France Insoumise (NUPES)
PCF & ultramarins (NUPES) PS et divers gauche (NUPES) EELV (NUPES)
Radicaux, centristes, régionalistes... LREM et proches (Majorité gouv.)
MoDem et indépendants (Majorité gouv.) Horizons (Majorité gouv.) LR et UDI
RN et patriotes
Non-Inscrits (divers gauche à droite sans groupe)
La séance est ouverte.
La séance est ouverte à neuf heures.
La parole est à M. Philippe Juvin, pour exposer sa question, n° 392, relative à l'insertion professionnelle des jeunes.
Lorsqu'on demande aux chefs d'entreprise quel est leur principal problème, ils répondent tous qu'ils ne parviennent pas à embaucher, ce qui est proprement invraisemblable et extravagant quand on sait que notre pays compte 5 millions de chômeurs.
L'une des raisons expliquant ce phénomène est probablement l'inadéquation de notre système de formation avec les besoins réels du pays. Pour y remédier, le groupe Les Républicains souhaite formuler trois propositions, sur lesquelles il aimerait connaître votre avis, madame la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Nous proposons pour commencer la fermeture des filières qui conduisent à une impasse. Les sciences sociales sont à cet égard intéressantes en ce qu'elles concentrent 30 % des étudiants en master 2, mais seulement 2 % des postes de chercheur en entreprise. En effet, les chercheurs dont nous avons besoin ne sont pas des chercheurs en sciences sociales, mais en physique, en chimie, en médecine, ou en informatique. Fermez donc des filières dans ce premier domaine et ouvrez-en dans les autres.
Notre deuxième proposition a trait aux diplômes. En France, créer un diplôme demeure en effet une entreprise compliquée, nécessitant des mois, voire des années lorsque le diplôme est complexe ; et le temps qu'il voie le jour, le monde a changé, tout comme les besoins. Ainsi faudrait-il que nous parvenions ensemble à raccourcir les délais de création des diplômes, en accélérant leur validation, en ouvrant la possibilité de les valider a posteriori pour gagner du temps – même si des dispositifs sont actuellement en vigueur dans ce domaine –, voire en donnant aux entreprises la liberté de créer leurs propres diplômes. Notre appareil de formation doit s'adapter aussi vite qu'évoluent les besoins du monde.
Enfin, troisième aspect, ayez une vision des vrais besoins du pays. Je sais que vous y travaillez, mais j'aimerais que nous fassions le point sur cette question, car mon impression est que nous avançons dans le noir, comme des somnambules.
Je rappelle que les entreprises doivent se doter de ce qu'on appelle une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC). L'expression est un peu barbare, mais elle signifie que les entreprises s'efforcent de se projeter en identifiant leurs besoins à un an, cinq ans, dix ans. La nation doit faire la même chose et se demander de combien de chauffeurs de bus, de couvreurs, de physiciens, de chimistes, de chercheurs dans le domaine nucléaire elle aura besoin dans cinq ans et dans dix ans. C'est à cette condition que nous cesserons d'avancer à tâtons et que nous pourrons adapter notre système universitaire et nos écoles aux besoins réels du pays.
J'insiste, il est absolument fondamental d'améliorer l'adaptation de notre système de formation au monde qui change : à défaut, nous continuerons d'avoir des millions de chômeurs d'un côté, et des millions de chefs d'entreprise incapables de recruter de l'autre. Et quand je parle de chefs d'entreprise, j'inclus dans cette dénomination les directeurs d'hôpital, les maires, les patrons de collectivité locale qui cherchent à recruter des profils qui n'existent actuellement pas sur le marché du travail.
Je le répète une nouvelle fois : l'adéquation entre la formation et les besoins réels du monde constitue une condition absolument fondamentale de la prospérité du pays.
La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.
J'entends votre constat et les différents points que vous avez évoqués. Sachez que nous travaillons sur l'offre de formation, ainsi que sur son évolution.
Je tiens d'abord à vous signaler que les taux d'insertion des diplômés de niveau bac + 5 sur le marché du travail sont plutôt bons, de l'ordre de 90 %, notamment chez les titulaires d'un master d'ingénieur. Nous suivons néanmoins les taux d'échec, en particulier lors du premier cycle, niveau où une régulation doit avoir lieu.
Face aux défis posés par les transitions numérique – dont vous avez parlé –, écologique et énergétique, le Gouvernement renforce son action, en lien avec les branches professionnelles et l'ensemble de l'écosystème de formation, afin de faire évoluer le plus rapidement possible l'offre de formation dans le supérieur.
Pour renforcer notre action dans les domaines de l'information et de l'orientation, nous avons ainsi créé la plateforme InserJeunes et le dispositif InserSup, auxquels participent plusieurs ministères, dont le ministère du travail, du plein emploi et de l'insertion. D'ores et déjà liés à Parcoursup, ces outils fourniront une information très précise sur les taux d'insertion sur le marché du travail, information qui permettra aux jeunes de faire leur choix d'études et qui nous aidera à faire évoluer les filières de formation.
Pour former les nouveaux talents aux métiers d'avenir, en tension ou en évolution, l'État a également investi 2,5 milliards d'euros dans le cadre du plan France 2030. L'appel à manifestation d'intérêt « Compétences et métiers d'avenir » permettra de renforcer l'attractivité des formations relatives à ces filières, de les développer ou d'en créer de nouvelles, de les professionnaliser, et de développer de nouvelles compétences.
Enfin, mon ministère a passé des contrats d'objectifs, de moyens et de performance avec tous les établissements, contrats grâce auxquels nous ferons ce que vous appelez la GPEC de la nation. Nous lions ainsi l'évolution de l'offre de formation aux besoins du monde socio-économique, en créant de nouvelles filières et en adaptant les maquettes. Il est possible d'aller vite et, je le répète, nous travaillerons avec les établissements pour améliorer l'agilité de l'offre de formation et l'adapter aux besoins. Le processus est en cours et je reviendrai vers vous dès que possible.
Il y a vingt ans, l'arrivée de la série américaine Urgences sur nos écrans a entraîné un pic d'inscriptions en études de médecine. L'un des enjeux est donc l'information des jeunes, leur motivation et leur admiration de beaux métiers. Dans ce domaine également, vous avez un rôle à jouer, en montrant aux jeunes toute la beauté de certains métiers trop ignorés. En effet, de nombreuses professions sont malheureusement méconnues des étudiants si elles ne sont pas exercées par un membre de leur famille. J'insiste, il s'agit selon moi d'un aspect très important dont vous pourriez vous saisir.
La parole est à M. Éric Woerth, pour exposer sa question, n° 375, relative aux infirmiers inscrits à Pôle emploi.
Ma question, à laquelle Philippe Juvin pourrait d'ailleurs peut-être répondre, est assez précise. J'ai constaté que 1 608 demandeurs d'emploi exerçant le métier d'infirmier sont inscrits à Pôle emploi dans ma région des Hauts-de-France alors que, dans le même temps, 3 080 postes sont à pourvoir pour cette même profession. Il existe donc un décalage assez net montrant que le lien entre la demande et l'offre d'emploi ne fonctionne pas.
Je précise que la situation est la même à l'échelle nationale. En effet, 21 480 infirmiers sont inscrits à Pôle emploi dans toute la France, alors qu'on dénombre 44 970 projets de recrutement pour ce métier. Je souhaiterais donc savoir comment vous expliquez ce mystère.
Il existe bien sûr des pistes de réflexion. Certains infirmiers inscrits à Pôle emploi n'ont probablement plus envie d'exercer ce métier. La crise sanitaire est passée par là et certaines personnes sont certainement éreintées d'avoir accompli ce travail difficile, sachant que celui-ci n'est peut-être pas assez attractif en matière de rémunération ou de conditions de travail.
J'ai interrogé Pôle emploi, qui accomplit sa mission et s'efforce de recenser les demandes et les offres d'emploi pour ce métier si important et terriblement nécessaire. Nos concitoyens ont des besoins considérables dans le domaine de la santé, et je n'évoque même pas la problématique des médecins. Je répète donc ma question : comment expliquez-vous ce décalage entre le nombre d'infirmiers au chômage et nos difficultés à en recruter ?
La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.
François Braun, ministre des solidarités et de la santé, regrette de ne pouvoir être présent ce matin et m'a demandé de vous fournir les éléments de réponse suivants.
Comme vous, le Gouvernement souhaite que toutes les chances soient saisies pour que les postes disponibles dans les établissements sanitaires mais aussi médico-sociaux soient pourvus. À la fin avril 2023, 1 594 infirmiers étaient effectivement inscrits à Pôle emploi dans les Hauts-de-France, toutes catégories confondues.
Ce chiffre, en baisse de 14 % sur un an, se décompose de la manière suivante. D'abord, 779 de ces infirmiers inscrits à Pôle emploi ont exercé une activité, de courte ou de longue durée, au cours du mois de mars. Ces personnes correspondent aux demandeurs d'emploi des catégories B, C et E : il s'agit d'infirmiers salariés ou libéraux exerçant à temps partiel ou effectuant des remplacements. Ensuite, 255 infirmiers étaient en formation ou en arrêt maladie. Enfin, 560 de ces personnes étaient immédiatement disponibles, n'ayant exercé aucune activité professionnelle en mars : ce sont les demandeurs d'emploi de la catégorie A.
Ces 560 infirmiers qui étaient en avril immédiatement disponibles représentent 1 % de l'ensemble des infirmiers diplômés exerçant dans la région des Hauts-de-France. L'enjeu qui se présente à nous est de renforcer l'attractivité des postes afin que ces personnes, quel que soit leur degré d'avancement dans leur carrière, rejoignent le métier.
Au niveau local, depuis 2020, l'ARS – Agence régionale de santé – et Pôle emploi entretiennent une collaboration étroite et mènent des actions concrètes, en organisant des webinaires thématiques et des rencontres entre employeurs et demandeurs d'emploi, et en élaborant des revues avec les Ifsi – instituts de formation en soins infirmiers.
Au niveau national, un plan d'attractivité et de fidélisation a été spécifiquement conçu pour les personnels infirmiers. À cet égard, François Braun a annoncé, le 26 mai dernier, le lancement de travaux pour la refondation et la transformation globale du métier d'infirmier autour de trois axes : les compétences, la formation et les carrières. Ces travaux doivent aboutir pour la rentrée de septembre 2024.
Vous constatez donc que le Gouvernement se mobilise pour donner envie à un plus grand nombre d'infirmiers de rejoindre ce beau métier, et je puis vous assurer que l'enseignement supérieur est associé à cette démarche, afin que les formations débouchent toutes sur un emploi.
Je prends bonne note de ces réponses qui, je n'en doute pas, sont pertinentes. Cela étant, 1 % de travailleurs au chômage, ce n'est pas rien lorsqu'il s'agit d'un métier en tension – même si je sais que des questions de mobilité se posent également : les postes vacants ne se situent pas nécessairement là où résident les infirmiers qui en recherchent un. Il convient de s'employer à réduire au maximum le nombre de demandeurs d'emploi dans les métiers en tension, ce qui vaut aussi pour les travailleurs à temps partiel. En effet, exercer plusieurs temps partiels peut être utile et nombre d'établissements ne recrutent pas que des temps pleins.
Je ne dis pas que le Gouvernement n'agit pas, mais l'ensemble des acteurs doivent être mobilisés, depuis Pôle emploi jusqu'aux établissements de formation. Il faut parler avec les demandeurs d'emploi, les convoquer, les rencontrer, pour essayer de mieux comprendre la situation et de réduire la tension insupportable qui existe actuellement sur le système de soins.
La parole est à Mme Laure Miller, pour exposer sa question, n° 377, relative au centre hospitalier de Fismes.
Depuis plus de deux ans désormais, le centre hospitalier de Fismes et le centre hospitalier universitaire (CHU) de Reims se sont engagés dans un rapprochement bénéfique qui a permis la mise en place d'une direction commune, puis d'une fédération médicale interhospitalière entre le pôle sanitaire fismois et le pôle autonomie santé du CHU, conduisant à la nomination en octobre dernier de M. le professeur Jean-Luc Novella à la chefferie des services de soins de suite et de réadaptation (SSR) polyvalents et de l'unité de soins de longue durée (USLD) du centre hospitalier de Fismes. Grâce à ces rapprochements, qui ont abouti à une nouvelle gouvernance administrative et médicale, le centre hospitalier a pu bénéficier, dès novembre 2022, de l'affectation à 20 % d'un assistant spécialiste à temps partagé, confortant les liens entre le pôle sanitaire fismois et les services de gériatrie du CHU.
Pourtant, l'hôpital de Fismes se trouve aujourd'hui dans une situation difficile au regard des effectifs médicaux affectés à son pôle sanitaire : un de ses praticiens à temps plein est parti inopinément en mai dernier, pendant une période propice aux absences pour congés, contribuant ainsi à l'affaiblissement du centre hospitalier, alors que, au même moment, ce dernier recevait la visite de certification de la Haute Autorité de santé. L'établissement fismois se trouve donc à nouveau fragilisé, alors même qu'il vit une période charnière de son histoire en raison de la perspective, encore incertaine, du renouvellement de ses autorisations de soins en SSR polyvalents et en USLD au cours de l'année 2023. La direction a malheureusement dû procéder à une réduction des capacités d'accueil des services du pôle sanitaire fismois.
Je me permets donc de vous alerter sur la situation de cet hôpital et de solliciter les services du ministère de la santé et de la prévention pour l'aider à renforcer ses effectifs médicaux et favoriser la gestion commune des équipes par les deux établissements. L'enjeu est de permettre au centre hospitalier de Fismes de bénéficier de la force d'attractivité du CHU de Reims.
La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Votre question met en lumière la difficulté pour les établissements de santé, dans des communes de taille moyenne, de poursuivre leurs activités de soin dans un contexte de tension généralisée, en particulier sur nos ressources soignantes. Le plan d'action de l'ARS – agence régionale de santé –, en appui du centre hospitalier de Fismes, a débuté dès octobre 2022 afin de permettre à l'établissement de maintenir la continuité de ses actions de soin. L'établissement mène depuis lors un travail avec M. le professeur Novella, alors gériatre au CHU de Reims, désormais chef de service de l'USLD du centre hospitalier de Fismes, en lien avec la direction des affaires médicales du CHU de Reims.
Les actions en cours afin de renforcer les effectifs mais aussi de veiller à une meilleure organisation territoriale de l'offre disponible sont les suivantes : élaboration d'une convention cadre avec le Samu de la Marne afin de couvrir l'ensemble du système de régulation entre la ville et l'hôpital, tout en renforçant les échanges avec les médecins libéraux pour une participation à la permanence des soins ; projet de maison de santé pluridisciplinaire à Fismes, qui devrait permettre – s'il aboutit – le renforcement de la composante libérale dans l'organisation de la permanence des soins ; offre de renfort proposée par un praticien d'un autre établissement de la Marne pour assurer la poursuite de l'ensemble des activités de l'établissement.
Dans ce contexte tendu, l'ARS Grand Est met tout en œuvre pour faciliter, avec le soutien des partenaires hospitaliers de la Marne, la réouverture totale ou partielle des dix lits de SSR, fermés depuis le 2 mai. Le sujet de la reprise des admissions en USLD sera abordé prochainement avec le chef de service.
La parole est à Mme Yaël Menache, pour exposer sa question, n° 382, relative à la maternité de Péronne.
Le rapport adopté par l'Académie de médecine lors de sa séance du 28 février 2023 préconise le regroupement des maternités de type 1, effectuant moins de 1 000 accouchements annuels, avec les maternités de types 2 et 3 les plus proches. La ville de Péronne, commune de 7 300 habitants, située dans la cinquième circonscription de la Somme, fait partie de ces 111 communes qui risquent de voir leurs maternités fermer définitivement, renvoyant ainsi les futures mamans dans des établissements situés à plus d'une heure de leur lieu de vie. Nous luttons contre la désertification médicale du département de la Somme : une telle décision ne ferait qu'accroître le drame à la fois sanitaire et social. Comment voulez-vous inciter les médecins à s'installer en zone rurale si vous continuez de dégrader à ce point notre service public ?
La maternité de Péronne vient d'être fermée pour un mois, faute d'anesthésiste. Le problème de recrutement que connaît l'ensemble de la nation aurait pu, et aurait dû, être anticipé par une revalorisation des salaires et par la réouverture de lits, comme le propose depuis longtemps Marine Le Pen. Ce qui est vrai pour la maternité de Péronne l'est aussi pour l'hôpital de proximité de cette même commune, dont les différents services – blocs opératoires, urgences ou service de réanimation – sont en danger. Si le Gouvernement venait à valider la préconisation de l'Académie de médecine, non seulement cette maternité serait fermée, mais cela mettrait aussi en péril l'hôpital de proximité. Ce serait condamner ce type de commune au désert médical ad vitam æternam.
Je rappelle que 40 % des maternités de proximité ont été fermées ces vingt dernières années. Comment comptez-vous éviter l'engorgement des établissements qui recevront ces nouvelles patientes, alors que les services sont déjà totalement saturés ? En fermant 111 maternités supplémentaires, vous promettez l'abandon et l'isolement à nos territoires ruraux, vous obligez les familles à une mobilité insensée et vous découragez les médecins et les spécialistes à s'installer dans nos campagnes. Vous menez une politique où le plan l'emporte sur le besoin, où la rentabilité conditionne le soin et où la bureaucratie fait autorité face à la réalité du terrain. Vous contribuez ainsi à creuser les inégalités d'accès de tous les Français à des services publics toujours plus centralisés et déshumanisés.
Allez-vous suivre les recommandations de l'Académie de médecine qui propose de fermer plus d'une centaine de maternités, dont celle de Péronne dans ma circonscription ? N'est-il pas plus urgent de traiter le problème de la désertification médicale et d'y apporter des solutions comme le recrutement massif et la revalorisation salariale du secteur de la santé publique ?
La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Vous appelez l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur les préconisations formulées par l'Académie de médecine dans son rapport relatif à la planification d'une politique en matière de périnatalité en France. Je précise que ce document, produit par une structure indépendante, constitue un avis qui n'engage pas le Gouvernement. Il n'y a bien évidemment aucun objectif de fermeture d'établissements de santé ni de politique volontariste de fermeture de services de maternité. Nous devons toutefois faire preuve de vigilance quant aux conditions de fonctionnement des maternités, en raison du contexte difficile que nous rencontrons sur le plan de la démographie des professions de santé. Notre priorité reste de garantir la sécurité et la qualité de la prise en charge des femmes enceintes et des soins prodigués à leurs nouveau-nés. Pour cela il convient de s'assurer de disposer à tout moment de l'environnement humain et technique prévu par la réglementation.
À Péronne, malgré tous les efforts déployés jusqu'au dernier moment par la direction et la communauté médicale de l'établissement, il n'a pas été possible de consolider le planning d'anesthésie du mois de juin. Il n'y avait donc pas d'autre choix que de suspendre l'activité d'obstétrique pendant cette période. Toutes les futures mamans devant accoucher en juin ou pour lesquelles il existe un risque d'accouchement prématuré ont été informées et accompagnées par l'équipe de la maternité. Je précise par ailleurs que l'ensemble des consultations de suivi en pré et post-partum sont maintenues au sein de l'établissement.
Les difficultés rencontrées par cette maternité pour assurer la continuité de son activité ne sont pas nouvelles puisque deux épisodes de fermeture sont déjà intervenus, le plus récent remontant à l'hiver dernier. L'établissement se mobilise avec l'appui de l'ARS – agence régionale de santé – pour consolider l'équipe et fera à nouveau tout ce qui est possible pour organiser une reprise de l'activité, dès que les conditions de sécurité seront réunies.
Vous avez rappelé que ce n'est pas la première fois que la maternité a dû être fermée. Ne serait-il donc pas plus judicieux de prendre le problème à sa racine ? L'établissement a désormais recours à des médecins – anesthésiste, pédiatre ou gynécologue – pour des périodes de 24 heures, au lieu de 72 heures auparavant. Nous disposions donc du personnel nécessaire, mais des spécialistes qui habitent loin de Péronne, à Toulouse, Perpignan ou Marseille, ne prennent pas la route pour travailler durant 24 heures. Voilà le problème ! Il serait donc souhaitable que la directrice de l'établissement modifie le temps de garde des médecins remplaçants.
La parole est à Mme Maud Petit, pour exposer sa question, n° 361, relative au déploiement du dispositif Osys.
Dans un contexte de crise de l'hôpital public, ma question porte sur la généralisation de l'expérimentation Orientation dans le système de soins (Osys). Lancé en Bretagne en 2021, le dispositif est le fruit d'une collaboration entre l'union régionale des professionnels de santé (URPS) Médecins libéraux de Bretagne, regroupant médecins et pharmaciens de Bretagne, et l'association Pharma Système Qualité, avec le soutien de l'agence régionale de santé (ARS) Bretagne.
L'expérimentation poursuit plusieurs objectifs : développer un parcours de prise en charge innovant permettant aux pharmaciens d'officine d'apporter un conseil pharmaceutique encadré ; faciliter l'accès des patients aux soins de premier recours non programmés ; contribuer à limiter les consultations inappropriées dans les services d'urgence et l'engorgement des cabinets médicaux et maisons médicales de garde.
Concrètement, cinquante officines sont maintenant concernées. Le conseil du pharmacien d'officine expérimentateur est formalisé par des arbres décisionnels, avec une liste de situations lui permettant d'orienter le patient vers une consultation médicale ou une prise en charge aux urgences. Le pointage du ministère de la santé et de la prévention évalue à près de 99 % la proportion de patients satisfaits par le dispositif.
Ce dispositif innovant illustre parfaitement la volonté de construire une meilleure coordination entre la ville et l'hôpital. Il se trouve donc au cœur de la stratégie nationale de la santé d'aujourd'hui et de demain. Dans ma circonscription du Val-de-Marne, bon nombre de professionnels sont enthousiastes à l'idée de l'intégrer. Est-il envisagé de généraliser l'expérimentation ou de la dupliquer selon les demandes ?
La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.
L'article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale pour l'année 2018 a effectivement instauré un cadre d'expérimentation permettant d'être à l'écoute des initiatives de terrain et de construire un cadre de déploiement des projets, qui font l'objet d'un accompagnement attentif par le ministère de la santé et de la prévention, et d'une évaluation indépendante. C'est dans ce cadre que l'expérimentation Osys a été autorisée en 2021 pour tester une réponse adaptée à la population, en renforçant le rôle de premier recours des pharmaciens d'officine pour treize situations pathologiques, avec l'appui de l'URPS Médecins libéraux de Bretagne. Je veux d'ailleurs saluer l'engagement de ces professionnels autour de la mise en place de ce projet innovant.
Après les premiers résultats d'évaluation intermédiaire montrant des résultats très encourageants, le cahier des charges de cette expérimentation est en cours de révision et devrait être publié à l'été. Bientôt, soixante-quatorze officines expérimenteront en Bretagne cette nouvelle modalité d'organisation. Le projet ayant suscité un intérêt marqué, une extension à trois nouvelles régions – l'appel à candidatures est en cours – permettra de tester la réplicabilité du dispositif. Enfin, comme toute expérimentation, le projet Osys fera l'objet d'une évaluation, qui servira de base aux études des modalités de généralisation. La phase expérimentale devrait s'achever en 2024.
La parole est à M. Andy Kerbrat, pour exposer sa question, n° 396, relative à la situation des services publics de santé.
En mars 2020, en pleine crise sanitaire, le Président de la République avait promis un refinancement massif de l'hôpital et la rénovation des infrastructures de santé publique grâce à un plan historiquement ambitieux. Promis juré, le Gouvernement allait se pencher sur la crise des vocations à l'hôpital public. On allait reconstruire l'hôpital !
L'hôpital est et demeure sinistré et ce gouvernement et ses prédécesseurs en sont responsables. La maltraitance s'est institutionnalisée : en 2022, on a compté au CHU – centre hospitalier universitaire – de Nantes plus de 310 000 heures supplémentaires travaillées et 280 000 jours d'arrêt de travail pour les soignants, soit plus d'un mois d'arrêt de travail par agent.
Le CHU de Nantes va être détruit pour être relocalisé sur un nouveau site inondable – il s'agit d'une île – et sous-dimensionné : 400 postes et 231 lits y seront supprimés, malgré les 16 000 habitants qui s'installent en Loire-Atlantique chaque année. Voilà un exemple parmi d'autres de la gestion absurde de nos hôpitaux et des fonds publics. La chambre régionale des comptes des Pays de la Loire alerte sur un dérapage des coûts : au lieu des 900 millions initialement prévus, nous atteignons le 1,3 milliard, mais l'État n'a pas prévu de modifier sa participation, laissant le CHU de Nantes s'endetter alors que les lits d'urgence ferment partout en Loire-Atlantique, comme à Ancenis. Nous allons perdre 231 lits alors que nous en avons déjà perdu plus de 400 entre 2007 et 2021. Au lieu de réellement investir pour organiser plusieurs pôles d'urgence sur notre territoire, nous prenons donc le risque de renvoyer les patientes et les patients vers les cliniques privées.
Parmi tous les personnels hospitaliers touchés, ce sont ceux de la psychiatrie qui paient le plus cher la casse de notre service public de santé. En Loire-Atlantique, l'intersyndicale alerte sur la suppression d'une cinquantaine de lits, soit 48 % des capacités d'admission du territoire, alors que les besoins augmentent. Manque de suivi, augmentation du temps d'attente, maltraitance institutionnelle, pratiques d'un autre temps, insultes et agressions envers le personnel : le secteur psychiatrique est sans doute dans l'état le plus cauchemardesque. La suppression du métier d'infirmier psychiatrique et la crise des vocations aggravent encore la situation.
Après avoir échoué à reconstruire l'hôpital public, échouerez-vous également face au défi de la prise en charge de la santé mentale ? Annulerez-vous le projet de transfert du CHU de Nantes avant que son coût dérape ? Sortirez-vous enfin le carnet de chèques pour investir en faveur des soignants plutôt que dans le béton ?
À question directe, réponse directe : non, nous n'échouerons pas. C'est vrai, les établissements de la région Pays de la Loire ont été affectés par les difficultés de recrutement des psychiatres. Afin de satisfaire les besoins à court terme, il existe, et c'est nouveau, une vraie solidarité entre les établissements de psychiatrie aux échelons départemental et régional. Ainsi, l'ARS – agence régionale de santé – a demandé la création d'une cellule régionale d'ordonnancement des lits de psychiatrie adulte. Par ailleurs, les équipes de soins psychiatriques de particulière intensité à domicile offrent désormais une réponse alternative, permettant d'éviter une hospitalisation à temps complet.
Ainsi, et c'est vraisemblablement la solution, de nouvelles pratiques apparaissent. Les infirmiers de pratique avancée (IPA) spécialisés en psychiatrie et santé mentale, notamment, améliorent l'accès aux soins et la qualité du parcours des patients et réduisent ainsi la charge de travail des médecins, qui peuvent se concentrer sur des pathologies ciblées. En Pays de la Loire, les universités de Nantes et Angers forment ainsi des professionnels de santé expérimentés pour ces nouvelles pratiques – c'est ainsi que nous progresserons. Les protocoles de coopération et le recrutement d'assistants médicaux permettent en outre de libérer du temps médical pour prendre en charge un plus grand nombre de patients. L'ARS accompagne par ailleurs le déploiement de nouveaux outils de téléconsultation et travaille au renforcement des centres médico-psychologiques. Enfin, des actions sont menées avec les partenaires des secteurs médico-social et social, notamment les collectivités territoriales, pour que les patients qui n'ont plus besoin de soins à l'hôpital mais y sont maintenus faute de solution d'accueil extérieure bénéficient de vraies modalités d'hébergement ou de lieux de vie adaptés.
Ainsi, le travail se poursuit, notamment dans le cadre des assises de la santé mentale et de la psychiatrie, installées par le Président de la République en septembre 2021, qui font régulièrement l'objet de comités stratégiques de suivi avec le ministre de la santé et de la prévention. C'est par l'innovation que nous réussirons.
C'est le problème quand le ministre concerné n'est pas là : vous ne répondez pas à ma question qui portait tant sur la psychiatrie en Loire-Atlantique que sur les fermetures de lits et de places d'accueil en général, problème qui ne pourra être résolu facilement.
Dans ce département, des enfants sont accueillis dans des unités de psychiatrie adulte à cause de la crise de l'hôpital public. Les aidants – des membres de la famille des enfants handicapés, leurs parents notamment – soulignent : ce n'est pas des « 50 000 nouvelles solutions médico-sociales » que propose le Président de la République qu'ils ont besoin, mais de places en psychiatrie.
Je réitère mon alerte : avec le nouveau CHU, vous investissez dans le béton, pour un site sous-dimensionné, alors que nous ne pouvons pas prendre le risque d'abandonner les soins psychiatriques. Votre réponse tombe à côté.
La parole est à Mme Isabelle Valentin, pour exposer sa question, n° 371, relative aux investissements liés au vieillissement.
Monsieur le ministre délégué, je vous alerte sur les conséquences du manque de réactivité et de pragmatisme des agences régionales de santé (ARS). Les plus de 60 ans représentent 26 % des Français – c'est plus d'un sur quatre ; en 2040, ce sera près d'un sur trois. Ce choc démographique sans précédent, qui s'accentuera dans les deux décennies à venir, complique l'équation économique et sociale.
Dans mon département, la Haute-Loire, la part des personnes de plus de 75 ans doublera, passant de 11 % en 2028 à 22 % en 2070. Le nombre de patients catégorisés GIR – groupe iso-ressources – 1 et 2 explosera. Comment gérerons-nous cette transformation démographique ? Quels moyens humains et matériels, quels hébergements, quels financements sont prévus pour faire face au vieillissement de la population ?
Au vu de ce phénomène, le court-termisme des ARS en matière d'investissement est inquiétant, tant ses conséquences sont nombreuses. Citons trois exemples tirés de ma circonscription.
À Beaux-Malataverne, le projet de construction d'un Ehpad de demain a été retoqué par l'ARS, au motif qu'il ne satisfaisait pas les critères imposés par celle-ci. Pourtant, ce projet comblait de nombreuses attentes et correspondait en tout point aux objectifs définis dans la mission flash « l'Ehpad de demain : quels modèles ? », présentée en commission des affaires sociales le 2 mars 2022. Il prévoyait des chambres fonctionnelles de 30 mètres carrés, un grand lieu de vie dans lequel les soins pouvaient être réalisés, ainsi qu'un coin nuit et un coin jour séparés.
À Coubon, un projet d'Ehpad situé au cœur de la commune et offrant des prestations de grande qualité a été refusé par l'ARS pour les mêmes raisons.
Troisième exemple : à Saint-Maurice-de-Lignon, un nouvel Ehpad de dernière génération est en construction. Afin de pallier le manque croissant de places en Ehpad, la commune et les professionnels de santé du secteur demandent la création de quatorze lits supplémentaires, qui permettraient de réduire la facture des futurs résidents de 4 euros par jour. Si l'ARS a donné son accord, elle refuse pour des raisons purement financières de prendre en charge le coût de ces chambres supplémentaires et propose de repousser leur construction à une date ultérieure.
La situation est ubuesque : en janvier, la construction de ces places supplémentaires coûtait 500 000 euros ; cinq mois plus tard – aujourd'hui –, en raison de l'inflation, elle coûte 635 000 euros, soit 137 000 euros de plus. Comment pouvons-nous gérer la France d'une façon si peu visionnaire ? Qui peut se le permettre ?
Quelle est votre stratégie d'investissement dans l'ensemble des territoires, à court, moyen et long terme, face au vieillissement croissant de la population ? J'ai bien compris que le Président de la République demandait à tous les ministères de réaliser 5 % d'économies, afin de réduire la dépense publique. Toutefois, lors d'une audition en commission des affaires sociales, M. Philippe Martin a signifié qu'il n'était pas judicieux de freiner l'investissement, car cela aurait un effet inverse sur l'inflation. Êtes-vous d'accord avec ces propos ?
Sachez que les projets que vous évoquez relèvent du champ des plans pluriannuels d'investissement des conseils départementaux, c'est-à-dire d'une compétence locale, même si je sais bien que lorsque les choses vont mal, on tend à se tourner vers l'État. L'ARS n'intervient que sur les projets les plus stratégiques, grâce à une subvention dans le cadre du plan d'aide à l'investissement (PAI), afin de limiter l'impact financier pour l'usager – les Ehpad de Haute-Loire ont ainsi bénéficié de plus de 5,7 millions d'euros depuis 2019.
S'agissant plus spécifiquement de l'Ehpad de Saint-Maurice-de-Lignon, le projet de reconstruction a été fortement soutenu par l'ARS, au moyen d'une subvention de 2,9 millions d'euros, soit 30 % du montant global. Le dossier a été validé sans extension de capacité d'établissement, non pour des raisons financières, mais au vu des besoins départementaux actuels et à venir.
Selon les projections, le département dispose en effet d'un taux d'équipement favorable. En outre, des travaux sont en cours afin de répartir au mieux l'offre au sein de ce territoire – je pense notamment aux deux projets de reconstruction que vous citez et qui correspondent à votre vision de ces établissements. Contrairement à ce que vous indiquez – nous n'avons pas les mêmes informations –, le projet d'Ehpad de Beaux-Malataverne n'a pas été rejeté. Il a été retiré par le promoteur en mars dernier, au vu de l'inflation, de l'instabilité des coûts et d'un besoin de réflexion sur la situation globale de la structure.
Quant au projet d'Ehpad à Coubon, il est actuellement à l'étude. Eu égard aux éléments reçus, le projet paraît soutenable et répond aux attendus d'évolution. Une réponse est prévue, comme pour tous les projets de la région, d'ici à novembre.
La parole est à M. Paul-André Colombani, pour exposer sa question, n° 393, relative à la maternité de Porto-Vecchio.
S'il est un sujet qui fait l'unanimité dans ma région, c'est le maintien de la maternité de Porto-Vecchio. Élus locaux, professionnels de santé et habitants de la région sont vent debout contre la fermeture d'un service public qu'ils jugent indispensable. Il semblerait que cette union sacrée ait porté ses fruits et que la fermeture de cet établissement ne soit plus d'actualité. Heureusement, car la situation de l'extrême sud de la Corse est tout à fait singulière. En effet, au niveau national, on considère qu'un éloignement des femmes enceintes de plus de quarante-cinq minutes de la salle d'accouchement représente un danger. Or, en l'occurrence, sans la maternité de Porto-Vecchio, ce temps aurait été porté à deux heures trente minimum, soit le triple du seuil national, conduisant immanquablement à des drames humains.
De plus, le contexte régional se tend. La fermeture de la maternité de la clinique Maymard à Bastia déstabilise profondément l'offre de soins et met sous tension toute la gynécologie en Corse. Cela entraînera mécaniquement un surcroît d'activité pour la maternité de Porto-Vecchio, rendant nécessaire d'y prévoir une prise en charge complète.
Le rôle clef que remplit la polyclinique de Porto-Vecchio dans l'offre de soins régionale est d'ailleurs reconnu par le Gouvernement, qui l'a rendue éligible à un financement complémentaire. Pourtant, la pérennité de cet établissement n'est pas assurée et le financement des deux missions de service public qu'il assure grâce au service de maternité et à celui des urgences met en péril son activité globale. Les besoins sont estimés à 1,5 million d'euros pour le premier, à 2 millions d'euros pour le second.
Si cette clinique a, par le passé, fonctionné selon un modèle économique opaque, les repreneurs ont choisi d'y substituer une gestion plus saine et transparente, reposant sur la création d'un comité de surveillance et d'une comptabilité analytique permettant la traçabilité financière. Ils ont toute ma confiance. Entendez-vous reconsidérer le montant du financement attribué à cette clinique, afin de garantir le maintien d'une offre de service public à la hauteur des besoins de la population ?
L'ARS – agence régionale de santé – s'est engagée auprès de l'établissement que vous évoquez dans un avenant au contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens pour les années 2019 à 2024, alors que cette clinique, comme vous l'avez indiqué, rencontre de très grandes difficultés financières, induites notamment par l'activité de maternité, fortement déficitaire.
Pour l'année 2022, le montant de l'accompagnement pris en charge par l'ARS a atteint un total de 1 610 000 euros. En 2021, à l'occasion de l'élaboration du contrat territorial de santé pour l'extrême sud corse, l'agence a mandaté des experts médicaux en matière de soins urgents et de périnatalité – les travaux sur celle-ci ont avancé, en concertation avec les professionnels de santé et les élus.
Ainsi, nous étudions la perspective d'une évolution de la maternité de Porto-Vecchio vers un centre périnatal de proximité (CPP), dont la capacité à prendre en charge des accouchements inopinés serait garantie grâce aux urgences – même si ce n'est pas la seule mesure. Il importe en effet de travailler, vous l'avez souligné, sur les liens avec les centres hospitaliers d'Ajaccio et de Bastia pour sécuriser les parcours, grâce à des actions de coopération et de partage de dossiers. Par exemple, la maternité de Porto-Vecchio pourrait participer aux staffs pluridisciplinaires, ou accueillir des consultations avancées de praticiens hospitaliers.
Vous avez raison, il faut prendre en compte la distance avec les centres hospitaliers de référence d'Ajaccio et de Bastia : le CPP sera à deux heures trente de transport de l'un et de l'autre. Le travail sur cette structure inclura une réflexion sur la filière d'urgence et les transports, afin d'organiser la réponse à l'urgence obstétrique. Le chantier est en cours ; attendons la suite !
Cette réponse ne me satisfait pas du tout. Ma question est dans les tuyaux depuis deux ou trois semaines et nous attendons depuis plusieurs mois un arbitrage financier. Je connais parfaitement ce dossier, pour l'avoir suivi de très près. Votre absence de réponse concernant le financement met en danger la nouvelle équipe, qui n'a pas les reins solides.
Par ailleurs, lors du dernier débat, houleux, sur les retraites, la position du groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires a été critiquée par le Gouvernement et par certains députés, dont le président du groupe Horizons et apparentés, qui trouvait contradictoire que nous nous opposions au Gouvernement tout en lui demandant de l'aide. Que les choses soient claires : notre position sur les retraites ne doit pas vous conduire à freiner l'aboutissement de ce dossier, en refusant de répondre.
Aucun rapport ! Je vais saisir le préfet de Corse afin qu'il analyse précisément la question du financement de la maternité de Porto-Vecchio. Je vous enverrai copie du courrier que je lui adresse dès ce soir.
La parole est à M. Paul-André Colombani, suppléant Mme Béatrice Descamps, pour exposer sa question, n° 370, relative à l'allocation aux adultes handicapés.
Monsieur le ministre délégué, veuillez excuser Mme Descamps pour son absence ; je la remercie pour la confiance qu'elle me témoigne en me chargeant de vous adresser sa question.
De nombreux adultes en situation de handicap travaillent en milieu ordinaire, ce dont nous nous réjouissons. Leur rémunération est composée d'un salaire au prorata de leurs heures travaillées, complété par l'allocation aux adultes handicapés (AAH). Or le cumul des deux soulève un problème, car le montant du salaire net perçu par ces personnes est parfois équivalent à celui de l'AAH à taux plein, perçu en l'absence d'emploi, si bien qu'elles peuvent perdre des revenus en travaillant.
Mme Béatrice Descamps a ainsi été interpellée par la situation d'Axelle, qui perçoit un salaire net de 1 078,28 euros dont 329,65 euros d'AAH, en travaillant vingt heures par semaine dans une entreprise adaptée. Sachant que le montant maximum de l'AAH à taux plein est de 971,37 euros, le travail quotidien d'Axelle n'augmente son revenu que de 106,91 euros, somme vite absorbée par les trajets quotidiens en bus. Elle ne gagne donc rien à travailler. Quant à l'employeur, il verse un salaire pour quatre-vingts heures par mois, alors que la déficience d'Axelle ne lui permet d'être efficace que quarante heures par mois. S'y ajoutent les charges de l'Urssaf et l'aide au CDD tremplin pour les entreprises adaptées. Ce schéma est peu encourageant.
Comment encourager les employeurs et les employés concernés ? Comment faciliter le travail des personnes handicapées et reconnaître leur activité professionnelle à sa juste valeur ?
Pour répondre à la question de Mme Descamps, les personnes qui ont un taux d'incapacité compris entre 50 % et 79 %, et une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi, ont droit à l'allocation dite AAH2.
Vous avez raison, cette restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi n'est pas compatible avec une activité à mi-temps – dix-sept heures trente par semaine – ou plus en milieu ordinaire. Il s'agit d'inciter à la reprise d'une activité professionnelle. Cependant, une personne qui choisit de travailler au-delà d'un mi-temps ne bénéficie plus de l'AAH2 lorsqu'elle renouvelle ses droits, ce qui entraîne une baisse du niveau global de ses ressources, ce qui peut, nous en sommes tout à fait conscients, créer une désincitation à la reprise d'un emploi en milieu ordinaire, alors que c'est pourtant l'objectif pour les personnes handicapées.
Nous devons garder à l'esprit la dimension sociale, inclusive, du travail, le sens et la reconnaissance qu'il apporte, notamment pour une personne en situation de handicap. Ainsi, vous avez raison, il conviendrait d'inciter financièrement les bénéficiaires de l'AAH2 à travailler en milieu ordinaire, au-delà du seuil de dix-sept heures trente, seuil à partir duquel ils perdent l'AAH2. C'est pourquoi, lors de la dernière Conférence nationale du handicap, le 26 avril dernier – j'y ai assisté et peux en témoigner –, le Président de la République a annoncé une mesure qui facilitera la reprise d'activité en milieu ordinaire, au-delà d'un mi-temps. Les services sont au travail pour que cette mesure se concrétise.
La parole est à Mme Sophie Errante, pour exposer sa question, n° 376, relative aux places en institut médico-éducatif.
Bien que de nombreuses dispositions aient déjà été prises pour faciliter le parcours des personnes en situation de handicap – en atteste dernièrement la création du site Mon Parcours Handicap –, force est de constater qu'il reste encore beaucoup à faire, notamment en matière de prise en charge et d'accompagnement des enfants et des jeunes adultes.
Il ne se passe pas une semaine sans que nous ne recevions des familles démunies, sans solution d'accueil en institut médico-éducatif (IME) pour leurs enfants, malgré l'orientation en établissement de la commission des droits et de l'autonomie de personnes handicapées (CDAPH). Faute de places en IME, ces enfants aux besoins particuliers se retrouvent quelquefois pendant plusieurs années sur des listes d'attente. Cela met les enfants et leur famille dans une situation difficile, complexe à gérer ; cela met également en porte-à-faux les établissements, qui se trouvent dans la délicate position de refuser les enfants malgré une notification en bonne et due forme.
En avril 2021, ce constat a d'ailleurs fait l'objet d'un échange collectif avec Mme Sophie Cluzel, qui était alors secrétaire d'État chargée des personnes handicapées. Le manque de places en IME est, en partie, dû à la très forte tension sur l'offre médico-sociale, du fait d'un important dynamisme démographique. Mais il est également le résultat d'une chaîne de difficultés : faute de places en établissement spécialisé pour adultes, nombre de jeunes adultes en situation de handicap sont maintenus en IME. Ce maintien, qui ne devrait être que transitoire, perdure dans le temps, occupant de fait des places qui devraient être destinées aux enfants et adolescents. Les places n'étant pas créées au niveau national, en IME ou en structures pour adultes, il n'est pas possible de le faire au niveau départemental. Si rien n'est entrepris pour fluidifier la prise en charge et l'accompagnement, c'est tout le parcours de l'enfant en situation de handicap, et de l'adulte qu'il deviendra, qui se trouve bouleversé.
Mme la ministre déléguée chargée des personnes handicapées, Geneviève Darrieussecq, est venue il y a quelques semaines en Loire-Atlantique et nous a indiqué que notre département serait prioritaire en matière d'équiments. Où en sommes-nous ? Combien de places seront créées ? Trop de familles sont laissées pour compte en France, et dans notre territoire. J'en profite pour saluer le travail du collectif Handicap44, porte-voix des familles.
Je vous remercie des informations que vous pourrez apporter quant à la création de places en établissements à l'échelle nationale, et par territoire, afin de sécuriser et de simplifier le parcours des enfants et des jeunes adultes porteurs de handicap, ainsi que de leur famille, parcours qui est, bien trop souvent, celui du combattant. Il y a urgence !
Vous évoquez la question des plus jeunes et de leur scolarisation. Le Gouvernement travaille pour que l'école s'adapte à tous les élèves en situation de handicap, et non l'inverse. La place d'un élève est d'abord à l'école. Même s'il reste beaucoup à faire, il me semble que cela n'a jamais autant bougé dans le bon sens.
Dans les mois à venir, nous irons vers une transformation des établissements pour enfants, notamment des IME, en dispositifs et plateformes ouverts, et surtout plus fluides. Ces plateformes devront répondre aux différentes situations évoquées, dans une logique de solution plutôt que de gestion de places.
En outre, les 50 000 solutions nouvelles promises par le Président de la République à l'occasion de la Conférence nationale du handicap du 26 avril dernier répondront, je l'espère, à l'enjeu de l'appui à l'école, et aux besoins des personnes polyhandicapées, des enfants protégés par l'aide sociale à l'enfance, des personnes handicapées vieillissantes et des personnes autistes – c'est l'intérêt de la fluidité des dispositifs ; elles apporteront également des réponses à la situation des adultes maintenus en établissement pour enfants. Les jeunes adultes relevant de l'amendement Creton sont estimés à 10 000 – c'est considérable. Il faut donc s'appuyer sur une nouvelle méthode de programmation pluriannuelle de développement de solutions, afin d'améliorer la visibilité de long terme des agences régionales de santé (ARS), et leur permettre d'engager rapidement la discussion avec l'ensemble des départements.
Que signifient concrètement ces 50 000 solutions – c'est énorme ? Il s'agit de places en hébergement, lorsque cela est souhaité, ou de solutions d'accompagnement au plus proche des lieux de vie des personnes concernées. Notre ambition, le Président l'a rappelé lors de la dernière Conférence nationale du handicap, c'est l'exercice de tous les droits par tous les citoyens. Ma conviction, c'est que nous progressons, mais qu'il reste du chemin à parcourir.
J'aurais préféré une réponse plus détaillée. J'attends que la ministre déléguée réponde à ma question orale sans débat, peut-être par écrit, afin de m'apporter les précisions demandées. Nous avons besoin d'une feuille de route, de visibilité. Vous avez exposé la méthode de travail. Elle nous engage tous mais, je le répète, j'attends des réponses précises. Je vous remercie, malgré tout, d'avoir en partie répondu à ma question.
La parole est à M. Freddy Sertin, pour exposer sa question, n° 378, relative aux tests de tuberculose bovine.
Je souhaite appeler l'attention du ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur les mesures pour lutter contre les cas de tuberculose bovine sur notre territoire, en particulier les conséquences sur les cheptels lorsqu'un animal est testé positif. Depuis 2015, le département du Calvados est placé sous surveillance renforcée contre la tuberculose bovine, ce qui implique chaque année des dépistages de troupeaux, parfois sur un périmètre assez large, pouvant aller jusqu'à plus de 200 communes. Les animaux détectés positifs sont alors abattus et des tests de confirmation réalisés. S'ils s'avèrent également positifs, cela entraîne l'abattage du troupeau dans sa totalité.
C'est évidemment source d'une grande inquiétude chez les éleveurs, qui se retrouvent en situation de grande détresse. En mars dernier, deux élevages situés en Suisse normande ont été confirmés positifs à la tuberculose bovine. Ce fut un véritable coup de massue pour les éleveurs et le territoire, entraînant la perte par abattage de près de 400 bovins.
Les mesures d'abattage lors de la contamination d'un seul animal sont problématiques. J'ai eu l'occasion d'échanger avec bon nombre d'éleveurs, mais également des élus, inquiets face à cette situation. Le 5 avril dernier, le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire a annoncé le renforcement des mesures de prévention de la tuberculose bovine, ainsi qu'un meilleur accompagnement des éleveurs touchés. La principale mesure consiste en un nouveau test de détection de l'interféron gamma, à la suite d'évolutions réglementaires européennes. Quelles seront les modalités de déploiement de ces nouveaux tests et leurs conséquences sur les cheptels ?
Je vous prie de bien vouloir excuser Marc Fesneau, actuellement en déplacement en Suède pour une réunion des ministres de l'agriculture. Je lui transmettrai votre question en lui proposant de vous apporter, le cas échéant, un complément écrit.
Comme vous le soulignez, la hausse du nombre de foyers constatée dans plusieurs zones géographiques et sa persistance dans d'autres nécessitent un renforcement des mesures sanitaires. Des actions importantes sont mises en œuvre, notamment le lancement d'une expérimentation vaccinale sur la faune sauvage, qui peut devenir vecteur de la maladie pour les animaux d'élevage. Une première phase de test d'un protocole de vaccination a débuté en région Nouvelle-Aquitaine et pourra, le cas échéant, être étendue à l'ensemble des zones contaminées, pour limiter la propagation de la maladie.
En outre, les récentes évolutions réglementaires au niveau européen autorisent le recours au test de détection de l'interféron gamma, qui permet de réduire la durée de blocage des élevages suspectés d'infection et de limiter l'abattage d'animaux suspects, tout en maintenant une surveillance optimale des troupeaux.
En effet, la méthode de détection historique est imparfaite. Le test interféron gamma a une sensibilité nettement supérieure mais, en contrepartie, il peut désigner des animaux sains comme étant atteints de tuberculose ; cela induit parfois des abattages aux diagnostics non confirmés lors des tests post mortem. Il convient donc d'utiliser les deux méthodes de manière complémentaire. Le dispositif de surveillance déployé dans les départements à risque est ainsi conçu de manière à améliorer la sensibilité de la détection, tout en limitant les abattages.
Ce sujet mérite des explications techniques complémentaires, que je solliciterai auprès de mon collègue.
Je vous remercie pour votre réponse. Comme vous le savez, bon nombre d'éleveurs et d'élus sont concernés dans les territoires ruraux. J'aurai l'occasion de m'en ouvrir directement à M. le ministre pour avoir plus de détails techniques relatifs à la mise en œuvre de ce nouveau test.
La parole est à M. Jean-François Rousset, pour exposer sa question, n° 381, relative à la filière laine.
De nombreuses entreprises réfléchissent aux meilleurs débouchés pour valoriser la laine produite par nos animaux d'élevage. Dans l'Aveyron, chaque brebis Lacaune produit environ 1 kilogramme de laine par an et notre cheptel compte environ 1 million de brebis. Le potentiel est énorme et il est nécessaire de tout faire pour le valoriser. Nous devons créer les conditions de réussite de la relance de cette filière, longtemps fragilisée par la course aux prix bas menée notamment par les pays asiatiques. Le temps d'une relocalisation est venu et nous devons produire la valeur ajoutée sur place. Ce serait un succès pour l'emploi et cela améliorerait la rémunération de nos agriculteurs.
Or certains éleveurs se retrouvent pénalisés par les réglementations sanitaires. Une ferme de ma circonscription a développé un engrais à base de laine – belle innovation qui répond à un besoin réel. Ils ont un nombre de préventes record ! Mais la réglementation européenne impose l'hygiénisation de la laine, procédure coûteuse impossible à mettre en œuvre. C'est d'autant plus dommageable que plusieurs pays voisins, dont l'Allemagne, ont autorisé cette production, dérogeant à la réglementation européenne.
Monsieur le ministre délégué, dans quels délais pourrions-nous mettre fin à cette distorsion de concurrence ? Quelle stratégie l'État souhaite-t-il soutenir pour la relocalisation de la filière laine ?
Le Gouvernement accompagne la filière grâce à plusieurs leviers : la stratégie nationale pour la bioéconomie, l'inclusion dans le plan de relance du projet Tricolor, l'observatoire du marché des cuirs, laines, peaux et plumes mis en place par FranceAgriMer, ainsi qu'un groupe de travail chargé d'identifier des pistes de valorisation. Le Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux présentera au mois de juillet un rapport qui contiendra une feuille de route visant à améliorer la valorisation et les débouchés de ces produits.
Dans le domaine sanitaire, la dimension européenne aboutit généralement à une situation complexe. En vertu de la réglementation européenne, la laine a le statut de sous-produit animal de catégorie 3. Les possibilités de valorisation sont multiples : textile, matériaux isolants, industrie pharmaceutique et cosmétique, alimentation animale, engrais, avec le compostage sur place notamment. Néanmoins, son usage direct dans le sol en tant que fertilisant, sans application préalable des traitements prévus à cet effet, est strictement interdit, à cause des risques sanitaires de diffusion de maladies animales pour les animaux d'élevage, la faune sauvage, voire l'homme. À ce sujet, nos interprétations divergent de celles de nos amis allemands et les relations de nos deux pays avec la Commission diffèrent.
Des expérimentations sont menées pour concevoir des méthodes de valorisation de la laine conformes à la réglementation sanitaire, afin d'améliorer les marges des exploitants. Le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire est décidé à travailler avec la filière pour élaborer un dossier de demande d'agrément européen prêt à l'emploi, grâce à une adaptation de la fréquence des analyses d'autocontrôle. Ce travail doit aboutir à une solution acceptable pour Bruxelles.
La parole est à Mme Brigitte Liso, pour exposer sa question, n° 379, relative aux pratiques sectaires dans les salons de bien-être.
Les dérives sectaires nous exposent tous à un risque d'emprise, notamment dans les salons consacrés au bien-être, qui suscitent depuis plusieurs années un véritable engouement. Exposants et conférenciers y présentent des thérapies dites alternatives et des remèdes miracles, promettant un état de bien-être, voire une guérison rapide. Hélas, ces salons donnent surtout une visibilité à des gourous en thérapie qui exercent une véritable emprise sur leurs victimes, les menant parfois au décès. Comment un visiteur pourrait-il se méfier lorsqu'un conférencier, même controversé, jouit tranquillement d'une accréditation, ou lorsqu'un exposant a installé son stand sans être inquiété ?
Malheureusement, ces nouvelles formes d'emprise s'exercent aussi sur internet, où les plus jeunes sont exposés à la désinformation et aux contenus complotistes. Pourtant, des solutions existent. Je salue la mobilisation du Caffes – Centre national d'accompagnement familial face à l'emprise sectaire –, association lilloise, installée depuis des années en première ligne pour accompagner les familles des victimes d'emprise. Vendredi, le Caffes et l'Udaf – union départementale des associations familiales – ont présenté Boomering, mallette pédagogique d'outils innovants à l'usage des jeunes, afin de renforcer leur esprit critique face aux fake news et autres procédés complotistes.
La Miviludes – mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires – accomplit un travail considérable. Toutefois, le décideur doit également se montrer à la hauteur de l'enjeu. Les situations d'emprise se multiplient et changent de forme : leurs victimes sont de plus en plus jeunes. Face à ce phénomène, il nous faut redoubler de vigilance et faire preuve de fermeté. Nous le devons aux victimes et à leurs familles. Comment empêcher ces nouveaux gourous, qu'ils agissent physiquement ou avec des outils numériques, de s'en prendre à nos concitoyens ?
Il s'agit d'un véritable sujet de société, qui nous amène à réfléchir à notre manière de vivre ensemble et au rôle des réseaux sociaux, des influenceurs et des gens, nombreux, qui parlent sans avoir rien à dire. Il faut surveiller la vogue des salons dédiés au bien-être, afin d'éviter qu'ils n'offrent une porte d'entrée aux mouvements sectaires. Moi qui suis vieux, je me demande qui aurait pensé il y a trente ans qu'on parlerait de salons « bien-être » et de dérives sectaires associées ! Le monde change.
Je vous remercie de l'avoir souligné, la Miviludes est vigilante. Elle accomplit un travail de fond, notamment avec les associations d'aide aux victimes. Lorsqu'on porte à sa connaissance un doute sérieux quant à la nature réelle d'une manifestation, elle prévient les ordres professionnels concernés et leur transmet les signalements. Peut-être n'est-ce pas suffisant.
En outre, la Miviludes met à disposition des organisateurs de salons une affiche d'information et de prévention ; elle se tient à leur disposition pour répondre à leurs interrogations. Elle mène des actions de sensibilisation auprès des collectivités territoriales et des élus locaux, notamment en partenariat avec l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité, qui participe pleinement à cette action. Enfin, dès lors que les salons ou colloques concernés ont un retentissement régional ou national, la Miviludes met en garde les préfectures et les accompagne, comme lors du récent quatrième congrès de médecine intégrative – j'ignore de quoi il s'agit –, qui s'est tenu les 3 et 4 juin à Mont-sous-Vaudrey, dans le Jura.
En effet, il appartient au préfet et aux agences régionales de santé d'engager les démarches de contrôle des exposants et des conférenciers qui participent aux salons de bien-être, afin de vérifier la bonne application de la réglementation en matière de santé, d'hygiène, de sécurité et de protection des consommateurs. Il est important que le ministre de l'intérieur et le ministre de la santé et de la prévention les sensibilisent à ce problème – dont nous n'avons pas fini de parler.
Nous sommes plusieurs pièces d'un même puzzle : nous devons absolument nous associer pour lutter contre ce phénomène. Je compte sur le soutien de mes collègues parlementaires pour que nous y prenions toute notre part.
La parole est à M. Alexis Jolly, pour exposer sa question, n° 383, relative à la fonction de maire.
La fonction de maire, véritable pilier de notre démocratie, se heurte à toutes les difficultés.
Les maires sont d'abord confrontés aux difficultés financières. Tandis que les dotations et autres concours publics diminuent, l'État impose unilatéralement des mesures qui impliquent pour les communes des hausses de charges de fonctionnement. Je pense notamment à la hausse du point d'indice : elle est nécessaire sur le plan social, mais les communes dont le budget est déjà serré auront du mal à en absorber le coût. S'ajoute l'augmentation des prix des denrées alimentaires, de l'électricité et du carburant, qui devient insoutenable. Tous les maires que je rencontre me le disent : la concomitance de l'explosion des charges et de la réduction des recettes rend la situation intenable à long terme ; les trésors d'ingéniosité déployés pour équilibrer les budgets ne suffiront bientôt plus.
Les difficultés de gestion vont croissant. Les communes ont de plus en plus mal à recruter des personnels formés et compétents, notamment dans les secteurs de l'animation et de la petite enfance, ainsi que dans les ressources humaines, où les postes sont transversaux, ou encore pour des postes de secrétariat ou de direction générale. Ce n'est pas un secret, la fonction publique territoriale manque d'attractivité et de visibilité, notamment pour les jeunes diplômés.
Je le constate à l'occasion de mes déplacements : faute d'être en mesure de pourvoir les postes vacants, les maires, souvent épaulés par un ou deux adjoints dévoués, sont fréquemment obligés d'accomplir les tâches normalement assignées aux agents publics, en sus de leur mission d'élu. Il en résulte une surcharge de travail insupportable, parfois même un profond découragement.
Enfin, les maires assument une responsabilité toujours plus écrasante. Le dévouement et l'engagement de ceux des plus petites communes doivent avoir pour corollaire une protection accrue de l'État, qu'il s'agisse de leur sécurité personnelle ou du régime de responsabilité civile et pénale qui encadre leur fonction.
Quelle est la position du Gouvernement en la matière ? Comment comptez-vous alléger la charge pratique et morale qui pèse toujours davantage sur les maires ?
Le bloc communal a été très touché par la crise énergétique et par l'inflation. Aussi n'avons-nous pas diminué les dotations. J'insiste : vous ne pouvez pas affirmer que les dotations ont baissé. Au contraire, en 2022 et 2023, le Gouvernement a adopté des mesures inédites pour soutenir les collectivités territoriales : pour les plus petites, un bouclier tarifaire, étendu à toutes les collectivités situées outre-mer ; l'amortisseur d'électricité ; en 2023, l'augmentation de 320 millions d'euros de la dotation globale de fonctionnement, dont 90 % des communes ont bénéficié ; deux filets de sécurité ; la création du fonds Vert. Ce dernier était doté cette année de 2 milliards : il constitue une aide à l'investissement considérable ; en 2024, il sera reconduit, peut-être augmenté – en tant que ministre délégué aux outre-mer, je l'espère.
Il est vrai que la fonction publique territoriale connaît des difficultés d'attractivité et de fidélisation, comparables à celles de la fonction publique d'État. Les mesures récentes devraient améliorer la situation. Le Gouvernement prévoit d'autres dispositifs, comme la création d'une marque employeur visant à accroître sa visibilité, parfois moindre que celle des deux autres fonctions publiques. Il a également engagé un chantier transversal aux trois versants, consistant à fournir plusieurs instruments aux employeurs, notamment aux maires, afin de les aider à relever le défi de l'attractivité : assouplissement des conditions de recrutement et des quotas ; modification du déroulement de carrière ; outils en matière de rémunération.
Je suis particulièrement sensible aux conditions difficiles de l'exercice du mandat de maire. L'actualité est marquée par des violences inacceptables, d'où qu'elles viennent. En effet, elles ne sont pas nécessairement politiques, il peut s'agit de violences de voisinage. Il y a peu, un maire m'a écrit pour évoquer le « mal vivre ensemble », qui affecte la sécurité et la sérénité des édiles. Toutes les violences commises à l'encontre d'un élu de la République, quel qu'il soit, sont inadmissibles. Malheureusement, le ministre de l'intérieur et des outre-mer constate que de plus en plus d'élus doivent être protégés – ils le sont.
Plus concrètement, Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité, organisera dès septembre une grande concertation relative aux conditions d'exercice du mandat de maire. Le sujet est très vaste : il faut additionner les réponses, seulement partielles, pour que nos élus, qui soutiennent la République, puissent exercer plus sereinement leur mandat.
La parole est à M. Frédéric Petit, pour exposer sa question, n° 363, relative aux cartes d'identité pour les Français de l'étranger.
Dans la continuité des questions déjà posées par mes collègues députés des Français de l'étranger, la mienne concerne les difficultés que rencontrent beaucoup de nos concitoyens établis hors de France pour effectuer leurs démarches administratives.
Le 21 avril dernier, la Première ministre a annoncé que les délais d'obtention de rendez-vous seront réduits à un maximum de trente jours d'ici à l'été. Il s'agissait de l'Hexagone, mais cette mesure devrait s'appliquer partout. Je salue cette annonce et soutiens l'objectif, qui répond aux attentes des Français, y compris de ceux vivant à l'étranger. En effet, alors que l'accessibilité des services publics est primordiale pour ces derniers, le renouvellement des titres d'identité s'apparente parfois à un véritable parcours du combattant administratif. Aux difficultés pour prendre rendez-vous – nous avons connu deux systèmes, dont l'un n'a pas fonctionné durant deux ans –, s'ajoute l'éloignement des consulats et des ambassades, réel obstacle à l'accomplissement des démarches.
La promesse d'expérimenter au Portugal et au Canada une dématérialisation des démarches de renouvellement des passeports est très prometteuse. Je regrette toutefois qu'il ne s'agisse que d'une expérimentation et que son début ait été reporté d'un an et demi, au 1er mars 2024. S'il est possible de procéder ainsi dans deux pays, pourquoi tous ne seraient-ils pas concernés ? Il est désormais impératif de respecter la date fixée, afin de ne pas décourager nos concitoyens de l'étranger d'effectuer les démarches administratives les plus essentielles : cela aboutit parfois à les faire changer de citoyenneté, en adoptant la nationalité locale. La dématérialisation constitue donc une avancée indispensable pour répondre enfin à leurs besoins et pour remédier à un sentiment d'injustice, voire de déclassement.
Pourquoi ce projet n'est-il pas appliqué conjointement aux procédures de renouvellement des cartes nationales d'identité (CNI) ? En France, la procédure d'obtention des cartes d'identité électroniques de nouvelle génération est dématérialisée : cela devrait permettre de déployer rapidement France identité à l'étranger, facilitant l'ensemble des démarches en ligne afin de résoudre un problème auquel nous sommes confrontés depuis des années. Pourquoi conserver des procédures différentes ? Des mesures similaires à celle relative aux passeports ou prises par France identité seront-elles prochainement appliquées pour le renouvellement des cartes d'identité des Français établis à l'étranger ? Il est urgent d'améliorer significativement l'accès de nos compatriotes aux services publics, en France ainsi qu'à l'étranger.
Monsieur Petit, vous évoquez un délai supérieur à trente jours dans l'Hexagone : en tant que ministre délégué chargé des outre-mer, je ne résiste pas au plaisir de remarquer que ces démarches sont moins longues et tout à fait fluides dans les outre-mer.
L'exigence de rationalisation des démarches administratives pour renouveler les titres d'identité va de pair avec l'impératif tout aussi crucial de lutte contre la fraude et l'usurpation d'identité. Les Français établis à l'étranger bénéficient déjà, à la différence de leurs compatriotes établis en France hexagonale, de plusieurs dérogations visant à tenir compte du caractère parfois long et coûteux des déplacements vers les services consulaires.
La limitation aux passeports de ces dispositifs fortement dérogatoires a été justifiée par le fait que ce dernier est le seul titre indispensable aux Français établis à l'étranger : il s'agit non seulement d'un titre d'identité, mais également du seul titre de voyage permettant de circuler en dehors de l'Union européenne. L'extension de ces dispositifs dérogatoires aux CNI est jugée par le Gouvernement incompatible avec le déploiement de l'identité numérique régalienne, qui s'appuie exclusivement sur la CNI électronique que nous ambitionnons de certifier au niveau de sécurité élevé – au sens de la réglementation européenne – dans le courant du second semestre 2023.
Or, pour garantir ce niveau de sécurité élevé – seul sujet faisant débat –, les services du ministère de l'intérieur et de l'outre-mer estiment indispensable de maintenir, à l'occasion du renouvellement de la CNI, les procédures suivantes lors du dépôt de la demande et de la remise du titre : une double comparution physique du demandeur, assortie d'une double vérification des empreintes digitales et d'une double vérification visuelle, par l'agent, de la correspondance entre la personne qui se présente et la photographie enregistrée dans le dossier. Prévenir les cas de fraude et d'usurpation d'identité constitue la motivation essentielle de ces services, ce que chacun peut comprendre.
À défaut de cette double comparution, la carte délivrée aux Français de l'étranger présenterait un niveau de sécurité dégradé – une carte d'identité de seconde zone, en quelque sorte. Non seulement elle les exposerait à un risque élevé de fraude et d'usurpation d'identité, mais elle les priverait des futurs usages de l'identité numérique régalienne, telles que les procurations en ligne pour les élections. Pour ces raisons et malgré votre demande, monsieur le député, il n'est pas envisagé pour l'instant d'étendre la dématérialisation au renouvellement des cartes nationales d'identité.
Cette réponse est malheureusement bien connue : c'est celle que j'entends depuis trois ans, monsieur le ministre délégué. Je rappelle au Gouvernement qu'un passeport justifie de l'identité d'un citoyen. Comment expliquer à mes concitoyens que l'agent du consulat qui leur a délivré leur passeport et l'a envoyé à leur domicile après une seule comparution ne peut faire la même chose pour la carte d'identité, au motif que celle-ci justifie de leur identité ? Le passeport en justifie également !
Quant à l'explication selon laquelle la carte d'identité serait moins utile qu'un passeport pour les Français établis à l'étranger, elle a été édictée par des fonctionnaires qui ne connaissent pas les réalités auxquelles ces derniers sont exposés. Je n'ai pas besoin d'un passeport pour circuler dans l'espace Schengen ; quand un enfant vivant à l'étranger revient dans l'Union européenne pour y passer ses vacances, il n'a pas non plus nécessairement besoin d'un passeport, mais il a besoin d'une carte d'identité. Je le maintiens : cette réponse est absurde.
La parole est à M. Xavier Breton, pour exposer sa question, n° 373, relative à la filière bois.
Le projet de loi dite industrie verte sera prochainement débattu au Parlement. À travers vous, monsieur le ministre délégué, je souhaite interroger le ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur la prise en considération de la filière bois dans ce texte. On connaît l'importance de ce secteur pour notre pays. Ainsi, 36 % de la région Auvergne-Rhône-Alpes – que vous connaissez bien –, sont couverts de forêt ; avec près de 2 millions de mètres cubes, elle est la première région française en matière de sciage. Le département de l'Ain compte 204 000 hectares de forêt et 1 350 entreprises, qui correspondent à plus de 5 500 emplois.
La filière forêt-bois présente de nombreux avantages : son principal atout consiste à répondre aux enjeux climatiques. Tout d'abord, la forêt est naturellement un puits de carbone : elle est même le principal puits naturel de notre pays. Ensuite, les acteurs de la filière s'organisent pour jouer un rôle majeur dans la transition écologique dans le secteur du bâtiment, avec des constructions et des rénovations décarbonées – au niveau des charpentes, par exemple. La filière bois propose également une consommation plus durable, grâce à des produits manufacturés stockant le carbone et grâce à la valorisation de matières en fin de vie, incorporées dans des panneaux à base de bois.
La filière bois est donc en mesure de développer des capacités de transformation du bois pour répondre aux besoins des marchés bas-carbone, en vue d'atteindre la neutralité carbone en 2050. Il est donc indispensable de l'inclure dans le périmètre du projet de loi « industrie verte ». Est-ce bien prévu, monsieur le ministre délégué ? Quelles dispositions concrétiseront cette prise en considération ?
Je découvre votre question, monsieur Breton, à laquelle mon collègue Jean-Noël Barrot devait apporter une réponse – il n'est pas encore arrivé. J'ai toutefois plaisir à y répondre, parce que c'est vous qui la posez, parce que vous évoquez la région Rhône-Alpes et parce qu'en tant que ministre délégué chargé des outre-mer, je trouve un intérêt à ce que l'outre-mer ait sa part dans le financement de cette filière bois.
Les services écologiques rendus par la filière bois, notamment la séquestration de carbone, ont des effets majeurs : vous avez raison de le souligner. Le bois permet de décarboner certains secteurs, notamment l'industrie, grâce au remplacement des chaudières industrielles à énergies fossiles par des chaudières biomasse ; reste à savoir d'où vient la biomasse.
Le Gouvernement est convaincu de l'importance de développer la filière bois ; son soutien a d'ailleurs été massif dans le cadre du plan France relance. Soyez rassuré, elle est clairement identifiée dans le dossier de presse de la stratégie industrie verte comme faisant partie des technologies vertes permettant la décarbonation de l'économie. J'ai moi-même été saisi pour faire connaître mes projets en la matière.
S'agissant des dispositions écrites figurant dans le projet de loi « industrie verte », il n'est pas paru souhaitable au Gouvernement de figer dans la loi une liste limitative des technologies vertes. Compte tenu des avancées technologiques qui sans cesse créent de nouvelles filières et de nouvelles solutions, il serait illusoire, voire contre-productif, d'en établir une liste limitative dans la loi. La quasi-totalité des dispositions du projet de loi « industrie verte » s'appliquent d'emblée à tous les secteurs industriels participant à la transition écologique : la filière bois en fait évidemment partie, sans qu'il soit nécessaire de le fixer dans un texte de loi. Dans certains cas précis, il sera renvoyé à un décret, afin de conserver la souplesse nécessaire.
Vous pouvez – j'en témoigne – compter sur l'engagement total du Gouvernement à développer l'industrie française – toute l'industrie – et toutes les filières, dont la filière bois, qui fait partie de celles contribuant le plus à la transition écologique. C'est l'ambition du projet de loi « industrie verte », qui sera examiné au Sénat cette semaine en commission et la semaine prochaine en séance publique. Il connaîtra des évolutions et vos collègues parlementaires, notamment les sénateurs, auront à cœur de défendre vos revendications.
Merci de votre réponse, monsieur le ministre délégué. Je souhaite simplement que l'engagement du Gouvernement auprès de la filière bois aille au-delà du dossier de presse. Il est urgent de soutenir la modernisation de la filière, notamment pour les nombreuses entreprises familiales. Cela peut passer par un soutien aux investissements productifs : les industries de la filière forêt-bois ont besoin d'évolutions technologiques très importantes, qui doivent être soutenues. Ce soutien peut aussi prendre la forme de mesures fiscales, comme un dispositif de suramortissement exceptionnel ou un nouveau crédit d'impôt fondé sur le stockage de carbone. Rappelons que la filière bois représente des emplois non délocalisables et fait vivre de nombreux territoires.
La parole est à M. Laurent Croizier, pour exposer sa question, n° 362, relative à la THRS pour les associations de Besançon.
Ma question s'adresse au ministre délégué chargé des comptes publics. En 2022, à Besançon, dans ma circonscription, des associations ont eu la désagréable surprise de se voir nouvellement assujetties à la taxe d'habitation sur les résidences secondaires et autres locaux meublés non affectés à l'habitation principale (THRS), alors qu'elles n'y étaient pas soumises précédemment et que leur situation était restée inchangée. À ma connaissance, les critères n'ont pourtant pas évolué. Une association est imposable à la taxe d'habitation dans le seul cas où le local concerné répond conjointement à trois critères : être meublé, être occupé à titre privatif et ne pas être retenu dans les bases de la cotisation foncière des entreprises (CFE).
Parmi les associations concernées, certaines ne remplissaient pas ces trois critères. Cette dépense imprévue est venue affecter leurs finances, déjà fragiles. Vous n'ignorez pas que la crise sanitaire a bousculé nombre d'associations, qui se remettent tout juste de ses répercussions ; de plus, il leur faut désormais faire face à l'inflation.
La France ne serait pas la France sans ses associations. Monsieur le ministre délégué, je souhaite appeler l'attention du Gouvernement sur l'incompréhension, le découragement et les difficultés que cette situation imprévisible a suscités chez les responsables associatifs de ma circonscription. Je souhaite connaître les raisons pour lesquelles autant d'associations bisontines, à situation inchangée, se sont trouvées tout à coup redevables de la taxe d'habitation. Qu'entend faire le ministère pour leur venir en aide, dans le contexte économique que nous connaissons ?
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications.
Les associations sont soumises à la taxe d'habitation au titre des locaux répondant aux trois critères que vous avez mentionnés : être meublés, être occupés à titre privatif et ne pas être retenus pour l'établissement de la cotisation foncière des entreprises. Conformément à la jurisprudence, seuls sont considérés comme des locaux occupés à titre privatif par une association ceux qui ne sont pas accessibles au public ou dans lesquels le public ne peut circuler librement lorsque les conditions d'accès sont fixées par l'association elle-même.
Entre 2018 et 2023, une trajectoire de suppression de la taxe d'habitation par étapes a été appliquée. Depuis le 1er janvier 2023, plus aucun ménage n'est redevable de cet impôt au titre de sa résidence principale. En dehors des résidences principales, la taxe d'habitation est néanmoins maintenue, de sorte que le droit applicable est demeuré inchangé pour les associations. Dès lors, si des associations qui ne remplissent pas les critères ont malgré tout reçu un avis d'imposition, elles sont invitées à se rapprocher des services locaux des impôts, afin que leur situation soit réexaminée.
Au-delà de cette question, les collectivités locales et l'État sont mobilisés pour soutenir le tissu associatif. Outre les mécanismes exceptionnels que vous avez évoqués, le soutien à la vie associative s'exerce au travers de leviers fiscaux, comme les incitations fiscales à la générosité, et budgétaires. Le Gouvernement a ainsi relevé les moyens d'action du fonds pour le développement de la vie associative (FDVA), doté de près de 33 millions d'euros en 2023, auxquels s'ajoutent les 17,5 millions au titre du fléchage des comptes inactifs acquis par l'État. Avec 12 000 subventions versées chaque année, le FDVA constitue le principal outil de soutien de l'État aux petites associations locales.
La parole est à M. Joël Aviragnet, pour exposer sa question, n° 386, relative au fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée.
Ma question s'adresse au ministre délégué chargé des comptes publics. Depuis plusieurs mois, les petites communes rurales souffrent particulièrement de l'inflation galopante. Je souhaite appeler votre attention sur la non-intégration des dépenses relatives aux opérations sous mandat dans l'assiette du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA). Cette exclusion nuit à de nombreuses communes et affecte dangereusement leur budget ; elle pose de graves problèmes pour les projets réalisés entre 2020 et 2022, pour lesquels les remboursements étaient prévus à l'origine.
Prenons l'exemple de Beauchalot, une commune de 650 habitants de ma circonscription : le FCTVA y est automatisé depuis 2022, un an après les dépenses engagées par la commune pour les travaux de sécurisation et d'urbanisation de la route départementale 817 qui la traverse. Ces travaux d'urbanisation concernant son territoire, la commune les finance, par le biais d'un plan de financement qui intégrait le reversement du FCTVA à hauteur de 126 000 euros : c'est considérable, rapporté au budget d'une petite commune. S'agissant d'une opération sous mandat, puisque la route est départementale, les dépenses relatives à ces travaux sont imputées au compte 458, qui est désormais exclu de l'assiette du FCTVA. Cette situation déséquilibre fortement le plan de financement prévisionnel élaboré avant la réforme et met en péril le budget communal. De nombreuses communes de Haute-Garonne sont touchées par ce phénomène et j'imagine que la situation est similaire dans l'ensemble du pays.
Il n'est pas normal que les communes portant des projets soutenus par ailleurs par l'État au titre de la dotation d'équipement des territoires ruraux se voient amputées d'un tel financement. Compte tenu de la situation budgétaire des petites communes, l'État ne peut pas donner d'une main et reprendre de l'autre, tout en changeant les règles en cours de route pour récupérer des fonds sur leur dos. Dans un contexte de crise économique et de ralentissement de la croissance, le soutien à l'investissement public local, notamment aux petites communes est une priorité. Les services déconcentrés de l'État, comme ceux du ministère chargé des comptes publics, n'apportent pas de réponse à ce sujet. Je vous le demande donc, monsieur le ministre délégué : le Gouvernement compte-t-il réintégrer ces dépenses dans l'assiette du FCTVA avant qu'il ne soit trop tard ?
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications.
L'automatisation du FCTVA a conduit à revoir la définition de l'assiette des dépenses d'investissement éligibles. Pour permettre l'automatisation du calcul pour les travaux sous délégation de maîtrise d'ouvrage, il a été nécessaire de modifier l'attributaire du FCTVA. Désormais, lorsque les travaux sont, par exemple, délégués à une commune par un département, ce n'est plus la commune délégataire qui est bénéficiaire, mais le département qui a délégué les travaux.
Le montant du FCTVA attribué au projet délégué reste le même. L'automatisation du FCTVA n'a donc pas revu à la baisse le montant, mais a conduit à verser directement à l'entité mandante le FCTVA, et non plus à l'entité délégataire. Par conséquent, les collectivités et groupements soumis aux délégations de maîtrise d'ouvrage doivent adapter les contrats stipulant le versement direct aux propriétaires des ouvrages, afin de prévoir l'ajustement du montant des remboursements effectués à l'entité délégataire par l'entité mandante.
Prenons un exemple : si le conseil départemental a délégué les travaux à la commune sur son domaine routier, c'est lui qui bénéficiera directement du FCTVA, dans le cadre de l'automatisation du fonds. Il convient donc que le département rembourse la commune à due concurrence du FCTVA qu'il percevra dans le cadre de l'opération. Pour clarifier ce nouveau cadre de gestion, les services de la préfecture prendront attache auprès de la commune. Ce dispositif doit permettre de s'assurer que le montant dû pour l'opération est bien attribué à l'entité qui sera en mesure de rembourser la commune délégataire. Si la commune contribue pour tout ou partie au financement de l'opération déléguée, une partie de l'opération ne sera pas prise en considération par le traitement automatisé. Dans ce cas de figure, une procédure déclarative particulière a été instaurée, afin de garantir le versement de l'exhaustivité du montant du FCTVA. Ainsi, dans le cadre de ces projets délégués, il n'y a pas lieu de réintégrer les dépenses engagées qui n'ont pas été déduites de l'assiette du FCTVA.
Par ailleurs, les simulations réalisées en amont de la réforme ont montré que, si celle-ci engendre un coût supplémentaire pour l'État, elle s'avère globalement favorable aux collectivités, notamment en ce qu'elle supprime les cas de non-recours au fonds, qui concernaient principalement les plus petites collectivités. La réforme a simplifié la gestion du FCTVA, en supprimant la quasi-totalité des obligations déclaratives, ce qui a conduit à une importante accélération des paiements. Dans sa globalité, elle s'avère donc favorable à l'investissement public local. Une évaluation du coût de ce dispositif est en cours, afin de garantir la bonne mise en œuvre de la réforme et de tirer pleinement profit des simplifications attendues.
J'ai bien entendu que les communes ne subiraient pas de pertes. Néanmoins, nous devons remédier à la situation transitoire. Au bout du compte, les communes doivent récupérer le montant prévu. Entre-temps, la loi a été modifiée. Nous devons veiller à ne pas mettre en difficulté les petites communes.
La parole est à M. Philippe Pradal, pour exposer sa question, n° 367, relative aux dates de déclaration de l'impôt sur le revenu.
Pour la plupart de nos compatriotes, le mois de juin est synonyme de déclaration de revenus. Si c'est presque le temps des vacances, c'est surtout l'heure des comptes.
Les dates limites de déclaration d'impôt sur le revenu (IR) en ligne ne sont pas les mêmes pour tous les départements. Selon la zone où ils se situent, des échéances différentes ont été prévues : une échéance au 25 mai 2023 pour les départements qui portent les numéros 1 à 19 et pour les non-résidents ; au 1er juin 2023 pour les départements portant les numéros 20 à 54 ; au 8 juin 2023 pour les départements portant les numéros 55 à 976.
Il semble n'exister aucun système de roulement entre les zones, ce qui, chaque année, a pour conséquence de soumettre les mêmes contribuables à la même échéance. Les contribuables des Alpes-Maritimes sont ainsi systématiquement soumis à la plus courte échéance. Cette situation pose un problème d'égalité devant l'obligation déclarative pour tous les citoyens, car, selon leur département de résidence, ils ne disposent pas du même délai pour remplir leur déclaration ; elle pose donc aussi un problème d'équité, car ce sont toujours les mêmes citoyens qui sont soumis aux délais les plus courts.
Je souhaiterais donc savoir si le Gouvernement est prêt à proposer un roulement entre les différentes zones ou à imposer de nouveau une date unique de déclaration pour l'ensemble du territoire national.
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications.
Je vous remercie pour votre question, qui permet de saluer la façon dont s'est déroulée, une fois encore, la campagne déclarative de l'impôt sur le revenu. Cette année, près de 40 millions de foyers fiscaux devaient déclarer leurs revenus, ce qui représente un moment d'intense activité pour les services de la direction générale des finances publiques (DGFIP) et un rendez-vous important entre les Français et l'impôt.
Pour la première fois, une grande consultation – En avoir pour mes impôts – a été annoncée par le ministre délégué chargé des comptes publics. Depuis 2017, notre majorité a profondément remodelé le lien entre l'usager et l'administration fiscale. Le prélèvement à la source fait désormais l'unanimité. Il a contemporanéisé le prélèvement de l'impôt, en particulier durant la période de crise que nous avons connue. Il a également permis à chaque foyer de mieux maîtriser sa contribution fiscale : en 2022, plus de 6 millions de modifications du taux de l'impôt ont été enregistrées dans l'outil Gérer mon prélèvement à la source. Dans le cadre de cette même réforme, nous avons créé une avance de 60 % du montant des réductions et crédits d'impôts récurrents, toujours dans le but de rendre l'impôt plus contemporain. Ainsi, 9 millions de foyers ont bénéficié de 624 euros en moyenne au mois de janvier 2023. Nous avons aussi introduit la déclaration automatique, qui a concerné près de 11 millions de foyers en 2022. Grâce à cette déclaration, une seule vérification suffit : la formalité déclarative s'en trouve allégée.
La DGFIP est aussi une administration pionnière en matière de droit à l'erreur. Elle a placé la relation à l'usager au cœur de sa stratégie. En développant son nouveau réseau de proximité, elle sera présente dans 3 000 communes d'ici à 2024, soit une augmentation de 50 % du nombre de points de contact. Je vous rappelle toutes ces innovations, afin de vous présenter le contexte infiniment simplifié dans lequel s'inscrit désormais l'exercice déclaratif.
Votre question est relative aux dates limites différenciées par zone géographique. Le calendrier de la déclaration de revenus en ligne, qui n'est pas nouveau, a été instauré en 2003, afin d'éviter toute défaillance technique. Jusqu'en 2009, les dates limites, qui étaient définies en fonction des zones scolaires, étaient modifiées chaque année. De nombreux usagers étaient alors déstabilisés par le changement annuel de calendrier : ce dernier est donc figé depuis 2010. Cette évolution a permis de simplifier la communication sur le zonage et d'apporter de la sécurité aux usagers quant à la date limite à laquelle ils doivent soumettre leur déclaration : en témoigne la baisse significative des questions sur le calendrier et des demandes d'assistance des usagers auprès du réseau de la DGFIP.
Ce système, qui fonctionne, évite la survenance de difficultés informatiques, qui provoquaient un stress important chez nos concitoyens, au moment de valider leur déclaration. La stabilité de ces zones géographiques est aussi un gage de lisibilité et de clarté pour tous, d'autant que le délai pour procéder à la déclaration est acceptable quel que soit le lieu du domicile du déclarant. Enfin, le délai pour déclarer en ligne est plus long que celui fixé pour les déclarations papier, qui devaient, cette année, être envoyées avant le 22 mai.
La parole est à Mme Charlotte Goetschy-Bolognese, pour exposer sa question, n° 374, relative à l'hébergement des étudiants à Mulhouse.
Comme de nombreux autres territoires, Mulhouse est victime de la désertification médicale. Si le phénomène est reconnu au niveau national, des difficultés apparaissent dans certaines régions, s'agissant, notamment, de l'hébergement des étudiants en médecine.
Chaque année, un nombre important d'étudiants, issus de la faculté de médecine de Strasbourg, effectuent leur stage d'internat dans les centres hospitaliers de Mulhouse ou en médecine de ville, dans les communes de l'agglomération. Malheureusement, beaucoup d'étudiants rencontrent des difficultés pour se loger, d'autant que l'internat est peu attrayant. Ils sont donc contraints d'effectuer des allers-retours, ce qui nécessite un véhicule et entraîne une fatigue supplémentaire, alors qu'ils subissent déjà une charge de travail très importante.
De plus, le fait de ne pas posséder de logement dans le bassin de vie mulhousien ne leur permet pas de se saisir des opportunités que le territoire pourrait leur offrir. Convaincue que la possibilité de se projeter dans un projet professionnel sur le plan géographique est un vecteur de lutte contre la désertification médicale, je souhaite connaître les mesures incitatives que vous comptez prendre afin de favoriser la venue d'internes dans l'ensemble des territoires en tension de France.
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications.
Je partage pleinement votre constat sur la nécessité de disposer d'un parc de logements abordables dédiés aux étudiants. Je vous assure de la pleine mobilisation du Gouvernement en la matière. Ainsi, 12 % de la population étudiante est logée dans des résidences universitaires qui disposent d'une capacité d'accueil dédiée d'environ 380 000 places, dont 175 000 dans les résidences gérées par les centres régionaux des ?uvres universitaires et scolaires. Plus de 60 000 places ont été offertes entre 2018 et 2022. Depuis 2022, l'objectif général poursuivi est d'augmenter la part de l'offre de logements étudiants à caractère social.
Globalement, chaque année, en moyenne, sur la période 2018-2022, autour de 6 000 logements sociaux étudiants ont été financés. Afin d'accélérer les projets, le ministre délégué chargé de la ville et du logement a demandé aux préfets de région de mener un travail de recensement et de protection foncière avec les présidents d'université, afin d'identifier, au sein des campus, les terrains où des logements destinés aux étudiants pourraient être construits.
Pour élargir la palette de solutions offertes aux étudiants et aux jeunes en matière de logement, la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique – la loi Elan – a renforcé le cadre de la colocation dans le parc social. En outre, elle permet d'attribuer un certain nombre de logements sociaux en priorité à des jeunes de moins de 30 ans. Dans le parc privé, le bail mobilité d'une durée d'un à dix mois non renouvelable a également été créé pour accroître les solutions de logement meublé pour toute personne suivant une formation professionnelle ou des études supérieures, ou titulaire d'un contrat d'apprentissage.
Enfin, pour sécuriser leur accès au logement, le Gouvernement a étendu le champ d'application de la garantie Visale – visa pour le logement et l'emploi – à tous les jeunes entre 18 et 30 ans, dans le cadre de la précédente convention quinquennale signée entre l'État et Action logement. Son déploiement auprès du public étudiant est particulièrement dynamique : 120 000 nouveaux contrats ont été signés en 2021 et 160 000 en 2022. Ces efforts spécifiques ont naturellement vocation à se poursuivre et à s'intensifier.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix heures quarante, est reprise à dix heures quarante-cinq.
La parole est à M. Jean-Philippe Tanguy, pour exposer sa question, n° 395, relative à la réindustrialisation de la Somme.
La 4
Je pense tout d'abord à la filière du lin. En effet, la France produit, en particulier dans la Somme, 60 % à 80 % du lin mondial. Hélas, tout se passe, dans ce domaine, comme si nous étions un pays du tiers-monde : bien que nous ayons inventé les méthodes de filature et de traitement du lin, celui-ci est quasi exclusivement exporté vers l'Asie, notamment la Chine, où il est transformé avant d'être réimporté en Europe. Or le lin, qui est utilisé pour l'isolation des bâtiments mais aussi pour la fabrication de tissus industriels, peut contribuer à la transition énergétique. Pourquoi la filière n'est-elle pas assez protégée, valorisée ? Dans la Somme, de petits efforts sont consentis, de petites initiatives voient le jour, mais la filière n'est pas organisée à la hauteur de la production.
Par ailleurs, nous rencontrons, vous le savez, des difficultés pour produire des engrais. Il se trouve que, dans ma circonscription, à Beauval, est implantée une ancienne mine de phosphate qui n'est pas valorisée : personne ne veut étudier les possibilités de la rouvrir. Selon la rumeur locale, elle serait transformée en décharge, ce qui non seulement poserait un problème environnemental mais serait un gâchis énorme. Or, une usine de production d'engrais, située non loin de là, à Mazingarbe, est à l'arrêt. Ainsi, nous avons, séparées de quelques kilomètres, une mine de phosphates et une usine capable de transformer cette matière première en engrais, si précieux pour notre industrie.
Enfin, la culture de la betterave, qui offre d'importantes capacités de production de sucre, est un atout pour la filière industrielle de la chimie verte. Depuis des années, avec d'autres acteurs du territoire, je me bats, en tant que conseiller régional, en tant que député, pour promouvoir cette filière, qui n'en est encore qu'à ses balbutiements.
Voilà trois exemples de filières industrielles qui, si elles étaient relancées, valoriseraient les compétences et les productions locales, notamment agricoles, et créeraient des emplois tout en contribuant à la transition énergétique et climatique. Je ne dis pas que rien n'est fait dans ce domaine, mais les mesures prises ne sont pas du tout à la hauteur.
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications.
Vous avez raison, il nous faut défendre nos industries dans les territoires, en particulier, s'agissant de votre circonscription, celles du lin, du sucre et des engrais. Pour y parvenir, l'un des outils les plus efficaces dont nous disposions est le programme Territoires d'industrie.
Plusieurs communes de la 4
Dans ce cadre, ils ont pu bénéficier d'un soutien de l'État, de la région et des opérateurs pour faciliter la concrétisation de projets ambitieux portés par des industriels, tels que GEF Industrie à Villers-Bretonneux, qui a bénéficié d'une subvention de 400 000 euros pour moderniser et agrandir sa ligne de fabrication de lubrifiants. Ainsi, le programme Territoires d'industrie a permis de travailler très concrètement avec les collectivités et les industriels, à la reconquête industrielle au plus près des projets des territoires.
Fort de ce bilan positif, le Gouvernement prépare la prolongation du programme pour la période 2023-2027, autour d'une offre de services renforcée pour les territoires. Nous continuerons ainsi de veiller à ce que tous les territoires puissent continuer à bénéficier de ce dispositif au service de la réindustrialisation du pays. Le Gouvernement est à votre disposition pour étudier tout projet industriel dont vous auriez connaissance.
Merci, monsieur le ministre délégué. Les deux programmes, je vous en donne acte, existent bien, et l'entreprise que vous avez mentionnée, avec laquelle j'étais en contact, a bien reçu cette subvention : je remercie le Gouvernement pour cette action. Puisque vous m'y invitez, je ferai connaître à vos services ainsi qu'à ceux du préfet, que j'ai déjà sollicités, les filières dont je préconise le développement. Nous pouvons, je crois, faire plus.
J'invite du reste le Gouvernement – et je le dis de manière constructive – à penser de nouveaux modes de réindustrialisation. Pour certaines filières, il peut anticiper et les organiser de manière verticale, même en impliquant les élus. Mais, à l'instar de ce qui se passe aux États-Unis ou en Corée du Sud, par exemple, il faut aussi que cent fleurs s'épanouissent. Certains développements sont imprévisibles : arrosons donc un peu plus large, si vous me permettez l'expression, en donnant plus de libertés et en encourageant davantage l'entrepreneuriat. Il faut encourager ce que nous savons pouvoir réussir mais aussi ce que nous ne savons pas encore pouvoir réussir.
La parole est à M. Benoît Bordat, pour exposer sa question, n° 380, relative à la liaison TGV Dijon-Lille.
La ligne TGV reliant Dijon à Lille via Montbard, Marne-la-Vallée et l'aéroport Paris-Charles-de-Gaulle a été suspendue en 2020 en raison de la crise sanitaire. Or, la fermeture de cette ligne impose d'importantes contraintes pour les Dijonnais, ainsi que les habitants de la métropole et du département. Les étudiants, mais aussi les personnes qui se déplacent pour des raisons professionnelles au profit des entreprises du territoire, ne peuvent plus se rendre directement ni à l'aéroport, ni à Lille, ni à Bruxelles. La métropole dijonnaise, ville universitaire au rayonnement international, se trouve être l'une des seules en France à ne pas être reliée directement à un aéroport international.
En outre, le rétablissement de cette ligne permettrait d'offrir à nouveau, à tous, une solution de mobilité bas-carbone. Les habitants de la Côte-d'Or sont d'ailleurs nombreux à le réclamer et le font savoir par une pétition qui a recueilli à ce jour près de 26 000 signatures.
La volonté politique des acteurs locaux – dont le maire de Dijon et président de Dijon métropole, François Rebsamen – de rétablir la ligne TGV reliant Dijon à Lille s'inscrit dans la continuité du développement d'un maillage territorial fort. La Côte-d'Or dispose d'un pôle économique diversifié, et son potentiel industriel mérite d'être davantage soutenu. Il s'appuie sur un vaste tissu de PME et de groupes internationaux. C'est notamment le cas des entreprises de métallurgie et de maroquinerie de luxe installées à proximité de la desserte TGV de Montbard, dont l'activité dépend en grande partie de décideurs internationaux qui se rendent régulièrement sur les sites industriels.
Notre territoire et ses acteurs ne peuvent être privés indéfiniment de cette desserte ferroviaire. C'est pourquoi je demande à M. le ministre des transports d'intervenir auprès de la SNCF et de me dire s'il juge possible que notre demande aboutisse enfin.
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications.
Je tiens d'abord à rappeler que le Gouvernement est très attentif à ce que le niveau de service ferroviaire soit en mesure de répondre aux besoins de mobilité des habitants des territoires. La liaison aller-retour quotidienne en TGV entre Lille et Mulhouse, desservant notamment Roissy et Dijon, a été interrompue en 2020 en raison de la crise sanitaire. En 2019, le taux d'occupation de cette liaison était de 38 % en moyenne sur le tronçon le plus rempli.
Le niveau de trafic ferroviaire constaté globalement au niveau national est désormais revenu à un niveau comparable à celui de 2019, voire supérieur avec les perspectives de cet été. La question de la remise en circulation de la liaison TGV Lille-Mulhouse est donc légitime, même s'il convient de tenir compte des enseignements de cette crise et des nouvelles habitudes de travail et de déplacement. Je pense en particulier à la clientèle professionnelle.
À l'initiative des acteurs locaux, notamment dans le département de la Côte-d'Or, des échanges ont été engagés avec SNCF Voyageurs pour déterminer les conditions dans lesquelles cette liaison pourrait être rétablie. La solution n'est pas évidente car, vous le savez, la SNCF doit d'ores et déjà gérer une reprise vigoureuse du trafic, en particulier dans les périodes de pointe, avec un parc de matériel roulant qui n'a pas pu anticiper un rebond aussi important. Les échanges se poursuivent et le Gouvernement veillera à ce que les élus soient informés de leur bon avancement, dans l'objectif d'assurer la meilleure connectivité possible des territoires, de la Côte-d'Or en particulier.
La parole est à M. Thierry Frappé, pour exposer sa question, n° 384, relative à l'installation d'une déchetterie à Hersin-Coupigny.
La société Sarpi du groupe Veolia souhaite implanter sur le site des Dièves, à Hersin-Coupigny, une installation de stockage de déchets dangereux (ISDD) de 25 hectares, dont la capacité serait de 100 000 tonnes par an et la durée d'exploitation est estimée à vingt-cinq ans.
Ce projet suscite depuis le début un rejet unanime de l'ensemble des habitants et des élus. Diverses manifestations ont été organisées, profitant d'une mobilisation croissante, et une pétition a recueilli des milliers de signatures. Les craintes portent sur le risque environnemental, le risque de nuisances sonores, visuelles et olfactives, ainsi que sur les conséquences néfastes que pourrait avoir ce projet pour le marché immobilier, sur un site déjà affecté par son passé minier. Par ailleurs, les études ont montré qu'il existe 130 autres possibilités d'installation dans la région.
Les habitants ont le sentiment que leur territoire est sacrifié. La région Hauts-de-France doit, légalement, être autosuffisante s'agissant du traitement de ses déchets, mais je tiens à me faire, auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, le relais de l'inquiétude et du questionnement des habitants. J'ai pu discuter avec eux et assister à diverses réunions publiques : tous, sans exception, s'inquiètent du devenir de leur commune et de son environnement.
Le projet est reporté à 2026 et la concertation se poursuit. J'appelle donc l'attention du ministre sur la situation d'un territoire déjà fortement affecté par des contraintes d'utilité publique : à l'existence d'une rocade, d'une usine d'enrobés à chaud et de diverses lignes à haute tension s'ajouterait maintenant le projet d'installation d'une déchetterie de produits dangereux ! Le groupe Veolia est propriétaire du foncier, mais les habitants et les élus ont manifesté leur rejet massif de ce projet.
Aussi souhaiterais-je connaître l'avis du ministre et savoir quelles sont les intentions de l'État concernant cette nouvelle installation contraignante et pénalisante pour les habitants d'une commune de plus de 6 000 habitants, sans compter les communes voisines.
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications.
Vous m'interrogez sur le projet de Sarpi Veolia d'exploiter une installation de stockage de déchets dangereux sur le territoire de la commune de Hersin-Coupigny, dans les Hauts-de-France.
Les installations de stockage de déchets dangereux sont des équipements importants pour la protection de l'environnement car elles permettent d'éviter que ces déchets ne soient dispersés dans l'environnement. Pour un certain nombre de déchets, il n'existe pas d'autre solution que le stockage dans des installations sécurisées. La loi prévoit donc que les territoires disposent d'installations de stockage de déchets dangereux, dans le respect du principe de proximité. En vertu de ce principe, les déchets générés par les installations industrielles de la région doivent être gérés à l'échelle de cette région et non être exportés chez les voisins. Les conseils régionaux sont ainsi responsables de la planification, à l'échelle de la région, de ces installations de stockage.
Dans les Hauts-de-France, il n'existe plus, depuis la fermeture du site de Menneville, en 1994, d'installation sécurisée de stockage de déchets dangereux. La région a identifié ce manque dans sa planification : certains déchets dangereux des Hauts-de-France sont exportés chez nos voisins, en contradiction avec le principe de proximité. La Commission nationale du débat public a été saisie il y a plus d'un an afin d'organiser une concertation préalable sur le projet. Cette concertation, qui s'est déroulée en 2022, a permis de formuler plusieurs recommandations tout en relevant que le projet faisait l'objet d'une forte opposition locale.
À ce jour, Sarpi Veolia n'a pas encore déposé de demande d'autorisation officielle au titre des installations classées pour la protection de l'environnement. Toutefois, si l'entreprise souhaite maintenir son projet, les services de l'État seront très vigilants à ce que les conditions de stockage des déchets respectent les meilleures technologies disponibles.
Je vous remercie pour cette réponse. J'espère obtenir rapidement des nouvelles précises de ce projet qui suscite une opposition manifeste.
La parole est à M. Yoann Gillet, pour exposer sa question, n° 385, relative au Canal du Rhône à Sète.
Je souhaite appeler l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur l'avenir du canal du Rhône à Sète. Élément de patrimoine fédérant les communes et les territoires, ce canal est un enjeu majeur pour le devenir environnemental, économique et culturel régional.
En 2020, le préfet de la région Occitanie avait confié l'animation d'une conférence de concertation à M. François Lalanne, préfet en mission de service public, afin qu'il suive la concertation sur le canal, qui se trouve au carrefour d'enjeux économiques et écologiques. Mais, dans le rapport de concertation, « Devenir du Canal du Rhône à Sète », publié en février 2021, aucune action stratégique n'est définie pour l'avenir et le devenir du canal. Or le territoire est concerné par plusieurs enjeux environnementaux et climatiques. Se sont par ailleurs exprimées une série d'inquiétudes concernant les effets de cet ouvrage et de ses travaux d'entretien sur les espaces naturels environnants et le maintien de la qualité des eaux.
Je souhaite donc que le ministre nous présente un bilan des actions concrètes qui ont été menées et des orientations stratégiques qui ont été définies pour assurer l'exploitabilité des cinq scénarios présentés dans le rapport. J'appelle son attention sur la nécessité de prendre en compte, dans le projet, la réouverture de l'écluse de Beaucaire, afin, non seulement de développer l'attractivité touristique du Gard et du transport fluvial, mais aussi de répondre aux enjeux économiques pour les industries locales et aux problématiques environnementales.
Le maire de Beaucaire a sensibilisé à de multiples reprises l'État et les partenaires institutionnels à cette question. Son point de vue est largement partagé par les élus des autres communes situées sur le parcours du canal. Il ne manque finalement que la volonté de l'État pour avancer. Je souhaite donc savoir quelle fonction concrète le Gouvernement envisage de donner au canal. L'État a-t-il, enfin, la volonté d'avancer sur ce dossier ?
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la ville et du logement.
Le canal du Rhône à Sète est intégré au domaine public fluvial confié à l'opérateur Voies navigables de France (VNF). L'État participe donc, soit directement, soit par l'intermédiaire de VNF, à l'amélioration de la capacité de cet ouvrage par son inscription aux contrats de plan interrégionaux État-régions (CPIER). Ainsi, dans le cadre du CPIER 2007-2013, l'État a participé à hauteur de 20 millions d'euros à une programmation de 50 millions.
En 2010, un programme de modernisation permettant d'augmenter l'emport des bateaux a été déclaré d'utilité publique. Il a été prolongé par son inscription au CPIER 2015-2020 pour un montant de 34,4 millions d'euros, dont 8 millions à la charge de VNF. Ce programme n'a finalement pas pu être mené à bien du fait des difficultés structurelles affectant le canal, dont la principale réside dans l'effondrement des berges par érosion. À la suite de la mission confiée au Conseil général de l'environnement et du développement durable en 2019, le comité de pilotage réunissant l'État, la région Occitanie et l'opérateur VNF a acté le 28 avril 2021 un scénario plus modéré permettant le maintien de l'activité de fret, dont la première phase se déroulera entre 2021 et 2027 et comprendra la réalisation d'études et de travaux, pour un coût estimé à 53,2 millions d'euros. L'État prévoit de cofinancer cette première phase à hauteur de 27,4 millions par l'intermédiaire de VNF : cette proposition est incluse dans le mandat de négociation donné au préfet coordonnateur du prochain CPIER Rhône-Saône 2023-2027. En outre, VNF a déposé le 18 janvier 2023 auprès de l'Union européenne une demande de contribution à hauteur de 1,9 million d'euros dans le cadre du mécanisme pour l'interconnexion en Europe.
Le canal du Rhône à Sète, quoique bien moins connu, est, pour ainsi dire, le jumeau du canal du Midi. Vous n'avez pas tout à fait répondu à ma question, qui portait sur l'écluse de Beaucaire. En effet, malgré le nom qu'on donne au canal – canal du Rhône à Sète –, il serait plus exact de l'appeler le canal de Beaucaire à Sète, puisque Beaucaire est un cul-de-sac, l'écluse étant fermée. J'aimerais obtenir une réponse quant au devenir de cette écluse, dont l'ouverture, en concertation avec l'ensemble des acteurs, autoriserait le transport fluvial et le développement économique et touristique du territoire. Il s'agirait là d'un projet d'envergure.
La parole est à M. Loïc Prud'homme, pour exposer sa question, n° 368, relative à l'EPA Euratlantique.
Voilà plus de dix ans que ma circonscription subit de profondes transformations du fait des aménagements urbains menés par l'établissement public d'aménagement (EPA) Euratlantique, une opération d'intérêt national (OIN). Créé par Alain Juppé, alors maire de Bordeaux et obsédé par le projet de faire de sa ville une métropole millionnaire, ce programme d'aménagement démesuré est désormais à mi-parcours. Son bilan est désastreux, qu'il s'agisse de la méthode ou de la réalisation.
S'agissant de la méthode, les concertations ont été réduites au minimum. Elles n'ont offert aucune possibilité aux habitants et aux élus d'influer réellement sur des projets déjà ficelés par les promoteurs, avides de mètres carrés et influents auprès de l'opérateur public. Quant aux réalisations, elles procèdent d'un urbanisme du XX
Monsieur le ministre délégué chargé de la ville et du logement, les députés et les maires des territoires concernés par ces opérations, dont je fais partie, vous ont invité à venir voir par vous-même le résultat de ces dix ans d'urbanisme anachronique. Je profite de mon intervention pour renouveler cette invitation. L'année 2023 marque en effet une étape essentielle du programme d'aménagement : la feuille de route de l'EPA Euratlantique doit être renouvelée, et les orientations prises décideront de la trajectoire du projet pour les dix années à venir.
Changerez-vous la trajectoire du projet Euratlantique en prenant enfin en considération les réalités climatiques, les besoins du territoire et l'avis des habitants ? Quelle latitude financière laisserez-vous à cette OIN pour éviter que les promoteurs ne dictent demain leur urbanisme spéculatif à Bègles comme ils l'ont fait hier à Bordeaux ? L'aménagement du territoire et l'urbanisme sont des sujets éminemment politiques : je compte sur vous pour ne pas déléguer vos prérogatives aux promoteurs.
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la ville et du logement.
Je tiens d'abord à vous remercier de l'invitation que vous venez de renouveler. Lorsque mon agenda le permettra, je viendrai avec plaisir à la rencontre des élus et des équipes de Bordeaux Euratlantique afin de visiter les quartiers auxquels l'EPA a donné vie depuis sa création. J'ai d'ailleurs déjà eu l'occasion de m'y rendre lors du congrès de l'Union sociale pour l'habitat qui s'est tenu à Bordeaux en septembre 2021, étant alors président de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine. Nous n'avons pas tout à fait la même appréciation du travail mené, mais nous pourrons en discuter sur place.
L'OIN accompagne la dynamique impulsée par la ligne à grande vitesse et a pour enjeu le développement d'une ville durable et abordable. Or je suis convaincu qu'elle a réussi ce pari. Le prix des logements situés autour de la gare Saint-Jean reste inférieur au prix des autres zones d'aménagement de la métropole bordelaise et les logements sociaux conservent une place centrale dans ce quartier historiquement populaire. Par ailleurs, Bordeaux Euratlantique s'efforce d'associer le public à l'élaboration de ses projets grâce à de nouvelles dynamiques de concertation. Lors de chacune des nombreuses consultations effectuées, les contributions récoltées sont étudiées afin d'enrichir les projets et de repenser les actions mises en œuvre.
Les EPA, dont j'assure la tutelle, constituent des outils essentiels pour répondre aux enjeux écologiques, climatiques et sociaux. Ainsi, Bordeaux Euratlantique limite l'étalement urbain de la métropole ; je lui demande en outre de développer les espaces naturels en ville, de limiter les îlots de chaleur et d'inciter les promoteurs à anticiper les jalons de la réglementation environnementale RE2020. Ces orientations seront réaffirmées dans la nouvelle feuille de route de l'EPA dont l'action doit contribuer à la fabrication d'une ville solidaire et résiliente, à son adaptation au dérèglement climatique et à la préservation des ressources. Connaissant le précédent et l'actuel directeurs de l'EPA Euratlantique, je vous assure que la préservation des ressources, la limitation de l'étalement urbain ou encore le choix de matériaux biosourcés et de filières courtes constituent, pour eux comme pour moi, des préoccupations centrales.
La feuille de route est en cours de finalisation. Son élaboration se fait en étroite concertation avec les collectivités territoriales, dont la métropole de Bordeaux et les communes concernées.
Je prends acte de vos bonnes intentions et me réjouis de vous recevoir prochainement dans ma circonscription. Toutefois, nous avons besoin d'annonces concrètes : les gens sont fatigués de ces projets dans lesquels ils ne se reconnaissent pas. Je pense au collectif Amédée-Sacré-Cœur qui se bat toujours pour obtenir la construction d'un parc de 2 hectares dans son quartier entièrement bétonné. Il est urgent de faire en sorte que de telles demandes aboutissent. Monsieur le ministre délégué, il ne s'agit pas là de revendications isolées – des collectifs similaires existent également à Bègles ou encore à Floirac –, mais du symptôme du mécontentement généralisé que suscite l'urbanisation menée aux dépens des habitants.
La question de la latitude financière est donc primordiale : desserrerez-vous l'étau autour des finances de l'EPA pour lui permettre de mener une urbanisation en accord avec les nécessités du XXI
La parole est à Mme Marianne Maximi, pour exposer sa question, n° 369, relative aux réserves d'eau dans le Puy-de-Dôme.
Des villages où l'eau potable ne sort plus du robinet, mais de camions-citernes : cette scène se déroule non pas dans un pays étranger, mais bien dans plusieurs départements français, dont le mien, le Puy-de-Dôme. Plusieurs communes sont ravitaillées ainsi depuis plusieurs mois, comme d'ailleurs de nombreuses communes d'outre-mer, qui subissent cette situation en permanence.
Le Puy-de-Dôme et l'Auvergne ont longtemps été considérés comme le château d'eau de la France. Pourtant, force est de constater que le château d'eau commence à être à sec, notamment en raison de la sécheresse hivernale et de l'insuffisance des pluies récentes, qui n'ont pas permis de remplir des réserves d'eau particulièrement basses. Pour éviter une pénurie dangereuse et meurtrière cet été, le préfet a donc décidé de restreindre les usages de l'eau dans plus de quarante communes. Or seuls les habitants paieront le prix de ces premières mesures préventives – d'autres seront probablement prises dans les mois à venir. Ils se trouveront par exemple contraints de renoncer à arroser leur potager, ce qui est loin d'être anodin dans le contexte actuel d'inflation, ou d'attendre la rotation du camion-citerne pour disposer d'eau, comme c'est notamment le cas dans les communes de l'est du Puy-de-Dôme.
Pendant ce temps, d'autres disposent abondamment de la ressource en eau, comme l'usine Volvic du groupe Danone, qui peut continuer à puiser et ne doit réduire ses prélèvements que de 5 % malgré le risque de pénurie : un comble, lorsque l'on sait qu'une grande partie de sa production est exportée bien loin de la France. Alors que le manque d'eau se fera chaque année plus pressant, les autorités organisent l'accaparement de cette ressource par de grandes multinationales qui défendent leurs intérêts industriels, plutôt que de garantir sa disponibilité pour tous. La même logique est d'ailleurs à l'œuvre quand les pouvoirs publics défendent, envers et contre tous, des projets de mégabassines. Pas moins de vingt et un projets, dont un constituerait la plus grande mégabassine de France, sont à l'étude dans le seul Puy-de-Dôme, où l'eau manque pourtant déjà.
Si nous ne posons pas la question du partage équitable et durable de l'eau, nous courons droit à la catastrophe écologique et sociale. Le Gouvernement entend-il engager une nécessaire concertation locale pour organiser un partage équitable de l'eau dans tous les départements de France ?
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la ville et du logement.
Je connais bien le département du Puy-de-Dôme où, lorsque j'étais professeur de physique-chimie, en compagnie de mes collègues de sciences de la vie et de la terre, j'ai emmené régulièrement et avec plaisir des élèves faire des travaux de géologie et de sciences physiques. Or, s'il est vrai que ce département a malheureusement eu recours au citernage l'année dernière, ce n'est plus le cas depuis mars 2023, à la connaissance des services de l'État. Si certaines communes se trouvent toujours dans une telle nécessité, j'invite leur maire à se signaler auprès de l'Agence régionale de santé.
La gestion de l'eau est organisée par unité hydrologique et par bassin versant. Dans le secteur de Riom-Volvic au sujet duquel vous m'interrogez, les tensions constatées se limitent à la source d'eau potable dite du Goulet, qui n'alimente pas les points de prélèvements utilisés par la société des eaux de Volvic, situés sur un autre réseau hydrographique superficiel. L'arrêté de restriction ne visant que les usages de l'eau potable alimentée pour tout ou partie par la source du Goulet, il ne concerne pas directement la société des eaux de Volvic, à laquelle le préfet n'a demandé d'appliquer une réduction de 5 % de son autorisation mensuelle de prélèvement que pour des raisons de solidarité.
Au-delà de la gestion des périodes de sécheresse, le travail engagé par l'État pour assurer la durabilité de la ressource du bassin de Volvic s'inscrit dans le temps long et traduit les ambitions du plan « eau », qui tend à impulser un effort de sobriété concernant l'ensemble des usages de l'eau, notamment ceux qu'en font les acteurs économiques. Le préfet du Puy-de-Dôme a ainsi engagé un travail structurel de réduction des prélèvements de la Société des eaux de Volvic, qui a débouché fin 2021 sur un nouvel arrêté diminuant l'autorisation de prélèvement de 10 % à partir de 2022 et de 20 % à partir de 2025.
Enfin, s'agissant des quatorze projets d'ouvrages de stockage d'eau pour l'agriculture, la ligne du Gouvernement est claire : il faut à la fois mener des efforts de sobriété et optimiser la disponibilité de la ressource, car il n'y aura pas d'agriculture sans eau. En revanche, ces ouvrages doivent être compatibles avec le maintien d'un bon état écologique des milieux et des autres usages de l'eau et doivent donc, à ce titre, être discutés de manière transparente et concertée dans les territoires. Soyez assurée, madame la députée, que nous sommes tous engagés pour préserver l'eau, indispensable à notre santé, à notre économie et à nos écosystèmes.
Je prends acte de vos annonces, mais nous attendons toujours des actes. L'inaction est d'autant plus problématique que l'accaparement de la ressource en eau tend à s'accentuer dans de nombreux départements. Il n'y aura pas d'agriculture sans eau, dites-vous : certes, mais de quelle agriculture parlez-vous ? Aucune réflexion n'est menée, ni au niveau national, ni au niveau local, sur les types d'agriculture qui conduisent à accaparer l'eau. C'est un enjeu majeur pour les habitants non seulement du Puy-de-Dôme, mais aussi de la France entière, en métropole comme en outre-mer.
La parole est à M. Julien Bayou, pour exposer sa question, n° 364, relative à la qualité de l'air dans le réseau RATP.
Le 23 mai, des journalistes de l'émission d'investigation « Vert de rage » sur France 5 publiaient les résultats de leur étude sur la qualité de l'air dans le métro menée sous l'autorité d'un chercheur du Centre national de la recherche scientifique (CNRS). Ils ont analysé pendant de longs mois les 332 stations du réseau à l'heure de pointe. Leurs conclusions sont inquiétantes, alarmantes même. En moyenne, la concentration en particules fines dans les stations de métro est deux fois supérieure au seuil recommandé par l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Dans certaines stations, comme celle de Belleville, la concentration est même douze fois supérieure au seuil retenu par l'OMS. Il y a de quoi exprimer une inquiétude, voire une colère forte et justifiée pour les salariés de la RATP, conducteurs, agents d'accueil, ainsi que pour les agents de sécurité ou de ménage, qui sont exposés en permanence pendant leurs heures de travail à cet air pollué et donc à des maladies vasculaires et pulmonaires. C'est absolument inacceptable. Je ne sais pas si on mesure l'engagement de ceux qui exercent ces métiers, qui travaillent sans voir le jour et à des horaires décalés, au détriment parfois de leur vie familiale ; tout cela pour être finalement lâchés par les autorités de tutelle et exposés à des menaces pour leur santé.
Ils le sont de longue date, car – et c'est là le cœur du scandale – les premiers relevés, traités par l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), ont eu lieu entre 2003 et 2005 : il y a vingt ans ! Et les chiffres, parcellaires, étaient déjà alarmants. On savait que les conducteurs et les agents de maintenance, notamment, étaient exposés à des seuils de dix à quinze fois supérieurs à la norme. Ces résultats ont été tenus secrets au moins jusqu'en 2010. Non seulement l'État, Île-de-France Mobilités et la RATP n'ont pas entamé des recherches scientifiques, mais ils ont caché les résultats. Non seulement ils n'ont pas réalisé un état complet et précis de la situation, mais ils ne l'ont pas exposée de manière parfaitement transparente. Ils ont procrastiné pendant vingt ans au détriment de la santé de leurs usagers et salariés.
Monsieur le ministre délégué, pourquoi, alors qu'on est alerté depuis vingt ans, n'a-t-on rien fait ? N'a-t-on rien appris du scandale de l'amiante ou du chlordécone ? Dans le cas de la qualité de l'air, de nouveau, la société civile fait sa part. Il a fallu que la CFDT saisisse le Conseil d'État pour obtenir un début d'action, puis il a fallu l'enquête de « Vert de rage » soutenue par le syndicat Solidaires RATP pour obtenir des mesures précises ; ensuite, l'association Respire a porté plainte pour tromperie et blessures involontaires, de sorte que la RATP fait l'objet d'une enquête préliminaire. Toutefois, malgré toutes ces actions, alors même que nous disposons désormais de chiffres fiables qui établissent que les menaces sont réelles, il n'y a toujours pas de normes régissant la pollution dans les bâtiments intérieurs, c'est-à-dire pour les logements ou les établissements ferroviaires souterrains.
Monsieur le ministre délégué, que compte faire le Gouvernement pour se saisir enfin de ce sujet et pour que la région Île-de-France, présidée par Valérie Pécresse, pleinement alertée depuis plusieurs années, prenne enfin ce problème au sérieux ? Des investissements dans les métros de Taïwan ou de Corée du Sud ont permis de réduire radicalement et de manière très rapide les émissions. Comptez-vous soutenir des investissements de ce type dans les réseaux ferrés souterrains français ? Pour le groupe Écologiste – NUPES, l'enjeu est immense : il y va de la santé non seulement des agents de ces établissements, mais aussi de celle des usagers des transports franciliens, qui pourront prendre sereinement le métro ou le RER sans risquer leur santé.
Je termine donc. Que comptez-vous faire pour mettre en sécurité les salariés qui œuvrent chaque jour dans ces réseaux souterrains pour faire fonctionner un service de transports en commun efficace et indispensable à la transition écologique dans le pays ?
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la ville et du logement.
La pollution de l'air intérieur est un enjeu de santé publique important qui concerne la population générale, en particulier les personnes les plus fragiles et les personnes exposées du fait de leur activité professionnelle, vous l'avez rappelé. S'agissant de l'exposition des travailleurs dans les réseaux souterrains, l'Anses, saisie par le ministère chargé du travail, avait formulé dès 2015 des recommandations. Cet avis avait été complété en mai 2022 par un autre avis de l'Anses qui souligne que la littérature reste encore très limitée pour tirer des conclusions sur les effets sanitaires liés à l'exposition des usagers à la pollution de l'air dans les enceintes ferroviaires souterraines et qu'il n'est pas possible de définir des valeurs guides de qualité d'air intérieur spécifiques à l'exposition des usagers. L'Agence recommandait enfin le renforcement des dispositifs de surveillance existants.
Concernant l'exposition des usagers, l'Institut national de l'environnement industriel et des risques a élaboré un guide de recommandations pour la réalisation de mesures harmonisées de la qualité de l'air dans les enceintes ferroviaires. Ce guide, publié fin 2020, a pour but d'accompagner les opérateurs dans la caractérisation des niveaux de concentration de certains polluants. Pour l'application de ce guide, un comité de pilotage créé par le ministère chargé des transports réunit périodiquement les opérateurs de transports français, ce qui leur permet de partager leurs retours d'expérience. La RATP, ainsi que les autres opérateurs nationaux, ont déjà, pour la plupart, réalisé des mesures sur les quais et des mesures dans les rames, qui sont en train d'être finalisées. Un premier bilan et une version revue du guide sont prévus fin 2023.
Afin de continuer à améliorer la qualité de l'air dans les enceintes ferroviaires, les opérateurs fournissent des efforts tant sur les mesures que sur le matériel. D'une part, une surveillance continue est instaurée dans les stations et des capteurs sont installés sur les quais, dans les couloirs et dans les rames : les résultats de ces mesures seront rendus publics. D'autre part, le renouvellement des matériels roulants est accéléré ; des systèmes de freinage électriques qui émettent moins de particules sont utilisés et la ventilation est améliorée grâce à des systèmes de filtration plus performants.
La parole est à M. Sébastien Delogu, pour exposer sa question, n° 389, relative aux tarifs réglementés de l'énergie.
Six ans de Macronie sont vécus par notre peuple comme une éternité. Il faut dire – et j'en sais quelque chose – que la précarité et la misère allongent les journées : pour des millions de gens, après qu'ils ont durement travaillé le matin et l'après-midi pour faire vivre leur famille, vient chaque soir l'heure de la gamberge et des sacrifices. Manger à sa faim, payer le loyer, se chauffer lorsqu'il fait froid, se laver à l'eau chaude : les besoins élémentaires et donc la dignité de millions de nos concitoyens sont attaqués par votre politique. Dans ma circonscription, où les grandes copropriétés sont délabrées et nécessitent des opérations de requalification que vous avez promises mais qui ne sont toujours pas réalisées, où deux arrondissements affichent un taux de logements sociaux qui dépasse les 40 %, les associations des locataires privés des tarifs réglementés luttent pour leur droit à l'énergie. Entendez-vous la détresse de ceux, toujours plus nombreux, qui ne peuvent plus payer leur loyer, faute de salaire décent, ni régler les factures d'énergie à cause des prix devenus indécents ?
L'augmentation du prix des loyers et des charges transforme en luxe le droit au logement et à l'accès à l'énergie vitale, qui sont pourtant des droits fondamentaux de notre République. Comment osez-vous donner des leçons de constitutionnalité ou de République alors que vous bafouez les droits élémentaires des êtres humains ? Le 4 mai dernier, un an jour pour jour après sa création, la NUPES a voté, contre l'avis du Gouvernement, le rétablissement des tarifs réglementés de l'énergie, pour les très petites entreprises (TPE), les petites et moyennes entreprises (PME) et les bailleurs sociaux, ce qui implique une baisse concrète et massive des factures d'électricité pour des millions de personnes. Les locataires des logements sociaux – je pense à ceux que j'ai rencontrés à Marseille, à la Busserine, à la Solidarité, à Frais-Vallon, à Consolat et à la Viste –, ainsi que les boulangers, les bouchers, les artisans et les chefs d'entreprise des TPE et des PME qui entourent ces quartiers, attendent avec impatience l'application rapide de ces mesures vitales.
Monsieur le ministre délégué chargé de la ville et du logement, respecterez-vous le vote de la représentation nationale et accélérerez-vous l'application de ces mesures d'urgence attendues par des millions de Français ou utiliserez-vous, comme pour la réforme des retraites, tous les vices constitutionnels de la V
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la ville et du logement.
Je tiens d'abord à rappeler que, face à la plus grave crise énergétique que l'on ait connue depuis les derniers chocs pétroliers, le Gouvernement a pris des mesures très importantes pour protéger les consommateurs français des hausses des prix de l'énergie, ce qui leur a permis de payer leur énergie deux à trois fois moins cher que nos voisins européens. Par ailleurs, je souhaite casser un mythe : l'éligibilité à un tarif réglementé n'apporte pas en soi de protection contre les hausses de prix. Ce sont les dispositions adoptées par le Gouvernement qui apportent cette protection, grâce notamment au cadre d'urgence européen instauré l'année dernière. Pour vous donner un exemple très concret, le niveau du tarif réglementé de vente de l'électricité (TRVE) qui aurait dû s'appliquer au 1er février 2023 aurait conduit à un doublement des factures sans l'intervention de l'État. Au lieu de cela, le niveau du TRVE a augmenté de 15 %. L'État finance la différence, et ce choix est à l'honneur du Gouvernement.
Au lieu de laisser penser qu'il existe une solution miracle, le Gouvernement a apporté des réponses rapides et inédites : le bouclier tarifaire et le chèque énergie pour les ménages, qu'ils soient locataires ou propriétaires, avec un chauffage individuel ou collectif ; le bouclier tarifaire amortisseur et le plafonnement garanti à 280 euros le mégawattheure pour les entreprises, les associations et les collectivités locales ; des guichets d'aide pour les entreprises consommant beaucoup d'électricité.
Une réforme du marché de l'électricité se construit en ce moment à Bruxelles, pour que les consommateurs paient un coût de production cohérent avec les coûts réels de notre mix électrique. Monsieur le député, soyez assuré que le Gouvernement continuera, autant que possible, de protéger les Français de la hausse de l'énergie et du drame du mal logement, en particulier dans les copropriétés dégradées. Cependant, une opération d'intérêt national n'est efficace que si tous les acteurs sont d'accord pour la mettre en œuvre.
Monsieur le ministre délégué, toutes ces mesures ne sont que des artifices, car en compensant les hausses indécentes des prix décidées par les géants de l'énergie, vous faites payer par l'État, et donc par les contribuables, les superprofits records que ces grands groupes ont réalisés. En définitive, ce sont les classes moyennes et les classes populaires qui paient. Elles ont rempli les poches des actionnaires de 67 milliards d'euros l'année dernière, qui ont indûment été volés alors que la population se serrait la ceinture. En rétablissant les tarifs réglementés de l'énergie pour les TPE, les PME et les bailleurs sociaux, l'Assemblée nationale a voté la fin de cette gabegie. Les représentants du peuple se sont exprimés : c'est la démocratie. Appliquez ces mesures vitales !
La parole est à M. Charles Fournier, pour exposer sa question, n° 390, relative à la gestion de l'eau.
J'éprouve une certaine fierté à poser cette question, car elle a été élaborée par les soixante-quinze membres du parlement de circonscription que j'y ai réunis, après qu'ils ont mené des auditions sur l'eau. Cette initiative peut constituer une source d'inspiration pour redonner de la vitalité démocratique dans notre pays.
En Indre-et-Loire, la situation est alarmante : le Bureau de recherches géologiques et minières nous a annoncé que les nappes phréatiques sont au plus bas. Le manque d'eau s'accentue mois après mois, avec un déficit de précipitation de près de 60 % pour le mois de février. Le débit des cours d'eau a diminué entre 60 % et 90 % et le niveau des nappes a baissé, deux évolutions très préoccupantes observées au cours de la période hivernale 2022-2023. En conséquence, le département d'Indre-et-Loire a été placé en vigilance sécheresse à compter du 16 mars 2023, un mois plus tôt que l'année précédente.
Les citoyens composant le parlement de circonscription ont souhaité vous alerter, avec moi, au sujet des insuffisances du plan d'action du Gouvernement pour une gestion résiliente et concertée de l'eau. Premièrement, la qualité de l'eau est remise en cause par les pollutions chimiques qui affectent la santé de tous. En Indre-et-Loire, douze sites sont contaminés aux substances polyfluoroalkylées ou perfluoroalkylées (Pfas), des polluants dits éternels, selon une étude publiée par Forever Pollution Project en 2023. Or le sujet de la pollution de l'eau est le grand absent de votre plan d'action. Envisagez-vous d'appliquer le principe du pollueur-payeur, en taxant les pollutions agricoles et industrielles à la hauteur du coût des dommages environnementaux, sociaux et économiques qu'elles entraînent ?
Deuxièmement, vous indiquez qu'en phase d'installation de nouveaux agriculteurs sur des aires d'alimentation et de captage, les projets s'inscrivant dans une démarche agroécologique et d'agriculture biologique seront favorisés. Mais s'il faut entendre par là l'agriculture à haute valeur environnementale, cela ne nous semble pas du tout satisfaisant. Du reste, même l'agriculture biologique ne garantit pas, par exemple, contre l'utilisation du cuivre pour contrôler diverses maladies fongiques ou bactériennes, qui entraîne de vrais problèmes. Prévoyez-vous un cahier des charges plus strict en matière environnementale qui exclurait tous les intrants lors de l'installation de nouveaux agriculteurs sur des aires d'alimentation et de captage ?
Troisièmement, vous proposez une tarification progressive de l'eau, qui responsabilise ceux qui l'utilisent. Nous sommes d'accord avec le principe, mais nous pensons qu'il faut aller plus loin. Les premiers mètres cubes devraient être gratuits, comme dans la tarification progressive instaurée par la ville de Montpellier. Êtes-vous favorable à une telle tarification progressive ?
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la ville et du logement.
Je vous félicite, monsieur le député, de votre méthode participative : je profite d'ailleurs de cette occasion pour saluer les élèves présents dans les tribunes. Je m'assiérai ce soir, en Seine-Saint-Denis, à une table de quartier : vous savez à quel point je suis attaché à cette pédagogie, à quel point je souhaite une politique de la ville coconstruite avec les habitants.
Pour en revenir à notre sujet, vous savez qu'une large concertation auprès des parties prenantes a débouché sur un plan « eau » à trois axes : s'engager dans la sobriété, optimiser la disponibilité de la ressource et préserver sa qualité. La protection des ressources destinées à la production d'eau potable constitue une priorité du Gouvernement : une action forte et coordonnée est nécessaire pour que les aires d'alimentation et de captage soient pourvues d'outils visant à réduire la pression agricole sur les ressources utilisées pour la consommation humaine. Le plan « eau » met donc l'accent sur la prévention des pollutions agricoles au sein de ces aires, qui seront dotées d'ici à 2027 d'un plan de gestion de la sécurité sanitaire des eaux : cette démarche sera réalisée, en concertation avec les acteurs concernés, sous la responsabilité du responsable de la production et de la distribution de l'eau autour du captage. Le préfet prendra des mesures pour juguler le risque en cas de dépassement des seuils de qualité par un pesticide ou son métabolite, et pourra intervenir plus rapidement si les concentrations en nitrates s'approchent des seuils sanitaires. En outre, par l'intermédiaire des agences de l'eau, le soutien aux pratiques agricoles à bas niveau d'intrants sera renforcé, dans ces aires, de 100 millions d'euros.
Je vous rappelle également qu'une ordonnance, assortie de textes réglementaires, a été prise en décembre 2022 afin de transposer la directive européenne « eau potable » du 16 décembre 2020. Elle réaffirme le droit de chacun à bénéficier d'un accès quotidien à l'eau potable, et le décret du 29 décembre 2022, pour la première fois, exprime en chiffres la « quantité suffisante d'eau destinée à la consommation humaine » : entre 50 et 100 litres par jour et par personne – d'après l'Organisation mondiale de la santé, 50 litres sont nécessaires à des conditions de vie décentes, 100 litres à un réel confort. La tarification de l'eau relevant des collectivités, celles-ci peuvent prendre des mesures afin d'aider les foyers précaires à régler leurs factures d'eau. Un décret visant à faciliter l'accès aux données nécessaires à la mise en œuvre d'une politique sociale de l'eau est en cours de finalisation. Enfin, le Conseil économique, social et environnemental sera prochainement saisi en vue de recommandations conciliant impératifs sociaux et écologiques en matière de tarification progressive de l'eau.
Je vous invite, monsieur le ministre délégué, à vous intéresser au conseil local de sobriété énergétique dont s'est dotée la métropole de Tours : s'agissant de gestion de l'eau, c'est non pas un plan descendant qui pourra fonctionner, mais une logique ascendante, à laquelle soient associés tous les acteurs locaux. Vous êtes favorable à la participation des citoyens : en voilà un exemple.
La parole est à M. Hubert Wulfranc, pour exposer sa question, n° 365, relative au service express régional métropolitain à Rouen.
La loi du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités a fixé l'objectif d'un doublement de la part modale du ferroviaire dans les grands pôles urbains, d'où la priorité donnée au déploiement des services express régionaux métropolitains (Serm). La proposition de loi relative aux Serm, déposée le 25 avril par le président Zulesi et que notre assemblée examinera vendredi en séance publique, vise à leur conférer un statut, ainsi qu'un cadre de gouvernance propice à leur financement. La métropole rouennaise et sa périphérie sont directement concernées, puisque le Conseil d'orientation des infrastructures (COI) a retenu Rouen dans sa liste – mais la concrétisation de ce projet dépend de celle de la gare du quartier Saint-Sever, desservie par la future ligne nouvelle Paris-Normandie (LNPN). Une étude d'opportunité est en cours ; par ailleurs, un solide travail de diagnostic et de propositions de la part des organisations cheminotes et associations d'usagers a été rendu public.
Les lignes de transport express régional permettent de commencer dès à présent, par étapes, à matérialiser un tel projet, qui pourrait être achevé d'ici à dix ans. Il existe à Rouen une étoile ferroviaire composée de trois lignes : des travaux de rénovation et d'électrification, la réouverture d'un nombre limité de gares de desserte, l'aménagement de quelques pôles multimodaux, des liaisons rapides par bus suffiraient, à brève échéance, à préfigurer le Serm. Ce projet pénètre d'ailleurs largement dans les territoires périurbains, notamment les pays de Caux et de Bray. Compte tenu de son opportunité, puisqu'il anticiperait des réalisations très attendues de la population urbaine, de l'examen imminent de la proposition de loi que j'ai mentionnée et du fait que vient de débuter la négociation du volet « mobilités » des contrats de plan État-région (CPER) 2023-2027, je vous demande de bien vouloir vous saisir de la possibilité de concrétiser ce projet de Serm, sans le faire dépendre plus longtemps de celui de la nouvelle gare de Rouen.
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la ville et du logement.
Les Serm constituent une priorité du Gouvernement, comme l'a rappelé Mme la Première ministre, le 24 février, lors de la remise du rapport du COI. Bien que ce rapport ne le classe pas parmi les projets les plus matures, celui de Rouen fait partie des plus importants, ceux au sujet desquels ont été lancées des études financées par l'État aux côtés des collectivités. Le rapport rappelle également l'importance de son articulation avec la LNPN, nécessaire pour permettre à terme un véritable service de haut niveau. Cela n'empêche pas que les premières phases du projet, d'abord à infrastructures constantes, puis avec des aménagements de capacité de faible ampleur, soient prévues avant l'installation de la ligne et de la gare nouvelles. Les Serm constituant en premier lieu un projet de service, le fait de réaliser celui-ci de manière progressive, en commençant, lorsque cela est possible et pertinent, par accroître l'offre sans modifier les infrastructures, contribuera à ce que soit atteint l'objectif d'une concrétisation rapide.
Dès lors, si les collectivités conçoivent un projet cohérent, consensuel et correspondant aux critères retenus dans le texte définitif de la future loi, ce projet pourra bénéficier de ces dispositions sans attendre la mise en service de la LNPN. L'État est prêt à le soutenir financièrement dans le cadre du volet « mobilités » des CPER 2023-2027, comme cela est indiqué au préfet de région dans le mandat qui lui a été transmis : l'État sera au rendez-vous, monsieur le député, et connaissant notre attachement commun au transport ferroviaire, je ne doute pas non plus de votre soutien.
Je vous remercie beaucoup, monsieur le ministre délégué, de cette réponse nette. La séquence qui s'ouvre permettra effectivement d'approfondir le travail engagé, et j'apprécie d'autant plus votre propos que les attentes et les besoins d'une population telle que celle de la métropole industrielle de Rouen sont particulièrement prégnants : d'autres projets ayant trait aux mobilités, comme celui de zone à faibles émissions mobilité, y perturbent lourdement l'appréciation, par les usagers des transports, des facilités dont ils bénéficient. Enfin, le projet de Serm pourrait constituer une solution de rechange décisive par rapport au projet de contournement routier de Rouen, qui continue de faire couler beaucoup d'encre.
La parole est à M. Pierre Dharréville, pour exposer sa question, n° 366, relative au plan de prévention des risques technologiques.
Ma circonscription, terre d'industrie, compte plusieurs plans de prévention des risques technologiques (PPRT) : après Port-Saint-Louis-du-Rhône, après Fos-sur-Mer, Martigues et Port-de-Bouc – plus de 900 habitations en tout, soit l'un des plus vastes périmètres de France pour un tel plan – sont à leur tour concernées par celui relatif à la raffinerie de Lavéra, approuvé le 15 mai. Je ne reviendrai pas sur l'esprit de la loi du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages, dite loi Bachelot, qui vise plutôt à limiter les conséquences d'un accident industriel qu'à œuvrer en vue d'en réduire le risque, puisque les industriels ne sont tenus en la matière qu'à des travaux « économiquement acceptables ».
Je souhaite donc faire écho à l'inquiétude de nombreux riverains qui, dans ma circonscription, s'interrogent sur le caractère économiquement inacceptable pour eux de certaines dispositions, ainsi que sur leur efficacité. En vingt ans, dans l'ensemble du territoire, seuls 17 % des logements relevant d'un PPRT ont fait l'objet de travaux de renforcement. Il est manifeste que les dispositions législatives, parfois excessivement contraignantes pour les collectivités, sont insuffisantes concernant les propriétaires : ces travaux sont en effet subventionnés jusqu'à 10 % de la valeur du bien ou un montant de 20 000 euros, plafonds fixés en 2013 et jamais réévalués depuis. Compte tenu des pénuries, de l'inflation courante et de son explosion à la suite de la pandémie, leur inadaptation peut empêcher que le risque, comme le prévoit la loi, soit convenablement pris en compte, en particulier lorsque se cumulent plusieurs facteurs – toxique, thermique, surpression – ou que la zone est exposée à des effets de forte intensité.
Dès lors que le montant des travaux excède les plafonds de subvention, le propriétaire est contraint de faire des choix, alors même que l'on évoque une obligation de se protéger des risques. Certes, il est souvent aidé afin que cette hiérarchisation le pénalise aussi peu que possible ; reste que, pour finir, son habitation est moins protégée qu'il ne le faudrait, et le PPRT n'atteint pas sa pleine efficacité. Avez-vous étudié ma proposition de loi, déposée le 21 mars, visant à indexer sur l'inflation le montant de ces travaux ? Une autre condition de la réussite des PPRT réside dans l'accompagnement des riverains : il existe des exemples expérimentaux, notamment dans le cadre du PPRT relatif à l'usine Arkema de Saint-Menet, de guichet unique permettant la prise en charge intégrale des travaux. Pourquoi ne pas reconduire ces dispositions ? Enfin, il est également regrettable que les bailleurs sociaux, dont vous connaissez bien les difficultés, les artisans, commerçants, artisans, établissements recevant du public, ne soient absolument pas accompagnés en vue de la réalisation des travaux nécessaires.
Alors que notre pays s'engage dans la voie de la réindustrialisation, quelles mesures entendez-vous prendre afin de protéger au mieux nos concitoyens et de réduire le risque à la source ?
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la ville et du logement.
Monsieur le député, votre question s'adresse à Christophe Béchu, ministre de la transition écologique : vous me permettrez de répondre à sa place. Le montant alloué aux travaux dans un logement pour cause de PPRT est, en effet, plafonné à 20 000 euros ou à 10 % de la valeur de ce bien, car l'obligation de faire réaliser ces travaux concerne des zones où les risques sont suffisamment modérés pour qu'une lourde reprise du gros œuvre ne soit pas nécessaire. De fait, leur coût s'élève en moyenne à environ 4 000 euros par logement : ainsi, même en tenant compte de l'inflation, nous restons loin des plafonds, quoique ceux-ci soient atteints dans certains cas.
La réglementation actuelle fixe uniquement les participations minimales de la part des financeurs : elle permet des participations volontaires, notamment de la part des exploitants à l'origine du risque et de la part des collectivités territoriales concernées. Compte tenu du faible nombre de logements pour lesquels le montant des travaux de protection excéderait les plafonds, j'ai confiance en la capacité des acteurs locaux à trouver collectivement des accords permettant de financer ces travaux dans la mesure nécessaire.
Par ailleurs, l'État cofinance également des opérations d'accompagnement et de diagnostic de ces travaux, permettant que la totalité de l'enveloppe de financement soit consacrée aux seuls travaux. Pour prendre en compte l'inflation, il a récemment augmenté sa participation à la réalisation de ces actions de 1 500 à 1 700 euros par logement, voire à 2 000 euros dans le cas particulier des PPRT comptabilisant moins de vingt logements soumis à travaux.
S'agissant enfin des activités économiques riveraines, les travaux ne sont plus obligatoires au titre du code de l'environnement, depuis la modification législative du 22 octobre 2015. Ils sont néanmoins vivement recommandés, au regard des enjeux, et peuvent faire l'objet d'un dialogue spécifique avec les collectivités et avec l'industriel à l'origine du risque.
Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre délégué, mais je ne peux pas m'en satisfaire. Les montants des remboursements ont été fixés par la loi en 2013 : il ne vous aura pas échappé que de l'eau a coulé sous les ponts et qu'ils sont désormais inadaptés. Pour de nombreux riverains de ma circonscription, ils sont insuffisants, et cette insuffisance constitue un argument pour ne pas réaliser l'ensemble des travaux nécessaires. Ces montants n'ont plus aucun sens aujourd'hui, ce qui pose problème ; il faut les revoir. J'aimerais également que vous me répondiez, aujourd'hui ou plus tard, au sujet des bailleurs sociaux.
La parole est à M. Jean-Charles Larsonneur, pour exposer sa question, n° 391, relative aux locaux judiciaires à Brest.
Le tribunal judiciaire de Brest manque non seulement d'effectifs mais surtout de place. C'est un problème ancien qui s'aggrave, notamment parce que les compétences du tribunal se sont étendues avec l'arrivée du pôle régional spécialisé en matière d'atteintes à l'environnement. Il manque de place aujourd'hui pour les magistrats, pour les greffiers et pour les divers agents du tribunal. Les locaux ne sont suffisants ni pour déférer, ni pour accueillir le public. Un bâtiment appartenant aujourd'hui au conseil départemental, quasi mitoyen du palais de justice actuel, en plein centre-ville, pourrait offrir une solution de proximité à ce problème important.
La solution de plus long terme consisterait à construire une cité judiciaire à la périphérie de la ville. Elle ne réglerait cependant pas le problème avant longtemps, et n'irait pas dans le sens des objectifs que je défends et que le Gouvernement, je le crois, du moins, défend également : faire vivre le centre-ville et offrir aux citoyens une justice proche, au plus près de leurs besoins.
J'ai sollicité à plusieurs reprises le garde des sceaux et son cabinet. Le bâtiment situé en centre-ville est à céder depuis l'an dernier. Savez-vous où en sont les discussions et pourriez-vous nous éclairer sur les intentions du Gouvernement à ce sujet ?
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement et de la formation professionnels.
Comme vous le savez, monsieur le député, le garde des sceaux a fait du renforcement des moyens de la justice un axe majeur de son action depuis son arrivée à la tête du ministère. Le projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027, que vous aurez à examiner prochainement et que, je l'espère, vous voterez, prévoit ainsi un plan de recrutement historique de 10 000 agents durant le quinquennat, ainsi que des moyens substantiels pour accompagner l'arrivée de ces renforts sur le plan immobilier.
S'agissant de la situation des juridictions brestoises, des recherches immobilières étaient déjà en cours pour répondre au problème actuel de saturation du tribunal judiciaire, dans un contexte de création d'un nouveau pôle régional. Les perspectives de renfort ouvertes par le projet de loi de programmation nécessitent désormais la recherche de surfaces plus étendues, répondant de manière pérenne aux besoins du tribunal judiciaire tout en évitant une trop grande dispersion des services.
À cet égard, le bâtiment mis en vente par le conseil départemental du Finistère constitue assurément une opportunité intéressante. La première visite que les services du ministère de la justice y ont déjà effectuée a permis au garde des sceaux de signifier au président du conseil départemental et au maire de Brest l'intérêt de la Chancellerie. Il convient néanmoins d'attendre les conclusions d'une étude de faisabilité technique, qui est en cours. Celle-ci permettra de confirmer la capacité du site proposé à accueillir l'ensemble des renforts d'effectifs, récents et à venir, et de définir l'ampleur des travaux de réhabilitation nécessaires. Ses conclusions seront rendues d'ici à la fin du mois et le ministre de la justice ne manquera pas, le moment venu, de prendre la meilleure décision pour les magistrats, greffiers et agents du tribunal de Brest, ainsi que pour les concitoyens finistériens au nom desquels la justice est rendue.
Je vous remercie, madame la ministre déléguée, pour ce point de situation que je qualifierai d'encourageant. Je tiens à redire que l'ensemble des collectivités appuient cette solution, qui permettrait de favoriser la proximité des citoyens avec la justice : l'ensemble des parties prenantes y sont très favorables. J'ajoute enfin que la situation dure depuis trop longtemps et qu'il est urgent désormais de trouver une solution rapide permettant d'apporter à tous nos concitoyens une justice proche, en centre-ville.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour exposer sa question, n° 388, relative au centre pénitentiaire de Béziers.
Ma question s'adressait initialement au garde des sceaux. Depuis de nombreux mois maintenant, le centre pénitentiaire de Béziers est le lieu d'un important trafic de stupéfiants. En témoignent les importantes saisies de résine de cannabis, dont je tiens la liste à disposition du ministre. Le 2 octobre dernier, 648 grammes ont été saisis ; le 27 octobre, 900 ; le 13 novembre, 500 ; le 4 décembre, 498 ; le 22 et le 24 février, 375. La liste des saisies, en réalité bien plus longue, démontre à elle seule l'existence de trafics de stupéfiants structurés et de grande ampleur à destination du centre pénitentiaire.
Les envois de colis sont réguliers. Ils ont lieu quasiment toutes les nuits. Tous les jours ou presque, une échelle est collée sur le mur d'enceinte de la prison. Dès que l'on en retire une, une autre réapparaît le lendemain. Les lanceurs de colis parviennent ainsi à escalader le mur antiprojections et lancent ensuite le colis dans l'enceinte de la prison. Malheureusement, le temps que les surveillants arrivent, les détenus parviennent à récupérer les paquets en moins de dix minutes avec – il faut bien le reconnaître – une certaine habileté.
Ces trafics incessants ont pour conséquence directe une charge de travail très importante pour le commissariat de police de Béziers qui, en l'absence d'augmentation de ses effectifs, ne peut plus absorber l'ensemble des incidents en détention liés aux stupéfiants. La chaîne judiciaire pénale est également fortement mobilisée. La quasi-totalité des réponses pénales apportées sont d'une grande fermeté dès lors que sont identifiés les auteurs de trafics – y compris à l'encontre des projeteurs, mêmes mineurs, qui font presque systématiquement l'objet d'un déferrement.
Lors de ma dernière rencontre avec la directrice du centre pénitentiaire de Béziers et avec le directeur interrégional des services pénitentiaires de Toulouse, à la fin du mois d'avril, nous avons une nouvelle fois évoqué la nécessité de mettre en place des dispositifs antiprojections enfin efficaces, le plus rapidement possible. Il semblerait même que les crédits permettant de les installer soient disponibles ! Il ne manque que l'accord du garde des sceaux. Quand donnera-t-il enfin son feu vert ?
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement et de la formation professionnels.
Construit en 2009, le centre pénitentiaire de Béziers possède une capacité d'accueil de 810 places et héberge actuellement 975 détenus. Son taux d'occupation a connu une baisse, passant de 133 % au 1er juin 2022 à 120 % en juin 2023. Cet établissement a fait l'objet de travaux d'envergure ces dernières années. Ceux-ci ont visé le remplacement d'un certain nombre de dispositifs de surveillance, comme les œilletons, mais aussi la création, en 2022, de nouveaux locaux pour accueillir les équipes locales de sécurité pénitentiaire. En outre, un quartier de semi-liberté hors enceinte de vingt et une places, pour lequel le montant des travaux a atteint 4 millions d'euros, sera livré dans le courant de l'année 2023.
S'agissant du problème particulier que vous évoquez, un mur antiprojections a été construit en 2018 pour un montant de 1,27 million d'euros. Une expression de besoin a également été émise, en vue d'installer un filet antiprojections. Que les choses soient claires : cette expression de besoin a été formulée dans de nombreuses prisons, partout en France. Le déploiement de filets antiprojections est donc une priorité nationale. Pour preuve, dix-sept opérations de ce type – extensions de filets ou renforcement de grillages, notamment – ont été réalisées en 2022 pour 6 millions d'euros. Ont ainsi bénéficié de ces travaux les établissements – pour n'en citer que quelques-uns – de Périgueux, de Béthune, d'Avignon et de Toulon. S'agissant de Béziers, le garde des sceaux étudiera avec une grande attention les résultats de l'expertise en cours pour envisager de nouvelles solutions.
La situation actuelle est telle, madame la ministre déléguée, que les détenus en arrivent à se moquer littéralement de l'administration pénitentiaire. Au centre pénitentiaire, je les ai vus lancer des sortes de cannes à pêche pour récupérer des colis. Ils vont très vite et l'habileté dont je vous parle n'est pas qu'un mot : elle est réelle. Le nombre de dossiers en attente au commissariat augmente toujours davantage. Les policiers ont l'impression d'un puits sans fond et, il faut bien le dire, considèrent qu'ils perdent leur temps en procédures. À chaque fois que l'administration pénitentiaire récupère un colis, elle contacte en effet les agents du commissariat de police nationale de Béziers qui sont obligés de se déplacer et de réaliser une procédure de saisie, qui représente une perte de temps considérable pour eux. Les agents de la justice ont, eux aussi, une impression terrible de gâchis : en effet, le problème pourrait aisément être réglé ou, à tout le moins, circonscrit. Au lieu de cela, les dossiers du centre pénitentiaire prennent beaucoup de temps aux services du tribunal qui – c'est tout à leur honneur – ne veulent pas laisser ces actes impunis.
Pour en avoir discuté avec le directeur interrégional des services pénitentiaires de Toulouse, je sais que les crédits sont disponibles. Je remercie M. le garde des sceaux de porter une attention particulière à l'amélioration des dispositifs mais aujourd'hui, il faut prendre une décision. Nous n'attendons plus une attention particulière mais une décision du ministère de la justice et la réalisation des travaux. Une expérimentation est en cours dans d'autres centres pénitentiaires, fort bien. Mais Béziers a vraiment besoin de travaux car c'est toute la chaîne englobant la police, la justice et l'administration pénitentiaire qui est pénalisée au quotidien. Cela ne peut plus durer.
La parole est à Mme Chantal Jourdan, pour exposer sa question, n° 387, relative à l'encadrement pédagogique dans les lycées professionnels.
Je souhaite aujourd'hui appeler votre attention, madame la ministre déléguée, sur la situation du lycée professionnel Marcel-Mézen à Alençon. Ce lycée de 360 élèves propose des formations de qualité dans les domaines de l'automobile, du transport et de la logistique, ainsi que de la chaudronnerie. Le poste de proviseur adjoint y sera supprimé à la prochaine rentrée, alors que les effectifs restent constants. Dans un territoire dont la fragilité sociale est bien connue, dans un établissement engagé pour l'intégration des élèves allophones ou ayant des parcours d'enseignement spécialisé en unité localisée pour l'inclusion scolaire par exemple, le proviseur adjoint joue un rôle essentiel. La disparition de ce poste entraînera indéniablement une baisse du niveau d'encadrement et, par voie de conséquence, un amoindrissement des chances de réussite scolaire des jeunes. L'attention particulière promise par les services du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse à l'égard des équipes de l'établissement ne compenserait qu'en partie la perte d'un poste clé.
Une telle nouvelle, concomitante des annonces récentes concernant la future réforme du lycée professionnel, a un effet délétère sur le moral des enseignants. Ceux-ci ne disposent que de peu d'éléments quant à l'application de cette dernière, prévue en partie pour la rentrée 2023. J'aimerais d'ailleurs savoir si le Gouvernement envisage de saisir le Parlement à ce sujet.
Dans un tel contexte, il me semble qu'une attention particulière doit être portée au bon fonctionnement et à la cohésion des équipes pédagogiques. Globalement, les lycées professionnels accueillent un public en difficulté scolaire, qu'il faut épauler. Les familles des élèves y étant plus fragiles, il est nécessaire d'être en relation constante avec elles. Le proviseur adjoint joue un rôle de médiation et d'orientation essentiel. Aussi ma question est-elle la suivante : sur quel accompagnement l'équipe pédagogique du lycée Marcel-Mézen peut-elle compter concrètement pour l'accomplissement des missions du proviseur adjoint ? Une révision de la suppression du poste est-elle envisagée ? Plus globalement, quels engagements peuvent être pris pour améliorer le dialogue avec les équipes, afin que celles-ci soient entendues et qu'elles puissent mener à bien leurs missions éducatives ?
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement et de la formation professionnels.
La réforme du lycée professionnel a été construite à partir non seulement d'un diagnostic précis et d'une large consultation des parties prenantes, mais aussi des discussions régulières que j'ai eues avec le Parlement, à qui j'ai fait part de l'avancement des travaux et du projet de réforme que je conduis lors de plusieurs points d'étape : le 14 novembre dernier dans le cadre d'un débat sur la voie professionnelle au Sénat, puis le 9 janvier, le 28 février et le 30 mai à l'Assemblée nationale, à l'occasion de débats et d'auditions. Je rappelle que les moyens consacrés à la réforme de la voie professionnelle sont inédits : 1 milliard d'euros supplémentaires par an, soit une hausse de 20 % des crédits budgétaires alloués à cette filière afin de la valoriser. Ces moyens iront à l'ensemble des professeurs et équipes pédagogiques des établissements.
J'en viens au cas précis du lycée professionnel Marcel-Mezen d'Alençon. Cet établissement connaît une baisse continue des effectifs depuis 2016, le nombre d'élèves étant passé de 412 à 343 à la rentrée 2022, soit une baisse de 16 %. Au reste, la diminution des effectifs concerne toute l'académie de Normandie et a conduit l'autorité académique à adapter l'implantation globale des emplois de personnel de direction sur le territoire. La suppression du poste d'adjoint au chef d'établissement du lycée Marcel-Mezen s'inscrit dans ce cadre. Notons que sur les 185 lycées professionnels de catégorie identique à celle du lycée Marcel-Mezen, seuls 40 % disposent d'un poste d'adjoint.
Cependant, la structure de l'équipe de direction doit être considérée de manière globale : y interviennent également, autour du chef d'établissement, l'adjoint gestionnaire, les conseillers principaux d'éducation (CPE) ainsi que le ou les directeurs délégués aux formations professionnelles et technologiques – DDFPT. Lors de la prochaine rentrée scolaire, l'académie accompagnera cet établissement par l'attribution d'un CPE et d'un DDFPT supplémentaires, pour garantir le bon fonctionnement et la cohésion des équipes pédagogiques.
Enfin, dans le cadre de la réforme du lycée professionnel, des responsables des bureaux des entreprises, dont le rôle est de renforcer le lien entre les établissements et les acteurs économiques, seront recrutés. Une campagne a été lancée en ce sens la semaine dernière, partout en France. Comme la plupart des lycées professionnels, le lycée Marcel-Mezen sera concerné par cette mesure.
Je vous remercie pour ces éclaircissements mais permettez-moi de revenir sur les effectifs. Il est vrai qu'ils ont baissé, mais ce n'est pas le cas de la rentrée 2023 par rapport à la rentrée 2022. Vous comprendrez donc les fortes inquiétudes de l'équipe éducative. De surcroît, le lycée Marcel-Mezen se trouve dans un territoire très particulier et reçoit un public en grande difficulté. La collectivité fait beaucoup pour maintenir le lien social et la situation se stabilise, mais la présence du proviseur adjoint est essentielle pour nourrir la relation avec les familles qui, pour beaucoup, ont des parcours difficiles : pour elles, le lien avec l'équipe pédagogique ne va pas toujours de soi. Le rôle de médiation du proviseur adjoint s'inscrit donc dans le travail accompli au quotidien par l'établissement, et il est indispensable à l'accompagnement des élèves. J'y insiste : ce poste est nécessaire.
La parole est à Mme Valérie Bazin-Malgras, pour exposer sa question, n° 372, relative au conditionnement du RSA.
Alors que le Président de la République souhaite convaincre les Français de la réussite de sa politique de réindustrialisation, de nombreuses questions restent en suspens, comme celle de l'emploi. Dès lors, nous ne pouvons qu'accueillir avec bienveillance l'annonce de l'installation d'une immense usine de batteries électriques et de la création de 3 000 emplois directs dans le Nord. Pour le reste du tissu industriel français, cependant, c'est encore une année de vaches maigres. Combien de PME n'arrivent pas à recruter ? Combien d'entreprises ne trouvent pas les employés qualifiés dont elles ont besoin pour donner suite à leurs commandes, et doivent embaucher des intérimaires à l'étranger ? Dans l'industrie française, 61 000 postes restent à pourvoir.
Ces chiffres font écho à d'autres : au premier trimestre 2023, le taux de chômage s'élève à 7,1 % de la population active. Pourtant, plus de 1,9 million de foyers sont bénéficiaires du RSA. Nombreux sont les secteurs manufacturiers où le taux de difficulté à recruter est le plus fort : couvreurs, menuisiers, postes dans le secteur du bâtiment et des travaux publics, ingénieurs, chaudronniers, tôliers, métalliers, forgerons qualifiés pour l'industrie en général, mécaniciens et électroniciens du secteur automobile, en particulier. Même dans le secteur textile – comme dans mon département –, on recrute mais on manque de main-d'œuvre.
Selon l'Insee, 67 % des chefs d'entreprise déclarent rencontrer des difficultés de recrutement. La réforme France Travail, annoncée mercredi 7 juin pour une entrée en vigueur le 1er janvier 2024, donne aux bénéficiaires du RSA l'obligation de s'inscrire à Pôle emploi. Cependant, si l'on veut réellement mettre un point d'honneur à accélérer la réindustrialisation, il faut directement orienter les bénéficiaires du RSA vers des formations professionnelles dans des secteurs qui recrutent et qui rémunèrent correctement, afin que la RSA soit un revenu pour rebondir et non pour stagner.
Qu'attendez-vous pour répondre à la demande des entreprises, qui veulent embaucher, pour redonner espoir à ces quelque 2 millions de Français qu'on laisse chaque jour un peu plus en marge de la société active ? Le Gouvernement doit saisir ce problème à bras-le-corps et orienter en priorité les bénéficiaires du RSA vers des formations qualifiantes pour les aider à se réinsérer par le travail et pour l'économie française.
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement et de la formation professionnels.
Le marché du travail se heurte à d'intenses difficultés de recrutement. Le premier facteur d'explication tient à la forte dynamique de création d'emplois depuis la fin de la crise : plus de 1,3 million d'emplois ont été créés. Ce rythme est resté très vif au premier trimestre, avec plus de 100 000 emplois créés.
Cette situation impose de renforcer l'orientation et la formation des demandeurs d'emploi pour répondre aux besoins des entreprises, notamment dans les secteurs en tension. À cet égard, le ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion, Olivier Dussopt, le ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées, Jean-Christophe Combe, et la ministre déléguée chargée des personnes handicapées, Geneviève Darrieussecq, ont présenté au Conseil des ministres de la semaine dernière le projet de loi pour le plein emploi. Il vise à déployer les grands principes qui permettront une amélioration substantielle de l'offre de services proposée aux personnes en recherche d'emploi ainsi qu'aux entreprises. En prévoyant des moyens et une gouvernance qui contribueront à atteindre les objectifs de plein emploi, la France se dotera d'un système qui permettra d'aider concrètement chaque personne à accéder à l'autonomie et à la dignité par le travail, et chaque entreprise à recruter dans un contexte où nombre d'entre elles disent rencontrer des difficultés pour pourvoir leurs postes.
Les parcours des demandeurs d'emploi se structureront autour d'un nouveau contrat d'engagement de toutes les personnes inscrites auprès de l'opérateur France Travail, unifié autour d'un socle commun de droits et devoirs. Ce contrat sera coconstruit avec chaque demandeur d'emploi, ses objectifs et sa durée seront adaptés au projet conçu en commun et, en contrepartie, le bénéficiaire du RSA devra s'engager à suivre le parcours d'insertion établi avec lui, faute de quoi son allocation pourra être suspendue ou supprimée.
En somme, France Travail répondra aux transformations profondes que connaît le monde du travail, aux nouveaux défis des compétences ainsi qu'aux nouveaux défis technologiques et environnementaux qui se présentent à tous les territoires français.
Je vous remercie pour votre réponse mais s'agissant du RSA, le torchon brûle ! Il faut aller très vite. On laisse des gens en déshérence, la société ne s'occupe pas d'eux et, parallèlement, des entreprises ont besoin de main-d'œuvre. Que le Gouvernement se dépêche de faire en sorte que ces gens soient pris en compte et que nos entreprises trouvent des personnes à former !
Il en va de même dans le secteur de l'aide à la personne : les postes à pourvoir sont très nombreux et, là encore, les bénéficiaires du RSA pourraient aider, mais on les laisse, sans rien faire. De grâce, mettez les bouchées doubles car il faut vraiment avancer !
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Discussion de la proposition de résolution, déposée en application de l'article 34-1 de la Constitution, relative à l'accord commercial entre l'Union européenne et le Mercosur ;
Suite de la discussion de la proposition de loi visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels.
La séance est levée.
La séance est levée à douze heures dix.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra