La séance est ouverte.
La séance est ouverte à neuf heures.
La parole est à M. Benoit Mournet, pour exposer sa question, n° 622, relative aux centres experts en santé mentale.
Monsieur le ministre chargé de la santé, j'ai visité la semaine dernière, en compagnie du délégué ministériel à la santé mentale et à la psychiatrie et de plusieurs collègues, le centre expert en psychiatrie de Créteil. Il existe cinquante-trois centres experts en France. Ces structures sont destinées à favoriser l'établissement précoce d'un diagnostic et à améliorer le pronostic. Grâce à elles, la France se place au troisième rang mondial dans la recherche sur les troubles bipolaires. Ce modèle rend plus attractif l'hôpital public pour les psychiatres. Le réseau s'est étendu à la suite d'une expérimentation lancée en 2007. Ne serait-il pas temps d'intégrer ces centres dans l'offre de soins et de les inscrire dans le code de la santé publique – afin de compléter les dispositifs existants, et non de les concurrencer, bien sûr ?
J'aimerais, d'autre part, vous poser une deuxième question concernant les médecins remplacés. Le docteur Hervé Gachies, qui exerce dans le centre de soins non programmés de Tarbes, m'a ainsi appris que les médecins remplacés ne pouvaient pas, pendant la durée de leur remplacement, exercer une activité libérale ailleurs. Sachant que nous en comptons environ 15 000 en France, peut-être pourrions-nous réfléchir à mieux exploiter ce temps médical ?
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la santé et de la prévention.
Votre question est pertinente et je vous remercie de me l'avoir posée. Je connais votre implication dans ce domaine. Les centres experts en psychiatrie, comme les centres de recours pour les troubles du comportement alimentaire ou les centres experts déployés par la fondation FondaMental, existent depuis plusieurs années et sont très utiles : ils fournissent une aide au diagnostic, accueillent les patients les plus complexes et dispensent des formations. Ces activités de psychiatrie surspécialisée doivent être pleinement intégrées dans une logique de gradation de l'offre de soins. Si le concept de gradation des soins a été introduit pour la psychiatrie, par ordonnance, en 2021, il n'a pas encore été appliqué.
Bien sûr, ces travaux seront menés en étroite concertation avec les psychiatres, comme cela se pratique dans toutes les autres disciplines.
Dès à présent, certains centres, du fait de leur expertise ou de leur activité, font déjà l'objet d'une reconnaissance spécifique par le ministère de santé. C'est le cas, au niveau national, du numéro national de prévention du suicide ou de certains centres nationaux, comme le centre ressource de réhabilitation psychosociale et, à l'échelon régional, des centres régionaux du psychotraumatisme ou des centres ressources pour les intervenants auprès des auteurs de violences sexuelles. Les travaux se poursuivent pour structurer par étapes l'offre de soins en psychiatrie, depuis l'offre de premier recours non spécialisée jusqu'au centre spécialisé de niveau régional, voire national.
Je reprendrai ces chantiers, qui sont issus des conclusions des assises de la santé mentale et de la psychiatrie, lancées par le Président de la République – je suis en effet déterminé à appliquer les engagements qui en ont découlé. Je m'y emploierai avec tous ceux qui, comme vous, ont à cœur ce sujet.
La parole est à Mme Anne Brugnera, pour exposer sa question, n° 629, relative à la scolarisation des enfants handicapés.
J'aurais souhaité interroger Mme la ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées sur l'ouverture de nouvelles places en institut médico-éducatif (IME). Dans ma circonscription, des parents me confient régulièrement les grandes difficultés qu'ils rencontrent pour scolariser leurs enfants en situation de handicap. Les handicaps sont parfois très lourds et leur inclusion dans des établissements classiques n'est pas toujours la meilleure solution pour le bien de l'enfant. Si la loi de 2005 pour l'égalité des droits et des chances, qui reconnaît à tout enfant porteur de handicap le droit d'être inscrit en milieu ordinaire, a permis des avancées importantes, nous ne pouvons ignorer le fait qu'un environnement scolaire inadapté ne permet pas à certains enfants porteurs de handicap de s'épanouir. Il peut au contraire les faire régresser, voire souffrir. C'est le cas par exemple d'Adem, dont je suis le parcours et qui vit dans le 6
La mise en œuvre du plan de création de 50 000 solutions, qui permettra d'accompagner les choix de vie des enfants et des adultes en situation de handicap, doit s'étaler de 2024 à 2030 et commencera par un diagnostic territorial.
En Auvergne-Rhône-Alpes, 134 millions d'euros sont prévus, dont 50 millions pour le montant école. Dans le Rhône, à la rentrée prochaine, de nombreux postes seront créés en Sessad (service d'éducation spéciale et de soins à domicile), en IME, en Ulis TSA (troubles du spectre de l'autisme) et d'autres seront issus de la transformation d'Ulis TFC (troubles des fonctions cognitives).
Ces observations concernent le volet école mais ma question a trait au volet médico-éducatif : quand de nouvelles places seront-elles créées en IME, de manière à apporter à ces enfants la solution qui leur convient ?
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la santé et de la prévention.
Je vais vous répondre à la place de Mme Fadila Khattabi, qui ne pouvait pas être présente ce matin.
L'accompagnement des enfants en situation de handicap et leur scolarisation sont l'une des préoccupations majeures du Gouvernement – vous le savez, puisque vous participez à ces travaux. Depuis 2017, nous agissons avec le ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse en faveur de l'école pour tous et, au-delà, pour proposer à chaque enfant des parcours fluides, de la maternelle à l'université.
Cette ambition a été réaffirmée par le Président de la République lors de la Conférence nationale du handicap qui s'est tenue le 26 avril dernier. Il est prévu de fortement renforcer l'accessibilité de l'école grâce au projet de création de pôles d'appui à la scolarité, qui permettront de mobiliser des ressources de l'éducation nationale et des ressources du médico-social pour une intervention de premier niveau. Pas moins de 400 millions d'euros seront ainsi mobilisés à cet effet dans les prochaines années.
Cette mesure s'inscrit dans une démarche de renforcement de la coopération entre le secteur médico-social et l'éducation nationale. En effet, nous le savons pour le vivre dans nos territoires, le décloisonnement est l'une des clés de la réussite de notre action. Il s'agit de proposer non pas une superposition de réponses, mais une réponse coordonnée et globale auprès de l'enfant et de sa famille. C'est dans cette même logique que nous travaillons à l'implantation de 100 établissements médico-sociaux pilotes dans les murs de l'école d'ici à 2027, de manière à construire les passerelles indispensables aux parcours. Il s'agit de permettre à ces enfants et leurs familles de franchir le même portail : celui de l'école de la République.
Enfin, et vous l'évoquez, nous nous sommes engagés à créer 50 000 nouvelles solutions d'ici à 2030. La circulaire du 7 décembre que la ministre Fadila Khattabi a adressée aux ARS, les agences régionales de santé, détaille ce plan et en présente notamment la méthode, résolument partenariale et inspirée de la réalité de chaque territoire.
Ces crédits, de l'ordre de 1,5 milliard d'euros à l'horizon 2030, dont 134 millions en Auvergne-Rhône-Alpes, permettront de trouver des solutions modulaires pour accélérer la transformation des établissements et services et préfigurer une logique de plateformes de services coordonnés avec la personne en situation de handicap.
Quant au calendrier, la ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées s'y engage : des solutions concrètes émergeront dès cette année, en 2024, grâce aux moyens nouveaux qui seront délégués aux ARS au printemps. Soyez assurée que Mme Khattabi veillera à la bonne déclinaison de ce plan dans le Rhône comme dans l'ensemble du territoire, afin de proposer à chacun de nos compatriotes une réponse à la hauteur de ses besoins et attentes.
Je vous remercie pour votre réponse. Les familles sont en grande souffrance, les enfants aussi. Vous pouvez compter sur les députés pour travailler avec vous dans ce domaine.
La parole est à M. Julien Dive, pour exposer sa question, n° 618, relative aux centres sociaux dans l'Aisne.
Monsieur le ministre, vous avez été maire, vous connaissez le rôle crucial des centres sociaux, non seulement dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), mais aussi dans les zones de revitalisation rurale (ZRR). Je souhaite associer à ma question ma suppléante, Marie-Laurence Maitre, maire adjointe chargée des centres sociaux à Saint-Quentin.
Le 12 mars, il s'organisera, au centre social du quartier Saint-Martin, à Saint-Quentin, un « vestiaire solidaire », afin d'offrir aux plus démunis la possibilité de s'habiller à prix modiques. Mais ce n'est pas tout ! Il y aura aussi des goûters littéraires, des ateliers culinaires, des activités artistiques – bref, autant d'initiatives audacieuses qui défient les barrières de l'exclusion sociale et économique. C'est ainsi que se forge la véritable solidarité : dans la concrétisation des initiatives et le partage de savoirs.
Nos centres sociaux savent se plier, s'adapter, organiser des festivités avec des ressources chétives, en jonglant avec des budgets de plus en plus étriqués – mais aujourd'hui, les demandes d'aide s'étirent hors de leur portée, et la coupe est pleine !
Le 31 janvier dernier, les agents des dix centres sociaux et culturels de l'Aisne ont manifesté pour protester contre la baisse drastique des ressources de leurs établissements, qui met en péril leurs missions essentielles. Les lourdeurs administratives étouffent toute demande de financement, plongeant les employés dans une précarité grandissante.
Épuisés, étranglés financièrement, accablés, certains centres sociaux se voient forcés de réduire leurs horaires d'ouverture ou de limiter leurs services, tandis que d'autres sont contraints de sacrifier la qualité de leurs activités. Pourtant, alors que les prix de l'énergie, de l'alimentation, des transports et des produits d'hygiène flambent, la demande sociale ne cesse de croître, mettant à rude épreuve leur résilience.
Face à cette crise, la Fédération des centres sociaux et socioculturels de France appelle au déblocage d'un fonds de soutien de 65 millions d'euros, à un nouveau pacte de coopération entre centres sociaux et pouvoirs publics ainsi qu'à une révision en profondeur de leur modèle économique.
Quelles mesures concrètes envisagez-vous de prendre pour permettre aux centres sociaux de supporter dans la durée l'augmentation de leurs charges de fonctionnement ?
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la santé et de la prévention.
Vous avez raison, monsieur le député, de souligner le rôle primordial des centres sociaux dans nos territoires. Rappelons que 60 % des 2 373 centres sociaux et des 1 668 espaces de vie sociale que compte notre pays sont des associations et que les centres sociaux emploient 62 420 salariés.
Le Gouvernement est fortement mobilisé pour favoriser le déploiement de la politique et des structures d'animation de la vie sociale. Des engagements ont été pris dans le cadre de la nouvelle convention d'objectifs et de gestion (COG) de la branche famille de la sécurité sociale pour la période 2023-2027, signée le 10 juillet 2023. Ils découlent des bilans annuels de la COG précédente, des rapports d'évaluation de l'Inspection générale des affaires sociales et des besoins exprimés par les représentants des structures, notamment la Fédération des centres sociaux et socioculturels de France, partenaires locaux et nationaux des caisses d'allocations familiales. Ces dernières ont notamment alerté sur le coût de l'avenant à la convention collective nationale des acteurs du lien social et familial (Alisfa) qui entre en vigueur.
Afin de tenir compte de ces revalorisations salariales, une hausse de 6 % sera appliquée par un relèvement du taux de prise en charge des prestations de service de la branche famille : 42,4 % contre 40 % précédemment pour la fonction « animation globale et coordination », constitutive d'un centre social, 63,6 % contre 60 % auparavant pour les prestations de service « animation locale », afin de financer les espaces de vie sociale, et « animation collective familles », pour prendre en charge les référents familles.
D'autre part, dans le cadre de la convention d'objectifs et de gestion, la branche famille prévoit de participer au financement de 611 nouvelles structures : 150 centres sociaux et 461 espaces d'animation de la vie sociale dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, les zones de revitalisation rurale, ainsi que les territoires non couverts. L'objectif est d'améliorer le maillage des structures d'animation de la vie sociale en ciblant les territoires faiblement couverts, notamment en outre-mer.
Cependant, cet engagement de la part de la branche famille n'aura d'effet sur la situation des centres sociaux que si les autres financeurs, en premier lieu les villes et les intercommunalités, maintiennent, voire renforcent leur soutien.
J'entends que vous avez prévu d'ouvrir de nouveaux centres sociaux et de revaloriser les salaires mais, dans les faits, même si les villes – auxquelles il est déjà beaucoup demandé – font un effort d'accompagnement, cela risque d'être insuffisant. L'État a demandé, à juste titre, la revalorisation des salaires des employés des centres sociaux, mais il n'a pas donné les moyens de la couvrir. Cette revalorisation sera réalisée, vous venez de l'évoquer, mais je crains qu'elle ne suffise pas. Je crains même que nous ne soyons toujours à courir après les annonces sans avoir de véritable plan stratégique à long terme pour les centres sociaux.
Je le répète, et je sais que vous en avez conscience, les centres sociaux sont structurants, non seulement pour les territoires ruraux, mais aussi en ville. Ils constituent un sérail où naissent les fortes solidarités qui se manifestent dans notre pays, particulièrement là où il existe de la misère sociale. Si nous ne mettons pas en place une véritable politique de moyen et long terme pour l'accompagnement des centres sociaux, qu'ils soient associatifs ou municipaux, il est à craindre que nous ne rations ce rendez-vous et que nous n'atteignions pas notre cible.
La parole est à M. Mickaël Bouloux, pour exposer sa question, n° 636, relative aux centres sociaux.
Je reviens sur le sujet des centres sociaux. Qu'un collègue d'un autre groupe et d'un autre territoire vous ait interrogé sur ce point démontre qu'il est urgent d'apporter une réponse.
Lutte contre les inégalités, solidarité, éducation populaire, lien social, lutte contre les exclusions : telles sont les nombreuses missions des centres sociaux, véritables pierres angulaires de la cohésion sociale dans notre pays. Nul besoin de démontrer combien leur action est indispensable dans notre époque marquée par les replis et les fractures.
Pourtant, face à la fragilisation croissante de leur modèle économique, leurs difficultés financières se sont aggravées. Dans ma circonscription, à proximité de Rennes, les responsables d'un centre social m'expliquaient que ni le financement ni la masse salariale n'avaient augmenté depuis 2014, alors que la commune dans laquelle le centre est implanté compte près de 300 habitants supplémentaires par an, soit près de 3 000 sur la période. Monsieur le ministre, expliquez-moi comment, dans ce centre social, deux animateurs enfance-jeunesse peuvent décemment accompagner 400 adolescents en très grande vulnérabilité ?
Beaucoup de centres ont déjà mené un travail de rationalisation et sont aujourd'hui dépourvus de marge de manœuvre financière. Un autre centre social de ma circonscription rennaise m'informait être contraint d'aller chercher des microfinancements. En une année, il a signé quatre-vingt-trois conventions de financement dans le cadre d'appels à projets, soit plus d'une et demi par semaine. Alors que la vulnérabilité et la pauvreté explosent, le modèle actuel oblige les centres sociaux à passer un temps démesuré à répondre à une multitude de petits appels d'offres. Cette surcharge administrative est traitée au détriment des réponses concrètes à apporter à une détresse sociale croissante !
En Bretagne, l'État participe au financement des centres sociaux à hauteur de 4,7 % seulement, contre près de 30 % pour les communes. Dans cet hémicycle, le Gouvernement a affirmé que des solutions financières avec le bloc communal seraient trouvées. L'État doit prendre ses responsabilités et arrêter de se désengager ! Vous êtes à l'origine de la rigueur budgétaire subie par les collectivités.
Le bloc communal ne peut pas tout, surtout dans un contexte d'amenuisement de ses dotations et subventions. Comment répondre à des besoins sociaux croissants avec des ressources financières et humaines en diminution ? Le pouvoir actuel édicte des règles sur la base d'une vision purement statistique mais, dans le cas présent, même statistiquement, ça coince !
Monsieur le ministre, face à cette équation insoluble, ne restez pas enfermé dans des certitudes idéologiques. Sortez du logiciel de la Macronie : les centres sociaux sont incompatibles avec les sirènes de la start-up nation ! Ils ne vendent ni biens ni services ; ils reposent sur la non-lucrativité et l'intérêt général. Faites un pas de côté afin de ne pas laisser les centres sociaux subir une situation insupportable jusqu'à être contraints de mettre la clé sous la porte.
J'ai bien connaissance de la nouvelle convention signée en juillet dernier. Cependant, les montants supplémentaires prévus ne permettent pas de couvrir la hausse de 18 % des dépenses des centres sociaux. C'est largement insuffisant et cette insuffisance ne peut plus être camouflée par des pirouettes.
Monsieur Bouloux, il serait bon de laisser à M. le ministre du temps pour vous répondre…
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la santé et de la prévention.
En l'absence de Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités, je reprendrai la réponse que j'ai faite au député Julien Dive et vous rappellerai l'effort d'accompagnement décidé par le Gouvernement dans le cadre de la nouvelle convention d'objectifs et de gestion et la hausse de 6 % accompagnée d'un relèvement du taux de prise en charge des prestations de service de la branche famille, concernant à la fois l'animation globale et la coordination, les animations locales et les animations collectives familles.
Je n'entrerai pas dans les détails, mais je souligne que ces dispositions témoignent de ce que le Gouvernement ne méconnaît pas l'utilité ni l'importance des centres sociaux. Ayant été maire pendant plus de quinze ans, je sais le rôle majeur qu'ils jouent dans le maintien du tissu social, l'animation des quartiers ou des villages et l'accompagnement des personnes éloignées des loisirs et d'un certain nombre de prises en charge. Il n'existe pas de volonté d'écraser un dispositif parce qu'il serait diffus, fragile ou parce qu'il reposerait sur des bonnes volontés et des engagements locaux – je pense aux élus et au tissu associatif dont la fragilité est connue.
La mobilisation générale face à des charges qui augmentent doit concerner tant l'État que les collectivités locales. Je ne crois pas que ce gouvernement – cela a fait l'objet de nombreux débats dans l'hémicycle – ait appauvri les collectivités territoriales. Leurs dotations ont été confortées ces dernières années et l'activation du bouclier tarifaire leur a profité en priorité. Nous accordons une attention particulière aux finances locales de manière à protéger les collectivités territoriales, acteurs importants qui constituent les partenaires quotidiens des centres sociaux.
Je me suis éloigné de la réponse précédente, fondée sur des chiffres précis, mais il importait de rappeler que nous ne méconnaissons pas l'importance des centres sociaux dans le tissu et l'animation de nos territoires.
La parole est à M. Charles Fournier, pour exposer sa question, n° 608, relative à la psychiatrie publique à Tours.
Cette question a l'originalité d'avoir été rédigée par un groupe de citoyens membres du parlement de circonscription que j'ai institué. Ce parlement réunit quatre-vingts citoyens tirés au sort parmi des volontaires de ma circonscription ; ils participent à mes travaux parlementaires. C'est la seconde fois que j'ai l'honneur de porter à l'attention du Gouvernement une question qui émane directement des citoyens.
Elle résulte de la rencontre d'une préoccupation de bon nombre d'entre eux sur les enjeux de santé et d'une actualité locale chargée concernant la psychiatrie. La prise en charge des personnes atteintes de troubles psychiatriques est en effet insuffisante : des lits ferment dans les structures hospitalières alors que les structures extra-hospitalières de prise en charge ambulatoire sont d'ores et déjà débordées.
Le nouvel hôpital psychiatrique de Tours, qui doit regrouper d'ici à 2026 les différentes unités des services de psychiatrie publique du territoire, a prévu la suppression de 84 lits sur 204 pour des raisons budgétaires. Il manquerait 2 millions d'euros, alors que l'Indre-et-Loire fait déjà partie des départements qui ont le ratio le plus faible de psychiatres et de personnel soignant par habitant. En résultent la saturation permanente des urgences, la souffrance généralisée des soignants, des patients et de leurs familles, la sortie prématurée de patients qui ne sont pourtant pas stabilisés.
Dans un contexte de manque de personnel et sous prétexte d'un virage ambulatoire, les lits d'hospitalisation complète sont fermés avant même que n'aient été alloués les moyens nécessaires à l'extra-hospitalier pour assurer une prise en charge de qualité.
La charrue est mise avant les bœufs : avant de réduire le nombre de lits et de personnel soignant en intra-hospitalier, il conviendrait de donner plus de moyens à l'extra-hospitalier afin que tous ceux qui en ont besoin soient pris en charge en ambulatoire. En outre, il ne faut pas réduire les capacités d'hospitalisation complète car un grand nombre de patients et d'actes requièrent des lits d'hospitalisation.
Comme le Gouvernement l'avait précisé le 29 novembre 2022 dans sa réponse à l'une de mes questions écrites, l'instruction du 21 juillet 2022 relative aux modalités d'adaptation de l'offre de soins en psychiatrie pour mieux répondre aux besoins incite les établissements de santé autorisés en psychiatrie à ouvrir des lits d'hospitalisation supplémentaires de façon transitoire pour répondre aux besoins, mais également à mettre en place des dispositifs de renforcement de l'offre de soins en psychiatrie pour prévenir les venues aux urgences et limiter les hospitalisations.
L'instruction n'est pas mise en œuvre à Tours. En l'absence de personnel, les patients ne sont pas pris en charge. En témoignent les délais d'attente en centre médico-psychologique : actuellement, ils sont de deux mois pour un rendez-vous avec un infirmier et de trois mois pour un rendez-vous avec un psychiatre ou psychologue.
Malgré le financement accordé par l'ARS – l'agence régionale de santé – pour la construction du nouvel hôpital psychiatrique de Tours, le budget reste insuffisant pour prendre en charge l'ensemble du bassin tourangeau, en intra-hospitalier comme en ambulatoire. Une partie du budget normalement affecté au fonctionnement de la psychiatrie et ne relevant pas de la T2A (tarification à l'activité) a été affectée à l'équilibre général du CHRU, le centre hospitalier régional universitaire. Cette réaffectation est officiellement justifiée par les difficultés à couvrir des postes vacants en psychiatrie. Si la question de l'attractivité des métiers de la psychiatrie se pose, la réponse passe par la réaffirmation d'un projet de soins de qualité, ce qui ne semble pas être le cas.
Pourquoi cette partie du budget allouée à la psychiatrie a-t-elle été détournée alors que les besoins de prise en charge augmentent ? Le Gouvernement sera-t-il en mesure de combler le manque de financement pour que le futur hôpital psychiatrique de Tours devienne un modèle en matière de prise en charge des patients ? D'une manière générale, pourrait-on prévoir pour l'ambulatoire un budget qui permette d'assurer une meilleure prise en charge globale ?
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la santé et de la prévention.
Je vous remercie de vous faire le messager de cette question qui résulte d'un mode de construction participatif dont il faut souligner l'intérêt. Je constate que ces citoyens tirés au sort ont des idées précises et posent des questions tout aussi précises concernant le fonctionnement de notre système de santé, particulièrement en psychiatrie. Je comprends leurs inquiétudes au sujet de leur établissement de proximité, le CHRU de Tours.
Le secteur de la psychiatrie est confronté à des problèmes de démographie des professionnels de santé. Il n'échappe pas aux tensions démographiques que connaît l'ensemble de notre système de santé, à tous les étages, dans tous les modes d'exercice et dans toutes les professions. Cela est vrai partout en France et, de façon prégnante, en Centre-Val de Loire.
Il convient de souligner que la région Centre-Val de Loire bénéficie de financements complémentaires pour la psychiatrie au titre du rattrapage national depuis 2018 : 13 millions d'euros supplémentaires ont été alloués en trois ans au département d'Indre-et-Loire, en soutien notamment du centre hospitalier régional universitaire de Tours.
En parallèle, afin de lutter contre les problèmes de démographie médicale – permettez-moi, là aussi, d'être précis –, le nombre de postes d'internes en psychiatrie est passé de dix en 2017 à treize en 2022. La psychiatrie a été reconnue comme une spécialité en tension. Le taux d'étudiants hospitaliers de deuxième cycle en service de psychiatrie va augmenter de manière progressive, concomitamment à la suppression du numerus clausus et à la montée en puissance des effectifs dans les études médicales.
L'attractivité du secteur de la psychiatrie est une des priorités du projet régional de santé conduit par l'ARS en liaison avec les collectivités territoriales de votre région. Grâce à l'ouverture d'une deuxième faculté de médecine à Orléans, un plus grand nombre de médecins psychiatres seront formés. II y aura également plus d'infirmiers en pratique avancée ayant la mention « psychiatrie-santé mentale » dans les services grâce à l'augmentation des capacités de formation, qui passera de vingt places en 2021 à cinquante en 2023, soit plus qu'un doublement.
Plus spécifiquement, le CHRU de Tours s'est engagé dans un plan de transformation de son offre de soins en psychiatrie. Le projet du nouvel hôpital psychiatrique, dont l'ouverture est prévue fin 2025, prévoit le regroupement des lits d'hospitalisation des quatre secteurs de psychiatrie adultes dans un site unique et nouveau. Le CHRU de Tours mène aussi des projets au bénéfice des patients, par exemple en développant de nouvelles solutions d'aval pour les patients hospitalisés depuis longtemps.
Vous l'aurez compris, à Tours comme sur le reste du territoire, l'État est mobilisé pour soutenir activement le secteur de la santé mentale. Je l'ai dit : avec Catherine Vautrin, nous allons reprendre les conclusions des assises de la santé mentale lancées par le Président de la République afin qu'elles trouvent une traduction concrète et que la santé mentale ne soit plus l'un des parents pauvres de notre système de santé.
La parole est à M. Yannick Favennec-Bécot, pour exposer sa question, n° 616, relative à la retraite des sapeurs-pompiers volontaires.
Dans le cadre de la réforme des retraites de 2023, une mesure très attendue par les sapeurs-pompiers volontaires a été adoptée : l'attribution de trimestres supplémentaires, lors de la liquidation de leur pension de retraite, en compensation de leur engagement très fort et risqué, aux multiples conséquences personnelles et professionnelles.
Je fais partie de ceux qui, depuis de nombreuses années, plaidaient à l'Assemblée nationale pour que soit mieux reconnu l'engagement de ces hommes et de ces femmes au service de la sécurité des Français. Il y va de la pérennité et du développement de ce modèle unique de sécurité civile et, par conséquent, du secours apporté quotidiennement à nos concitoyens, notamment dans les territoires ruraux, comme je le constate dans mon département de la Mayenne.
Le décret d'application de cette mesure est toujours en attente de publication. Dans sa première version, le bénéfice du dispositif était limité aux seuls sapeurs-pompiers volontaires ne bénéficiant pas de l'ensemble de leurs trimestres de cotisation retraite au titre de leur carrière professionnelle. Or, au sein de notre assemblée, le principe de cette bonification faisait consensus ; elle devait permettre d'accorder des trimestres supplémentaires au-delà – et en plus – des trimestres cotisés dans le cadre d'une activité professionnelle. Elle devait donc s'appliquer à tous les sapeurs-pompiers volontaires ayant accompli au moins dix années de service, continues ou non, et non se limiter aux seuls volontaires inactifs pour compenser un déficit de trimestres.
Nous sommes nombreux à avoir averti le Gouvernement : exclure ces hommes et ces femmes du dispositif de bonification leur enverrait un mauvais signal alors qu'ils attendent cette reconnaissance depuis de nombreuses années. De surcroît, cela découragerait celles et ceux qui cumulent leur activité professionnelle avec leur engagement au service de la protection de nos concitoyens.
Certaines informations amènent à penser que la représentation nationale aurait enfin été entendue. Pouvez-vous me confirmer que notre volonté de reconnaissance et de justice à l'égard de tous nos sapeurs-pompiers volontaires sera bien respectée et m'indiquer dans quels délais cette mesure très attendue sera enfin effective ?
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la santé et de la prévention.
Vous l'avez souligné, la réforme des retraites de 2023 a concrétisé – il faut le souligner – une avancée jusqu'ici toujours écartée : attribuer des droits à la retraite aux sapeurs-pompiers volontaires, de manière à valoriser leur engagement et à garantir qu'il ne pèse pas sur leur future pension.
Le Gouvernement tiendra cet engagement – de façon rétroactive, je tiens à le préciser. Pour toute nouvelle liquidation de pension d'une personne ayant accompli par le passé au moins dix ans de service en tant que sapeur-pompier volontaire, ces périodes donneront lieu à des trimestres supplémentaires selon les conditions fixées par un décret.
Celui-ci prévoira bien que les trimestres supplémentaires seront accordés pour les années qui n'ont pas donné lieu à la validation de quatre trimestres et au cours desquelles des périodes d'engagement en tant que sapeur-pompier volontaire ont été effectuées. La mesure permettra donc de corriger les interruptions de carrière et de garantir que l'engagement comme sapeur-pompier volontaire ne pèse pas sur l'acquisition de droits à retraite. Cette avancée correspond à l'esprit des débats ayant conduit à l'adoption de l'article 24 de la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, portant réforme des retraites.
Les amendements adoptés au Sénat prévoyaient que, dans le cadre de ce dispositif, quatre trimestres par année au maximum pouvaient être validés, ce qui, de fait, limitait le champ d'application de la mesure aux carrières incomplètes. Le compte rendu des débats de la commission mixte paritaire – ayant abouti à la rédaction actuelle de l'article 24 de la loi de financement rectificative de la sécurité sociale, qui renvoie à un décret – mentionne un coût de 30 millions d'euros pour la mesure, ce qui correspond au montant que représente la correction des interruptions de carrière engendrées par l'engagement en tant que sapeur-pompier volontaire.
Vous ne m'avez pas donné de date, une information pourtant attendue par nos sapeurs-pompiers. Nous leur devons cette reconnaissance si nous voulons pérenniser et développer l'engagement citoyen altruiste. Ce socle constitue un vivier de secours, un service de proximité en particulier dans nos territoires ruraux – je l'observe chaque jour dans mon département, la Mayenne. Il est urgent que ce décret soit publié et que la mesure entre enfin en application.
La parole est à Mme Manon Meunier, pour exposer sa question, n° 613, relative à la fermeture de classes en Haute-Vienne.
Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse mais puisqu'elle est absente, c'est à vous, monsieur le ministre, que je proposerai un petit exercice, comme à l'école.
Je commence en vous lisant cette phrase extraite de notre Constitution : « La nation garantit l'égal accès de l'enfant […] à l'instruction […]. L'organisation de l'enseignement public gratuit et laïque à tous les degrés est un devoir de l'État. »
Pour continuer l'exercice, dites-moi à présent si les situations réelles – observées dans ma circonscription en Haute-Vienne – que je vais vous décrire correspondent aux exigences contenues dans la première phrase.
Au Val de l'Aurence, quartier parmi les plus pauvres de Nouvelle-Aquitaine, vous fermez deux classes.
À Châteauponsac, vous fermez une classe, avec pour conséquences une moyenne par classe portée à vingt-quatre élèves et des mélanges de niveaux non concertés avec les équipes pédagogiques.
À Bellac, vous fermez encore une classe, ce qui pourrait entraîner une fermeture d'école. Cette commune avait déjà perdu une école il y a deux ans, ce qui avait abouti à une situation catastrophique : les CM2 avaient subi cinq semaines de cours sans enseignant à cause du manque de remplaçants dans le département. Avec cette nouvelle fermeture, une classe de maternelle ne compterait pas moins de vingt-sept enfants. Vous persistez dans les mesures désastreuses.
À Saint-Gence, vous fermez une classe, avec pour résultat une classe de maternelle qui compte vingt-huit enfants. En effet, vous ne tenez pas compte de l'existence des toutes petites sections qui nécessitent pourtant la présence d'enseignants, d'Atsem, les agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles, et d'AESH, les accompagnants d'élèves en situation de handicap.
À Saint-Sulpice-les-Feuilles, vous fermez une classe si bien que, désormais, une classe comptera vingt-sept élèves.
Considérez-vous que de telles situations permettent l'égal accès des enfants à une éducation digne ? Considérez-vous que vous répondez correctement aux principes de la Constitution ? La mission des services publics – a fortiori peut-être l'école – est de contribuer à réduire les inégalités dans notre société et de permettre à chacun d'avoir accès aux savoirs fondamentaux.
La casse de l'école publique à laquelle vous vous livrez réduit ce principe à néant. Pour s'y opposer, un collectif de parents d'élèves de la Haute-Vienne s'est créé. Il vous demande, pour nos enfants, de mettre fin à la politique du chiffre.
Aujourd'hui, vous décidez au niveau national d'un certain nombre de suppressions de poste afin de faire des économies. Les territoires doivent alors se débrouiller avec les effectifs d'enseignants qu'on leur attribue. Ce n'est pas humain. Arrêtez de mener une politique des moyens et appliquez une politique des besoins. Cela suppose, premièrement, que vous vous rendiez sur le terrain pour constater que, non, la fermeture d'une classe du RPI – le regroupement pédagogique intercommunal – Compreignac-Thouron n'est pas justifiée et qu'une fermeture de classe à l'école Aigueperse créerait des inégalités d'accès à une éducation digne pour nos enfants, deuxièmement, qu'en conséquence vous attribuiez un nombre de postes suffisants afin de permettre à tous les enfants d'avoir accès à une éducation de qualité.
Hier encore, les Haut-Viennois – élus, paysans, habitants des ruralités ou encore mamans des quartiers – se sont mobilisés partout dans le département. Tous martelaient ces mots : « Nos enfants ne sont pas des moutons, arrêtez de les compter. »
Avant de vous transmettre les éléments de réponse que m'a fournis la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, je veux vous remercier de la teneur de votre question. Moi-même élu, il y a quelques semaines encore, d'un département rural, je sais à quel point ces questions sont délicates.
D'ailleurs, l'ensemble du Gouvernement sait que, face aux modifications de la carte scolaire, la sensibilité de nos concitoyens est grande, en particulier dans les territoires ruraux, par exemple en Haute-Vienne, votre département – vous l'avez rappelé avec force. C'est pourquoi il veille particulièrement à ce que les élus soient associés, le plus en amont possible, aux évolutions de la carte scolaire. Vous le comprendrez très bien, celle-ci ne saurait être figée. Il faut cependant veiller à maintenir un équilibre qui prenne en considération le ressenti et les besoins exprimés dans un territoire.
L'instance de concertation mise en place dans les territoires ruraux doit justement donner une visibilité à trois ans sur la carte scolaire dans le premier degré. Cette possibilité d'anticiper les évolutions, à un rythme pluriannuel, constitue une nouveauté. Nous suivons de très près le déploiement de cette instance dans chaque département afin que cette promesse soit effective dans les meilleurs délais. C'est au sein de cette instance, au plus près du terrain, que doit être mené le dialogue, selon les besoins, très différents d'un département rural à un autre.
Des réponses adaptées aux territoires ruraux ont en outre été élaborées au cours des dernières années. Je pense notamment à l'allocation progressive des moyens qui tient compte de l'indice d'éloignement ou encore au dispositif des territoires éducatifs ruraux (TER), au bénéfice des écoliers et des collégiens.
La carte scolaire est avant tout un instrument de politique publique que l'éducation nationale mobilise pour s'adapter à la réalité de territoires en constante évolution. Nous devons mener un travail continu, en lien étroit avec les forces vives de ces territoires, pour que chaque élève dispose des meilleures conditions d'enseignement possible.
Or, dans un contexte de baisse démographique dans la Haute-Vienne avec, vous le savez, 2 525 élèves en moins, soit une baisse de 8,5 %, dans les écoles publiques du premier degré entre les rentrées 2017 et 2023, et malgré les évolutions récentes de la carte, nous pouvons noter avec satisfaction que le taux d'encadrement du département va légèrement s'accroître.
Permettez-moi d'être précis – les chiffres sont importants. Le taux d'encadrement dans votre département, mesuré par le ratio donnant le nombre d'équivalents temps plein – les ETP – pour 100 élèves, est passé de 5,24 à la rentrée 2017 à 5,80 à la rentrée 2023 et devrait encore progresser pour atteindre 5,82 à la prochaine rentrée. Le nombre d'élèves par classe – 21,7 à la rentrée 2023 contre 23,4 en 2017 – permet un suivi de qualité par les enseignants, et c'est bien là le plus important.
Nous veillons à ce que tous les élèves, quel que soit leur territoire, bénéficient toujours du meilleur accompagnement possible, en nous adaptant aux situations locales, au plus près du terrain.
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour exposer sa question, n° 619, relative à la fermeture de classes dans le Cantal.
Je souhaite appeler l'attention de Mme la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur l'incompréhension et la colère que suscite le projet de son ministère de supprimer treize postes d'enseignants à la rentrée 2024 dans les écoles du Cantal, ce qui se traduira par la fermeture de seize classes.
Ces nouvelles diminutions de moyens dans un département de montagne sont insupportables parce qu'elles mettent en péril le maillage des écoles rurales et la qualité de la prise en charge des élèves. En outre, elles entraînent une augmentation du temps de transport de ces élèves et viennent anéantir tous les efforts entrepris par les communes et collectivités locales pour renforcer leur attractivité.
Il n'est pas acceptable que des postes soient supprimés dans des écoles marquées seulement par une légère baisse des effectifs et qui connaissent même parfois des perspectives de progression, ni que ces mesures aient pour effet d'empêcher l'accueil des enfants en très petite section, ni, enfin, que des postes d'enseignant soient supprimés dans des communes qui ont investi dans leurs locaux scolaires.
Les services de l'éducation nationale justifient ce projet en faisant valoir que le taux d'encadrement par élève reste confortable si on le rapporte à la moyenne nationale. Cependant ce ratio n'est pas pertinent car il ignore les réalités des territoires ruraux.
Conjuguées aux mesures prises l'an dernier – dix postes déjà supprimés à la rentrée 2023 –, celles prévues cette année viennent annuler les bénéfices des conventions pour un aménagement du territoire scolaire signées en 2014 avec le ministère. Celles-ci avaient permis de limiter le nombre de suppressions de postes d'enseignants au vu des exigences du maillage territorial et des limites du regroupement en réseaux des écoles rurales.
Vous en conviendrez, ces nouvelles mesures constituent un changement radical de politique qui contraste singulièrement avec le discours du Premier ministre selon lequel l'éducation serait la priorité du Gouvernement.
Enfin, ces diminutions de moyens sont d'autant plus mal vécues et difficilement comprises que le budget de l'éducation nationale s'affiche à la hausse.
Pour toutes ces raisons, je demande à Mme la ministre – vous lui transmettrez mon message – de reconsidérer ce projet de carte scolaire s'agissant du Cantal. J'aimerais également savoir quelle suite le Gouvernement envisage de donner à la proposition de résolution, déposée avec mon collègue Fabrice Brun, député de l'Ardèche, et cosignée par de nombreux collègues, l'invitant à mettre en œuvre un moratoire sur les fermetures de classes en zone rurale.
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la santé et de la prévention.
Je vous remercie pour cette question importante qui rejoint celle de votre collègue Meunier, à propos de la politique du ministère de l'éducation nationale en direction des territoires ruraux.
Voici les éléments de réponse que m'a transmis Mme Belloubet. Vous le savez – je l'expliquais à l'oratrice précédente –, la carte scolaire est le résultat d'un travail continu mené afin de s'adapter au mieux aux évolutions des effectifs scolaires, dans une logique d'équité entre les territoires.
Or, dans un contexte de baisse démographique dans le Cantal, avec 890 élèves de moins – près de 9,5 % – dans les écoles publiques du premier degré entre les rentrées 2017 et 2023, et malgré les évolutions récentes de la carte, nous pouvons tout de même nous réjouir du fait que le taux d'encadrement de votre département, qui est déjà l'un des meilleurs du pays, devrait rester stable – il est passé de 7,44 à la rentrée 2017 à 7,88 à la rentrée 2023. Ces chiffres, qui vous paraissent sans doute abstraits, témoignent d'une consolidation, voire d'un léger renforcement du taux d'encadrement, lequel se situe à un niveau plus favorable, de manière significative, que la moyenne nationale, qui s'élève à 6.
D'autre part, le nombre d'élèves par classe – 16,95 à la rentrée 2023 contre 17,46 en 2017 – est le plus bas de France après celui de la Lozère, se situant très au-dessous de la moyenne nationale, qui est de 21,47.
Toutefois, nous ne saurions nous satisfaire de cette situation, et c'est pourquoi des réponses adaptées aux territoires ruraux ont été élaborées au cours des dernières années – je les ai déjà évoquées mais je tiens à les citer de nouveau. Je pense notamment à l'allocation progressive des moyens, qui tient compte de l'indice d'éloignement, ou encore au dispositif des territoires éducatifs ruraux, au bénéfice des écoliers et des collégiens. Je me félicite d'ailleurs que le TER de votre département fonctionne extrêmement bien et qu'un nouveau TER soit même en projet, signe de la vitalité de votre département ainsi que de la mobilisation des acteurs.
Enfin, le ministère va labelliser, au bénéfice de la ruralité, 3 000 places supplémentaires en internat d'excellence. Ces places offriront une solution de proximité aux élèves et à leurs familles éloignés des centres urbains. Cinq établissements du Cantal se sont portés candidats dans le cadre de l'appel d'offres. Le Gouvernement a pleinement conscience que les modifications de la carte scolaire sont un sujet sensible, en particulier dans les territoires ruraux, et met tout en œuvre pour garantir à chaque élève les meilleures conditions d'enseignement possible, quel que soit le territoire où il réside.
Monsieur le ministre, je suis au regret de vous dire qu'une telle réponse n'est pas de nature à rassurer ni à satisfaire les parents d'élèves et les élus de mon département.
Je ne peux que déplorer qu'il y ait un fossé entre les directives du ministère appliquées sur le terrain et le discours du Premier ministre.
Je constate que, dans les territoires urbains, on dédouble les classes pour faciliter les apprentissages essentiels, ce qui est une excellente chose, alors même que dans les territoires ruraux, l'on réinvente les classes à deux niveaux,…
…ce qui n'est pas synonyme de confort pour les élèves ni pour les enseignants. Voilà qui s'apparente, à s'y méprendre, à une école à deux vitesses !
La parole est à M. Vincent Descoeur, suppléant Mme Isabelle Valentin, pour exposer sa question, n° 620, relative à la carte scolaire de la rentrée 2024.
Je vous prie d'excuser l'absence de ma collègue et je vais vous donner lecture de la question qu'elle adresse à Mme la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
« L'accès à l'éducation dans l'enseignement du premier degré est menacé en Haute-Loire. C'est en tout cas le constat que font de nombreux syndicats de mon département, qui tentent d'alerter l'inspection académique à ce sujet. Saint-Étienne-Lardeyrol, Le Puy-en-Velay, Les Estables, Saint-Jeures et bien d'autres encore vont subir, à la rentrée 2024, une perte d'enseignants, voire la fermeture d'une classe, du fait d'une carte scolaire tout à fait inadaptée.
« Les syndicats l'ont clairement montré. Alors qu'il y a une carence de 210 élèves en Haute-Loire selon les chiffres du ministère, les analyses de terrain effectuées par les directeurs d'école révèlent l'exact inverse. En somme, la carte scolaire pour la rentrée 2024 conduira à la fermeture de onze classes pour une seule ouverture. Ce n'est pas possible !
« Face à des estimations complètement improbables, les partenaires sociaux se mobilisent et affirment clairement leur opposition à cette carte scolaire ; les parents d'élèves et leurs familles manifestent pour soutenir le maintien d'un modèle scolaire qui fonctionnait bien jusqu'ici puisque, de l'aveu même des directeurs de collège, les élèves arrivent dans le second degré avec un bon niveau, une bonne autonomie et un comportement tout à fait sérieux. Fermer autant de classes aurait pour seule conséquence de fragiliser cet édifice éducatif pourtant efficace et de remettre en cause toute l'organisation nécessaire pour le transport des élèves, puisqu'il s'agit de zones rurales qui n'ont pas d'école dans chaque commune.
« Même lorsqu'il s'agit de la suppression d'un demi-poste, les conséquences peuvent être dramatiques !
« Les élèves entrant en sixième sont de plus en plus nombreux à ne pas maîtriser le français et les mathématiques, et la carence en enseignants leur sera préjudiciable. Vouloir alléger les classes du second degré est une bonne chose, mais c'est totalement inefficace si les cours élémentaires sont surchargés. Un mauvais bilan en CP est en effet synonyme d'une scolarité affaiblie. Il est donc fondamental de fournir les efforts nécessaires pour assurer un enseignement de qualité.
« Quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il afin de préserver l'équité de traitement dans l'éducation nationale et de donner une chance à tous ? »
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la santé et de la prévention.
Monsieur le député, je vous transmets les éléments que m'a communiqués Mme la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
La carte scolaire est le résultat d'un travail continu pour s'adapter au mieux aux évolutions des effectifs scolaires département par département, c'est-à-dire avec les acteurs de terrain. Son élaboration se fait en concertation avec les élus et avec les forces vives de chaque territoire, notamment la communauté éducative. Le ministère travaille à améliorer cette concertation, dont la qualité a pu varier selon les départements et selon les périodes, il faut bien le reconnaître. Il est en effet essentiel que chaque territoire puisse exprimer ses priorités et ses enjeux propres ainsi que disposer de visibilité dans le temps. Je pense que vous serez sensible, ainsi que Mme Valentin, au fait que nous ayons la volonté d'une approche beaucoup plus ancrée, calée sur les besoins du terrain, plutôt qu'uniquement nationale, depuis Paris. L'objectif commun demeure bien sûr toujours d'assurer à tous les élèves un enseignement et un environnement scolaires de qualité.
Concernant le département de Mme Valentin, la Haute-Loire, le taux d'encadrement, mesuré par le ratio P/E, c'est-à-dire le nombre de postes, en équivalents temps plein, pour 100 élèves, ratio qui permet de comparer la situation d'un département à l'autre – je l'ai cité dans mes réponses aux orateurs précédents –,…
…est passé de 5,93 à la rentrée 2017 à 6,39 à la rentrée 2023, bien au-dessus de la moyenne nationale, qui est de 6 ; il restera stable à la prochaine rentrée, et cela malgré une baisse démographique importante : 1 363 élèves en moins, soit une diminution de 9,5 %, dans les écoles publiques du premier degré entre 2017 et 2023.
Quant au nombre d'élèves par classe, il était de 20,9 à la rentrée 2023, un chiffre significativement plus favorable que la moyenne nationale, qui est de 21,5. Ce nombre a nettement diminué depuis la rentrée 2017 : il était alors de 21,6. Voilà des réalités et des évolutions qu'il faut évidemment prendre en compte.
Ce sont des moyennes tout ça – et les moyennes, cela ne veut rien dire !
Le ministère veille à ce que tous les élèves, quel que soit leur territoire, bénéficient toujours du meilleur accompagnement possible, en s'adaptant au plus près des réalités. Le Gouvernement est pleinement mobilisé au service de cette ambition et Mme la ministre espère que Mme Valentin en a conscience.
Je transmettrai bien évidemment ces éléments de réponse à Mme Valentin, mais je ne suis pas sûr qu'elle soit plus rassurée que je ne l'ai été il y a quelques instants. Je voudrais redire ici que le taux d'encadrement n'est pas un ratio pertinent dans des départements peu peuplés, avec des temps de transport des élèves qui dépassent l'entendement : parfois plus d'une heure trente au quotidien !
Il importe de changer de méthode. On ne peut plus se satisfaire d'une approche purement comptable qui masque des réalités terribles. Un moratoire sur les fermetures de classes, moratoire que plusieurs collègues et moi proposons, permettrait de trouver le temps nécessaire pour construire de nouveaux indicateurs qui répondent réellement aux besoins de ces enfants qui méritent autant que les autres un encadrement de qualité.
La parole est à Mme Cécile Untermaier, pour exposer sa question, n° 635, relative à la fermeture de classes.
Au préalable, je tiens à dire qu'un ratio ne peut définir une politique. Celle-ci relève d'abord du ressenti, qui est très négatif actuellement dans nos territoires parce que les fermetures de classes sont massives. On en avait connu autrefois et l'on en connaît à nouveau énormément, à un point tel que les maires sont démobilisés s'agissant des questions de l'école. Je pense qu'après le grand débat, qui incitait tous les maires à discuter sur ce type de sujets, faire un sort pareil à ceux d'entre eux qui se sont engagés pour construire des écoles en ne leur permettant pas de dire un mot à propos d'une fermeture de classe me paraît pour le moins compliqué. Je rejoins ce qui a été dit précédemment : nous sommes dans un système qui a atteint ses limites.
Nous devons absolument trouver d'autres solutions en profitant de la démographie descendante pour investir dans la jeunesse afin que celle-ci dispose de classes moins peuplées, contrairement à ce qui se fait aujourd'hui. Ce sera vertueux pour les enfants ainsi que pour les enseignants, que le ministère peine d'ailleurs à recruter en raison de la façon dont ceux-ci doivent travailler, changeant d'école régulièrement tout en devant bien sûr accueillir des enfants en difficulté.
La situation n'est plus du tout celle qu'ils ont connue par le passé.
Dans ma circonscription, des écoles ferment et les maires sont consternés – c'est le cas à Brienne, à Nanton, à Sainte-Croix, à Savigny-en-Revermont, à Sornay, à Beaurepaire-en-Bresse, à Saint-Germain-du-Bois, à Louhans-Châteaurenaud, à La Frette et dans d'autres communes encore. Ces maires ont tout fait pour offrir un lieu d'accueil formidable, mobilisant des crédits, convainquant leurs contribuables et leur conseil municipal, consacrant du temps à construire des dossiers de demande de subventions. Ils ont obtenu des financements au titre de la DETR, la dotation d'équipement des territoires ruraux, ainsi que des crédits de la région pour leur cantine, tout cela pour se heurter finalement à une politique comptable qui leur est imposée en mars et qu'ils devront justifier en juin.
L'enquête Pisa – le programme international pour le suivi des acquis des élèves –, dresse un bilan extrêmement négatif pour la France puisqu'on compte dans les classes de notre pays en moyenne huit élèves de plus que dans les classes des autres pays de l'OCDE. Il faudrait en tirer les leçons pour remettre en cause la manière comptable de voir les choses.
Nous sommes plusieurs à considérer que le seuil doit être abaissé à dix-sept élèves par classe, sans que cela justifie de continuer à demander au directeur académique de perdre son temps à pratiquer une gymnastique comptable qui ne convainc personne…
…et qui ne correspond pas à l'enjeu que représente pour nous l'éducation nationale.
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la santé et de la prévention.
Je vous remercie pour votre question, qui rejoint les deux précédentes. Je vais vous transmettre les éléments de réponse que m'a communiqués Mme la ministre de l'éducation nationale mais, au préalable, je récuse le terme d'approche « comptable ». La volonté de déconcentrer la décision en ouvrant une concertation avec les élus locaux et avec les communautés éducatives permet de tenir compte de la réalité de chacun des territoires et de tourner la page de politiques de l'éducation qui, pendant de très longues années, ont été pensées, conçues et arrêtées depuis Paris, sans guère de discussions dans les territoires. On pouvait sans doute alors parler d'approche comptable parce que c'était en effet l'application sèche de ratios qui l'emportait sur le reste.
Toutefois, on ne peut pas méconnaître les réalités démographiques et il convient de trouver un nouvel équilibre, dans le dialogue, en élaborant des réponses au cas par cas. Au-delà de la déconcentration de l'approche, il s'agit de trouver autant de politiques à mener qu'il y a de territoires et de départements. En appliquant par ailleurs l'idée d'une visibilité sur trois ans, on sort de politiques qui étaient annuelles, le rythme triennal permettant à la fois de stabiliser et d'anticiper certaines évolutions.
J'en viens aux éléments de réponse de Mme la ministre. Le travail continu sur la carte scolaire s'effectue dans votre département, madame la députée, dans le contexte démographique suivant : 3 700 élèves de moins dans les écoles publiques du premier et du second degré depuis 2017. Pourtant, malgré les évolutions récentes de la carte, le taux d'encadrement dans votre département augmente lui aussi. Désolé de citer des chiffres, mais ils traduisent bien une réalité : ce taux est passé de 5,79 en 2017 à 6,26 à la rentrée 2023. Ce n'est pas de la part du ministère montrer une obsession du chiffre roi que d'utiliser des instruments de mesure pour effectuer des comparaisons ; c'est ainsi ce qu'il a fait avec le Cantal et la Haute-Loire – chacun pouvant faire de même avec d'autres départements. Il faut rappeler que le taux d'encadrement en Saône-et-Loire est à comparer avec la moyenne nationale, qui est de 6. Il devrait augmenter encore à la prochaine rentrée, pour s'élever à 6,28.
En outre, le nombre d'élèves par classe est de 20,8 à la rentrée 2023, chiffre plus favorable que la moyenne nationale – 21,5 – et qui a nettement diminué par rapport à la rentrée 2017, où il était de 21,7. Précisons que le taux d'encadrement s'est également amélioré dans les zones rurales éloignées, qui comptaient vingt élèves par classe à la rentrée 2023 ; de même dans les regroupements pédagogiques intercommunaux.
Mme la ministre ajoute que la directrice académique des services de l'éducation nationale de Saône-et-Loire, qui porte une attention toute particulière à la ruralité, a invité l'ensemble des maires des communes hébergeant une école pour leur présenter les perspectives triennales de la démographie scolaire départementale – un point important. Elle l'en remercie : les maires de votre département ont certainement apprécié cette réunion.
Enfin, elle rappelle que, comme chaque année, si le processus de préparation de la rentrée commence en janvier, il se poursuit jusqu'à la rentrée de septembre dans un dialogue continu avec les élus, dans le cadre d'un suivi très attentif des évolutions éventuelles des effectifs, et que rien n'est donc figé aujourd'hui.
La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour exposer sa question, n° 607, relative à la réforme du collège.
Sourires
ma question porte sur la réforme du collège, dite du choc des savoirs, et sur ses conséquences organisationnelles pour les établissements. Elle a été annoncée comme étant opérationnelle dès la rentrée 2024, mais sans qu'aucun élément concret n'en soit encore parvenu aux établissements.
Cette mesure est éminemment critiquable sur le fond puisque les études des sciences de l'éducation démontrent qu'il faut privilégier les classes hétérogènes et que les groupes de niveau ne peuvent être utiles que s'ils sont provisoires et limités dans le temps. Sur le fond, nous sommes donc en désaccord avec la démarche.
De plus, la réforme pose une énorme difficulté, qui met en émoi la direction et le personnel des collèges : les dotations horaires globales (DHG) qui leur ont été attribuées sont au mieux stables, au pire en diminution. Cela aura des conséquences négatives pour les élèves car la création des groupes de niveau se fera au détriment des options et des dédoublements de classes scientifiques – on ne pourra plus faire de demi-groupes pour les travaux pratiques en SVT (sciences de la vie et de la terre) ou en physique. L'intégralité de l'enseignement sera dégradée en raison d'une réforme éminemment contestable sur le fond.
Je veux relayer une autre inquiétude majeure des enseignants, qui commencent d'ailleurs à s'organiser avec les parents d'élèves pour s'opposer à la réforme : non seulement les DHG sont en baisse, mais en plus un récent décret annonce une diminution de 123 millions d'euros du budget dévolu au second degré.
Il est encore temps de renoncer à cette réforme. À ce stade, elle ne représente qu'un coup de communication dans la mesure où elle n'a fait l'objet d'aucun texte sur lequel les enseignants et les directions d'établissement pourraient s'appuyer pour la conduire, alors qu'ils sont censés l'appliquer dès la rentrée prochaine. Les conditions de sa mise en œuvre n'étant pas réunies, l'abandonner me paraît l'unique solution.
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la santé et de la prévention.
Madame Taillé-Pollian, il ne vous aura pas échappé que ce n'est pas le ministre de l'éducation nationale qui vous répond…
Sourires.
Néanmoins, la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse m'a transmis des éléments qui me permettront de répondre, modestement, à votre question pertinente.
Le constat est là, l'enquête Pisa 2022 l'a montré : en français, le niveau des élèves âgés de 15 ans continue de baisser ; en mathématiques, ce sont vingt et un points qui ont été perdus par nos élèves depuis dix ans. Ces résultats sont alarmants. Ils ne peuvent être ignorés tant leurs conséquences sont néfastes pour le parcours des élèves comme pour notre capacité collective à relever les défis auxquels la société française est confrontée.
Les mesures du choc des savoirs annoncées par le Premier ministre en décembre dernier répondent à l'impératif national d'élévation du niveau des élèves. Cela passe en premier lieu par le fait de donner les moyens de réussir à tous nos enfants.
L'organisation du travail en groupe, en sixième et cinquième, en français et en mathématiques, dès la rentrée scolaire prochaine, n'est en aucun cas la fin du collège unique. Il s'agit de donner à nos élèves la possibilité d'acquérir plus facilement les compétences qui leur manquent dans ces deux matières fondamentales. Ces temps en groupe faciliteront un accompagnement adapté et des progrès dans les apprentissages. Le travail en classe entière, un collectif par nature hétérogène, reste la règle pour l'ensemble des matières aujourd'hui suivies par les élèves, auxquels il fournit la garantie d'un parcours cohérent.
Tout cela va se mettre en place en fonction de la réalité du terrain, en liaison avec les chefs d'établissement, qui sont les garants de la bonne organisation du système scolaire. La ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse a eu l'occasion d'échanger avec les représentants des organisations syndicales ces derniers jours, et a salué leur mobilisation et leur engagement.
Le Gouvernement va donner les moyens nécessaires à la création de ces groupes. Les premières ouvertures de postes supplémentaires ont d'ores et déjà été permises ; des ajustements sont en cours. Le travail au plus près du terrain est la garantie d'un meilleur apprentissage et d'une plus grande flexibilité. Permettez-nous, madame la députée, de nourrir pour nos élèves l'ambition de mieux apprendre, dans de meilleures conditions et avec de meilleurs résultats.
On ne peut pas gouverner à coups de formules. Tout le monde est d'accord que les élèves doivent mieux apprendre, mais tout le monde est également d'accord que l'éducation pour tous, c'est-à-dire l'accès à l'instruction, est en danger dans notre pays, notamment parce que le service public d'éducation a subi des baisses d'effectifs et une augmentation du nombre d'élèves par classe – du fait, notamment, de votre politique.
Oui, les résultats de l'enquête Pisa sont inquiétants, mais les sciences de l'éducation sont là pour éclairer les politiques sur les mesures à prendre pour que tous les élèves reprennent le chemin de la réussite. Les groupes de niveau sont à proscrire : ils ont été expérimentés à de multiples reprises sans donner de bons résultats. Quand on catalogue les élèves, qu'on leur met une étiquette, l'un des groupes, même si on lui trouve un joli nom – par exemple celui des « plus fragiles » –, réunira malgré tout les moins bons. En les cataloguant ainsi, on les fige dans des résultats médiocres et on n'accompagne pas leur progression. Au contraire, les groupes hétérogènes, comme les sciences de l'éducation l'ont maintes fois démontré sur la base d'expérimentations, sont meilleurs pour tous les élèves.
En outre, l'application de la réforme conduira à l'arrêt des demi-groupes en SVT et en physique. C'est donc l'ensemble des élèves qui pâtira de conditions d'enseignement dégradées.
La parole est à M. Jean-Louis Bricout, pour exposer sa question, n° 617, relative aux moyens alloués aux collèges.
Ma question ressemble étrangement à celle qui vient d'être posée. Alors que Nicole Belloubet vient de prendre la charge du ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse, les équipes éducatives s'inquiètent des moyens qui sont alloués aux établissements scolaires dans le cadre de la dotation horaire globale pour 2024. Les professeurs des collèges d'Hirson, de La Capelle, du Nouvion-en-Thiérache et de Sains-Richaumont, situés dans ma circonscription, m'ont alerté sur la baisse tendancielle en heures postes comme en heures supplémentaires, baisse d'autant plus problématique que le département de l'Aisne souffre d'un taux d'illettrisme préoccupant.
Je souhaite relayer cette inquiétude avec force. Je suis venu vous parler du combat contre l'échec scolaire et de la défense de l'école publique. Je suis venu vous dire qu'il nous faut relever ensemble les défis pédagogiques qui sont devant nous. Je suis venu vous rappeler qu'il n'y a pas d'égalité des chances sans équité ni sans adaptation aux réalités locales. Trop longtemps, la carte scolaire a nié la crise des moyens et l'affaiblissement des apprentissages dû aux suppressions de postes successives.
La ministre a évoqué récemment, dans la presse, sa volonté d'organiser un travail « en groupes d'élèves, selon leur niveau de compétence, selon leur capacité à agir », et a demandé aux chefs d'établissements de travailler sur la mise en place de ces groupes. Imaginez l'émotion que ces propos ont provoquée dans des territoires comme le nôtre ou comme la Seine-Saint-Denis – dont on parle beaucoup en ce moment –, qui ne peuvent répondre, en l'état actuel, aux besoins éducatifs !
Je n'entrerai pas dans le débat sur les groupes de niveau, mais je veux connaître les moyens supplémentaires qui seront mobilisés pour réussir la rentrée de septembre 2024. Et ne reprenez pas l'argumentaire immuable des équipes du ministère sur la baisse démographique, car la situation ne s'est pas du tout améliorée ! Le pacte pour la réussite de la Sambre-Avesnois-Thiérache doit faire de l'éducation une priorité et c'est dans des territoires fragiles comme le nôtre que les moyens doivent être déployés.
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la santé et de la prévention.
Monsieur Bricout, je me permets de vous exposer les arguments que Nicole Belloubet – qui, malheureusement, ne peut être là ce matin – m'a transmis à votre intention, en espérant que vous ne les considérerez pas comme fallacieux.
Rappelons d'abord une évidence : le budget pour 2024 de l'éducation nationale et de la jeunesse reste le premier budget de la nation. C'est sur la politique de l'éducation que celle-ci porte d'abord son effort.
La répartition nationale des moyens du second degré public tient compte de plusieurs indicateurs reflétant des informations qualitatives telles que les caractéristiques du réseau scolaire académique ou le maintien du service public dans les zones rurales, et prend notamment appui sur l'indice d'éloignement des collèges, de façon à coller aux réalités de chaque territoire. Les dotations horaires globales déléguées aux établissements doivent permettre le maintien des taux d'encadrement à la rentrée 2024 tout en accompagnant la mise en œuvre des mesures du choc des savoirs, la poursuite de l'effort en faveur de l'école inclusive et les évolutions de la voie professionnelle. Ainsi, malgré la nouvelle baisse de 7 800 élèves au niveau national que devrait connaître le second degré public à la rentrée 2024, des postes doivent être créés pour continuer à améliorer l'encadrement des élèves de collège.
L'académie d'Amiens, à laquelle est rattaché le département de l'Aisne, verra le maintien de ses moyens d'enseignement malgré une prévision de 801 élèves en moins. Dans l'Aisne, 18,4 % des collégiens relèvent de zones rurales, soit plus du double de la moyenne nationale. Le nombre moyen d'élèves par classe dans les collèges ruraux de l'Aisne, 24 en 2023, demeure toutefois plus favorable que celui des collèges français en général – 25,4. La situation des collèges Colbert-Quentin du Nouvion-en-Thiérache, Georges-Cobast d'Hirson, Quentin-de-la-Tour de Sains-Richaumont ou Pierre-Sellier de La Capelle est bien prise en compte, avec des taux d'encadrement plus favorables que la moyenne départementale et significativement plus favorables que la moyenne nationale. Je tiens les chiffres à votre disposition. Vous connaissez l'adage : « Quand on se regarde, on s'inquiète ; quand on se compare, on se rassure » ! Les élèves scolarisés dans ces établissements bénéficieront de meilleures conditions d'enseignement, et c'est là le plus important.
Enfin, comme à la rentrée 2023, chaque établissement disposera également d'une dotation dans le cadre du pacte enseignant, qui permet d'organiser des actions d'accompagnement et de soutien au bénéfice des élèves.
Je ne veux pas nier les efforts entrepris, ni la considération particulière accordée à mon département voire à ma circonscription, mais la démographie ne peut être constamment convoquée pour justifier l'absence de moyens. Faire autant, c'est toujours faire insuffisamment. Notre territoire connaît des difficultés économiques et sociales particulières, qui ont pour conséquence, je l'ai dit, un taux d'illettrisme important. La création de groupes de niveau fait mauvais ménage avec la baisse des DHG, même liée à la démographie. Les moyens restent insuffisants et, en l'absence de décret d'application de la réforme, les enseignants craignent la désorganisation des plannings. Les professeurs intervenant parfois dans plusieurs collèges, la difficulté risque d'être grande et il faudrait étudier cette question de plus près.
La parole est à Mme Patricia Lemoine, pour exposer sa question, n° 625, relative à la formation des aidants numérique en Seine-et-Marne.
Ma question porte sur les aidants numérique, qui accompagnent nos concitoyens en difficulté avec la maîtrise des outils informatiques. En 2021, dans le cadre du plan de relance, le Gouvernement a débloqué 10 millions d'euros pour assurer la formation de ces professionnels et ainsi encourager la lutte contre l'illectronisme. Le dispositif a été particulièrement bien accueilli dans les départements ruraux, où la fracture numérique est la plus prononcée, comme c'est le cas en Seine-et-Marne, où nombre de communes ne disposent toujours pas d'un accès à des services publics de proximité.
Une étude de l'Insee publiée en mai 2023 a cependant mis au jour de grandes disparités. Ainsi, dans ma circonscription, seuls 29,5 % des habitants de l'agglomération Coulommiers Pays de Brie, qui en compte 95 000, possèdent actuellement une forte maîtrise des outils numériques, contre plus de 60 % des Parisiens.
Pour répondre à la demande importante d'accompagnement, le plan de relance prévoyait de former 20 000 aidants à l'horizon 2026, dont 409 en Seine-et-Marne. Or, d'après le site data.gouv.fr, seuls 237 aidants avaient été formés dans le département au 31 décembre 2022. En octobre 2023, on en comptait 238, soit seulement un de plus par rapport à l'an passé.
Il serait regrettable de voir s'essouffler le déploiement d'un tel dispositif. Son intérêt pour la population victime d'illectronisme est manifeste car il permet aux usagers de devenir autonomes dans la réalisation de leurs démarches administratives dématérialisées. Par conséquent, madame la secrétaire d'État chargée du numérique, pourriez-vous m'indiquer si votre secrétariat d'État entend poursuivre les actions de formation des aidants numérique sur le territoire national, et plus particulièrement en Seine-et-Marne, afin d'atteindre les objectifs fixés par le Gouvernement en 2021 ?
Merci, madame la députée, pour votre question. L'illectronisme est un sujet crucial, voire un enjeu démocratique, car l'accès au numérique est un vecteur important d'insertion et d'inclusion dans la société.
Comme vous l'avez dit, la généralisation de la formation des aidants professionnels à l'accompagnement numérique des usagers constitue une priorité pour le Gouvernement et la lutte contre l'illectronisme occupe une place de choix dans ma feuille de route. Depuis 2021, le volet inclusion numérique du plan France relance a permis de former 18 522 aidants. L'objectif pour 2027 est de porter ce chiffre à plus de 20 000, avec un déploiement sur tout le territoire national. Cet effort de formation doit se poursuivre et s'intensifier, d'autant – et c'est peut-être la cause de la stagnation que vous notez dans votre département – que les métiers de l'aide et de l'accueil professionnel sont caractérisés par des taux de renouvellement et de mobilité élevés.
Outre la formation et le déploiement de 4 000 conseillers numérique, qui accompagnent les Français dans le développement de leur autonomie et de leurs usages numériques, la feuille de route France numérique ensemble prévoit une hausse du nombre d'aidants, en s'appuyant notamment sur plusieurs partenariats et dispositifs financés par l'État.
Ainsi, un partenariat entre l'Opco – opérateur de compétences – Uniformation et l'Agence nationale de la cohésion des territoires doit permettre de financer la formation de professionnels du secteur associatif. La formation des aidants passera également par la poursuite du déploiement d'Aidants Connect, un service public permettant aux personnes en difficulté avec le numérique d'être accompagnées de manière sécurisée par un aidant professionnel dans la réalisation de leurs démarches administratives. L'accès à cet outil suppose une formation et une habilitation spécifique dont 13 000 professionnels ont bénéficié depuis 2021. Les collectivités territoriales et les structures associatives de proximité sont invitées à nous transmettre d'ici à l'été leurs besoins de formation, notamment pour les travailleurs sociaux, les secrétaires de mairie ou les agents d'accueil, à commencer par ceux des maisons France Services. Avec les chiffres que vous avez cités, je ne doute pas que votre département nous fera connaître ses besoins.
En ce qui me concerne, je suis une élue locale, comme vous, et j'aurai donc à cœur que tous les territoires soient bien accompagnés puisque le numérique doit être partout et pour tous.
Madame la ministre, je sais votre attachement aux territoires ruraux et votre engagement en leur faveur. Il importe que les objectifs fixés soient atteints. La Seine-et-Marne accueille chaque année de 10 000 à 12 000 habitants supplémentaires, qui ne sont pas tous des jeunes. Disposer d'environ 400 aidants numérique est essentiel pour accompagner au mieux nos populations. Je sais pouvoir compter sur votre engagement et je vous en remercie.
La parole est à M. Mathieu Lefèvre, pour exposer sa question, n° 627, relative au départ de la société Air Liquide.
Les 600 salariés d'Air Liquide à Champigny-sur-Marne sont inquiets en raison du risque de déménagement du site à Charenton-le-Pont. Avec eux et leurs familles, c'est tout le tissu local, élus inclus, qui s'inquiète, car Air Liquide est présent à Champigny depuis cent ans. L'entreprise veut procéder à ce déménagement pour des raisons louables : se conformer au décret « tertiaire » et aux exigences environnementales, améliorer le bien-être des salariés grâce à des locaux plus modernes et développer son activité.
Toutefois, cette décision, qui n'a peut-être pas fait l'objet d'assez de concertation, me paraît un peu prématurée. Le maire de la commune, Laurent Jeanne, n'épargne pas ses efforts pour qu'une réunion rassemblant les parties prenantes ait lieu et qu'une solution soit trouvée. Le Gouvernement n'est évidemment pour rien dans cette décision, mais il pourrait prendre certaines initiatives, peut-être en apportant des financements, en vue d'assurer la conformité du site au décret « tertiaire » et permettre ainsi aux salariés d'Air Liquide de rester à Champigny-sur-Marne.
Tout d'abord, monsieur le député, je vous prie d'excuser l'absence du ministre délégué chargé de l'industrie et de l'énergie, Roland Lescure, qui, empêché, m'a demandé de répondre à votre question.
Le projet de déménagement concerne l'activité Ingénierie & Construction France d'Air Liquide, groupe de taille mondiale. Il consisterait en un déplacement de ses bureaux vers un site situé dans le même département, à Charenton-le-Pont. L'entreprise a indiqué aux services de l'État que ce transfert ne se traduirait par aucune suppression de poste, ce qui est heureux. Le projet a fait l'objet d'une consultation des instances représentatives du personnel, qui s'est achevée le 27 février. Selon le groupe, il serait lié à de nouveaux modes de travail, à la recherche d'une meilleure accessibilité des locaux par les transports et à la nécessité de se conformer aux nouvelles exigences environnementales et au décret « tertiaire ».
Vous l'avez dit : les décisions concernant l'implantation d'une entreprise privée relèvent non pas de la responsabilité du Gouvernement mais des relations entre ladite entreprise et son bailleur. Toutefois, dans un souci de concertation, l'État a demandé à Air Liquide d'associer les élus locaux et les parlementaires au déroulement du projet et, si possible, de préserver un lien avec la commune de Champigny-sur-Marne.
Nous demeurons bien évidemment à votre disposition pour vous accompagner dans vos démarches à chaque étape du processus.
Merci beaucoup, madame la ministre, pour cette réponse exhaustive qui nous laisse de l'espoir. L'association des élus locaux et nationaux au projet est importante. Pour ma part, je crois l'entreprise de bonne foi quand elle indique vouloir procéder à ce déménagement pour le bien-être des salariés, entre autres raisons. Toutefois, on ne peut pas faire leur bien-être contre leur volonté. Sans vouloir me faire leur porte-parole, je pense que les 600 personnes qui travaillent sur le site de Champigny-sur-Marne y sont très heureuses et ont envie d'y rester.
La parole est à M. Philippe Schreck, pour exposer sa question, n° 633, relative à l'avenir de l'hydroélectricité.
Au sortir de l'hiver, le coût de l'énergie grève toujours plus le budget des Français. Une nouvelle fois, pouvoir d'achat et souveraineté énergétique sont étroitement liés.
Je ne reviendrai pas sur la filière nucléaire française, durablement mise à mal par des compromissions politiciennes. En revanche, je parlerai d'hydroélectricité, un sujet d'avenir à part entière. Issue de l'exploitation des barrages, elle constitue une énergie renouvelable indispensable, notamment lors des pics de consommation. Cependant, l'état des barrages français, dont l'âge moyen est supérieur à 70 ans, nécessite d'importants travaux de maintenance et de modernisation. Les investissements projetés permettraient d'augmenter leur rendement de 15 % à 20 % d'ici à 2035.
Pourtant, ces investissements sont suspendus ou, à tout le moins, différés, car, depuis plus de dix ans, la Commission européenne exige la mise en concurrence des barrages, actuellement exploités en concession. Pour la filière hydroélectrique française, une telle mise en concurrence serait synonyme de démantèlement et de cession à la découpe à des structures pouvant être étrangères. Cette exigence bruxelloise empêche EDF, opérateur historique, d'avoir une quelconque visibilité lui permettant d'envisager la réalisation de projets à court ou à moyen terme.
Il n'est pas inutile de rappeler que les barrages, en plus de produire de l'électricité, permettent de soutenir le débit des rivières, de développer le tourisme et l'agriculture ainsi que de prévenir et gérer les conflits d'usage de l'eau, de plus en plus nombreux en cette période de raréfaction de la ressource.
Le sujet doit donc être traité sans délai, à moins que la mise en concurrence et la vente de nos barrages soient déjà actées. La souveraineté énergétique de notre nation et l'approvisionnement électrique des Français à un prix contenu dépendent en grande partie de la gestion de ce dossier.
Ma question est donc la suivante : quelles actions concrètes le Gouvernement entend-il engager à court terme, voire immédiatement, afin d'éviter la mise en concurrence de nos barrages et le démantèlement de la filière hydroélectrique, indispensable à notre souveraineté et à l'aménagement du territoire ?
Le Gouvernement porte une grande attention à l'énergie hydroélectrique et à son développement. Cette énergie, renouvelable et pilotable, est essentielle pour atteindre nos objectifs climatiques, pour sécuriser l'approvisionnement des Français et pour bien gérer la ressource en eau.
Il n'y a aucune procrastination de notre part, bien au contraire. Le Gouvernement est profondément engagé pour résoudre les précontentieux européens sur les concessions hydroélectriques et libérer les investissements dans le secteur, notamment dans les stations de transfert d'énergie par pompage, un sujet déjà évoqué dans l'hémicycle. Il n'y a donc aujourd'hui aucune option de vente de nos barrages. Rien n'est acté, je puis vous l'assurer.
Tenir une telle résolution nécessite la prise en compte et le traitement d'enjeux multiples, tels que la maîtrise technique et la sécurité des ouvrages, la gestion partagée de la ressource en eau à l'échelle des vallées ou encore le cadre juridique relatif au droit de la concurrence et à la liberté d'établissement. Les échanges avec la Commission européenne se poursuivent.
Sachez, monsieur le député, qu'étant originaire de Savoie, le premier département hydroélectrique de France, je demeure – avec mon collègue Roland Lescure, excusé aujourd'hui – très attentive à ce sujet.
Cette question est sur le devant de la scène depuis plus de dix ans. Avoir un dossier sur son bureau est une bonne chose, le traiter en est une meilleure.
Vous l'avez dit : rien n'est acté. C'est bien le problème : on ne sait toujours pas si la seule mesure permettant de contourner l'obstacle que constitue la gestion par concession, à savoir une mesure d'autorisation, serait considérée positivement par Bruxelles. Je le répète : l'âge moyen de nos barrages est de 70 ans et l'opérateur historique ne dispose pas de la visibilité requise pour lancer les investissements nécessaires pour les décennies à venir, qu'il s'agisse de maintenance ou de développement des technologies que vous avez évoquées.
Vous affirmez qu'il n'y a pas de procrastination. Je pense le contraire, parce que le dossier est toujours sur le bureau mais n'avance pas. Il est toujours à la même place dans la même pile. En matière énergétique, les dernières années ont prouvé que la procrastination était une pratique dévastatrice et redoutable pour la continuité de l'approvisionnement et pour le pouvoir d'achat de nos concitoyens.
Monsieur le député, en matière d'énergie, il faut se garder du « y'a qu'à, faut qu'on ». Le dossier est très complexe – vous le savez, puisque vous le maîtrisez parfaitement. Vous savez aussi que l'État français est très engagé sur cette question.
En outre, je tiens à souligner que la défense des intérêts français auprès de la Commission européenne a connu des avancées significatives, comme la reconnaissance du rôle du nucléaire pour atteindre nos objectifs climatiques.
La parole est à Mme Edwige Diaz, pour exposer sa question, n° 634, relative à la centrale nucléaire du Blayais.
La centrale nucléaire du Blayais, située dans ma circonscription, est candidate pour accueillir une paire de réacteurs du type EPR 2 – réacteur pressurisé européen de deuxième génération. La souveraineté énergétique de notre pays passera par le nucléaire ; le dynamisme économique de nos territoires passera par nos centrales.
Entre autres tergiversations sur ce qui constitue le socle de notre indépendance énergétique – fermeture de Fessenheim, annonce de l'arrêt de douze réacteurs d'ici à 2035, baisse de la part du nucléaire à 50 % de notre mix énergétique –, la fermeture de la centrale du Blayais a été envisagée. Heureusement, le Gouvernement est revenu sur sa décision et le Président de la République a annoncé en 2022 la construction de plusieurs réacteurs de nouvelle génération, dont huit n'ont pas encore été attribués.
Le site du Blayais possède toutes les caractéristiques et tous les atouts requis pour accueillir ces nouveaux réacteurs. Le premier argument est géographique. L'extension de la centrale ne susciterait pas de difficulté foncière, car la zone qui l'entoure est peu densément peuplée. En outre, la proximité avec l'estuaire de la Gironde faciliterait l'utilisation de la ressource en eau, indispensable au fonctionnement des réacteurs.
De plus, une telle installation bénéficierait d'un atout en matière de formation : dans ce territoire, un réseau d'établissements dispensant des cours jusqu'au niveau master 2 est en mesure de former chaque année des centaines de jeunes, ce qui assurerait la présence d'un nombre suffisant de spécialistes et garantirait l'activité de la centrale.
Enfin, la candidature de la centrale du Blayais, située à Braud-et-Saint-Louis, dispose d'un appui populaire significatif, malgré les tentatives de sénateurs et de députés écologistes d'enrayer son développement par voie d'amendements au projet de loi relatif à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes, texte adopté en mai 2023.
Ainsi, 1 014 personnes ont signé un manifeste d'appui au projet, et quatre-vingt-douze motions de soutien ont été votées ou publiées par des conseils municipaux, des ONG, des intercommunalités de Gironde et de Charente-Maritime, des associations sportives, le conseil départemental de la Gironde ainsi que la chambre de commerce et d'industrie (CCI) de Bordeaux. Surtout, le projet est approuvé par 87 % des riverains. C'est dire le soutien sans concession manifesté par l'ensemble des habitants au développement de la centrale. Plus de 9 000 personnes en bénéficieraient ; leurs moyens d'existence en dépendent.
La centrale du Blayais est le moteur économique d'un territoire qu'il convient de promouvoir. Elle couvre 65 % des besoins énergétiques de la Nouvelle-Aquitaine, ce qui en fait une candidate idéale.
En matière de politique énergétique, nous devons nous redonner les moyens de nos ambitions. Durant la dernière campagne présidentielle, Marine Le Pen a proposé un plan de livraison de vingt EPR et EPR 2 entre 2030 et 2040, afin d'accompagner la réindustrialisation de notre pays tout en redonnant une place prédominante au nucléaire, qui représenterait 75 % à 80 % de notre mix énergétique. Le Blayais pourrait être un excellent point de départ vers cet objectif.
Quelle est la position du Gouvernement quant à l'implantation d'une paire de réacteurs EPR 2 au sein de la centrale du Blayais ?
Je vous prie d'excuser l'absence de mon collègue Roland Lescure, empêché ce matin.
La stratégie énergétique du Gouvernement, dont le Président de la République a fixé le cap en février 2022 à Belfort, vise à permettre à la France de sortir des énergies fossiles. Elle repose sur quatre piliers : la sobriété énergétique, l'efficacité énergétique, le déploiement des énergies renouvelables, la relance d'une politique nucléaire ambitieuse et durable.
S'agissant du nucléaire, il faut d'une part poursuivre le fonctionnement du parc nucléaire existant aussi longtemps que possible, bien évidemment dans le strict respect des exigences de sûreté, d'autre part construire des réacteurs de type EPR 2. À ce stade, vous l'avez dit, le programme d'EDF porte sur la construction de six réacteurs EPR 2, à savoir trois paires de réacteurs respectivement sur les sites de Penly, de Gravelines et du Bugey. Nous étudions la construction de huit réacteurs additionnels et souhaitons pouvoir fournir les conclusions de cette étude dans les toutes prochaines années.
En tout état de cause, l'année 2023 a permis d'adopter la loi relative à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes. Des sites tels que celui du Blayais ont donc une place toute particulière dans les travaux en cours. Nous espérons pouvoir apporter une réponse très prochainement.
La parole est à M. Vincent Rolland, pour exposer sa question, n° 621, relative à la stratégie énergétique.
Ma question s'adresse à M. le ministre délégué chargé de l'industrie et de l'énergie. Depuis les années 1960, la France permet aux Français et à ses industriels de bénéficier d'une énergie bas-carbone et peu chère, grâce à un mix électrique performant qui repose sur un socle alliant énergie nucléaire et hydroélectricité. Or, depuis une dizaine d'années, cet avantage considérable s'est nettement effrité.
D'une part, l'avenir de nos barrages hydroélectriques fait l'objet de diverses spéculations, notamment quant à l'éventuelle mise en concurrence de ceux dont la concession est échue ou se terminera prochainement. Il s'agit d'un enjeu de souveraineté, qui doit faire l'objet d'un débat clair devant la représentation nationale. En outre, les autorisations d'augmentation de puissance doivent être délivrées rapidement pour que l'on puisse faire face aux besoins énergétiques du pays. La première version du projet de loi relatif à la souveraineté énergétique n'offre pas toutes les garanties nécessaires. À l'occasion de la mise en conformité au droit européen du régime des concessions hydroélectriques, il convient d'assurer aux Français que ces concessions resteront sous pavillon tricolore.
D'autre part, le dispositif de l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh) prendra fin le 1er janvier prochain. À compter de cette date, les industriels français ne bénéficieront plus d'aucune mesure satisfaisante pour assurer la soutenabilité de leur production. De ce fait, les industriels hyper-électro-intensifs – ceux pour lesquels l'électricité représente une part majeure des coûts de production – ne peuvent plus prendre d'engagements à moyen ou à long terme. L'accord trouvé récemment entre l'État et EDF n'offre à ces entreprises aucune garantie concernant l'après-Arenh.
J'invite donc le Gouvernement à s'engager clairement en faveur de la souveraineté énergétique de la France en présentant rapidement un projet de loi complet qui réponde aux inquiétudes concernant les concessions hydroélectriques et les prix contractuels qui seront proposés aux industriels.
Je vous prie d'excuser l'absence de mon collègue Roland Lescure et vous remercie pour votre question. Je connais votre engagement de longue date à ce sujet, particulièrement prégnant dans la vallée où vous êtes l'élu.
Le Gouvernement prête une grande attention à l'énergie hydroélectrique et à son développement. Renouvelable et pilotable, cette énergie représente en moyenne plus de 10 % du mix électrique français, et jusqu'à 20 %, voire 25 %, lors des pics de consommation d'électricité.
M. Vincent Rolland acquiesce.
C'est dire si le sujet est crucial. C'est pourquoi le Gouvernement est pleinement engagé dans la résolution du précontentieux européen relatif aux concessions hydrauliques, en vue de libérer les investissements dans ce secteur, notamment pour favoriser les augmentations de puissance. Naturellement, le Gouvernement prend en compte les enjeux de toute nature, y compris ceux qui ont trait aux redevances perçues.
J'en viens à la fin, le 1er janvier 2025, du mécanisme de l'Arenh. En novembre dernier, vous l'avez dit, un accord a été trouvé avec EDF, qui vise un triple objectif : permettre à EDF de dégager les moyens de financer les investissements futurs, stabiliser les prix de l'électricité pour les consommateurs et préserver la compétitivité de l'industrie française. EDF a d'ailleurs signé tout récemment un contrat de dix ans avec l'un des industriels électro-intensifs de votre territoire.
Il pourrait être nécessaire de légiférer pour tenir compte de l'issue du précontentieux européen relatif aux concessions hydrauliques ou pour mettre en œuvre la nouvelle régulation de l'électricité nucléaire historique. Vous avez mentionné le projet de loi relatif à la souveraineté énergétique. En raison de l'importance des sujets afférents, nous avons fait le choix de prolonger les échanges portant sur ce texte. Nous veillerons bien évidemment à informer la représentation nationale, de manière cohérente avec les nouvelles orientations qui seront retenues pour défendre au mieux les intérêts de la France.
Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre. Je ne voudrais pas en retenir que tout ce qu'il y a de sûr, c'est qu'il n'y a rien de certain ! Peut-être faut-il passer d'un régime de concession à un régime d'autorisation, comme il en existe un pour les microcentrales, dont la puissance est inférieure à celles des barrages. En tout cas, il faut absolument graver dans la loi que les concessions hydroélectriques resteront sous pavillon français. C'est indispensable, sachant que les crises énergétiques vont sans doute se multiplier.
Vous avez mentionné l'accord entre l'État et EDF. Or de nombreux industriels hyper-électro-intensifs m'indiquent que les conditions de discussion avec l'énergéticien ne sont pas satisfaisantes, ce qui fragilise leur viabilité économique à moyen ou à long terme. Il faut traiter le fond du problème en ayant cet élément à l'esprit.
Tout ce qu'il y a de sûr, c'est qu'il n'y a rien de certain, dites-vous. Je rappelle néanmoins que même en cas de changement de concessionnaire, c'est l'État qui reste propriétaire des ouvrages hydroélectriques. Il n'y a donc aucun risque, à ce stade, de voir nos actifs stratégiques passer sous pavillon étranger.
Je ferai part à Roland Lescure de votre préoccupation concernant les conditions de discussion entre les industriels et leur fournisseur d'électricité.
La parole est à M. Thomas Ménagé, pour exposer sa question, n° 632, relative à l'apiculture.
Comme le monde agricole en général, l'apiculture française est en crise. Elle doit affronter la concurrence déloyale imposée par un commerce mondial dérégulé. Cette crise inédite tient à plusieurs raisons.
D'abord, on ne parvient pas toujours à déterminer la provenance réelle du miel, ni la composition finale du produit. Les autorités de contrôle n'ont pas les moyens d'établir l'origine des importations, le parcours du miel étant rendu illisible par la succession des expéditions. Résultat : dans nos magasins, des miels étrangers – importés d'Ukraine, du Vietnam ou du Mexique – sont vendus à 1 ou 2 euros le kilogramme, alors que les coûts de production des apiculteurs français se situent entre 6 et 8 euros. En d'autres termes, les miels français ne sont pas en mesure d'affronter la concurrence des miels importés, dont la composition est souvent frelatée. Selon un rapport publié le 23 mars 2023 par la Commission européenne, 60 % des opérateurs ont importé au moins un lot soupçonné d'être frelaté par l'apport de sucres artificiels. UFC-Que choisir a confirmé que de nombreux miels contiennent des sirops sucrés à base d'amidon, de riz, de betterave ou de maïs – autrement dit, ce n'est pas du miel.
En raison de ces distorsions de concurrence, le cours du miel français est en baisse. Quelque 63 % des apiculteurs français ont du mal à commercialiser leur récolte de 2023 et sont amenés à stocker – ce que m'ont confirmé de nombreux apiculteurs de mon territoire, le Gâtinais, au cours des derniers mois. Placés dans l'impossibilité d'écouler leur stock, les exploitants ne disposent pas de la trésorerie nécessaire pour préparer la nouvelle saison, qui commencera dans les prochains jours.
Parallèlement à l'accumulation de tonnes de miel français dans les stocks de nos apiculteurs, nous constatons une hausse des importations, qui est inacceptable. Les exploitants ont besoin d'une aide d'urgence à court terme et de vrais changements à long terme. Ils attendent des mesures. J'adresse au Gouvernement des questions précises, qui appellent donc des réponses précises.
Premièrement, le Gouvernement compte-t-il suspendre ou prendre en charge les cotisations patronales et salariales dues à la Mutualité sociale agricole (MSA) ? Entend-il reporter les crédits en cours ?
Deuxièmement, prévoit-il des aides d'urgence pour les entreprises qui n'ont plus aucune liquidité et qui risquent de fermer dès cette saison ou de réduire leur cheptel ?
Troisièmement, le Parlement européen et les États membres se sont accordés pour renforcer les directives dites petit-déjeuner, notamment pour imposer un étiquetage plus clair du miel. Le Gouvernement peut-il préciser les modalités et les dates d'entrée en vigueur de ces évolutions ?
De manière plus générale, quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre pour soutenir la production française de miel face à la concurrence étrangère ? Il pourrait par exemple enclencher des clauses de sauvegarde ou des clauses miroirs, ou encore instaurer un prix minimal à l'importation – on en débat en ce moment – afin d'éviter la concurrence déloyale. N'oubliez pas qu'en sauvant l'apiculture française, vous sauverez toute l'agriculture française, car la pollinisation assurée par ces magnifiques insectes que sont les abeilles est au fondement de la biodiversité et de toutes nos productions.
Malheureusement, le secteur est très fragilisé. Nous comptons sur le Gouvernement.
Je vous remercie de votre question et vous prie d'excuser l'absence de Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, qui m'a demandé de le représenter.
Nous avons bien conscience des distorsions de concurrence actuelles, qui tiennent à la difficulté à déterminer la provenance réelle du miel et l'éventuelle manipulation frauduleuse – c'est le terme approprié – de sa composition. Les contrôles dans le secteur sont réguliers et seront renforcés cette année, afin de protéger non seulement les consommateurs français, mais aussi les apiculteurs contre des pratiques tout à fait déloyales qui menacent leur activité.
De manière plus structurelle, le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire a présenté le 23 février dernier un plan d'action face à la crise apicole, qui apporte des réponses à trois de vos questions.
Premièrement, le Gouvernement a accordé un soutien conjoncturel d'urgence aux apiculteurs qui connaissent des difficultés importantes. Ce soutien, d'un montant total de 5 millions d'euros, prend la forme d'avances de trésorerie, d'aides conjoncturelles et d'une prise en charge des cotisations dues à la MSA.
Deuxièmement, l'accord intervenu entre le Conseil de l'Union européenne et le Parlement européen pour un étiquetage plus clair sur l'origine des aliments et leur teneur en sucre sera suivi d'effets concrets. Le premier axe du plan apicole de l'État vise à lutter contre les fraudes et à améliorer la transparence de l'information du consommateur. Cela passera par des exigences renforcées en matière de réglementation relative à l'étiquetage d'origine et par des contrôles de l'authenticité et de la qualité des miels.
Troisièmement, le Gouvernement compte effectivement prendre des mesures pour soutenir la production française de miel. À court terme, nous débloquons 500 000 euros pour soutenir les actions de communication et de promotion de la filière, dédiées au miel, aux autres produits de la ruche ou aux métiers de la filière apicole. À plus long terme, nous conforterons la résilience de la filière en lui donnant des outils qui lui permettront de mieux piloter sa production en fonction des attentes du consommateur. Cela passera notamment par l'élaboration d'indicateurs de marché pertinents.
Le travail est devant nous. Il faut que nous accélérions et agissions rapidement.
Je vous remercie pour ces premiers éléments de réponse. Comme vous l'avez dit, il reste du travail. Je veillerai à ce qu'il se traduise en actes dans mon territoire du Gâtinais. Il faut un étiquetage clair pour que le consommateur comprenne ce qu'il a dans son assiette au petit-déjeuner, mais pas seulement, puisqu'il existe de nombreux produits de la ruche en plus du miel.
Par ailleurs, je vous invite à être attentive au système global. Vous connaissez notre position vis-à-vis du Mercosur, qui est un vrai danger ; augmenter le nombre de traités de libre-échange comme celui avec le Chili, que les députés européens de la majorité ont malheureusement approuvé la semaine dernière, ne fera qu'affaiblir la filière avec l'importation de miel supplémentaire. Nous veillerons à ce qu'une concurrence juste soit assurée entre nos apiculteurs et ceux du reste du monde.
La parole est à M. Stéphane Peu, pour exposer sa question, n° 609, relative à la prime de fidélisation territoriale.
Le plan L'État plus fort en Seine-Saint-Denis, lancé en 2018 par le Premier ministre Édouard Philippe et acté en 2020, comportait une mesure inédite : la prime de fidélisation pour les agents de la fonction publique d'État en poste dans ce département. Cette prime, dont le montant vient de passer de 10 000 à 12 000 euros, est accordée à chaque agent au terme de cinq années consécutives d'exercice. Instaurée pour surmonter des difficultés exceptionnelles en matière de ressources humaines en Seine-Saint-Denis, elle a été pensée pour bénéficier d'abord aux agents de première ligne de l'État.
Si nous ne disposons pas encore du recul nécessaire pour juger de sa pleine efficacité, le délai de cinq ans n'étant pas arrivé à son terme, le rapport parlementaire sur la Seine-Saint-Denis que je viens de publier avec ma collègue députée du groupe Renaissance, Christine Decodts, montre toutefois que les agents non éligibles à la prime vivent mal cette inégalité de traitement et, en toute cohérence, la réclament. Cette demande s'exprime en particulier dans la fonction publique hospitalière et chez les accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH). Ces agents de toute première ligne, dont les salaires figurent parmi les plus bas et dont les conditions de travail sont très difficiles, exercent dans des secteurs où les problèmes de recrutement sont notoires et dans un département que le Premier ministre qualifiait très justement à l'époque de « département hors-normes » en raison de son histoire et de ses difficultés. C'est pourquoi nous préconisons l'élargissement de cette prime de fidélisation dans notre rapport.
Ma question est donc très simple : êtes-vous disposés à accorder cette prime de fidélisation à la fonction publique hospitalière et aux AESH de la Seine-Saint-Denis, au même titre qu'aux agents de la fonction publique d'État ?
Permettez-moi d'excuser l'absence de Stanislas Guerini, retenu ailleurs. Vous nous interrogez au sujet de l'extension de la prime de fidélisation au personnel de la fonction publique hospitalière et aux AESH exerçant en Seine-Saint-Denis. Les deux situations sont différentes, mais donnent chacune lieu à un dispositif d'appui au personnel concerné.
Pour la fonction publique hospitalière, aucune extension de la prime de fidélisation territoriale des agents exerçant en Seine-Saint-Denis n'est prévue à ce jour. Ses membres bénéficient en effet d'un dispositif indemnitaire propre, la prime d'attractivité territoriale, instaurée par le décret du 30 janvier 2020 pris dans le cadre du volet « Investir pour l'hôpital » du plan Ma santé 2022 pour répondre aux difficultés de recrutement des établissements de la fonction publique hospitalière dans certains territoires d'Île-de-France, dont la Seine-Saint-Denis. Cette disposition permet de verser chaque année une prime d'un montant qui peut aller jusqu'à 940 euros aux agents publics hospitaliers dont la rémunération est inférieure au salaire médian de la fonction publique hospitalière, dès lors qu'ils exercent depuis au moins trois mois certaines fonctions correspondant à des métiers en tension.
Les AESH, quant à eux, sont éligibles à la prime de fidélisation. Le ministre de la transformation et de la fonction publiques, Stanislas Guerini, a acté en fin d'année dernière la modification des conditions d'éligibilité à cette prime en revoyant son montant et en permettant son échelonnement sur une période de référence de cinq années. Concrètement, une première part de 2 400 euros est désormais versée dès la nomination, suivie de deux parts de 4 800 euros trois ans, puis cinq ans après la nomination, en contrepartie d'un engagement de servir dans le département. Ce dispositif permettra de mieux fidéliser les AESH exerçant dans le département. L'avancée a été saluée par les organisations syndicales.
Je vous remercie pour votre réponse, qui vient clarifier un décret dont la lecture ne nous avait jusqu'à présent pas permis de déduire que les AESH étaient éligibles à la prime de fidélisation.
S'agissant de la fonction publique hospitalière, le sentiment d'injustice perdure. Pour les policiers ou les magistrats, il existe des catégories de primes diverses, auxquelles s'ajoute la prime de fidélisation propre au travail dans le département de la Seine-Saint-Denis. Les primes que vous avez évoquées pour la fonction publique hospitalière ne sont pas du même montant et elles excluent le cumul avec la prime de fidélisation, ce qui ne favorise pas le recrutement et la fidélisation des agents.
Le département souffre d'être une vaste école d'application de la fonction publique. C'est une bonne chose que d'avoir des jeunes, avec leur dynamisme et leur enthousiasme ; pour qu'ils exercent bien leur métier, il faut cependant que les services dans lesquels ils travaillent emploient des fonctionnaires ayant de l'expérience aux côtés de ceux qui sont en train d'apprendre.
La parole est à M. Christophe Marion, pour exposer sa question, n° 623, relative à l'aide humanitaire au Soudan.
Ma question porte sur la réponse qu'adresse la France aux besoins humanitaires du peuple soudanais, première victime, depuis avril 2023, des combats qui font rage entre l'armée soudanaise et les forces de soutien rapide.
Il est indéniable que la France est très attentive à ce conflit. Notre pays a participé activement à la conférence humanitaire pour le Soudan et la région organisée le 19 juin 2023 par l'Arabie Saoudite. Comme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères, Catherine Colonna, l'avait confirmé en réponse à l'une de mes questions écrites, la France a mobilisé, entre le début de la guerre au Soudan et septembre dernier, plus de 43,3 millions d'euros d'aide humanitaire. Cette somme – dont vous pourriez peut-être nous donner une mise à jour – est importante et permet aux ONG installées sur place et aux agences des Nations unies de soigner, d'alimenter, d'abriter et de prendre en charge les nombreuses victimes de la guerre. Ce soutien financier est absolument nécessaire : mes collègues députés du groupe d'amitié France-Soudan et moi-même, qui nous sommes rendus en octobre dernier dans des camps de réfugiés soudanais, pouvons témoigner de l'immensité des besoins de la population soudanaise et des ONG qui tentent de lui venir en aide.
Je salue donc sincèrement l'annonce par le ministre des affaires étrangères, il y a deux semaines, de l'organisation d'une conférence humanitaire pour le Soudan à la mi-avril. J'aimerais que vous nous confirmiez que cet événement se traduira par un accroissement important de l'aide humanitaire allouée par la France à la population soudanaise. Notre pays a su être au rendez-vous pour aider les civils ukrainiens et les civils de la bande de Gaza ; il doit l'être aussi pour les civils soudanais. Rappelons qu'ils sont 45 millions, dont 18 millions à être confrontés à une insécurité alimentaire aiguë, selon l'ONU.
J'attends aussi que vous nous rassuriez s'agissant de l'impact des coupes budgétaires annoncées sur les fonds destinés, directement ou indirectement, à venir en aide aux civils soudanais. Les Soudanais ont besoin de nous. Après presque un an de calvaire, nous nous devons de leur envoyer des messages d'espoir et des actes de solidarité.
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée du développement et des partenariats internationaux.
Le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, qui ne pouvait être présent ce matin, m'a chargée de vous répondre.
Le conflit au Soudan a provoqué l'une des plus importantes crises humanitaires au monde, comme vous l'avez justement décrit. La position de la France est connue : nous condamnons la poursuite des combats au Soudan et les violations des droits de l'homme commises par les forces armées soudanaises et les forces de soutien rapide.
Face à une situation dramatique, nous prenons nos responsabilités. La France et l'Union européenne organiseront une conférence humanitaire internationale à Paris, le 15 avril prochain, un an après le déclenchement des hostilités. Stéphane Séjourné réunira la communauté internationale ainsi que les acteurs humanitaires internationaux et les organisations locales qui agissent en première ligne afin de rassembler nos efforts pour soutenir les populations civiles au Soudan et dans les pays voisins. Nous chercherons à mobiliser les financements nécessaires et à obtenir des belligérants un accès humanitaire libre, sûr et sans entrave.
Vous l'avez rappelé, la France est déjà mobilisée pour répondre à cette crise humanitaire. Nous avons apporté en 2023 une aide de 55 millions d'euros et nous poursuivrons cet engagement en 2024. Par ailleurs, nous appelons les parties à respecter leurs obligations au regard du droit international humanitaire et à tenir les engagements pris à Djeddah. La France appuie l'ensemble des initiatives de paix internationales et régionales visant à mettre un terme aux hostilités. Nous œuvrons, avec nos partenaires, afin de favoriser davantage de coordination entre ces efforts.
Enfin, ce conflit entre militaires ne doit pas masquer l'existence d'une classe politique et d'une société civile soudanaises pacifistes. Nous serons attentifs à ce que leurs aspirations ne soient pas laissées pour compte. Le Gouvernement ne veut pas que le conflit au Soudan devienne une crise oubliée car, comme l'a dit le Président de la République, toutes les vies se valent.
La parole est à M. Antoine Léaument, pour exposer sa question, n° 615, relative à l'inscription sur les listes électorales.
Comme vous le savez sans doute, La France insoumise a lancé une campagne d'inscription sur les listes électorales avec le site onvoteinsoumis.fr, qui permet de vérifier que l'on est bien inscrit. Je vous invite à venir avec moi à la Grande Borne à Grigny, à Saint-Hubert à Sainte-Geneviève-des-Bois ou au Bois des Roches à Saint-Michel-sur-Orge pour promouvoir avec moi cette campagne d'inscription sur les listes électorales et constater combien celle-ci est compliquée.
En effet, il faut utiliser le site FranceConnect, qui est extrêmement difficile d'accès. En outre, pour avoir tenté d'inscrire quelqu'un en lui disant : « Ne vous inquiétez pas, cela prend cinq minutes », je vous assure que c'est loin d'être aussi rapide. Pourquoi ? Parce que le site n'accepte pas les photos d'une taille supérieure à 2 mégaoctets. Quand on prend la photo avec son téléphone, il faut donc la compresser avant de s'inscrire. Vous imaginez le niveau de complexité quand on est non inscrit, ce qui est le cas de 4 millions de personnes, ou mal inscrit, ce qui est le cas d'à peu près 8 millions de personnes… Au total, 12 millions de personnes sont potentiellement exclues de la participation au vote.
C'est une forme de rétablissement du suffrage censitaire. En effet, les plus touchés par la mal-inscription et la non-inscription sont les jeunes et les habitants des quartiers populaires. Pourquoi ? Parce qu'il y a une très forte mobilité dans les quartiers populaires pour des raisons liées au logement, au travail, à la vie de famille. Dans les quartiers populaires, on change souvent de ville ; on a donc souvent besoin de se réinscrire sur les listes électorales.
Ma première question est la suivante : comptez-vous supprimer l'usage obligatoire de FranceConnect pour s'inscrire sur les listes électorales ? La deuxième : comptez-vous supprimer la limite de 2 mégaoctets, qui est complètement ridicule ?
Enfin, dernière question, centrale : comptez-vous lancer une campagne nationale d'inscription sur les listes électorales avant les élections européennes du 9 juin ? Il y en a sacrément besoin. 12 millions de personnes mal inscrites ou non inscrites sur les listes électorales, cela représente à peu près un quart du corps électoral. C'est énorme, pour des élections où l'abstention est de 50 %, en partie du fait de la mal-inscription ; cela signifie qu'une part non négligeable de nos concitoyens est exclue du vote. Que comptez-vous faire à ce sujet ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la ville et de la citoyenneté.
Avant de vous apporter la réponse factuelle du ministre de l'intérieur, je tiens à vous dire qu'étant chargée des quartiers prioritaires, je partage votre constat. Ce que je vois dans la réalité est même au-delà de ce que vous décrivez. Puisque nous ne nous connaissons pas si mal, je vous invite à travailler avec nous à cette campagne d'inscription sur les listes électorales ; je l'avais faite, il y a vingt-cinq ans, et nous pouvons la refaire.
Le Gouvernement se mobilise depuis plusieurs années pour réduire le taux de non-inscription et lutter contre la mal-inscription : en 2022, plus de 95 % des Français en âge de voter – et 99 % des adultes de moins de 30 ans – étaient inscrits sur une liste électorale, contre, respectivement, 88 % et 85 % en 2018.
Ces chiffres montrent les progrès considérables réalisés depuis 2019 grâce au déploiement du répertoire électoral unique. L'inscription automatique des jeunes majeurs leur permet de voter dès le lendemain de leur dix-huitième anniversaire. Les électeurs peuvent s'inscrire en ligne, en quelques minutes, et changer ainsi très facilement de commune de vote lorsqu'ils déménagent.
L'utilisation de FranceConnect, qui permet de se connecter par l'intermédiaire de sites de démarches essentielles, tels que ameli.fr ou impots.gouv.fr, n'est pas obligatoire lors de cette téléprocédure, mais elle la rend plus sûre.
Nous poursuivons nos efforts : en amont des élections européennes, des actions de communication seront organisées pour faire connaître les démarches d'inscription et sensibiliser les électeurs à la mal-inscription.
Des travaux de plus long terme sont également menés par les services du ministère de l'intérieur et des outre-mer afin de lutter contre la mal-inscription, particulièrement à la suite d'un déménagement, et de simplifier les procédures pour que chacun puisse procéder à son inscription dans sa nouvelle commune en un clic.
Enfin, si le jour du scrutin, un électeur ne se trouve pas dans la commune où il est inscrit, il peut voter par procuration. Cette démarche a été considérablement simplifiée depuis 2021 grâce à la téléprocédure Maprocuration. Les détenteurs d'une identité numérique certifiée pourront faire établir leur procuration pour les élections européennes de 2024 de manière complètement dématérialisée, sans avoir à se déplacer au commissariat ou dans une brigade de gendarmerie.
Pour combattre l'abstention, lutter contre la non-inscription et la mal-inscription est en effet la priorité.
Je vous remercie pour votre réponse et prends acte de votre invitation à participer à une campagne d'inscription sur les listes électorales. Soyez sûre que j'y réponds favorablement !
Vous dites qu'il n'est pas obligatoire de passer par FranceConnect pour s'inscrire sur les listes électorales, mais ce n'est pas vrai !
C'est pour sécuriser la démarche !
Il y a certes le formulaire Cerfa, mais il n'est pas dématérialisé, ce qui complique aussi les choses. Il faut changer ce système !
S'agissant des procurations, nous vous souhaitons bonne chance, mais nous jugerons sur pièces.
Et vous avez raison !
La parole est à Mme Monique Iborra, pour exposer sa question, n° 624, relative à la navette Toulouse-Orly.
Mes collègues députés d'Occitanie et moi-même avons appris par la presse le 18 octobre la décision d'Air France de supprimer en 2026 la navette Toulouse-Orly, qui assure aujourd'hui quatorze rotations par jour, la compagnie Transavia devant prendre le relais.
Cette décision prise sans concertation a provoqué de vives réactions, non seulement chez les élus – mes collègues sénateurs ont saisi le ministre Clément Beaune à ce sujet il y a trois mois –, mais aussi chez les citoyens regroupés dans le collectif Orly et les acteurs économiques de la région Occitanie et de la métropole toulousaine.
La stratégie d'Air France, qui souhaite supprimer ses liaisons domestiques, fait naître un sentiment de déclassement dans toute une région qui ne pourra bénéficier d'une solution de remplacement crédible à cette navette – la ligne à grande vitesse (LGV) – qu'à partir de 2030 ou de 2032.
D'autre part, la compagnie Transavia, déficitaire, n'a pour l'instant pas su démontrer qu'elle pouvait remplacer Air France en assurant les mêmes services et les mêmes rotations. Alors qu'Air France assurait par exemple huit à dix vols par jour entre Montpellier et Orly, Transavia n'en assure qu'un à trois. La situation est la même pour Brest.
Sans parler des choix stratégiques d'Air France, le calendrier évoqué pour la suppression de la navette Toulouse-Orly assurée par la compagnie nous semble complètement inadapté. Nous souhaiterions donc qu'il ne soit révisé qu'après la mise en service de la LGV.
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la ville et de la citoyenneté.
Les annonces de la compagnie Air France doivent s'analyser au regard des évolutions structurelles de la demande sur le marché domestique depuis la crise sanitaire.
Durant cette crise, les organisations et les habitudes de travail ont profondément évolué, ce qui a entraîné une baisse du trafic aérien lié aux voyages d'affaires, en particulier sur les liaisons en provenance et à destination de Paris. Alors que le trafic aérien en France a retrouvé son niveau de 2019 en novembre 2023, la fréquentation sur les lignes radiales du trafic domestique à cette date dépassait à peine 75 % de son niveau d'avant la crise. Le trafic de la navette Orly-Toulouse est ainsi passé de près de 300 000 passagers en 2019 à moins de 150 000 en 2023.
Dans ce contexte, il est justifié qu'Air France cherche des solutions pour limiter le poids des lignes déficitaires sur son modèle économique et améliorer sa rentabilité ; c'est la condition de sa pérennité face à la concurrence.
Je vous rejoins sur le fait que ces évolutions ne doivent pas se faire au détriment des territoires et de leur connectivité.
Le groupe a bien confirmé que cette évolution s'accompagne du renforcement des liaisons de Toulouse vers l'aéroport Paris-Charles de Gaulle opérées par Air France, le nombre des rotations quotidiennes en été, qui continuera à augmenter, étant passé de sept en 2019 à huit en 2023, et du développement des liaisons de sa filiale Transavia à destination de Paris-Orly.
Je sais combien il importe de maintenir la connectivité de Toulouse, ville qui accueille le siège social du constructeur aéronautique européen Airbus et capitale mondiale de l'industrie aéronautique et spatiale.
Patrice Vergriete, ministre délégué chargé des transports, veillera à ce que le groupe Air France y reste un acteur majeur, au service du territoire et de ses acteurs.
Je vous remercie pour votre réponse, madame la ministre, mais les arguments d'Air France ne nous convainquent pas. Toulouse s'apprête à devenir la troisième métropole de France. Vous l'avez dit, elle abrite Airbus. Mais surtout, elle ne dispose pas d'autre solution que l'avion avant la mise en service de la LGV en 2030 ou 2032.
Air France n'est certes pas responsable de la situation assez peu satisfaisante des transports en Occitanie, en particulier le déploiement de la LGV,…
C'est vrai !
…mais le calendrier évoqué, élaboré sans aucune concertation, n'est pas acceptable. Mes collègues députés et moi-même, ainsi que d'autres personnalités, solliciterons un rendez-vous avec le ministre pour obtenir la révision des dispositions qui s'appliqueront à partir de 2026, prises de manière unilatérale pour des raisons que l'on peut entendre, mais qui ne sont pas les nôtres.
La parole est à Mme Danielle Brulebois, pour exposer sa question, n° 626, relative au dispositif MaPrimeRénov'.
Je souhaite appeler l'attention du ministre chargé du logement sur les importantes difficultés que rencontrent les demandeurs de MaPrimeRénov' pour constituer leur dossier et obtenir le versement de la prime.
Très souvent, des particuliers contactent ma permanence à ce sujet : ils n'arrivent pas à finaliser leur dossier alors qu'ils ont engagé des sommes particulièrement importantes, ce qui engendre des difficultés financières. Des interlocuteurs locaux existent pour les aider dans leurs démarches, notamment les maisons France Services, mais ils restent méconnus. Par ailleurs, ils sont souvent désemparés pour répondre aux questions posées.
Dans la pratique, les demandeurs sont renvoyés à l'Agence nationale de l'habitat (Anah), qu'ils arrivent très difficilement à joindre, ou trop tard, perdant ainsi les aides sur lesquelles ils comptaient. Cette situation crée un sentiment d'insatisfaction vis-à-vis de notre politique de rénovation énergétique. L'obligation de réaliser une rénovation d'ampleur avec des travaux permettant de gagner au moins deux classes dans le diagnostic de performance énergétique (DPE) conduira à aggraver ces problèmes.
Conditionner une aide pour isoler son logement à un premier geste consistant à installer un chauffage décarboné, et plus spécifiquement une pompe à chaleur, pose problème. De nombreux logements, en particulier en zone rurale, ne peuvent en effet être équipés de pompes à chaleur.
Par ailleurs, ce projet obligerait au remplacement de toutes les chaudières, y compris celles installées depuis moins de quinze ans, pour pouvoir obtenir des aides afin d'isoler sa toiture ou ses murs : la question du reste à charge pour les ménages se pose. Quand on habite une vieille ferme, par exemple dans le Jura, changer ses portes et ses fenêtres qui ferment mal et laissent passer les courants d'air représente déjà un premier geste majeur, qui entraîne réel un gain énergétique.
De plus, l'encouragement à la rénovation globale pousse les ménages à faire appel uniquement à de grandes entreprises, les petites entreprises artisanales ne disposant pas de tous les corps de métier.
Enfin, conditionner une aide pour isoler son logement à un DPE allongera considérablement les délais de travaux.
Quelles mesures concrètes le Gouvernement compte-t-il prendre pour simplifier un dispositif trop compliqué et remédier à ces difficultés ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la ville et de la citoyenneté.
Le dispositif MaPrimeRénov', créé à l'initiative du Gouvernement, est un vrai succès : il a permis de rénover plus de 2 millions de logements depuis 2020, grâce aux moyens mis à disposition par l'État au plus près du terrain.
Pour informer et aider les Français à réaliser leurs travaux de rénovation, plus de 570 espaces conseil France Rénov' proposent un service gratuit d'information, de conseil et d'accompagnement des particuliers. L'accompagnateur France Rénov' agréé par l'Anah, les frais associés étant intégralement pris en charge pour les plus modestes, évite aux Français de recourir à une grande entreprise en les aidant lors de la conception de leurs travaux, de leurs démarches administratives – sélection des devis, dossiers d'aides, plans de financement – et enfin de la réception des travaux, qui pose souvent problème et nécessite un accompagnement renforcé.
Dans le cadre de la réforme conduite en 2024, les ménages qui souhaitent réaliser un unique geste d'isolation sont incités à changer leur chaudière dans le même temps. Les pompes à chaleur peuvent être installées dans de nombreux logements, y compris en zone rurale, même si des travaux complémentaires peuvent être recommandés – isolation, changement des radiateurs.
L'installation de chauffages à biomasse, ainsi que le raccordement à de petits réseaux de chaleur dont la construction peut être partiellement financée par le fonds Chaleur de l'Agence de la transition écologique (Ademe), constituent également des solutions de remplacement, viables en zone rurale, aux chaudières à énergie fossile. Toutes ces solutions sont subventionnées.
Ce dispositif mérite cependant d'être encore simplifié pour devenir pleinement efficace. C'est pourquoi les ministres Christophe Béchu et Guillaume Kasbarian ont rencontré le 16 février les représentants de la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb) et de la Fédération française du bâtiment (FFB) pour accélérer la rénovation énergétique des bâtiments en simplifiant les parcours d'accès aux aides.
Dans ce cadre, le Gouvernement travaille, en concertation avec ces acteurs, à des évolutions substantielles qui seront présentées en détail dans la première quinzaine du mois de mars.
Je suis heureuse d'entendre que le Gouvernement s'est saisi de ce dossier et travaille avec les fédérations du bâtiment, qui sont les mieux à même d'identifier les difficultés.
La parole est à M. Matthieu Marchio, pour exposer sa question, n° 630, relative à l'échangeur de l'autoroute A21.
En 2023, le ministre des transports a donné son accord de principe pour la construction d'un échangeur routier sur l'A21, dans ma circonscription, entre les sorties 27, à hauteur de Rieulay et de Marchiennes, et 28, au niveau de Somain et d'Aniche. La création de cette bretelle d'autoroute est essentielle pour le développement économique de l'Ostrevent et de Somain.
Elle permettrait de désengorger l'échangeur autoroutier existant qui dessert Somain et Aniche, parfois complètement bloqué aux heures de pointe, avec des bouchons qui peuvent déborder sur l'autoroute, créant un risque pour la sécurité routière.
La bretelle projetée contribuerait à désenclaver et à développer la zone de la Renaissance à Somain, en facilitant l'implantation d'industries et d'entreprises. Une entreprise de logistique doit s'y installer, avec 350 emplois à la clé. Il s'agit d'un formidable atout pour notre territoire du Douaisis, où le taux de chômage dépasse 11 %, soit quatre points de plus que la moyenne nationale. Cela faciliterait également le report modal, la gare de triage de Somain se trouvant à proximité.
Alors que ce projet devait figurer dans le volet mobilités du contrat de plan État-région (CPER) – le Gouvernement s'y était engagé –, il en est totalement absent, ce qui suscite l'inquiétude légitime des habitants et des élus locaux.
Quid du respect de la parole donnée en politique ? À l'heure où nous avons besoin de l'intervention et du soutien financier de l'État, nous avons une fois de plus le sentiment que votre majorité abandonne le développement économique et le renforcement de l'attractivité du bassin minier. Lorsque des projets existent, il faut les soutenir ! Trois cent cinquante emplois sont en jeu. Nous attendons donc des actes forts et concrets pour le bassin minier du Nord et pour l'Ostrevent.
Madame la secrétaire d'État, nous demandons un engagement ferme du Gouvernement sur ce projet d'échangeur routier sur l'A21. L'État sera-t-il au rendez-vous ? Allez-vous vous engager dans ce projet et apporter les garanties financières nécessaires à sa bonne réalisation ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la ville et de la citoyenneté.
L'État se tient toujours aux côtés des collectivités territoriales. Tenir sa parole en politique est pour moi une évidence, autant que faire se peut.
Le choix des projets routiers à financer dans le cadre du volet mobilités des contrats de plan État-région 2023-2027 est plus sélectif que par le passé, afin de réorienter les moyens financiers vers des modes de transport plus durables.
Dans les Hauts-de-France, l'État et la région ont donné la priorité à la poursuite de l'aménagement d'itinéraires routiers structurants, en particulier la RN2. Cependant, des aménagements ponctuels, répondant à des enjeux d'amélioration de la desserte du territoire, peuvent être financés et promus par des collectivités territoriales, sous réserve que leur intérêt soit démontré et que leurs impacts aient été préalablement évalués.
Or Somain est déjà desservie par deux échangeurs distants d'environ 3 kilomètres. Un nouvel échangeur serait susceptible d'entraîner des reports de trafic non souhaités sur l'A21 et de modifier significativement le trafic sur le réseau local. Compte tenu de la faible distance entre les échangeurs 27 et 28, sa compatibilité avec les règles de la conception autoroutière reste par ailleurs à vérifier. Il convient de s'assurer que des solutions alternatives sur le réseau routier local ne permettent pas de répondre efficacement aux besoins, dans le cadre d'une concertation précise et détaillée – il faut faire dans la dentelle – qui permettra d'éviter tout déport de trafic susceptible de créer des problèmes de circulation sur d'autres échangeurs.
Ce n'est pas l'engagement pris par Clément Beaune, alors ministre des transports, qui avait donné un accord de principe. En outre, l'échangeur existant au niveau de Somain et d'Aniche est complètement engorgé, ce qui crée des risques en matière de sécurité routière, alors même que des écoles et des zones commerciales et industrielles sont situées à proximité. Un nouvel échangeur routier, ou un autre aménagement, est nécessaire pour le territoire, ne serait-ce que pour cette raison.
La parole est à Mme Alexandra Masson, pour exposer sa question, n° 631, relative au tunnel routier du col de Tende.
Les 2 et 3 octobre 2020, la tempête Alex a fortement endommagé le tunnel routier du col de Tende, infrastructure majeure de la vallée de la Roya. Cette connexion entre la France et l'Italie, qui relie la Côte d'Azur à la région du Piémont et à tout le Nord de l'Italie, est fermée depuis trois ans.
La réouverture de ce tunnel est un enjeu capital en matière commerciale, économique, touristique et humaine. Des deux côtés de la frontière franco-italienne, la demande comme l'attente des élus et des habitants sont très fortes. À l'occasion de la conférence intergouvemementale (CIG) des Alpes du Sud, réunissant la France et l'Italie, qui s'est tenue à Rome le 6 octobre 2023, cette réouverture, prévue au mois d'octobre 2023, a été reportée au mois de juin 2024. Lors de la dernière réunion de la CIG, le 28 février, elle a une nouvelle fois été reportée au mois de septembre 2024.
Une demande d'ouverture partielle pour le passage de véhicules en convois durant l'hiver est restée lettre morte, alors que le rapport d'une commission de sécurité, attendu au mois de décembre, n'a toujours pas été remis aux autorités françaises. L'ouverture de la route dite des quarante-six lacets, qui permet de contourner le tunnel, n'a pas été autorisée ; celle-ci restera donc totalement fermée jusqu'au printemps.
Pire, alors qu'une enveloppe globale de 255 millions d'euros a été prévue pour la construction d'un nouveau tunnel et la réhabilitation de l'ancien tunnel pour permettre le passage des véhicules à double sens, le projet ne prévoit désormais plus la réhabilitation de l'ancienne structure, sans aucune réduction des coûts !
Lors de la dernière CIG, le 28 février 2024, j'ai donc demandé l'ouverture de la route des quarante-six lacets le plus tôt possible, pour permettre une circulation, même partielle, entre la France et l'Italie ; la transmission du dossier de la commission de sécurité demandé par la CIG du 6 octobre 2023, afin de permettre une ouverture partielle du tunnel pour des passages de véhicules en convois ; le montant de la moins-value à verser par l'entreprise maître d'œuvre du chantier, à la suite de sa décision de ne pas poursuivre la réhabilitation de l'ancien tunnel ; le lancement d'un nouvel appel d'offres pour reprendre cette réhabilitation visant à permettre une circulation à double sens ; la tenue d'une réunion d'information de la CIG au moins tous les deux mois.
Le Gouvernement doit prendre ses responsabilités et intervenir réellement auprès des autorités italiennes pour obtenir la réouverture – urgente – du tunnel du col de Tende. Je demande au ministre des transports de se rendre sur place avec son homologue italien afin de débloquer cette situation qui n'a que trop duré.
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la ville et de la citoyenneté.
Le Gouvernement souscrit pleinement à la nécessité impérieuse d'ouvrir le nouveau tunnel routier du col de Tende le plus rapidement possible. Lors de la CIG du 28 février dernier, les élus et les représentants des collectivités françaises et italiennes ont exprimé avec force, comme vous-même, leur refus de tout nouveau report.
Le président de la délégation française a exprimé fermement la position du Gouvernement : le report de la mise en service de juin à septembre 2024, envisagé par l'Anas – la société publique qui gère les routes nationales italiennes et les autoroutes non concédées –, maître d'ouvrage délégué italien, n'est pas acceptable. Tout doit être mis en œuvre par l'entreprise italienne pour respecter l'engagement pris fin 2023 par les autorités italiennes.
La CIG n'a donc pas validé le nouveau calendrier proposé par l'entreprise et a demandé que le nouveau tunnel soit ouvert à la circulation au plus tard en juillet 2024. Alors que le génie civil du tunnel devrait s'achever dans les prochaines semaines, la CIG a exigé un calendrier détaillé de l'approbation des dispositions de sécurité, de l'installation des équipements et des tests en situation réelle, qui seront réalisés par les services de secours français et italiens avant l'ouverture. Ces dispositions sont critiques pour l'ouverture du tunnel.
Je vous confirme que sur proposition française, une réunion de la CIG se tiendra tous les deux mois, notamment afin d'informer les élus et les populations concernées, chez qui tout nouveau retard suscite une incompréhension grandissante. Je vous assure de la mobilisation totale du Gouvernement, en particulier du ministre Patrice Vergriete, à qui je ne manquerai pas de transmettre votre invitation à se rendre dans la vallée de la Roya.
Au-delà de cette invitation, sa venue est une urgence impérieuse : ce dossier doit devenir politique. Trop longtemps, l'Italie comme la France ne s'en sont pas emparées. Ce tunnel transfrontalier, oublié, est particulièrement important puisqu'il relie la Suisse au rivage de la mer Méditerranée. Si sa fermeture devait se prolonger, elle aurait des effets dommageables, du point de vue économique et touristique, sur deux pays pourtant amis, qui ne souhaitent qu'une chose : poursuivre leurs relations, dans l'intérêt de la coopération transfrontalière.
Je vous demande donc instamment, non seulement de transmettre cette invitation au ministre des transports, mais aussi d'en faire connaître le caractère impérieux.
La parole est à M. Idir Boumertit, pour exposer sa question, n° 612, relative à l'exposition aux substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées.
Cette question s'adresse au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Le Rhône est un territoire particulièrement concerné par une exposition excessive de la population et de l'environnement aux polluants éternels, les Pfas – substances polyfluoroalkylées ou perfluoroalkylées –, comme en témoignent de récentes études et la publication d'analyses par l'agence régionale de santé (ARS) Auvergne Rhône-Alpes en janvier dernier.
La Vallée de la chimie, important bassin industriel, est ainsi confrontée à une concentration alarmante de Pfas, qui met incontestablement en péril la santé de ses habitants et l'environnement. Omniprésents dans notre environnement, ceux-ci représentent une grave menace pour la santé publique. Les récentes analyses de l'ARS Auvergne Rhône-Alpes ont montré que les habitants de ces zones sont exposés à des niveaux de Pfas nettement supérieurs aux normes européennes, ce qui accroît les risques pour leur santé et leur bien-être.
L'ARS a intimé aux collectivités locales de prendre des mesures pour que la population ne soit pas mise en danger par cette exposition. Ce ne sont pourtant pas les populations locales, ni les collectivités territoriales, qui décident de l'implantation de sites industriels polluants sur leur territoire. Le principe pollueur-payeur s'oppose, sur le fond, à ce que le coût des mesures de prévention et de réduction de la pollution soit mis à la charge de la personne publique.
Dans ce contexte, quelles mesures spécifiques le Gouvernement envisage-t-il de prendre pour répondre à cette situation critique dans le département du Rhône et dans la Vallée de la chimie ? Comment comptez-vous intensifier les efforts de dépollution et de protection de la population dans ces zones particulièrement touchées ? Enfin, pouvez-vous nous garantir que le principe pollueur-payeur sera appliqué, sur le territoire national, à la lutte contre l'exposition excessive aux Pfas ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la ville et de la citoyenneté.
Je vous communique la réponse, très précise, du ministre de la transition écologique. Les Pfas sont une famille de plusieurs milliers de composés chimiques. Les propriétés de certaines molécules sont bien connues et les connaissances disponibles ont d'ores et déjà abouti à l'application de mesures visant à prévenir certains risques associés à leurs usages. Cependant, les connaissances relatives à l'immense majorité des autres Pfas demeurent parcellaires et incitent, vous avez raison, à accroître le niveau de la vigilance et les actions dans ce domaine.
En juillet 2023, la Première ministre Élisabeth Borne avait missionné le député Cyrille Isaac-Sibille pour établir un diagnostic de la situation des Pfas en France, accompagné de recommandations. Ce dernier a remis son rapport début février ; ses recommandations sont actuellement étudiées par l'ensemble des ministères concernés en vue de compléter, par des actions interministérielles, le plan élaboré en janvier 2023 par le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Afin de répondre à l'objectif de protéger au plus vite la population d'une exposition excessive aux Pfas, il s'agit d'abord de surveiller les émissions, les contaminations de l'environnement et des organismes vivants, ainsi que les impacts d'une telle exposition sur la santé humaine et sur l'environnement. Un arrêté du ministère de la transition écologique du 20 juin 2023 impose déjà la réalisation d'une campagne de mesures des Pfas dans les rejets de nombreux sites industriels dans les eaux. De septembre 2023 à juin 2024, environ 4 000 sites devront analyser leurs rejets, à trois reprises, pour évaluer leur concentration en Pfas.
Il convient ensuite de maîtriser les risques, pour agir à toutes les échelles sur l'ensemble des sources et des milieux. Enfin, il nous faut communiquer de façon transparente afin de donner aux populations concernées les moyens d'agir pour leur santé. La définition de ces actions s'accompagne de l'engagement de travaux interministériels pour identifier des modalités de financement, en mobilisant de façon proportionnée les différents contributeurs. En effet, les sources d'émission de Pfas sont nombreuses et relèvent de secteurs économiques très variés, au-delà de la seule industrie.
La parole est à Mme Charlotte Leduc, pour exposer sa question, n° 614, relative à l'autoroute A31 bis .
Ma question s'adresse au ministre des transports, dont je regrette l'absence. Elle porte sur l'obstination de l'État à soutenir le grand projet inutile et imposé qu'est l'A31 bis, qui vise à relier, dans son tronçon nord, la ville de Metz à la frontière luxembourgeoise. Elle porte également sur le manque de considération auquel se heurtent, à tous les échelons, les acteurs du territoire qui proposent des solutions alternatives.
Comme vous le savez, le lancement de la construction de l'autoroute A31 bis a été confirmé le 15 décembre à Metz par le précédent ministre des transports, Clément Beaune. Ce projet est pourtant inutile, anachronique et injuste. Inutile, car il ne répond pas aux problèmes de congestion des axes de transport du Sillon lorrain ; anachronique, car imaginé dans les années 1990, il va dans le sens inverse de celui que nous impose la lutte contre le réchauffement climatique ; injuste, car il organise le racket des usagers – frontaliers ou non –, qui devront s'acquitter d'un péage pour emprunter le tronçon passant à l'ouest de Thionville et l'autoroute existante, pourtant déjà payée par le contribuable, qui relie Elange et la frontière avec le Luxembourg : un beau cadeau de votre part au futur concessionnaire ! Le montant annoncé de ce péage est un véritable scandale : 4 euros pour un trajet complet entre Metz et Thionville, soit 8 euros l'aller-retour et 160 euros par mois pour les travailleurs frontaliers !
Malgré tout cela, le Gouvernement s'obstine, dans la plus grande hypocrisie, à maintenir ce projet : d'un côté, il se targue d'avoir mis fin à des projets autoroutiers pour des raisons environnementales, mais de l'autre, il maintient des projets tels que ceux de l'A69 ou de l'A31 bis, particulièrement destructeurs pour l'environnement, sans jamais en avoir démontré la nécessité.
En effet, dans le cadre de la concertation publique organisée entre novembre 2022 et février 2023, aucun projet alternatif n'a été étudié et aucun scénario faisant l'hypothèse d'un développement des mobilités douces plus ambitieux que celui déjà programmé n'a été présenté. Seuls des choix concernant les variantes du tracé étaient encore possibles, tous les autres ayant d'emblée été rejetés.
L'autoroute a été considérée, sans aucune preuve, comme absolument nécessaire, mais d'autres solutions existent et l'État les connaît. Le ministère ne peut d'ailleurs pas nier avoir été destinataire des propositions très étayées des usagers du TER – train express régional – Metz-Luxembourg et du collectif Alternatives 31, puisque je les lui ai moi-même envoyées, avant de les remettre en main propre à M. Beaune, puis de les transmettre au préfet de la Moselle dans le cadre du groupe de travail « mobilités » du comité consultatif du codéveloppement France-Luxembourg.
Madame la ministre, pouvez-vous me dire si le ministre délégué chargé des transports expertisera et chiffrera les mesures présentées par les usagers du TER Metz-Luxembourg, notamment leur proposition d'un doublement de la capacité entre Thionville et Bettembourg ? S'appuiera-t-il sur leurs propositions chiffrées pour préparer un scénario alternatif sans autoroute, comme l'ont recommandé les garants de la Commission nationale du débat public ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la ville et de la citoyenneté.
Permettez-moi de vous transmettre la réponse de mon collègue Patrice Vergriete, ministre délégué chargé des transports. L'aménagement de l'autoroute A31 et l'amélioration de l'offre de transports ferroviaires ne sont pas exclusifs l'un de l'autre. Seule une politique de transports multimodale, associant amélioration des conditions de circulation sur l'autoroute A31 et développement de l'offre de transport ferroviaire et fluvial – notamment pour le fret – est à même de répondre aux enjeux des mobilités dans le Sillon lorrain. À titre d'exemple, les places assises en période de pointe passeront de 8 000 aujourd'hui à 22 000 d'ici 2030 dans les TER reliant Metz et le Luxembourg. Ce saut d'offre, qui se traduira dès cette année par la mise en circulation de trains de plus grande capacité, est rendu possible par les investissements conjoints de la France et du Luxembourg. Au total, ce sont 460 millions d'euros qui soutiendront les mobilités alternatives à la voiture individuelle, dont 440 millions d'euros dédiés au transport ferroviaire.
Présentées lors de la dernière concertation portant sur l'autoroute A31 bis, des études de trafic confirment que même des objectifs très ambitieux de développement de l'offre ferroviaire ne permettraient pas un report modal suffisant pour décongestionner l'autoroute A31. Pendant cette concertation, ses usagers ont d'ailleurs été nombreux à signaler la saturation de l'axe reliant Thionville et la frontière luxembourgeoise. L'aménagement d'une autoroute A31 bis devrait améliorer les conditions de circulation, grâce à l'élargissement d'infrastructures existantes. La section en tracé neuf, contournant Thionville, sera en partie réalisée en tunnel, ce qui limitera les nuisances pour les riverains. En outre, la mise en concession est une condition nécessaire pour garantir le financement et accélérer le lancement des travaux. Enfin, le projet offre la possibilité de développer les transports en commun, grâce à une voie de circulation dédiée, et le covoiturage, mais également de mettre aux dernières normes environnementales les structures existantes.
Ces mesures sont détaillées dans la décision ministérielle du 5 janvier 2024, prise à l'issue de la concertation que j'évoquais.
Ah non, moi je ne fais rien !
Je vous dis que des propositions très détaillées, formulées notamment par l'Association des voyageurs du TER Metz-Luxembourg, n'ont été ni chiffrées ni expertisées. Ainsi, aucune étude ne plaide en faveur d'un projet qui ne reposerait pas sur l'aménagement d'une nouvelle autoroute, puisqu'aucune solution alternative à une autoroute nouvelle n'a été véritablement étudiée. La réponse de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal) à l'Association des voyageurs est plus que lapidaire et c'est une preuve de mépris vis-à-vis de son travail de documentation.
Des solutions alternatives doivent être étudiées et le financement du transport ferroviaire doit progresser ; d'autres enjeux, comme le fret ferroviaire, le covoiturage, le transport collectif, le télétravail et la relocalisation de l'emploi doivent être pris en compte. L'État craint-il qu'on découvre que ces scénarios alternatifs sont crédibles ou ne prête-t-il aucun intérêt aux solutions qui n'engraissent pas les sociétés autoroutières ?
La parole est à Mme Florence Lasserre, pour exposer sa question, n° 605, relative au RER basco-landais.
Elle porte sur les suites de la loi relative aux services express régionaux métropolitains (SERM), votée par cette assemblée l'an passé. Au-delà des avancées qu'elle a permises, elle constitue surtout une occasion unique, pour les collectivités territoriales qui le souhaitent, de développer un réseau de transport ambitieux et diversifié pour répondre aux enjeux du XXI
Le Pays basque exerce en effet un attrait important, dont découlent une forte croissance démographique et une pression touristique grandissante, autant de raisons de repenser les déplacements quotidiens de ses habitants et de ses visiteurs. L'ensemble des acteurs locaux – collectivités territoriales et Syndicat des Mobilités du Pays basque-Adour – sont donc prêts à s'engager dans la voie tracée par la loi, comme en témoignent la délibération prise par ledit syndicat le 10 décembre dernier et celle adoptée par le conseil régional de Nouvelle-Aquitaine les 11 et 12 décembre 2023.
La réalisation de ce projet constituerait une grande innovation, car le premier SERM non métropolitain verrait le jour. Il trouverait naturellement sa cohérence et son utilité dans la conurbation formée autour du Pays basque, de la frontière espagnole à la côte landaise. Madame la ministre, je me fais le relai des élus de mon territoire pour vous transmettre le souhait qu'il reçoive le soutien de l'État afin que soit lancé ce grand projet d'utilité publique. Quelle assurance pouvez-vous nous apporter à cette heure et quels engagements l'État peut-il prendre vis-à-vis des habitants du Pays basque, qui sont nombreux à attendre sa mise en œuvre ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la ville et de la citoyenneté.
Madame la députée, je vous réponds au nom du ministre délégué chargé des transports, Patrice Vergriete. Le déploiement des services express régionaux métropolitains compte parmi les objectifs prioritaires de l'État. Ils offriront à nos concitoyens des solutions adaptées aux enjeux de la transition écologique.
La promulgation de la loi relative aux SERM le 27 décembre a marqué une étape très importante. Il appartient désormais aux territoires de définir les projets de service « tous modes » qu'ils souhaitent mettre en place pour répondre aux défis qui s'imposent à eux en matière de mobilité et d'aménagement. Cette réponse implique de travailler sur la complémentarité entre offres de services et – ensuite seulement – d'identifier les opérations d'infrastructures à réaliser pour répondre à cette ambition de service.
Dans ce cadre, la coordination qui s'esquisse entre la région – compétente pour l'organisation des services ferroviaires et routiers interurbains – et les collectivités est primordiale, afin de traduire cette ambition commune. Le statut de SERM, tel que défini par la loi, sera accordé une fois que la pertinence du service projeté aura été démontrée au regard des besoins de déplacements constatés et prévus et que les stratégies de maîtrise de l'urbanisation auront été définies. L'État pourra accompagner les collectivités dans la définition du projet, sachant que les modalités et le montant de son soutien financier seront prévus dans le contrat de plan État-région (CPER) 2023-2027 de la région Nouvelle-Aquitaine, lequel est toujours en négociation.
Pour que le projet obtienne le statut de SERM, son plan de financement devra être pérenne et formalisé et sa gouvernance efficiente. La dynamique actuellement à l'œuvre dans le Pays basque est cependant très positive et l'État l'accompagnera. Le ministre délégué chargé des transports aura d'ailleurs l'occasion de préciser dans les semaines à venir le calendrier de la suite de la démarche engagée.
La parole est à M. Hubert Ott, pour exposer sa question, n° 606, relative à l'entretien des sentiers pédestres.
Madame la ministre, je souhaite appeler votre attention sur le droit d'accès à la nature et le rôle essentiel des associations qui contribuent à l'encadrer et à le garantir. Le Haut-Rhin, que j'ai l'honneur de représenter, est l'une des portes d'entrée du massif des Vosges, dont l'attrait, tout comme la fréquentation, va croissant année après année. Les usages se développent, évoluent, se transforment et les pouvoirs publics doivent y répondre, pour encadrer, sécuriser, prévenir des accidents et garantir la préservation de l'environnement.
Le massif des Vosges bénéficie d'un acteur essentiel et exceptionnel, engagé depuis 1872 dans toutes les missions que j'évoque. Je veux évidemment parler du Club Vosgien, qui y rassemble pas moins de 130 sections locales, associatives, et des centaines de bénévoles qui œuvrent depuis 150 ans au balisage et à l'entretien de plus de 20 000 kilomètres d'itinéraires, qui gèrent des chalets, des refuges et des abris pour les randonneurs, dans le respect de la nature et des paysages.
Je tiens aujourd'hui à rendre hommage à chacune et chacun d'entre eux : l'engagement de ces bénévoles est en effet essentiel et permet de décharger les pouvoirs publics : nos communes, d'un travail titanesque ; nos collectivités territoriales, d'un coût important. Pour des questions de sécurité, leur fine connaissance du territoire est également très précieuse, notamment dans le cadre de la prévention et de la lutte contre les feux de forêt. Les cartes qu'ils éditent sont aujourd'hui un patrimoine dont la valeur est inestimable.
Pour ces raisons, je me dois d'attirer votre attention sur les préoccupations des responsables locaux du Club Vosgien, notamment au sujet de la sécurité des refuges ou du règlement de diverses taxes. Ces derniers peinent toujours plus à faire face à leurs obligations réglementaires, alors même que nous avons plus que jamais besoin d'eux.
Lorsqu'un sentier entretenu et balisé par ces associations traverse une propriété privée, une autre difficulté majeure se pose. La loi du 2 février 2023 visant à limiter l'engrillagement des espaces naturels et à protéger la propriété privée crée en effet une contravention en cas de pénétration sans autorisation dans une propriété privée rurale ou forestière. Alors que la Charte de l'environnement nous rappelle que « l'environnement est le patrimoine commun des êtres humains », la fermeture de sentiers parfois centenaires ne peut être acceptée.
Aussi souhaité-je savoir, madame la ministre, si le Gouvernement est disposé à faire évoluer la loi du 2 février 2023 afin de garantir que tout sentier entretenu et balisé par une association reconnue d'utilité publique, comme l'est le Club Vosgien, puisse rester accessible, même lorsqu'il traverse une propriété privée. Je vous invite également à présenter les mesures concrètes qui pourront être mises en œuvre afin d'accompagner toutes ces associations, qu'elles soient ou non installées dans le massif des Vosges, et de garantir ainsi le droit d'accès à la nature des Français.
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la ville et de la citoyenneté.
Je vous transmets la réponse du ministre de la transition écologique, qui est bien conscient du problème. Les associations dont vous venez de parler, en particulier le Club Vosgien, jouent un rôle central en entretenant les sentiers de randonnée de nos territoires. Ce faisant, elles contribuent à leur attractivité touristique et facilitent l'accès à la nature de nos concitoyens.
Je tiens à rappeler que de nombreux accès aux espaces naturels sont déjà ouverts au public, notamment les forêts publiques et le sentier du littoral. L'ouverture au public des aires protégées, et plus spécifiquement de tous les parcs nationaux et réserves naturelles, est l'un des objectifs de la stratégie nationale pour la biodiversité 2030 (SNB). La loi du 2 février 2023 prévoit que « dans le cas où le caractère privé du lieu est matérialisé physiquement, pénétrer sans autorisation dans la propriété privée rurale ou forestière d'autrui, sauf les cas où la loi le permet, constitue une contravention de la 4
Avant l'adoption de cette loi, un propriétaire pouvait déjà s'opposer à la traversée de sa propriété par un sentier de randonnée au moment de la création de ce dernier. Cette opposition est désormais renforcée, puisque la loi punit l'intrusion d'une amende.
La situation n'a donc pas changé et les associations œuvrant au développement et à l'entretien des sentiers de randonnée de nos territoires peuvent poursuivre leur action, sous réserve de s'assurer préalablement, comme elles le faisaient déjà, de l'accord des propriétaires chez qui passent les sentiers à entretenir. Les plans départementaux des itinéraires de promenade et de randonnée (PDIPR) contribuent à l'objectif de structuration des chemins de randonnée, en lien avec les différents propriétaires concernés.
La parole est à Mme Naïma Moutchou, pour exposer sa question, n° 611, relative aux nuisances aériennes.
Je souhaite vous interroger sur la question majeure des nuisances aériennes et de leurs effets en matière de pollution de l'air et de bruit, à la fois sur l'environnement et la santé publique.
Les enjeux sont désormais largement documentés et montrent combien les dégâts sont considérables sur le cadre de vie et le climat, mais également sur l'état physique et psychique de ceux qui sont, au quotidien, jour et nuit, confrontés aux nuisances aériennes. Elles créent du stress, de l'anxiété, et entraînent des troubles du sommeil, des problèmes de tension, des maladies cardiovasculaires, etc.
Certaines habitations aux alentours de l'aéroport de Paris-Charles de Gaulle, situé dans ma circonscription, sont survolées chaque jour par 450 avions. Les habitants du Val-d'Oise et de la région Île-de-France exposés à ces nuisances peuvent perdre jusqu'à trois années d'espérance de vie en bonne santé. À l'échelle nationale, ce sont désormais plusieurs millions de Français, riverains des aéroports, qui subissent ces préjudices.
Je propose d'agir efficacement, notamment en examinant la proposition de loi visant à protéger la santé des populations et l'environnement contre les nuisances aériennes que j'ai déposée. Ce texte vise à favoriser l'essor d'une aviation plus durable et mieux contrôlée. Je ne fais pas partie de ceux qui voudraient bannir les avions de nos vies : l'aéronautique française est un fleuron de notre industrie, un puissant moteur de développement pour les territoires, notamment dans ma circonscription, ce dont je me réjouis.
Néanmoins, je suis convaincue que cela n'empêche pas de poser les conditions d'un nouvel équilibre entre le développement durable, la sécurité sanitaire et la prospérité économique. Je crois profondément à cette nouvelle approche du transport aérien que je propose.
L'Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires (Acnusa), qui est une autorité indépendante, a qualifié la proposition de loi de « base solide pour un travail transpartisan du Parlement qui devrait être encouragée par le Gouvernement ». Le texte prévoit notamment d'instaurer un couvre-feu à l'aéroport de Paris-Charles de Gaulle entre vingt-trois heures et six heures ; de plafonner le nombre de mouvements annuels à 440 000 ; de contraindre les compagnies aériennes et les contrôleurs aériens à respecter les procédures de vol et les trajectoires permettant de limiter les nuisances aériennes – ce qui n'est pas le cas aujourd'hui ; de donner davantage de pouvoirs de contrôle et de compétences à l'Acnusa ; de promouvoir la décarbonation du secteur de l'aviation ; enfin, d'inciter les compagnies à renouveler leurs flottes au profit d'avions moins bruyants et moins polluants.
Le Gouvernement est-il prêt à travailler avec moi et tous les députés engagés sur cette question afin de prendre, sur le fondement de ce texte, des mesures efficaces de réduction des nuisances aériennes ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la ville et de la citoyenneté.
Dans mon ancienne vie, j'étais membre du conseil d'administration de l'aéroport Marseille Provence. Je connais donc parfaitement ce sujet, qui concerne tout le territoire, voire le monde entier. Je vais m'efforcer de vous apporter une réponse très précise.
Je vous remercie d'appeler mon attention sur la protection des habitants exposés aux nuisances aériennes et les effets de celles-ci sur la santé publique.
Je suis d'accord avec vous, il est important de définir des mesures concrètes permettant de protéger les riverains des aéroports tout en favorisant l'essor d'un transport aérien durable. Au regard du droit européen, instaurer un plafonnement ou un couvre-feu à l'aéroport de Paris-Charles de Gaulle revient à établir de nouvelles restrictions d'exploitation liées au bruit.
Or l'instauration de toute mesure de restriction du bruit doit être précédée d'une étude d'impact relative à l'aéroport concerné, dans le cadre d'une approche équilibrée. Celle-ci consiste à définir et à évaluer de nouvelles mesures permettant de réduire les nuisances sonores de manière proportionnée à leurs effets socio-économiques. Peuvent ainsi être étudiées des mesures relatives aux performances acoustiques exigées pour pouvoir opérer sur l'aéroport concerné, ou incitant les compagnies aériennes desservant l'aéroport à renouveler leurs flottes avec des avions moins bruyants, ainsi que des mesures de limitation du nombre de mouvements ou de couvre-feu. À l'issue de cette étude, le ministre chargé de l'aviation civile et le ministre chargé de l'environnement peuvent imposer des restrictions d'exploitation s'appliquant à l'aéroport concerné. Je tiens à vous confirmer qu'une telle étude d'impact est en cours à Paris-Charles de Gaulle, sous l'autorité du préfet du Val-d'Oise.
Le Gouvernement étudie par ailleurs des mesures de modernisation de la procédure de sanction mise en œuvre par l'Acnusa, comme toute initiative parlementaire visant à rendre plus efficaces les politiques publiques de maîtrise des nuisances aériennes. Attaché aux politiques publiques de lutte contre les nuisances sonores et de décarbonation du secteur aérien, il est prêt à travailler avec l'ensemble des parlementaires engagés en faveur de la réduction des nuisances environnementales.
Je vous remercie de votre réponse. Néanmoins, je ne suis pas satisfaite. Bien que je défende cette nécessité depuis 2017, je ne constate aucune amélioration significative de la situation pour nos concitoyens.
La transition écologique concerne tous les secteurs, y compris le secteur aérien. Des solutions existent ; elles ne sont pas appliquées. Je le redis, je suis persuadée que la sécurité sanitaire et la protection de l'environnement ne sont pas incompatibles avec la prospérité économique et l'emploi dans les territoires concernés.
Nous devons absolument nous saisir de cette question et débattre du texte transpartisan que j'ai déposé, afin de déterminer, avec l'ensemble des députés, la manière dont nous pourrions avancer. Il faut que nous soyons à la hauteur des défis pour nos concitoyens.
La parole est à Mme Emeline K/Bidi, pour exposer sa question, n° 610, relative à la situation du logement à La Réunion.
Je souhaite vous interpeller sur la situation du logement à La Réunion, en particulier le logement social, qui connaît une crise sans précédent. Les livraisons de logements sociaux n'ont cessé de diminuer d'année en année. En un peu moins de dix ans, nous avons assisté à une chute vertigineuse du nombre de livraisons : en 2014, 3 386 logements ont été livrés ; en 2023, seulement 1 613.
Ce chiffre, que vous connaissez, est historiquement bas, alors que le nombre de demandeurs de logement social est inversement proportionnel. Chaque année, il augmente en moyenne de 9 %. Au 31 décembre 2023, on dénombrait 44 600 demandeurs de logement social à La Réunion. Ce chiffre est astronomique. Par ailleurs, il existe des disparités territoriales. Dans le Sud de l'île, où je suis élue, la demande progresse encore davantage : entre 2022 et 2023, le nombre de demandeurs de logement social y a augmenté d'un peu plus de 15 %. Or, en moyenne, seules 16 % de ces demandes parviennent à être satisfaites sur l'ensemble de l'île. Dans le Sud, 11 % des demandeurs de logement ont obtenu satisfaction ; les autres attendent toujours.
Les conséquences sont désastreuses. Les logements sont suroccupés, il n'y a pas de décohabitation : les parents, les enfants, les grands-parents habitent sous le même toit et rencontrent des difficultés sociales que vous connaissez également. En outre, le nombre de familles à la rue augmente. Heureusement, La Réunion est un territoire solidaire où les valeurs de la famille sont encore fortes. Néanmoins, étant donné le nombre de demandeurs – plus de 44 000 –, les valeurs familiales sont insuffisantes pour résoudre le problème du logement social.
Il y a également une incohérence à La Réunion. Ce département occupe la troisième place des départements où le prix du logement social est le plus élevé, alors que 36 % de sa population vit au-dessous du seuil de pauvreté. On s'attendrait plutôt à ce que les prix soient bas. La responsabilité de ce bilan désastreux est partagée, mais l'État a une part de responsabilité. Je pense notamment à la recentralisation dans le domaine du logement social. En effet, CDC Habitat, filiale de la Caisse des dépôts – CDC –, qui est elle-même une émanation de l'État, a mis la main sur les différents bailleurs sociaux, notamment la Sodiac – Société dionysienne d'aménagement et de construction –, la SIDR – Société immobilière du département de La Réunion –, la Semader – Société d'économie mixte d'aménagement, de développement et d'équipement de La Réunion –, et, plus récemment, la Semac – Société d'économie mixte d'aménagement et de construction.
On aurait pu penser que cela allait améliorer la situation. Or c'est tout le contraire : lorsque les collectivités avaient la main sur les bailleurs sociaux, on construisait plus de logements sociaux à La Réunion. Pourtant, certains avaient alerté sur le risque de recentralisation : à La Réunion, on connaît bien les situations de monopole et d'oligopole ; elles n'ont jamais rien apporté de bon. En définitive, deux grands bailleurs se partagent le marché du logement social, qui n'a jamais été autant en difficulté.
Eu égard à sa position privilégiée vis-à-vis de CDC Habitat, l'État compte-t-il demander des comptes à CDC Habitat et aux bailleurs et les contrôler, afin que l'on sache pour quelle raison les logements sociaux ne sortent plus de terre à La Réunion ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la ville et de la citoyenneté.
Permettez-moi de vous donner la réponse de mon collègue Guillaume Kasbarian, ministre délégué chargé du logement. Dans la continuité du plan Logement outre-mer – Plom – 2019-2023, un nouveau plan Logement outre-mer portant sur la période 2024-2027 est en préparation pour répondre aux défis de la politique du logement dans les territoires ultramarins.
Ce plan s'articulera autour de deux axes. Le premier axe, territorial, sera défini par les préfets des départements et régions d'outre-mer, en fonction des besoins propres de chaque territoire. Le Plom territorial vise à élaborer une stratégie et à définir pour les quatre prochaines années, dans chaque territoire, les priorités d'action en matière de logement au regard de ses enjeux spécifiques : construction et réhabilitation des logements locatifs, qu'il s'agisse du parc public ou du parc privé ; accession sociale ; adaptation aux évolutions du climat et au vieillissement de la population ; construction de structures d'hébergement ou de logements accompagnés pour les personnes âgées, jeunes, étudiants et publics précaires. Ces actions visent au développement et à l'utilisation des matériaux de construction locaux.
À La Réunion, des séminaires sont actuellement organisés avec l'ensemble des acteurs. À cet égard, la convention rénovée conclue entre le conseil départemental et l'État à la suite du comité interministériel des outre-mer – Ciom – nourrit de façon positive les travaux relatifs au logement des personnes vulnérables.
Le second axe, dit transversal, intègre les mesures arbitrées dans le cadre du Ciom par le Premier ministre. Il vise à simplifier les actions menées par les acteurs territoriaux, au premier rang desquels les élus du territoire, en leur fournissant les outils nécessaires, en levant les obstacles identifiés et en apportant le soutien des administrations centrales.
C'est grâce à cette mobilisation collective autour du futur plan Logement outre-mer que nous parviendrons à faire face aux enjeux du logement dans ces territoires, en particulier à La Réunion.
Dans ce plan, il faudra prévoir le contrôle de CDC Habitat et des bailleurs sociaux.
Je l'ai noté.
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Discussion de la proposition de résolution européenne relative à l'adoption d'une loi européenne sur l'espace ;
Discussion de la proposition de loi visant à allonger la durée de l'ordonnance de protection et à créer l'ordonnance provisoire de protection immédiate ;
Discussion de la proposition de loi visant à renforcer la réponse pénale contre les infractions à caractère raciste ou antisémite.
La séance est levée.
La séance est levée à midi.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra