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Intervention de Philippe Juvin

Séance en hémicycle du mardi 13 juin 2023 à 9h00
Questions orales sans débat — Insertion professionnelle des jeunes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Juvin :

Lorsqu'on demande aux chefs d'entreprise quel est leur principal problème, ils répondent tous qu'ils ne parviennent pas à embaucher, ce qui est proprement invraisemblable et extravagant quand on sait que notre pays compte 5 millions de chômeurs.

L'une des raisons expliquant ce phénomène est probablement l'inadéquation de notre système de formation avec les besoins réels du pays. Pour y remédier, le groupe Les Républicains souhaite formuler trois propositions, sur lesquelles il aimerait connaître votre avis, madame la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Nous proposons pour commencer la fermeture des filières qui conduisent à une impasse. Les sciences sociales sont à cet égard intéressantes en ce qu'elles concentrent 30 % des étudiants en master 2, mais seulement 2 % des postes de chercheur en entreprise. En effet, les chercheurs dont nous avons besoin ne sont pas des chercheurs en sciences sociales, mais en physique, en chimie, en médecine, ou en informatique. Fermez donc des filières dans ce premier domaine et ouvrez-en dans les autres.

Notre deuxième proposition a trait aux diplômes. En France, créer un diplôme demeure en effet une entreprise compliquée, nécessitant des mois, voire des années lorsque le diplôme est complexe ; et le temps qu'il voie le jour, le monde a changé, tout comme les besoins. Ainsi faudrait-il que nous parvenions ensemble à raccourcir les délais de création des diplômes, en accélérant leur validation, en ouvrant la possibilité de les valider a posteriori pour gagner du temps – même si des dispositifs sont actuellement en vigueur dans ce domaine –, voire en donnant aux entreprises la liberté de créer leurs propres diplômes. Notre appareil de formation doit s'adapter aussi vite qu'évoluent les besoins du monde.

Enfin, troisième aspect, ayez une vision des vrais besoins du pays. Je sais que vous y travaillez, mais j'aimerais que nous fassions le point sur cette question, car mon impression est que nous avançons dans le noir, comme des somnambules.

Je rappelle que les entreprises doivent se doter de ce qu'on appelle une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC). L'expression est un peu barbare, mais elle signifie que les entreprises s'efforcent de se projeter en identifiant leurs besoins à un an, cinq ans, dix ans. La nation doit faire la même chose et se demander de combien de chauffeurs de bus, de couvreurs, de physiciens, de chimistes, de chercheurs dans le domaine nucléaire elle aura besoin dans cinq ans et dans dix ans. C'est à cette condition que nous cesserons d'avancer à tâtons et que nous pourrons adapter notre système universitaire et nos écoles aux besoins réels du pays.

J'insiste, il est absolument fondamental d'améliorer l'adaptation de notre système de formation au monde qui change : à défaut, nous continuerons d'avoir des millions de chômeurs d'un côté, et des millions de chefs d'entreprise incapables de recruter de l'autre. Et quand je parle de chefs d'entreprise, j'inclus dans cette dénomination les directeurs d'hôpital, les maires, les patrons de collectivité locale qui cherchent à recruter des profils qui n'existent actuellement pas sur le marché du travail.

Je le répète une nouvelle fois : l'adéquation entre la formation et les besoins réels du monde constitue une condition absolument fondamentale de la prospérité du pays.

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