Je suis choquée : le réchauffement climatique est déjà une réalité, et les dérogations accordées aux centrales du Blayais, du Bugey, de Golfech et de Saint-Alban ne relèvent pas de la science-fiction. Cela s'est passé l'été dernier. Les nouveaux réacteurs verront le jour, au mieux, dans quinze à vingt ans. Entre-temps, le réchauffement climatique se sera amplifié. Même si les émissions de gaz à effet de serre étaient limitées drastiquement, ceux qui sont déjà dans l'atmosphère continueront à accroître le réchauffement jusqu'à ce que leur concentration diminue.
Si l'étude d'impact ne prend pas en compte les réalités auxquelles nous sommes d'ores et déjà confrontés, nous irons au-devant de difficultés considérables. Il faudra procéder à des arbitrages impossibles. Par exemple, il faudra choisir entre les différents usages de l'eau : l'eau du Rhône sera-t-elle réservée à la boisson, à l'agriculture – c'est-à-dire à l'alimentation – ou au refroidissement des centrales ? Par ailleurs, les rejets d'eau entraînent une pollution chimique qui augmentera elle aussi.
Le réchauffement climatique doit être pris en compte. L'IRSN a constitué un groupe de travail qui rendra ses premières conclusions dans le courant du mois. Si l'on décide de relancer le nucléaire, comme semblent le vouloir le Président de la République et les groupes qui le soutiennent ici, il faut à tout le moins tenir compte du fait que nous ne sommes plus dans les années 1970 : à cause du réchauffement climatique, il n'est plus possible de construire les centrales comme on le faisait à cette époque.
Vous percevez nos demandes comme une forme d'obstruction, mais ce n'est pas le cas : nous craignons que l'on aille tellement vite dans la construction qu'on en vienne à ignorer les nouvelles réalités induites par le réchauffement climatique.