Commission d'enquête sur le montage juridique et financier du projet d'autoroute a

Réunion du mercredi 15 mai 2024 à 15h30

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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La réunion

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La séance est ouverte à quinze heures quarante.

La commission auditionne M. Sébastien Bourget, associé-gérant de Quaero Capital SA et président de Quaero Capital (France) SAS, M. Mayeul de Margerie, gestionnaire d'investissements de Quaero Capital SA, ainsi que M. Manuel Ravara-Cary, gérant et conseil de TIIC 2 SCA SICAR, accompagné de M. Cédric Beauvois.

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Nous poursuivons nos travaux sur le volet financier de la convention de concession de l'autoroute A69, avec les auditions des sociétés actionnaires d'Atosca. Nous vous remercions de vous présenter devant notre commission d'enquête. Quaero et TIIC détiennent chacune 30 % des parts d'Atosca, soit 60 % du capital de la société concessionnaire. Votre audition vise à déterminer quand et pourquoi vos sociétés sont devenues actionnaires d'Atosca, le rendement financier attendu à travers cette participation et, plus généralement, à vous entendre sur les modalités de la convention de concession.

Je vous rappelle que notre audition est publique et retransmise sur le portail de l'Assemblée nationale.

Messieurs, je vous demande préalablement, en application de l'article 6 de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, de prêter serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité, et de dire « je le jure ». N'étant pas de nationalité française, M. Manuel Ravara-Cary est dispensé de cette formalité.

(MM. Sébastien Bourget, Mayeul de Margerie et Cédric Beauvois prêtent serment)

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Nous poursuivons avec vous un cycle d'auditions consacré au volet financier de la convention de concession, centré principalement sur l'actionnariat d'Atosca et sur l'équilibre financier de la convention. Nous examinerons lors d'auditions ultérieures les concours publics apportés par l'État, la région Occitanie, les départements de Haute-Garonne et du Tarn, la communauté d'agglomération de Castres-Mazamet et la communauté de communes de Sor et Agout.

Quaero et TIIC disposent chacune de 30 % des parts d'Atosca, soit 60 % du capital de la société concessionnaire, ce qui représente la majorité de ce capital. Pouvez-vous nous indiquer si ces 60 % représentent également 60 % des droits de vote au sein du conseil d'administration d'Atosca ?

Vos sociétés ont notamment pour raison sociale d'investir dans des projets d'infrastructures. Nous souhaitons connaître les raisons qui vous ont conduits à vous associer à NGE pour constituer le capital d'Atosca, et le rendement financier que vous en attendez. Lors de son audition, M. Thierry Bodard nous a fait part de 6 %, à propos desquels je ferai preuve d'exigence en vous posant des questions supplémentaires.

Je souhaite également savoir si, dans la démarche qui vous a conduit à devenir actionnaires d'Atosca, la rentabilité attendue de cette autoroute vous a semblé claire et suffisamment solide pour opérer votre investissement avec confiance. Il nous semble en effet, au regard des documents auxquels nous avons eu accès, des témoignages et des précédents tels que le faible trafic sur l'autoroute entre Pau et Langon, que les hypothèses de trafic sont parfois surestimées. S'il s'avérait que cette autoroute n'était pas rentable et enregistrait des déficits d'exploitation, seriez-vous prêts à assumer votre devoir d'actionnaire ? Aucun aménagement sur ce point n'est en effet prévu de la part de l'État.

Je vous ai envoyé un questionnaire complet et précis, communiqué à l'ensemble de mes collègues afin qu'ils puissent préparer leurs questions. Je vous demande de fournir les réponses dès aujourd'hui. Si nous manquons de temps, je vous inviterai à apporter toutes les réponses nécessaires par écrit. Si j'estime que toutes les informations utiles pour éclairer la commission d'enquête n'ont pas été communiquées, vous pourriez recevoir un second questionnaire. Au regard de la nébuleuse qui entoure Atosca, je vous invite à nous fournir des réponses utiles et précises.

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Manuel Ravara-Cary, gérant de TIIC 2 SCA SICAR

Nous apprécions cette invitation, car nous croyons à la nécessité d'un débat équilibré et apaisé sur ce projet.

TIIC est une société d'investissement paneuropéenne et indépendante, qui se consacre au financement des infrastructures. Depuis notre création en 2008, nous avons acquis une forte expérience dans ce secteur, avec une expertise particulière sur les projets de taille moyenne. Notre vocation est de nous impliquer sur l'ensemble du territoire européen. Nous apportons, à tous les projets d'infrastructures européens auxquels nous participons, une approche opérationnelle, en nous appuyant sur les compétences de nos équipes en gestion et en finance. Ces compétences ont été développées pendant de nombreuses années auprès des principaux opérateurs d'infrastructures et établissements de financement de projets en Europe. Comme toutes les sociétés d'investissement, nous fonctionnons par l'intermédiaire de différents fonds, dans lesquels nos souscripteurs investissent. Les activités de ces fonds se concentrent sur l'investissement dans les infrastructures de transport et les infrastructures sociales. Les investisseurs sont, pour la plupart, des investisseurs institutionnels, à l'image de la Banque européenne d'investissement. Nous investissons également, sous forme de concessions, dans l'autoroute A150, dans l'incubateur pépinière hôtel d'entreprises (IPHE), un incubateur d'entreprises présent sur le plateau de Saclay, et dans le train de la Mure, situé dans le département de l'Isère. Plus globalement, le groupe TIIC possède une expérience significative dans le secteur des infrastructures routières et autoroutières, ayant investi dans neuf projets routiers et autoroutiers au total à travers l'Europe, dont deux en France, l'A150 et l'A69. Du fait de notre histoire et de nos expériences, les projets de concession représentent la majorité des projets dans lesquels nous investissons. Avant de nous engager sur un projet, nous procédons à une évaluation approfondie, sous la forme d'une analyse précise basée sur plusieurs critères, tels que la nature de l'investissement, sa taille, la rentabilité attendue et les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) du projet. Plus globalement, nous tenons compte du secteur, de la géographie et du stade de développement.

Il me semble utile de vous expliquer la façon dont nous sommes arrivés, pour l'A69, dans le groupement d'entreprises et le rôle que nous y jouons. Nous avons été approchés par l'entreprise NGE pour constituer un groupement en amont de l'appel d'offres lancé par le ministère des transports. L'objectif était de réunir toutes les compétences techniques et financières nécessaires pour y répondre. Le projet de l'A150 ayant été une première occasion de travailler avec NGE, nous étions naturellement intéressés par les projets créant des partenariats durables et avions l'envie réciproque de collaborer. Lors de la constitution du groupement pour l'A69, nous souhaitions donc échanger sur un nouveau partenariat, nos compétences étant totalement complémentaires. De ce fait, un protocole de groupement a été signé en juillet 2019.

Il est important de vous expliquer la façon dont se forme un groupement dans le cadre d'une candidature. L'objectif étant de réunir les expertises et les compétences à travers des partenaires industriels et financiers, certains groupements disposent de la capacité, de l'expertise et surtout des fonds propres pour concourir par eux-mêmes. Nous intervenons dès lors qu'il existe un besoin de créer une équipe composée d'acteurs complémentaires. Notre savoir-faire consiste à accompagner des acteurs industriels sur le volet financier des projets. C'est dans ce cadre que nous participons à un groupement. La constitution d'une équipe pour candidater, qui prend la forme d'un groupement plutôt que d'une société où chacun est actionnaire, tient compte de la complémentarité et de l'apport de chacun dans un projet, sous la coordination d'un mandataire, en l'occurrence NGE. Les partenaires industriels sont chargés de concevoir le projet, tandis que les partenaires financiers contribuent principalement à la construction économique et financière. Pour toutes les phases du projet, c'est NGE qui, en tant que mandataire, était chargé de piloter et de coordonner l'ensemble du groupement. Notre implication a principalement consisté à mener, avec les autres membres du groupement, l'ensemble des analyses et études, de trafic, et de négocier la structure de financement avec les partenaires bancaires et les établissements prêteurs. Dès que le groupement est retenu et que la phase de réalisation du chantier commence, c'est la société concessionnaire Atosca, dont nous sommes actionnaires, qui est chargée de la gestion.

Le règlement de l'appel d'offres exigeait que la société concessionnaire soit créée spécifiquement pour le projet de l'autoroute A69. Ce schéma est aujourd'hui courant, notamment pour les appels d'offres de concessions d'autoroutes. Dans un groupement comme celui-ci, les acteurs doivent trouver le meilleur équilibre entre les différents partenaires, industriels d'une part et investisseurs d'autre part, sous la coordination du mandataire. Les acteurs industriels s'organisent pour définir la meilleure manière de construire le projet, en se concentrant particulièrement sur les aspects de concession et de construction, tandis que les partenaires financiers se concentrent principalement sur le volet économique et financier du projet. Les investissements ayant pour vocation de permettre à des acteurs industriels de répondre à une candidature, nous sommes complémentaires en permettant à ces acteurs de candidater, quand d'autres candidats peuvent s'autofinancer. La répartition correspond donc à la capacité contributive de chacun. Logiquement, nous assumons une majorité de l'apport et supportons le projet et, en conséquence, le risque financier, à proportion égale. Lors de la constitution d'Atosca, TIIC a pris l'engagement d'apporter des fonds propres dans la phase de construction, à hauteur d'environ 45 millions d'euros. À la mise en service, ces fonds propres se décomposent en 9 millions de capital et 36 millions de dettes subordonnées d'actionnaires. En août 2023, TIIC a cédé une part de sa participation, soit 5,3 % du capital et de la dette subordonnée d'actionnaires qu'il détenait dans Atosca, à Tarn Sud Développement. À ce jour, l'engagement de TIIC vis-à-vis d'Atosca est donc d'apporter un total de 42,5 millions d'euros, décomposés, à compter de la mise en service, en 8,5 millions de capital et 34 millions de dettes subordonnées. Nous sommes également actionnaires de la société Tarn Sud Développement, ce qui nous permet de participer aux assemblées générales d'entreprises.

Vous nous interrogez sur les raisons d'un financement principalement par prêts subordonnés plutôt que par une participation plus élevée au capital social d'Atosca. Les deux possibilités présentent le même degré d'engagement et de prise de risque de la part des actionnaires. Les financements en fonds propres ou quasi-fonds propres impliquent une prise de risque similaire à celle d'une participation plus importante au capital social d'Atosca. Ce modèle correspond à un schéma classique. Nous fonctionnons en cascade de trésorerie. Le remboursement des prêts subordonnés intervient, en effet, après le remboursement des prêts établis auprès des banques.

Ce schéma vise également à optimiser la durée de la rémunération des actionnaires. Il s'agit d'un modèle optimisé pour le concédant et les acteurs publics. La rémunération à travers le modèle classique unique à compter de 2045 aurait mécaniquement augmenté le niveau de subvention publique, ainsi que les tarifs. Dans notre dossier de candidature, nous avons proposé au concédant la mobilisation de 149 millions d'euros par le biais d'un investissement en fonds propres et quasi-fonds propres des actionnaires. Ce modèle permet de minimiser le recours à la subvention d'équilibre. En effet, cela nous a permis de contracter des prêts à hauteur de 275 millions d'euros auprès des établissements prêteurs. Le capital social d'Atosca est aujourd'hui de 10 000 euros. À compter de la mise en service de l'A69 à la fin de 2025, 20 % des prêts subordonnés d'actionnaires seront transformés en capital social, ce qui l'élèvera à 30 millions d'euros. C'est la raison pour laquelle il n'existe pas, dans la convention de concession, de clauses de recapitalisation automatique. L'importance des fonds propres apportés par les actionnaires permet d'assurer la solidité nécessaire pour envisager l'avenir et, le cas échéant, se prémunir contre des scénarii dégradés. Parmi les critères d'attribution choisis par les services de l'État, figure la robustesse financière et économique.

Sur la rémunération des prêts subordonnés, la mobilisation des fonds propres via l'investissement en capital social a permis de réduire la subvention d'équilibre, conformément à la proposition contenue dans notre candidature. Dans ce schéma, avant de commencer le chantier et avant que les banques n'acceptent le premier tirage sur la dette, les actionnaires transfèrent leurs fonds propres. Nous avons effectué un investissement avant les banques. Nos prêts en tant qu'actionnaires sont subordonnés aux prêts bancaires et comportent un risque bien plus important. C'est pourquoi la rémunération de 6 % est logiquement plus élevée que pour les prêts bancaires, dont le taux est de 4,6 %. Enfin, les intérêts sur les dettes subordonnées d'actionnaires ne sont payés que si la situation financière de la société le permet, en fonction du trafic effectif.

Durant la période de construction, les actionnaires ne reçoivent aucun paiement d'intérêts. La rémunération complémentaire des actionnaires, dont vous faites mention, sera payée par les prêteurs et non par les fruits d'exploitation. Les banques ne permettant pas de rémunération pendant la période de construction, il s'agit d'une forme de contrepartie. Le versement de 4,1 millions d'euros n'aura lieu qu'à condition que la mise en service soit effective et à compter du moment où toutes les sommes dues aux constructeurs auront été payées. C'est une logique similaire qui régira la politique de distribution d'Atosca aux actionnaires, qui dépend principalement des résultats d'exploitation de la concession, par définition inconnus à ce jour. Les moyens d'Atosca doivent lui servir prioritairement à assurer son intérêt social, c'est-à-dire le service public autoroutier, avec une continuité d'exploitation. En outre, Atosca doit honorer les contrats de financement bancaire, c'est-à-dire rembourser les dettes contractées pour la construction, intérêt et principal. Enfin, dans le respect des limites fixées par les contrats de financement bancaire, Atosca peut verser les intérêts de la dette subordonnée avant de verser les dividendes. Elle interviendra à la fin de la cascade de trésorerie et sera donc également, en grande partie, subordonnée au remboursement de la dette, les établissements prêteurs étant naturellement prioritaires. Il s'agit d'un schéma standard sur ce modèle de concession, dans lequel se matérialise le risque pour les actionnaires, et donc le rendement attendu. La prise de risque est au cœur de notre modèle. Par conséquent, le rendement attendu dépend du trafic réalisé, et donc des résultats d'exploitation de l'entreprise.

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Sébastien Bourget, associé-gérant de Quaero Capital SA et président de Quaero Capital (France) SAS

Nous investissons aux côtés de TIIC, partageant la même activité et la même conviction concernant le projet de l'A69. Quaero Capital est une société de gestion d'actifs indépendante possédant 2,7 milliards d'euros d'encours. Fondée en 2005 en Suisse, son siège est établi à Genève et ses bureaux répartis entre Paris, Luxembourg, Londres et Zurich. Nous exerçons notre activité avec l'agrément de l'Autorité des marchés financiers en France, de l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers en Suisse et de la Financial Conduct Authority au Royaume-Uni. Notre activité consiste à gérer des fonds confiés par des investisseurs institutionnels pour les investir, pour leur compte, dans des thématiques prédéfinies. Celle qui nous intéresse aujourd'hui est le financement d'infrastructures en Europe, avec une part importante en France. Dans le domaine des infrastructures, nous gérons environ 1,5 milliard d'euros. Notre stratégie est de financer des projets de petite et moyenne dimension à travers l'Europe, auxquels nous apportons nos fonds d'actionnaires. Ces opérations, qui rencontrent des besoins de financement importants, sont pourtant relativement délaissées par la plupart des acteurs français et internationaux, qui préfèrent se concentrer sur les opérations de grande taille. En règle générale, nous investissons quelques dizaines de millions d'euros dans les projets auxquels nous participons, qui représentent eux-mêmes quelques centaines de millions d'euros de coûts de travaux. Du fait de sa dimension, le projet de l'A69 s'inscrit donc pleinement dans notre stratégie.

Notre stratégie d'investissement consiste, d'autre part, à prioriser le financement de nouvelles infrastructures, qu'il s'agisse de constructions ou de réhabilitations. Nous prenons des risques, car nous ne pouvons pas nous appuyer sur les certitudes d'une infrastructure préexistante. Nous investissons dans divers secteurs afin de répondre à des besoins d'investissement massifs, en France et en Europe. À titre d'exemple, nous avons contribué au déploiement de la fibre optique dans les zones rurales de la région Grand Est. Nous investissons massivement dans la transition énergétique et dans le développement d'infrastructures de réutilisation de l'eau, permettant aux industriels de prélever moins d'eau dans le milieu naturel et d'en réutiliser davantage. Notre développement dans le financement d'infrastructures s'inscrit dans la continuité des politiques publiques initiées au début des années 2000. À la suite des crises financières de 2007 et 2012, l'objectif était de relancer nos économies en soutenant l'investissement dans l'économie réelle, notamment par le développement et la modernisation des réseaux d'infrastructures. Ces projets stimulent en effet l'activité économique à court terme durant la construction en mobilisant une main-d'œuvre importante. Par exemple, le chantier de l'A69 mobilise aujourd'hui plus de 800 compagnons, et ce sont bientôt plus de 1 200 qui seront sur le chantier. Ces projets dynamisent également l'activité économique à moyen et long terme. Le projet d'A69 facilitera ainsi l'accès à un bassin de vie de 140 000 habitants et de 50 000 emplois, qui n'était pas encore raccordé à sa métropole par une autoroute.

Il est nécessaire, pour comprendre les raisons de notre investissement dans ce dossier, de rappeler le contexte dans lequel il s'est développé. Le dossier de consultation est né au cours de l'été 2020, et nous avons remis notre offre à l'État en février 2021, en pleine pandémie, alors que l'économie française connaissait une récession d'une brutalité sans précédent. Cette crise a révélé l'importance des voies logistiques et les inégalités d'accès aux services publics entre les aires urbaines et les territoires ruraux. C'est dans ce contexte compliqué que nous avons choisi de nous impliquer, en France, dans le projet de l'A69. Compte tenu de la situation, nous avons dû effectuer des projections, et avons ainsi mené des études économiques sur l'économie locale et sur des évolutions structurelles telles que l'essor du télétravail. Les conclusions nous ont convaincu de la valeur ajoutée du projet d'A69. Deux autres éléments sont venus conforter notre intérêt : le gain de temps de parcours et le flux libre. Le développement de cette autoroute en flux libre en fait une autoroute de nouvelle génération, car cela diminue son emprise et, grâce à la suppression des barrières de péage, nous évitons les surconsommations et les rejets polluants à ces barrières. Leur absence conforte également l'idée d'un gain de temps de parcours, car le flux libre permet au trafic de suivre son cours, et évite les ralentissements aux heures de pointe.

Je souhaite ensuite présenter la façon donc nous avons formé notre groupement et travaillé avec nos partenaires durant l'appel d'offres. Traditionnellement, les appels d'offres publics sont considérés avec intérêt par les grandes entreprises du secteur de la construction. La plupart d'entre elles sont cotées en bourse, disposent de bilans solides, et sont capables de financer ces opérations sur leur bilan. À leurs côtés, se trouvent des entreprises de taille intermédiaire, qui, si elles possèdent une expertise forte, disposent de ressources financières restreintes, qui les conduisent à s'associer avec des fonds d'infrastructures comme les nôtres, qui les accompagnent en apportant des fonds propres. Ces acteurs forment des groupements qui combinent expertise industrielle et financière, ce qui amplifie la concurrence dans les projets d'appel d'offres en élargissant le cercle des participants au-delà des seuls acteurs finançant ces opérations sur leur bilan. C'est cette logique que nous avons suivie pour le dossier de l'A69. Les collectivités et l'État peuvent alors sélectionner l'attributaire de la consultation au terme d'une compétition rendue plus intense par la diversité des acteurs impliqués.

Notre groupement s'est formé en 2018, lorsque le projet a été déclaré d'utilité publique. En 2019, nous avons rapidement entamé des discussions avec NGE, Ascendi et TIIC pour élaborer une candidature. Ayant collaboré avec NGE sur le déploiement de la fibre optique, et avec Ascendi sur le dossier de la route Centre-Europe Atlantique, nos équipes se connaissaient bien. Le volume de fonds d'actionnaires à mobiliser, particulièrement élevé, a justifié l'implication de deux fonds d'investissement, Quaero et TIIC, pour collaborer sur ce dossier.

Sur la répartition du capital : les industriels se sont partagé 40 % du capital, et nous avons partagé le reste avec TIIC, nous engageant initialement à hauteur de 30 % chacun. Le fait que les industriels soient actionnaires des projets représente pour nous un gage de robustesse et crée un alignement d'intérêts qui a permis de concevoir l'équilibre des participations durant l'appel d'offres.

Sur les montants de fonds d'actionnaires que nous avons apportés, au moment de la signature de la convention de concession, nous nous sommes engagés à hauteur de 45 millions d'euros. En août 2023, nous avons cédé 5,3 % de notre participation à Tarn Sud Développement, comme l'ont fait les autres actionnaires initiaux. À ce jour, notre engagement s'élève donc à 42,5 millions d'euros, pour un total de fonds d'actionnaires de 149 millions d'euros. Ayant apporté 28,4 % des fonds d'actionnaires, nous détenons donc 28,4 % des droits de vote, conformément à l'alignement complet entre la quote-part du capital et celle des droits de vote.

Vous nous avez également interrogés sur l'existence de clauses de recapitalisation en cas de déficit d'exploitation. Si la convention de concession ne prévoit pas d'engagement spécifique sur ce point, le plan de financement est robuste et capable de supporter une dégradation significative du trafic. Nous assumerons notre responsabilité d'actionnaires, comme nous l'avons déjà fait face à des difficultés sans précédent. Au moment de notre offre initiale, nous prévoyions d'engager 103 millions d'euros de fonds d'actionnaires, avec une enveloppe de sécurité qui n'avait pas vocation à être utilisée. Toutefois, en raison du contexte macroéconomique dégradé, notamment du fait de la guerre en Ukraine, et des difficultés liées à la période du covid, qui ont entraîné une inflation imprévue et une hausse des taux d'intérêt, nous avons dû augmenter cette enveloppe initiale à 149 millions d'euros. Cela représente 35 % des financements privés, incluant la dette bancaire et les fonds d'actionnaires. Ce volontarisme témoigne de notre engagement à soutenir le dossier et à achever la construction, désormais bien avancée.

Nous avons également évoqué le sujet de la forme que prennent les fonds d'actionnaires. Ils se composent de 80 % de dettes d'actionnaires et de 20 % de capital social. Dans les faits, ces deux instruments présentent le même degré d'engagement et le même niveau d'exposition au risque pour les actionnaires. Si nous utilisons la dette d'actionnaires, c'est en raison de sa plus grande souplesse de fonctionnement en période de construction, tant pour l'injection des fonds que pour leur rémunération. La rémunération de cette dette est fixée à 6 %, soit environ 2 % de plus que la dette bancaire. Cet écart s'explique par le fait que le remboursement de la dette bancaire est prioritaire, tandis que la dette d'actionnaires est subordonnée.

Une autre question portait sur la rémunération à la mise en service, liée au fait qu'aucun actionnaire ne perçoive d'intérêts durant la période de construction. Le plan de financement prévoit donc un paiement ponctuel de 4,1 millions d'euros à la mise en service, correspondant à la date de mise en exploitation. Cette somme a été dimensionnée en appliquant un taux d'intérêt de 1,2 % aux fonds d'actionnaires injectés durant la période de construction. Ce mécanisme de paiement unique à la mise en service permet de limiter le coût de portage des fonds d'actionnaires pendant les premières années du projet et de réduire son coût global.

Enfin, sur la politique de distribution, la trésorerie est allouée en priorité au coût du projet, puis au remboursement des banques. Si le trafic et les recettes sont suffisants, les actionnaires peuvent espérer des distributions entre la mise en service et 2034, bien que l'essentiel de la trésorerie durant cette période soit alloué aux banques. À partir de 2034, aucune distribution n'est possible avant le complet remboursement des banques. En résumé, nous investissons nos fonds avant d'utiliser la dette bancaire, alors que notre rémunération n'intervient que tardivement, car la capacité financière est d'abord affectée au coût du projet, puis au remboursement des banques. Cet engagement fort de la part des actionnaires a permis de convaincre les banques de contribuer au projet à hauteur de 275 millions d'euros, dont 85 % proviennent de banques françaises. Nous avons également pris soin d'associer les caisses locales, montrant ainsi notre volonté d'impliquer les acteurs économiques du territoire. Cette mobilisation importante de la dette bancaire et des fonds d'actionnaires a permis de limiter le besoin de subventions publiques pour ce projet.

La société qui porte notre participation dans Atosca se nomme QEIF II Development Holding et possède une structure juridique luxembourgeoise. Cela s'explique par le fait que ces structures sont connues des investisseurs européens, qui sont moins coutumiers des structures de fonds françaises. Nous avons donc choisi cette structure pour faciliter l'arrivée des investisseurs dans nos fonds. Les investisseurs français représentent néanmoins une part importante, puisque 50 % des capitaux sont apportés par des investisseurs institutionnels français, tels que des mutuelles de santé, des compagnies d'assurance et des caisses de retraite. Le solde est exclusivement apporté par des investisseurs institutionnels européens, avec une proportion importante provenant de la Banque européenne d'investissement. Notre fonds a également investi dans quinze participations au sein de secteurs variés et, pour faciliter la supervision du portefeuille, il était logique de rassembler ces participations sous une société-mère qui les porte, QEIF II Development Holding. Cette organisation ne nous procure aucun avantage particulier, comparativement à une structure de fonds française. Son seul mérite est d'être connue des services administratifs et juridiques des investisseurs européens non français, ce qui facilite leur participation dans nos fonds. Il est important de souligner que la société de gestion du fonds, Quaero Capital France SAS, dont je suis le président, est française et exerce son activité avec l'agrément de l'Autorité des marchés financiers.

Pour conclure, l'autoroute A69 a été souhaitée par l'État, qui a confié la responsabilité de sa mise en œuvre à Atosca. En tant qu'actionnaires, nous avons à cœur de mener à bien ce projet. Nous sommes conscients que si cette autoroute est contestée par certains, elle est également attendue par d'autres, et qu'il s'agit du lot commun des projets d'infrastructures utiles.

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Vous avez fait part de vos motivations pour investir dans Atosca et dans le projet de l'autoroute A69 au sortir de la crise sanitaire, et je souligne ici votre courage. En tant que député de la troisième circonscription du Tarn, je pensais sincèrement qu'aucune société ne répondrait aux appels d'offres et que le projet serait remis en question. Je vous remercie donc d'avoir pris le risque de cet investissement.

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Je reviens sur le contrat de concession, qui prévoit une rémunération de 6 % de la dette subordonnée consentie par les actionnaires, dont la mention se trouve en page 4 de l'annexe 18. Sur la dette senior, si les garanties et les établissements sont mentionnés, ces informations sont manquantes pour ce qui concerne votre montant de plus de 91 millions d'euros. Pouvez-vous nous communiquer le nombre d'établissements auprès desquels les actionnaires se sont endettés au titre de la dette subordonnée d'actionnaires ? Malgré vos propos, le taux de 6 % nous paraît confortable, et nous nous étonnons qu'il ne soit pas fait mention de cette information.

Par ailleurs, il nous a été indiqué que les actionnaires ont emprunté à un taux situé entre 4,6 et 4,7 %. Est-ce un taux habituellement pratiqué pour des opérations similaires ?

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Sébastien Bourget, associé-gérant de Quaero Capital SA et président de Quaero Capital (France) SAS

Votre première question concernait les institutions auprès desquelles les actionnaires se financent. Cette dette est apportée par les actionnaires eux-mêmes, à travers des fonds qu'ils fournissent à partir de leurs propres ressources. L'appellation dette d'actionnaires indique que, s'il s'agit d'une dette pour la société de projet, il s'agit, pour les actionnaires, d'une avance faite à cette société.

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Je comprends donc que vous n'avez pas emprunté et qu'il s'agit de fonds propres. Le taux de 6 % est-il en réalité un taux net ?

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Sébastien Bourget, associé-gérant de Quaero Capital SA et président de Quaero Capital (France) SAS

En effet. La notion financière est celle de quasi-fonds propres, qui sont nommés fonds d'actionnaires. Il s'agit d'une modalité d'injection caractérisée par sa simplicité. La rémunération nette pour l'actionnaire est de 6 %.

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Il ne s'agit pas de 4,67 % jusqu'à 6 %, mais uniquement de 6 % ?

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Sébastien Bourget, associé-gérant de Quaero Capital SA et président de Quaero Capital (France) SAS

Il s'agit de deux sujets différents. Pour les instruments de dette bancaire, il s'agit d'une dette mise en place par la société concessionnaire Atosca, qui a emprunté auprès d'un consortium de dix banques, à qui elle paye un taux d'intérêt. Ce taux d'intérêt comporte plusieurs composantes : une marge de crédit d'environ 2,5 % sur une durée de trente ans, un taux de base de 1,55 %, et enfin une marge de swap, appliquée, car l'emprunt est à taux variable. Afin de protéger la société concessionnaire des fluctuations des taux d'intérêt et des augmentations futures, nous avons mis en place un instrument de couverture contre le risque de taux, une sorte d'assurance coûtant environ 0,15 %. En additionnant le taux de base, la marge de crédit et la marge de swap, nous obtenons un taux global situé entre 4 % et 5 %.

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Il me semble avoir compris qu'une partie des fonds provient des actionnaires, utilisant leurs propres ressources, tandis qu'une autre partie est obtenue par des emprunts auprès d'un consortium. Pourriez-vous étoffer vos explications afin que nous puissions avoir une position nette sur ce sujet ?

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Manuel Ravara-Cary, gérant de TIIC 2 SCA SICAR

Nous abordons différents sujets. Pour la société concessionnaire, il existe une dette bancaire avec un taux d'intérêt d'environ 4,7 % et une dette actionnaire avec un taux de 6 %. L'injection de capitaux dans la société est effectuée de deux manières, qui sont la dette actionnaire et les capitaux propres.

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Nous évoquons donc deux éléments différents : la dette de 275 millions d'euros et la dette senior résultant d'un emprunt avec un taux de 4,67 %. Nous avons connaissance des établissements bancaires pour cette dernière, mais pas pour le reste, portant sur la dette subordonnée d'actionnaires, dont vous nous indiquez qu'il s'agit de fonds propres. Confirmez-vous que le taux de 6 % est le taux net de rentabilité ?

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Sébastien Bourget, associé-gérant de Quaero Capital SA et président de Quaero Capital (France) SAS

Nous le confirmons.

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Cela me semble être une excellente rémunération, même si elle intervient après le remboursement des dettes bancaires.

Le tableau d'amortissement montre que celui-ci cesse au 31 décembre 2046. Cela signifie-t-il que l'amortissement sera achevé au 1er janvier 2047 ? Serez-vous bien, comme l'indique votre tableau, bénéficiaire jusqu'en 2077, avec une rémunération à hauteur de 6 % ?

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Sébastien Bourget, associé-gérant de Quaero Capital SA et président de Quaero Capital (France) SAS

La difficulté réside dans la complexité des instruments utilisés. La rémunération de 6 % concerne uniquement la dette d'actionnaires, mais il existe également une rémunération pour le capital social. Les prêteurs, qui apportent 275 millions d'euros, souhaitent toujours s'assurer que, même dans le pire des cas, la dette sera remboursée. Nous avons donc proposé deux scénarii, qui correspondent pour l'un à un cas de base et pour l'autre à un cas dégradé. Le tableau en annexe représente le cas de base bancaire. Cependant, dans un cas dégradé, la dette est remboursée en trente ans, soit jusqu'en 2052. Pendant cette période, les actionnaires sont peu rémunérés, avec quelques distributions entre la mise en service et 2034, puis plus aucune. Il est donc logique que les actionnaires, qui apportent 149 millions d'euros de fonds propres, soit plus de 50 % de la dette bancaire, soient rémunérés durant les vingt années suivantes. Les trente premières années sont principalement consacrées aux coûts du projet, puis au remboursement des banques. Durant les vingt années suivantes, les actionnaires, qui ont été peu rémunérés, perçoivent des distributions.

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La rémunération prévue pour les actionnaires a été validée, contrôlée par l'État et acceptée. Tout cela est parfaitement transparent dans le cadre du contrat de concession.

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Si l'objectif du secteur privé est de faire des bénéfices, l'État doit en revanche fournir des explications. En tant que législateurs, nous sommes ici dans notre rôle de contrôle et d'évaluation des politiques publiques. Or rien n'est transparent, puisque ces éléments étaient couverts par le secret des affaires et n'étaient ni visibles ni analysables dans le cadre de la concession. J'ai d'ailleurs reçu, à la suite de ma première demande, le contrat, dont une partie était occultée. En tant que rapporteure du rapport spécial sur les transports à l'époque, et plus tard en tant que rapporteure de la commission d'enquête, j'ai fait valoir mes droits, et n'ai pu accéder à ces éléments que dans un second temps. Le tableau d'amortissement n'était pas visible. Confirmez-vous donc qu'au bout de vingt-trois ans, l'infrastructure sera amortie ?

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Sébastien Bourget, associé-gérant de Quaero Capital SA et président de Quaero Capital (France) SAS

La dette bancaire ayant une maturité contractuelle de trente ans, nous disposons de cette durée pour rembourser cette dette. Cependant, les banques souhaitent être remboursées le plus rapidement possible. Vous trouverez, dans l'annexe 18, un tableau d'amortissement correspondant au cas de base bancaire. Il a été conçu pour déterminer l'échéancier de couverture de la dette bancaire contre les hausses des taux d'intérêt. La dette bancaire initiale sera donc, si elle n'est pas refinancée, amortie entre vingt-trois et trente ans, voire moins.

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Selon le contrat signé avec l'État, vous aurez donc amorti la dette au bout de vingt-trois ans.

Si vous vous êtes félicités de l'intégration des industriels au pacte d'actionnariat, je remarque toutefois que cela n'a pas été fait de manière transparente. Dans les comptes sociaux de fin d'année de TIIC, il est fait état d'Opale Invest et de sa montée à hauteur de 5,3 % au capital d'Atosca, financée par différentes sociétés locales, dont le groupe Pierre Fabre. Comme l'indique le contrat, tout cela était prévu de longue date, puisque l'annexe 16 stipule un transfert de la part du concédant préalablement à la signature du contrat de concession. Nous recevrons d'ailleurs prochainement Tarn Sud Développement, à qui nous poserons également la question. Pouvez-vous nous fournir des éléments d'explication sur cette opacité, alors même que, tout comme vous, l'État se félicite de la montée au capital de sociétés tarnaises ?

Vous indiquiez d'autre part qu'avec cette entrée au capital précitée au capital de Tarn Sud Développement, Quaero avait réduit sa participation pour atteindre 28,4 %. Aussi, si Opale Invest, avec un capital de 10 000 euros, transformé en Tarn Sud Développement avec 8 600 000 euros, n'était pas entré au capital, vous auriez supporté la différence, au moins en avance. Cela signifie finalement que, dans l'équilibre financier, nous n'étions pas au même niveau, notamment par rapport aux apports des collectivités locales et à la subvention d'équilibre, qui était de 270 millions d'euros, ramenée à 220 millions puis à 110 millions, et finalement à 23 millions, car les 75 millions de l'apport en nature sont exclus. J'ignore par ailleurs à combien l'entrée au capital à hauteur de 5,3 % est valorisée en montant, et souhaite des éclaircissements sur ce point. Ce montage financier impacte logiquement l'équilibre financier de l'opération.

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Manuel Ravara-Cary, gérant de TIIC 2 SCA SICAR

Lors des travaux sur la concession, tous les actionnaires ont accepté un compromis avec l'intention de s'associer à des partenaires locaux. Nous avons ainsi convenu de céder une participation du capital à une société locale, initialement nommée Opale Invest, et qui a ensuite changé de nom pour devenir Tarn Sud Développement. Nous avons donc tous cédé, de manière proportionnelle, 5,3 % de notre participation. Cela n'affecte en rien la solidité financière de la concession, car tous les fonds propres ont été engagés par les actionnaires dès le début. Par la suite, nous avons transféré cette participation à une société locale, car nous estimons qu'il est nécessaire de maintenir un ancrage territorial dans le capital.

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Sébastien Bourget, associé-gérant de Quaero Capital SA et président de Quaero Capital (France) SAS

Je comprends que vous puissiez regretter le manque de transparence. Je précise que l'Autorité de régulation des transports (ART) a confirmé que la rémunération des actionnaires était conforme à l'équilibre des risques et aux pratiques de marché. Ces dossiers complexes, qui impliquent de nombreux enjeux industriels, ne peuvent pas être intégralement portés à la connaissance du public. La transparence doit cependant être mesurée à l'aune des communications faites au concédant et, de ce point de vue, une pleine transparence envers le concédant est assurée. Les actionnaires initiaux, que sont NGE, Ascendi, TIIC et Quaero, se sont engagés à apporter 100 % des fonds d'actionnaires à la signature du contrat de concession en avril 2022, et les ont effectivement apportés. Nous avions également mentionné la possibilité, pour des entreprises locales, d'entrer au capital jusqu'à 10 %, sans que cela n'affecte en rien le plan de financement. Quaero disposait même, si nécessaire, d'une capacité supérieure, du fait de sa vocation à investir. Si nous avons diminué notre participation pour faire entrer des entreprises locales, c'était dans le but d'associer les acteurs économiques du territoire à la réussite du projet. Il s'agit donc d'un enjeu d'acceptation locale, et non d'une nécessité financière. C'est également pour cette raison que nous avons associé les banques locales et les caisses locales.

Pour comprendre les raisons pour lesquelles ces actionnaires n'ont pas été intégrés dès le début, il est nécessaire de souligner l'intensité des négociations menées, dans un contexte de marché impliquant une multitude de parties prenantes, de la phase d'offre à celle de bouclage. Nous avons dû négocier les conventions de financement, les contrats de construction, les contrats d'exploitation, les contrats d'interface, ainsi que les annexes, qui représentent des milliers de pages. Nous étions quatre actionnaires avec, face à nous, dix banques. En raison de son intensité, ce travail de mise au point ne pouvait être mené que par des partenaires habitués à ce type de projet, et il n'était pas envisageable d'associer dans cette phase des entreprises locales, qui n'ont pas la même expérience. C'est pour cette raison que leur participation n'était pas une condition imposée, mais une opportunité d'associer le territoire au projet.

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Je m'étonne justement qu'en dépit du contrat, qui prévoit l'ensemble de ces éléments, rien n'ait été fait de façon transparente. Certaines personnes nous ont certifié que le groupe Pierre Fabre, par exemple, n'était pas partie au contrat et ne le serait pas, puisqu'il se limitait à des campagnes d'influence en faveur de l'A69. Or tout était prévu, y compris la présence du groupe Pierre Fabre au sein de Tarn Sud Développement. Vous comprenez donc que le défaut de transparence, qui ne semble pas être de votre fait, mais de celui de l'État, soit un réel sujet de préoccupation. La question sera posée à l'État, car ce sujet fait naître une suspicion sur ce montage, non pas d'un point de vue légal, mais sur la transparence qu'il convient de respecter pour les contrats de concession, en particulier dans le contexte actuel. Je constate qu'il vous est demandé de ne pas réagir sur ce sujet. Les questions seront posées au ministère chargé des transports. Si cette montée au capital de 5,3 % peut être légalement acceptable, elle ne l'est pas en termes de transparence. Elle a eu des effets sur la valeur actuelle nette socioéconomique (VAN-SE) et sur son calcul, notamment par rapport à la contribution des collectivités locales. Nous peinons à comprendre comment cette VAN-SE, qui avait été évaluée à 508 millions d'euros dans un premier temps, qui est passée à 98 millions d'euros à la suite de l'évaluation faite par le commissariat général à l'investissement (CGI), soit subitement passée, en 2021, dans un document communiqué par Atosca, à 788 millions d'euros. Cette dernière estimation n'intègre pas, en effet, l'apport en nature, et l'on fait entrer de façon non transparente, au capital, à hauteur de 5,3 %, des entreprises qui n'étaient pas prévues au contrat dans l'équilibre financier.

Ma prochaine question est relative à l'annexe 12, qui concerne les fermes solaires et dans laquelle nous trouvons deux parties grisées. Si je peux comprendre l'application du secret des affaires au moment de l'appel d'offres, le fait de l'appliquer sur des sujets tels que les fermes solaires, lorsque des députés ou des citoyens souhaitent consulter un contrat de concession, m'échappe complètement. D'ailleurs, cela doit vous échapper également, puisque personne n'a demandé le huis clos sur ce dossier. En page 6 de l'annexe 12, il est fait état d'une ambition environnementale concrète. Atosca a déjà engagé une étude prospective sur ce projet. Une dizaine de sites répondant aux premiers critères de délaissement et sans enjeux environnementaux ont été identifiés, avec un objectif d'installer 40 mégawatts opérationnels dès la mise en service de l'autoroute. La question de la superficie à y consacrer fait débat. Selon moi, elle se situe entre 80 et 120 hectares. Ce point, qui figure au contrat dont vous êtes signataires, a-t-il contribué à votre accord sur ce dossier, puisque cette autoroute va également produire de l'électricité via du photovoltaïque, générant ainsi des recettes ? Ces recettes seront rapportées au chiffre d'affaires, qui a certainement représenté l'un des éléments du calcul de la redevance. La page 21 nous apprend que le contrat décide des délaissés, c'est-à-dire des parcelles sans qualité environnementale. Or, ce n'est ni au concédant ni au concessionnaire de déterminer une valeur environnementale, mais à l'Autorité environnementale. Sur les délaissés, nous rencontrons également un problème avec l'arrêté interdépartemental, car ils ne peuvent pas avoir deux destinations, l'une pour des fermes solaires et l'autre pour les mesures compensatoires.

La question de l'opacité se pose à nouveau, puisque nous constatons qu'un accord de joint-venture a été conclu entre Atosca, le groupe Pierre Fabre et Gaïa Energy afin de développer ces fermes solaires dès la mise en service de l'autoroute. Nous souhaitons que cet accord nous soit communiqué, car il figure dans le contrat. Les agriculteurs du Tarn s'intéressent à ce sujet, notamment en ce qui concerne les mesures compensatoires, car certaines parcelles de délaissés pourraient revenir à la nature ou à l'agriculture.

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Le fait que vous ayez accepté d'être entendus en audition publique et non à huis clos démontre que la transparence est assurée. L'annexe 16 du contrat de concession, validé par l'État, prévoit clairement la possibilité d'ouvrir le capital d'Atosca à d'autres sociétés. Pouvez-vous, à des fins de parfaite transparence également, confirmer ces éléments ? Le 22 décembre 2022, la demande a été faite par Atosca à l'État de faire rentrer Tarn Sud Développement au capital. Le 17 juillet 2023, l'État a donné son accord. Le 4 août 2023, l'accord des entreprises est intervenu. Tout cela me paraît parfaitement transparent, et prévu initialement par le contrat. Pouvez-vous également confirmer que l'annexe 12 prévoit la question des projets solaires, ainsi que celles des délaissés et du domaine public autoroutier concédé pour des activités annexes ? Pouvez-vous confirmer que ces projets solaires nécessiteront effectivement une autorisation environnementale et qu'il n'y aura donc pas d'impact sur les mesures compensatoires ? Enfin, pouvez-vous confirmer que les revenus qui rentreront dans le cadre de ce projet solaire seront compris dans les revenus de la concession ? Je souhaite, avec ces éléments, nous prémunir contre toute critique liée à un flou ou à un manque de transparence.

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Sur une autoroute en flux libre, sans barrière de péage, les usagers n'ont pas à s'arrêter pour régler leur trajet. Ce concept n'étant pas encore répandu en France, l'A69 sera l'une des premières autoroutes de ce type. Les sociétés concessionnaires d'autoroutes françaises, et notamment Atosca, maîtrisent-elles bien cette technologie ?

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De votre point de vue d'investisseurs européens, les conditions posées par le concédant vous paraissaient-elles particulièrement strictes ?

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Manuel Ravara-Cary, gérant de TIIC 2 SCA SICAR

Si les conditions en France sont effectivement beaucoup plus contraignantes que sur d'autres marchés, elles sont toutefois suffisamment intéressantes pour justifier que nous entreprenions des projets. Bien que les conditions aient été plus dures que dans la plupart des marchés où nous avons construit des autoroutes ces dernières années, et que la négociation ait été difficile, notamment au niveau environnemental, l'affaire conclue est finalement bénéfique pour les deux parties.

Le flux libre est une nouveauté qui représente l'avenir des autoroutes. Les barrières physiques de péage ne sont efficaces ni sur le plan environnemental ni pour la gestion des autoroutes. Le flux libre sera, selon moi, la norme sur les autoroutes européennes dans les dix prochaines années.

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Sébastien Bourget, associé-gérant de Quaero Capital SA et président de Quaero Capital (France) SAS

Je confirme votre lecture de l'annexe 16. Cette évolution du capital était envisagée, mais non prévue initialement. Lors de la signature du contrat de concession, il était prévu que 100 % du capital soit apporté par les quatre actionnaires précédemment cités.

S'agissant des questions sur l'énergie solaire, ce projet n'était pas une demande de l'État dans le cadre de l'appel d'offres. Nous avons abordé ce dossier avec l'idée de créer une autoroute de nouvelle génération. La contribution du flux libre est importante à cet égard, mais nous aurions également pu évoquer les bornes de recharge ou les aires de covoiturage. Il est important de noter que certaines zones délaissées pourraient être utilisées pour développer les énergies renouvelables. Nous avons donc envisagé cette question sous un angle environnemental. Vous avez mentionné l'annexe 12, qui traite des questions environnementales, et le paragraphe qui fait référence à une ambition environnementale dans le cadre du projet solaire. Cette ambition, c'est que la production d'électricité consommée par les véhicules empruntant l'autoroute soit en grande partie fournie par l'électricité produite sur les emprises de l'autoroute. Nous raisonnons en termes d'équivalence, et visons une logique d'autoconsommation vertueuse. Pour nous, l'enjeu concerne moins le volet financier que les aspects d'environnement et de décarbonation. Quant au calendrier de mise en œuvre de ce projet photovoltaïque, celui-ci existera le jour où nous disposerons d'une autorisation environnementale, pour laquelle aucune demande n'a encore été effectuée. La réalisation de ce projet prend du temps, car nous nous consacrons pleinement à la construction de l'autoroute, qui a traversé différentes épreuves, à l'image de la hausse des taux ou de l'inflation subie par le constructeur et la société concessionnaire. Par ailleurs, certaines terres envisagées pour la ferme solaire pourraient avoir d'autres destinations, et pourraient potentiellement revenir à l'agriculture. Il nous semble donc plus avisé d'attendre que la situation évolue et de laisser la concertation se dérouler afin de réserver à la ferme solaire des terres délaissées, sans autre usage possible. Nous prenons donc du temps, car nous sommes conscients de la sensibilité de ces questions, et des attentes de certains agriculteurs. Il est préférable de s'accorder le temps nécessaire plutôt que d'avancer précipitamment et de prendre des décisions que nous pourrions regretter plus tard. Cette ambition est très forte et nous allons poursuivre ce projet, dont nous définirons ultérieurement les modalités, dans un climat serein, lorsque la concertation aura permis de bien identifier les terrains retenus.

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Si tout n'était pas écrit dans le contrat, nous serions dans l'illégalité. Cependant, les parties grisées au sein du contrat que nous avons consulté m'amènent à conclure à un manque de transparence. Toutes mes questions concernent des éléments qui, jusqu'à présent, étaient occultés, y compris la question des fermes solaires et la participation du groupe Pierre Fabre. Vous indiquez que vous prenez le temps nécessaire pour bâtir l'autoroute du XXIe siècle. Je rappelle qu'une voiture électrique consomme 17 kilowatts pour 100 kilomètres, et qu'un mégawatt équivaut à 1 000 kilowatts. Si le trafic est de 7 000, 8 000 voire 10 000 véhicules, 40 mégawatts vont au-delà de l'autoroute et concerneront également d'autres usages. L'État, lorsqu'il a signé le contrat, s'attendait-il à des recettes liées à cette production de 40 mégawatts dès la mise en service de l'autoroute ? La production d'énergie renouvelable, à laquelle je suis favorable, génère du chiffre d'affaires, ce qui peut influencer les tarifs et leur éventuelle diminution. Le ministère chargé des transports nous a indiqué que ces tarifs seront négociés deux mois avant l'ouverture de l'autoroute, mais peut-être certains ici connaissent-ils déjà les tarifs qui seront payés par les classes 1 à 4 ? Vous l'ignorez, et cela démontre à nouveau le manque de transparence. Nous questionnerons également l'État sur ce point.

Je souhaite revenir sur la question des fonds. Vous avez indiqué que les actionnaires se priveront de rémunération durant un temps, et seront ensuite rémunérés à l'ouverture de l'A69. Pouvez-vous préciser sur quels fonds seront prélevés les 4,1 millions d'euros de rémunération des actionnaires à la date de mise en service de l'autoroute ? Seront-ils prélevés sur les 275 millions de crédits bancaires ou sur les prêts subordonnés d'actionnaires, ce qui implique que les actionnaires ne prennent aucun risque, puisqu'ils ont une garantie de rémunération de 6 % ?

Comment expliquer que le versement des dividendes intervienne en deuxième position, avant le remboursement de la dette subordonnée actionnaire, alors même que les actionnaires ne s'endettent pas sur cette dette subordonnée ?

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Cédric Beauvois

Les 4,1 millions d'euros mentionnés font partie d'une négociation avec les banques, et seront donc payés par les banques à la mise en service de l'A69.

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Seront-ils prélevés sur les 275 millions d'euros ?

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Cédric Beauvois

Cela fait partie du plan de financement, qui se compose essentiellement des fonds propres des actionnaires et de la dette bancaire. Il est destiné à couvrir l'ensemble des coûts pendant la période de conception et de construction, ainsi que certains coûts de pré-exploitation, dont ceux-ci font partie.

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Est-il juste d'affirmer que le contribuable est doublement perdant ?

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Cédric Beauvois

Non, car cette partie du montage est discutée avec les banques. Cela ne concerne par les tarifs de péage, mais un arrangement conclu avec les prêteurs.

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Je reviens à ma question sur le versement des dividendes.

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Sébastien Bourget, associé-gérant de Quaero Capital SA et président de Quaero Capital (France) SAS

Les contraintes comptables empêchent de procéder à des versements de dividendes durant les premières années, en raison du profil de résultat de la société de projet. Certains ratios comptables doivent être respectés, ce qui contraint le versement de dividendes. En revanche, la dette d'actionnaire n'est pas soumise à ces contraintes, et permet donc de procéder à des remontées aux actionnaires plus tôt.

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Les règles comptables actuelles favorisent donc les actionnaires. Je souhaite recevoir une réponse écrite sur ce sujet.

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Sébastien Bourget, associé-gérant de Quaero Capital SA et président de Quaero Capital (France) SAS

La matière et les modèles sont complexes, mais je pense pouvoir affirmer que ma réponse est correcte. Mon niveau de confiance est de 99 %, mais au vu de la marge d'erreur de 1 %, je fournirai donc une réponse écrite.

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Nous sommes, aujourd'hui, entrés dans le vif du sujet sur le financement et ses modalités. Bien que les règles françaises soient strictes, il semble que vous ayez bien négocié ce contrat, notamment en ce qui concerne le pacte actionnarial et le financement. Nous verrons ensuite dans quelles conditions l'État a consenti à ce plan de financement. Il est clair que ce dossier suscite de nombreuses controverses, surtout en ce qui concerne les infrastructures dans le contexte environnemental actuel. Les mobilités représentent 32 % des gaz à effet de serre, dont 85 % proviennent des camions et des voitures. Nous essayons donc de réduire cette production de gaz à effet de serre en privilégiant des moyens décarbonés, tels que les lignes ferroviaires.

Ce dossier s'inscrit par ailleurs dans le cadre plus large de remise en question des contrats de concession, y compris par l'État lui-même. L'État a en effet instauré, dans la loi de finances de 2024, une taxe sur les concessions autoroutières, considérant que les clauses des contrats de concession signés en 2006 étaient léonines. Il semble qu'avec ce contrat, l'État demeure dans une logique passéiste, et cette commission d'enquête est donc intéressante à la fois pour la transparence démocratique et pour réévaluer le principe même des concessions autoroutières dans le contexte actuel.

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Je tiens à vous remercier, messieurs, pour votre transparence et votre franchise. Nous avons pu lever les doutes et les inquiétudes concernant le contrat de concession de l'autoroute A69, y compris les parties occultées, qui sont traditionnellement protégées par le droit des affaires.

Puis la commission entend M. Luis Miguel Dias da Silva Santos, président d'Ascendi SGPS SA et d'Ascendi Invest SA, accompagné de M. David Chemla, directeur général de la filiale d'Ascendi en France.

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Nous poursuivons nos travaux consacrés au volet financier de la convention de concession de l'autoroute A69, avec les auditions des sociétés actionnaires d'Atosca.

Ascendi SGPS détient 15 % des parts d'Atosca. Le capital d'Ascendi est détenu par Ardian, société française de capital-investissement basée à Paris. Ascendi, société de droit portugais, est le deuxième opérateur de gestion d'infrastructures routières au Portugal et le leader mondial des systèmes intelligents de péage. La présence d'Ascendi au capital d'Atosca se justifie par le fait que le flux libre de péage constitue un gain de temps et réduit les émissions de gaz à effet de serre en évitant aux véhicules de s'arrêter et de redémarrer. Cette audition, monsieur Dias da Silva Santos, vise à déterminer quand et pour quelles raisons vos entités, Ascendi SGPS et Ascendi Invest, sont devenues actionnaires d'Atosca et à répondre à nos questions sur la convention de concession signée entre l'État et Atosca.

Je rappelle que notre audition est publique et retransmise sur le portail de l'Assemblée nationale.

Monsieur Dias da Silva Santos, vous êtes dispensé de la prestation de serment, car vous n'êtes pas de nationalité française. En revanche, je demande à Monsieur David Chemla, en application de l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, de prêter serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité et de dire « je le jure ».

(M. David Chemla prête serment)

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Notre commission d'enquête s'articule autour de trois volets : environnemental, économique et social, et financier. Nous ne disposons pas encore de toutes les réponses, notamment sur les tarifs des péages, mais nous nous concentrons maintenant sur l'équilibre financier de la concession.

Selon l'article 16 de la convention de concession, Ascendi dispose de 15 % des parts d'Atosca. Pour la bonne compréhension des membres de cette commission, ma première question porte sur les activités respectives d'Ascendi SGPS et Ascendi Invest. Pourquoi avoir fondé deux entités pour faire partie de l'actionnariat d'Atosca ? En particulier, pourquoi Ascendi Invest, qui ne dispose que d'une seule part, se retrouve également dans NGE Concessions A69 ?

Je rappelle que le capital d'Ascendi est détenu à 100 % par le groupe français Ardian, créé en 1996 par M. Claude Bébéar, alors président d'AXA. Il s'agissait de créer un pôle de capital-investissement au sein de la compagnie d'assurance, avec un capital de départ de 100 millions de dollars. En 2013, Ardian, qui a connu une croissance exceptionnelle, s'est séparée d'AXA pour devenir un groupe indépendant, qui compte aujourd'hui 19 bureaux à travers le monde et gère environ 90 milliards de dollars d'actifs. Votre participation au capital d'Atosca s'est-elle effectuée avec l'accord d'Ardian ou disposez-vous d'une autonomie de décision en la matière ? Ascendi est en effet une entreprise de taille respectable, qui gère une quinzaine d'autoroutes au Portugal et constitue une référence mondiale des systèmes de péage en flux libre. J'imagine que c'est cette maîtrise des technologies de péages qui vous a conduit à entrer dans le capital d'Atosca. Comme pour Quaero et TIIC, je souhaite également savoir si, dans la démarche qui vous a conduit à devenir actionnaire d'Atosca, la rentabilité attendue de cette autoroute vous a semblé claire et suffisamment solide pour opérer cet investissement en toute confiance.

La production d'électricité photovoltaïque a-t-elle par ailleurs pris une part dans votre décision d'investir dans Atosca ? En outre, le faible trafic constaté sur l'axe Pau-Langon, qui avait fait l'objet des mêmes alertes qu'actuellement pour l'A69, pourrait se vérifier de nouveau. Aussi, si cette autoroute n'était pas rentable ou enregistrait un déficit d'exploitation, seriez-vous prêts à assurer votre devoir d'actionnaire ?

Je vous ai adressé un questionnaire qui a été communiqué à l'ensemble de mes collègues afin qu'ils disposent d'un même niveau d'information quant au sens que je souhaite donner aux auditions et à cette commission d'enquête. Ma préoccupation est la transparence, dans un dossier qui ne l'est pas suffisamment. Je vous invite donc à nous apporter les réponses dans le cadre de cette audition, et à les compléter par écrit si nécessaire.

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Luis Miguel Dias da Silva Santos, président d'Ascendi SGPS SA et d'Ascendi Invest SA

Ascendi est une société portugaise basée à Porto, spécialisée dans la gestion des actifs autoroutiers en concession, ainsi que dans l'exploitation et l'entretien d'infrastructures routières. Notre activité est principalement concentrée au Portugal, où nous sommes le deuxième réseau autoroutier avec des participations majoritaires sur six concessions, couvrant environ 630 kilomètres. Nous fournissons également des services de collecte de péage, tant en flux libre qu'en mode conventionnel, et nous assurons l'exploitation et l'entretien des infrastructures autoroutières pour l'État portugais et d'autres concessionnaires privés. Nous sommes également présents en Espagne, où nous avons récemment acquis une société qui exploite et entretient des routes nationales. C'est au Portugal que nous avons acquis notre solide expérience et une bonne réputation en matière d'innovation, notamment avec la mise en place, depuis 2010, des systèmes de péages en flux libre, de plus en plus utilisés dans le monde. Notre expertise en matière de péages en flux libre n'est pas uniquement due à nos mérites. Le Portugal, confronté en 2008-2009 à une situation économique difficile, a décidé de mettre en place des péages sur des autoroutes qui en étaient jusqu'alors dépourvues. Face au défi majeur de cette mesure, l'État portugais a opté pour le flux libre, qui représentait la méthode la plus simple et la plus économique. Ascendi a su tirer parti de cette situation pour développer ses compétences, qui lui ont également permis d'être sollicité pour intervenir sur le territoire français. En 2016, Ascendi a ainsi été invité à présenter une candidature dans le cadre de l'appel d'offres pour le projet de route Centre-Europe Atlantique. À cette occasion, nous avons collaboré pour la première fois avec les groupes NGE et Quaero. Bien que nous n'ayons pas été retenus, nous avons pu démontrer notre solidité en matière d'exploitation d'autoroutes et de flux libre, aussi bien aux membres du groupement qu'à l'État.

Si nous sommes impliqués dans le projet de l'autoroute A69, c'est donc grâce à notre expertise en matière de flux libre et d'exploitation, un critère essentiel du cahier des charges de l'appel d'offres. Lorsque le projet a été lancé, nous avons naturellement repris contact avec NGE et, au printemps 2019, nous avons commencé à collaborer avec tous les partenaires actuels de la société Atosca. Le protocole de groupement, signé en juillet 2019, nous a permis de rejoindre le projet. Atosca a été créée spécifiquement pour ce projet, conformément aux exigences de l'appel d'offres et au schéma classique des projets de concessions d'autoroutes. Notre participation à ce projet est une décision autonome d'Ascendi, intégrée dans notre stratégie de développement. La décision d'investissement a été prise en accord avec notre conseil d'administration, composé de personnalités nommées par Ardian, notre unique actionnaire.

Il existe en effet, au niveau d'Ascendi, deux niveaux de gestion. La gestion exécutive de la société d'une part, composée de six directeurs sous ma direction, qui sont chargés d'exécuter et de proposer la stratégie, ainsi que de garantir la gestion courante du groupe. Le conseil d'administration d'autre part, dont je suis également le président, au sein duquel la majorité des membres ne dispose pas de fonctions exécutives. Le conseil approuve la stratégie ainsi que le budget annuel, et contrôle trimestriellement la performance du groupe. Concernant Atosca, le conseil a initialement approuvé l'intérêt d'Ascendi pour divers projets d'autoroutes en France, notamment sur l'A79. Avant de faire l'offre finale sur l'A69, il a également approuvé la participation d'Ascendi dans les investissements propres au projet, réalisés uniquement avec des capitaux du groupe, sans aucune contribution extérieure. Pour clarifier la gestion, certains directeurs d'Ardian siègent au conseil d'administration d'Ascendi. Cependant, le conseil d'administration et la gestion d'Ascendi, que je dirige, forment un groupe indépendant qui assure la gestion intégrale de la société. Pour chaque investissement, nous sollicitons l'approbation finale du conseil au moment de signer les contrats. Il intervient donc uniquement après la décision du management, et ne prend jamais part au processus décisionnel initial.

Revenons au sujet de l'autoroute A69. Lorsque des entreprises partenaires décident de former un groupement, l'organisation et la complémentarité entre les différentes entreprises, industriels d'une part et investisseurs d'autre part, doit être déterminée. L'ensemble des travaux est coordonné par le mandataire, en l'occurrence NGE. Les acteurs industriels s'organisent pour concevoir le projet de manière optimale, en se concentrant sur les aspects de conception, de construction et d'exploitation. Le partenaire financier se concentre principalement sur le volet économique et financier du projet. La répartition du capital correspond à l'engagement et à la capacité financière de chacun dans le projet. Il est donc logique que les partenaires financiers supportent une majorité de l'apport et que la construction ait un poids beaucoup plus important que l'exploitation pour les industriels. C'est la raison pour laquelle l'actionnaire lié à la construction a un apport plus important que celui lié à l'exploitation. Notre stratégie est spécifique au marché français dont, contrairement au Portugal, nous ne serons jamais un acteur majeur. Notre taille ne nous permettant pas de rivaliser avec les principaux acteurs du marché français, notre stratégie est d'adopter une position de partenaire minoritaire dans la société concessionnaire, mais majoritaire dans la société exploitante. C'est cette approche que nous essayons d'appliquer à tous les contrats que nous cherchons à obtenir en France. Concernant le montant de la participation d'Ascendi, nous déterminons systématiquement notre contribution au regard de la totalité des capitaux propres du projet, car tout ce qui n'est pas financé par les banques et les subventions publiques doit l'être par les actionnaires. Ce financement est réparti entre capital et prêts d'actionnaires pour permettre une approche opérationnelle et compétitive optimale. Le montant total investi par Ascendi est de 21,2 millions d'euros. Remporter un appel d'offres implique de proposer une solution plus compétitive que celle des concurrents, à travers une structuration spécifique du financement, dans le complet respect du cahier des charges et des restrictions imposées par les banques, qui sont toujours les premiers financeurs des opérations d'infrastructure.

Je confirme d'autre part que nous sommes actionnaires de la société Tarn Sud Développement depuis le 4 août 2023. Cette participation nous permet d'assister à l'assemblée générale de cette société et d'avoir une meilleure articulation avec tous les autres acteurs.

Je souhaite clarifier le point concernant Ascendi SGPS et Ascendi Invest. En vérité, la présence d'Ascendi Invest est une erreur. Ascendi SGPS est la tête du groupe Ascendi et c'est cette entreprise qui est impliquée dans le projet d'autoroute A69 et dans Atosca. Initialement, pour des raisons d'organisation interne, il avait été envisagé qu'Ascendi Invest, détenue à 100 % par Ascendi SGPS, devienne la holding se consacrant aux activités hors du Portugal. C'est pour cette raison que nous avions demandé aux autres actionnaires de nous laisser une action d'Ascendi Invest pour, plus tard, demander à l'État de changer la participation d'Ascendi SGPS en faveur d'Ascendi Invest. Cet objectif n'est plus d'actualité. Nous avons abandonné cette idée et c'est bien Ascendi SGPS qui conserve la participation dans Atosca. Nous avons donc abandonné l'idée d'une holding pour les activités internationales et toutes les concessions sont sous Ascendi SGPS, qui possède l'expertise.

Nous avons préparé, avec le reste des équipes du groupement, tous les chapitres d'exploitation de l'offre. Nous avons notamment travaillé sur la description détaillée de l'exploitation proposée pour cette autoroute, en incluant les équipements, l'organisation, les moyens et le modèle d'interface. Aujourd'hui, dans le cadre du contrat d'exploitation, notre mission est de permettre au service d'exploitation d'être prêt en temps et en heure. M. Chemla, ici présent, sera responsable de l'exploitation et de la mise en service. Tous les projets de concession se décomposent en trois parties, qui sont la construction, l'exploitation et les financements. Pour l'exploitation, il y a toujours deux possibilités. Soit le concessionnaire assume entièrement le risque d'exploitation et en prend la responsabilité, soit chacun conserve sa spécialité, avec un constructeur qui assume le risque de la construction de l'autoroute et un exploitant qui assume le risque de son exploitation. Dans la mesure où Ascendi et NGE connaissent bien l'exploitation de l'autoroute et les risques associés, que les partenaires financiers ne connaissent pas et ne sont pas préparés à prendre, nous sommes tous deux responsables de l'exploitation.

Vous souhaitez savoir pourquoi la majeure partie du financement a pris la forme de prêts subordonnés plutôt que d'une plus forte participation au capital social. Tout d'abord, je précise que le capital social d'Atosca a été dimensionné pour permettre à la société de franchir sans difficultés les premières années d'exploitation. Le financement sous forme de fonds propres est le schéma habituel pour ce type de projet. Nous avons adapté le modèle de nos concessions au Portugal et en Espagne, où Ascendi signera prochainement un contrat de concession routière avec le gouvernement de Tarragone. Nous avons remporté l'appel d'offres en utilisant le même schéma de répartition des capitaux propres entre capital et dette subordonnée. Le remboursement de ces prêts subordonnés intervient toujours à la fin de la cascade de trésorerie, comme expliqué précédemment. Autrement dit, les remboursements de ces prêts contractés ne seront effectués qu'à la fin. Afin de minimiser le recours à une subvention d'équilibre, le groupement a proposé une mobilisation de 530 millions d'euros par les actionnaires, qui a permis de souscrire des prêts à hauteur de près de 300 millions d'euros auprès des banques, dont 85 % sont françaises, principalement des banques et caisses locales. Le capital d'Atosca, qui était de 10 000 euros au départ, sera porté à 30 millions d'euros d'ici à la fin de 2025. Il s'agit, pour nous, d'une prise de risque similaire à celle d'une participation supérieure au capital social.

En ce qui concerne les prêts subordonnés, vous avez souhaité savoir comment le taux de 6 % a été défini. Ce taux est une rémunération qui commence à la date de mise en service de l'autoroute. Nous avons choisi de mobiliser des fonds propres via l'investissement en capital social et prêts subordonnés afin de réduire la subvention d'équilibre. La rémunération des prêts d'actionnaires à 6 % est logique, car la dette subordonnée a toujours un taux légèrement plus élevé que le taux bancaire. La dette subordonnée est payée uniquement lorsque la dette bancaire a été remboursée. Les intérêts sur les dettes subordonnées d'actionnaires ne sont payés que si la situation financière de la société le permet, en fonction des trafics effectifs que nous ne connaissons pas encore aujourd'hui. La rémunération de 4,1 millions d'euros sera payée par le prêteur et non par les fruits de l'exploitation. Cette rémunération est une contrepartie au fait que les banques n'autorisent aucune rémunération pendant la période de construction. Elle n'aura lieu que si la mise en service est effective et que toutes les sommes dues aux constructeurs sont payées.

J'ai également été interrogé sur la politique de dividendes de la compagnie Atosca. En vérité, aucune politique de distribution n'a été établie par les actionnaires, car cela dépendra des résultats d'exploitation de la concession, inconnus à ce jour. Cela interviendra à la fin de la cascade de trésorerie, une fois la dette remboursée, les établissements prêteurs étant prioritaires. Les moyens financiers de l'entreprise doivent assurer son intérêt social, c'est-à-dire garantir le service autoroutier et la continuité de l'exploitation. Atosca doit rembourser les dettes bancaires avant de rémunérer les actionnaires et de procéder à des distributions, ce qui représente un schéma classique des modèles de concession.

Nous avons conçu ce projet en prenant réellement en compte le risque de trafic, un modèle courant dans les concessions d'autoroutes, notamment lorsque l'investissement initial est important. Les discussions sont toujours basées sur des études de trafic réalisées par des experts reconnus, acceptées non seulement par les actionnaires, mais également par les banques pour déterminer le montant de la dette.

Pour ce qui est du rendement attendu par Ascendi et les raisons de notre investissement dans ce projet, nous sommes à la fois actionnaires d'Atosca et chargés de l'exploitation. Ascendi se considère avant tout comme un prestataire de services. Nous sommes d'abord exploitants, puis investisseurs dans les concessions, et ces rôles ne se conçoivent pas séparément. S'agissant de notre implication dans le projet de l'autoroute A69, les deux rémunérations attendues sont liées, mais sont de nature différente. Comme je l'indiquais, le rendement attendu est lié aux résultats d'exploitation du concessionnaire et, par conséquent, au trafic effectivement réalisé. C'est là que réside le risque pour l'investisseur. Comme vous le savez, un taux de rendement interne (TRI) est mentionné dans le contrat, correspondant au scénario de base du projet ; il est connu des actionnaires. D'autre part, notre rémunération en tant qu'exploitant est liée au risque que nous prenons en garantissant au concessionnaire que l'autoroute sera exploitée pendant toute la durée de la concession, avec un prix déjà défini.

Je précise, enfin, qu'il n'existe aucune clause de recapitalisation automatique dans le contrat de concession. La solidité économique et financière de notre offre était un élément déterminant, représentant 20 % de la note d'attribution. Les fonds apportés par les gestionnaires sont très élevés dans ce contrat, atteignant 300 % de la totalité de l'investissement, précisément pour assurer la solidité nécessaire afin d'envisager l'avenir sereinement et, si besoin, d'affronter des scénarii dégradés. Tous les projets comportent un risque. La dimension des fonds propres, en l'espèce 300 %, donne une idée de l'ampleur du risque, et nous, actionnaires, en sommes pleinement conscients.

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Votre intervention, qui fait suite à celles de NGE, de Quaero et de TIIC, me semble en cohérence avec les déclarations des autres actionnaires d'Atosca. Je vous remercie également d'avoir accepté que cette audition se tienne de manière publique.

Vous avez mentionné le flux libre de péage, un concept assez inédit en France au sujet duquel nous avons de nombreuses interrogations. Il est intéressant de constater qu'au Portugal, vous avez adopté ce système à la suite de la décision prise par l'État de rendre payantes les autoroutes. Vous avez donc dû trouver un système adéquat, et avez opté pour la collecte de péage par le flux libre, mais j'imagine que le Portugal possède également des barrières de péage. Pouvez-vous présenter les avantages de la collecte par le flux libre, notamment en termes de gain de temps ? Disposez-vous de données sur ce sujet ?

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Luis Miguel Dias da Silva Santos, président d'Ascendi SGPS SA et d'Ascendi Invest SA

Si le Portugal a adopté le flux libre pour des raisons qui peuvent être qualifiées de discutables, cette situation unique a finalement permis de développer une expertise précieuse. Les péages nécessitant de s'arrêter pour payer n'ont plus de sens au XXIème siècle. Aujourd'hui, le flux libre est utilisé mondialement, avant tout pour sa commodité, avec une application de paiement facile, la possibilité de passer l'autoroute sans ralentissement, ni perte de temps, et un service au client réactif en cas de besoin. Le flux libre est une solution à la fois intégrée et plus respectueuse de l'environnement, qui permet de simplifier et de fiabiliser la relation avec l'usager. Ce système permet également de maîtriser de nombreux aspects tels que les prix, la modulation et les remises, de manière plus transparente que dans les systèmes traditionnels avec barrières.

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Par rapport aux questions que j'ai posées et aux réponses qui m'ont été fournies au cours de l'audition précédente, notamment sur la rémunération de 6 %, des fonds propres, sur la durée d'amortissement, et sur le prélèvement des 4,1 millions d'euros sur les 275 millions d'euros de crédit bancaire, êtes-vous en accord avec ce qui a été déclaré ou souhaitez-vous apporter un complément ?

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Luis Miguel Dias da Silva Santos, président d'Ascendi SGPS SA et d'Ascendi Invest SA

J'ai précisé que la différence entre le taux de la dette subordonnée et le taux bancaire est tout à fait normale. Le chiffre serait, normalement, légèrement supérieur au 1,5 % de ce projet entre le taux bancaire et le taux de la dette subordonnée. La solution optimale du modèle financier de la concession soulève deux grandes questions : les règles de l'État pour l'appel d'offres d'une part, et les restrictions imposées par les banques, qui sont les premiers financeurs de cette opération, d'autre part. Avec le modèle de trafic, les charges de financement et les restrictions bancaires, nous cherchons à trouver, dans le cadre légal, la manière optimale de présenter une offre pour remporter le marché. C'est la nécessité de présenter l'offre la plus compétitive qui, finalement, détermine ces chiffres.

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Je vais donc vous poser d'autres questions, qui relèvent davantage de l'organisation que vous avez mise en place avec la société Atosca et Atosca Exploitation. Cette SAS a été créée pour assurer l'exploitation, l'entretien et la maintenance de l'autoroute A69 pendant 55 ans. Les deux actionnaires en sont, à parts égales, NGE Concession et Ascendi. Pouvez-vous m'expliquer comment a été organisée, entre Ascendi et Atosca Exploitation, la remontée des chiffres d'affaires ?

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Luis Miguel Dias da Silva Santos, président d'Ascendi SGPS SA et d'Ascendi Invest SA

La responsabilité de l'exploitation incombe à la compagnie Atosca Exploitation. Cela signifie que, selon le pourcentage de participation de chacun dans la compagnie, c'est une entité unique qui gère l'exploitation et qui a signé le contrat avec le concessionnaire. Le contrat est très strict entre le concessionnaire et la société exploitante, c'est-à-dire Atosca Exploitation, qui est obligée de gérer l'exploitation. Cette compagnie est dirigée par une seule personne, et non par deux entités distinctes. Les pourcentages de participation varient entre Ascendi et NGE, mais c'est une compagnie avec une direction unique, représentée par M. Chemla, qui est responsable de l'exploitation. En ce qui concerne l'exploitation, certaines tâches sont effectuées directement par des employés de cette compagnie exploitante et non d'Ascendi ou de NGE. D'autres tâches sont sous-traitées, ce qui est normal et conforme à la gestion de toutes les concessions. Certaines activités sont réalisées avec des moyens propres, comme dans toutes les compagnies, tandis que d'autres le sont par des sous-traitants. Il n'y a pas de division de l'exploitation entre NGE et Ascendi, puisqu'une seule compagnie gère l'exploitation. Certaines tâches, davantage liées à la partie péage, sont sous-traitées par Ascendi, et les interventions locales de réparation et de maintenance à NGE.

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Cela signifie donc que le chiffre d'affaires sera celui d'Atosca Exploitation, après déduction des charges et des rétributions liées aux sous-traitances d'Ascendi et NGE ?

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Luis Miguel Dias da Silva Santos, président d'Ascendi SGPS SA et d'Ascendi Invest SA

Exactement. Chacun intervient en fonction de ses compétences, en proposant des prix plus favorables afin d'aboutir à la proposition la plus compétitive possible.

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Ascendi est-elle une société de droit français ?

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Luis Miguel Dias da Silva Santos, président d'Ascendi SGPS SA et d'Ascendi Invest SA

Ascendi est une société de droit portugais, qui existait déjà bien avant son rachat par Ardian en 2017.

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Qu'est-ce qui garantit à l'État, signataire du contrat, que l'ensemble du chiffre d'affaires réalisé sur le prélèvement des péages ne sera pas réduit de manière excessive par les rétributions dues à Ascendi ?

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Luis Miguel Dias da Silva Santos, président d'Ascendi SGPS SA et d'Ascendi Invest SA

Le concessionnaire ne verse rien à Ascendi, seulement à Atosca Exploitation, qui est une compagnie française.

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J'entends cela, mais Ascendi sera bien rétribuée pour le service qu'elle rend ?

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Luis Miguel Dias da Silva Santos, président d'Ascendi SGPS SA et d'Ascendi Invest SA

Oui, dans le cadre du contrat. Ascendi se doit d'être une compagnie rentable.

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Le contrat qui unit Atosca Exploitation et Ascendi est un contrat de droit privé, que vous avez conclu au moment du contrat signé avec l'État, mais qui n'apparaît pas dans ce dernier.

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Luis Miguel Dias da Silva Santos, président d'Ascendi SGPS SA et d'Ascendi Invest SA

Comme pour l'ensemble des sous-traitants.

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Nous avons donc une interrogation concernant le contrat de droit privé signé entre Ascendi, société portugaise, et Atosca Exploitation, société française. Nous nous interrogeons sur le fait que la compagnie mentionnée dans le contrat soit le concessionnaire Atosca Exploitation, ainsi que sur le chiffre d'affaires qui sera généré par cette dernière.

Une autre question concerne le péage en flux libre. Comment articulez-vous ce péage sur l'autoroute Castres-Verfeil, avec votre partenaire et néanmoins concurrent, Vinci, qui gère l'autoroute A680 reliant Verfeil à Toulouse ?

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Luis Miguel Dias da Silva Santos, président d'Ascendi SGPS SA et d'Ascendi Invest SA

Avant de répondre à cette question, je souhaite apporter un complément. Nous parlons, au sujet de l'autoroute A69, d'environ 10 millions de trajets effectués par an. Il s'agit donc d'un chiffre significatif. Mais il s'agit d'une opération courante pour nous, ce qui devrait vous rassurer quant à la prestation de service d'Ascendi.

Sur l'articulation avec Vinci, la situation est ici très simple. Il existe actuellement une barrière de péage traditionnelle sur l'autoroute A680, mais cela va changer, sans pour autant affecter le tronçon de 9 kilomètres entre Toulouse et Verfeil. Cela signifie que Vinci va aménager et transformer la section jusqu'à Verfeil. Notre concession commence à Verfeil et se termine à Castres. Nous avons quatre portiques dans notre tronçon. Nous n'avons aucune relation avec Vinci, qui génère ses recettes sur sa portion de péage, tandis que les recettes de nos portiques nous appartiendront.

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Les cinq sorties qui sont prévues sur la portion des 53 kilomètres seront-elles exclusivement en flux libre ?

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Luis Miguel Dias da Silva Santos, président d'Ascendi SGPS SA et d'Ascendi Invest SA

En effet. Comme vous le savez, nous sommes un prestataire de service et essayons de nous adapter au cahier des charges. Celui-ci était très clair sur les sujets des portiques et des points de collecte de péage en flux libre.

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Je vous ai également interrogé sur l'influence des fermes solaires sur votre décision. Nous savons qu'Ascendi et Ardian se dirigent vers la production d'énergie, un secteur en pleine expansion. Quelle importance avez-vous accordée à cet aspect dans votre décision ? Que répondez-vous lorsque vous apprenez que l'annexe 12 stipule un objectif d'installer 40 mégawatts opérationnels dès la mise en service de l'autoroute ? En quoi cela affecte-t-il votre équilibre financier, sachant que cet objectif ne sera pas atteint, comme cela nous a été indiqué ?

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Luis Miguel Dias da Silva Santos, président d'Ascendi SGPS SA et d'Ascendi Invest SA

Je confirme qu'Ardian investit massivement dans l'énergie solaire. Ascendi est cependant une compagnie de gestion d'infrastructures d'autoroutes, qui n'est pas concernée par l'énergie solaire. Nous développons un réseau de panneaux photovoltaïques sur nos autoroutes, mais avec un spécialiste externe. Nous nous contentons de recevoir une redevance pour l'usage du terrain. Ascendi n'a pas vocation à devenir énergéticien, ni au Portugal ni sur d'autres marchés. Lors de la préparation du modèle pour répondre au cahier des charges, nous avons cherché toutes les opportunités d'améliorer l'offre. À l'époque, le modèle incluait une participation à un projet solaire, mentionné dans l'annexe que vous avez citée. Notre participation se limite à Atosca, dont nous détenons 15 %. La participation d'Atosca dans ce projet solaire est notre seule implication, et nous ne participerons à aucun projet en dehors de ce cadre. Chez Atosca, nous sommes uniquement présents, en tant qu'actionnaire minoritaire, pour comprendre et connaître la concession et disposer d'une voix. Si nous respectons nos actionnaires et les accompagnons par notre participation, nous ne sommes pas à la tête de l'exploitation.

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C'est en réalité Ardian, qui vous détient à 100 %, qu'il faudrait interroger sur ce sujet, et sur l'intérêt qu'il peut porter à l'annexe de ce projet en joint-venture avec Gaïa Energy.

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Luis Miguel Dias da Silva Santos, président d'Ascendi SGPS SA et d'Ascendi Invest SA

Si c'est un projet de 40 mégawatts, nos 15 % représentent théoriquement entre 4 et 6 mégawatts. Je ne pense pas qu'Ardian soit préoccupée par cet aspect du projet.

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Je vous ai également interrogé sur l'annexe 16 de la convention de concession, dans laquelle apparaît Ascendi SGPS, qui détient 15 % des parts d'Atosca, et Ascendi Invest, qui en possède une seule part. Pouvez-vous expliquer l'organisation et la raison d'être de ces deux entités, surtout que nous avons vu apparaître ultérieurement deux autres entités juridiques distinctes, à savoir NGE Concession et NGE Concession A69 ?

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Madame la rapporteure, la réponse a déjà été apportée. Pouvez-vous revenir sur ce point en essayant de condenser votre propos ?

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Luis Miguel Dias da Silva Santos, président d'Ascendi SGPS SA et d'Ascendi Invest SA

À l'époque, Ascendi Invest était une filiale détenue à 100 % par Ascendi SGPS, qui est la société mère du groupe Ascendi. Nous avions pour objectif de faire d'Ascendi Invest la tête de tous nos investissements internationaux. Lors de l'appel d'offres, nous avions demandé aux autres actionnaires d'accepter l'inclusion d'Ascendi Invest avec une seule action, ce qui nous aurait permis de transférer ensuite nos actions de Ascendi SGPS vers Ascendi Invest à une date ultérieure. Ascendi SGPS restait impliquée en tant que société disposant des ressources financières nécessaires pour investir. Cependant, nous avons finalement abandonné cette idée. Nous prévoyons de transférer l'action unique d'Ascendi Invest vers SGPS et de retirer Ascendi Invest du capital d'Atosca.

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Nous vous remercions pour vos réponses et pour le retour écrit que vous nous fournirez. Si des interrogations subsistent après l'ensemble des auditions, nous reviendrons vers vous.

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Je tiens à vous remercier, messieurs, pour votre présence et votre participation à cette audition. Je vous remercie également de n'avoir pas demandé le huis clos, permettant ainsi que cette audition se déroule de manière publique, en toute transparence.

La séance s'achève à dix-neuf heures cinq.

Membres présents ou excusés

Présents. – Mme Christine Arrighi, M. Philippe Frei, M. Jean Terlier, Mme Corinne Vignon