La Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a examiné pour avis le projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes (n° 762) .
(Mme Christine Decodts, rapporteure pour avis)
Notre commission s'est saisie pour avis des articles 4, 9, 9 bis et 10 du projet de loi relatif à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes, que la commission des affaires économiques examinera au fond à partir de demain soir.
En préalable, je tiens à remercier, pour leur disponibilité et leurs contributions pertinentes, les personnalités qualifiées et les élus que nous avons auditionnés.
Ce projet de loi, qui a été enrichi lors de son examen au Sénat, est techniquement complexe. Son objectif est de faciliter, dans un domaine stratégique pour notre politique énergétique, des procédures longues quant à leur mise en œuvre. Il s'agit donc de les accélérer, sans remettre en cause la sécurité et la sûreté.
Pour illustrer mon propos, permettez à la Dunkerquoise que je suis de revenir sur la centrale nucléaire de Gravelines, qui fait partie des deux plus puissantes d'Europe. Cette centrale, dont la construction a été lancée en mai 1974 – j'avais alors 8 ans –, a été mise en service en 1980, dans un site nucléaire de 150 hectares au cœur du département du Nord, le plus densément peuplé de notre pays.
Il y a presque vingt ans, en 2004, le maire de Gravelines M. Bertrand Ringot, que je salue, et son conseil municipal présentaient la candidature de leur commune pour l'accueil de deux EPR – réacteurs pressurisés européens – en mettant en avant les éléments suivants : la situation géographique, en bordure de la mer du Nord, la disponibilité foncière autour du site, l'acceptation de la population, confirmée par les résultats du baromètre régulièrement tenu par EDF, les besoins en énergie des industries électro-intensives, comme l'usine Aluminium Dunkerque, premier site de production d'aluminium dans l'Union européenne, situé juste à côté, les enjeux d'Arcelor en matière de décarbonation, mais aussi les ressources humaines et les entreprises partenaires disponibles.
Les installations de la centrale de Gravelines sont nécessaires au développement du territoire avoisinant, et l'exemple de cette commune illustre que le déploiement de l'énergie nucléaire est possible même dans des zones densément peuplées.
Le 10 février 2022, le Président de la République a détaillé la nouvelle politique énergétique de la France dans un discours qui, prononcé à Belfort dans le cadre du plan d'investissement France 2030, annonçait la reprise en main de notre destin énergétique. Il s'agit de consommer moins d'énergie et de gagner en sobriété énergétique, l'objectif étant de réduire de 40 % la consommation d'énergie en 2050 et de produire davantage d'énergie décarbonée par le développement massif des énergies renouvelables et la consolidation de la filière nucléaire.
Cette consolidation passe inéluctablement par la prolongation des réacteurs qui peuvent être prolongés et par le lancement d'un grand programme de nouveaux réacteurs nucléaires, comme le projet de Gravelines et celui de Penly, pour lequel le débat public a été clôturé hier, lors d'un séminaire consacré à la participation du public à la gouvernance des projets nucléaires.
Le compte rendu et le bilan du débat public seront disponibles avant le 27 avril. EDF et RTE – Réseau de transport d'électricité – auront alors trois mois pour indiquer les enseignements qu'ils en tirent et leurs réponses aux recommandations formulées. Je remercie Mme Chantal Jouanno, que notre commission a auditionnée, pour son dynamisme au service de la consultation des populations.
J'ai toujours gardé en tête, lors des auditions, les enjeux sociaux, économiques et environnementaux dans nos territoires, qu'ils soient ruraux ou urbains : ils sont au cœur des travaux de notre commission, et j'ai souhaité prendre du temps pour écouter les élus locaux. Rien ne peut être bâti sans eux dans le cadre de projets aussi structurants pour les territoires. Les élus locaux ont dit ce que M. Patrice Vergriete, président de l'agglomération de Dunkerque, résume souvent par cette phrase : « Notre rôle d'élu local est de faire lien avec la population et de donner une vision cohérente de l'avenir d'un territoire. »
J'ai également souhaité prendre du temps pour échanger avec l'Association nationale des comités et commissions locales d'information (CLI), situés auprès des installations nucléaires de base. Je salue en particulier le travail de mon collègue et voisin M. Paul Christophe, président de la CLI de Gravelines, qui a toujours beaucoup œuvré pour mener une concertation large et ouverte en matière de sûreté nucléaire.
J'ai souhaité rendre concret et vivant ce texte relatif à un sujet qui est ultrasensible, le nucléaire, et dont tout indique qu'il le sera encore plus. C'est vrai depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine, dont nous venons de commémorer tristement la première année, et en raison des défis environnementaux au cœur des changements climatiques. C'est également un sujet sensible pour l'avenir de notre autonomie énergétique – décarbonée – et pour l'avenir industriel de notre pays.
Alors oui, mes chers collègues, nous devons accélérer les procédures relatives à la construction de nouvelles installations nucléaires et garantir le fonctionnement des installations existantes sans compromettre la sécurité des populations. C'est tout l'enjeu et toute l'ambition du texte qui nous est proposé, et c'est notre responsabilité d'y veiller en tant qu'élus de la nation.
Il nous restera un autre grand défi national à relever au plus vite : l'orientation, la formation et le recrutement pour permettre la réalisation du grand projet qui nous attend, mais aussi la facilitation de l'accès des femmes aux métiers du nucléaire. Des marges de progrès existent, en effet : les femmes représentent 24 % des 220 000 salariés de la filière nucléaire française, elle-même composée de 3 200 entreprises qui contribuent au développement des tissus économiques locaux.
Ce texte représente un pas de plus vers une France plus souveraine énergétiquement. C'est une nécessité face aux défis de notre temps.
Le 10 février 2022 – vous l'avez souligné, madame la rapporteure pour avis –, le Président de la République a fait part, à Belfort, d'une double ambition forte : faire de la France le premier grand pays à sortir de la dépendance aux énergies fossiles et renforcer notre souveraineté énergétique et industrielle, en ayant comme boussole la neutralité carbone d'ici à 2050.
Pour atteindre ces objectifs, le premier chantier ouvert durant ce quinquennat a été la réduction de la consommation énergétique. Le plan de sobriété présenté à l'automne dernier par la Première ministre en est une des principales briques. Le deuxième chantier structurant consiste à produire davantage d'énergie, notamment de l'électricité décarbonée. La stratégie choisie pour répondre à cette nécessité ne vient pas de nulle part : elle s'appuie sur une étude complète, menée au grand jour pendant deux ans, qui a conduit à l'élaboration de six scénarios présentés par RTE à l'automne 2021, lesquels combinent les énergies renouvelables et le nucléaire.
C'est dans ce contexte que le Gouvernement a fait le choix d'accélérer massivement le développement des énergies renouvelables et les procédures administratives de construction de nouveaux réacteurs électronucléaires. Après avoir voté en janvier le projet de loi relatif à l'accélération de la production d'énergies renouvelables, nous étudions désormais le texte qui permettra d'accélérer et d'augmenter la production d'énergie nucléaire. C'est une priorité que notre groupe soutient.
En effet, l'électrification et la décarbonation de nombreux usages devront se faire tout en assurant le remplacement de la majorité des installations qui constituent aujourd'hui notre parc nucléaire. Par ailleurs, la modernisation du parc et la construction des futurs EPR2 – réacteurs pressurisés européens de deuxième génération –, de plus grande puissance, nécessitent d'accélérer les procédures juridiques sans altérer celles qui régissent la sûreté des installations. En contribuant au développement de l'électricité d'origine nucléaire, nous permettrons aussi la décarbonation d'autres sources énergétiques, telles que l'hydrogène produit par électrolyse de l'eau, qui nécessite de l'électricité d'origine renouvelable ou nucléaire pour s'inscrire dans un mix énergétique décarboné.
Le groupe Renaissance apportera son soutien à ce texte, après l'adoption, espérons-le, des amendements proposés par Mme la rapporteure pour avis, que nous tenons à féliciter pour son écoute et la qualité de son travail.
Le groupe Rassemblement national est ravi qu'il soit enfin question, dans cette assemblée, de la relance de la filière nucléaire en France. Nous revenons de loin. En effet, la majorité qui propose ce texte est la même que celle qui a désarmé le nucléaire dans notre pays durant la précédente législature, en fermant la centrale de Fessenheim et en voulant réduire la part du nucléaire à 50 % du mix énergétique. Quel revirement ! Vous vous êtes enfin rendu compte de votre aveuglement. Mais la Macronie n'est pas la seule responsable : avec la NUPES, nous avons ici la « gauche plurielle » reconstituée. Quel plaisir de voir des socialistes et des communistes majoritairement favorables au nucléaire alors qu'ils ont arrêté Superphénix en 1998, pour faire plaisir à leurs alliés écolos, toujours aussi bornés vingt-cinq ans plus tard et rejoints depuis, dans leur hystérie antinucléaire, par La France insoumise. Félicitations à tous : vous avez réussi à détruire une filière nucléaire autrefois gage de souveraineté énergétique nationale.
Notre groupe considère que ce texte est le bienvenu. Dans le cadre du programme Marie Curie, Marine Le Pen défendait d'ailleurs un projet ambitieux de construction de nouveaux réacteurs EPR et SMR – petits réacteurs modulaires. Nous sommes ravis que la majorité rejoigne nos positions. Sachez que nous aurons une attitude responsable et ambitieuse à l'égard de ce projet de loi : il doit garantir l'approvisionnement en électricité des Français, de nos entreprises et de nos services publics, tout en permettant de réaffirmer l'excellence industrielle française et de relancer la recherche et le développement, à l'image de ce que nous avons connu pendant des décennies. Cinquante ans après le plan Messmer, nous devons retrouver le souffle qui a fait la fierté de notre pays et la garantie de son indépendance en électricité.
Ce projet de loi traduit une vision du monde dépassée. Accélérer le déploiement du nucléaire sous prétexte d'œuvrer en faveur de la transition écologique revient à aller à rebours de l'histoire.
D'abord, c'est méconnaître les dangers de l'atome, dont le risque de catastrophes aux conséquences dramatiques n'a jamais été aussi élevé du fait de l'accroissement des tensions géopolitiques et du prolongement de la durée de vie des centrales, que vous souhaitez faire perdurer jusqu'à soixante ans et même plus.
Ensuite, c'est ignorer les aspects négatifs de l'énergie atomique sur le climat, compte tenu des quantités démesurées de déchets nucléaires produits chaque année : 23 000 mètres cubes dont on ne sait que faire – le village de Bure peut en témoigner.
C'est aussi perpétuer une logique financière absurde, en ce que le nucléaire est un véritable gouffre. Le nouveau réacteur EPR de Flamanville en est la parfaite illustration, son coût ayant été réévalué à 19 milliards d'euros par la Cour des comptes. Ce sont autant de milliards que l'on pourrait allouer à un déploiement massif et pragmatique des énergies renouvelables.
Enfin, c'est priver les Français d'un débat démocratique indispensable, en revenant sur les objectifs du mix énergétique et en prévoyant la construction de nouveaux réacteurs de seconde génération à travers une loi technique, sans solliciter les Français et en méprisant le processus de consultation mené par la Commission nationale du débat public (CNDP). Vous pariez de manière obsessionnelle sur une énergie qui est en réalité bien plus coûteuse que le développement des énergies renouvelables et qui fait peser dans le même temps des risques immenses et éternels sur l'humanité.
Nous examinons quatre articles visant à simplifier les autorisations de construction de nouveaux réacteurs nucléaires. Ces dispositions traduisent l'urgence actuelle face à la crise énergétique, symbolisée par l'arrêt de la moitié de nos réacteurs cet hiver et par la fin de vie, d'ici à 2035, du parc issu du plan Messmer des années 1970. L'accord électoral de circonstance entre les Verts et le parti socialiste nous a fait perdre dix ans et a affaibli notre production d'électricité d'origine nucléaire, notamment à la suite de la fermeture des deux réacteurs de Fessenheim. Dans l'intérêt général du pays, la majorité effectue un virage à 180 degrés. Le temps est compté : tout report entraînerait un surcoût pour la livraison des EPR2, censés remplacer le parc existant.
Ce projet de loi horriblement technique, de l'aveu même de la ministre, et présenté avant la future PPE – programmation pluriannuelle de l'énergie –, permettra des dérogations au droit de l'urbanisme en faveur des centrales en autorisant le démarrage des travaux non nucléaires sans attendre l'autorisation de création des réacteurs ou en dispensant les installations d'une demande de permis de construire. Ces mesures temporaires ont été agrémentées par le Sénat de dispositions plus politiques qui feront l'objet, de notre part, d'amendements visant à préserver leur efficacité.
Le texte passe néanmoins à côté de nombreux sujets, comme le financement, la maturité technologique des nouveaux réacteurs et la prolongation de ceux qui existent déjà. Cette prolongation est devenue la seule solution pour permettre de faire la jonction avec la livraison des EPR2, mais la PPE prévoit toujours la fermeture de douze réacteurs dès 2027. Allez-vous revenir sur ce point ? Le choix du tout-EPR2 écarte le recours à de petits réacteurs de type SMR ou la remise en service de réacteurs historiques Westinghouse, moins puissants mais dont nous maîtrisons mieux la technologie. Renoncerez-vous, par ailleurs, à votre projet d'un mix électrique laissant une large place aux renouvelables, ce qui impose des capacités d'ajustement plus importantes du côté de nos réacteurs ?
Les Républicains, favorables à la relance du nucléaire, contribueront à améliorer ce texte. Il faudra bien anticiper tous les aspects, et pas seulement les réacteurs en bout de ligne, si nous ne voulons pas refaire les erreurs majeures que nous tentons aujourd'hui de corriger.
Après avoir passé la fin de l'année dernière à étudier le projet de loi relatif à l'accélération de la production d'énergies renouvelables dans un esprit constructif et collaboratif, même si le vote final de certains groupes a plus souvent été dicté par un dogmatisme désolant que par les valeurs qu'ils sont censés défendre, nous voici réunis pour aborder un autre volet de la politique énergétique que nous souhaitons pour les prochaines années, le développement de la production d'énergie nucléaire.
Si ce texte n'aborde pas, bien sûr, la place du nucléaire dans notre mix énergétique, nous aurons l'occasion d'en débattre très prochainement. Le projet de loi jette les bases techniques d'une mise en œuvre plus efficace des choix qui, je l'espère, seront les nôtres dans les prochains mois. Nous sont ainsi proposées toute une série de dispositions qui permettront d'accélérer la construction de nouveaux réacteurs dans les années à venir en réduisant de deux à trois ans les délais actuels.
Notre conviction, au groupe Démocrate et plus largement au sein de la majorité présidentielle, est que, comme cela a clairement été annoncé lors des échéances électorales de 2022, l'indispensable montée en puissance de notre production d'électricité doit s'appuyer sur les énergies renouvelables et sur le nucléaire, non seulement pour garantir notre souveraineté énergétique, mais aussi pour atteindre notre objectif de neutralité carbone en 2050.
S'agissant du second point, je le constate jour après jour dans le cadre des travaux préparatoires du futur projet de loi sur l'industrie verte, notre mix électrique est fortement décarboné grâce au nucléaire, ce qui est un avantage concurrentiel très important pour faire de la France la première nation industrielle verte au monde. Notre parc nucléaire est un atout majeur : nous devons non seulement le renouveler et le développer, mais aussi en améliorer la résilience tout en continuant de garantir des standards de sûreté et de sécurité extrêmement exigeants. Ce texte y contribuera. Notre groupe l'accueille donc très favorablement et soutiendra les mesures qui permettront d'accélérer les procédures sans rien renier, bien sûr, de nos exigences en matière de concertation avec le public et de sécurité.
Nous regrettons cependant que toute l'attention soit focalisée sur le projet de fusion entre l'ASN, l'Autorité de sûreté nucléaire, et l'IRSN, l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire. En effet, si la volonté politique de favoriser plus d'indépendance dans la recherche et d'efficacité grâce à une autorité unique peut tout à fait être entendue, la méthode employée et le véhicule ne semblent pas être les bons. Là encore, il nous semble indispensable de prendre le temps de l'échange et de la concertation. Nous aurons, je n'en doute pas, l'occasion d'y revenir.
L'énergie est la condition de possibilité de chacune de nos actions. La question des choix énergétiques de notre pays est donc éminemment politique. La loi de programmation sur l'énergie et le climat définira les objectifs et les priorités d'action de la politique énergétique nationale : ce texte, qui sera présenté en juillet à l'Assemblée, permettra de déterminer notre mix énergétique. Le projet de loi qui nous occupe aujourd'hui et dont l'objectif est de faciliter les travaux préparatoires de futures installations nucléaires et de prolonger celles existantes n'aurait jamais dû précéder notre délibération sur le premier texte. Il aurait fallu discuter d'abord du mix énergétique. Nous demandons ainsi la suppression de l'article introduit par le Sénat pour abroger l'objectif de réduction à 50 % de la part du nucléaire dans la production électrique à l'horizon 2050. Cet article préempte le débat sur notre avenir énergétique. Il ne faut pas mettre la charrue avant les bœufs.
Le groupe Socialistes et apparentés proposera des amendements suivant trois axes : un axe démocratique, d'abord, car la prolongation ou la relance d'un programme nucléaire sont des choix dont les citoyens, notamment ceux vivant aux abords des centrales, doivent pouvoir se saisir ; la transparence, ensuite, pour que les informations qui ne menacent pas la sécurité des sites puissent être publiées par l'IRSN et l'ASN ; la sûreté, enfin, pour assurer un respect scrupuleux des avis de l'ASN et une meilleure prise en compte des risques liés au changement climatique. Nous sommes extrêmement préoccupés par la volonté de fusionner l'ASN et l'IRSN : ce système de sûreté a fait ses preuves, et aucune justification de la fusion envisagée n'a été apportée jusqu'ici. Nous défendrons donc un amendement visant à inscrire dans la loi le système actuel, qui est opérant.
En tant que corapporteur du projet de loi relatif à l'accélération de la production d'énergies renouvelables, je n'ai eu de cesse de dire que celles-ci et le nucléaire étaient deux faces d'une même pièce. Nous soutiendrons donc, au groupe Horizons, l'ensemble du projet de loi et des amendements qui permettront d'améliorer la production d'énergie nucléaire dans notre pays. Nous accueillons ce texte dans un état d'esprit très favorable. Je m'associe, par ailleurs, aux propos de notre collègue Bruno Millienne au sujet de l'IRSN.
Un jour de février 2022, à Belfort, Emmanuel Macron a fait des annonces au sujet de la relance du nucléaire. C'était avant l'invasion de l'Ukraine et le fameux « modèle amish » auquel Emmanuel Macron nous a tout droit conduits après l'avoir tant exécré. La réponse du Gouvernement a été implacable : il s'est immédiatement assuré que les remontées mécaniques pourraient fonctionner dans les stations de ski, si seulement il y tombait encore de la neige, avant de demander à chacun de baisser le chauffage à 19 degrés et de porter des cols roulés, tout en refusant les milliards adoptés par l'Assemblée pour la rénovation thermique. Il fallait, cette fois-ci, filer droit, et devinez où ? Vers le nucléaire. Oui, le Président l'avait déjà annoncé : sur le carreau, la consultation publique menée par la CNDP, et sur le carreau, tout autre scénario, même si la planète entière est en train de sortir du nucléaire. Ce que le Gouvernement veut faire, c'est sauver le climat. Peu importe si les premiers réacteurs ne seront en service qu'en 2037, et peu importe qu'il soutienne les mégaprojets gaziers du champion Total en parallèle – de toute façon, ce sont des énergies vertes…
Il y a un brin de fatalité derrière tout cela : qui aurait pu prédire qu'Emmanuel Macron dise tout et son contraire en matière d'énergie ? Qui aurait pu prédire l'arrêt de 50 % de notre parc nucléaire l'an dernier ? Qui aurait pu prédire que Flamanville serait un tel fiasco industriel et financier ? Qui aurait pu prédire les bouleversements climatiques qui vont transformer notre monde d'ici à 2050 ? Ah pardon, ça, on savait le prédire, et Flamanville aussi.
Vous voulez, par ce projet de loi, faire tomber les objectifs de diversification du mix électrique, faire tomber l'IRSN et faire tomber les normes environnementales et de sécurité en matière nucléaire, au mépris des travailleurs, de la sécurité des Français, de leur avis et de leur argent, qui finance vos certitudes. Le groupe Écologiste s'oppose à la relance d'un programme nucléaire civil qui n'est pas une énergie verte, malgré vos deals peu reluisants avec la Hongrie ou la Pologne, et qui engage les générations futures pendant des siècles alors que notre monde connaîtra des bouleversements absolument majeurs dans les prochaines décennies. À la cérémonie des César, vendredi dernier, une jeune militante a brandi un panneau où était inscrit « 761 », soit le nombre de jours qu'il nous reste pour inverser la tendance du changement climatique. Terminez Flamanville dans ce délai, et on reparlera.
Chacun connaît la position des députés communistes au sujet de la relance de la filière nucléaire. Nous trouvons, néanmoins, que ce texte est surtout riche en manquements majeurs, en ce qui concerne les financements, la régulation du marché, l'Arenh – l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique –, les choix technologiques – EPR ou SMR –, la maîtrise publique de la relance du nucléaire, la fermeture programmée de douze tranches ou encore – je ne suis même pas exhaustif – l'avenir des tarifs réglementés. Sur le terrain, qui plus est, les ambitions pourraient bien se heurter à la réalité actuelle de la filière, entre pertes de compétences industrielles, dégradation de l'outil de production et délitement du tissu des sous-traitants, dont nous payons le prix.
Nous serons également attentifs à la préservation des procédures de consultation du public et au strict encadrement des dérogations au droit de l'environnement. Enfin, comme beaucoup d'autres, nous nous opposons à toute réforme à la hussarde de notre modèle de sûreté nucléaire.
Je redis, tout d'abord, ce que nous avions indiqué lors de l'examen du projet de loi relatif à l'accélération de la production d'énergies renouvelables : nous regrettons, nous aussi, le calendrier choisi parce qu'il inverse un peu les choses en entrant dans la technique sans fixer de cap, le cadre étant renvoyé à plus tard. Cette méthode n'est-elle pas un aveu silencieux du fait que le Gouvernement a changé d'avis et qu'il prendra le risque de faire passer la PPE par décret et non par la loi, comme le prévoyait pourtant le législateur ? C'est ce que dit la rumeur : ceux qui sont aux responsabilités pourraient-ils nous éclairer à ce sujet ? Si c'était vrai, cela poserait une question démocratique majeure.
La méthode suivie nous renvoie, par ailleurs, à un débat, un peu caricatural, entre les pro et les anti-nucléaires, que nous aurions dû avoir lors de l'examen de la PPE. En revanche, j'ai pu observer cet après-midi encore des positions mesurées et je souligne, au passage, que les changements de pied ne sont pas le privilège du Président de la République : la présidente du Rassemblement national a beaucoup changé d'avis dans ce domaine. En réalité, les positions évoluent en fonction du contexte. Un mouvement de recul s'était produit à la suite de l'accident de Fukushima.
Si nous considérons très majoritairement, au sein de mon groupe, qu'un mix énergétique décarboné est souhaitable, et si nous souhaitons accompagner ce texte, nous regrettons que sa rédaction initiale, qui faisait l'objet d'un fort consensus parmi nous, ait été amendée par le Sénat, d'une manière parfois un peu étonnante – je pense en particulier à l'article 4 et à l'anticipation des travaux préparatoires suivant une classification qui pose question.
Enfin, la question de la fusion entre l'ASN et l'IRSN sera pour nous, comme pour d'autres groupes, y compris de la majorité, un élément extrêmement important au moment où nous prendrons notre décision. J'encourage le Gouvernement à revenir sur cette évolution qui est arrivée sur le plateau en toute fin de partie.
Excusez-moi si je suis un peu atypique et singulière : je ne répondrai pas directement à l'ensemble des interventions, mais je vous livrerai un fait issu de ma petite expérience professionnelle. J'étais en mission à Sarajevo en 1994, sous les bombes. On ne pouvait tout simplement plus allumer l'électricité. J'ai alors produit un rapport qui se terminait par cette phrase : « l'Homme n'agit que sous la contrainte ».
On dit aujourd'hui que c'est la faute d'un tel, de tel gouvernement ou du dérèglement climatique, qu'il faut se méfier de ceci ou de cela, et on parle des César… Je suis une élue qui a les pieds sur terre – je vous ai parlé de mon expérience locale. Le débat concernant le nucléaire et notre mix énergétique est important, et les choix que nous ferons sont déterminants. Même si je ne verrai pas, compte tenu de mon âge, l'ensemble des EPR2 – les processus sont extrêmement longs dans ce domaine –, j'ai foi en mon pays, dans le nucléaire et dans les énergies renouvelables.
TITRE IER
MESURES DESTINÉES À ACCÉLÉRER LES PROCÉDURES LIÉES À LA CONSTRUCTION DE NOUVELLES INSTALLATIONS NUCLÉAIRES À PROXIMITÉ DE SITES NUCLÉAIRES EXISTANTS
Article 4 : L'anticipation des travaux en vue de la construction des réacteurs nucléaires
Amendement de suppression CD86 de Mme Anne Stambach-Terrenoir.
Nous trouvons l'article 4 très problématique. Il permettra de commencer des travaux n'ayant aucun impact, ou très peu, sur la sûreté dès que l'exploitant disposera d'une autorisation environnementale. Si les bâtiments destinés à recevoir des combustibles nucléaires ne pourront être commencés, pour leur part, qu'après la délivrance d'une autorisation de création, le fait que des travaux ayant peu d'impact sur la sûreté puissent débuter grâce à une simple autorisation environnementale crée une politique de fait accompli ou, en tout cas, de « pied dans la porte », puisqu'il sera alors beaucoup plus difficile de revenir en arrière.
Par ailleurs, ces travaux pourraient démarrer avant même la clôture de l'enquête publique portant sur le projet dans son ensemble, dont les délais d'instruction sont plus longs. C'est un véritable déni du débat public et de l'information des citoyens sur des projets majeurs et non dénués de risques, tant d'un point de vue environnemental que pour la sûreté des personnes. Nous nous appuyons sur l'avis du Conseil national de la transition écologique, qui a souligné « la nécessaire prise en compte des enjeux connexes attachés à ces constructions pour assurer la qualité environnementale de ces projets et de leur cycle de vie, tout en respectant les impératifs de protection de la biodiversité et de la participation du public ». Le présent article menaçant directement ces deux impératifs, nous réclamons sa suppression.
Vous comprendrez aisément que je m'oppose à la suppression de cet article, car il est très important dans l'ensemble du dispositif visant à accélérer la construction des futurs réacteurs électronucléaires.
Ces dispositions ne vont en rien compromettre la sûreté des installations à venir ni empêcher le bon déroulement des procédures en amont. Rien ne sera modifié dans la procédure visant à délivrer l'autorisation de création du réacteur. La procédure d'autorisation environnementale sera également conforme aux règles de droit commun – elle sera même renforcée.
Les travaux qui démarreront dès que l'autorisation environnementale aura été délivrée auront fait l'objet d'une étude approfondie et aucun élément du bâtiment du réacteur ne sera construit avant l'instruction complète de la demande d'autorisation de création.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CD37 de M. Pierre Meurin.
L'article 4 ayant été considérablement alourdi au Sénat, il s'agit de revenir à la rédaction initiale du Gouvernement car le droit commun comporte des garanties suffisantes tant sur le plan démocratique que sur celui de la sûreté.
Dans les amendements suivants, je proposerai la suppression de deux éléments ajoutés qui risquent de complexifier et d'allonger la procédure d'examen de la demande d'autorisation environnementale. Toutefois, il ne me semble pas souhaitable de tout supprimer, notamment pour ce qui est des précisions demandées dans l'étude d'impact. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CD152 de la rapporteure pour avis.
Amendements CD151 de la rapporteure pour avis et CD69 de Mme Annick Cousin (discussion commune).
Il est nécessaire d'envisager le projet dans sa globalité, en intégrant le stockage des matières et leur recyclage. Ces activités étant assurées autour de la centrale, cela permettra la création d'emplois locaux.
Le stockage et le recyclage ne sont pas concernés par la procédure dérogatoire prévue à l'article 4, qui n'a vocation à s'appliquer qu'aux seuls réacteurs nucléaires. Avis défavorable.
La commission adopte l'amendement CD151.
En conséquence, l'amendement CD69 tombe.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CD150 de la rapporteure pour avis.
Amendements identiques CD149 de la rapporteure pour avis, CD36 de M. Pierre Meurin et CD143 de M. Emmanuel Maquet.
Il s'agit de revenir à la version initiale du dispositif, qui prévoit que l'autorisation environnementale est délivrée par un décret simple et non par décret en Conseil d'État.
La commission adopte les amendements.
Amendements identiques CD156 de la rapporteure pour avis et CD144 de M. Emmanuel Maquet, amendements CD119 de M. Gérard Leseul et CD88 de M. Maxime Laisney (discussion commune).
Il est proposé de supprimer l'avis demandé à l'ASN, disposition introduite par le Sénat, au stade de l'instruction de l'autorisation environnementale. L'ASN sera nécessairement conduite à donner un avis sur l'ensemble du dossier joint à la demande d'autorisation de création, dont l'étude d'impact.
Il s'agit de revenir à la version initiale du projet de loi, dans un but de simplification.
Nous proposons au contraire de soumettre l'autorisation environnementale à un avis conforme de l'ASN, lequel devra être non seulement scrupuleusement suivi mais également rendu public, conformément à l'article 7 de la Charte de l'environnement.
Souhaitant également que l'avis de l'ASN soit conforme et non simple, nous proposons de l'indiquer à chaque alinéa de l'article 4 afin de soumettre à cet avis la construction des parties nucléaires comme non nucléaires. Alors que l'on a déjà bien du mal à achever la construction des EPR, rien ne garantit que l'on saura faire fonctionner des EPR2.
De plus, dans le discours de Belfort, il était question de six nouveaux EPR et de huit à l'étude ; désormais, il est question de neuf réacteurs supplémentaires, soit vingt-trois au total, alors que Luc Rémont, PDG d'EDF, a indiqué que son calendrier lui permettrait d'en construire six mais sans doute pas davantage. Enfin, le démantèlement de l'IRSN et sa dilution dans l'ASN ne sont pas de nature à nous rassurer. Dans ces conditions, l'avis conforme nous semble la moindre des choses.
Les avis que délivre l'ASN, quelle que soit la procédure, ne sont jamais contraignants. C'est au ministre chargé de la sûreté nucléaire de trancher au vu des avis qui lui sont communiqués. Le projet de loi ne remet pas en cause ce principe. Avis défavorable aux amendements CD119 et CD88.
J'ai du mal à comprendre l'argument de la rapporteure pour avis : l'avis du ministre serait-il plus important que celui d'une instance collégiale ?
Nous n'avons que votre parole. En tant que législateurs, nous devons inscrire dans la loi que l'avis de l'ASN sera conforme et préciser ce qui doit l'être en matière de sûreté nucléaire. Cela serait de nature à rassurer les Français face à cette précipitation vers le nouveau nucléaire.
La commission adopte les amendements CD156 et CD144.
En conséquence, les amendements CD119 et CD88 tombent.
La réunion est suspendue de dix-huit heures cinq à dix-huit heures vingt-cinq.
Amendement CD120 de M. Stéphane Delautrette.
L'étude d'impact doit mesurer l'ensemble des risques inhérents à tout projet de création d'une nouvelle installation. Nous proposons donc d'inclure dans son périmètre certains risques liés au changement climatique – érosion, recul du trait de côte, risques d'inondation et de submersion marine, prélèvements d'eau, rejets d'effluents et de déchets radioactifs, état radiologique de l'environnement, etc. La rédaction que nous vous proposons simplifie la lecture de l'article 4.
Tous ces éléments sont déjà prévus dans la version actuelle du projet de loi. Le seul effet de votre amendement est de supprimer la dernière phrase de l'alinéa 1, pourtant très utile. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CD23 de Mme Marie Pochon.
En l'état du projet de loi, l'étude d'impact ne comprend aucun élément relatif aux conséquences du changement climatique sur la pérennité des nouvelles installations, alors même que la résilience face au dérèglement climatique devient un point central de réflexion pour les acteurs du nucléaire.
Cette année, plusieurs centrales d'EDF ont été contraintes d'abaisser leur production en raison de la température élevée des cours d'eau utilisés pour leur refroidissement. À partir de 2050, les sécheresses dites exceptionnelles devraient se produire une année sur deux et le débit du Rhône pourrait diminuer de plus de 50 % alors qu'il alimente quatorze réacteurs. La multiplication de ces phénomènes aura un impact sur l'augmentation significative de la température des cours d'eau et, in fine, sur notre indépendance énergétique si le Gouvernement s'obstine à relancer la filière nucléaire.
Si je peux comprendre le début de votre amendement, qui vise à compléter le contenu de l'étude d'impact avec la mesure des conséquences du dérèglement climatique sur le fonctionnement de la future installation, je ne vois pas en quoi la suite de votre proposition concerne les installations nucléaires car elle traite des effets du changement climatique d'une manière générale. Avis défavorable.
Je soutiens l'amendement de Mme Pochon, qui me paraît être de bon sens. Lors de l'examen du projet de loi relatif à l'accélération de la production d'énergies renouvelables, nous avions tous, à l'exception du Rassemblement national, partagé le constat du caractère avéré du changement climatique et de la nécessité de faire bifurquer notre modèle énergétique. J'aimerais que l'on commence l'examen de ce projet de loi sous les mêmes auspices, en prenant au sérieux le caractère dramatique et l'ampleur du changement climatique. La hausse du niveau de la mer, les épisodes de sécheresse, etc., sont des critères tout à fait pertinents pour nos installations nucléaires qui, comme vous le savez, sont refroidies avec de l'eau.
Je comprends tout à fait votre propos, mais tout cela est déjà prévu dans l'étude d'impact.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CD24 de Mme Marie Pochon.
L'étude d'impact ne comprend aucun élément relatif à l'augmentation du risque de sécheresse. Or les réacteurs nucléaires ont besoin d'eau non seulement pour refroidir le cœur du réacteur mais également lorsque le réacteur est à l'arrêt ou pour les piscines d'entreposage du combustible. En outre, en amont du circuit de refroidissement, un débit trop faible ou une température trop élevée du cours d'eau ne permet pas de refroidir suffisamment le circuit secondaire. Lorsque l'on sait que plus de 50 % des prélèvements en eau en France sont liés à l'industrie nucléaire, que le Rhône dessert quatorze réacteurs et que les conflits d'usage se multiplient, notamment avec l'irrigation, investir largement dans la relance du nucléaire est un non-sens. L'enjeu n'est pas la sûreté des installations mais la capacité à produire de l'électricité, donc à garantir la sécurité de notre approvisionnement énergétique dans les années à venir.
Je comprends votre interrogation concernant la sécheresse, mais l'étude d'impact prend en compte l'ensemble des risques.
Nous sommes à la limite de la négation du réchauffement climatique et de ses impacts. Les futurs réacteurs, si vous arrivez à les construire, n'entreront pas en service avant 2035 au mieux, échéance à laquelle la hausse des températures se fera encore plus ressentir. Il est absolument nécessaire, si vous voulez un parc nucléaire robuste, de faire en sorte que les événements structurels liés au réchauffement climatique soient pris en compte dans les études d'impact.
Ces amendements illustrent les objectifs affichés par toute la gauche, hormis les communistes, à savoir faire obstacle à la relance du nucléaire. La gauche est en grande partie responsable à la fois de l'abaissement de notre souveraineté énergétique et de la hausse des prix de l'électricité, avec la fermeture de Superphénix par Mme Voynet et celle de Fessenheim, préparée par les socialistes et exécutée par Emmanuel Macron lors du précédent quinquennat.
Le Rassemblement national est le seul mouvement qui propose une électricité totalement décarbonée grâce au nucléaire, et ce depuis de très nombreuses années. En cela, nous sommes probablement le parti qui veut le plus lutter contre le dérèglement climatique et pour le pouvoir d'achat des Français.
Nous parlons du nouveau parc nucléaire, composé d'EPR2, placés pour la plupart en bord de mer afin d'assurer, précisément, la prise en compte de la problématique de l'eau. De plus, les sujets que vous abordez sont déjà traités dans le cadre des dispositions actuelles. Il ne faut pas créer de la confusion.
Peut-être la rapporteure pour avis s'appuie-t-elle sur d'autres études que celles du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), des études qui démontreraient que le niveau des précipitations permettra d'éviter des épisodes de sécheresse dans les quarante ou cinquante prochaines années ? Peut-être la température de l'eau va-t-elle diminuer ? Si tel est le cas, nous restons ouverts à la discussion, mais cela ne correspond pas aux informations dont nous disposons.
D'une part, toutes les centrales ne seront pas au bord de la mer et, d'autre part, cela pose d'autres questions, comme l'a montré l'inondation de la centrale du Blayais lors de la tempête de 1999. S'il n'y a pas assez d'eau pour refroidir, on ne produira pas d'électricité. L'été dernier, plusieurs réacteurs ont dû être éteints à cause du débit trop faible des cours d'eau et des températures de rejet trop élevées. Il serait dommage de dépenser des milliards pour construire des réacteurs que l'on ne pourra pas utiliser la moitié de l'année.
La sécheresse de plus de trente jours que nous vivons actuellement se répétera et s'accentuera en été. On n'a pas le droit de dire que ce n'est pas grave parce que les nouveaux réacteurs seront en bord de mer : le sort du glacier de l'apocalypse en Antarctique devrait vous faire prendre conscience que l'on risque une montée des eaux très rapide, comprise entre 1 et 3 mètres, d'ici à quelques années. L'étude d'impact devrait être très précise sur les conséquences de la montée des eaux pour les centrales en bord de mer. Par ailleurs, personne ne peut affirmer qu'il pleuvra plus dans quarante ans. Le nucléaire est un mauvais choix.
Je ne voudrais pas que la commission tombe dans la caricature d'un débat pour ou contre le nucléaire. Le problème du stress hydrique est pris en compte dans les centrales nucléaires. À Civeaux, où je me trouvais aujourd'hui, l'exploitant a installé des systèmes de refroidissement des effluents pour tenir compte des contraintes de débit de la Vienne. De plus, la centrale dispose de réserves d'eau suffisantes pour fonctionner pendant un certain temps sans avoir à puiser dans la rivière. Quant aux forages, ils n'ont vocation à être utilisés qu'en dernier recours, quand le risque atteint son maximum. Il faudrait que le stress hydrique soit catastrophique pour que l'on soit conduit à utiliser ce système – mais cela revient à présager l'avenir sans le connaître réellement.
Nous voterons cet amendement, qui est tout à fait responsable et raisonnable. On ne peut nier les incidences majeures du changement climatique sur les installations nucléaires. Pour nous assurer que la filière et les installations seront bien robustes, il est tout à fait légitime de nous entourer d'éléments d'expertise permettant de fonder une décision d'intérêt général.
En été, beaucoup de réacteurs sont à l'arrêt en raison d'une consommation plus faible d'électricité. L'an dernier, selon l'IRSN, alors qu'il était possible à certains endroits de traverser la Loire à pied, le débit le plus faible enregistré pour ce fleuve était de 40 mètres cubes par seconde. Or la centrale de Dampierre puise 0,8 mètre cube par seconde pour le refroidissement de ses réacteurs, soit un niveau très éloigné du débit minimal constaté. À moins que la Loire ne finisse par s'assécher, votre amendement est totalement inopérant.
Le code de l'environnement dispose déjà que l'étude d'impact pour les autorisations de création intègre des études relatives aux variations climatiques et saisonnières : il n'est pas utile d'en rajouter.
La réduction de production consécutive au réchauffement climatique ne représente que quelques pour cent par an, selon le rapport Futurs énergétiques 2050 publié par RTE. La canicule que nous avons subie l'année dernière a entraîné des réductions de 200 mégawatts sur des réacteurs de 900 mégawatts, alors que la consommation d'électricité est moins importante en été qu'en hiver : l'impact pour la population est donc très raisonnable.
De plus, ces baisses de puissance ne sont pas consécutives à des problèmes de sûreté mais à des considérations environnementales : il ne faut pas mélanger les deux aspects. La sûreté n'est pas mise en péril par l'évolution des conditions climatiques. Du reste, pourquoi ne pas s'interroger aussi sur les conséquences sur la production hydraulique, solaire ou éolienne ? Toutes les énergies subissent des variations mais les conséquences sur la sûreté sont extrêmement limitées.
L'article 4 prévoit déjà que l'étude d'impact étudie « les incidences sur la ressource en eau ». Vous souhaitez préciser que celles-ci sont envisagées sous l'angle de l'augmentation des risques de sécheresse. Avis de sagesse.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CD25 de Mme Marie Pochon.
L'énergie nucléaire nécessite une gestion centralisée, pilotée par l'État. C'est un projet qui engage le pays pour des dizaines d'années : il faut quinze ans pour autoriser la construction d'une centrale, l'exploitation de cette dernière dure quarante à quatre-vingts ans et son démantèlement prend cent ans. Surtout, les déchets ont une durée de vie de plusieurs centaines de milliers d'années et, pendant tout ce temps, ils ne cessent de représenter un risque grave pour la santé humaine et pour l'environnement.
Nous ne savons toujours pas comment traiter ces déchets. Nous les jetons donc dans de grands trous, en espérant que rien ne vienne bouleverser le monde durant des centaines de milliers d'années. C'est une belle chose d'être persuadé qu'aucun événement dramatique ne surviendra sur une telle durée alors que nous ne sommes même pas capables de garantir les conditions d'existence sur la planète dans les cinquante prochaines années…
On peut s'en désintéresser, se dire qu'on ne sera plus là, et c'est précisément la logique qui guide le projet de loi. Nous, écologistes, nous ne nous résignons pas à laisser aux générations suivantes une planète inhabitable. Il en va de même des Français : la moitié d'entre eux, selon les dernières études, perçoivent les déchets nucléaires comme une source de risques importants. Nous souhaitons donc qu'une partie de l'étude d'impact soit consacrée à la gestion des déchets nucléaires.
Dans la suite de la phrase que vous proposez de modifier, il est fait référence au plan national de gestion des matières et déchets radioactifs. Par ailleurs, les compléments relatifs aux déchets radioactifs incluront des informations concernant leur gestion. Votre amendement me paraît donc satisfait. Avis défavorable.
Madame Pochon, vous présagez une catastrophe dans cent mille ans. Pour ma part, étant d'un naturel optimiste, je me dis que, d'ici là, la recherche aura peut-être trouvé une solution pour traiter ces déchets.
Il était temps que nous inversions la tendance pour que la filière se reconstruise enfin et que nous travaillions à fond – justement – sur le traitement des déchets.
Il faut 1 tonne d'énergie fossile pour produire autant d'énergie qu'avec 1 gramme d'uranium. Certes, il est légitime de s'interroger sur les déchets, car c'est a priori l'unique inconvénient de la filière, mais ce risque me paraît bien plus faible que ceux liés à l'utilisation d'énergies renouvelables intermittentes et non pilotables, ou encore d'énergies fossiles. Lutter contre le nucléaire, c'est favoriser les énergies fossiles ; cela revient, notamment, à faciliter l'importation d'électricité allemande, laquelle est particulièrement carbonée car produite par des centrales à charbon.
Le débat est légitime, mais les écologistes ont fait en sorte que soient abandonnés Superphénix et le projet de réacteur rapide refroidi au sodium à visée industrielle (Astrid), qui permettaient, par la technologie des centrales à neutrons rapides, de diminuer sensiblement la production de déchets nucléaires.
La rédaction de l'amendement pose problème : il est proposé d'ajouter une référence à la gestion des déchets radioactifs au sein de l'article L. 593-2 du code de l'environnement, alors que la suite de la phrase renvoie à l'article L. 542-1-2 du même code, lequel traite précisément des déchets.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CD89 de Mme Aurélie Trouvé.
Si le code de l'environnement oblige l'évaluation environnementale à s'intéresser aux incidences notables sur l'environnement, ce qui permet d'aborder des enjeux comme les ressources en eau et la pollution de l'air, il n'y est pas fait mention de la faune et de la flore. Or il est permis de penser qu'une centrale nucléaire a des incidences sur la faune et la flore à proximité.
Il y a quelques années, une artiste suisse avait fait le tour des centrales du monde entier et avait constaté que les radiations avaient des effets sur la faune locale : elle avait observé, notamment parmi les insectes et les plantes, ce que l'on peut appeler des organismes mutants. Certains scientifiques affirment que l'exposition chronique à de faibles doses de radioactivité a des effets bien plus graves qu'une exposition intense mais courte.
Si l'on entend réaliser une étude d'impact sérieuse, on ne saurait négliger les conséquences de la radioactivité sur la faune et la flore.
Je comprends – et partage – votre intérêt pour la faune et la flore ainsi que pour la manière dont elles pourraient être affectées par le fonctionnement des futurs réacteurs et par l'extension du périmètre des installations nucléaires de base (INB). Toutefois, dans le cadre de l'instruction de l'autorisation environnementale, toutes les conséquences du projet seront étudiées. L'étude d'impact prévue est celle régie par l'article L. 122-3 du code de l'environnement – l'article 4 précise même qu'elle comporte « au minimum » les éléments mentionnés dans cet article. Or, en vertu de la partie réglementaire du code de l'environnement, cette étude doit évaluer les conséquences du projet sur la biodiversité. L'amendement me semble donc satisfait. Reste, il est vrai, la question des activités agricoles avoisinantes, qui n'est peut-être pas suffisamment détaillée.
Je sais votre souci sincère pour la question animale. Je ne vois donc pas pourquoi vous vous opposeriez à la précision que je demande : elle viendrait seulement compléter l'éventail des sujets abordés. À vous entendre, la notion de biodiversité inclut la faune et la flore. Pourquoi, dans ce cas, ajouter des éléments relatifs à l'air, aux sols et à la ressource en eau ? Tout cela aussi participe de la biodiversité.
À ce moment-là, tout devrait être inscrit dans le texte ! L'article renvoie déjà à l'étude d'impact prévue par le code de l'environnement, laquelle inclut la biodiversité. Nous ne précisons ici que ce qui est spécifique aux centrales nucléaires.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CD26 de Mme Marie Pochon.
Il s'agit d'inclure dans l'étude d'impact les conséquences des radiations sur la santé. Les données épidémiologiques montrent que l'exposition aux rayons ionisants entraîne, dans les populations concernées, des risques de cancer et de leucémies supérieurs à ceux liés à une exposition aux autres substances cancérogènes. Ces données ne tiennent pas compte, au demeurant, des 22 000 salariés précaires embauchés par les entreprises sous-traitantes d'EDF pour assurer la maintenance et l'entretien des installations. Ce sont pourtant eux qui assurent les tâches comportant le plus de risques. Ils reçoivent 80 % des doses annuelles de radioactivité, contre 20 % pour les agents d'EDF. Les risques des rayonnements ionisants pour l'environnement et le public sont évalués, notamment, par l'IRSN, que vous souhaitez démanteler.
Vous parliez de la situation des sous-traitants d'EDF intervenant dans les centrales nucléaires. Selon vous, ils ne seraient pas accompagnés médicalement ?
L'étude des rayonnements ionisants émis par les centrales inclut leurs conséquences pour la santé humaine. Votre amendement est donc satisfait. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CD72 de M. Nicolas Thierry.
Nous proposons d'ajouter à l'étude d'impact un volet consacré aux dérogations, en période de canicule, aux limites fixées pour les rejets thermiques dans l'environnement, et à leurs effets sur la faune et la flore. Quand il fera plus chaud, les dérogations se multiplieront – il y en a eu l'été dernier. Il faut les limiter.
Que nous soyons pour ou contre le nucléaire, nous devrions faire en sorte de protéger la biodiversité. Quant aux canicules, on sait qu'elles se multiplieront. Or certains des propos tenus ici relèvent presque du climatoscepticisme.
Vous souhaitez que l'étude d'impact indique les conséquences du fonctionnement du réacteur nucléaire sur la faune et la flore en tenant compte des rejets thermiques autorisés et des dérogations aux limites maximales autorisées pour ces rejets.
Les rejets thermiques des centrales nucléaires sont réglementés pour maîtriser l'élévation de la température du cours d'eau en aval. L'été dernier, en raison des fortes chaleurs et pour que les réacteurs continuent à fonctionner, notamment dans le sud de la France, des dérogations ont été accordées par l'ASN. C'est plutôt dans ce cadre qu'une évaluation des effets sur la faune et la flore pourrait être demandée : prévoir cette évaluation dès le stade de la demande environnementale me semble prématuré. Avis défavorable.
Je suis choquée : le réchauffement climatique est déjà une réalité, et les dérogations accordées aux centrales du Blayais, du Bugey, de Golfech et de Saint-Alban ne relèvent pas de la science-fiction. Cela s'est passé l'été dernier. Les nouveaux réacteurs verront le jour, au mieux, dans quinze à vingt ans. Entre-temps, le réchauffement climatique se sera amplifié. Même si les émissions de gaz à effet de serre étaient limitées drastiquement, ceux qui sont déjà dans l'atmosphère continueront à accroître le réchauffement jusqu'à ce que leur concentration diminue.
Si l'étude d'impact ne prend pas en compte les réalités auxquelles nous sommes d'ores et déjà confrontés, nous irons au-devant de difficultés considérables. Il faudra procéder à des arbitrages impossibles. Par exemple, il faudra choisir entre les différents usages de l'eau : l'eau du Rhône sera-t-elle réservée à la boisson, à l'agriculture – c'est-à-dire à l'alimentation – ou au refroidissement des centrales ? Par ailleurs, les rejets d'eau entraînent une pollution chimique qui augmentera elle aussi.
Le réchauffement climatique doit être pris en compte. L'IRSN a constitué un groupe de travail qui rendra ses premières conclusions dans le courant du mois. Si l'on décide de relancer le nucléaire, comme semblent le vouloir le Président de la République et les groupes qui le soutiennent ici, il faut à tout le moins tenir compte du fait que nous ne sommes plus dans les années 1970 : à cause du réchauffement climatique, il n'est plus possible de construire les centrales comme on le faisait à cette époque.
Vous percevez nos demandes comme une forme d'obstruction, mais ce n'est pas le cas : nous craignons que l'on aille tellement vite dans la construction qu'on en vienne à ignorer les nouvelles réalités induites par le réchauffement climatique.
Vos demandes sont largement prises en compte à l'article 9 bis. Il n'est pas opportun de les intégrer à l'article 4.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CD121 de M. Gérard Leseul.
Nous proposons que l'IRSN soit saisi lors de la réalisation de l'étude d'impact, dans la limite de ses domaines d'expertise, et qu'il rende un avis public. Pour mémoire, le champ des compétences de l'institut est le suivant : surveillance radiologique de l'environnement et intervention en situation d'urgence radiologique ; radioprotection de l'homme ; prévention des accidents majeurs dans les installations nucléaires ; sûreté des réacteurs ; sûreté des usines, des laboratoires, des transports et des déchets ; expertise dans le domaine du nucléaire de défense.
L'article 4 a pour finalité d'accélérer la première partie des travaux. Au stade de l'instruction de l'autorisation environnementale – laquelle est étudiée par le ministre compétent, donne lieu à une enquête publique et comprend l'étude d'impact –, un avis de l'IRSN, comme d'ailleurs de l'ASN, paraît prématuré : même si l'exploitant fournit dès cette étape de nombreuses informations sur le futur réacteur nucléaire, il s'agit encore de la phase préparatoire.
La commission rejette l'amendement.
Amendements CD157 deuxième rectification de la rapporteure pour avis et CD46 de M. Nicolas Ray (discussion commune).
L'amendement CD157 deuxième rectification vise à préciser que le décret relatif à l'autorisation environnementale est modifié conformément aux règles prévues à l'article L. 181-14 du code de l'environnement.
Il s'agit d'établir plus clairement la distinction entre, d'une part, le régime dérogatoire institué par le présent article pour la délivrance de l'autorisation environnementale avant celle de l'autorisation de création, et, d'autre part, le régime applicable après la délivrance de cette autorisation de création. Dans le cadre du second régime, c'est l'ASN qui est compétente dans le périmètre de l'installation nucléaire de base une fois que celui-ci a été établi. Grâce à l'amendement, il apparaît clairement que l'ASN est compétente en matière d'autorisation environnementale après la délivrance de l'autorisation de création ; avant cette autorisation, le régime de l'autorisation environnementale est celui qui est prévu par le code de l'environnement.
L'amendement CD46 vise à distinguer la phase précédant l'autorisation de création et celle qui suit cette autorisation. En effet, le projet de loi ne prévoit pas de fin pour le système dérogatoire. Nous proposons de rentrer dans le droit commun une fois que l'autorisation de création a été délivrée, tout en prévoyant la possibilité d'y déroger par un décret simple. Dans ce cas, les modifications seront soumises aux modalités figurant dans l'autorisation environnementale.
Le complément que vous proposez – et que je propose moi aussi, du reste – consiste à faire en sorte qu'après la publication du décret autorisant la création, les modifications apportées à l'autorisation environnementale relèvent du droit commun et non de la procédure créée par l'article 4. Or la seconde partie de votre amendement semble revenir sur ce principe. Avis défavorable.
La commission adopte l'amendement CD157 deuxième rectification.
En conséquence, l'amendement CD46 tombe.
Amendement CD154 de la rapporteure pour avis.
Dès lors que les nouveaux réacteurs sont construits à proximité des anciens, il existe déjà une commission locale d'information (CLI). Néanmoins, la construction de nouveaux réacteurs ne constitue pas une modification de l'installation nucléaire de base ; en l'état du droit, la CLI ne serait donc pas informée d'une demande d'autorisation. Le présent amendement vise donc à garantir que cette commission en est avisée par le pétitionnaire – c'est-à-dire l'exploitant – afin de l'intégrer dès le début de la procédure.
La commission adopte l'amendement.
Amendements identiques CD27 de Mme Marie Pochon et CD123 de Mme Chantal Jourdan.
L'article introduit la faculté d'anticiper la réalisation de constructions, d'aménagements, d'installations et de travaux en vue de la création de réacteurs électronucléaires dès la délivrance de l'autorisation environnementale. Autrement dit, les travaux pourront commencer avant que l'autorisation de construction du réacteur ne soit donnée.
Il nous semble périlleux d'opérer une distinction entre les différents bâtiments de l'installation nucléaire. L'autorisation environnementale en vue de la création d'un réacteur nucléaire est délivrée, au vu de l'étude d'impact, pour l'ensemble du projet. Commencer à édifier les parties annexes ne ferait que contraindre la construction des réacteurs. Nous proposons donc de supprimer les alinéas 2 et 3, car le gain de temps escompté ne justifie pas une atteinte que nous jugeons disproportionnée à la participation du public. Du reste, les retards sont dus plutôt aux difficultés industrielles qu'aux procédures administratives.
En demandant nous aussi la suppression des alinéas 2 et 3, nous entendons réaffirmer l'intérêt de l'enquête publique, y compris pour les constructions, aménagements, installations et travaux réalisés en vue de la création d'un réacteur électronucléaire. Cela permet d'informer les riverains et ces derniers peuvent donner leur avis.
Si ces alinéas étaient supprimés, le texte créerait simplement une procédure dérogatoire pour la délivrance d'une autorisation environnementale, par voie de décret et non d'arrêté, avec une étude d'impact plus complète que ne le prévoit le droit actuel, mais cela n'aurait aucun effet sur le séquençage des travaux conduisant à la construction des réacteurs. Avis défavorable.
Je ne vois pas en quoi cela bloquerait les choses : pourriez-vous préciser votre argument ?
Pour simplifier, si nous supprimions les alinéas 2 et 3, nous nous priverions des effets positifs attendus de l'article 4, à savoir démarrer les travaux en amont, hors nucléaire. Cela remettrait en cause le sens même de l'article.
Depuis plusieurs années, ce qui fait prendre du retard aux projets, ce sont les installations nucléaires elles-mêmes, car nous peinons à les construire, et pas les bâtiments annexes. Nous n'avons toujours pas fini les plans de l'EPR 2, et les petits réacteurs modulaires (SMR) ne sont pour l'instant que des rêves d'industriels ou d'ingénieurs. Ce n'est pas parce que nous construirons d'abord les autres bâtiments que nous pourrons mettre en service les centrales plus rapidement.
Une centrale, c'est un tout : la population doit être informée de l'ensemble, et pas uniquement de la construction d'un réacteur. Il n'apparaît donc pas opportun de contourner l'étape de l'enquête publique pour les travaux préparatoires à la création d'un réacteur électronucléaire, y compris la construction des bâtiments annexes.
L'amendement relatif à la CLI que nous venons d'adopter montre que je suis attachée à l'information de la population. En l'occurrence, celle-ci aura connaissance également des travaux hors nucléaire.
Ces dispositions visent-elles réellement à accélérer la construction de centrales nucléaires ? À notre connaissance, ce ne sont pas les parties hors nucléaire qui posent problème. On peut légitimement se demander si l'objectif n'est pas de forcer la décision, de placer les gens devant le fait accompli une fois que les bâtiments annexes ont déjà été construits. Par ailleurs, le fait que l'on ait construit ces bâtiments en amont ne risque-t-il pas d'obliger à les rénover pour mettre le réacteur en service, ce qui, en définitive, entraînerait plutôt des retards ?
Tous les représentants de sociétés, d'organismes ou d'associations que nous avons auditionnés – qu'il s'agisse d'EDF et de Framatome ou de l'Association des maires de France – nous ont dit qu'ils espéraient gagner quinze à vingt-quatre mois grâce aux procédures prévues par le projet de loi ; certains ont même parlé de trois ans, ce qui me paraît ambitieux.
J'ai voté pour votre amendement précédent, madame la rapporteure pour avis, parce que je sais que vous êtes attachée à une bonne information du public. Mais les procédures prévues dans cet article, en particulier aux alinéas 2 et 3, visent bien, au fond, à forcer la décision du public.
Il faut informer et consulter. Les associations que vous avez auditionnées et auxquelles vous avez fait référence représentent plutôt des opérateurs. Je ne vois pas quel pourrait être l'intérêt de gagner du temps pour les associations qui représentent le public et les riverains, qui veulent être informés. Dans le cas de Flamanville, les problèmes proviennent du réacteur, pas des bâtiments annexes.
Je ne comprends pas pourquoi vous vous obstinez à refuser la suppression des alinéas 2 et 3.
Les travaux annexes font dès le départ l'objet d'une enquête publique, lors de la procédure d'autorisation environnementale. Une autre enquête publique doit ensuite intervenir pour la partie spécifiquement nucléaire, dans le cadre de la procédure d'autorisation de création – qui dure plusieurs années.
Nous avons déjà voté des dispositifs similaires, notamment à l'occasion de l'examen du projet de loi d'accélération et de simplification de l'action publique, dit Asap, avec les sites industriels « clés en main ».
En l'occurrence, il s'agit tout simplement d'autoriser la réalisation d'aménagements tels que des routes ou des bâtiments destinés à héberger des ouvriers, avant même le lancement du chantier de construction du réacteur. Cela permet en effet un gain de temps assez significatif. Il n'y a rien de choquant. Cela va dans le bon sens et permet d'accélérer.
La commission rejette les amendements.
Amendement CD87 de M. Maxime Laisney.
L'alinéa 2 de cet article prévoit que des travaux pourront commencer avant la délivrance de l'autorisation de création. Et l'alinéa 3 précise qu'un décret en Conseil d'État doit dresser la liste des constructions, aménagements, installations et travaux qui pourraient être ainsi réalisés.
Premièrement, le rapporteur du Sénat a entendu des représentants de la direction générale de la prévention des risques (DGPR) et de la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC). Il indique noir sur blanc dans son rapport qu'« une définition positive des travaux pouvant être anticipés n'a pas été trouvée ». Il n'est pas possible de dresser une liste précise, car les sites d'implantation des nouveaux réacteurs présentent des différences. Cela rend les choses floues et créé une marge d'interprétation très importante au sujet des travaux qui pourront être entrepris avant la délivrance de l'autorisation de création.
Deuxièmement, lors de leur audition – à laquelle j'ai assisté –, le président et le vice-président de l'Association nationale des comités et commissions locales d'information (Anccli) ont dit très clairement que la mesure proposée par cet article allait donner aux riverains le sentiment que les décisions étaient déjà prises et créer un fait accompli. Le Conseil national de la transition écologique (CNTE) et les associations telles que Greenpeace ou le réseau Sortir du nucléaire disent la même chose. On est en train de montrer aux citoyens qu'ils ne peuvent pas peser sur les décisions. C'est contraire à la convention d'Aarhus. C'est aussi la raison pour laquelle les discussions menées dans le cadre de la Commission nationale du débat public (CNDP) se terminent en eau de boudin. Alors qu'il restait à organiser trois étapes de débat public sur la relance du nucléaire et l'opportunité de construire six nouveaux EPR, des décisions ont déjà été prises – notamment lors du conseil de politique nucléaire organisé le 3 février par le président Macron.
Tout cela va dans le mauvais sens. C'est un signal très négatif adressé aux citoyens. Aucuns travaux ne doivent être réalisés avant la délivrance de l'autorisation de création.
En supprimant l'alinéa 2, vous enlevez une grande partie de l'intérêt de l'article 4. Or ce projet de loi a pour ambition de permettre une accélération du processus de construction des futurs réacteurs nucléaires – sans toutefois compromettre le bon respect des procédures, tant en matière d'information du public que de contrôle de la sûreté nucléaire.
Je rappelle que les travaux qui pourront commencer dès la délivrance de l'autorisation environnementale ne sont pas liés au bâtiment du réacteur lui-même. Par ailleurs, il est prévu que de nombreuses informations devront être transmises au public dès la première enquête publique.
Avis défavorable.
Le projet de loi a bien pour objet d'accélérer les procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites existants. On bâtira les nouveaux réacteurs à côté de ceux qui sont en service, sur des emprises qui ont en général déjà été acquises par EDF, avec des centaines d'hectares prévus autour des installations actuelles. On peut accélérer la réalisation d'un certain nombre d'aménagements, afin de construire au plus vite les réacteurs dont nous avons besoin pour garantir aux Français la sécurité d'approvisionnement en électricité.
Un sondage publié il y a quelques semaines par Le Journal du dimanche montrait que 72 % des Français étaient favorables au nucléaire, notamment ceux de la jeune génération – chose tout à fait nouvelle. Les factures d'électricité sont en effet de plus en plus élevées. Pendant des décennies, le nucléaire nous a fourni l'électricité la moins chère et la plus abondante d'Europe. Il faut d'urgence revenir à cette situation, qui a fait le bonheur des Français et qui constituait un gage de compétitivité pour nos entreprises.
Le nucléaire fournira peut-être l'électricité la moins chère dans quinze ou vingt ans, si l'on arrive à construire un réacteur… Non merci. On peut développer un champ d'éoliennes ou de panneaux photovoltaïques en deux ans. Cela ne présente aucune difficulté, ne risque pas de nous exploser à la figure et, en plus, coûte de moins en moins cher.
Madame la rapporteure pour avis, vous n'avez pas répondu à mon premier argument. J'insiste sur le fait que le rapport du Sénat indique qu'il est impossible de faire la liste des travaux que l'on peut anticiper avant que l'autorisation de création soit délivrée. Peut-être disposez-vous d'un autre rapport qui démontre que dresser cette liste est possible, mais pour l'instant, je n'ai pas de réponse à cette question.
Le projet de loi prévoit tout de même des catégories de travaux. Nous savons tous qu'il est difficile de dresser une liste par avance lorsque l'on envisage de manière générale des travaux de terrassement ou de raccordement. On ne peut pas entrer dans un tel degré de détail, ce serait très compliqué.
La rapporteure pour avis a indiqué que, selon plusieurs personnes auditionnées, la réalisation d'un certain nombre d'aménagements avant de construire le réacteur nucléaire lui-même représenterait un gain de temps. J'aimerais savoir quelles études étayent cette opinion, car nous n'en avons aucune. Quand on considère le chantier de Flamanville, on se dit que pour gagner davantage de temps, il aurait mieux valu réfléchir en amont plutôt que de construire à la va-vite un modèle dont les annexes sont appelées à évoluer en cours de route. La filière nucléaire est-elle si peu sûre d'elle-même qu'elle doive passer en force, en plaçant les gens devant le fait accompli ? Une fois investis des millions d'euros d'argent public, les citoyens pourraient se sentir en quelque sorte obligés de ne pas dire non.
Il existe un précédent en Autriche. Une nouvelle centrale nucléaire avait été construite, mais sa mise en service a été refusée lors d'un référendum. Du même modèle que celle exploitée à Fukushima, elle avait été utile lors de l'accident au Japon car c'est la seule où l'on peut entrer à l'intérieur du réacteur. Mais votre but, j'imagine, n'est pas de construire des bâtiments pour y étudier des questions de sûreté nucléaire et mieux comprendre leur fonctionnement en cas d'accident…
En l'absence de preuve sur le gain de temps, la disposition dont nous parlons n'a d'autre but que de placer les gens devant le fait accompli. C'est une mascarade démocratique, inquiétante pour la suite.
Je vous ai répondu précédemment avec sincérité. J'ai rendu compte des auditions auxquelles j'ai assisté, en vous faisant part des éléments sur le gain de temps qui ont été fournis tant par EDF et Framatome que par d'autres experts avertis, comme M. Jean-Claude Delalonde, président de l'Anccli.
Comme je l'ai indiqué dans mon propos liminaire, il ne se passe pas une semaine sans que le conseil municipal de Gravelines et les habitants s'interrogent sur l'état d'avancement des travaux déjà engagés. Notre collègue Paul Christophe, président de la commission locale d'information, peut vous le confirmer. Ce projet de loi suscite beaucoup d'attentes.
Il n'est pas facile d'évaluer le gain de temps, mais je m'appuie sur les informations fournies par les spécialistes et sur l'expérience que, élue au conseil municipal de Dunkerque, j'ai pu acquérir au sujet des procédures d'urbanisme.
L'objectif est d'accélérer les procédures pour gagner du temps. N'étant pas devin, je ne puis préjuger des résultats : ils dépendront beaucoup de l'état d'avancement des projets, des sites retenus et de leurs spécificités. Il faut environ cinq ans pour obtenir une autorisation, et nous essayons de ramener ce délai à trois ans. Dans la réalité, ce sera peut-être un peu moins.
Des discussions précédentes, l'on peut retenir que l'on va bâtir une grosse bête et que la construction de son cœur – le réacteur – prendra beaucoup de temps. Et, dans le même temps, on nous dit qu'il faut réaliser d'autres travaux au préalable, comme des routes d'accès. Un tel argumentaire pose problème.
Je vois un lien entre cette démarche du fait accompli et la culture du secret. Des membres de la CGT qui travaillent à la centrale de Tricastin reconnaissent que cette culture a trop longtemps été la règle chez l'ensemble des acteurs de la filière et qu'il faut évoluer.
Le choix de relancer la filière nucléaire doit s'accompagner d'une plus grande lisibilité démocratique et opérationnelle. Quelles que soient nos orientations politiques, il nous faut progresser pour mieux répondre à cette nouvelle culture de la population, dont les exigences de démocratie locale vont croissant, et de façon tout à fait légitime, sur de tels projets industriels.
Encore une fois, je suis terre à terre : le projet de loi prévoit bien que les différents travaux réalisés avant l'autorisation de création peuvent être engagés dès lors qu'ils ont été préalablement portés à la connaissance du public, dans le cadre de l'enquête publique effectuée pour l'autorisation environnementale.
Il faut se mettre à la place de nos concitoyens. Comment voulez-vous qu'ils aient confiance dans la parole publique ? On voit bien que les travaux anticipés troublent le débat public.
Les citoyens peuvent estimer que ces travaux sont des investissements inconsidérés si le projet, au final, ne va pas à son terme. Mais ils peuvent aussi penser que la consultation, c'est du vent, parce que si l'on investit, c'est que la décision a déjà été prise. Dans tous les cas, la parole publique n'en sort pas grandie.
Pourquoi est-il nécessaire d'anticiper la réalisation d'ouvrages qui ne concernent pas l'îlot nucléaire ? Parce que les travaux de terrassement et d'adduction d'eau, par exemple, font aussi partie du chemin critique du planning. Les anticiper permet d'éviter l'accumulation de retards.
Certains ont estimé qu'il ne servait à rien d'anticiper les travaux conventionnels car les retards constatés dans certains projets en cours relèvent de la partie nucléaire. C'est faux, puisqu'une partie de travaux conventionnels feront réellement prendre de l'avance. En les réalisant à partir de la mi-2024, la partie nucléaire pourra commencer au début de 2027.
Je pense que nous sommes éclairés par les derniers propos tenus au sujet des objectifs de ce projet de loi.
Mais vous ne percevez pas suffisamment que cette politique du fait accompli est totalement contre-productive. Sans débat préalable sur les projets, il ne peut y avoir de confiance dans les politiques publiques menées par les grandes entreprises, par l'État ou par les collectivités locales.
Vous ne comprenez pas à quel point ce que vous proposez détricote la confiance que peuvent avoir les Français dans les autorités publiques en matière de nucléaire. C'est très dangereux pour ce qui constitue le socle de la cohésion sociale et de la confiance dans la démocratie.
L'intervention de la rapporteure Maud Bregeon va dans le sens de nos arguments. Si les travaux conventionnels font partie du chemin critique de construction de l'ensemble de la centrale, cela renforce le sentiment de fait accompli. La population peut se dire qu'on ne fera jamais marche arrière. À quoi bon une seconde enquête publique pour l'autorisation de création ?
Je rappelle qu'il s'agit d'une disposition qui existe déjà et qui permet aux collectivités territoriales d'aménager des terrains pour des projets industriels – en réalisant des accès routiers, des parkings et des bâtiments administratifs, voire des logements.
L'une des questions qui se pose dans le cadre du chantier de construction d'un EPR à Gravelines réside dans les capacités d'accueil des travailleurs. Il est donc nécessaire de réaliser un certain nombre d'aménagements critiques avant même la pose de la première pierre du bâtiment du réacteur.
Il faut cesser les concours d'éloquence. La démocratie française et la confiance dans l'État ne vont pas être remises en question du fait de la construction de parkings ! Le projet de loi prévoit bien que tout est public. Rien n'est caché.
Nous n'avons pas de leçons à recevoir de gens qui sont contre toute accélération, aussi bien en matière de nucléaire que d'énergies renouvelables.
La question du nucléaire est particulièrement sensible, mais il en est de même pour d'autres projets industriels – pour lesquels on peut transposer ce qui a été dit au sujet de l'association des populations en amont.
Je maintiens mon avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CD38 de M. Pierre Meurin.
Il s'agit de revenir à la rédaction initiale de l'alinéa 2, telle qu'elle avait été proposée par le Gouvernement. Les dispositions ajoutées par le Sénat sont superfétatoires et risquent de rendre plus difficile le développement du nucléaire.
Il ne me semble pas opportun de revenir sur tout ce qui a été ajouté par nos collègues sénateurs, notamment en ce qui concerne l'obligation, pour l'exploitant, d'indiquer au moment de la procédure d'autorisation environnementale les travaux qu'il compte entamer dès la délivrance de cette autorisation. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CD90 de Mme Aurélie Trouvé.
La préservation de l'environnement doit être la priorité de l'action publique, tant au niveau national que local. Il est inacceptable que les travaux préparatoires nécessaires à la construction d'une nouvelle installation nucléaire puissent être engagés alors même que l'autorisation de création n'a pas été délivrée. En effet, compte tenu des conséquences irrémédiables des installations nucléaires sur les écosystèmes locaux et sur le paysage, il est impensable de laisser démarrer de tels travaux d'aménagement.
Nous proposons donc de supprimer cette possibilité, qui est en totale contradiction avec l'impératif de protection de l'environnement. L'accélération des procédures ne saurait se faire au détriment de l'environnement et de nos territoires.
L'énergie nucléaire ne fournit que 2,5 % de la consommation finale d'énergie à l'échelle mondiale. Même si l'on utilisait toutes les ressources d'uranium disponibles dans le monde, on arriverait péniblement à 4 ou 5 %. Cela démontre que l'énergie atomique n'a pas d'avenir.
Avec cet amendement vous revenez sur le principe même de l'article 4, qui prévoit bien une dérogation par rapport au droit en vigueur.
Votre amendement conduit à durcir ce dernier, puisque les travaux qui concernent l'îlot nucléaire ne pourraient être autorisés qu'après la parution du décret de création. Actuellement, ces travaux peuvent commencer une fois que l'enquête publique a été réalisée.
Avis défavorable, car il faut un dispositif qui permette d'anticiper certains travaux pour accélérer les constructions.
Comme il a été fait allusion à l'attitude de certains groupes lors de l'examen du projet de loi relatif à l'accélération de la production d'énergies renouvelables, notre groupe s'est senti un peu visé.
Nous aurions aimé que des dispositions prévoyant d'anticiper les travaux aient été aussi prévues pour les énergies renouvelables. On aurait ainsi pu couler le béton pour fixer le pylône d'une éolienne avant d'avoir l'autorisation d'installer les pales ; au lieu de quoi on a inventé un article 3 qui prévoit une pseudo-planification, et qui donne en fait un droit de veto aux maires à chaque étape de la procédure.
Avec ce projet de loi, c'est l'inverse : l'État reprend la main, par le biais du Conseil d'État, pour imposer ses desiderata aux collectivités territoriales.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CD155 de la rapporteure pour avis.
Amendement CD146 de M. Emmanuel Maquet.
Pour accélérer la construction de réacteurs, il est essentiel de démarrer le plus de travaux possible – hormis ceux liés à la sûreté nucléaire – dès l'autorisation environnementale.
L'amendement précise que les équipements et les installations nécessaires à l'exploitation du réacteur sont aussi concernés par cette mesure dérogatoire.
Cette précision sur le périmètre des travaux concernés par l'autorisation environnementale est importante. Avis favorable.
La commission adopte l'amendement.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CD140 de la rapporteure pour avis.
Amendements CD139 de la rapporteure pour avis et CD122 de M. Gérard Leseul (discussion commune).
Les précisions ajoutées à la fin de l'alinéa 2 par le Sénat reviennent à rappeler, d'une part, l'obligation d'organiser une enquête publique à laquelle est soumis l'exploitant lorsqu'il dépose une demande d'autorisation de création, d'autre part, la nécessité de recueillir un avis de l'ASN. Or celle-ci doit obligatoirement donner son avis sur la demande d'autorisation, donc, implicitement, sur les documents qu'elle contient, dont le rapport préliminaire de sûreté. En mentionnant l'article L. 593-7 du code de l'environnement, qui détermine le régime de création des installations nucléaires de base, le texte du projet de loi initial inclut toutes les étapes nécessaires à l'instruction et à la délivrance du décret de création. C'est pourquoi je propose de supprimer les précisions du Sénat, qui sont inutiles.
Si je partage en partie l'analyse de la rapporteure pour avis, je souhaiterais que nous allions plus loin, en faisant en sorte que l'avis de l'Autorité de sûreté nucléaire soit à la fois conforme et rendu public.
Nous avons déjà eu cette discussion tout à l'heure : il importe d'assurer la transparence, conformément aux exigences démocratiques et de manière à permettre à toute personne d'exercer son droit à l'information prévu par l'article 7 de la Charte de l'environnement.
Il l'est si l'ASN le décide, mais aucune obligation n'est inscrite dans la loi. Nous souhaiterions en introduire une afin de veiller à la bonne information de l'ensemble de la population.
Si vous m'en apportez la démonstration, je suis prêt à retirer l'amendement, mais, à ma connaissance, ce n'est pas le cas, même si, dans la pratique, l'avis de l'ASN est, dans la plupart du temps, rendu public. Inscrire une telle disposition dans la loi permettrait de donner confiance à la population.
Je vérifierai, mais, à ma connaissance, il n'existe aucune obligation formelle que l'ASN rende publics tous ses avis.
La commission adopte l'amendement CD139.
En conséquence, l'amendement CD122 tombe.
Membres présents ou excusés
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire
Réunion du mardi 28 février 2023 à 17 h 15
Présents. - M. Damien Adam, M. Henri Alfandari, Mme Lisa Belluco, M. Emmanuel Blairy, M. Jean-Yves Bony, M. Jorys Bovet, Mme Pascale Boyer, Mme Maud Bregeon, M. Jean-Louis Bricout, M. Anthony Brosse, Mme Danielle Brulebois, M. Stéphane Buchou, M. Aymeric Caron, M. Sylvain Carrière, M. Lionel Causse, M. Pierre Cazeneuve, M. Mickaël Cosson, Mme Annick Cousin, Mme Catherine Couturier, Mme Nathalie Da Conceicao Carvalho, Mme Christine Decodts, M. Stéphane Delautrette, M. Vincent Descoeur, M. Nicolas Dragon, Mme Sylvie Ferrer, M. Jean-Luc Fugit, M. Daniel Grenon, Mme Clémence Guetté, M. Yannick Haury, Mme Laurence Heydel Grillere, Mme Chantal Jourdan, Mme Julie Laernoes, Mme Sandrine Le Feur, M. Gérard Leseul, M. Jean-François Lovisolo, Mme Aude Luquet, M. Emmanuel Maquet, Mme Manon Meunier, M. Pierre Meurin, Mme Laure Miller, M. Bruno Millienne, M. Jimmy Pahun, Mme Sophie Panonacle, Mme Christelle Petex-Levet, M. Bertrand Petit, Mme Marie Pochon, M. Loïc Prud'homme, M. Nicolas Ray, M. Benjamin Saint-Huile, Mme Anne Stambach-Terrenoir, M. Jean-Pierre Taite, M. Vincent Thiébaut, M. Stéphane Travert, M. David Valence, M. Pierre Vatin, M. Antoine Vermorel-Marques, M. Antoine Villedieu, M. Hubert Wulfranc, M. Jean-Marc Zulesi
Excusés. - M. Gabriel Amard, Mme Nathalie Bassire, M. Jean-Victor Castor, Mme Marjolaine Meynier-Millefert, M. Marcellin Nadeau, M. Hubert Ott
Assistaient également à la réunion. - Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Christophe Bex, M. Maxime Laisney, Mme Nathalie Oziol, M. René Pilato