La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.
(Mme Isabelle Rauch, présidente)
La commission auditionne, réunis en table ronde, les responsables des sociétés et établissement concernés par la réforme du financement de l'audiovisuel public.
Mes chers collègues, j'ai le plaisir d'accueillir, en votre nom à tous, les dirigeants et représentants des sociétés et établissement de l'audiovisuel public. Alors que les délais sont particulièrement contraints et que notre Assemblée et ses organes viennent à peine d'être renouvelés, je remercie nos invités d'avoir su se rendre immédiatement disponibles ou de s'être fait représenter. Je crois néanmoins savoir que Monsieur Bruno Patino et Madame Marie-Christine Saragosse devront nous quitter respectivement à dix heures trente et à onze heures, mais leurs proches collaborateurs sauront prendre le relais sans difficulté pour répondre à vos questions.
Il m'a semblé indispensable d'organiser rapidement cette table ronde, compte tenu de la réforme du financement de l'audiovisuel public prévue dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2022. Je rappelle que notre commission s'est saisie pour avis de l'article 1er de ce texte, qui porte suppression de la contribution à l'audiovisuel public (CAP). Il s'agit d'un tournant majeur pour le secteur comme pour les redevables de la CAP, car force est de constater que la redevance audiovisuelle, pour reprendre son ancienne dénomination, est l'une des contributions les mieux identifiées par les Français, qu'ils se réjouissent ou qu'ils déplorent de s'en acquitter.
Nos échanges se dérouleront de la manière suivante. J'inviterai successivement chacun des responsables concernés à exposer sa position vis-à-vis de la réforme et des conséquences de celle-ci pour sa société ou son établissement. Afin de favoriser les échanges avec les députés présents, je demande à chaque intervenant de bien vouloir limiter son propos liminaire à dix minutes maximum, étant entendu qu'intervention plus courte ne posera pas de problème !
Je donnerai ensuite la parole à Madame Céline Calvez, notre rapporteure sur l'article 1er du PLFR, pour une durée de deux minutes, puis aux orateurs des groupes. Nos invités répondront à cette première série de questions, avant de passer aux autres interventions.
Afin de ne pas monopoliser la parole, je n'aurai pour ma part qu'une interrogation d'ordre très général, sur un point que vous alliez fatalement aborder : au-delà des ressources que vous tirez de la CAP, quelles sont vos autres sources de financement et quelle part représentent ces recettes dans vos ressources totales ? Je pense notamment, pour certains d'entre vous, aux recettes publicitaires.
Je vais maintenant céder la parole à nos invités, en leur proposant d'intervenir dans l'ordre suivant : Madame Delphine Ernotte Cunci, présidente-directrice générale de France Télévisions ; Monsieur Bruno Patino, président d'ARTE France, Madame Sibyle Veil, présidente-directrice générale de Radio France ; Madame Marie-Christine Saragosse, présidente-directrice générale de France Médias Monde ; Monsieur Laurent Vallet, président-directeur général de l'Institut national de l'audiovisuel (INA) ; Monsieur Thomas Derobe, secrétaire général de TV5 Monde, représentant Monsieur Yves Bigot, son président-directeur général.
Le débat qui s'ouvre est majeur, et je sais qu'en tant que membres de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, vous y êtes très sensibles. Dans une société parfois fracturée entre territoires et entre générations, le service public remplit des missions essentielles pour relier les citoyens. Face au dérèglement médiatique, nous sommes la première source d'information des Français, et celle à laquelle ils accordent le plus leur confiance. Puisqu'il est question du pouvoir d'achat, le service public représente aussi la première porte universelle et gratuite d'accès à la connaissance, à la culture et au sport. Depuis le début de l'année, 60 % des Français disent sacrifier leurs dépenses dans les achats de biens et de produits culturels, et 50 % des Français ne sont pas allés au cinéma l'année dernière.
Le service public est un patrimoine commun des Français. Il permet à tous, quel que soit son lieu de vie et quels que soient ses revenus, de se rendre au théâtre, à un concert, ou de découvrir un livre. Chaque mois, un Français sur cinq entre dans une salle de spectacle via nos antennes. Sans le service public, cette offre gratuite, populaire et accessible à tous n'existerait tout simplement pas.
Le débat qui s'ouvre vise à modifier en profondeur le financement de l'audiovisuel public, à en définir les futures fondations, et, par incidence, notre raison d'être et notre indépendance. À cet égard, il me paraît important de partager avec vous une perspective européenne. Il se trouve que je suis également présidente de l'Union européenne de radio-télévision, dont les membres échangent régulièrement sur ce sujet.
Trois modèles de financement existent en Europe. Le premier modèle est celui des médias publics financés par une redevance. Il est adopté par l'Allemagne, le Royaume-Uni, l'Italie, et, jusqu'à aujourd'hui, la France. La redevance représente 60 % du financement des médias publics, car toutes les grandes puissances audiovisuelles du continent ont choisi cette option.
Le deuxième modèle est celui des pays scandinaves, qui ont opté pour une contribution universelle proportionnelle aux revenus, laquelle finance leurs médias publics, le plus souvent via un mécanisme distinct du budget de l'État.
Le troisième modèle est celui des médias publics directement financés par le budget de l'État. Ce modèle représente environ 14 % du financement des médias publics en Europe. Il est notamment adopté en Europe de l'Est, en Espagne et au Danemark. Cette troisième voie, qui est donc proposée en France, est celle qui appelle le plus de vigilance. L'Espagne a choisi la budgétisation en 2010. En douze ans, le financement de la télévision publique espagnole a baissé de plus de 25 %, et de près de 40 % en tenant compte de l'inflation. Sans surprise, la place de la télévision publique espagnole dans le paysage médiatique s'est effondrée. Celle-ci touche aujourd'hui 40 % d'Espagnols de moins chaque semaine qu'il y a dix ans, ce qui démontre une stricte corrélation entre la baisse du budget et la baisse d'audience. Il en est allé de même au Danemark.
Ce débat intervient alors que la Commission européenne s'apprête à porter le Media Freedom Act, un texte important qui devrait rappeler l'importance de médias publics indépendants et bien financés en Europe. La France, troisième puissance audiovisuelle européenne derrière la BBC et les ARD-ZDF allemandes, doit rester un modèle en la matière.
Partant de ce constat, le chemin de la budgétisation doit s'accompagner de deux corollaires nécessaires et indispensables : d'une part, des garanties très fortes d'indépendance vis-à-vis du pouvoir politique, condition de notre indépendance éditoriale en matière d'information ; d'autre part, un financement pérenne et une visibilité nous permettant d'assurer nos missions à l'avenir. Cette indépendance est au cœur du pacte de confiance entre les citoyens et leurs services publics. Cette indépendance ne peut être garantie que si trois conditions sont remplies.
Tout d'abord, une garantie de ressources est indispensable, ce qui suppose une protection contre les régulations infra-annuelles effectuées au gré de décisions politiques ou budgétaires. C'est ce que semble prévoir le texte dans son article 1er, en mentionnant un versement intégral des fonds dès le début de l'année. Des garanties supplémentaires devraient toutefois être apportées.
La deuxième condition est la prévisibilité de nos ressources, c'est-à-dire une trajectoire pluriannuelle pour l'audiovisuel public. Ailleurs en Europe, la BBC négocie actuellement sa trajectoire budgétaire au-delà de 2027, car celle-ci est déjà assurée jusqu'à cette date. En effet, nous sommes des entreprises qui engageons des investissements sur le temps long. Un choix de série à réaliser ou de droits sportifs à acquérir effectué aujourd'hui affectera notre résultat dans les années à venir.
La troisième condition est le dynamisme des ressources, qui prend tout son sens dans le contexte d'inflation.
Ces deux dernières conditions, pourtant centrales, sont absentes de la réforme soumise à votre examen. Or, France Télévisions arrive au bout d'un cycle. En 2018, un cap stratégique a été fixé par le Premier ministre Édouard Philippe après six mois d'intenses discussions dans le cadre de Cap 2022, qui arrive à son terme fin décembre. Cap 2022 visait à renforcer nos missions autour de trois axes. Le premier était le numérique, sur lequel nous avons doublé nos investissements en quatre ans. France Info, qui est notre œuvre commune, est devenue la plateforme d'actualité la plus visitée en France. France.tv rassemble déjà plus de 23 millions de visiteurs uniques chaque mois, et nous souhaitons en faire la première plateforme gratuite de France. Dans un second temps, Cap 2022 souhaitait consolider la proximité de notre service autour de France 3, qui a considérablement renforcé son empreinte locale. Cette dernière sera encore consolidée l'année prochaine par le lancement de vingt-quatre éditions d'information lancées uniquement depuis les régions. Cap 2022, enfin, visait le renforcement de la connaissance et la culture. En témoigne le lancement de la chaîne Culture Box.
Dans le même temps, nos liens avec les publics se sont renforcés. Cette saison, les audiences de France Télévisions sont au plus haut depuis dix ans. Ces transformations ont été réalisées dans un cadre budgétaire extrêmement contraint, puisqu'entre 2018 et 2022, nos crédits ont diminué de 160 millions d'euros. Cela représente en réalité – puisqu'il fallait investir sur le numérique et que l'inflation, même modérée, doit être prise en compte – un effort de plus de 400 millions d'euros, en incluant l'évolution naturelle de nos charges.
Aujourd'hui, France Télévisions coûte à la collectivité nationale 500 millions d'euros en moins qu'en 2010 en euros courants. Notre périmètre et nos missions se sont élargis sur cette même période, ce qui signifie que des efforts massifs ont été réalisés pour conserver les comptes à l'équilibre, comme tel est le cas depuis 2015. En cinq ans, France Télévisions a perdu 850 salariés, soit environ 10 % de nos effectifs. L'entreprise est en plan social depuis plus de dix ans. Je ne connais pas d'autre entreprise ou administration de la sphère publique qui ait réalisé un effort aussi important que celui fourni par nos salariés, auxquels je rends hommage. Notre plan de départs volontaires négocié en 2019 avec les organisations syndicales arrive à son terme à la fin de l'année 2022. Nous avons réalisé 15 % d'économies sur notre programme national ces cinq dernières années, alors même que nous faisons face à des géants américains qui consacrent chaque année des milliards de dollars à leurs contenus. Il me semble difficile, sinon impossible, de faire davantage, à moins d'une vaste réflexion sur notre périmètre ou notre organisation commune.
En 2024, nous serons le diffuseur des Jeux olympiques de Paris, le plus grand événement organisé sur le territoire national depuis des décennies. Nous avons une très grande ambition pour préparer durant deux ans ces Jeux de Paris 2024, que nous souhaiterions transformer en « France 2024 ».
Nous sommes enfin au cœur du secteur florissant que constituent les industries culturelles. À elle seule, France Télévisions supporte 50 % des investissements en création en France. Nous soutenons des filières d'excellence dans les séries, le documentaire, l'animation, ou le cinéma. Je souhaiterais que l'audiovisuel public ne soit plus considéré comme un simple centre de coûts : en effet, notre activité génère 60 000 emplois directs et indirects dans tous les territoires.
Dans son rapport annuel intitulé « Démocratie », l'Union des médias publics européens, démontre par des corrélations scientifiques qu'en Europe, là où les services publics audiovisuels sont puissants, indépendants et bien financés, la démocratie, le débat public et la confiance dans les médias et les institutions se portent mieux. J'espère que les débats à venir seront l'occasion de conforter cette place du service public audiovisuel en France.
N'ayant que des points d'accord avec Madame Ernotte, je me contenterai d'y apporter l'éclairage spécifique d'Arte. Arte fête cette année ses trente ans, qui marquent aussi l'anniversaire du traité interétatique qui forme son cadre juridique, puisqu'Arte a été créée par la volonté de deux États, la France et l'Allemagne. Arte échappe ainsi à la régulation de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM), tout en respectant les règles qui en proviennent.
À sa fondation, le but d'Arte était de contribuer au rapprochement des peuples européens par la culture. Cette ambition est révélatrice de la tâche du service public audiovisuel, qui consiste notamment à transformer le public en citoyens. Ce rôle est trop souvent oublié lorsque les modes de financement de l'audiovisuel public sont évoqués. En trente ans, nous avons démontré que nous sommes un outil de démocratisation culturelle et de création artistique, notamment auprès des jeunes créateurs. Cependant, notamment parce que nous échappons aux contraintes de marché, nous avons également su devenir un outil d'innovation technologique. Je combats très fortement l'idée d'une désuétude du service public. Arte a par exemple organisé un concert dans le métavers, la chaîne est présente sur Twitch, et nous avons créé le replay en France. Cette innovation est aussi éditoriale, car les podcasts ont été lancés en 2002 sur Arte en France.
Ces dernières années, Arte a suivi une stratégie en trois points : « l'éclectisation », la plateformisation et l'européanisation. Aujourd'hui, comme France Télévisions, nous arrivons à la fin d'une forme de cycle. Nos audiences sont plus élevées que jamais. En dix ans, l'audience de la chaîne a doublé, tandis que l'audience numérique a progressé de 4 000 %. Il semble ainsi qu'Arte n'a jamais été autant regardé et partagé, notamment par les plus jeunes. Néanmoins, le tarissement des ressources commence à se faire ressentir. Les ressources d'Arte France ont connu une croissance permanente de sa création en 1992 à 2018, date à laquelle elles ont entamé une diminution.
Arte est une société franco-allemande. Arte France et Arte Allemagne sont rassemblées au sein du groupement européen d'intérêt économique (GEIE) à Strasbourg, que je préside. Notre partenaire allemand exprime une très forte incompréhension face à la réforme du financement de l'audiovisuel public en France.
En effet, en Allemagne, les besoins de financement de l'audiovisuel public sont élaborés par une commission indépendante, la Kommission zur Überprüfung und Ermittlung des Finanzbedarfs der Rundfunkanstalten (KEF). La KEF est nommée par de nombreuses autorités allemandes, mais pas par l'État fédéral. Elle évalue les besoins des différentes sociétés de l'audiovisuel public, conformément à la loi votée par les Länder. La KEF établit ensuite un financement pluriannuel voté par les Länder. Ce vote constitue une compétence liée. Ainsi, lorsqu'un Land a décidé de ne pas voter les recommandations de la KEF l'année dernière, le tribunal constitutionnel de Karlsruhe a rendu un avis en juillet 2021 rappelant que l'indépendance de l'audiovisuel public contraignait les Länder à voter les ressources telles qu'établies par la KEF. Les besoins établis sont pluriannuels et s'étalent sur quatre ans. Aucune variabilité n'est possible sur cette période, sauf dans le cas d'un choc économique considérable poussant l'unanimité des Länder à réviser la proposition de la KEF. L'Allemagne est par conséquent très inquiète d'une budgétisation de l'audiovisuel public français, qui s'accompagnerait d'une absence de garanties.
De plus, l'inquiétude de l'Allemagne concerne la visibilité. Nous discuterons avec le partenaire allemand et la KEF des besoins de financement pour la période 2025-2027 dès le mois de septembre. Ainsi, l'Allemagne comprend mal le manque de cadre et de visibilité indicative du financement pluriannuel qui commence en 2023, puisque nos contrats d'objectifs et de moyens (COM) arrivent à terme en décembre 2022.
Enfin, l'Allemagne a décidé d'augmenter l'équivalent de sa redevance il y a deux ans. Elle s'y élève à 18,36 euros par mois par foyer, soit 221 euros annuels. Dans sa délibération de juillet 2021, le tribunal de Karlsruhe a rappelé que le financement de l'audiovisuel public n'avait jamais été aussi nécessaire, en raison du caractère indispensable de ses missions. Trois motifs ont été invoqués par le tribunal de Karlsruhe : la multiplication des fausses informations et des campagnes de désinformation, la fragmentation du débat public, rendant nécessaire la présence de tiers de confiance, et enfin la fragmentation sociale, fragilisant l'accès des populations à la culture du fait de l'apparition d'offres payantes.
L'idée que l'audiovisuel public n'a pas fourni d'effort ces derniers temps est complètement fausse, comme l'a rappelé Madame Ernotte. En dix ans, Arte France a diminué de 25 % ses frais généraux. Ces économies ont été dévolues aux programmes, qui ont bénéficié de 33 % d'augmentation, afin de rendre nos contenus accessibles à tous. La masse salariale d'Arte en euros courants est la même en 2020 qu'en 2013, tandis que notre périmètre a explosé. Le service public est en outre performant, comme le montrent les nombreux prix décernés à nos programmes. La réforme qui est en jeu montrera ainsi si l'instrument de démocratie qu'il représente est pris au sérieux.
Tous les acteurs réunis savent que les années à venir verront se dérouler des débats, dans l'enceinte de l'Assemblée nationale, du Sénat, mais également au sein des médias. Vous pouvez être certains que sur nos antennes, ce débat aura lieu de manière sereine, pluraliste et indépendante. Ces valeurs nouent le contrat de confiance entre nos médias et nos publics. S'agissant de Radio France, ce public est constitué de 16 millions d'auditeurs quotidiens et de 38 millions de Français chaque mois, dont 37 % vivent dans des communes de moins de 20 000 habitants. Cette dimension populaire et généraliste fait de nous le premier groupe de radio de France.
Pour que le débat se déroule sereinement, il est nécessaire qu'il se fonde sur des informations fiables et partagées. Or, l'information représente plus de 53 % du contenu de nos antennes. Ces tranches d'information sont celles qui ont connu la plus forte progression de leur audience ces dernières années. Pour beaucoup de Français, France Info est devenue une référence en matière d'information fiable et partagée, ce dont je suis fière, car ce site est le fruit d'une coopération exemplaire entre nous, que le contexte du dérèglement de l'information rend d'autant plus importante.
Nous vivons un moment très particulier, où il ne s'agit plus seulement de débusquer les fausses informations, mais aussi de mener une véritable guerre de territoire, afin que les informations fiables et validées soient les plus nombreuses et les plus partagées. Un travail journalistique de qualité est donc indispensable pour le bon fonctionnement de notre pays et pour contrer les dérives auxquelles nous assistons sur les réseaux sociaux. S'y diffusent en effet les informations les plus polémiques, et s'y développe un antagonisme qui divise les Français, à l'origine de l'émergence d'une société de la défiance. Les réseaux sociaux donnent souvent l'impression d'une hyperconnexion, qui est en réalité une illusion. Par ailleurs, les crises que nous avons traversées ont montré que, plus que le lien permanent, c'est le lien authentique qui compte véritablement. À cet égard, le travail mené par nos médias de proximité, et notamment par les 44 locales de France Bleu ou le réseau régional de France 3, ne pourrait être effectué par aucun acteur privé, tout simplement parce qu'il n'est pas rentable. Ce travail est en outre mené en coopération. Les matinales de France Bleu sont par exemple diffusées sur France 3. Les deux chaînes ont également créé la plateforme commune « ici ».
Pour continuer à jouer ce rôle de média citoyen, nous avons besoin de votre confiance. Nous saurons être à la hauteur, car nous avons tous engagé une transformation numérique absolument majeure. Il existe très peu de pays dans lesquels le service public est à la pointe du service digital et de l'évolution des usages. En France, c'est bien le service public qui, le premier, a créé un média global de l'information. La radio publique a inventé le modèle de l'audio de demain, qui s'écoute à la fois en direct et en podcast. En France, le service public a créé une plateforme audio digitale, qui dépasse le géant mondial du podcast, Apple Podcast. Cette plateforme contient plus de 2 millions de contenus, rassemblant des témoignages de la vie intellectuelle, politique et culturelle des dernières décennies. Les émissions de philosophie font partie de nos plus grands succès, preuve de la singularité de notre offre. Nous avons également créé cette plateforme en bonne intelligence avec nos partenaires de l'audiovisuel public, puisque des contenus d'Arte, de Radio France internationale (RFI), de l'INA ou de France Télévisions y sont disponibles.
Ces transformations ont été menées parallèlement aux importants efforts d'économies qui nous ont été demandés ces dernières années. Depuis 2018, nous avons absorbé une diminution de 20 millions d'euros de CAP, à laquelle s'ajoutent les effets de la hausse des charges courantes et du redéploiement nécessaire à notre transformation digitale, portant nos efforts à 60 millions d'économies, soit 10 % de nos ressources.
Dans un média où tout est produit en interne, et souvent par la magie du direct, ces efforts ont été réalisés en engageant cinquante-sept projets de réorganisation et en négociant avec les partenaires sociaux une rupture conventionnelle collective, provoquant 340 départs volontaires. Le chantier que nous sommes encore en train de mener est donc considérable, et une nouvelle réduction de nos crédits serait vécue comme une contre-prime à l'effort.
La question financière que vous étudiez est avant tout stratégique. Elle concerne d'abord l'indépendance de nos médias, acquis démocratique considérable et garantie de confiance de la part de nos auditeurs. Pour préserver cet acquis, il est indispensable que l'indépendance de nos rédactions et de nos lignes éditoriales ne soit pas sujette à caution et ne soit pas soumise à des débats budgétaires. C'est la raison pour laquelle une visibilité pluriannuelle et l'absence de régulations infra-annuelles sont des conditions nécessaires à l'exercice de notre métier.
En outre, nous ne pourrons continuer à mener des plans d'économies majeurs sans faire évoluer le périmètre de nos offres. Si des économies advenaient, nous serions contraints de supprimer certains de nos contenus. Les chaînes de Radio France soutiennent aujourd'hui l'activité du livre, du cinéma et de la musique, et plus de 800 événements sur l'ensemble du territoire chaque année. Nous contribuons à l'émergence de nouveaux artistes, dont certains bénéficient désormais d'une renommée internationale. Ces derniers sont accompagnés dans la durée, à contre-courant des logiques prônées par les plateformes de streaming, où 90 % des écoutes se concentrent sur un nombre réduit d'artistes, et où les carrières sont à la fois fulgurantes et fugaces. Si nous les soutenons, c'est aussi parce que nous souhaitons que nos enfants écoutent encore des artistes français à l'avenir. L'air du temps ne peut uniquement venir de Californie. La France a aussi besoin de récits nationaux.
La guerre de territoire que j'évoquais quant à l'information existe pour la vidéo, mais également pour l'audio. La radio est un média très puissant en France. Elle compte 40 millions d'auditeurs chaque jour. Elle constitue une alternative aux écrans, qui occupent tant la vie de nos concitoyens, et plus particulièrement de nos adolescents et de nos enfants. Cet enjeu nous a poussés à développer – et nous avons été les premiers à le faire – des podcasts pour enfants, comme « Les Odyssées », « Oli », « Le journal intime de Mozart » ou encore « Les mondes de Chloé ». Ces podcasts ont connu un succès considérable puisqu'ils ont dépassé les 50 millions d'écoutes le 1er janvier dernier. Notre rôle, à ce titre, va bien au-delà de ceux qui nous écoutent, car nous diffusons en France l'usage du podcast. Plus d'un podcast sur deux écouté en France est un contenu de Radio France. Enfin, nous développons l'usage du podcast en veillant à préserver les droits des auteurs et les droits voisins. Les accords que nous avons conclus à cet égard servent aujourd'hui de référence à l'ensemble de la filière.
Souscrivant pleinement aux propos de mes collègues, je me contenterai de revenir sur les éléments spécifiques à France Médias Monde.
Sur le plan international, le choix du mode de financement de son média n'est pas anodin. Un média financé par des recettes affectées est en général qualifié de média indépendant de service public. À l'inverse, un média financé sur le budget de l'État est perçu comme un média gouvernemental.
RFI est la radio internationale au monde qui compte le plus grand nombre de fréquences FM. Ces 158 FM constituent un extraordinaire patrimoine pour la France. Au mois de juin, nous avons été contactés par l'autorité de régulation de Berlin, où notre FM bénéficie d'un certain succès. Renouvelée depuis 1994, cette fréquence arrive à échéance dans un an. Or, l'autorité de régulation nous a fait savoir que la réforme de l'audiovisuel français remettrait probablement en cause l'attribution de cette fréquence, puisque nous ne serions plus financés par une recette affectée, mais budgétisée. En effet, l'indépendance vis-à-vis de l'État est un élément déterminant pour recevoir une fréquence FM, qui est une fréquence de souveraineté donnée par l'État et les autorités de régulation. Pour citer l'autorité de régulation, « l'indépendance de l'État implique que toute influence dominante de l'État soit exclue, tant sur le plan du droit des sociétés et de l'organisation que sur le plan financier ou économique ». Il n'appartient évidemment pas à l'autorité de régulation de Berlin de mettre en cause l'engagement politique de nos pouvoirs publics : nul ne doute que leur volonté soit de garantir cette indépendance. Toutefois, la budgétisation porte en elle le germe du doute. Orsi par hasard, par malheur, nos amis allemands décidaient de ne pas renouveler notre fréquence, le précédent pourrait être redoutable. Les pays ne manquent pas, qui trouveraient qu'il serait au fond tellement plus commode que n'existe pas une radio comme RFI, indépendante, libre, experte et qui vérifie les faits.
Lors de notre conseil d'administration réuni hier, nous avons émis la proposition suivante. Puisque le moteur de la réforme est la volonté d'améliorer le pouvoir d'achat de 23 millions de foyers ; puisque la seule véritable garantie d'indépendance opposable n'est pas la bonne foi de nos pouvoirs publics, mais le financement par une recette affectée ; puisque, enfin, le budget de l'État doit prendre en charge le budget du service public dans la réforme telle qu'elle est prévue, nous pensons que les foyers français doivent continuer à payer la redevance, puis la déduire de leurs impôts. Le service public continuerait à être financé par une recette affectée, sans que cette dernière pèse sur les foyers.
J'ajoute qu'il est souvent répété que l'indexation de la redevance sur l'inflation n'a pas été utile. L'inflation était très réduite ces dernières années : si cette dernière atteint plus de 5 %, cette indexation prend tout son sens. Nos salariés connaissent en effet de grandes difficultés, auxquelles nous ne pouvons entièrement faire face. Davantage qu'un travail, l'activité de nos équipes relève d'un véritable engagement auquel il importe de rendre justice.
France Médias Monde ne se porte pas mal, d'autant que notre budget est bien inférieur à celui de nos concurrents internationaux. Ces derniers, comme la BBC, sont dotés d'un budget jusqu'à 50 % supérieur au nôtre, s'élevant à 360 millions d'euros quand nous ne disposons que de 254 millions d'euros de redevance. En 2022, le budget de la Deutsche Welle était supérieur de 130 millions d'euros à celui de France Médias Monde. Le budget de Russia Today est quatre fois supérieur à celui de France 24. Malgré cela, nous touchons 244 millions de personnes chaque semaine, dans nos vingt langues, avec nos trois médias, partout dans le monde. La qualité de nos programmes nous rend très attractifs. L'année dernière, 2,2 milliards de vidéos et de sons ont été visionnés et écoutés. Peu de pays ont la chance de disposer d'un tel outil, qu'il faut donc faire prospérer. Nous diffusons aussi une information indépendante, experte, vérifiée, qui lutte contre les fausses informations et les manipulations tout en respectant la pluralité des opinions. Nous payons le prix fort de notre action et du fait d'être français, puisque nous sommes fermés au Mali et interdits en Russie. Nous nous évertuons à répondre aux urgences de la guerre d'information. Avec le soutien du ministère des Affaires étrangères, nous ouvrons à Bucarest une rédaction en exil pour les journalistes ukrainiens et ukrainiennesqui fuient le conflit. Une maison des journalistes est également créée avec notre filiale CFI afin de les accueillir et les soutenir psychologiquement. Outre cette rédaction en ukrainien que nous souhaitons adosser à RFI Romania, nous souhaitons renforcer nos contenus en langue russe.
Cette réforme fondamentale pour l'audiovisuel public intervient dans une période où l'audiovisuel se porte plutôt bien. En témoignent les audiences, les équilibres économiques et les grandes transformations de ce dernier. L'INA a su rebondir après la crise de 2020, qui l'a particulièrement affecté, puisqu'il doit assurer près de 35 % de son financement par des ressources propres – c'est l'une de ses singularités. L'INA s'est profondément transformé, en adoptant une politique éditoriale originale, ancrée dans le temps long, d'analyse et de décryptage de l'information et de la culture, à l'aide notamment d'archives, et en développant son audience numérique à travers son site internet et ses pages sur les réseaux sociaux. Ainsi, notre audience numérique est passée de moins de 80 millions de vidéos visionnées par an à 1,3 milliard l'année dernière.
L'INA a également fait évoluer ses missions de formation et de transmission des savoirs. Notre campus de Bry-sur-Marne accueille en permanence 300 étudiants en BTS, en master ou préparant des diplômes spécifiques, dans le cadre de la formation initiale. Nous œuvrons pour la diversité au sein de cette formation, notamment au travers de la classe alpha, à laquelle France Télévisions est associé. Nous avons également développé des perspectives d'intégration à l'université Paris-Panthéon-Assas à l'horizon 2024. Enfin, nous avons renforcé nos liens avec le ministère de l'Éducation nationale, qui a récemment confié à l'INA, en tant qu'éditeur de Lumni Enseignement, la reprise intégrale de son service Êduthèque, plus particulièrement destiné aux professeurs. Ces diverses coopérations sont le signe que l'INA assume pleinement son rôle de média distinctif de service public, et s'affirme en tant que média patrimonial, auquel contribuent nos activités éditoriales et de recherche. L'INA développe des solutions d'intelligence artificielle avec ses chercheurs, qui permettent de combiner l'analyse de contenus audiovisuels en masse, comme ceux gérés à travers le dépôt légal de l'audiovisuel et du webmedia, et la production d'études assez novatrices. Nous avons par exemple mené des études sur la représentation du genre en analysant le temps de parole des hommes et des femmes à la télévision. Cette activité constitue une contribution originale aux contenus informatifs produits par le service public de l'audiovisuel.
Si l'INA est plutôt en avance sur ses objectifs stratégiques et sur la trajectoire de redressement économique qui a suivi les difficultés de 2020, ces acquis restent fragiles. Le contexte d'inflation élevée crée une forte tension sur les charges des entreprises, alors même que la trajectoire 2018-2022 ne l'avait pas anticipée. La réforme de financement de l'audiovisuel public constitue une deuxième source d'incertitude.
En supprimant la CAP pour la budgétiser, le projet de loi de finances rectificative pour 2022 propose une mesure pérenne, dont les effets se feront sentir bien plus tard, alors même qu'en vertu du principe d'annualité budgétaire il ne peut apporter aux entreprises concernées que des garanties partielles et limitées à l'exercice 2022. Le PLFR, tout comme le Gouvernement, évoquait des garanties pour 2023 et les années suivantes. Toutefois, leur valeur juridique est mal assurée, d'abord parce que ces garanties ne relèvent pas du PLFR : il a été évoqué la possibilité d'un fonctionnement inspiré du modèle allemand de la KEF, mais cela relèverait d'un véhicule législatif sectoriel. De plus, si le versement des crédits en une fois, au début de l'exercice, va dans le bon sens, d'un point de vue juridique il n'empêche pas la régulation infra-annuelle. Seule la modification des dispositions organiques permettrait de garantir l'absence de ces régulations.
Madame la présidente, vous avez évoqué la prolongation envisagée des contrats d'objectifs et de moyens, qui interviendrait dans l'attente du débat sur les missions, le périmètre et les conséquences de l'évolution de ces derniers en matière de trajectoire financière à moyen terme, voire, de gouvernance. Ce débat ne pouvant être esquivé, la prolongation des COM semble représenter la seule solution raisonnable, mais encore faudra-t-il qu'elle s'accompagne de la prolongation des ressources correspondantes. Les entreprises ne pourront continuer à atteindre leurs objectifs une ou deux années de plus en disposant de moyens réduits. Les intervenants précédents ont déjà souligné les efforts fournis, notamment par les salariés, pour réaliser des économies conséquentes. Cette stabilité des moyens en phase transitoire ne peut en outre s'entendre qu'en tenant compte de l'inflation, ce qui se traduirait par une hausse des crédits budgétaires à compter de 2023, a fortiori parce que le Gouvernement a demandé aux entreprises d'absorber le choc de l'inflation sur leur exécution budgétaire 2022.
L'article 1er du PLFR soulève donc une question de fond, qu'ont détaillée les autres intervenants. La budgétisation des ressources, en l'absence de garanties juridiques suffisamment solides, risque d'affecter l'indépendance des médias publics que protège la Constitution. En outre, cet article soulève une question de temporalité. La suppression de la CAP intervient avant le débat sur les missions et le périmètre de l'audiovisuel public, qui devra se tenir entre l'automne 2022 et les premiers mois de 2023, et qui apportera à nos entreprises les clarifications et les réponses qu'elles attendent pour poursuivre sereinement leur transformation. Face aux grands acteurs mondialisés de l'audiovisuel et du numérique, ces entreprises doivent en effet construire leurs offres éditoriales de demain, sécuriser leurs équilibres économiques sur une base pluriannuelle et, enfin, apaiser des salariés inquiets d'une mesure dont ils peinent encore à saisir la portée, comme l'a montré le mouvement social récent.
La spécificité de TV5 réside dans son caractère multilatéral. Nous sommes à la fois français, canadiens, québécois, belges, suisses et monégasques. Outre cette force de fédération d'autres gouvernements, nous sommes également opérateurs officiels de l'Organisation internationale de la Francophonie, qui regroupe 88 pays. De nos jours, il est important de ne pas être perçus comme un média d'État. C'est bien ce multilatéralisme qui nous permet d'émettre en Chine continentale, où nous sommes la seule chaîne en français à l'exception des chaînes du gouvernement chinois, ou de continuer à émettre dans des pays d'Afrique dans les périodes de tension.
L'image de la France se dégrade en Afrique et dans le monde arabe année après année, à très grande vitesse. La France n'est pas seule responsable de cette dégradation. Certaines puissances étrangères ne rechignent pas à utiliser des méthodes telles que des cyberattaques, comme celle qui avait durement affecté TV5 en 2015, menaçant notre groupe de fermeture, et dont le parquet de Paris, dans son enquête, avait attribué la responsabilité à un pays de l'est de l'Europe. En Centrafrique, de nombreux journalistes indépendants ont été assassinés pour avoir tenté de faire valoir un point de vue divergent de celui des autorités en place et de leurs alliés. Dans ce contexte, il est essentiel de pouvoir relayer une information certifiée, vérifiée et indépendante à l'étranger, notamment là où l'influence d'autres États fait baisser celle de la France. Il est entendu que notre démocratie n'usera jamais des méthodes que j'ai évoquées pour faire valoir ses points de vue. Nous n'en avons pas besoin. Nous avons pu constater que trois ans après son lancement, en 2016, notre chaîne jeunesse diffusée en Afrique était regardée par un enfant sur deux au Sénégal, en Côte d'Ivoire, en République démocratique du Congo et au Cameroun . En effet, notre capacité d'attraction et d'influence, qui dépasse par ailleurs les enjeux politiques et informationnels, nous permet d'offrir un récit différent du récit parfois fataliste et sordide proposé dans ces pays. Or, pour que ce récit continue à plaire, nous avons besoin d'un financement assuré, garanti et pérenne. Aussi les partenaires de TV5 Monde se montrent-ils très surpris de la situation française. C'est bien la France, et non les autres gouvernements, qui diminue les crédits de TV5 Monde. Nous avons récemment développé la plateforme francophone TV5MONDEplus, qui met en avant les programmes des partenaires français, multilatéraux, et de chaînes africaines. Cette plateforme a été financée en grande partie par les Canadiens, qui ont dégagé un budget exceptionnel de 14 millions de dollars, car ils étaient persuadés que nous devions offrir une alternative aux grandes plateformes de streaming américaines.
Je tiens à remercier les intervenants pour leurs éclairages quant à l'importance économique, sociétale, démocratique de l'audiovisuel public en France, en Europe et à l'international. Les défis de l'information face aux guerres médiatiques, les opportunités de l'innovation numérique, ou encore l'accès à la culture, confronté à la fragmentation des offres de contenu, forment des enjeux vertigineux autant que mobilisateurs.
Au regard de la priorité et de l'urgence de la protection du pouvoir d'achat des Français, nous faisons face à une question importante, qui ne concerne pas que les sociétés de l'audiovisuel public, ce qui justifie le fait que la représentation nationale se charge de son financement depuis des années. La CAP ne vit en effet pas sans le Parlement, contrairement à ce que véhiculent certains mythes faisant du canal de la redevance télévisée l'alpha et l'oméga de l'indépendance financière des sociétés de l'audiovisuel public. Or, 15 % des dotations ne sont pas issues de cette contribution, mais relèvent du budget général de l'État au titre des compensations pour les foyers exonérés et en raison du principe de garantie des ressources. Le financement ne dépend donc pas intégralement de la CAP. Dans le cadre du PLFR, nous continuerons à le faire, par la création de la mission budgétaire qui comprendra six programmes, pour chacune des six sociétés que vous représentez. Aussi, le dispositif répond aux craintes de régulation infra-annuelle en versant l'intégralité des dotations dès le début de l'exercice.
J'entends la proposition de la présidente France Médias Monde de percevoir la CAP avant de la rembourser aux 23 millions de foyers contributeurs. Votre proposition est bien entendu expertisée, puisqu'elle est issue des travaux de votre conseil d'administration. Je rappelle cependant que 5 millions de foyers paient la CAP, mais pas l'impôt sur le revenu. C'est en outre la disparition de la taxe d'habitation qui soulève la question du rapport entre le coût de perception de la CAP, estimé à 29 millions d'euros et 2 000 emplois à temps plein. Par ailleurs, je suis comme vous convaincue de l'importance majeure de la prévisibilité de vos ressources financières, qui représente le cœur de vos enjeux et de vos métiers. Toutefois, ce sujet ne dépend pas d'un financement par la CAP ou par une budgétisation, mais des COM et de la capacité à avoir une visibilité pluriannuelle sur votre capacité à investir et à fonctionner. Ainsi, ces sujets seront discutés non pas aujourd'hui, mais dans quelques mois.
Comment envisagez-vous la possibilité de prolonger les COM actuels et de travailler conjointement à une loi d'orientation et de programmation dédiée à l'audiovisuel public ?
( RE). Dans un entretien au magazine Le Point daté du 6 juillet, la ministre de la Culture a indiqué que la suppression de la CAP ne changera rien au principe d'indépendance de ces médias. Celui-ci perdurera et sera même renforcé par un projet de texte européen. En Europe, plusieurs pays ont déjà budgétisé le financement de leur audiovisuel public, même si d'autres ont opté pour des modes de financement alternatifs. Nous avons entendu vos craintes. En 2017, j'avais rendu un rapport dans lequel je proposais une réforme du financement qui ne devait plus être lié à la possession d'une télévision, laquelle est de moins en moins représentative de nos usages. La budgétisation aura le mérite de permettre un financement plus juste, à la hauteur des capacités de chacun, sans créer de nouvel impôt ou de nouvelle taxe, et de redonner du pouvoir d'achat aux 25 millions de foyers français qui payaient tous une redevance identique égale à 138 euros.
Que ce soit sous une forme budgétisée ou sous la forme d'une taxe affectée, ce seront toujours les parlementaires qui détermineront chaque année le montant alloué à chaque entreprise. Ainsi, la question ne porte pas sur la mécanique précise de dotation, même si j'ai bien entendu les conséquences que cela induit à l'international, mais sur les garanties à moyen et à long terme que l'État et les parlementaires peuvent apporter à vos sociétés.
Vous bénéficiez de COM prévus sur trois ans, qui ont été respectés ces dernières années, et dont l'échéance est atteinte au moment de la suppression de la CAP et d'un changement majeur du rapport de force au sein de l'hémicycle. Quelle serait, selon vous, la durée idéale d'un COM, et dans quelle temporalité faudrait-il le fixer ? En effet, la fixation d'un COM au démarrage des mandats présidentiels et législatifs paraît problématique, car les priorités des différents candidats aux groupes politiques semblent parfois diamétralement opposées.
Je suis très heureux d'avoir devant moi les patrons de l'ensemble des radios et télévisions publiques de notre pays. Vous avez tous parlé de l'indépendance du service public et de l'information, ce qui est louable. En effet, tout média devrait déontologiquement se montrer neutre et impartial. En pratique, ce n'est pas le cas, ce que je trouve d'autant plus choquant que vous êtes le service public de l'information et que vous êtes financés par l'argent du contribuable. Madame Parmentier et moi-même avons assuré les relations presse de Marine Le Pen et du Rassemblement national durant toute la campagne présidentielle. Ainsi, nous pouvons témoigner que la réalité se situe bien loin de vos exposés.
Madame Veil, comment expliquez-vous que la grande majorité des chroniqueurs de France Inter soient ouvertement de gauche et qu'ils puissent quotidiennement salir le Rassemblement national sans recadrage de la direction ?
Le président d'Arte a affirmé que le premier rôle des médias publics était de former les citoyens. Le principe de la démocratie est que l'on naît citoyen, et que l'on ne le devient pas. Je m'inquiète donc légitimement sur le sens de l'expression que vous avez employée : s'agit-il de faire ouvertement de la propagande ? Avec Marine Le Pen, nous voulons supprimer la redevance audiovisuelle, car l'impôt des Français ne doit pas servir à financer cette propagande. J'estime que vous devez nous rendre des comptes, parce que vos programmes et vos médias sont financés par l'impôt de tous les Français, y compris, ne vous en déplaise, par celui des 13 millions d'électeurs qui ont voté pour Marine Le Pen au second tour de la présidentielle.
Je vous remercie des éclairages que vous nous avez apportés. Le groupe Insoumis, comme l'intergroupe de la NUPES, est en total désaccord avec la suppression de la redevance audiovisuelle. Nous pensons qu'elle doit évoluer, et remercions, à ce titre, Mme Saragosse pour sa proposition. Cependant, sa suppression pure et simple apparaît abusive, voire, dangereuse. Nous sommes profondément inquiets quant à l'avenir de nos médias et de leur indépendance, vis-à-vis des pouvoirs publics et du pouvoir de l'argent, incarné par les grands milliardaires. La Macronie continue de piétiner la démocratie, comme le montre cette suppression effectuée sans consultation préalable, ni des représentants des salariés, ni des usagers, ni des dirigeants des sociétés de l'audiovisuel public. Pourquoi une telle opacité ? Pourquoi une telle peur de la concertation ? À nos yeux, vous êtes en effet les premiers concernés et, par conséquent, les mieux à même d'établir un diagnostic juste de nos besoins.
Quelles sont les conséquences des politiques austéritaires des précédents quinquennats, et notamment du dernier ? Comment appréhendez-vous ce nouveau quinquennat au vu de cet article ? Avez-vous été réellement consultés sur le projet de suppression de la CAP ? Quelles garanties vous ont été données pour pérenniser votre indépendance et pour vous prémunir de la privatisation que proposent les députés d'extrême droite, qui ne désirent qu'une généralisation de CNews et d'Europe 1 avec la mainmise de Monsieur Bolloré ? Quels garde-fous vous ont été proposés ? Quels engagements le Gouvernement a-t-il pris fermement pour le maintien d'un budget stable et pérenne ? Quelles solutions préconisez-vous de votre côté ? Enfin, que pensez-vous de la fusion des sociétés de l'audiovisuel public, qui pourrait être l'une des prochaines mesures prises par le Gouvernement ?
Votre unanimité est frappante et importante. J'ignore si elle préfigure un futur regroupement des forces du service public en matière de gouvernance. Cependant, en effet, comment réclamer la solidarité des élus et des parlementaires, si vous n'en faites pas vous-mêmes preuve sur la question du financement de l'audiovisuel public ? Comme nous, vous avez été mis devant le fait accompli d'une annonce sans négociation et sans débat préalable. Nos oppositions portent donc à la fois sur le fond et sur la forme.
La redevance est le mode de financement historique de l'audiovisuel public. André Tardieu l'avait souhaité pour la radio dès les années 1930 afin de se prémunir des dérives commerciales. C'est le système de financement le plus fréquent dans toutes nos démocraties, certes obsolète en raison des nouveaux modes d'accès au service de l'audiovisuel et de la suppression de la taxe d'habitation. Une réforme était donc nécessaire. Cependant, au lieu de cela, la CAP est simplement supprimée.
N'est-il pas légitime de payer pour bénéficier d'un service ? Quels moyens sont nécessaires, et pour quelles missions ? La budgétisation ne risque-t-elle pas de se traduire par une compensation par la dette et par le déficit, alors que nous nous sommes fixé pour objectif de maîtriser le déficit à 3 % en 2027 et que de nombreux autres postes de dépense doivent être pris en compte, dans le contexte d'inflation ? J'aimerais également vous entendre sur la gouvernance et le regroupement des forces de l'audiovisuel public.
Je vous remercie pour votre présence aujourd'hui. À l'occasion de la présentation du PLFR, Gabriel Attal, ministre chargé des Comptes publics, a confirmé la volonté du Gouvernement de supprimer la CAP dès 2022. Cette mesure a passé le jugement du suffrage universel, puisque le candidat Emmanuel Macron l'avait inscrite dans le programme qui l'a porté pour la seconde fois à la présidence de la République. Certains ont fait part de leur inquiétude quant à cette décision. Les députés – moi-même – avons été interpellés par l'intermédiaire de courriers et de mails émanant de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD) ou de l'Union Nationale des Syndicats Autonomes (UNSA). Les contours de cette réforme n'étant pas arrêtés, profitons-en pour la coconstruire. L'important – et nous pourrons nous accorder sur ce point – est de sécuriser le financement, l'indépendance et l'avenir de l'audiovisuel public sans creuser davantage les déficits publics. Même si les foyers les plus modestes en sont exonérés, cette taxe est injuste et n'est pas efficiente, compte tenu des mutations technologiques et de l'émergence de nouveaux acteurs audiovisuels.
Nous savons que la perte fiscale sera compensée par le budget de l'État et que le versement de la subvention aux services publics devrait se faire en une seule fois au début de l'année. La dotation ne pourra dès lors ni être gelée ni être annulée unilatéralement par l'État. Nous ne savons cependant rien de la gouvernance budgétaire du dispositif. Une option pourrait consister en la mise en place d'un mécanisme d'évaluation indépendante des besoins de l'audiovisuel public, à l'image de la commission dédiée à ce sujet en Allemagne. Mesdames et Messieurs, que préconisez-vous ?
Nous nous opposons à la suppression de la CAP proposée par le Gouvernement. Nous avons d'ailleurs déposé hier un amendement en ce sens, qui a été rejeté par les députés de la majorité présidentielle et des Républicains.
Nous reconnaissons que la redevance, devenue injuste et obsolète, doit être réformée. Son montant unique pèse davantage sur les foyers modestes que sur les plus riches. Par ailleurs, d'autres foyers, parce qu'ils n'ont pas de téléviseur, y échappent, alors que l'essor des supports numériques leur permet de bénéficier de l'offre de l'audiovisuel public sur les écrans connectés.
Cependant, la suppression pure et simple de la CAP revient à soumettre chaque année l'audiovisuel public aux lois des finances. Ainsi, nos médias publics perdront toute visibilité sur leurs ressources, et verront leurs présidents de société dépendants du bon vouloir de la majorité en place. Surtout, le texte de loi ne prévoit pas les garanties promises par le Gouvernement pour assurer les principes de prévisibilité et d'indépendance, avec notamment la mise en place d'une commission indépendante de gestion.
Plutôt que la suppression de la redevance, nous sommes favorables à une contribution audiovisuelle universelle et progressive, comme l'a évoqué Madame Ernotte. Elle permettrait une véritable mesure de pouvoir d'achat pour les 85 % de foyers payant déjà la CAP, et garantirait votre indépendance et votre financement. Que pensez-vous de cette option ?
Le sport est un élément majeur de cohésion nationale et sociale, qui s'incarne dans la pratique quotidienne et les compétitions locales, mais également dans la retransmission des événements et grandes compétitions sportives. Le Tour de France, dont la popularité est sans cesse démontrée, en est l'exemple flagrant. Je pense également à Roland-Garros et aux futures retransmissions des Jeux olympiques. Il me paraît essentiel que ces événements restent accessibles au plus grand nombre, et qu'ils ne requièrent pas l'abonnement à des chaînes payantes. Grâce à la garantie de financement qui vous sera apportée, pouvez-vous nous assurer le maintien de la diffusion de ces moments charnières de nos vies collectives ?
Merci pour votre éclairage sur cette proposition qui ne recueille guère d'enthousiasme ni d'assentiment de votre part. Les propos tenus par les députés du Rassemblement national dans cette enceinte montrent à quel point la garantie apportée à l'indépendance des médias par l'affectation d'une taxe est précieuse. À cet égard, je pense que la proposition du Gouvernement traduit une forme de légèreté coupable.
Vous avez chacun et chacune exposé les baisses continues de crédits auxquelles vous avez été confrontés. Vous avez maintenu le service public, notamment en opérant des plans sociaux. Toutefois, combien de temps cela va-t-il durer ? Assisterons-nous, comme c'est déjà le cas dans de nombreux services publics, et notamment à l'hôpital, à un effondrement qui suivra cette lente agonie ? Ne faudrait-il pas plutôt garantir non seulement l'indépendance, mais la hausse des moyens à l'audiovisuel public ?
Nous sortons d'une période électorale, durant laquelle le premier candidat à avoir évoqué la suppression de la CAP était Éric Zemmour. Lui-même était soutenu par un groupe audiovisuel privé, qui a tout fait pour imposer dans le débat public des priorités thématiques éloignées de celles des Français. Cette situation révèle bien le danger de voir l'audiovisuel public perdre en indépendance. Or, cette perte d'indépendance est le pendant de la suppression de la redevance, qui se traduirait également par une absence de visibilité pour investir et se développer.
Il est par ailleurs paradoxal de tenir un discours constant sur la souveraineté tout en ne déclinant cette dernière que sur le plan économique et industriel. La souveraineté repose également sur une culture et une éducation communes et partagées.
Enfin, s'il est vrai que la redevance est injuste sur le plan fiscal, des propositions peuvent être émises sans toutefois supprimer la CAP. Nous proposerons donc de ne pas supprimer la redevance au détour de l'été dans le cadre d'un PLFR, mais qu'une véritable étude d'impact soit menée et que cette question soit abordée dans le cadre d'un débat classique sur la loi de finances, mobilisant une assemblée éclairée et en écoutant les acteurs concernés. À cet égard, à quel niveau avez-vous été consultés sur cette décision ?
Je souhaite d'abord rappeler le processus qui avait conduit à l'adoption des COM actuels. Sous le gouvernement d'Édouard Philippe, dans le cadre de la mission confiée à Cap 2022, nous avions intensivement travaillé pendant six mois afin de répondre à la volonté du Gouvernement de mettre en cohérence nos missions et notre financement. Notre travail avait donné lieu à un arbitrage du Premier ministre entre les propositions émanant du ministère de la Culture et du ministère du Budget, lesquelles n'étaient pas tout à fait les mêmes, pour utiliser un euphémisme. Grâce à l'équilibre entre les missions et le budget qu'il fixait ainsi qu'aux efforts importants réalisés par les entreprises, ce COM a été parfaitement respecté jusqu'à cette année.
Travailler au cœur de l'été à un nouveau COM me semble totalement irréalisable. Tout d'abord, nous ne sommes pas ceux qui définissent nos missions. Nous sommes des chefs d'entreprise qui appliquons ce que la représentation nationale décide. Bien entendu, nous avons un avis sur le sujet, et nous sommes parfois consultés, comme lors du dernier COM. Cependant, il s'agit d'un processus long. La proposition de prolonger les COM actuels me paraît donc raisonnable. Toutefois, le budget calibré en 2018 pour atteindre un équilibre ne peut être remis en question sans débat. De plus, nous sommes soumis à de nombreuses instances de contrôle : le Parlement, en premier lieu, l'ARCOM, et, enfin, nos conseils d'administration. Or, les membres du conseil d'administration, qui sont totalement indépendants des pouvoirs politiques, ont constaté la précarité de l'équilibre budgétaire pour l'année 2022, en raison de mauvaises nouvelles structurelles, comme l'inflation, et de quelques bonnes nouvelles plus conjoncturelles.
La part de la publicité dans les recettes de France Télévisions s'élève à 15 %. Elle n'est donc pas majeure. En outre, même si notre régie publicitaire arrive à valoriser le service public davantage que son audience le laisserait supposer, le chiffre d'affaires publicitaire reste indexé sur l'activité économique. Or, la guerre en Ukraine et l'inflation laissent présager des difficultés et nous ne pouvons attendre des recettes publicitaires une solution pour améliorer nos budgets. Nous sommes donc au bout de l'exercice. Je voudrais rendre hommage aux efforts très importants qu'ont fournis les personnels. Le plan social dure depuis dix ans. Les salariés de France Télévisions, qui sont très engagés dans le service public, ont besoin d'entendre que leur travail est important et qu'ils ne sont pas considérés comme des surnuméraires. Le mouvement de grève, qui a été très suivi, l'illustre bien.
Vous me demandez quelle est la durée idéale d'un COM. En tant que patron d'entreprise, je vous répondrais qu'elle devrait être la plus longue possible. La durée de la charte de la BBC est de onze ans. La prévisibilité dont elle bénéficie ainsi lui permet de manœuvrer dès à présent pour répondre aux enjeux de 2027. De notre côté, nous sommes au mois de juillet 2022, et j'ignore quel sera le budget prévu pour France Télévisions en 2023.
Vous parlez de la nécessaire réforme de la redevance. J'ai souvent dit auprès de cette commission que je partageais ce point de vue. De multiples options sont à notre disposition pour concilier la santé du secteur public de l'audiovisuel et l'équité de l'impôt pour les foyers. Les exemples européens peuvent nous servir de modèles. En réalité, la transformation de la redevance est un serpent de mer : depuis sept ans, la représentation nationale répète que la redevance doit évoluer. Désormais, il est question de la supprimer. La lettre de mission confiée par le Premier ministre Jean Castex à l'Inspection générale des affaires culturelles (IGAC) lui demandait d'étudier toutes les possibilités, en excluant alors la budgétisation. Je suppose que l'IGAC a depuis réorienté sa démarche. Lorsque nous avons reçu les inspecteurs de l'IGAC, nous avons tenté de les éclairer par une perspective à la fois française et européenne.
Monsieur Loubet, chaque parti politique estime que le service public ne le favorise pas. Cependant, nos propres contrôles comme ceux de l'ARCOM n'ont jamais relevé de sous-exposition de Marine Le Pen lors de la campagne présidentielle, ou du Rassemblement national lors de la campagne du premier tour des élections législatives. Concernant cette dernière, qui a duré six semaines, la surexposition des partis de la NUPES pendant les trois premières semaines, résultant de la couverture médiatique de la constitution de cette coalition, a été compensée par des temps de parole importants du Rassemblement national, de la République en marche et des Républicains les trois semaines suivantes. France Télévisions a donc strictement respecté la réglementation.
Madame Piron, la durée des COM est traditionnellement établie à cinq ans. Cette durée me paraît indispensable. Comme l'a décrit Madame Ernotte, nous dirigeons des entreprises engagées dans une révolution digitale qui nécessite de prévoir les investissements à réaliser. L'autre raison, qui nous distingue par ailleurs des autres secteurs de l'action publique, est celle de l'indépendance. Pour se prémunir de tout soupçon d'une éventuelle collusion entre le débat politique et la ligne éditoriale ou le traitement de l'information, toutes les grandes démocraties qui nous entourent veillent bien à la dissociation la plus forte possible. Ces garanties sont nécessaires au maintien du contrat de confiance avec nos auditeurs et téléspectateurs, comme on a pu le constater lors de la crise sanitaire. Lors du premier confinement, nos audiences sont montées en flèche car les auditeurs faisaient confiance à France Info pour savoir précisément ce qu'ils devaient faire.
Ce contrat de confiance nécessite aussi le respect de l'impartialité. Monsieur Loubet, lors de la période que vous citez, la première matinale d'information de France, écoutée par 4 millions de personnes chaque matin, a reçu des invités du Rassemblement national une fois tous les jours. L'ARCOM nous a gratifiés d'un satisfecit, rendu public, sur l'ensemble de la période des élections présidentielle et législatives. Nous avons bien respecté nos obligations de pluralisme. Par ailleurs, comment pourriez-vous croire que les 16 millions d'auditeurs qui nous écoutent quotidiennement partagent tous les mêmes convictions politiques ? Si nos audiences ont progressé de 1,5 million d'auditeurs ces dernières années – quand le marché de la radio en perdait 2 millions –, c'est précisément parce que nos offres respectent ce contrat de neutralité et d'impartialité, y compris dans les prises de position de nos chroniqueurs. À ce titre, pour bien distinguer ce qui relève de l'information et de l'opinion, notre rubrique s'intitule « En toute subjectivité ». Chaque matin, un chroniqueur différent traite de l'actualité. Alexandre Devecchio, du FigaroVox, Étienne Gernelle, du Point, Dominique Seux, des Échos, par exemple, interviennent ainsi dans nos chroniques.
Monsieur Gaultier, vous avez lié la question de la gouvernance à celle du montant des ressources alloué à notre secteur. En effet, ce lien est très important. Si une grande réforme bureaucratique telle qu'une fusion était engagée, cela signifierait que nous devrions renégocier toutes nos conventions collectives, en appliquant immédiatement la clause la plus favorable. Nous devrions donc financer une hausse de notre masse salariale ainsi que la mise en commun de tous nos systèmes d'information et de gestion. Ces chantiers bureaucratiques seraient particulièrement chronophages et éloignés des préoccupations stratégiques majeures que nous avons exposées ce matin.
La question du financement est également importante, car nous avons tous procédé à des plans d'économies majeurs, qui se sont traduits par le départ de nombreux salariés, sans toutefois réduire notre offre. Or, nous ne pourrons poursuivre ces efforts plus longtemps. Si de nouvelles économies étaient nécessaires, nous serions contraints d'effectuer des choix structurels. Ces économies ne serviraient pas à compenser une baisse de la ressource qui nous est affectée, mais à financer la hausse de l'inflation qui a un effet majeur sur toutes nos charges, et notamment sur nos salaires.
Les décisions d'investissement que nous prenons ciblent le moyen terme. Les programmes d'Arte sont indépendants : ils sont créés par des entreprises qui font vivre le secteur de la création. Les décisions sont prises à horizon de neuf mois au minimum, et jusqu'à trois ans pour un programme d'animation. Nos décisions d'investissement produisent leurs fruits en moyenne dix-huit mois plus tard. Nous signons donc aujourd'hui des chèques en blanc, puisque nous ignorons le montant du budget dont nous disposerons dans un an.
J'entends que l'audiovisuel ne s'est jamais aussi bien porté alors que ses crédits ont baissé depuis 2018. C'est un effet d'optique. Les excellents résultats de nos entreprises ne sont que le fruit de ce qui a été semé à l'époque où les moyens de l'audiovisuel public étaient bien supérieurs. Nous serons donc affectés par l'attrition que nous subissons dans les années à venir, dans un contexte radicalement modifié. La crise covid a renforcé l'importance, dans le quotidien des Français, des plateformes extra-européennes, qui bouleverseront encore davantage notre milieu économique, puisqu'en raison des obligations d'investissement qui sont désormais les leurs, plusieurs centaines de millions d'euros seront investies dans la production européenne. Si nous nous en réjouissons pour les créateurs, cette situation porte un risque d'éviction majeur des acteurs traditionnels que nous sommes. L'effet inflationniste, par ailleurs, est très facile à quantifier. À moyens constants, nous sommes aujourd'hui 25 % plus pauvres qu'il y a trois ans. Nos capacités de production à très court terme ne peuvent donc suivre l'investissement des plateformes sur nos marchés. En outre, les conséquences pourraient s'avérer désastreuses pour les créateurs à moyen terme. En effet, ces plateformes ne respectent pas toujours les principes du droit d'auteur à la française et à l'européenne. Nous plaçons donc en situation de dépendance économique le tissu de production français, qui nourrit pourtant notre imaginaire collectif national et européen.
Plusieurs députés ont abordé la question de la régulation infra-annuelle. Il est bien entendu positif que les crédits soient versés en début d'année. Lorsque le dépôt légal a été financé de façon mixte par la redevance et des crédits budgétaires il y a vingt-cinq ans, l'INA s'est vu reprendre des crédits budgétaires en cours d'année. La procédure est très simple : il suffit d'adopter un décret d'annulation et d'émettre un titre de perception pour contraindre l'entreprise à rendre l'argent qui lui avait été accordé. C'est pour cette raison que cette garantie relève plutôt d'une loi organique.
Madame Piron, la nouvelle trajectoire définie en 2018 prévoyait l'économie de 190 millions d'euros sur la période pour l'ensemble des entreprises. Pour la première fois, les engagements pris à travers les COM ont été tenus, notamment parce qu'ils coïncidaient avec la mandature et la législature. Si nous nous acheminons vers une budgétisation de la ressource, il est urgent de la déconnecter de la mandature et de la législature. La durée du COM devrait s'établir à dix ans, avec un bilan à mi-parcours, de manière à nous situer dans le même horizon que le reste de l'écosystème de l'audiovisuel numérique national et européen
Une budgétisation par l'État n'est pas synonyme de gouvernementalisation des lignes éditoriales. Les COM servent à garantir un service public indépendant et innovant, une information pluraliste et exemplaire, des offres locales de qualité, des programmes sportifs, jeunesse, culturels de référence, et enfin une production audacieuse qui rayonne au-delà de nos frontières. L'État est au service des Français. S'il n'apportait pas un complément aux recettes fiscales, il serait difficile pour l'audiovisuel public d'être au rendez-vous de cette qualité éditoriale et de cette innovation. Les lignes éditoriales des médias publics ne sont pas dictées par le Gouvernement, bien que certains ici pourraient avoir une volonté d'étatiser cet audiovisuel public, voire, de le privatiser. Ce n'est pas celle du Gouvernement ni de cette majorité. Au-delà des COM, que proposez-vous pour garantir votre indépendance, qui nous est chère, et pour nouer cette confiance si nécessaire avec les législateurs ?
Votre discours est bien différent de celui, plein d'enthousiasme, que vous teniez il y a cinq ans lors de l'élection de Monsieur Macron. Vous semblez désormais plus sceptique sur votre devenir.
Le Gouvernement a annoncé la création d'une éventuelle commission, qui pourrait être « la vigie de l'indépendance de l'audiovisuel ». Nous avons auditionné hier la ministre de la Culture, qui nous a donné très peu de détails sur cette commission, en dehors de l'évocation de l'ARCOM qui pourrait constituer cette garantie d'indépendance. Nos collègues sénateurs avaient également émis dans leur rapport l'idée de la création d'une commission composée de cinq membres : un magistrat de la Cour des comptes comme président, et quatre personnalités qualifiées nommées par l'Assemblée nationale et le Sénat. Pensez-vous que ces commissions seraient les bienvenues, sachant que l'ARCOM est peut-être moins indépendante du fait de la nomination de son président par le Président de la République ?
Les médias publics sont notre bien commun. Nous mesurons l'importance pour nos concitoyens des médias régionaux qui mettent à l'honneur nos territoires et nos acteurs locaux. Le véritable enjeu est de créer un service public territorialisé se déclinant sur tous les supports. Que pensez-vous de la proposition du Sénat de créer France Médias Régions pour être au plus près des territoires en lien avec nos collectivités locales ?
Vous avez parlé du caractère obsolète de la redevance. Je souhaitais partager une anecdote à ce propos. Alors que ma télévision ne fonctionnait plus, il m'est arrivé de déclarer ne pas avoir de téléviseur. Le fisc a fait valoir que je disposais d'un abonnement téléphonique, quand bien même mon téléphone ne me permettait pas de regarder la télévision ou d'écouter la radio. Si j'ai fini par payer ma redevance, je comprends que cette contribution puisse être difficilement vécue par les citoyens.
Dans le cadre de la budgétisation, serait-il possible d'imaginer un budget indexé sur le nombre de foyers français, en garantissant que ce montant ne diminue pas ?
Vos propos m'interrogent sur la prévisibilité des financements, le dynamisme des ressources, mais surtout sur l'indépendance de l'audiovisuel public. La redevance est-elle le meilleur moyen aujourd'hui pour assurer l'indépendance de l'audiovisuel public ? Je le crois sincèrement, car il s'agit d'un impôt identifiable par les Français. Nous savions que la fin programmée de la taxe d'habitation soulèverait la question de la suppression de la redevance, puisque ces deux impôts sont accolés l'un à l'autre.
Je pense que l'audiovisuel public participe pleinement du parcours républicain et de l'égalité des chances, notamment au travers de son indépendance.
La suppression de la redevance fait émerger le risque de voir apparaître un nouvel impôt pour la compenser. Par ailleurs, la suppression de cette redevance ne pose-t-elle pas la question de la disparition pure et simple de l'audiovisuel public à long terme ?
Plusieurs questions ont porté sur les garanties nécessaires à la préservation du principe d'indépendance. La création d'une commission indépendante a été proposée dans un rapport sénatorial. Elle s'inspire du modèle allemand de la KEF, qui rend ses avis en toute objectivité, puisqu'il s'agit d'un avis d'experts sur le montant devant être alloué aux entreprises de l'audiovisuel public pour réaliser les missions qui leur sont confiées. Ainsi, une telle commission peut apporter la sérénité et l'objectivité dans le débat sur le niveau de financement.
Plus largement, nous avons évoqué les deux principes essentiels que sont l'absence de régulation en cours d'année et la pluriannualité. Le premier doit être garanti par une loi organique. Ce rapport proposait également la création de France Médias Régions. Cette proposition soulève la question des coopérations à mener. France Info ou Culture Prime sont de bons exemples de ces coopérations, également établies avec Arte pour la captation de nos concerts. Ces coopérations sont sans équivalent, y compris à la BBC. Nos deux réseaux de proximité, cependant, doivent encore être renforcés en raison de leur rôle majeur pour l'implantation de notre service public sur le territoire. Des coopérations ont été entamées en ce sens et doivent être approfondies.
Je souhaitais également rappeler que le budget de l'audiovisuel français rapporté au nombre d'habitants classe la France en dessous de la moyenne de l'Union européenne, en 14e position. L'audiovisuel public n'est donc pas sur-financé, mais plutôt sous-financé.
Madame Bellamy a évoqué la diffusion des événements sportifs. La diffusion du tournoi de Roland Garros a été divisée en deux lots lors du dernier appel d'offres. Une partie de l'événement a été diffusée sur Amazon et l'autre sur France Télévisions. Si l'intégralité des matchs venait à être diffusée sur une plateforme privée, les 138 euros de redevance seraient rapidement réinvestis dans des plateformes payantes. Il faudrait dépenser 100 euros par mois pour accéder à l'ensemble des événements de football, dont la diffusion s'est largement privatisée ces dernières années. L'accessibilité du sport à tous est une question cruciale, alors que les droits sportifs augmentent fortement tandis que nos budgets diminuent.
J'ai lu le rapport des sénateurs Karoutchi et Hugonet sur la question de la fusion. Je suis d'accord avec certaines des propositions émises, comme la fusion de France 3 et de France Bleu, qui permettrait de renforcer notre ancrage local. Les propositions sur la massification du numérique me semblent également pertinentes. Des synergies ont été entamées sans attendre ce changement de gouvernance. La question de cette fusion se posera sans doute, à terme, mais elle nécessitera un débat. Nous devons nous demander si nos entreprises y sont prêtes, et étudier les coûts immédiats qu'une telle mesure pourrait engendrer.
Je ne crois pas avoir lu de propositions quant à la création d'une commission dans le texte. Une telle mesure pourrait être utile, mais je rappelle que les commissaires aux comptes, les conseils d'administration et la représentation nationale sont déjà chargés de vérifier nos comptes. La question n'est donc pas tant comptable que politique. Enfin, la commission ne saurait constituer à elle seule une garantie. Je fais totalement crédit au Gouvernement de sa bonne foi, mais il importe de nous assurer de la robustesse du système qui sera mis en place.
Je pense comme Madame Veil que le respect des garanties évoquées nécessite une réforme de la loi organique relative aux lois de finances.
Tout se passe comme si seule la capacité contributive des contribuables français avait été prise en compte ces dernières années. Si leur contribution est bien entendu nécessaire, nos besoins doivent aussi être appréciés de manière professionnelle et experte, et cela au plus près du terrain, en s'interrogeant sur ce que signifie la réalisation des missions de service public qui nous ont été confiées. La représentation nationale est dotée d'outils pour mener ces évaluations et ces audits.
S'agissant de la gouvernance, Arte se situe dans une configuration particulière. Pour reprendre une formule affectionnée par Monsieur Patino, Arte France est mariée à Arte Allemagne, et, ainsi, à l'ARD-ZDF. Nous fondre dans un ensemble unique reviendrait à nous forcer à divorcer, ce qui contreviendrait au traité interétatique et aux engagements des gouvernements français successifs depuis trente ans. Une réforme de la gouvernance d'Arte est donc impossible, ce qui ne nous empêche pas de travailler à des coopérations concrètes avec notre famille de l'audiovisuel française.
S'agissant des calendriers des COM, la logique voudrait que nous nous concertions avec nos partenaires allemands sur une durée équivalente, laquelle s'élève, côté allemand, à quatre ans, et s'achève fin 2024. Une prolongation de deux ans du COM actuel d'Arte permettrait donc de faire coïncider le travail d'évaluation conjointe des Français et des Allemands.
Si l'indépendance d'un média dépend de sa capacité à disposer de recettes prévisibles et sûres, et que la budgétisation est décidée, il nous semble que les propositions actuelles ne sont pas suffisantes d'un point de vue juridique pour convaincre nos partenaires. Il faudrait modifier la loi organique pour y faire figurer les dispositions concernant l'audiovisuel public.
Concernant la gouvernance, le développement des coopérations entre nos médias me semble positif, pour des raisons qui ne sont pas uniquement économiques. J'ai lu dans le rapport du Sénat que la tutelle avait déclaré qu'elle n'avait pas les outils pour contraindre les entreprises audiovisuelles à coopérer entre elles. Des éléments de la gouvernance globale du système peuvent donc encore être améliorés.
L'article de loi dont nous discutons induit des effets pour l'avenir alors que ce n'est pas dans ce texte et dans cette temporalité que sera traitée la question d'une commission indépendante ou de la garantie de l'absence de régulation infra-annuelle ou de visibilité pluriannuelle. La chronologie s'imposant à nous, nous devons nous interroger sur la prolongation des COM. Une prolongation de deux ans me paraît raisonnable et cohérente avec cette chronologie.
Vous avez rappelé que l'audiovisuel public jouait un rôle important, voire primordial dans notre vie démocratique. C'est précisément parce que nous sommes dans un État démocratique que nous avons un audiovisuel public.
Ne faut-il pas chercher l'indépendance ailleurs que dans la visibilité octroyée par votre budget ? Faut-il aller au-delà du champ de loi organique, en questionnant, peut-être, les grands principes constitutionnels ? Une vraie réflexion sur la pérennité d'un service public de l'audiovisuel me semble nécessaire.
À vous entendre, deux chemins semblent se dessiner pour notre audiovisuel public : d'un côté, celui d'un service public financé, indépendant, qui répond aux besoins des Français et gagnerait en audience ; de l'autre, celui d'un média gouvernemental, dépendant du pouvoir politique, qui gère la pénurie de ses ressources, et doit arbitrer entre les offres qu'il est en mesure de diffuser.
Ce choix se profile alors que le service public de l'audiovisuel arrive à la fin d'un cycle néolibéral et d'un plan social continu depuis plus de dix ans. La ministre de la Culture indiquait hier qu'il n'y avait selon elle aucune difficulté à trouver les 3,7 milliards d'euros qui viendront à manquer dans le budget de l'État – sans nous préciser où –, et alors que Madame Borne avait annoncé dans son discours de politique générale que le Gouvernement ferait baisser la dette publique en 2026 et le déficit public en 2027 sans augmenter les impôts. Ses propos vous rassurent-ils ?
Pour rebondir sur les propos de Monsieur Vannier, je rappelle que la somme dont nous parlons équivaut au budget du ministère de la Culture.
Pendant le confinement, seul le service public audiovisuel a pu mettre en œuvre dans l'urgence des supports éducatifs et culturels gratuits à disposition des élèves et des enseignants tout en respectant la liberté pédagogique. Ces supports étaient aussi rassurants pour les parents. Sans la compensation de la redevance, pourriez-vous garantir la gratuité de ces contenus ?
La question du financement de l'audiovisuel public n'est pas technique, mais éminemment politique. La récente condamnation de l'État pour tentative de perquisition d'une rédaction illustre que jusqu'en France, la liberté d'information est menacée.
Le mode de financement de l'audiovisuel public est révélateur de notre conception des médias, de leur indépendance et de notre rapport à l'information. Une ressource affectée est la seule à même de tenir les médias à l'écart d'une influence dominante de l'État.
La décision de l'État vous paraît-elle précipitée ? Seriez-vous favorables à ce que le Parlement, dans son pluralisme, se saisisse de cette question pour construire des accords durables ?
La présidente de France Médias Monde et le président d'Arte France nous ont expliqué que nous ne pouvions supprimer la redevance sous peine de contrarier la législation allemande. Je trouve ces propos déplacés devant les représentants de la nation. Devrions-nous supprimer la redevance pour complaire à nos voisins allemands ?
Vous n'avez cessé de dire que la redevance était synonyme d'indépendance, et que la budgétisation signifierait une perte d'indépendance ou une soumission au Gouvernement. Ne pensez-vous pas que la représentation nationale est capable, par une loi d'orientation et de programme, de garantir votre indépendance par la loi ?
Vos propos rendent difficilement compréhensible l'arbitrage du Gouvernement. Nous n'avons toujours pas eu accès au rapport de l'IGAC, alors que nous devons étudier la proposition de suppression cet après-midi. Le débat est donc largement escamoté. Les députés LFI-NUPES ont proposé un amendement de suppression de l'article portant suppression de la redevance, et de maintien d'un financement affecté et dynamique, rendu universel et proportionnel, permettant un gain de pouvoir d'achat pour 85 % des Français.
Si vous disposiez de la garantie de pérenniser voire d'étendre cette perception par sa progressivité, assisterions-nous toujours à des plans sociaux et à la dégradation de condition de travail des salariés ? Serait-il nécessaire d'envisager les fusions ? Auriez-vous la possibilité de rouvrir France Ô et de nouvelles chaînes ?
Pour rebondir sur les propos de Stéphane Mazars, un choc économique a déjà affecté France Télévisions en 2009 au moment de la fin de la publicité après le journal de vingt heures. Le Conseil constitutionnel avait conclu : « La loi doit fixer un montant permettant les missions de service public de l'audiovisuel public. La garantie de ressources de l'audiovisuel public est une condition de son indépendance. Le pluralisme et l'indépendance des médias de service public constituent des objectifs de valeur constitutionnelle ». Notre système de redevance est perfectible. Cependant, la budgétisation annuelle est un principe constitutionnel qui interdit presque structurellement une visibilité et une sécurité à long terme.
Nous sommes convaincus de l'importance des débats qui se déroulent à l'Assemblée nationale et du choix très politique sur l'avenir de l'audiovisuel public. Ce choix affectera l'offre d'information et l'offre culturelle que nous proposons. À cet égard, je ne connais pas de secteur qui, tout en démontrant sans cesse davantage de résultats, d'utilité et d'innovation, ait vu ses moyens fragilisés.
Monsieur Chudeau, Monsieur Patino et Madame Saragosse ne vous invitaient pas à complaire à l'Allemagne. Ils souhaitaient seulement éclairer la représentation nationale sur les conséquences du choix qu'elle s'apprête à faire sur le rayonnement de notre pays. Nos partenaires de l'Europe de l'Est montrent de grandes attentes vis-à-vis de l'appui que la France peut apporter à la construction d'un espace démocratique et citoyen. Nous sommes convaincus que les médias du service public y contribuent et souhaitons continuer à tenir ce rôle.
Je vous remercie de vous être rendus disponibles très rapidement. Cette table ronde nous a éclairés pour la suite de nos travaux et je vous remercie pour la qualité et la franchise de ces échanges. Soyez assurés de notre attachement à l'audiovisuel public. Chers collègues, nous nous retrouvons à 14 h 30 pour l'avis sur l'article 1er du PLFR.
La séance est levée à douze heures quinze.
Présences en réunion
Présents. – Mme Ségolène Amiot, Mme Emmanuelle Anthoine, M. Rodrigo Arenas, Mme Géraldine Bannier, M. Quentin Bataillon, Mme Béatrice Bellamy, M. Bruno Bilde, M. Idir Boumertit, Mme Anne Brugnera, Mme Céline Calvez, M. Roger Chudeau, Mme Fabienne Colboc, M. Alexis Corbière, M. Hendrik Davi, M. Francis Dubois, M. Inaki Echaniz, M. Philippe Fait, M. Jean-Jacques Gaultier, M. Frantz Gumbs, M. Yannick Haury, M. Fabrice Le Vigoureux, M. Jérôme Legavre, Mme Sarah Legrain, Mme Christine Loir, M. Alexandre Loubet, M. Christophe Marion, M. Stéphane Mazars, Mme Graziella Melchior, Mme Frédérique Meunier, M. Maxime Minot, Mme Caroline Parmentier, M. Jérémie Patrier-Leitus, Mme Isabelle Périgault, M. Stéphane Peu, Mme Béatrice Piron, Mme Lisette Pollet, M. Alexandre Portier, Mme Angélique Ranc, Mme Isabelle Rauch, M. Jean-Claude Raux, Mme Cécile Rilhac, Mme Véronique Riotton, Mme Claudia Rouaux, Mme Sophie Taillé-Polian, M. Boris Vallaud, M. Paul Vannier, M. Léo Walter
Excusés. – Mme Aurore Bergé, Mme Sophie Blanc, M. André Chassaigne, M. Raphaël Gérard, M. Stéphane Lenormand, M. Frédéric Maillot, Mme Francesca Pasquini, Mme Violette Spillebout
Assistaient également à la réunion. – M. Dino Cinieri, Mme Sophie Mette