Commission des affaires étrangères

Réunion du mercredi 3 mai 2023 à 9h00

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • LPM
  • dissuasion
  • influence
  • loi de programmation
  • militaire
  • programmation militaire
  • stratégique

La réunion

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La commission procède à l'examen pour avis, ouvert à la presse, et au vote des articles 1er à 10, 20, 21, 24 et 28 du projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2024 à 2030 et portant diverses dispositions intéressant la défense (n° 1033).

Présidence de M. Jean-Louis Bourlanges, président

La séance est ouverte à 9 h 00

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Compte tenu du champ de compétences de la commission des affaires étrangères prévu à l'article 36 du règlement de notre assemblée, nous nous prononcerons sur l'intégralité des dispositions du projet de loi de programmation militaire pour les années 2024 à 2030 relatives aux objectifs de la politique de défense et à la programmation financière, c'est-à-dire sur les articles 1 à 10, rapport annexé inclus, ainsi que sur les dispositions diverses comportant un lien étroit avec les enjeux internationaux suivis par notre commission, soit les articles 20, 21, 24 et 28 du texte.

Le point de vue de notre commission est déterminant pour apprécier l'adéquation des moyens accordés à nos forces armées pour les sept années à venir avec les objectifs stratégiques, diplomatiques et politiques de notre pays. Nous avons déjà eu l'occasion de débattre de ce sujet et nous avons eu un échange avec le ministre des armées.

L'enjeu financier est considérable, puisque le budget de nos forces armées sera porté à 413 milliards d'euros, soit une augmentation de plus de 100 milliards. Ces chiffres attestent un effort de réarmement substantiel.

Du point de vue de la procédure, la commission de la défense nationale et des forces armées, qui est saisie au fond, examinera le texte à compter du mardi 9 mai. L'échéance du délai de dépôt des amendements auprès de celle-ci est fixée à demain dix-sept heures. Aussi, pour que la position de notre commission et les amendements que nous adopterons puissent être pris en compte, il est impératif que nous ayons achevé nos travaux aujourd'hui. Je regrette que la convocation n'ait pu vous être adressée qu'après que le Conseil constitutionnel se soit prononcé sur l'étude d'impact, conformément à la saisine en ce sens du 12 avril 2023, consécutive à la demande de la conférence des présidents. Je ne me prononcerai pas sur le fond de cette procédure mais celle-ci a mécaniquement entraîné un raccourcissement des délais, dont nous subissons les conséquences.

Aucun des soixante-quatorze amendements déposés n'a été déclaré irrecevable au titre de l'article 40 de la Constitution. Un seul, l'amendement AE52, a été exclu de nos débats, car il était sans lien avec le champ de notre saisine.

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Je vous remercie, chers collègues, de m'avoir confié la mission de rapporteure pour avis de notre commission sur le projet de loi de programmation militaire (LPM), une responsabilité que j'avais déjà eue sous la précédente législature. À cette occasion, j'avais porté mon attention sur l'Europe de la défense, dont l'accélération amorcée au cours du dernier quinquennat avait été renforcée par la guerre en Ukraine. Pour le présent projet de LPM, mon rapport comportera un point particulier sur l'influence en tant que nouvelle fonction stratégique. Il me semble ainsi montrer que les travaux de notre commission complètent utilement ceux de la commission de la défense nationale et des forces armées.

Ce projet de loi de programmation militaire est présenté alors que se produisent plusieurs grandes bascules dans le paysage de la conflictualité mondiale ; je vous remercie à nouveau, monsieur le président, d'avoir récemment organisé une journée d'auditions, qui a été très éclairante pour notre commission. Pour rester au meilleur niveau, notre modèle d'armée doit simultanément relever deux défis : l'intensité croissante des nouveaux conflits et l'extension des champs de la confrontation. C'est pourquoi l'on parle d'une LPM de « transformation ».

Nous sortons, depuis la fin de la guerre froide, de trois décennies de réduction des moyens consacrés à la défense nationale. Entre 2008 et 2019, le ministère des armées a ainsi perdu plus de 60 000 emplois, soit 20 % de ses effectifs. Dans ce contexte, la LPM 2019-2025 a engagé la « réparation » de notre outil de défense par l'augmentation progressive du budget des armées, la création de 6 000 emplois et le comblement des lacunes capacitaires les plus criantes.

La Cour des comptes a confirmé que le niveau des dépenses programmées avait été intégralement respecté, ce qui est totalement inédit. Le Parlement peut être salué : il s'est assuré, lors de l'examen de chaque projet de loi de finances, que la LPM était exécutée à l'euro près, et même « surexécutée » dans le contexte d'inflation faible, voire négative, que nous connaissions. En 2023, même si la marche était plus élevée, le budget des armées a bien progressé de 3 milliards d'euros, conformément à ce qui était prévu.

Malheureusement, depuis l'adoption de la précédente loi de programmation militaire, l'environnement international s'est profondément dégradé. La revue nationale stratégique adoptée fin 2022 montre que, de la zone indo-pacifique au Sahel ou en Europe avec la guerre en Ukraine, les tensions se sont aggravées partout dans le monde.

Le projet de loi de programmation militaire qui nous est soumis est le plus ambitieux depuis la fin de la guerre froide. Après la phase de réparation, il nous fait entrer dans une phase de transformation des armées. Avec des besoins programmés à hauteur de 413,3 milliards d'euros, il dépassera les 2 % du produit intérieur brut (PIB) dès 2025 – désormais non plus un objectif, mais un seuil. Par ailleurs, l'aide à l'Ukraine et l'effet d'une éventuelle hausse du prix des carburants sont exclus de la programmation et ne pèseront donc pas sur le budget des armées.

Les effectifs connaîtront une hausse, notamment au bénéfice du renseignement et de la cyberdéfense. La réserve fera l'objet d'un effort important, l'objectif à terme étant de disposer d'un militaire de réserve pour deux militaires d'active.

Des choix capacitaires cohérents concilieront le souci de la masse et de la sophistication : un dilemme qui a été parfaitement exposé au cours du cycle d'auditions que nous avons mené. S'agissant de la masse, l'accent sera mis sur l'artillerie, la défense sol-air, les drones et, malgré un étalement des cibles, sur les blindés, les frégates et les avions de chasse. La sophistication passera par la modernisation de la dissuasion nucléaire, la construction d'un nouveau porte-avions, la poursuite du système de combat aérien du futur (SCAF) et du système principal de combat terrestre (MGCS), le renouvellement des capacités spatiales et la prise en compte des nouveaux espaces de conflictualité liées à l'intelligence artificielle, au quantique ou au métavers.

Le projet de loi contient également des mesures normatives, dont certaines intéressent directement la politique étrangère. L'article 20, en particulier, renforce le contrôle sur les reconversions de nos militaires à l'étranger. Il n'est pas acceptable que ceux-ci puissent concourir au renforcement des capacités de nos compétiteurs.

La seconde partie de mon rapport est consacrée au rôle joué par les armées dans la nouvelle fonction stratégique qu'est l'influence. Contrairement au Quai d'Orsay, le ministère des armées ne s'est pas encore doté d'une feuille de route à ce sujet. Je propose donc des pistes pour l'élaborer, en lien avec le ministère des affaires étrangères et de façon interministérielle.

La revue nationale stratégique témoigne d'une prise de conscience et d'une ambition en ce qu'elle a érigé l'influence en fonction stratégique, à côté des cinq fonctions stratégiques traditionnelles. L'influence est donc un sujet diplomatico-militaire. Nous faisons de l'influence en formant des militaires étrangers ou en développant l'interopérabilité avec des partenaires européens et africains. Les spécificités que présente le ministère des armées ne permettent pas de lui dupliquer complètement la feuille de route du Quai d'Orsay ; il en faut une qui lui soit propre.

La confrontation internationale s'est étendue au champ des perceptions, ce qui explique que l'influence ait acquis une telle importance. Nos compétiteurs utilisent désormais tous les leviers de l'influence à des fins stratégiques ; c'est probablement la fin du soft power. Cette tendance est particulièrement forte dans le domaine de l'information. Comme les démocraties le sont généralement, nous sommes sur la défensive face à cette évolution.

L'influence française n'est pas nécessairement en recul à l'échelle de la planète mais elle l'est dans la région stratégique du Sahel, où le sentiment anti-français progresse. J'y ai consacré l'essentiel de mes travaux et effectué un déplacement. Nous devons structurer une stratégie nationale d'influence intégrant les priorités que nos armées auront définies.

Laissant de côté le sujet de la désinformation, qui a été parfaitement traité par l'adoption d'une doctrine de lutte informatique d'influence en octobre 2021, je propose plusieurs axes de réflexion.

D'abord, l'accueil des stagiaires étrangers dans les écoles militaires françaises, qui favorise la création de liens humains durables et la coopération militaire sur le long terme avec nos partenaires. Politique méconnue, elle souffre de plusieurs limites que j'ai pu observer en visite aux écoles militaires de Saumur, notamment au regard des capacités et des conditions d'accueil. Je ne suis pas certaine que nous devions nous inspirer des États-Unis, qui offrent un per diem mais j'ai identifié quelques pistes d'amélioration. Depuis la mise en place de l'embasement, qui a retiré au commandement ses prérogatives en la matière, il est par exemple difficile de servir un repas chaud le week-end. Or ces personnes n'ont souvent pas d'autre option pour se restaurer. Nous présentons également un défaut de réciprocité : nous accueillons beaucoup d'élèves étrangers, venant notamment d'Afrique, mais nous envoyons peu d'élèves en scolarité hors les murs, ce qu'attendent pourtant nos partenaires, comme j'ai pu le constater en Mauritanie.

Ensuite, le réseau de personnels militaires insérés dans des organisations internationales ou dans les structures d'état-major de pays partenaires doit être renforcé. Nous avons beaucoup trop réduit la voilure dans ce domaine, laissant la place à d'autres, comme la Chine. Or nous n'arriverons à rien tant que le choix d'une mobilité à l'étranger restera aussi risqué pour la carrière d'un militaire. Je souhaite donc que ces mobilités internationales au sein de nos armées puissent être revalorisées.

Nos armées doivent aussi avoir des priorités sur le plan géographique. En Afrique, la réduction de notre présence militaire doit avoir pour corollaire le renforcement de nos leviers d'influence, en étant plus à l'écoute des besoins de nos partenaires et en renouvelant notre offre de coopération, notamment dans le domaine de la formation. Au niveau régional, l'outre-mer est la région la plus pourvoyeuse de soldats au sein de nos armées. À titre personnel, j'entretiens un lien particulier avec ces territoires, dont étaient originaires de nombreux soldats placés sous mes ordres. Je me félicite que la LPM y renforce nos moyens militaires car il s'agissait d'une de nos grandes faiblesses. Ces moyens devront être utilisés pour affirmer notre influence en Afrique de l'Est ou dans les îles du Pacifique. Je propose, par exemple, la création de centres de cadets de la défense ouverts aux pays situés dans le voisinage de nos territoires.

D'importants chantiers sont devant nous. Le texte qui nous est soumis est à la hauteur du changement d'époque et nous donnera les moyens de les conduire. Sans surprise, j'appelle donc à voter en faveur de ce projet de loi.

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Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

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Le travail de Mme la rapporteure pour avis met en évidence l'importance cruciale de cette loi de programmation militaire pour le statut international de la France ; nous le saluons.

Parmi les conflits qui se multiplient dans le monde, celui du Soudan a dernièrement été l'occasion pour nos forces armées de s'illustrer par leur courage et leur expertise. Entre le 22 et le 26 avril, dans le cadre de l'opération Sagittaire, elles ont évacué près de 900 personnes de quatre-vingt nationalités différentes, dont notre personnel diplomatique et nos ressortissants. Ce savoir-faire opérationnel suppose d'avoir des moyens suffisants pour agir en autonomie et des corps d'armée à la pointe de la technologie.

Bien que la précédente loi de programmation militaire ait permis une remise à niveau, nous devons faire face à une course à l'armement, au développement de conflits hybrides et au retour de la guerre de haute intensité. Une actualisation de nos moyens est donc vitale pour notre pays. Le projet de loi de programmation 2024-2030 et son budget inédit de 413 milliards d'euros consolident le passage d'un sous-investissement chronique à un renforcement conséquent de nos capacités de défense. Ce renforcement passe également par la définition de notre modèle d'armée, par notre conception de la dissuasion nucléaire et surtout par notre souveraineté industrielle, grâce à nos partenaires nationaux. Les véhicules issus du programme Scorpion, en cours de déploiement, la conception des sous-marins nucléaires lanceurs d'engins de troisième génération ou le projet de porte-avions de nouvelle génération témoignent de la qualité de notre base industrielle et technologique de défense (BITD).

Le projet de LPM est porteur de nombreuses avancées qui contribueront à sauvegarder notre statut de puissance d'équilibre et notre autonomie stratégique, en consolidant nos atouts dans le nucléaire, nos services de renseignement et nos forces spéciales. Il répond à un besoin de transformation de nos capacités de défense. Dans ses articles 3, 4 et 6, il consacre l'augmentation graduelle des effectifs, les ressources financières allouées aux opérations extérieures et le renforcement de la réserve opérationnelle, en fixant l'objectif d'un militaire de réserve pour deux militaires d'active.

Les défis du XXIe siècle ne sont pas non plus oubliés. Pour faire face à la militarisation croissante de ces environnements, des investissements de 4 et 6 milliards d'euros sont respectivement prévus pour notre cyberdéfense et nos opérations spatiales. Les autres articles que nous examinerons vont dans le même sens. L'article 20 préserve l'expertise sensible de nos anciens militaires de toute tentative d'espionnage, tandis que l'article 24 sécurise l'approvisionnement de nos armées en matériels stratégiques.

Cette loi de programmation représente un progrès significatif pour notre défense nationale et notre souveraineté. Le groupe Renaissance sera donc au rendez-vous pour soutenir nos armées et aligner la dimension budgétaire avec nos ambitions.

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Je vous remercie d'avoir salué le professionnalisme de nos soldats lors de l'opération Sagittaire.

Vous avez mentionné la dissuasion nucléaire, qui est pour nous une ligne de fracture positive. Pour citer Sun Tzu, « L'art de la guerre, c'est de soumettre l'ennemi sans combat ». La dissuasion nucléaire joue pleinement ce rôle.

Je soutiens également les projets de porte-avions de nouvelle génération ou de sous-marins nucléaires lanceurs d'engins (SNLE) de troisième génération. On peut certes s'interroger sur leur pertinence : pour le même budget, ne serait-il pas plus judicieux d'acquérir de nombreuses nouvelles frégates ? L'expérience du Royaume-Uni montre cependant que, compte tenu de la rapidité des évolutions technologiques, une compétence abandonnée ne peut pas être rattrapée.

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Ce projet de loi de programmation militaire tente d'enrayer la dynamique d'affaiblissement de nos armées. Toutefois, les efforts budgétaires n'ont pas été prévus en euros constants ni assortis d'une clause de sauvegarde. Ils seront donc en grande partie absorbés par l'inflation, qui est sans doute appelée à durer. Par ailleurs, leur mise en œuvre interviendra principalement au cours du prochain quinquennat : il est toujours plus facile de demander des efforts aux autres !

Si nous nous rejoignons sur la nécessité de renforcer nos armées, nous pensons qu'il faut le faire de manière cohérente. Or nous émettons des inquiétudes face aux insuffisances de ce texte, notamment en matière de préservation de notre souveraineté.

Si, pour minimiser les coûts et augmenter nos capacités de recherche, certaines coopérations industrielles apparaissent souhaitables, elles ne doivent pas être motivées par un idéalisme politique ou, pire, mener au sacrifice d'une partie de notre industrie de la défense, ce que nous risquons de faire en poursuivant le développement du SCAF et du MGCS. Ces projets ne correspondent pas à notre modèle d'armée et peuvent mettre en péril notre approvisionnement en matériels produits souverainement. Des coopérations fructueuses pourraient, en revanche, être envisagées avec des pays dont le modèle d'armée est comparable au nôtre, comme le Royaume-Uni, ou avec lesquels nous avons déjà des partenariats, comme les Émirats arabes unis.

La LPM doit permettre à nos armées de faire face à des conflits de haute intensité dans tous les milieux, ce qui suppose de préserver leur capacité de projection intacte. Les effectifs doivent être revus à la hausse, en les fidélisant et en valorisant les métiers. Nos stocks de munitions et de carburant doivent assurer le maintien en condition opérationnelle, afin de répondre à l'éventualité de l'engagement de nos forces. Une remise à niveau générale des infrastructures militaires est nécessaire. Tel sera le sens de nos amendements et interventions.

Pour atteindre ces objectifs, une politique industrielle nationale doit également être encouragée, par la stimulation de la recherche, la création d'un fonds souverain de la défense ou la refonte des dispositifs de soutien à l'exportation.

Les conflits et les instabilités géopolitiques nous alertent sur l'urgence de conforter et de consolider notre outil de défense et notre modèle d'armée complet, en conservant la dissuasion nucléaire comme pilier. Le constat est unanime : les forces armées françaises sont sollicitées au-delà de leurs moyens et de leur contrat opérationnel. Nous espérons que nos travaux parlementaires permettront d'améliorer cette LPM, afin que nos armées puissent relever les défis de demain.

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Nous avons de nombreux points d'accord : l'augmentation des effectifs, le carburant préservé de l'inflation, les besoins infinis pour améliorer le quotidien du casernement. Je partage également votre appréciation s'agissant du modèle d'armée complet et de la place de la dissuasion nucléaire.

Les enjeux européens constituent, en revanche, une ligne de fracture politique entre nous. Dans un contexte d'intensification des menaces et d'élargissement du spectre de la conflictualité, l'Europe me semble être une partie de la solution, alors que vous la considérez comme une partie du problème. La complexité du SCAF ou du MGCS est liée au fait que ce sont des systèmes interconnectés ; nous devons les penser en Européens.

Vous avez souligné que l'effort était principalement réalisé en fin de quinquennat. Il en était déjà ainsi de la LPM précédente, puisque la marche la plus élevée était en 2023. Elle a pourtant été respectée à l'euro près. Notre responsabilité collective est de nous assurer, à chaque projet de loi de finances, que le budget prévu est effectivement voté.

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La parole revient à La France Insoumise, mais il me semble, monsieur Ruffin, que vous souhaitiez poser plusieurs questions à la rapporteure pour avis et non faire une intervention au nom de votre groupe.

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Une question, naïve, m'est venue lorsque le président de la République a présenté ce projet de LPM. Le budget des armées va revenir à 3 % du PIB, comme au moment de la guerre froide. À l'époque, nous avions un ennemi clairement identifié : l'Union soviétique. Qu'en est-il aujourd'hui ?

Lors de son intervention, le président de la République a évoqué de manière très vague les « dangers de notre temps ». Quels sont-ils ? Qu'est-ce qui justifie ce réarmement ? Pour votre part, vous avez fait référence à un « élargissement du spectre de la conflictualité », ce qui est également très vague. S'agit-il de se préparer à un conflit avec la Russie, avec la Chine, ou en tout cas avec des puissances étatiques identifiées ? S'agit-il de faire face à de la guérilla terroriste ?

Quel bilan pouvons-nous tirer de nos interventions en Afrique ? Les problèmes que nous avons rencontrés sont-ils liés à un manque de moyens militaires ou, au contraire, au fait d'avoir déployé des moyens militaires à un moment où nous aurions dû miser sur la diplomatie ?

Identifier nos adversaires me semble indispensable pour savoir quel type de guerre nous pourrions mener et nous armer en vue de cette guerre-là.

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Vos questions sont légitimes. Nous les avons posées lors de nos séances d'auditions, avec des experts puis avec le ministre, et nous avons longuement débattu de ces sujets. La rapporteure pour avis ne pourra pas vous apporter toutes les réponses en quelques minutes.

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Je vais essayer d'être plus précise concernant la notion de « spectre de conflictualité ». Pendant des siècles, nous avons pensé la guerre dans trois environnements : terre, air et mer. Ils se sont toutefois élargis au fil du temps avec l'ajout de la menace nucléaire, radiologique, biologique et chimique (NRBC), puis du cyber et du spatial : des satellites butineurs sont désormais capables de capter du renseignement directement sur d'autres satellites. De nouveaux espaces de conflictualité continuent d'apparaître, comme l'intelligence artificielle ou le métavers. J'aurais également pu mentionner le milieu sous-marin. La compréhension de tous ces environnements est de plus en plus difficile ; il ne s'agit plus seulement d'étudier des nivelés comme en milieu terrestre.

Les dangers sont identifiés dans le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale, qui fait référence aux « menaces de la force » et aux « risques de la faiblesse ». Malheureusement, il est rare de choisir son adversaire.

Dans mon rapport, j'ai donné mon avis concernant le bilan des armées interventionnistes, la nôtre ou d'autres armées occidentales : il est très nuancé. Déjà, dans mon précédent rapport, je soutenais le continuum entre sécurité et développement. Très peu de conflits sont résolus par les armes. Clausewitz disait : « La guerre n'est que la continuation de la politique par d'autres moyens ». L'inverse me semble également vrai.

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Je remercie notre rapporteure pour avis pour la qualité de son travail et ses explications très intéressantes concernant les stratégies d'influence, dont nous avons longtemps ignoré l'importance.

Le projet de LPM prévoit des moyens importants en faveur de la dissuasion nucléaire, de l'espace ou du renseignement militaire. Ces éléments sont très positifs mais je regrette que l'essentiel de l'effort budgétaire ait été reporté après 2027. C'est aujourd'hui que nous avons besoin de moyens supplémentaires. Il faut tirer toutes les leçons de la guerre en Ukraine, combler nos lacunes en munitions, en canons ou en défenses antiaériennes. Nous constatons avec inquiétude des reports de calendrier. Le passage au tout-Rafale ne sera pas atteint durant cette LPM. La marine nationale disposera de moins de frégates que prévu. L'armée de terre subit aussi des réductions de cibles préoccupantes, notamment pour les véhicules blindés.

Nous regrettons que l'effort ne soit pas plus important et plus rapide. La France veut amener son budget de défense à 2 % du PIB, alors que le Royaume-Uni va le porter à 2,5 %. D'autres pays, comme la Pologne, ont engagé un effort de réarmement particulièrement important. Quant à l'Allemagne, elle a annoncé 100 milliards d'euros de dépenses à brève échéance. La France doit faire plus pour répondre à la situation de guerre qui frappe l'Europe.

Nous avons, en outre, relevé d'autres sujets d'inquiétude : l'inflation, qui représentera au moins 30 milliards d'euros et dont les mécanismes de compensation prévus sont trop limités, mais aussi les recettes extrabudgétaires, qui sont floues et devront être précisées pour éviter de nouveaux renoncements.

Je rappellerai enfin notre attachement à une actualisation de la LPM par la loi. S'agissant d'un sujet aussi important, nous ne pouvons pas nous contenter d'un simple débat, comme ce fut le cas en 2021.

Nous abordons ce débat avec responsabilité et conviction. Nous ferons des propositions permettant d'améliorer ce texte car nous savons qu'il représente un moment important pour notre nation. Nous devons tous être au rendez-vous.

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Nous avons beaucoup de points d'accord, notamment concernant l'importance des enjeux d'influence ou de la dissuasion.

Le passage au tout-Rafale et l'arrivée de frégates ou de blindés sont effectivement retardés. Pour avoir exercé à la tête d'un pôle logistique au sein de nos armées, je sais toutefois à quel point il est important de disposer des moyens de maintenance et des munitions qui correspondent à nos matériels. Il ne sert à rien d'avoir un char Leclerc s'il est équipé d'une baïonnette ! Si tout l'environnement des matériels prévus peut être mis en œuvre, ces reports n'auront pas de conséquences opérationnelles.

S'agissant des moyens inscrits dans la LPM, il ne tient qu'à nous de les voter lors des différents projets de loi de finances. Je partage également votre point de vue quant à la nécessité de procéder à l'actualisation par la loi. La place du Parlement est d'autant plus importante qu'il s'agit d'un texte de transformation. Des caps technologiques vont être franchis, en particulier dans le spatial, sur lequel j'ai beaucoup travaillé dans le cadre du volet parlementaire de la présidence française du Conseil de l'Union européenne.

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Je vous remercie pour la qualité de votre rapport et pour le sujet que vous avez choisi d'approfondir. Nous ne le savons que trop bien dans cette commission, la guerre informationnelle sera un enjeu majeur dans les conflits de demain. Si elles ne veulent pas perdre leur capacité d'action, notre diplomatie et nos armées doivent rester vigilantes.

Concernant le projet de loi de programmation militaire, le groupe Démocrate se réjouit de la hausse des moyens alloués à nos armées. La France leur consacrera près de 69 milliards d'euros en 2030. Il s'agit donc d'un effort important que la nation prévoit de faire pour assurer sa défense et surtout pour garantir son indépendance, notamment grâce à la dissuasion nucléaire.

Beaucoup préféraient utiliser cet argent pour transformer les armées françaises en forces dotées de nombreux chars, avions ou autres canons. La LPM 2024-2030 fait le choix de la raison. Les investissements massifs dans les munitions, le renseignement ou le maintien en condition opérationnelle ne sont que les conséquences tirées du conflit ukrainien. Celui-ci a maintes fois démontré que l'efficacité et l'ingéniosité l'emportaient sur le nombre.

Dans la continuité des travaux engagés au cours de la précédente législature, ce projet de loi accentue les investissements en matière d'innovation et de renouvellement de nos équipements, afin de garder des armées compétitives. Loin du cliché de la guerre de tranchées, l'Ukraine nous aura rappelé l'importance du spatial, des drones ou du cyber pour gagner les conflits du XXIe siècle.

La France entend rester une nation souveraine, gardant la maîtrise de sa dissuasion nucléaire et profitant de ce moteur pour innover, grâce à ses sous-marins lanceurs d'engins ou à son porte-avions de nouvelle génération. Ces équipements sont essentiels pour lui permettre de conserver son statut. Toutefois, notre volonté d'indépendance ne doit pas nous faire perdre de vue l'importance des partenariats.

Le groupe Démocrate est particulièrement attaché au concept d'autonomie stratégique européenne, ardemment défendue par le président de la République et qui semble enfin être entendu depuis le début de l'invasion russe en Ukraine. Si l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN) reste une alliance essentielle pour la France, les pays européens ne resteront des acteurs majeurs du monde de demain que s'ils s'unissent pour bâtir une politique de défense commune et cohérente. Au-delà des programmes SCAF ou MGCS, qui doivent en être une vitrine, nous devons poursuivre nos efforts pour mutualiser nos achats de munitions et bâtir des projets industriels à l'échelle du continent.

Vous l'aurez compris, le groupe Démocrate soutiendra ce projet de loi, qui prépare une France forte dans une Europe renforcée.

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Plusieurs interventions ont déploré que la hausse des moyens intervienne principalement en fin de période. Je vous remercie d'avoir insisté sur l'effort prévu dans le cadre de cette nouvelle LPM, le plus important depuis la fin de la guerre froide. Plutôt que de se focaliser sur le calendrier, je pense qu'il s'agit de l'élément sur lequel nous devons mettre l'accent.

Vous avez rappelé ce à quoi ce budget était destiné. Je sais que votre groupe proposera différents amendements concernant les enjeux de souveraineté et la place de l'Europe de la défense. Je partage votre vision dans ces domaines et je les soutiendrai. Je suis convaincue que l'union fait la force. Si la défense européenne se pense avec l'OTAN, elle doit conserver une liberté d'appréciation. Elle doit être davantage indépendante, pour être en mesure de réagir si l'OTAN décidait de ne pas intervenir là où la sécurité européenne le nécessiterait.

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Avec nos collègues commissaires socialistes de la défense, nous avons relevé plusieurs aléas financiers, économiques et internationaux que nous chercherons à atténuer par le biais d'amendements. Nous avons également constaté des reports, qui, dans un contexte mondial de plus en plus conflictuel, risquent d'affecter l'ambition d'armée complète et renouvelée d'ici à 2030.

Nous aurons l'occasion de revenir au cours des débats sur l'aléa politique de ce texte. Du fait de ses bornes temporelles, de 2024 à 2030, il enjambera l'échéance de 2027. Tous les groupes ont salué la bonne exécution et le respect des engagements de la précédente LPM ; s'agissant de ce nouveau texte, nous souhaiterions toutefois inverser le rythme des engagements financiers, afin de nous assurer que l'ambition ne sera pas amoindrie.

Nous proposerons également deux clauses de revoyure, au lieu d'une seule en 2027. La première, en 2026, permettrait de dresser, avant la fin de l'actuelle législature, un bilan à mi-parcours ; la seconde interviendrait au cours de l'année 2028, après l'élection présidentielle, pour adapter la programmation aux priorités du prochain président et se projeter dans l'après-2030.

Avec mes collègues socialistes et apparentés, nous serons extrêmement vigilants lors de l'examen de ce texte. Nous nous assurerons que la crédibilité de nos armées, qui sont l'un des instruments essentiels de notre diplomatie, est préservée.

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Concernant les reports de livraison de certains équipements, j'ai précisé tout à l'heure les enjeux liés à la disponibilité de l'ensemble de leur environnement opérationnel. D'ailleurs, le président de la République a demandé à notre base industrielle et technologique de défense de se mettre en mode d'économie de guerre, pour être plus rustique et efficace.

Comme vous l'avez indiqué, une clause de revoyure en 2027 n'est pas forcément la plus pertinente. Nous le savons, tous les nouveaux présidents de la République débutent leur quinquennat avec un nouveau livre blanc, une nouvelle revue stratégique et donc une nouvelle loi de programmation militaire. Nous reviendrons sur la place que le Parlement peut prendre dans le suivi de ce texte lors de l'examen des amendements.

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Ce projet de loi de programmation militaire est ambitieux, justifié et inédit.

La défense française s'est longtemps articulée autour de la dissuasion nucléaire et a bénéficié des dividendes de la paix mais notre environnement se caractérise désormais par une dégradation du contexte géopolitique : la guerre est de retour en Europe, de nouvelles menaces émergent et des puissances rivales de la France et de l'Europe développent des stratégies d'influence sur nos terrains opérationnels en Afrique, en Méditerranée et dans la zone indopacifique. Cette actualité ainsi que les sauts technologiques dans les domaines de la robotique, des drones et, bientôt, de la technologie quantique et de l'intelligence artificielle nous invitent à repenser notre modèle de défense et à l'accompagner massivement. L'effort financier de 413 milliards d'euros qui se déploiera jusqu'en 2030 ne peut que nous rassembler.

S'agissant des ressources humaines, la création de 6 300 postes durant la période et l'adaptation du régime d'accès à la réserve permettront de poursuivre un effort de formation et de spécialisation de nos forces. La formation devra aussi s'étendre à l'international pour permettre, notamment dans le cadre de la réévaluation de nos partenariats en Afrique, à des officiers de pays alliés de bénéficier de l'expertise française.

Cette future LPM constitue une pierre importante dans la refonte de notre modèle de défense, y compris dans son volet normatif. Les articles 20 et 21, par exemple, encouragent le dialogue entre nos services de renseignement et l'autorité judiciaire, notamment dans les enquêtes pour crime contre l'humanité, et empêchent que nos officiers occupant des fonctions sensibles ne puissent trop facilement proposer en fin de carrière leurs services à des puissances étrangères. L'article 24 organise la priorité accordée à notre défense en matière de livraison et de constitution de stocks stratégiques.

Pour toutes ces raisons, le groupe Horizons et apparentés votera en faveur de ce texte.

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Je vous remercie d'avoir insisté sur la défense de nos valeurs. J'ai beaucoup travaillé sur ce sujet pour la partie thématique de mon rapport. Pour garantir la bonne compréhension de la politique française et notre influence, il est important que nos valeurs ne soient pas à géométrie variable. J'ai défini un triptyque de l'influence, qui repose sur l'exemplarité, l'ouverture aux partenaires et à leurs attentes, ainsi que notre indépendance d'appréciation.

Parmi les nouveaux espaces de conflictualité, vous avez évoqué les drones. Nous sommes face à un dilemme opposant la nécessité de ne pas avoir de décrochage technologique et celle de maintenir la rusticité de nos moyens. Lors de notre cycle d'auditions, j'ai eu l'occasion d'évoquer l'influence qu'avait eu sur notre doctrine le chercheur Henrotin, auteur d'un article intitulé « Le drone, figure aérienne du mal ? » Est-il possible de juger d'une technologie avec des valeurs ? Le sens d'une arme réside dans la manière dont elle est utilisée par rapport aux règles d'engagement. Les a priori qui conduisent à mettre d'emblée certaines technologies de côté risquent d'entraîner un décrochage mortifère : on l'a vu avec les drones. Lors de mon déplacement en Mauritanie, j'ai pu constater que des drones capables de surveiller des milliers de kilomètres de frontières constituaient la principale demande des autorités. Trouver un équilibre entre technologie et rusticité de nos moyens sera l'un des enjeux du quinquennat.

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Votre rapport est édifiant à la fois concernant nos convergences et nos divergences.

Compte tenu de l'évolution du contexte géostratégique, investir dans nos armées est évidemment nécessaire. Le monde est en pleine mutation et nous devons anticiper la place que la France prendra en son sein. Nous avons également pour objectif d'accentuer les efforts de coopération européenne, notamment pour échapper à toute forme de dépendance vis-à-vis des États-Unis ou d'une autre puissance.

S'agissant de la BITD, je pense cependant que nous devons aller beaucoup plus loin et construire dès maintenant l'Europe de la défense, stratégique et souveraine. Elle sera le véhicule des valeurs démocratiques de la France et permettra de garantir une sécurité collective et autonome face aux grands blocs. Même si des divergences fondamentales existent au sein de l'Union européenne, en particulier avec les pays qui ont vu l'extrême droite arriver au pouvoir, le modèle fédéral européen me semble être le seul capable de nous positionner sur l'échiquier mondial comme une puissance de premier plan.

Il est indéniable que la France a perdu de son influence. Si nous partageons le constat général, les raisons avancées pour l'expliquer me semblent présenter un paradoxe. Vous admettez la persistance d'un esprit colonial dans l'imaginaire des militaires français, sans reconnaître qu'il fonde en partie la vision stratégique qui nous a conduits à la situation actuelle. La Russie, avec d'autres pays, décrédibilise l'action de la France en Afrique. Tout en ayant recours à des méthodes peu recommandables, ces pays surfent avant tout sur nos erreurs, que nous n'admettons que timidement et dont nous ne sommes pas capables de tirer des enseignements.

Selon votre rapport, la France est accusée d'avoir un double discours en Afrique et des valeurs à géométrie variable en fonction de ses intérêts. De fait, comment qualifier autrement la politique du président de la République vis-à-vis de certains États africains ? Après avoir proclamé depuis l'Élysée une réinvention de nos relations avec le continent, celui-ci a effectué une tournée catastrophique aux accents néocolonialistes, donnant la priorité au commerce et s'affichant tout sourire avec des dictateurs qui n'hésitent pas à massacrer leurs opposants, comme au Gabon.

Avant d'évoquer notre « supériorité dans le champ informationnel », nous devons faire preuve de vigilance et observer une forme d'humilité. S'il faut évidemment lutter contre la désinformation et être les vecteurs de valeurs démocratiques et humanistes, nous n'en devons pas moins porter un regard clair sur nos actions, en particulier sur nos erreurs. Il faut être lucide pour pouvoir répondre sans tomber dans le discours de propagande d'une vérité unique.

S'agissant de l'engagement des armées dans la stratégie d'influence de la France, il faudrait commencer par un rééquilibrage. Je partage la nécessité de redonner des moyens à nos armées mais l'influence doit rester la prérogative principale du Quai d'Orsay. Ce dernier subit depuis trop longtemps des coupes budgétaires, qui l'ont profondément abîmé. Notre action extérieure ne peut pas reposer seulement sur le pilier militaire et celui-ci ne peut pas s'arroger les missions de nos ambassadeurs.

Reconnaître que le monde change n'est pas admettre l'inéluctabilité d'un conflit majeur. Partout où elle peut l'être, la paix doit être préservée.

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Je me réjouis de nos convergences. Depuis 2017, l'Europe de la défense a beaucoup plus avancé qu'au cours des vingt ou trente années passées. Je peux citer l'Initiative européenne d'intervention ou le Fonds européen de la défense, qui a notamment profité au domaine spatial.

Nous ne choisissons pas notre héritage mais il nous appartient de l'intégrer pour penser l'avenir. C'est le journaliste Rémi Carayol qui m'a fait part de ce logiciel colonialiste qui animerait certains officiers. Il est évidemment choquant de lancer « Vive la coloniale ! » à la fin d'un briefing avec nos collègues du G5 Sahel, d'autant plus que l'immense majorité de nos anciennes colonies ont choisi le jour de leur indépendance comme fête nationale. Dans mon rapport, j'ai insisté sur le rôle que doivent jouer l'encadrement et le corps enseignant des écoles militaires. Ils ne doivent pas être « en roue libre ».

Le partenariat avec l'Afrique est bien réinventé. La France est le seul pays à avoir encore des bases militaires dans d'anciennes colonies. Pour en avoir parlé avec certains de nos collègues élus des Français de l'étranger, il n'y a pas forcément de souhait de voir partir nos forces armées ; il s'agit de trouver un équilibre, en ouvrant davantage ces bases avancées, en proposant de la formation et des partenariats. Elles ne doivent pas être le village gaulois d'Astérix.

Comme je l'ai indiqué dans mon propos introductif, certains sujets militaires ne trouvent pas leur place dans la feuille de route du Quai d'Orsay. L'influence pourrait, en revanche, être une mission interministérielle menée par ce ministère.

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Les 400 milliards d'euros de la future loi de programmation militaire ne transformeront pas nos armées car le modèle échantillonnaire reposant sur le nucléaire militaire et orienté vers les opérations extérieures n'a jamais été remis en question.

S'agissant du nucléaire militaire, l'opacité des dépenses ne permet aucun débat, ce qui est regrettable. Selon le ministre de la défense lui-même, la part de la dissuasion dans la prochaine loi de programmation serait d'environ 13 %, soit près de 10 milliards d'euros par an à partir de 2030. Nous refusons de cautionner un tel montant. Nous proposons que la France rejoigne le traité d'interdiction des armes nucléaires en tant qu'observatrice, ainsi que le gel du remplacement des matériels de la dissuasion tant qu'un débat transparent n'aura pas été mené sur le budget qui lui est consacré, depuis sa conception jusqu'aux déchets nucléaires militaires, en passant par les conséquences des essais en Polynésie et en Algérie.

Nos armées sont faites pour les opérations de guerre extérieures. Les députés de la Gauche démocrate et républicaine dénoncent systématiquement cette obsession néocoloniale, qui a entraîné des désastres pour nos militaires et pour les peuples d'Afrique, sans avoir pu empêcher l'extension du terrorisme au Sahel. Ce modèle expéditionnaire serait plus utile au sein des casques bleus. Nous devons privilégier un modèle d'armée défensif. Nos armées ne sont pas dimensionnées pour protéger les Français en Indopacifique, en Amérique ou en Europe.

Notre modèle industriel de l'armement doit également être questionné. La France est dépendante de ses exportations d'armement, ce qui rend l'équilibre précaire et l'oblige à être peu regardante sur ses clients. Puisque ce secteur est nécessaire pour garantir notre souveraineté, une gestion publique du commerce des armes nous semblerait plus appropriée que sa soumission aux lois cyniques du marché.

Enfin, la guerre étant la continuation de la politique par d'autres moyens, nos engagements internationaux devraient être pilotés par la diplomatie et non par le militaire. Nous sommes très inquiets de ce que le budget du ministère des affaires étrangères est près de vingt fois inférieur à celui des armées.

Compte tenu de toutes ces inquiétudes et de ces manques, les députés du groupe Gauche démocrate républicaine voteront contre ce texte, à moins que des amendements lui permettent de changer du tout au tout.

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Il existe de nombreuses lignes de fracture entre nous. J'espère néanmoins que nous pouvons nous retrouver s'agissant des enjeux indo-pacifiques et ultramarins. Je suis convaincue que nos outre-mer forment notre trait d'union avec le monde et que leur place est fondamentale. Tous les problèmes qu'ils rencontrent – surpêche, orpaillage, immigration, entre autres – doivent être pris en compte et les moyens budgétaires, adaptés.

En revanche, nos avis divergent totalement concernant la dissuasion nucléaire. Elle est la clef de voûte de notre défense, qui nous a permis de réduire la voilure année après année, jusqu'en 2017. Dans L'ensauvagement – une référence qui ne peut que vous plaire, monsieur Lecoq –, Thérèse Delpech dit que l'humanité a très peu appris de ce qui n'avait pas eu lieu. En effet, l'humanité a peu appris de la guerre froide et de la course à l'armement qu'elle a entraînée. Alors que la menace nucléaire est brandie dans le conflit en Ukraine – même si j'ai la conviction qu'elle ne sera pas exécutée –, il s'agirait du pire moment pour renoncer à notre dissuasion nucléaire.

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Renforcement de la dissuasion nucléaire et du renseignement militaire, investissement dans les défenses cyber, sol-air, spatiale et maritime, nouveaux armements, objectif de 105 000 réservistes : ce projet de loi de programmation militaire prévoit 413 milliards d'euros de dépenses sur sept ans, afin de transformer les armées. Cet effort budgétaire ambitieux se justifie notamment par la dégradation du contexte géopolitique – nous pensons tous à la guerre en Ukraine mais il y en a malheureusement beaucoup d'autres –, par l'émergence de nouvelles menaces et par les progrès technologiques dans les domaines de la robotique, des drones et de l'intelligence artificielle.

Pouvons-nous attendre de cet effort budgétaire appréciable des transformations substantielles pour nos armées ? Si le projet de loi est voté en l'état d'ici au mois de juillet, une entreprise comme Arquus, qui fabrique 90 % des véhicules de l'armée de terre, devra faire face à une baisse de 20 % à 25 % des cibles d'équipements initialement planifiées. La révision de l'échéancier des livraisons entraînera mécaniquement un étalement de la production. Celui-ci ne sera pas sans conséquence, y compris pour les sous-traitants. Ces reports concerneront plus de 1 200 véhicules blindés : 100 Jaguar sur 300, 473 Griffon sur 1 827 et 633 Serval sur 2 038. Les armées françaises ne gagnent pas en masse et l'armée de terre est la première à en faire les frais.

Par ailleurs, la notion de puissance d'équilibre développée par le président de la République ne semble pas convaincre grand monde, surtout que certaines de ses déclarations à contre-courant – notamment à propos de Taïwan – ont eu pour effet de faire passer la France pour un partenaire qui ne serait pas toujours et pas totalement fiable. Nous avons déjà entendu de tels propos dans le cadre de groupes d'amitié.

Face à des États qui réarment massivement, comme la Pologne, cette loi de programmation militaire ne risque-t-elle pas de donner l'image d'une armée française de compromis, qui pourrait ne pas convaincre totalement nos alliés de l'OTAN ?

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J'ai pu entendre que nous étions une armée « bonsaï », qui aurait tout d'une grande mais en modèle réduit. Cette critique acerbe mérite d'être nuancée. Je crois qu'il est nécessaire de garder une compétence sur tout le spectre. Comme celui-ci s'élargit et se densifie, il faut nécessairement faire des choix et accepter des compromis.

S'agissant des matériels Arquus – anciennement Renault Trucks Défense –, j'insistais tout à l'heure sur l'importance de l'environnement et du maintien en condition opérationnelle. Ce choix, certes pénible, est le bon car nous ne pouvons pas prendre de retard dans le spatial ou dans le cyber, où la menace peut sembler invisible alors qu'elle est très concrète. Il faut notamment sécuriser des câbles sous-marins et de nombreuses autres infrastructures.

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La discussion générale étant close, nous en venons à l'examen pour avis des articles dont nous nous sommes saisis.

TITRE Ier

dispositions relatives aux objectifs de la politique de défense et à la programmation financière

Article 1er : Programmation

La commission émet un avis favorable à l'adoption de l'article 1er non modifié.

Article 2 : Approbation du rapport annexé

Amendement AE5 de M. Jean-Louis Bourlanges

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Cet amendement tend à préciser que l'objectif de l'effort national de défense, à hauteur de 2 % du produit intérieur brut à l'horizon de 2025, doit être envisagé à partir de cette échéance comme un plancher et non comme un plafond. Cette rédaction est conforme aux engagements internationaux que nous avons pris. Il est proposé d'afficher clairement cet objectif dans le corps de la loi de programmation militaire pour les années 2024 à 2030, au regard de la place et du rôle joués par la France au sein de l'OTAN.

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Nous sommes contre l'amendement car nous sommes opposés à l'idée de fixer un pourcentage. Si les armées ont besoin d'être renforcées, il faut leur accorder les moyens dont elles ont besoin, quels qu'ils soient. C'est ainsi que nous atteindrons les objectifs politiques que nous nous sommes fixés. L'OTAN réclame un taux de 2 % mais nous refusons de nous soumettre à ce diktat.

La commission adopte l'amendement.

Rapport annexé

Amendement AE55 de M. Lionel Vuibert

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La diminution de nos capacités militaires s'est réalisée ces dernières décennies par la fermeture de casernes ou de bases en France mais également à l'étranger, par exemple au Sénégal en 2010. Il s'agit, par cet amendement, de préciser que l'ensemble de nos dispositifs militaires ont été touchés par ces réductions drastiques, ce qui a alimenté un sentiment d'affaiblissement de la capacité de projection de notre pays.

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On attend beaucoup des armées mais leur rôle n'est pas d'aménager le territoire. Je comprends cependant que les fermetures de casernes ou de bases aient des conséquences pour les circonscriptions. Le ministre, que j'ai interrogé à ce sujet, est prêt à préciser région par région les effets de la loi de programmation militaire. Avis défavorable.

L'amendement est retiré.

Amendement AE59 de M. Aurélien Taché

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Le rapport présente une stratégie qui s'inscrit dans la continuité des lois de programmation militaire précédentes. S'il fait état de transformations technologiques, l'approche reste la même. Alors que la guerre en Ukraine aurait dû nous inciter à revoir notre stratégie de défense, notamment terrestre, l'armée de terre souffre d'une accumulation des retards de livraison et d'un manque d'investissement. Si un conflit majeur éclatait sur notre territoire et nous imposait de passer en économie de guerre, ce qui supposerait une planification industrielle, la France ne serait pas prête.

Nous devons assurer la sécurité de notre pays en renforçant la mutualisation européenne. Une vision cohérente et partagée de la sécurité permettrait d'identifier les menaces potentielles et d'aligner nos efforts pour les affronter efficacement.

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Les nouveaux espaces de conflictualité et les sommes importantes que nous consacrons à ce projet de loi de programmation militaire suffisent à justifier que nous parlions de transformation. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AE24 de M. Jean-Paul Lecoq

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Monsieur le président, vous nous reprochez d'inciter la France à renoncer à la dissuasion nucléaire, quitte à ce qu'elle soit seule à prendre cette décision. À ma connaissance, nous n'avons jamais dit cela. Au contraire, nous avons toujours défendu l'idée qu'il fallait accompagner le mouvement d'interdiction des armes nucléaires ; j'ai même rédigé un rapport en ce sens, relatif à l'arme nucléaire dans le monde, avec Michel Fanget. Cela ne veut pas dire que nous voudrions que la France soit la seule à se désarmer. Simplement, il est temps de se poser la question de la légitimité de la dissuasion nucléaire car la preuve a été apportée que la bombe atomique était un outil utilisé par les colonialistes pour mener leur guerre de colonisation. L'esprit initial de la dissuasion nucléaire n'était pas de protéger les superpuissants et leur permettre de faire ce qu'ils voulaient mais, au contraire, de les placer sous une épée de Damoclès.

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Si ma réponse vous a conduit à cette interprétation, je vous présente mes excuses car loin de moi l'idée de caricaturer votre pensée.

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La France respecte le traité sur la non-prolifération des armes nucléaires et elle a abandonné il y a longtemps la composante terrestre. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AE44 de Mme Laetitia Saint-Paul

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Il s'agit de supprimer l'appréciation portée sur la qualité de la réflexion menée en amont de ce texte, « rigoureux travail d'introspection », qui s'apparente à un bavardage inutile.

La commission adopte l'amendement.

Amendement AE25 de M. Jean-Paul Lecoq

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L'amendement tend à remplacer « notre métropole et nos outre-mer » par « notre territoire national en Europe, en Amérique et en Indopacifique ». Il faut changer les mentalités et ne plus employer le terme « métropole » marqué par une connotation coloniale.

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Il a été dit que la géographie l'emportait toujours sur l'histoire. Il ne faut pas voir dans l'emploi de ce terme la moindre connotation péjorative. Au contraire, la rédaction que vous proposez pourrait donner l'impression d'une France conquérante. Les enjeux tiennent à la géographie. Avis défavorable.

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Votre amendement m'a fait penser à la formule du général de Gaulle qui, dans son discours du 16 septembre 1959, parlait du peuple français, de Dunkerque à Tamanrasset. Il y proposait trois options : la francisation, l'association ou la sécession. Cette réflexion est intéressante au moment où l'un de vos collègues vient de remporter une brillante victoire en Polynésie et s'oriente dans une voie différente. Plus sérieusement, ceux qui emploient le terme d'outre-mer ne le font pas dans l'intention de hiérarchiser les territoires mais pour marquer leurs spécificités. Là est la différence entre ceux qui refusent cette expression, comme vous, et ceux qui l'acceptent.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AE60 de M. Aurélien Taché

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La dissuasion nucléaire est au cœur de ce texte, ce qui est contraire à nos engagements internationaux en faveur de la non-prolifération nucléaire. En novembre 2022, la France a accepté la déclaration du G20 à Bali selon laquelle l'emploi d'armes nucléaires ou la menace de leur emploi était inacceptable. Dans un contexte aussi sensible, il est essentiel de débattre de ce sujet au Parlement en toute transparence, conformément aux engagements du ministre des armées devant la commission de la défense de l'Assemblée nationale. Je vous invite à ouvrir le débat pour que nous réfléchissions ensemble aux conséquences de nos choix en matière de dissuasion nucléaire, dans le respect de nos engagements internationaux et avec le souci de promouvoir un monde plus sûr et pacifique.

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Notre dissuasion nucléaire est un modèle défensif. En aucun cas nous n'envisageons de l'employer et nous ne menaçons pas davantage de le faire. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AE61 de M. Aurélien Taché

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La France est présente en Afrique et il serait temps de tirer les leçons de nos opérations extérieures, en particulier de l'échec des opérations Serval et Barkhane. La France doit rééquilibrer les relations qu'elle entretient avec le continent africain pour que chaque partie en retire des bénéfices. La France prévoit de laisser 2 500 militaires dans la région mais nous ne savons rien du nouveau dispositif. Quel sera l'emploi futur de nos armées ?

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Les leçons ont été tirées de nos opérations extérieures. Ainsi, alors que nous pensions qu'à une phase courte d'intervention succéderaient une phase de stabilisation et une longue phase de normalisation, nous avons compris qu'il pouvait être difficile de passer à la phase de normalisation. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AE56 de M. Lionel Vuibert

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Ces dernières années, la désinformation a été largement utilisée pour influencer les opinions et entretenir le sentiment anti-français, en particulier au Burkina Faso et au Sahel où il a été mis fin à l'opération Barkhane dans la précipitation. La désinformation peut représenter une menace hybride à l'encontre de notre pays. Il convient de lutter contre ; c'est le sens de cet amendement.

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Il me semblait que le rapport annexé était suffisamment clair sur ce point. S'il vous a paru lacunaire, je m'en remets à votre sagesse.

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Je voterai contre l'amendement. En Libye, c'est l'État français qui fut à l'origine de la désinformation ! Rappelez-vous les mensonges qui ont été proférés : l'État affirmait qu'aucun militaire ne se trouvait sur le sol libyen ! Aujourd'hui, tout le monde sait que des militaires étaient présents sur le territoire et que l'opération était engagée depuis longtemps. En temps de guerre, la désinformation fonctionne dans les deux sens. Il n'y a pas les gentils d'un côté, les méchants de l'autre, mais un doux mélange dangereux.

La commission adopte l'amendement.

Amendement AE23 de M. Jean-Paul Lecoq

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Le président de la République a évoqué le sujet de la résilience technologique lors de ses vœux aux armées. La rusticité des technologies est indispensable. L'armée doit mettre l'humain au cœur de chaque prise de décision et lui faire confiance. Il est important de mener une réflexion autour des technologies rudimentaires afin de trouver un équilibre entre la technologie et l'absence de technologie. La guerre en Ukraine, comme de nombreuses guerres de la deuxième moitié du XXe siècle, est menée par des soldats qui connaissent parfaitement la géographie et la population, et disposent d'un matériel suffisamment rustique pour être aisément réparable et peu sensible aux conditions météorologiques. Les armées actuelles survalorisent la technologie alors que la basse technologie permet au soldat d'être résilient dans un environnement dégradé. L'une et l'autre doivent être développées ensemble, et l'aspect rustique ne doit surtout pas être abandonné.

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Le risque est de se laisser aveugler par la guerre en Ukraine et le retour d'une guerre de position très rustique, qui s'opposerait au tout technologique, paralysé à la moindre faille cyber. Je suis favorable à votre amendement.

La commission adopte l'amendement.

Amendement AE22 de M. Jean-Paul Lecoq

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Il est nécessaire de prendre en considération les engagements internationaux de la France au regard de la dissuasion nucléaire. Les termes du traité sur la non-prolifération des armes nucléaires sont implacables et un moratoire sur les évolutions technologiques de notre dissuasion pourrait être proposé. Nous pourrions ainsi réduire le budget dédié au projet de loi de programmation militaire ; nul ne sait de combien, puisque les chiffres sont tenus secrets ! Surtout, nous enverrions un message positif aux États qui ne sont pas dotés de l'arme nucléaire en leur prouvant que, même en temps de guerre, il est possible de faire des gestes pour l'apaisement et le désarmement.

Enfin, que signifie « l'amélioration des vecteurs » ? Ces armes tueront-elles encore davantage ? Ce genre d'investissement est-il bien nécessaire ?

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Avis défavorable. L'amendement traduit votre profond désaccord avec le principe de la dissuasion nucléaire.

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Monsieur Lecoq, vous attaquez la dissuasion nucléaire tout en prônant – ce qui me ravit – l'indépendance de la nation face aux engagements qui nous entraînent, au contraire, vers un système conventionnel qui signera notre perte. Je suis hostile à votre amendement parce qu'un moratoire sur la recherche et l'amélioration de nos forces nucléaires nous fragiliserait. Au passage, il est affirmé, dans ce texte, l'indépendance de la nation, la solidarité envers l'OTAN et la solidarité européenne. Or la dissuasion nucléaire est la seule arme qui puisse nous permettre d'éviter un conflit de haute intensité, que nous n'aurions pas les moyens de soutenir. Si nous voulons être indépendants des Américains, nous devons investir massivement dans la dissuasion nucléaire.

La commission rejette l'amendement.

Suivant la préconisation de la rapporteure pour avis, la commission rejette l'amendement AE62 de M. Aurélien Taché.

Amendement AE66 de M. Aurélien Taché

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Le rapport n'insiste pas suffisamment sur les conséquences du changement climatique en outre-mer, alors que ces départements et collectivités y sont pourtant particulièrement exposés. Cette vulnérabilité particulière s'explique par leur situation géographique et leur dépendance économique aux secteurs les plus touchés. L'adaptation au changement climatique est un enjeu de sécurité globale et nous invitons le Gouvernement à accentuer ses efforts afin de former nos armées à la prévention et à la gestion des catastrophes naturelles.

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Je partage votre préoccupation. Un excellent rapport relatif aux conséquences du changement climatique pour la sécurité mondiale a été rendu sous la précédente législature. Cela étant, je ne suis pas d'accord avec la rédaction que vous avez retenue. Je ne suis pas certaine que les outre-mer soient les premiers à subir le changement climatique : les incendies sévissent dans notre pays alors que nous ne sommes qu'au début du mois de mai et beaucoup de nos littoraux sont exposés au recul du trait de côte. Je vous invite à le retirer pour en revoir la rédaction avant de le déposer en commission de la défense où il pourrait être adopté.

L'amendement est retiré.

Amendements AE64 de M. Aurélien Taché et AE21 de M. Jean-Paul Lecoq (discussion commune)

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Le service national universel (SNU), outil de militarisation de la jeunesse, va à l'encontre des valeurs citoyennes, notamment l'engagement associatif, politique ou syndical. Encore récemment, dix-sept jeunes ont été hospitalisés à la suite d'un bivouac. Cet incident succède à de nombreux cas de malaises, de violences physiques et psychologiques de la part d'encadrants. Les périodes d'expérimentation ont montré que le SNU ne favorisait pas la mixité sociale ni l'apprentissage du faire-ensemble. Au contraire, il impose, ordonne, range et ne s'adresse qu'à une minorité de jeunes.

Nous proposons de réallouer le budget du SNU à des mesures réellement utiles aux jeunes, par exemple une allocation d'autonomie de 1 063 euros par mois et un ticket climat donnant accès à tous les transports en commun du territoire. Ces alternatives renforceraient l'autonomie et la mobilité de notre jeunesse, indispensables pour son épanouissement et son insertion dans la société.

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Ce service national universel n'est ni national, ni universel. Jacques Chirac a supprimé le service militaire et nous sommes de ceux qui avaient considéré, à l'époque, que ce n'était pas la meilleure mesure qui soit. Le principe de la conscription ne nous pose pas problème, au contraire : le peuple défend le peuple. Malheureusement, le SNU s'apparente davantage à un caprice présidentiel censé résoudre tous les maux de la société. C'est absurde, ce n'est qu'un gadget, une mesure d'affichage.

Nous vous proposons de supprimer ce dispositif mais nous sommes prêts à réfléchir avec vous à une nouvelle définition du service national.

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C'est vrai, le service militaire avait des vertus mais, en interne, on le surnommait « le dernier impôt sur les pauvres » car ceux qui en avaient la possibilité parvenaient souvent à y échapper. Le SNU n'est pas parfait mais il présente l'intérêt de renouer avec une forme de rusticité, de rassembler nos concitoyens autour de nos valeurs, de développer la mixité sociale. Avis défavorable.

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Je ne reviendrai pas sur les faits et les chiffres qui ont été donnés : le nombre de cas est extrêmement limité.

Nous examinons un projet de loi de programmation, c'est-à-dire un texte de transformation, ce qui est forcément long : cela prend six ou sept ans. Il est rare que le Parlement ait l'occasion de travailler sur le long terme, de regarder l'horizon. Le SNU n'est pas encore parfait. Le ministère lui-même le dit : le dispositif est encore en phase d'expérimentation. On peut juger cette expérimentation et corriger les erreurs commises, bien entendu, mais très majoritairement les objectifs sont atteints, en particulier s'agissant du brassage social ; la plupart des témoignages le montrent. C'est donc une bonne chose d'inscrire dans ce projet de loi de programmation un travail autour du lien entre l'État et la nation, y compris en rassemblant tous les dispositifs d'engagement citoyen dont nous disposons – c'est le sens de certains amendements que je défendrai un peu plus loin –, et je suis opposé à ce que l'on retire la référence au SNU.

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Le vivre-ensemble existe dans d'autres instances, par exemple dans les camps pour adolescents.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement AE54 de M. Lionel Vuibert.

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La France est très bien implantée dans les zones polaires. Sa contribution à la recherche, notamment à travers les publications scientifiques, est reconnue. Les pôles ont vu émerger de nouveaux enjeux stratégiques, économiques et militaires. Alors que des conflits interétatiques surgissent de nouveau sur le sol européen, il apparaît de plus en plus nécessaire de s'intéresser aux diverses possibilités d'engagement, en particulier en Arctique : cette zone pourrait devenir un théâtre d'opérations à l'horizon de 2040. Un engagement sur ce terrain, dans le cadre d'une alliance, poserait d'importants défis à l'armée de terre, notamment en raison des conditions extrêmes qu'offrent ces territoires.

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Les pôles sont effectivement un enjeu important : avec la fonte des neiges, de nouvelles routes sont ouvertes, et ces zones deviennent de nouveaux espaces de conflictualité. Avis favorable.

La commission adopte l'amendement.

Amendement AE20 de M. Jean-Paul Lecoq.

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Hier, dans l'hémicycle, nous avons fait avec le ministre des armées le bilan de la précédente loi de programmation militaire et nous avons constaté que la question de l'espace restait à traiter. Tel est l'objet de cet amendement. La commission des affaires étrangères a produit un rapport sur le sujet, écrit par Pierre Cabaré et moi-même, qui préconise de ne pas militariser l'espace. C'est un peu comme l'usage de la bombe atomique : le premier qui jouera à détruire des objets se trouvant dans l'espace portera une lourde responsabilité car c'est alors l'ensemble de l'orbite terrestre qui sera pollué, comme nous l'ont expliqué tous les acteurs que nous avons interrogés. En effet, la pire menace pour les satellites et tous les engins se trouvant dans l'espace, ce sont les « déchets » – en l'occurrence, l'ensemble des corps flottants et incontrôlables.

Nous devons donc œuvrer à la diplomatie spatiale, comme je l'ai dit au ministre. Il faut se mettre d'accord pour ne pas toucher à l'espace car le risque est de très vite rendre celui-ci inutilisable pour plusieurs générations, ce qui serait absurde. Même dans une période conflictuelle, il est possible de trouver un accord.

J'entends bien que des menaces existent. Même si la France prépare une réaction – dont acte, nous n'y sommes pas favorables –, elle doit dire que la militarisation de l'espace constitue un danger réel et durable pour l'avenir. Ce serait une bonne chose si le président de la République, comme il le fait pour les questions relatives au climat, se faisait le porteur de l'idée selon laquelle l'espace est un lieu qu'il ne faut pas « arsenaliser ». Ce serait également une bonne chose si, à travers le débat autour du projet de loi et à travers nos amendements, nous parvenions à faire entendre cet appel : ne touchez pas à l'espace !

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Comme vous, je regrette la militarisation de l'espace. Toutefois, le modèle inscrit dans le texte est défensif : il ne s'agit nullement d'« arsenaliser » l'espace. Nous ne pouvons pas laisser les données captées par nos satellites se faire « butiner » ou être brouillées, et ce alors même que, grâce au projet européen Galileo, nous serons plus autonomes. Nous sommes sur la défensive mais nous ne pouvons pas rester sur le banc de touche. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AE69 de M. Frédéric Petit.

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Je défendrai simultanément l'amendement AE74, qui va de pair avec celui-ci.

Je suis chargé, au sein de notre commission, de la diplomatie culturelle et d'influence. J'ai donc travaillé avec notre rapporteure pour avis sur la notion d'influence militaire. Même si le rapport annexé est consistant et la rapporteure pour avis propose déjà de le compléter, je propose d'ajouter une référence explicite à la feuille de route de l'influence, aboutissement d'un travail mené entre notre commission et le ministère de l'Europe et des affaires étrangères au cours de la précédente législature. Cette feuille de route, qui date de 2021, correspond en quelque sorte à un effort de programmation de l'activité du MEAE dans le domaine de l'influence.

Il est important, tout en respectant les spécificités du domaine militaire, d'engager une politique d'influence. Par exemple, on peut cibler certaines populations : ma collègue rapporteure pour avis propose de mentionner le travail avec les militaires des pays alliés ou dans lesquels nous avons des hommes. Le ministère des armées doit avoir le réflexe d'utiliser aussi les outils d'influence de la diplomatie – ce qu'il ne fait que par saupoudrage –, en facilitant l'accès aux lycées français pour certaines populations, même si ce ne sont pas des Français, ou en travaillant avec les instituts français, les entreprises et nos postes de recherche à l'étranger. Il est absolument nécessaire de faire en sorte que l'effort en matière d'influence militaire soit consenti de manière certes spécifique mais en cohérence avec la feuille de route, qui est, d'une certaine manière, le pendant du projet loi de programmation.

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Nous partageons la même vision de l'influence.

J'émets un avis favorable sur l'amendement AE69. En revanche, je vous inviterai à retirer l'amendement AE74 pour que nous y retravaillions : la stratégie des armées en la matière ne doit pas être complètement fondue avec celle du Quai d'Orsay. Vous pourrez le déposer de nouveau en vue de l'examen du texte en commission de la défense nationale et des forces armées.

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Je retirerai d'autant plus volontiers l'amendement AE74 qu'il vise à compléter l'article au même endroit que votre amendement AE49 : ils empiètent donc l'un sur l'autre. L'amendement AE74 doit donc, effectivement, être réécrit.

La commission adopte l'amendement.

Amendement AE19 de M. Jean-Paul Lecoq.

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Le monde change ; la France et ses autorités doivent le comprendre très rapidement. Or la stratégie militaire française repose encore sur l'idée d'une armée expéditionnaire. Si ce modèle a pu avoir un sens dans l'esprit des acteurs politiques et militaires au milieu du XXe siècle, il est totalement anachronique. Cela entraîne deux conséquences.

Premièrement, en dépit de ses défauts, ce modèle a permis d'acquérir une grande expertise. Nous proposons donc que nos armées s'impliquent davantage dans des missions de maintien de la paix des Nations Unies.

Deuxièmement, il est nécessaire de renégocier les accords bilatéraux de défense et de sécurité afin de préserver la souveraineté des deux parties. C'est particulièrement vrai s'agissant de l'Afrique.

Enfin, et même si cela va sans dire, il est bon de préciser que le seul cadre envisageable pour une opération militaire est celui de la charte des Nations Unies.

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La dimension expéditionnaire a été profondément remise en question dans ce projet de LPM. Par ailleurs, il est évident que la France respecte la charte des Nations Unies et le droit international : cette conduite est intrinsèque à notre action. Avis défavorable.

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Que les interventions aient lieu « dans le cadre de résolutions des Nations Unies » n'est pas la même chose que « dans le respect de la charte des Nations Unies ». L'amendement poserait une limitation excessive.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AE41 de M. Jérôme Buisson.

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Dans la sous-partie du rapport annexé intitulée « Une France puissance solidaire et partenaire de souveraineté », plus précisément à l'alinéa 19, la France est définie comme « pourvoyeuse de sécurité et de souveraineté » et menant une « diplomatie de puissance d'équilibres ». Non seulement cette formulation n'a que peu de sens, mais elle relève d'une conception de la France comme gendarme du monde, visant à défendre la sécurité et la souveraineté des autres États, sans tenir compte de nos alliances et de nos intérêts. Notre vision, au contraire, est celle d'une France dont la politique a pour boussole la défense de sa propre souveraineté.

De plus, la formulation présente la souveraineté, au même titre que la sécurité, comme un bien que l'on confère. Il serait plus approprié de parler de défendre la souveraineté et d'assurer la sécurité.

L'amendement AE41 vise donc à remplacer la formulation par celle, plus neutre, de « puissance souveraine », rappelant la primauté de la défense de la nation, des Français et de nos intérêts par rapport à un rôle de police internationale.

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Je ne pense pas que l'objectif poursuivi à travers la formulation en question soit de se présenter comme le gendarme du monde. La France a une responsabilité en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationale. Et de la sécurité internationale dépend, en retour, la sécurité de notre pays car souvent les crises géopolitiques n'ont pas de frontières. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

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Je suis, quant à moi, favorable à cet amendement car je ne sais pas ce que veut dire « pourvoyeuse de souveraineté » – le texte comporte d'ailleurs beaucoup d'autres termes ambigus. Il n'y a qu'une seule souveraineté : celle de la nation et du peuple français. C'est la raison pour laquelle le seul instrument qui vaille est la dissuasion nationale. Là aussi, les textes officiels opèrent une dérive créant de l'ambiguïté en ce qui concerne l'utilisation de notre force de dissuasion pour la défense de nos voisins européens. Or la force de dissuasion est faite pour le territoire national, elle n'a de sens que pour cela.

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Je me permettrai de m'exprimer contre l'amendement. Considérer qu'un pays comme la France n'a pas, à travers sa politique militaire, de responsabilité dans le maintien de la paix et dans le respect de la souveraineté des autres États est une conception très limitative. La souveraineté n'est pas le monopole de la France : c'est un droit fondamental pour tous les pays. Quand nous menons une action en faveur de l'Ukraine – à tort ou à raison, là n'est pas la question –, nous pourvoyons de la souveraineté à ce pays, nous lui permettons de rétablir ses droits souverains. On peut être contre ou être pour, mais il y a là une dimension fondamentale de l'action internationale de la France, qui est fixée par le projet de loi de programmation. Il ne s'agit pas d'une erreur de rédaction : c'est une vocation qui est reconnue à notre pays.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AE49 de Mme Laetitia Saint-Paul.

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Le texte ne tient pas suffisamment compte de l'enjeu que constitue l'influence, pourtant érigée comme nouvelle fonction stratégique. Cet amendement, avec d'autres qui suivront, vise à inclure cette dimension. Il s'agit de doter nos armées d'une véritable colonne vertébrale en la matière.

La commission adopte l'amendement.

L'amendement AE74 de M. Frédéric Petit est retiré.

Amendement AE18 de M. Jean-Paul Lecoq.

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L'objectif de cet amendement est de faire en sorte que l'alinéa 20 n'autorise pas tout et n'importe quoi.

À nos yeux, il est nécessaire de renforcer le droit international, alors que le conflit en Ukraine a fait souffrir les Nations Unies et a révélé un très grand nombre de tensions et de blocages. La France doit prendre sa part de l'effort multilatéral visant à renforcer le droit international et l'Organisation des Nations Unies (ONU). Il est écrit à l'alinéa 20 que les moyens de nos armées « pourront être déployés pour tous les partenaires qui le solliciteraient ». Nous proposons d'ajouter que nos alliances militaires seront conclues « dans le cadre de la Charte des Nations Unies et du strict droit international ».

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L'alinéa 20 vise non pas les opérations militaires mais les activités de coopération, de formation, d'entraînement et de cession de matériel que la France pourrait mener avec ceux de ses partenaires ayant des besoins de défense légitimes, comme nous en avons. Dans toutes ses activités, y compris la coopération, la France est liée par la Charte des Nations Unies et par le droit international, qu'il y soit fait référence ou non dans le rapport annexé. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AE45 de Mme Laetitia Saint-Paul.

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Il faut développer la réciprocité. C'est l'un des enjeux du partenariat renouvelé avec l'Afrique que le président de la République appelle de ses vœux. Lors de mon déplacement en Mauritanie, j'ai proposé que des stagiaires français soient reçus par le Collège de défense du G5 Sahel. L'idée a été accueillie avec enthousiasme.

Je propose de compléter ainsi l'alinéa 20 : « En sens inverse, la France promouvra et sollicitera la formation de ses cadres officiers et sous-officiers dans les écoles militaires des pays partenaires. »

La commission adopte l'amendement.

Amendement AE48 de Mme Laetitia Saint-Paul.

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Le constat dressé dans le cadre des auditions est édifiant : une fois qu'ils ont achevé leur formation en France, les élèves officiers ou sous-officiers étrangers ne sont pas du tout suivis, alors même que certaines formations sont financées par la France, à travers l'aide publique au développement et la direction de la coopération de sécurité et de défense (DCSD). Cela me paraît incompréhensible.

Certains de mes camarades de promotion, formés en France quand ils avaient une vingtaine d'années, sont désormais commandants de zone dans leurs pays respectifs. Ils occupent donc déjà, à quarante ans, des fonctions éminentes dans leurs institutions. Assurer le suivi de ces élèves – en langage civil, on parle d'« alumni » –, entretenir un partenariat avec eux me semble primordial. Je propose donc de compléter le texte par la phrase suivante : « Un effort particulier sera fait pour entretenir sur le long terme le lien créé avec les cadres étrangers formés dans les écoles militaires françaises. »

La commission adopte l'amendement.

Amendement AE63 de M. Aurélien Taché.

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Le choix a été fait de maintenir un dispositif militaire français au Sénégal, en République de Côte d'Ivoire, au Tchad et au Gabon. Toutefois, les contours de l'évolution envisagée demeurent flous et aucune stratégie concrète n'a été présentée.

Des erreurs ont été commises dans ces pays. Depuis des années, le sentiment anti-français ne cesse d'y croître. Il est grand temps de poser un regard critique sur nos méthodes et nos stratégies et de mesurer leurs conséquences réelles. Inverser la tendance implique d'engager un audit transparent et approfondi de nos actions passées, afin d'éviter de reproduire les mêmes erreurs. Une démarche élaborée de manière concertée avec les pays concernés permettrait de définir une vision claire et de connaître l'évolution qu'ils souhaitent voir apportée au dispositif militaire.

Malheureusement, le rapport annexé ne fait qu'effleurer en quelques lignes ce sujet crucial. Nous ne saurions nous satisfaire de cette légèreté. Nous demandons une révision approfondie de la stratégie et une véritable concertation avec les pays hôtes afin de garantir un changement du dispositif.

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J'aurais voulu, moi aussi, être en mesure de vous présenter une vision beaucoup plus claire de ce partenariat. Si je ne peux pas le faire, c'est précisément parce que votre requête a été entendue : l'idée est de construire le dispositif en partenariat avec les pays tiers. Or nous n'avons pas encore connaissance de ce qu'ils attendent de nous, du format qu'ils veulent donner à cette nouvelle coopération. Il serait d'ailleurs intéressant, monsieur le président, que notre commission suive le sujet sur la durée.

Avis défavorable, madame Sebaihi, même si nous partageons le même objectif.

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Puisque vous m'avez tendu la perche, madame la rapporteure pour avis, je tiens à préciser que je suis cette question attentivement. L'année dernière, sous la précédente législature, j'avais visité trois de nos bases au Niger, au Sénégal et en Côte d'Ivoire. Je suis retourné en Côte d'Ivoire récemment, avec Mme la présidente de l'Assemblée nationale, ainsi que plusieurs collègues, et j'ai pu mesurer que des changements très importants avaient été engagés.

Pour résumer la démarche de façon extrêmement sommaire, je dirai ceci : alors que certains considéraient qu'il fallait fermer nos bases, nous avons choisi de les ouvrir, c'est-à-dire d'engager une coopération beaucoup plus égalitaire, une interpénétration beaucoup plus forte avec les pays concernés. Cet effort doit être poursuivi et théorisé. Cela ne s'improvise pas. Il me semble donc, madame Sebaihi, que votre souhait a été entendu et que vous pourriez retirer votre amendement car beaucoup d'entre nous n'ont pas envie de voter contre.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AE1 de M. Jean-Louis Bourlanges.

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Cet amendement vise, d'une part, à rappeler que la France est membre à la fois de l'Alliance atlantique et de l'Union européenne et qu'à ce titre elle est un acteur clé de la défense de l'Europe. Certains parmi vous sont très hostiles à ces engagements et considèrent que nous ne devrions pas être tenus par eux. Il n'en demeure pas moins que le projet de loi s'inscrit dans la réalité. Or celle-ci est bel et bien que nous avons souscrit ces engagements internationaux.

Il s'agit aussi, d'autre part, de préciser le sens de l'objectif d'autonomie stratégique. Certaines interprétations excessives ont été faites concernant les déclarations du chef de l'État. Cet objectif ne saurait être considéré comme un acte de défiance et d'émancipation à l'égard de nos engagements vis-à-vis de l'OTAN. Cette organisation est une alliance d'États souverains ; elle ne prévoit en aucune façon la subordination à l'un des États membres. L'objectif d'autonomie stratégique est d'abord motivé par le fait que, dans les années à venir, il risque d'être beaucoup plus difficile pour les Américains de tenir leurs engagements.

Ce message est de nature à rassurer certains de nos alliés, notamment les pays du Nord, les États baltes et la Pologne, qui ont tendance à voir dans notre revendication d'autonomie stratégique européenne une marque d'hostilité à l'égard des États-Unis, alors qu'il s'agit, pour nous, d'assumer des responsabilités dont il n'est pas sûr que les Américains soient en mesure de continuer à les exercer comme ils l'ont fait jusqu'à présent et comme ils le font dans la guerre en Ukraine. La revendication d'autonomie stratégique est destinée non pas à briser ces liens mais à répondre au fait que la situation stratégique sera différente.

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Je suis très favorable à cet amendement : le rapport annexé méritait d'être clarifié sur ce point.

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D'abord, monsieur le président, je souhaiterais que vous ne caricaturiez pas ma position comme vous l'avez fait tout à l'heure. Il n'est pas question de refuser d'aider un autre pays d'Europe. Il s'agit d'éviter un charabia créant de la confusion à propos de la question de la souveraineté.

Ensuite, je suis hostile à votre amendement parce qu'il pose des problèmes d'automaticité et de cohérence. Si nous voulons vraiment affirmer notre solidarité quasi automatique pour la défense du continent, 400 milliards ne suffiront pas et nous devrons opérer un changement d'orientation radical en matière de défense. Le général de Gaulle avait choisi la dissuasion nucléaire parce que c'était une façon de défendre notre souveraineté nationale sans avoir besoin d'engager des montants colossaux, ce que nous n'avions pas les moyens de faire.

Plutôt que de multiplier les engagements et les vœux pieux en matière de solidarité européenne, nous devrions veiller à être capables d'assurer notre défense. C'est l'objet de ce projet de loi de programmation militaire. Surtout, il convient d'entretenir l'incertitude car tout dépend du conflit : nous pouvons, bien évidemment, aider un pays à défendre sa souveraineté, mais cela doit dépendre de notre propre volonté, sans qu'il y ait eu d'engagement préalable. Du reste, c'est le sens du traité fondateur de l'Alliance atlantique, dont l'article 5 ne comporte pas de caractère automatique.

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Je soutiens cet amendement car il est toujours utile de rappeler que le renforcement du pilier européen au sein de l'OTAN n'est absolument pas contradictoire avec la construction d'une Europe de la défense. Le fait que la France prenne des initiatives capacitaires au sein de l'OTAN est même susceptible d'entraîner les autres pays européens, ce qui sera bénéfique pour notre sécurité collective.

La commission adopte l'amendement.

Amendement AE17 de M. Jean-Paul Lecoq.

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Comme je l'ai déjà expliqué, la façon dont on parle des outre-mer est parfois mal perçue par nos concitoyens vivant dans ces territoires, soit près de 3 millions de Français.

Je profite de la défense de cet amendement pour vous demander des nouvelles de la stratégie ultramarine, que le président de la République s'était engagé à présenter au Parlement avant la discussion sur le projet de loi de programmation militaire. Nous avons déjà interpellé le ministre sur la question. Cette stratégie sera-t-elle présentée devant notre commission avant le débat dans l'hémicycle ? Mme la rapporteure pour avis dispose certainement de quelques éléments.

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Je comprends l'intention et vous connaissez ma position quant à la place des outre-mer. La formulation que vous critiquez est géographique et nos concitoyens d'outre-mer ne doivent pas se sentir agressés. Avis défavorable même si, dans l'esprit, je partage votre engagement en faveur de ces territoires.

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Le président de la République s'était engagé à présenter au Parlement la stratégie ultramarine dans laquelle s'inscrira la loi de programmation militaire avant notre débat parlementaire. Le ministre, que nous avons interpellé à ce propos, a déclaré que cela viendrait mais nous discutons aujourd'hui du texte sans avoir encore connaissance cette stratégie promise par le président de la République, et dont nous ignorons quand elle nous arrivera.

La commission rejette l'amendement.

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La question de M. Lecoq est gravée dans ma mémoire et je m'enquerrai de cet engagement pour qu'il soit honoré le plus rapidement possible, dans toute la mesure de mes moyens, qui sont comme vous le savez très limités.

Amendements identiques AE16 de M. Jean-Paul Lecoq et AE65 de M. Aurélien Taché.

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Monsieur le président, je grave, moi aussi, dans ma mémoire votre promesse.

Quant à l'amendement AE16, qui est de cohérence, il est défendu car nous avons déjà donné notre avis à propos du service national universel.

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Vous connaissez en effet notre avis à propos du SNU.

Suivant la préconisation de la rapporteure pour avis, la commission rejette les amendements.

Amendement AE73 de M. Frédéric Petit.

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Cet amendement vise à tirer parti de la durée de six ans dont nous disposons avec cette loi de programmation militaire pour procéder à des transformations longues. Parmi des dispositifs très éclatés qui ont pour point commun l'engagement citoyen, l'engagement volontaire, l'adhésion à des idées et le dépassement de soi, la réserve citoyenne de défense et de sécurité fait figure de grand absent dans ce projet de loi de programmation militaire ; elle n'y est aucunement citée.

Il s'agirait donc que, progressivement, dans le temps dont nous disposons, la réserve citoyenne de défense et de sécurité rassemble ces dispositifs différents fondés sur l'engagement citoyen et la formation de la jeunesse, comme le service civique ou le SNU, en les coordonnant et en supprimant les silos qui les séparent.

Une partie de l'amendement est donc rédactionnelle, tandis qu'une autre partie tend à fixer de grandes échéances en vue de parvenir à un dispositif concret.

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Tout ce qui est possible en France l'est aussi pour les Français vivant à l'étranger, qui sont donc, eux aussi, tenus d'effectuer leur journée de défense ; ce n'est, du reste, pas toujours facile, et il conviendrait aussi de revoir ce point. La réserve citoyenne mérite également d'être promue auprès de nos concitoyens vivant à l'étranger. Selon les derniers chiffres dont je dispose, les réservistes citoyens sont aujourd'hui au nombre de 4 000 à l'échelle mondiale. Le chiffre de 200 000 que vise l'amendement est donc peut-être trop ambitieux. Je propose donc le retrait de l'amendement et sa réécriture en vue de l'examen du texte par la commission de la défense.

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Je retire l'amendement afin de le retravailler. Je précise cependant qu'il ne visait pas à porter l'effectif de la réserve citoyenne à 200 000 mais à structurer, d'ici à 2030, cet ensemble de dispositifs qui concernent aujourd'hui environ 100 000 personnes.

L'amendement est retiré.

Amendement AE46 de Mme Laetitia Saint-Paul.

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Toujours afin de rendre concrète cette nouvelle fonction stratégique qu'est l'influence, je propose que la mobilité internationale des militaires, notamment au sein des missions de défense des états-majors des pays partenaires et des organisations internationales, soit encouragée, valorisée et mieux accompagnée.

La commission adopte l'amendement.

Amendement AE47 rectifié de Mme Laetitia Saint-Paul.

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Au sein des lycées militaires et de nos grandes écoles, on compte très peu d'élèves ultramarins, voire aucun. Les classes préparatoires des lycées militaires sont désormais intégrées au dispositif Parcoursup mais le recrutement est un enjeu politique et il serait intéressant que l'Assemblée nationale soit mieux éclairée sur ses modalités.

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L'amendement ne spécifie pas qu'il est question des Ultramarins. Notre groupe est, par principe, favorable à la reconnaissance des compétences et non pas à l'idée d'imposer des quotas au titre de la discrimination positive.

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Je soutiens cet amendement car il est très important que les écoles militaires soient représentatives de la société française, ce qui vaut tant pour les Ultramarins que pour les différentes classes sociales ou pour les quartiers et villes qui composent nos territoires. Il est donc bon de l'inscrire dans la loi et nous devrons nous doter d'outils et de moyens permettant d'atteindre cet objectif très noble et très important.

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La diversité des origines et la diversité des critères de compétence sont deux choses entièrement différentes.

La commission adopte l'amendement.

Amendement AE15 de M. Jean-Paul Lecoq.

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Nous ne savons pas quelle sera l'utilité du satellite Egide ni comment seront circonscrites ses missions. On ne sait pas davantage si ces informations sont classifiées ni si tout cela est déjà défini. Egide contribuera-t-il à la militarisation de l'espace, que j'évoquais tout à l'heure, et la France jouera-t-elle un mauvais rôle dans ce domaine ? Aurons-nous un jour un débat sur l'espace et son utilité ? Il y a là beaucoup d'inconnues. Peut-être Mme la rapporteure pour avis pourra-t-elle nous communiquer des éléments à ce propos. Que recouvre le terme de « satellite patrouilleur » ? Est-ce un frelon asiatique qui mangera les abeilles butinant nos satellites ?

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C'est plutôt nous qui sommes l'abeille attaquée par le frelon. Techniquement, le satellite patrouilleur dénommé YODA (Yeux en orbite pour un démonstrateur agile), démonstrateur composé de deux nano-satellites qui a pour fonction de protéger nos satellites militaires contre d'éventuelles attaques, devrait être mis en orbite prochainement, dans l'idéal dès 2024. Le programme Egide vise, quant à lui, à produire un satellite patrouilleur plus lourd et véritablement opérationnel, qui pourra succéder à YODA vers 2030. Avis défavorable.

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Monsieur Lecoq, un amendement d'appel n'a pas de place dans un rapport annexé. En revanche, je comprends votre curiosité légitime quant à l'ensemble de ces dispositifs, nimbés d'un mystère qui mérite d'être dissipé. Je vous suggère de retirer votre amendement, moyennant l'engagement que la commission se penchera sur cette question.

L'amendement est retiré.

Amendement AE14 de M. Jean-Paul Lecoq.

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Il s'agit également d'un amendement d'appel, relatif à la protection de nos territoires d'outre-mer, sur lesquels l'exécutif semble porter systématiquement un regard purement utilitaire – ici un port spatial, là une présence dans un océan nous assurant des capacités de projection militaire stratégiques, là encore des ressources naturelles précieuses à exploiter, tandis que partout les services publics sont en berne et qu'on rencontre, entre autres, des problèmes de chômage, de coût de la vie et d'insécurité.

La France est présente sur plusieurs continents : il faut l'assumer et, dans le cadre de la loi de programmation militaire, prévoir la protection de ces territoires, où qu'ils soient et qu'il s'agisse de leurs espaces maritimes, terrestres ou aériens. Les zones économiques exclusives sont insuffisamment dotées en protection ; la surveillance de la surpêche doit être améliorée, ainsi que la lutte contre les divers trafics maritimes et la surveillance de la pollution.

J'ose espérer que tout le matériel militaire qui sera mis en orbite permettra aussi ce travail et cette surveillance mais si nous voulons être des acteurs agiles, rapides et efficaces, ces informations doivent pouvoir être communiquées très vite à des espaces opérationnels susceptibles d'intervenir immédiatement pour arrêter et déférer à la justice ceux qui contreviennent aux règles internationales.

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Je partage votre avis quant à l'aspect prioritaire des outre-mer dans cette nouvelle loi de programmation militaire. Cette priorité s'exprime d'ailleurs financièrement et j'ai moi-même formulé plusieurs propositions figurant dans le rapport, comme la montée en puissance de la réserve opérationnelle de l'armée de terre de nos outre-mer et la substitution aux tournantes de quatre à six mois, conçues sur le modèle des opérations extérieures, d'affectations de permanents venant en famille entretenir ce lien « à hauteur d'homme ».

Aux frontières, les enjeux diffèrent selon les outre-mer concernés : à Mayotte, il s'agit de l'immigration, en Guyane, de la drogue venue du Suriname et du Brésil. Dans le cadre du groupe d'études sur l'eau et la biodiversité que je préside, je travaille beaucoup sur le trafic d'espèces végétales et animales menacées. Notre biodiversité se concentre beaucoup sur les outre-mer et cette question est également un problème de sécurité car ce trafic d'espèces menacées est, après la traite d'êtres humains et la drogue, le troisième pourvoyeur de fonds du terrorisme. Vous prêchez donc une convertie. Avis favorable.

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Je comprends la préoccupation exprimée par l'auteur de l'amendement et la rapporteure pour avis mais, sur le plan rédactionnel, le mot « priorité » introduit une hiérarchie par rapport à la défense du territoire hexagonal. Je propose donc de rectifier l'amendement en remplaçant les mots « une priorité » par les mots « un impératif ».

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J'en suis d'accord, monsieur le président.

La commission adopte l'amendement ainsi rectifié.

Amendement AE13 de M. Jean-Paul Lecoq.

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Le statut de notre industrie militaire interroge. Les députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine considèrent en effet que seul un service public employant des ouvriers d'État peut assumer un carnet de commandes très difficile à anticiper et qui comporte de fortes variations, et permettre ainsi à notre État de rester pleinement souverain dans différents domaines, notamment pour ce qui concerne les munitions de petit calibre, qui ont fait l'objet d'un rapport d'André Chassaigne.

Il faut questionner en profondeur le rôle social et économique de notre secteur de l'armement, qui oblige aujourd'hui notre diplomatie à faire des courbettes devant des chefs d'État parfois peu scrupuleux pour vendre nos fleurons militaires. Ce n'est pas une bonne chose et, plutôt que de faire dépendre de nos exportations la survie de notre économie militaire et notre capacité à fournir des munitions à nos armées, je propose d'éloigner le secteur de l'armement de la libre concurrence.

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Je suis, d'une manière générale, favorable à tout ce qui concourt à notre autonomie stratégique et à la réindustrialisation de notre pays. J'ai moi-même, dans mes fonctions antérieures, subi les désagréments liés à l'utilisation de munitions au rabais et défectueuses. Je suggère toutefois de retirer cet amendement et de le retravailler car l'idée de renationalisation supposerait en effet que l'État reprendrait la main sur cette industrie, et je ne suis pas certaine qu'il soit souhaitable d'aller jusque-là.

En l'état, donc, avis défavorable. Peut-être pourriez-vous substituer au terme de « renationalisation » celui de « relocalisation » de la production de munitions de petit calibre.

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Nous souhaitons vraiment renationaliser, car c'est ce qui nous assurera l'indépendance. Nous maintenons donc l'amendement.

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Le groupe Rassemblement national est favorable à cet amendement essentiel. Nous travaillons, du reste, nous aussi, sur ce sujet : je pense au rapport de Julien Rancoule sur les munitions.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AE72 de M. Frédéric Petit.

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Dans la version actuelle du texte, la coopération est justifiée par le fait qu'elle coûte moins cher et peut offrir de bonnes occasions. Sans trop modifier les mots employés, l'amendement tend à ce que la coopération, en particulier dans le cadre franco-allemand et européen, soit présentée comme stratégique. Elle procède en effet d'une stratégie consistant à ne pas nous défendre toujours tout seuls.

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L'adoption de l'amendement AE1 du président et du groupe Démocrate satisfait celui-ci, qu'il conviendrait donc de retirer, mais aussi de réécrire pour intégrer la mutualisation des coûts.

L'amendement est retiré.

Amendement AE42 de M. Jérôme Buisson.

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Selon l'alinéa 57 de la sous-partie du rapport annexé intitulée « Des coopérations au service de l'autonomie stratégique européenne », les programmes en coopération contribueront à l'objectif de renforcer « l'autonomie stratégique européenne ».

L'amendement a pour objet de donner priorité au renforcement de l'autonomie stratégique française avant celle de l'autonomie stratégique européenne dans l'établissement de programmes de coopération en matière d'armement. Comme l'amendement AE41, il n'ajoute que quelques mots mais révèle les profondes différences de vision nous séparant des pessimistes qui considèrent que la France serait trop petite pour le monde et que l'intégration européenne serait le seul horizon de notre nation. Nous pouvons évidemment participer à des programmes en coopération mais ceux-ci doivent concourir en premier lieu au renforcement de notre souveraineté.

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Au-delà de la sémantique, cet amendement est sous-tendu par une vision stratégique qui nous sépare. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AE67 de M. Aurélien Taché.

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En matière de défense nationale, la concentration des pouvoirs dans les mains de l'exécutif limite le contrôle effectif du Parlement. Pour garantir une démocratisation accrue de la prise de décision, les parlementaires doivent pouvoir interroger les responsables politiques et militaires et être associés étroitement à la définition des objectifs stratégiques. Un contrôle accru du Parlement sur l'exportation d'armements est également nécessaire et permettrait de s'assurer que ces transactions respectent les valeurs et les principes éthiques de notre nation. Les parlementaires seraient en mesure d'évaluer si les ventes d'armes sont conformes aux engagements internationaux, aux droits de l'Homme et aux objectifs de la politique étrangère du pays. Cette mesure contribuera à une plus grande transparence et à une meilleure prise en compte des préoccupations de nos concitoyens dans les décisions stratégiques de la nation.

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L'Assemblée nationale peut déjà faire tout cela par elle-même. Sous-entendre que ce serait actuellement impossible affaiblit notre rôle. Je vous invite, à ce propos, à lire le rapport rédigé par Jacques Maire durant le mandat précédent sur les enjeux de l'exportation d'armement.

En outre je n'adhère pas à l'idée de mélanger les opérations militaires et les exportations d'armement.

Avis défavorable. En tout état de cause, nous discuterons ultérieurement de la place du Parlement pour les quatre années à venir dans le cadre de la loi de programmation militaire, et je veillerai à ce qu'il figure en bonne place.

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Le groupe Rassemblement national se prononcera également contre cet amendement car la Constitution comporte déjà tous les mécanismes de contrôle nécessaires. Le premier alinéa de son article 35 subordonne d'ailleurs la déclaration de guerre à l'autorisation du Parlement, lequel est systématiquement informé par le Gouvernement de l'intervention des forces armées à l'étranger. Nous devons donc rester dans l'esprit de notre République, qui fait du chef de l'État le chef des armées, sans adopter un modèle différent, dans lequel les forces armées pourraient être une armée subordonnée au Parlement.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AE50 de M. Kévin Pfeffer.

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Cet amendement tend à réaffirmer notre intention de quitter le commandement militaire intégré de l'OTAN. Nous en avons déjà débattu plusieurs fois au sein de cette commission et vous connaissez notre position : la France doit pouvoir fixer ses propres stratégies militaires et disposer d'une autonomie dans ses décisions stratégiques, qui doivent toutes être conformes à nos propres intérêts. Afin d'éviter tout risque de suivisme, nous resterons sur cette position.

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Cette position est à l'opposé de ce que j'ai défendu dans mon rapport. Nous ne pouvons pas être influents en pratiquant la politique de la chaise vide. Au contraire, il ne faut pas seulement viser des postes de commandement de niveau général mais précisément investir l'OTAN et les organisations internationales à tous les niveaux, à commencer par celui de très jeunes officiers qui peuvent prendre leurs marques pour revenir un jour en connaissant bien ces institutions. Seule une bonne connaissance des institutions internationales peut nous permettre de promouvoir notre vision et d'être plus influents, ce qui concourt à notre souveraineté. Il y a là entre nous une ligne de fracture. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AE43 de M. Jérôme Buisson.

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À l'alinéa 60 de la sous-partie du rapport annexé intitulée « Des coopérations au service de l'autonomie stratégique européenne », sont notamment cités les programmes d'armement menés en coopération – MGCS et SCAF. Il n'y figure cependant aucune réserve ou condition au développement de ces programmes, qui suscitent de grands doutes, portant notamment sur la captation de technologies nationales par des entreprises étrangères ou sur les divergences de cahier des charges en termes de besoins capacitaires.

L'amendement a pour objet d'introduire dans le cadre des programmes de coopération en matière d'armement un principe de sauvegarde des technologies nationales et d'adéquation aux besoins capacitaires des forces armées, de telle sorte que ces programmes soient abandonnés s'ils ne respectent pas ces critères et que les programmes SCAF et MGCS soient remplacés par des programmes d'armement nationaux.

Comme nous l'avons indiqué en défendant l'amendement AE42, nous ne sommes pas opposés au principe des coopérations mais il est impératif qu'elles sauvegardent nos intérêts, nos technologies et notre souveraineté.

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Nous avons en commun certains objectifs mais pas les façons de les atteindre. Pour conserver la totalité du spectre, objectif que vous avez également soutenu en exposant la position de votre groupe, la seule manière d'éviter de devoir faire des choix est d'unir nos forces à celles de nos alliés européens. Je crains que les programmes que vous souhaitez abandonner au profit d'un programme national ne soient, en fait, purement et simplement abandonnés. Avis défavorable.

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La France est capable de faire le Rafale mais elle ne peut faire le SCAF toute seule car il s'agit d'une intégration de projets beaucoup plus complexes. Comme vient de l'expliquer la rapporteure pour avis, le SCAF et le Rafale ne se situent pas au même endroit du spectre.

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Il s'agit d'un amendement à double détente car il comporte, d'une part, des précisions très intéressantes sur les conditionnalités, précisant que les programmes visés ne doivent pas porter atteinte à l'indépendance et aux besoins capacitaires de la France – ce dont les autorités nationales françaises sont très conscientes –, et vise, d'autre part, à l'abandon de certains programmes. Vous tirez, quant à vous, une conclusion unilatérale en posant pour principe que les conditions ne sont pas respectées, ce qui est tout autre chose.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AE12 de M. Jean-Paul Lecoq.

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La LPM engage notre pays pour plusieurs années et pour une dépense de 413 milliards d'euros : ce n'est pas rien, surtout à une époque où une partie des Français est dans la rue, où l'on souffre d'un déficit démocratique et où l'argent manque pour les actions sociales. Il doit y avoir un débat avec le peuple sur ce projet de loi. Une loi de programmation définit des priorités budgétaires que le peuple doit pouvoir discuter. Pourquoi ces priorités ? Quelles sont leur utilité et leur efficacité ? Il est bon de discuter de ces questions au Parlement mais il est également opportun d'avoir un échange avec la population à ce sujet.

Notre pays a perdu le réflexe d'associer le peuple, de l'informer, par exemple dans des émissions de télévision, et de le convier au débat national. Vous allez me dire que vous ne choisissez pas les thèmes des programmes audiovisuels. À d'autres ! Lorsque l'exécutif veut ouvrir un débat national sur un sujet, il sait actionner les bons leviers pour qu'il ait lieu. Cet amendement vise à ce qu'un tel débat se tienne sur ce projet de loi de programmation militaire.

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Je ne partage pas votre vision. Les orientations contenues dans ce projet de loi figuraient dans le programme du président de la République débattu pendant les campagnes présidentielle puis législatives. En outre, arrêtons d'affaiblir le Parlement ! Le débat se tiendra en séance publique et des amendements seront déposés sur le suivi parlementaire de la LPM : je nous fais confiance ! Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AE57 de M. Lionel Vuibert.

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Cet amendement vise à attribuer les futurs investissements en priorité aux zones en reconversion industrielle disposant des compétences et capacités nécessaires. La LPM représente un effort d'investissement sans précédent dans le domaine de l'armement. Des territoires comme celui que je représente, actuellement en reconversion industrielle, doivent pouvoir se positionner sur les marchés de la défense, qui offrent des perspectives de long terme.

Il faut saisir cette occasion pour donner à ces territoires, dans la mesure où ils disposent des compétences et des capacités nécessaires, une chance de revenir dans la course économique, grâce à ces marchés captifs. L'autre objectif, essentiel, est de renforcer notre souveraineté dans le domaine des investissements militaires.

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Les armées n'ont pas de rôle à jouer dans l'aménagement du territoire. Vous ciblez la BITD mais je ne suis pas sûre que l'on puisse mettre en œuvre votre amendement, ce qui ne serait de toute façon pas souhaitable. Je doute de la compétence de la commission des affaires étrangères pour trancher un sujet de nature si nationale. Comme le sujet semble vous tenir à cœur, je vous invite à déposer votre amendement auprès de la commission de la défense.

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Votre amendement est légitime mais il pose d'innombrables problèmes relatifs à l'aménagement du territoire, par exemple la question des zones de conversion. Je suis d'accord avec la rapporteure pour avis, notre commission n'est absolument pas compétente pour trancher ce sujet, qui plus est par voie d'amendement et sans débat approfondi. Il serait préférable que vous retiriez l'amendement, quitte à le redéposer dans une rédaction qui laisse de côté les domaines qui ne sont pas les nôtres.

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J'accepte de le retirer et d'en reprendre la rédaction mais j'appelle votre attention sur le fait que si des groupements d'industriels compétents cherchent à accéder à ces marchés, leur tâche est difficile. Il faut veiller à ce que tous les industriels de notre pays puissent, quand ils en ont la capacité, obtenir des commandes publiques militaires ; mon objectif est que certains d'entre eux bénéficient d'un accès facilité. Peut-être aurais-je dû préciser ce point dans l'amendement ? Je retire ce dernier, que je représenterai, en tenant compte de cet aspect car le sujet me tient à cœur ainsi qu'aux industriels de mon département et, j'en suis sûr, d'autres régions et départements de France.

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Je n'ai pas de conseil à vous donner mais je conserve la tentation du vieux professeur de français de chercher à améliorer la rédaction : si vous remplaciez « ciblant en priorité » par « exploitant les possibilités » des zones en reconversion industrielle, il serait plus facile de soutenir votre proposition.

L'amendement est retiré.

Amendement AE4 de M. Jean-Louis Bourlanges.

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Cet amendement vise, dans sa rédaction originelle, à insérer la phrase suivante : « L'élévation de l'effort national de défense à hauteur d'au moins 2 % du produit intérieur brut à partir de 2025 constitue un objectif impératif qui engage à la fois les forces armées françaises et celles de nos alliés européens ». Je vais plaider coupable : cette rédaction est juridiquement maladroite car on n'engage pas les forces armées et encore moins celles de nos alliés. Je propose donc de la rectifier et de remplacer « à la fois les forces armées françaises et celles de nos alliés européens » par « l'État ».

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Ainsi rectifié, j'émets un avis favorable. Il rejoint un autre de vos amendements, déjà adopté, qui ne concernait cependant pas le rapport annexé.

La commission adopte l'amendement AE4 rectifié.

Amendement AE51 de M. Sébastien Chenu.

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Cet amendement a pour but de préciser que la contribution de la France à la Facilité européenne pour la paix (FEP) sera financée par une enveloppe extérieure à celle de la LPM. Nous aimerions que ces crédits soient identifiés dans un programme spécifique, inséré dans la loi de programmation des finances publiques (LPFP). Cela nous permettrait d'avoir un débat sur leur utilisation et d'instaurer un plafond, révisable chaque année en fonction du contexte géopolitique.

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Le sujet est technique. Votre amendement est en grande partie satisfait car le soutien à l'Ukraine est exclu du champ de la programmation militaire ; si cette aide venait à augmenter, la hausse ne pèserait pas sur le budget des armées. Le financement de la contribution à la FEP et du soutien à l'Ukraine sera assuré en construction budgétaire.

Comme vous le savez, le Quai d'Orsay cofinance la FEP pour la partie non létale, le ministère des armées allouant les crédits relatifs au domaine létal. Il me semble inopportun de créer un programme unique au sein de la mission Action extérieure de l'État car l'effort financier porte actuellement sur l'aspect létal. En outre, il n'est pas souhaitable de plafonner a priori notre soutien à l'Ukraine car nous devons pouvoir l'adapter rapidement à l'évolution de la situation sur le terrain. Nous débloquerons sans doute des financements au cours de la gestion budgétaire, sans pratiquer de politique de chèque en blanc. Avis défavorable.

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La FEP est un programme communautaire financé par le budget de l'Union européenne, lui-même abondé par les contributions des États membres. Je n'ai pas très bien saisi votre explication sur le cofinancement entre le ministère de l'Europe et des affaires étrangères et celui des armées.

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C'est bien un financement communautaire, auquel participent le ministère des armées et le Quai d'Orsay.

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Je suis opposée à l'amendement du Rassemblement national, qui est en effet partiellement satisfait car le soutien financier à l'Ukraine n'entre pas dans le champ de la LPM. En outre, l'idée d'un plafonnement de la FEP va à l'encontre de notre position en faveur de l'Europe de la défense, à laquelle s'oppose le Rassemblement national. Outil au périmètre variable créé pour agir au Sahel et actuellement mobilisé pour la guerre en Ukraine, la FEP reçoit une contribution française dont le montant est examiné chaque année par le Parlement ; je ne vois donc pas de raison de plafonner les crédits dans cette loi.

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La FEP n'est pas destinée qu'à l'Ukraine. L'amendement ne prévoit aucun plafonnement des crédits de la FEP, il vise à clarifier le financement. Vous parlez d'évolution des enjeux, raison pour laquelle il faut précisément sortir l'enveloppe de la FEP de celle de la LPM. Dans le cas contraire, on pourrait amputer les crédits des armées pour financer la FEP : l'objectif premier de l'amendement est d'empêcher toute ponction de la LPM.

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La FEP est une coopération européenne structurée, qui n'engage pas tous les États membres et qui est donc financée par des contributions nationales. Il n'en reste pas moins que vous êtes très réservé sur cet outil.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AE11 de M. Jean-Paul Lecoq.

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La politique étant l'art de la répétition, je demande à nouveau l'ouverture d'un débat portant sur le poids budgétaire du nucléaire militaire. Le ministre des armées, comme son prédécesseur d'ailleurs, a maintes fois dit qu'il acceptait que se tienne un débat sur le sujet, mais à huis clos ; Mme la rapporteure pour avis vient de dire que mener un débat avec le peuple français reviendrait à affaiblir le Parlement. Chiche ! Débattons du nucléaire militaire au Parlement, mais devant le peuple et non à huis clos.

J'estime le coût du nucléaire militaire à un montant compris entre 6 milliards et 10 milliards d'euros par an en crédits de paiement, soit le double de l'ensemble du budget du ministère de l'Europe et des affaires étrangères, ce qui devrait nous interroger dans cette commission.

La commission rejette l'amendement.

Suivant la préconisation de la rapporteure pour avis, la commission rejette l'amendement AE68 de M. Aurélien Taché.

Amendement AE2 de M. Jean-Louis Bourlanges.

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Cet amendement porte sur les conditions dans lesquelles le Parlement contrôle la politique d'exportation d'armes. Le Gouvernement présente un rapport annuel au Parlement sur le sujet depuis 1997 et sur les biens à double usage depuis 2022, apport que l'on doit à notre ancien collègue Jacques Maire. La présentation de ces documents participe d'une saine transparence sur ces questions.

Afin de permettre au Parlement de disposer d'informations aussi précises que possible, l'amendement vise à préciser, dans le rapport annexé, que le rapport annuel sur les exportations d'armements ne se borne pas à exposer la politique d'exportation de la France ainsi que les modalités du contrôle des armements et des biens sensibles, mais dresse également un état des lieux approfondi du marché mondial des exportations d'armements et précise la place qu'y prennent les industriels du pays, en détaillant les prises de commandes et les livraisons réalisées, ainsi que les principaux clients étrangers en la matière.

L'équilibre que nous avons trouvé avec le Gouvernement lors de la précédente législature n'est pas modifié et seule l'information contextuelle dans laquelle s'exerce l'action de contrôle du Parlement évolue. Cela ne va pas de soi : les armées sont très réservées à l'idée de diffuser une quantité d'informations qu'elles jugent excessive mais d'autres acteurs sont plus favorables à cet effort de transparence.

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Notre ancien collègue Jacques Maire avait conduit de nombreux travaux à ce sujet lors de la législature précédente. L'équilibre trouvé à la fin de la législature était le bon : nous devons le conserver et refuser de changer en permanence les règles du jeu car cela enlève de la clarté au dispositif. Il importe d'articuler au mieux la transparence avec le secret-défense. Voilà pourquoi, j'émets un avis défavorable à votre amendement.

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L'amendement me pose problème : pas son début, car dresser un état des lieux du marché mondial des exportations d'armement et de la place des industries de défense françaises dans la compétition internationale pourrait être utile, mais détailler toutes les commandes et livraisons ne me semble pas opportun. Sur ce point, je rejoins Mme la rapporteure pour avis.

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Je ne suis pas d'accord avec Mme Pouzyreff sur la confidentialité des données. Ces dernières existent et circulent. Dans ma circonscription, je connais deux instituts qui travaillent sur ces éléments. Je me sers de leur travail mais je préférerais que ces faits nous soient directement soumis, en complément du rapport que le Gouvernement nous transmet grâce aux efforts de Jacques Maire. Je voterai donc en faveur de l'amendement.

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Si je suivais la proposition implicite de Mme Pouzyreff et que je ne gardais que la première partie de l'amendement, le soutiendriez-vous, madame la rapporteure pour avis ?

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Dans cette hypothèse, je m'en remettrais à la sagesse de la commission.

La commission rejette l'amendement.

Puis, elle émet un avis favorable à l'adoption de l'article 2 modifié.

Article 3 : Moyens de la politique de défense

Amendement AE28 de M. Alain David.

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Cet amendement d'appel vise à neutraliser les effets de l'inflation sur la programmation militaire, afin que les montants programmés soient effectivement perçus.

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Le ministère des armées a déjà consenti un effort pour prendre en compte l'inflation. Je vous invite à vous assurer qu'il en soit de même pour les crédits militaires dans les futurs projets de loi de finances. L'avis est défavorable mais nous aurons chaque année l'occasion de contrôler la sincérité budgétaire de la LPM.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AE10 de M. Jean-Paul Lecoq.

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Nous doutons de la fiabilité des chiffres du projet de loi, notamment du total de 400 milliards ou de 413,3 milliards d'euros : un apport extrabudgétaire doit provenir, selon l'alinéa 80 du rapport annexé, du produit de ventes immobilières, de la tarification à l'acte du service de santé des armées et de la tarification de certaines prestations d'imagerie spatiale, mais comment planifier ces rentrées complémentaires ?

Lorsque le président de la République a annoncé en grande pompe ce projet de loi de programmation militaire, il a avancé le chiffre de 413,3 milliards d'euros pour la période 2024-2030 mais nous découvrons que les ressources ne dépasseront pas 400 milliards. L'exécutif a l'obligation d'être sincère avec les représentants du peuple car la différence n'est pas anecdotique. De tels ajouts extrabudgétaires sont très précaires et portent atteinte à la fiabilité des chiffres inscrits dans le projet de loi.

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J'ai déjà obtenu des précisions sur la moitié de ces 13 milliards. L'amendement suivant, déposé par M. David, vise à éclairer l'origine de ces ressources : je vous propose de l'adopter après avoir retiré votre amendement. L'avis est défavorable mais votre préoccupation est prise en compte.

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Si vous donnez un avis favorable à l'amendement de M. David en reconnaissant que des précisions sont nécessaires sur ces financements, je suis prêt à retirer mon amendement.

L'amendement est retiré.

Amendement AE27 de M. Alain David.

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Cet amendement vise à appeler l'attention sur le fait que les besoins programmés de 413,3 milliards ne correspondent pas aux crédits documentés pour la période 2024-2030, ceux-ci ne s'élevant qu'à 400 milliards. Dès lors, il existe des doutes sérieux sur le respect de la programmation budgétaire.

La part manquante de 13,3 milliards doit être couverte par des ressources complémentaires, qui proviendraient à la fois de ressources extrabudgétaires de 5,9 milliards et de la solidarité interministérielle. Ces crédits seront couverts par des minorations d'autres dépenses du budget de l'État, à ce jour non documentées. Quels budgets seront affectés par ces coupes ? L'éducation nationale ? La justice ? Nous l'ignorons.

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Attachée à la sincérité budgétaire année après année, je me suis engagée à donner un avis favorable à votre amendement.

La commission adopte l'amendement.

Elle émet un avis favorable à l'adoption de l'article 3 ainsi modifié.

Après l'article 3

L'amendement AE34 de M. Alain David est retiré.

Article 4 : Provision au titre des surcoûts OPEX et MISSINT

La commission émet un avis favorable à l'adoption de l'article 4 non modifié.

Article 5 : Carburants opérationnels

Amendement de suppression AE9 de M. Jean-Paul Lecoq.

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L'article 5 octroie à la mission Défense des mesures financières exceptionnelles en cas d'augmentation du coût des carburants opérationnels. Avec un budget des armées s'approchant des 70 milliards d'euros par an d'ici à 2030, il est du devoir du ministère des armées de provisionner les crédits nécessaires à une éventuelle hausse du coût des carburants opérationnels. Il n'est pas opportun de faire supporter au budget général, donc à d'autres ministères moins bien dotés financièrement, les éventuelles variations de prix de ces carburants. Le ministre nous a expliqué hier dans l'hémicycle qu'il avait dans un premier temps bénéficié d'une baisse des prix qui lui avait donné des marges financières, celles-ci ayant disparu à la suite du retournement des cours des carburants.

Le budget des armées doit être sincère et ne doit pas vampiriser celui des autres politiques de la nation comme l'éducation ou la justice ; or le projet de loi sous-entend qu'il en ira ainsi. Les armées n'ont pas consenti suffisamment d'efforts de sobriété énergétique : il ne faut pas récompenser ce manque d'action par un budget extensible. Dans ma circonscription, il y avait des réserves de carburant de l'OTAN – peut-être existent-elles ailleurs ? – : utilisons-les ! Il faut anticiper pour ne pas subir les aléas.

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Mon avis est défavorable parce que cette mesure concourt à la sincérité du budget de la LPM.

La commission rejette l'amendement.

Puis, elle émet un avis favorable à l'adoption de l'article 5 non modifié.

Article 6 : Effectifs

La commission émet un avis favorable à l'adoption de l'article 6 non modifié.

Après l'article 6

Amendement AE58 de Mme Laurence Robert-Dehault.

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Ce projet de loi de programmation militaire entend mettre l'accent sur plusieurs secteurs dans lesquels la France enregistre un retard par rapport à ses partenaires et concurrents. Ses ambitions sont explicitées dans le rapport annexé, qui insiste notamment sur le développement d'une filière française de drones à munitions téléopérées, de manière à atteindre une capacité de vol en essaim d'ici à 2030, de dispositifs de lutte anti-drones, ainsi que d'une cyberdéfense de premier plan. À cette fin, une enveloppe de 5 milliards d'euros sera consacrée à l'acquisition de drones et une autre de 4 milliards au domaine cyber.

Toutefois, il ne suffit pas d'acheter des matériels ; encore faut-il disposer de femmes et d'hommes capables de conduire des opérations défensives ou offensives et d'assurer la maintenance des équipements et des infrastructures. Or, sur ce plan, les arbitrages ministériels ne sont pas à la hauteur, ce qui suscite l'inquiétude du monde militaire. Faute d'une augmentation importante des effectifs, ces développements ambitieux se feront au détriment des autres domaines, ce que le contexte stratégique ne justifie pas.

En conséquence, nous demandons au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport présentant les conséquences opérationnelles des arbitrages effectués en matière d'augmentation des effectifs, afin d'en tirer les leçons pour l'avenir.

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Sincèrement, avec la création de 6 300 emplois et l'objectif de disposer d'un militaire de réserve pour deux d'active, je ne pense pas que l'on puisse soutenir que l'augmentation des effectifs est trop faible. Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Article 7 : Actualisation

Amendement AE30 de M. Alain David.

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Il convient de prévoir non pas une mais deux actualisations de la programmation, en 2026 et 2028, qui répondraient à des objectifs distincts mais complémentaires.

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Avis défavorable. D'une part, une telle mesure me semble quelque peu disproportionnée. D'autre part, il s'agirait d'une consigne adressée au prochain président de la République.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AE29 de M. Alain David.

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Il serait bon d'élaborer un nouveau livre blanc sur la défense avant toute actualisation de la loi de programmation militaire. Il s'agit d'un exercice incontournable si l'on veut adapter nos capacités militaires aux nouveaux enjeux de sécurité dans un contexte stratégique en rapide mutation.

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Avis défavorable. Peut-être y aura-t-il besoin d'un nouveau livre blanc mais je ne suis pas certaine qu'il faille se lier les mains dès maintenant.

La commission rejette l'amendement.

Elle émet un avis favorable à l'adoption de l'article 7 non modifié.

Article 8 : Rapport sur le bilan de l'exécution de la programmation

La commission émet un avis favorable à l'adoption de l'article 8 non modifié.

Article 9 : Rapport sur les enjeux et l'évolution de la programmation

La commission émet un avis favorable à l'adoption de l'article 9 non modifié.

Après l'article 9

Amendements AE3 de M. Jean-Louis Bourlanges et AE32 de M. Alain David (discussion commune).

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Le Parlement contrôle l'action du Gouvernement et évalue les politiques publiques. À ce titre, il joue un rôle majeur pour atteindre les objectifs de la loi de programmation militaire.

L'article 9 de la loi du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense fixait le cadre du contrôle par les commissions des finances et de la défense de l'exécution et du suivi de cette programmation. Mon amendement vise à reconduire ce dispositif tout en incluant la commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale dans le champ des commissions appelées à exercer un droit de regard. En effet, dès lors que, à la différence du Sénat, la défense et les affaires étrangères ne relèvent pas d'une seule et même commission, il convient d'assurer un suivi cohérent de l'adéquation des moyens alloués aux forces armées avec les orientations diplomatiques et le contexte géopolitique des actions de la France.

Vous avez cité à plusieurs reprises la formule de Clausewitz : « La guerre est la continuation de la politique par d'autres moyens ». Cedant arma togae, ajouterai-je, suivant l'adage romain – « Que les armes le cèdent à la toge ». Il faut, au nom de ces sains principes républicains, impérativement défendre les droits de notre commission dans ce domaine.

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L'amendement du groupe Socialistes et apparentés vise précisément à inscrire dans la loi le rôle du Parlement et de ses commissions chargées de la défense dans le contrôle des engagements pris dans la programmation militaire. Il reprend à cette fin l'article 9 de la précédente LPM.

Cet ajout est nécessaire dans la mesure où la programmation financière est susceptible de faire l'objet à tout moment d'améliorations, de rééchelonnements, de réaffectations, peut-être à budget constant, mais toujours sous le contrôle du Parlement. Une information plus précise est donc indispensable au débat.

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J'y suis très favorable mais je préfère l'amendement du président Bourlanges, qui prévoit aussi un suivi par la commission des affaires étrangères.

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Je tiens en effet à ce que notre commission soit explicitement mentionnée.

La commission adopte l'amendement AE3.

En conséquence, l'amendement AE32 tombe.

Amendement AE31 de M. Alain David.

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Nous souhaitons inviter le Gouvernement à étudier les voies et les moyens d'exclure du calcul du déficit public les dépenses et investissements en matière de défense, tant du point de vue de la comptabilité nationale que pour le respect des traités et règlements européens.

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J'y suis totalement opposée. Le budget que nous votons doit être sincère. En outre, cela ouvrirait la voie à une possible escalade militaire. En définitive, le déficit existera quand même, et il pèsera sur les autres dépenses de l'État.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AE33 de M. Alain David.

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Cet amendement vise à demander un rapport qui évalue dans quelle mesure la loi de programmation militaire inscrit dans les faits la coopération européenne et en quoi cette dernière participe pleinement de la stratégie française d'autonomie dans le nouveau contexte stratégique européen. Si la capacité de la France à entraîner ses partenaires européens vers une plus grande convergence dépend étroitement de l'ampleur et de la qualité de son propre effort de défense, la coopération européenne doit désormais faire pleinement partie de la stratégie de défense nationale. Or nous manquons d'informations précises concernant la contribution des projets de coopération européenne à la défense nationale, alors même que les relations stratégiques en Europe sont en cours de redéfinition rapide.

La commission adopte l'amendement.

Amendement AE53 de M. Lionel Vuibert.

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Depuis 2008, de nombreuses casernes ont fermé, ce qui provoque des difficultés économiques et sociales. Des dispositifs d'accompagnement ont été instaurés. Le présent amendement vise à demander au Gouvernement un rapport dressant le bilan précis, à l'aide de données consolidées, des zones de restructuration de la défense (ZRD), des contrats de redynamisation de site de défense (CRSD) et des plans locaux de redynamisation (PLR) conclus entre l'État et les collectivités concernées.

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J'ai déjà eu l'occasion de m'exprimer sur les questions d'aménagement du territoire. Il me semble que cet amendement est assez éloigné des préoccupations de notre commission. Cela étant, ayant moi-même des casernes et des écoles militaires dans ma circonscription, je suis bien placée pour savoir combien ce sujet vous tient à cœur. C'est pourquoi je vous invite à retirer votre amendement et à le redéposer en vue de l'examen du texte par la commission de la défense ; à défaut, j'y émettrais un avis défavorable.

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Contrairement à l'amendement AE57, qui visait à accorder une priorité à certains territoires pour la mobilisation des industries de défense, celui-ci se contente de demander une analyse de l'impact des décisions prises. Il me semble que l'éloignement de notre domaine est moindre.

La commission rejette l'amendement.

Article 10 : Abrogation du titre Ier de la LPM 2019-2025

La commission émet un avis favorable à l'adoption de l'article 10 non modifié.

TITRE II

dispositions NORMatives intéressant

La défense nationale

CHAPITRE II

Renseignement et contre-ingérence

Article 20 (articles L. 4122-11 et L. 4122-12 [nouveaux] du code de la défense) : Régime de déclaration préalable assorti de sanctions pour les militaires souhaitant se reconvertir dans des entreprises de défense étrangères

Amendement AE8 de M. Jean-Paul Lecoq.

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L'article 20 prévoit que l'autorité militaire statue sur toute demande d'un ancien militaire de devenir salarié d'une entreprise étrangère exerçant dans le domaine de la défense ou de la sécurité. Nous proposons de supprimer purement et simplement cette possibilité. Dans un contexte géopolitique où la confiance est très limitée, où le Maroc et les États-Unis peuvent écouter le téléphone portable du président de la République et où les logiciels espions se multiplient, il ne semble pas raisonnable de prendre un tel risque, quand bien même les agents qui souhaiteraient travailler à l'étranger seraient soumis à un contrôle a priori approfondi. Leurs connaissances professionnelles, humaines, sociales techniques peuvent être extorquées, volontairement ou non. Chacune de ces personnes est susceptible de livrer des informations importantes, voire classifiées. Le Canard enchaîné a récemment révélé que d'anciens pilotes de chasse français avaient été sur le point de travailler pour la Chine moyennant une forte rémunération. Nous proposons donc d'interdire à tout ancien militaire de travailler pour un autre État ou pour une entreprise étrangère.

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Vous proposez une disposition exorbitante du droit commun, qui risque de nuire à l'attractivité du métier des armes. Le cadre de la loi me semble suffisant. Avis défavorable.

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En d'autres termes, madame la rapporteure pour avis, vous êtes pour le contrôle mais contre l'interdiction.

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Savez-vous combien de personnes ont quitté nos armées pour aller travailler dans des entreprises étrangères ? Cela permettrait de mesurer l'éventuel impact sur l'attractivité du métier.

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Je ne dispose pas à l'heure actuelle de cette information mais je vais essayer de l'obtenir.

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M. Lecoq soulève un problème réel mais la solution qu'il propose me semble relever du marteau-pilon ! Peut-être y aurait-il autre chose à faire.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AE7 de M. Jean-Paul Lecoq.

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Dans le même esprit, il s'agit de ne pas prévoir de limitation de durée à l'obligation édictée.

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Avis défavorable, pour les mêmes raisons : cela risquerait de nuire à l'attractivité du métier. De grands bonds technologiques sont effectués en dix ans.

La commission rejette l'amendement.

L'amendement AE6 de M. Jean-Paul Lecoq est retiré.

La commission émet un avis favorable à l'adoption de l'article 20 non modifié.

Après l'article 20

Amendement AE75 de Mme Laetitia Saint-Paul.

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Il s'agit, en cohérence avec ma promotion de l'influence comme nouvelle fonction stratégique, d'encourager la mobilité de nos militaires dans les organisations internationales, ou tout au moins de ne pas la dissuader.

La commission adopte l'amendement.

L'amendement AE71 de M. Frédéric Petit est retiré.

Article 21 (article 628-8-1 [nouveau] du code de procédure pénale) : Communication par l'autorité judiciaire aux services de renseignement des éléments recueillis dans une enquête pour crime ou délit de guerre ou contre l'humanité

La commission émet un avis favorable à l'adoption de l'article 21 non modifié.

CHAPITRE III

Économie de défense

Article 24 (chapitre IX [nouveau] du titre III du livre III du code de la défense) : Constitution de stocks stratégiques et dispositif de priorisation

La commission émet un avis favorable à l'adoption de l'article 24 non modifié.

Après l'article 24

Amendement AE26 de M. Alain David.

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Nous souhaitons que la commande ou l'achat d'équipements et de matériels militaires se fasse prioritairement sous la forme de contrats à long terme, sur une base pluriannuelle. Une véritable économie de guerre ne peut se pérenniser qu'en assurant une stabilité de financement aux entreprises du secteur de la défense, donc une prévisibilité dans leurs commandes. Seuls des contrats pluriannuels peuvent conduire à la constitution et à l'entretien des chaînes de production et des investissements lourds indispensables à la livraison de matériels en quantité demandée.

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Si je partage votre objectif de donner à notre BITD une vision à long terme, je ne souhaite pas inscrire des règles trop rigides dans la loi. Il faut aussi pouvoir répondre aux besoins ad hoc. D'ailleurs, vous indiquez vous-même que les commandes ne peuvent se faire que « prioritairement » sous cette forme. Bref, je crains qu'une telle mesure ne complexifie inutilement les choses, l'objectif étant partagé et votre demande en grande partie satisfaite. Avis défavorable – bien que je comprenne votre préoccupation.

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Je vous sens balancer, madame la rapporteure pour avis… À titre personnel, et même si je comprends vos réticences, je suis favorable à cet amendement car M. David a opté pour une rédaction très prudente. Il me semble que la préoccupation du long terme est indispensable à la montée en puissance vers une économie de guerre.

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L'amendement me semble satisfait : dans les faits, les contrats sont déjà pluriannuels. Je suis d'accord, il importe de donner une visibilité aux entreprises mais la rédaction pose un problème.

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L'objectif est de protéger nos industriels. Il faut, par exemple, que ceux qui investissent dans des chaînes de montage ne se voient pas brutalement retirer le marché, ce qui arrive.

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Je crois que nous sommes tous d'accord sur le principe. C'est l'opportunité de la mesure qui fait débat.

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Pour aller dans le sens de M. David, l'entreprise Arquus, par exemple, a vu son carnet de commandes diminuer de 20 % à 25 %, alors qu'elle ne s'y attendait pas du tout. Elle risque d'avoir du mal à conserver ses effectifs. Je voterai pour l'amendement.

La commission adopte l'amendement.

CHAPITRE IV

Crédibilité stratégique

Article 28 : Ratification de l'ordonnance en matière spatiale et adaptation de la loi sur les opérations spatiales

La commission émet un avis favorable à l'adoption de l'article 28 non modifié.

Elle émet ensuite un avis favorable à l'adoption de l'ensemble des dispositions dont elle est saisie, modifiées.

La séance est levée à 12 h 55

Membres présents ou excusés

Présents. - Mme Farida Amrani, Mme Anne-Laure Babault, Mme Véronique Besse, M. Carlos Martens Bilongo, Mme Chantal Bouloux, M. Jean-Louis Bourlanges, M. Jérôme Buisson, Mme Eléonore Caroit, Mme Mireille Clapot, M. Pierre Cordier, M. Alain David, M. Nicolas Dupont-Aignan, M. Frédéric Falcon, M. Olivier Faure, M. Nicolas Forissier, M. Bruno Fuchs, M. Guillaume Garot, Mme Olga Givernet, M. Philippe Guillemard, M. Michel Guiniot, Mme Marine Hamelet, M. Joris Hébrard, M. Michel Herbillon, M. Alexis Jolly, Mme Brigitte Klinkert, Mme Stéphanie Kochert, M. Jean-Paul Lecoq, Mme Brigitte Liso, Mme Emmanuelle Ménard, Mme Nathalie Oziol, M. Frédéric Petit, M. Kévin Pfeffer, Mme Natalia Pouzyreff, M. Adrien Quatennens, Mme Laurence Robert-Dehault, Mme Laetitia Saint-Paul, Mme Sabrina Sebaihi, M. Vincent Seitlinger, M. Philippe Sorez, M. Bruno Studer, Mme Michèle Tabarot, Mme Liliana Tanguy, Mme Laurence Vichnievsky, M. Patrick Vignal, M. Lionel Vuibert, M. Éric Woerth, Mme Caroline Yadan, M. Frédéric Zgainski

Excusés. - Mme Nadège Abomangoli, M. Louis Boyard, M. Moetai Brotherson, M. Sébastien Chenu, Mme Julie Delpech, M. Thibaut François, M. Meyer Habib, M. Hubert Julien-Laferrière, M. Tematai Le Gayic, Mme Marine Le Pen, M. Vincent Ledoux, M. Laurent Marcangeli, M. Bertrand Pancher, Mme Mathilde Panot, Mme Barbara Pompili, M. Aurélien Taché, Mme Estelle Youssouffa

Assistaient également à la réunion. - M. Jean-Michel Jacques, M. François Ruffin