La commission auditionne M. Jérôme Bonnafont, représentant permanent de la France auprès de l'office des Nations Unies à Genève et des organisations internationales en Suisse, rapporteur général des états-généraux de la diplomatie, sur le rapport conclusif de ceux-ci intitulé « Pour un plan de réarmement de la diplomatie française ».
Présidence de M. Jean-Louis Bourlanges, président
La séance est ouverte à 11 h 10
Monsieur le représentant permanent de la France auprès de l'Office des Nations Unies à Genève et des organisations internationales en Suisse, nous vous recevons aujourd'hui en votre qualité de rapporteur général des états-généraux de la diplomatie. Merci de venir nous livrer le bilan que vous tirez de cette expérience inédite, à laquelle mon homologue du Sénat, Christian Cambon, et moi-même avons été associés avec beaucoup d'intérêt.
Pour ceux qui ne vous connaîtraient pas, je rappelle votre très brillante carrière. Vous avez été en poste à New Dehli, au Koweït, à New York. Vous avez été conseiller puis porte-parole de la présidence de la République entre 1997 et 2007. Vous êtes devenu ambassadeur en Inde, puis en Espagne ; vous avez été directeur pour l'Afrique du Nord et le Proche-Orient, conseiller du premier ministre en 2020 et vous êtes aujourd'hui le représentant permanent de la France auprès des Nations-Unies, à Genève.
Il s'agit là de nombreux postes importants, qui ont nécessité de s'adapter à des pays avec des systèmes politiques très différents, avec également des passages en administration centrale, en cabinet au plus haut niveau et dans les organisations multilatérales. Vous étiez donc tout désigné pour mener à bien la réflexion sur ces états-généraux de la diplomatie
La suppression des corps diplomatiques dans leur forme traditionnelle a été diversement appréciée par les membres de notre commission, à commencer par moi-même. Les états-généraux lancés en septembre 2022 ont permis de conduire un exercice de réflexion collective reposant sur une large concertation des agents diplomatiques. Il s'agissait là, de manière ouverte et inclusive, d'analyser les évolutions des missions et des métiers diplomatiques et consulaires, dans une communauté internationale en mutation profonde.
Cette démarche a donné lieu à 90 heures d'ateliers, à la rencontre de près de 400 agents en poste à l'étranger et à la consultation de plus de 5 000 membres du personnel d'un ministère qui en compte au total 13 600.
À l'issue de ce travail, il vous est revenu de rédiger le rapport final de ces états-généraux, que vous avez remis à la ministre de l'Europe et des affaires étrangères le 15 mars dernier. Il a pour ambition de refléter la perception des agents sur les conditions d'exercice des métiers de la diplomatie et formule des recommandations concrètes et opérationnelles pour renforcer l'efficacité de celle-ci.
L'Assemblée nationale et notre commission ont été assez peu consultées sur la suppression des corps diplomatiques, ce qui a suscité un certain nombre de frustrations chez nos collègues. Un rapport d'information, élaboré par deux de nos collègues, messieurs Vincent Ledoux et Arnaud Le Gall, a bien été publié en janvier dernier, après l'entrée en vigueur de la réforme ; néanmoins, il ne parvient pas à des conclusions communes, preuve que le sujet divise. Comme vous êtes ambassadeur, votre mission fondamentale est d'éliminer les frustrations ; vous allez donc pouvoir répondre à nos interrogations.
Nous avons accueilli avec satisfaction l'annonce par le président de la République à la clôture des états-généraux de la diplomatie que les effectifs du ministère de l'Europe et des affaires étrangères allaient augmenter de 700 équivalents temps plein (ETP) en quatre ans et que les crédits s'accroîtraient sur la même période, pour atteindre 7,09 milliards d'euros en 2027. Notre commission n'avait cessé de vivre avec énormément de frustration et d'inquiétude la manière dont ce ministère évoluait au cours des dix dernières années, en termes de diminution d'effectifs, de locaux ou d'antennes culturelles et nous avons apprécié que M. Le Drian et le président de la République aient mis le holà à cette dérive importante.
Mais je vous cède la parole, monsieur l'ambassadeur, pour expliquer le sens de l'exercice que vous avez présidé.
Je vous remercie pour votre présentation et cet éloge qui s'adresse tout autant aux collègues qui m'ont assisté dans l'animation de ces états-généraux de la diplomatie. Je vous remercie également de cette occasion qui m'est donnée d'évoquer devant vous le rapport général qui en a résulté. Je salue enfin les nombreux membres de la représentation nationale que j'ai eu l'occasion de croiser au fil des années.
La genèse de ce processus est issue de la réforme de la haute fonction publique, dont les modalités d'application au ministère de l'Europe et des affaires étrangères ont provoqué un trouble profond, qui est allé jusqu'à une grève inédite des diplomates, le 6 juin 2022. À l'issue de cette grève, le président de la République et la ministre de l'Europe et des affaires étrangères ont décidé d'engager une consultation par laquelle l'ensemble des agents seraient entendus, un peu sur le modèle des états-généraux de la justice ou du Ségur de la santé.
La réforme de la haute fonction publique et sa déclinaison sur les corps diplomatiques ont été particulièrement mal perçues pour une raison profonde : elles sont intervenues après une génération de coupes claires dans les effectifs et les budgets de la diplomatie française. Elles se sont inscrites dans le hiatus entre la mondialisation et l'européanisation de la vie française, qui confère aux affaires internationales une place toujours croissante, et la diminution simultanée des moyens budgétaires et humains consacrés à ces mêmes affaires. Il y avait également un contraste important entre d'une part l'engagement très fort de l'exécutif en France sur les affaires européennes et internationales et la diminution des moyens. Cet effet de hiatus a provoqué ce résultat.
Les grandes dates de ces états-généraux de la diplomatie sont les suivantes :
– l'annonce de leur tenue par les discours des 1er et 2 septembre 2022 du président de la République et de la ministre de l'Europe et des affaires étrangères ;
– le message de Mme la ministre Colonna précisant leurs contours le 10 octobre 2022 ;
– leur inauguration, lors d'une séance plénière consacrée au dialogue entre le comité et les agents présents le 28 octobre 2022 ;
– enfin, un premier échange de vues avec l'Assemblée nationale et le Sénat sur le rapport alors en cours de préparation le 2 novembre dernier.
Nous formions une équipe d'une quinzaine de personnes et structurée autour de trois groupes de travail présidés chacun par une personnalité de rang d'ambassadeur : M. Briens, Mme Nguyen et un conseiller maître de la Cour des comptes, M. Cyril Pierre.
Trois sujets étaient approfondis : l'évolution du métier diplomatique compte tenu de l'évolution du monde ; la place de l'appareil diplomatique et plus précisément du ministère de l'Europe et des affaires étrangères dans l'État ; enfin, la définition de ce que doit être la politique de ressources humaines du ministère.
Pendant trois mois, nous avons procédé à des consultations, après l'adoption d'une charte de déontologie et la mise en place d'un déontologue en la personne de notre collègue Didier Le Bret, pour garantir aux agents la neutralité de fonctionnement des équipes en charge de ces états-généraux. Nous avions besoin de savoir comment, du point de vue déontologique, assurer l'indépendance d'un groupe de rapporteurs, eux-mêmes fonctionnaires nommés par la ministre. Nous avons donc adopté un mode de fonctionnement permettant aux agents de se sentir totalement libres de leur expression, afin de les assurer que les préoccupations qu'ils feraient valoir seraient fidèlement transmises.
Environ 5 000 agents ont participé à la consultation. Nous avons obtenu 800 réponses à un questionnaire très extensif adressé à tous nos collègues. Nous avons également largement pris appui sur les syndicats, qui ont eux-mêmes lancé leurs propres consultations auprès de leurs adhérents. Nous avons enfin reçu de nombreux témoignages individuels.
Nous avons également veillé à regarder ce qui s'était passé dans le reste du monde et à consulter les parlementaires, les milieux économiques et culturels, la société civile pour savoir ce que le public attend de la diplomatie. En effet, notre mission ne se limitait pas à la réforme de la haute fonction publique mais consistait aussi en une réflexion sur l'avenir du métier diplomatique et l'organisation de la fonction diplomatique, compte tenu des évolutions de l'Europe et du monde. Il était donc important pour nous, fonctionnaires, de mettre au cœur de nos préoccupations le fait que nous sommes au service des Français.
En effet, la fonction diplomatique n'est pas une espèce de monde à part qui aurait pour mission de traiter d'affaires ésotériques dans un environnement extérieur mais un service public comme les autres, au service de la France et des Français, et qui doit donc se sentir investi d'une obligation de redevabilité.
Nous avons, à la fin janvier, conclu nos auditions avant de passer un mois à rédiger le rapport intitulé : « Pour un plan de réarmement de la diplomatie française ». Nous avons délibérément choisi ce terme de réarmement car le moment correspondait à l'adoption en conseil des ministres du projet de loi de programmation militaire, dont les montants sont considérables.
Ces dernières années, nous avons observé un mouvement de prise de conscience ayant conduit au constat suivant : l'affaiblissement des institutions régaliennes de l'État devait être corrigé. Un certain nombre de décisions ont ainsi été prises pour réarmer les fonctions régaliennes, dont la justice. Il nous semblait donc qu'il fallait adopter la même logique pour la diplomatie. Nous avons d'ailleurs été heureux de constater que, dans son discours au Quai d'Orsay, le lendemain de la remise de notre rapport, le président de la République avait lui-même employé le terme de « réarmement ».
Ce rapport a été construit autour de deux grands axes : les constats et les propositions.
L'axe de constat s'est voulu aussi transparent que possible, entre les expressions des partenaires extérieurs et celles des agents. Il nous a semblé en effet que si nous voulions être fidèles à l'esprit des états-généraux, nous devions exprimer la parole telle qu'elle était transmise. J'utilise souvent trois termes pour décrire l'état d'esprit que nous avons pu constater : l'inquiétude, l'attachement au métier et l'espoir.
L'inquiétude était indiscutable. Il s'agit d'une inquiétude des agents vis-à-vis de leurs statuts mais aussi, en tant que fonctionnaires investis de missions, à l'égard des moyens attribués à ces missions et, enfin, d'une inquiétude générale sur la capacité de notre pays à continuer de s'exprimer dans le monde avec les moyens appropriés.
Le deuxième constat porte sur l'attachement au métier. Quels que soient les statuts, les grades, les positions hiérarchiques et les lieux d'affectation, ce métier attire des gens passionnés par ce qu'ils font. Ils ont la conviction chevillée au corps que leur mission a un sens et que la notion de service public reste une notion forte, qui structure une vie. Ceci est important dans un métier qui conduit à se déplacer constamment, entraînant parfois des situations familiales compliquées.
Enfin, le troisième constat porte sur l'espoir, né d'abord de l'arrêt de la dégradation obtenue par M. Le Drian, puis, peu avant la tenue des états-généraux, du fait que la ministre Catherine Colonna avait obtenu une première augmentation en personnels et en moyens budgétaires, inversant ainsi une tendance multi-décennale. Ceci donnait espoir aux agents que la convocation des états-généraux de la diplomatie n'était pas seulement un acte politique destiné à apaiser une corporation se sentant malmenée mais bien un acte politique visant à réexaminer les fondements d'un métier et d'une fonction dans l'État.
Les comparaisons avec l'étranger montrent que nous ne sommes pas les seuls à avoir vécu une telle période pour l'appareil diplomatique : nous avons découvert que nombre de nos partenaires occidentaux ont subi le même traitement. En quelque sorte, les diplomaties occidentales désarmaient au moment où les diplomaties émergentes armaient. De fait, nous constatons que la démarche entreprise en France intéresse nos collègues européens, mais aussi canadiens et australiens, qui ont réalisé eux-aussi qu'il leur fallait se remettre à l'ouvrage.
Les propositions sont organisées autour de deux grands axes.
Le premier concerne les missions et l'organisation du ministère. Il nous a semblé cohérent de commencer par là, dans une logique de redevabilité dont je vous parlais au préalable. Nous avons identifié, en la matière, quatre grands thèmes.
La première question que nous nous sommes posés en l'espèce est : comment rendre à notre diplomatie la capacité d'agilité et d'innovation qui s'impose dans un monde où les crises arrivent très soudainement et où les changements démographiques et technologiques imposent de transformer considérablement la manière dont nous faisons la diplomatie aujourd'hui ?
Le deuxième thème a tourné autour du « chef de filat ». Il est commun de dire que le Quai d'Orsay doit être le chef de file de l'action internationale. Concrètement, l'argument d'autorité n'en est pas un et l'argument juridique ne suffit pas : il faut une structure qui permette aux directions du ministère de mener ce rôle d'impulsion et de coordination, sous l'autorité du président de la République, de la première ministre et du Gouvernement. Pour y parvenir, il a semblé nécessaire d'examiner la manière dont nous traitons les enjeux globaux, c'est-à-dire les questions de santé mondiale, de changement climatique, d'économie internationale ou de numérique sur lesquelles les diplomates ne peuvent pas agir seuls. Il faut organiser un mariage entre, d'une part, les cultures spécialisées des ministères et des secteurs de la société en charge de ces domaines et, d'autre part, les diplomates qui sont les spécialistes de l'action internationale et de la négociation.
Le troisième sujet a porté sur la question de l'influence dans une Europe et un monde qui se développent. L'influence concerne la communication à l'ère de la désinformation et des réseaux sociaux mais aussi notre réseau de coopération culturelle et universitaire. De fait, des coupes minimes au regard de l'ensemble du budget de l'État aboutissent à la mutilation de fonctions extérieures de l'État.
La dernière thématique a concerné le service aux Français, en abordant deux aspects : l'avenir du réseau consulaire et les ressources humaines. Pendant un temps, certains ont prétexté réduire le réseau consulaire au motif que le numérique permettait de réaliser des économies d'échelle. Il faut certes numériser tout ce qui peut l'être mais aussi se souvenir que, dès qu'il y a une crise, les Français ont besoin à l'étranger d'une représentation diplomatique qui puisse venir à leur aide. Le rapatriement de 400 000 Français lors de la crise de la Covid-19 l'a aisément rappelé.
Le deuxième axe du volet du rapport consacré aux propositions touche aux ressources humaines. Nous avons étudié l'ensemble des agents et des catégories, en France comme à l'étranger, pour regarder quelles avaient été les évolutions au cours des années et pour proposer un certain nombre de modifications, soit concernant l'application de la réforme de la haute fonction publique, soit concernant le recours aux autres formes de contrats et à l'avenir des concours.
Nous avons travaillé sur la question des compétences car il nous semble exister un déficit dans l'appareil de formation du Quai d'Orsay. Nous avons insisté sur l'idée que l'école pratique des métiers de la diplomatie doit prendre une place essentielle au service de la formation des diplomates, des compétences de savoir-faire, de savoir-être et des compétences spécialisées, tels les sujets européens et stratégiques.
Nous avons enfin abordé les questions d'adéquation entre le corps diplomatique et la société française. Nous avons estimé que l'accent devait être mis sur la parité encore plus qu'il ne l'est déjà, pour l'atteindre non seulement à la base du recrutement mais également au sommet de la pyramide. S'agissant de la diversité, l'objectif consiste, par exemple, à mieux organiser les parcours de carrières de celles et ceux qui entrent par des voies contractuelles ou de catégorie B ou C, afin de mieux refléter la diversité de la société française, qu'elle soit géographique, d'origine ou de culture.
Le ministère a eu l'honneur d'accueillir le président de la République le lendemain même de la remise du rapport à la ministre. Celui-ci a formulé des annonces extrêmement importantes concernant les moyens budgétaires et humains. Il nous a demandé de travailler sur quatre sujets : un métier rénové ; une fonction d'influence ; une capacité à mieux aborder les enjeux globaux ; une capacité à mieux répondre aux besoins des Françaises et des Français dans notre action.
S'agissant du suivi, je laisse à votre commission le soin d'accueillir Mme la ministre et mes collègues chargés de directions. La ministre a annoncé vouloir préparer, pour le mois de septembre, un premier rapport d'exécution à l'intention du président de la République sur la mise en œuvre d'un ensemble de réformes relatives à ces quatre thèmes. L'objectif consiste à démontrer que les annonces concernant les moyens humains et budgétaires seront suivies d'effets et qu'elles sont mises en application sur la base d'une conception raisonnée du point d'application de ces progrès : en effet, il ne suffit pas de dire que des ETP supplémentaires sont budgétés, il faut également dire où ceux-ci sont affectés et comment effectuer les arbitrages, en fonction d'ordres de priorité également établis.
Il existe actuellement quinze chantiers de ressources humaines conduits sous l'égide de la secrétaire générale du ministère et du cabinet de la ministre. Certains ont déjà été mis en œuvre, comme la création d'une nouvelle sous-direction à la direction de la communication et de la presse, chargée plus spécialement de la question de la lutte contre la désinformation. Un grand chantier sur les méthodes de travail a également été engagé.
En conclusion de cette introduction, je tiens à dire que cette expérience a été très intéressante sur le plan personnel et humain. Mais elle est surtout, alors que j'approche de la fin de ma carrière de fonctionnaire, un formidable moment d'espoir. C'est la première fois en trente-cinq ans de carrière que je vois l'autorité publique engager sur le sujet de la diplomatie un effort de cette nature, dans lequel sont consultés l'ensemble des agents dans une logique de « citoyens-fonctionnaires », afin de réfléchir collectivement sur le cœur du métier, son adaptation au monde et aux besoins de la France par rapport à ses priorités.
Il ne s'agissait pas, à travers la conclusion de ces états-généraux de la diplomatie, de prétendre définir à la place du Gouvernement les priorités de l'action diplomatique de la France, mais plutôt d'un exercice dans lequel nous réfléchissions à la cohérence entre l'ambition de puissance mondiale de notre pays, qui demeure fondamentale pour nous tous, et l'organisation du service diplomatique de la République.
Je vous remercie pour votre présentation très complète. Les orateurs des groupes politiques vont à présent s'exprimer et vous poser leurs questions.
Monsieur l'ambassadeur, c'est en voisine que je m'adresse à vous, compte tenu de vos fonctions en Suisse. Vous connaissez mon engagement afin que des organisations internationales puissent s'installer sur le sol français, potentiellement sur le Genevois français.
Les états-généraux de la diplomatie ont représenté un exercice inédit de réflexion pour nos diplomates. Le groupe Renaissance tient à vous remercier pour votre travail et votre dévouement. Les discussions ont parfois été houleuses mais elles ont abouti à une feuille de route ambitieuse pour notre démocratie, résolument tournée vers l'avenir et à la hauteur des défis auxquels notre politique étrangère doit faire face.
Le président de la République a souligné les quatre grands axes que vous avez évoqués : adapter le métier diplomatique aux changements du monde ; investir le champ de l'influence ; prendre le tournant des enjeux globaux et rapprocher la diplomatie des Français. Nous saluons vivement ces orientations mais les conclusions des états-généraux tracent le constat inquiétant d'une perte de sens et d'un découragement de nos diplomates : près d'un tiers des agents ont envisagé ou envisagent de quitter le Quai d'Orsay. Pourtant, le métier de diplomate offre de belles perspectives de carrière au service de la France, dans un contexte géopolitique aux multiples enjeux.
Nous devons donc travailler pour continuer à attirer et donner envie de poursuivre ce métier de passion et d'engagement. Nous tenons également à vous entretenir de la place des femmes au sein de notre diplomatie. La France poursuit une diplomatie féministe et ambitieuse pour intégrer l'égalité femmes-hommes dans tous les enjeux internationaux. Des progrès significatifs ont été réalisés au cours de la décennie en termes de parité mais nous ne comptions que 28 % d'ambassadrice en 2021 et 30 % de femmes consuls généraux en 2022.
Pouvez-vous nous préciser les mesures retenues pour favoriser l'attrait de la profession et conforter l'égalité femmes-hommes, afin de donner à toutes et à tous des perspectives d'accès aux postes diplomatiques les plus élevés ?
Les femmes sont aussi nombreuses que les hommes à réussir les concours du Quai d'Orsay. Ensuite, la loi Sauvadet a permis de faire un grand progrès sur le nombre de femmes nommés en primo-ambassadrices ou directrices dans des fonctions de responsabilité. Cependant, nous ne sommes pas encore à la parité complète sur l'ensemble des fonctions dans le ministère de l'Europe et des affaires étrangères.
Nous devons nous interroger sur les raisons pour lesquelles, à mesure qu'avance la carrière, le nombre des femmes et celui des hommes ne restent pas similaires. L'association Femmes et Diplomatie travaille sur ces sujets et irrigue l'administration en propositions, en demandant de travailler sur toutes sortes de mesures, pas exclusivement administratives. Par exemple, l'une d'entre elles consiste à faire en sorte que lorsqu'un chef ou une cheffe de poste est nommé, son ou sa numéro deux soit de l'autre sexe. L'association demande aussi de réfléchir à des sujets plus complexes, comme les biais cognitifs, les auto-résistances à la présentation de candidatures dans des fonctions et la difficulté de combiner une vie familiale et une carrière diplomatique.
D'expérience, les femmes sont plus attentives que les hommes à l'équilibre de la vie familiale et, de ce fait, moins promptes à accepter des situations d'éloignement ou de séparation géographique temporaire. Je crois pouvoir dire que la secrétaire générale du ministère, l'inspectrice générale et le directeur général de l'administration disposent, dans ce rapport et dans les propositions de Femmes et Diplomatie, d'une série de propositions destinées à progressivement améliorer la prise en compte de l'exigence de féminisation dans les emplois supérieurs du Quai d'Orsay.
Naturellement, la considération de la féminisation doit s'accompagner d'une égale exigence professionnelle sur la qualité de nomination dans les emplois de responsabilité. De ce fait, il ne s'agit pas seulement d'une question de mécanique mais d'arriver à créer des candidatures féminines pour les emplois de responsabilité, en surmontant un phénomène bizarre par lequel les femmes hésitent parfois à se porter candidates à des fonctions, alors que les hommes hésitent moins.
En résumé, nous parvenons au point de bascule grâce auquel, dans les années qui viennent, la parité ne sera plus une question. Mais nous n'y sommes pas encore tout à fait. Il convient d'insuffler encore un peu plus d'énergie dans les dispositifs.
À vous entendre, on peut se demander si les femmes sont trop timides ou les hommes trop présomptueux…
Je retiens de votre rapport l'attachement profond des diplomates à leur métier, en même temps qu'un malaise significatif face à la volonté du pouvoir de briser ces corps de métiers. Ma première question porte sur l'inadéquation entre les objectifs de la diplomatie française et les moyens mis en œuvre pour les atteindre. Quelle est votre opinion sur l'ampleur de l'effort promis par le président de la République en réponse à votre travail, à savoir le recrutement de 700 ETP supplémentaires lors des quatre prochaines années ? Un tel effort est-il suffisant pour répondre efficacement à la crise du Quai d'Orsay ?
Tirez-vous de vos consultations le sentiment que les agents du Quai d'Orsay comprennent, d'une part, et approuvent, d'autre part, les objectifs de la politique étrangère de la France ? Les priorités de la France sur les plans géographiques et thématiques sont-elles par ailleurs clairement identifiées ?
Enfin, je m'interroge sur l'objectif de la politique de diversité que vous appelez de vos vœux. À ma décharge, il est vrai que vos propositions sont peu éclairantes. Vous appelez à encourager la diversité mais précisez qu'une telle politique doit néanmoins se conduire dans les limites de ce que permet le droit français et en évitant les assignations à résidence, dans le but supposé de faire rayonner les valeurs républicaines et de dialoguer efficacement avec le reste du monde. Comment proposez-vous de décliner une feuille de route aussi vague et visiblement paradoxale ?
S'agissant de l'effort, trente ans de baisse des moyens budgétaires et humains constants ont conduit à construire une action publique en partant du principe que les moyens seraient moindres. De ce fait, la première chose à faire consiste à opérer un basculement psychologique par lequel vous vous remettez à penser en termes d'augmentation des moyens et d'affectation de cette augmentation. Cet exercice n'est pas si aisé à réaliser car il faut rompre avec une habitude de pensée et il faut arriver à prioriser alors que l'on perçoit que tout est prioritaire.
Il doit y avoir un dialogue, qui a lieu en ce moment même, entre l'administration et le Gouvernement, sur l'affectation des moyens à différentes priorités. Les fonctionnaires ont des expertises et des avis à faire valoir mais, au bout du compte, cet arbitrage est éminemment politique. Si nous arrivons à la fin des quatre ans en ayant 700 ETP de plus et 20 % de budget de fonctionnement supplémentaire, nous aurons pu enclencher un cercle vertueux qui prouvera sa propre pertinence.
Il n'appartient pas aux diplomates ou aux fonctionnaires de fixer les priorités de l'action diplomatique de la France mais d'apporter une expertise sur l'état du monde et de l'Europe, sur les dossiers précis et la manière de les aborder. Il leur revient aussi d'exécuter les priorités décidées par le président de la République, le Gouvernement et la représentation nationale. De fait, il existe un patriotisme profond de la part de ceux qui servent la diplomatie française : comme les militaires, nous vouons notre vie à la défense et la promotion des intérêts français dans le monde. Nous sommes donc profondément attachés à l'idée d'une grandeur et d'un rayonnement de la France. Mais ensuite, il appartient au pouvoir politique de décider les priorités. Le temps me manquant pour développer plus avant, j'évoquerai la question de la diversité ultérieurement dans les échanges.
Les états-généraux de la diplomatie auraient été encore plus prometteurs s'ils ne s'étaient pas inscrits dans le contexte troublé de la réforme de la haute fonction publique. Votre rapport a déjà connu quelques avancées concrètes mais nous serons vigilants sur l'application des mesures envisagées, notamment les 700 ETP et la hausse de 20 % du budget de fonctionnement. Je crains, pour ma part, le retour de l'austérité. Avez-vous quelques garanties à ce sujet ?
Ensuite, je formule le vœu que le ministère retrouve sa place au sein de l'État, notamment vis-à-vis de l'Elysée, de l'Agence française de développement (AFD) voire du ministère des armées pour exercer le chef de filat de l'action extérieure. Au-delà de la question des moyens, cette place dans l'État a-t-elle été évoquée pendant les états-généraux de la diplomatie ? Sentez-vous une inflexion sur ce dernier point ?
Je précise que la question sur les garanties devra plutôt être posée à Mme Colonna et que ce sera à nous de les obtenir.
S'agissant du périmètre, nous nous sommes demandés s'il fallait consacrer beaucoup de temps à la question des relations avec Bercy et des attributions respectives. Nous en avons conclu que nous devions d'abord commencer par réarmer et réorganiser le ministère avant de passer à la conquête de directions internationales. Ce choix est assumé : il permet d'éviter de se lancer dans des guerres inutiles et perdues d'avance mais aussi de nous concentrer sur ce qu'il faut faire en premier.
Le métier diplomatique n'est plus réservé aux chancelleries ; il ne se fait plus exclusivement dans les ministères des affaires étrangères. De fait, les ambassades sont des lieux d'interministérialité. L'interministérialité existe déjà et la question qui se pose aux diplomates est de savoir s'ils sont à la hauteur des exigences de cette interministérialité, c'est-à-dire s'ils acceptent de se plonger dans les affaires globales, autant qu'ils l'ont fait pour les affaires européennes ou les affaires stratégiques. Il me semble à cet égard que les mesures qui sont en train d'être prises pour consolider ce savoir-faire des diplomates constituent la meilleure réponse.
L'AFD est une grande maison, qui a été extraordinairement développée, avec des initiatives notamment inspirées par Jean-Michel Severino et poursuivies par d'autres directeurs, à la demande du pouvoir politique. Il a ainsi été décidé de construire une grande AFD, qui soit à la fois une banque et qui devienne le lieu de l'expertise. La vraie difficulté pour les diplomates consiste à construire l'appareil d'une tutelle authentiquement stratégique. Il s'agit ainsi de nous mettre au niveau. Nous avons été frappés, lors de nos auditions, d'entendre plusieurs interlocuteurs distingués nous demander pourquoi le Quai d'Orsay avait perdu la culture de développement, c'est-à-dire la capacité à comprendre les enjeux du développement.
Il nous faut travailler à cette question du développement dans le cadre de la réforme de la direction générale de la mondialisation, mais aussi sur le lien entre la direction de l'Union européenne et les ministères, sur la circulation des diplomates dans l'État et sur l'accueil par les diplomates d'acteurs d'autres ministères dans leur travail.
Il existe malgré tout une particularité française : celle que la diplomatie ne possède pas la pleine maîtrise des actions de développement. Si cette culture du développement est ressentie comme défaillante, le système ne peut, structurellement, qu'accentuer ce phénomène, puisque l'AFD contrôle la plupart des fonctions nécessaires. N'existe-t-il pas, quand même, une certaine incohérence entre ces deux réalités ?
Il est clair que quand on a l'argent, le talent et professionnalisme, on est dans une position convaincante. Quand on a de surcroît construit un réseau international efficace, cela y contribue. Mon expérience d'ambassadeur en Inde, un pays où l'AFD était en train de s'installer, est la suivante : quand les chefs de poste considèrent que l'AFD fait partie de l'action extérieure du pays et qu'ils associent quotidiennement les représentants de l'AFD à leur travail, les choses se passent bien.
Cela dit, la question de la coexistence du représentant de l'ancienne caisse de coopération et de développement et de l'ambassadeur était une question brûlante dans l'Afrique francophone d'autrefois. Nous ne faisons que poursuivre cette dialectique entre une agence opératrice de projets et un ambassadeur chargé de représenter le Gouvernement. Le Quai d'Orsay doit réfléchir à la construction d'une tutelle stratégique, qui dépasse le contrôle de gestion et qui entre dans le cadre d'un dialogue sur les orientations stratégiques.
Je fais partie de ceux qui pensent que nous devrions réunir, comme c'est le cas au Sénat, la commission des affaires étrangères et la commission de la défense. En effet, on voit bien à quels points les enjeux sont imbriqués. Cela donnerait peut-être plus de force à notre commission, dont le président a évoqué les frustrations.
Nous nous félicitons tous de l'inversion de tendance en termes d'effectifs. Monsieur l'ambassadeur, comment, très concrètement, serait-il judicieux de pourvoir les nouveaux postes ? Quel est votre avis sur la création d'une réserve, comme celle qui intervient en matière de défense ?
Enfin, votre rapport constate un malaise des agents, qui a été renforcé par la réforme de la haute fonction publique. Quel est votre avis sur l'état actuel de ce malaise ?
Personnellement, j'estime que compte tenu de l'attrition que le ministère de l'Europe et des affaires étrangères a subi pendant tant d'années, il faut commencer de manière progressive, par un étalement des moyens supplémentaires entre les trois grandes fonctions que sont la fonction diplomatique, la fonction consulaire et la fonction de coopération, de manière à organiser une progressive remise à niveau. On a tendance à penser que tout est prioritaire mais tout ne pourra pas être priorisé. Il s'agit là d'une opinion personnelle ; j'ignore ce que la ministre décidera dans les prochaines semaines.
Nous sommes favorables à la création d'une réserve. Il me semble que nous disposons, dans la société civile et chez les jeunes retraités de ce ministère, de personnes en état d'être mobilisées, moyennant rémunération, pour des missions ponctuelles ; soit sur des crises, soit sur des urgences, de manière organisée. Ceci ne peut intervenir si nous n'avons pas une forme de corps de réserve constitué de volontaires qui s'inscrivent dans un cadre établi. Il y a là un beau chantier pour le directeur général de l'administration, si la ministre décide de le retenir.
S'agissant du malaise que vous avez évoqué, il me semble que les conditions dans lesquelles le droit d'option a été organisé pour les diplomates sont des conditions tout à fait particulières par rapport au reste de la haute fonction publique. En effet, il nous est donné le choix de rester dans le corps ancien jusqu'au bout des carrières de ceux qui y sont entrés ou d'entrer immédiatement dans le corps des administrateurs et administrateurs généraux de l'État, avec la garantie pour ceux qui décideraient de ne pas rentrer, de poursuivre des carrières dans des conditions d'égalité de traitement.
Il n'y a pas de raison de mettre en cause cette expression d'intention. En ce qui me concerne, j'ai décidé d'opter. En effet, les retards d'avancement et les baisses de prime que subissent les diplomates dans leur ministère par rapport aux autres peuvent être rattrapés par cette option. Il me semble que les garanties en train d'être construites sur le niveau de professionnalisme qui sera imposé pour l'exercice des fonctions de diplomates sont telles que la garantie du maintien d'un métier et d'une exigence professionnelle est suffisante.
Pour les secrétaires des affaires étrangères, la question est ancienne. Ma note au ministre Le Drian sur la gestion des carrières diplomatiques m'avait conduit à proposer un système de révision de leur organisation de carrières très différent. La réforme a entraîné un considérable accroissement des promotions de secrétaires vers les corps d'administrateurs, pour un certain nombre d'années. Elle a également conduit à la mise à l'étude d'un certain nombre de garanties, afin que les secrétaires qui deviendraient élèves de l'Institut national du service public (INSP) puissent sortir de l'INSP au Quai d'Orsay et, donc, que leur promotion ne soit pas l'occasion d'une remise en cause de leur vocation professionnelle mais d'une progression de carrière dans leur métier de vocation. À cet égard, le fait qu'il n'y ait plus de classement mais un appariement à l'INSP permet de construire quelque chose.
Je vous remercie pour la qualité de votre rapport et de vos recommandations. À la commission des affaires étrangères, nous contemplons avec une place privilégiée l'impact de la diplomatie dans le rayonnement de la France à l'international. Dans un contexte de transformation de la haute fonction publique et de non-adhésion à celle-ci de bon nombre d'agents du réseau diplomatique, une réflexion s'impose.
Face à cette non-adhésion, des états généraux de la diplomatie ont été menés mais il aurait été nécessaire de faire l'inverse. À la lecture de vos travaux, ma question sera très simple : la préconisation des allers et retours entre le ministère de l'Europe et des affaires étrangères et les autres ministères, mais aussi entre le public et le privé, ne risque-t-elle pas de changer la nature d'un métier à l'origine très distinct de celui des autres hauts fonctionnaires ?
Ensuite, s'agissant des époux et épouses des diplomates, j'ai eu l'occasion de rencontrer un ancien diplomate dont l'épouse est confrontée à des difficultés immenses parce qu'elle n'a jamais pu travailler. Sa situation est particulièrement compliquée, d'autant plus qu'elle est sa deuxième épouse. Bien souvent, les conjoints de l'ancienne génération de diplomates sont confrontés à de très grandes difficultés de vie. Qu'est-il possible de faire pour améliorer cette situation ?
Je suis personnellement convaincu que les allers et retours sont indispensables. En effet, si vous n'avez pas connaissance des modalités du fonctionnement interne de l'État, vous ne pouvez pas assumer des responsabilités de nature interministérielle au sommet de l'État. Or nous n'étions pas suffisamment puissants en interministériel ces dernières années. Il nous faut donc reconquérir un certain nombre de directions internationales, dans un certain nombre de ministères et un certain nombre de postes diplomatiques auprès de ministres, qui ont reculé ces dernières années. D'une part, les autres ministères veulent se les garder mais, d'autre part, les diplomates ne veulent pas toujours y aller. À mon avis, il faut être extrêmement volontaristes en la matière : ce n'est pas un moins mais un plus dans une carrière diplomatique que de savoir comment l'État fonctionne.
Le chantier des conjoints est effectivement un chantier du XXIème siècle. Il s'agit, notamment pour les ambassadeurs, de savoir quel est le statut de leurs conjoints. Est-il associé à leur mission ? Si tel est le cas, en contrepartie de quelles obligations et de quels droits ? Je ne peux apporter de réponse précise à votre question, mais pour conserver ce métier, il faut réfléchir à la manière dont les conjoints vont être traités dans le monde moderne.
Je vous remercie pour votre rapport complet qui nous permet de réfléchir à la nécessité de renforcer nos corps diplomatiques. Dans un monde de plus en plus complexe et confronté à de multiples crises, la diplomatie est en effet plus que jamais essentielle. La France, disposant du troisième réseau diplomatique mondial, a besoin de ces hommes et de ces femmes dotés d'une expérience unique, précise et irremplaçable. Ce sont eux qui prennent des initiatives et négocient, notamment sur des dossiers inédits comme le climat et la biodiversité. C'était notamment le cas au moment de l'ambitieux accord de Paris, qui demeure la pierre angulaire des politiques mondiales de lutte contre le réchauffement climatique.
Aujourd'hui, je me demande si nous serions encore capables de refaire les négociations de la COP 21, compte tenu du démantèlement de notre diplomatie. J'avoue que je n'en suis pas certaine. La réalité est alarmante : après des années de coupes budgétaires, la réforme des corps diplomatiques, décidée unilatéralement et sans débat au Parlement, conduira à la mise en extinction des corps historiques du Quai d'Orsay.
Un tiers de nos agents envisagent même de quitter définitivement le ministère. Cette situation ne peut plus durer. Il est urgent de redonner les moyens et une vision ambitieuse à nos personnels diplomatiques. La création de 700 postes d'ici 2027 et l'augmentation de 20 % du budget du ministère de l'Europe et des affaires étrangères représentent un timide début. Nous devons faire beaucoup plus, d'autant que ces postes sont annoncés sans le détail de leur ventilation au sein des différents services. Par exemple, nous ne savons pas combien de postes seront dévolus à notre action extérieure.
Je rappelle que 2 850 emplois ont été supprimés entre 2007 et 2021 ; sur une trentaine d'années, les effectifs ont été réduits de moitié sur ce ministère. Dans ce contexte, il crucial de ne pas négliger les questions d'égalité, d'inclusion et de diversité. Lorsque l'on voit en parallèle les moyens exorbitants accordés à la future loi de programmation militaire (LPM), comment comprendre que le Quai d'Orsay soit le seul ministère régalien à ne pas bénéficier d'une loi de programmation qui lui permettrait de se projeter dans l'avenir ? Sans loi de programmation et compte tenu du démantèlement progressif de nos corps diplomatiques, de quelle vision d'avenir la France se dote-t-elle concernant sa politique extérieure ?
L'idée d'une loi de programmation figurait effectivement dans notre rapport mais je ne suis pas sûr qu'elle sera retenue par le Gouvernement. Néanmoins, la volonté programmée de faire remonter les effectifs et les moyens est essentielle. Pour le comité que je présidais, cette décision politique affirmée et réaffirmée vaut engagement vis-à-vis du ministère de l'Europe et des affaires étrangères.
Je suis absolument convaincu que nous avons conservé intacte notre capacité de mobilisation mondiale et notre capacité à construire des évènements comme l'a été la COP de Paris. La conférence qui aura lieu en juin sur le financement de l'action climatique et le financement du développement constituera une réponse. Depuis Genève, j'observe que les acteurs multilatéraux et beaucoup de pays remercient la France d'avoir pris cette initiative et attendent avec une grande impatience la possibilité de consacrer un certain nombre d'efforts politiques à cette question du financement de l'action climatique mondiale, du financement de la lutte contre la pauvreté et de l'articulation entre l'exigence de développement et l'exigence de changement climatique.
Certains membres de cette commission ont estimé que la grève des agents diplomatiques en réaction à une réforme décidée d'en haut était légitime. La question posée par les personnels du Quai d'Orsay était juste, même si les réponses pouvaient être diverses. Depuis des années, dans cette commission, nous n'avons cessé de dire aux ministres des affaires étrangères successifs qu'il fallait cessait l'érosion des postes et des moyens alloués à leur ministère.
Selon moi, le ministère de l'Europe et des affaires étrangères est le ministère de la paix, celui qui, par son analyse, son action et sa réactivité, peut permettre d'éviter les guerres. Il doit donc disposer de moyens adaptés à cette belle et noble mission que constitue la diplomatie. Puisque vous avez indiqué dans votre rapport qu'une loi de programmation de la diplomatie française pourrait être utile, je propose à notre commission de soutenir cette suggestion, en l'érigeant au rang de véritable priorité. Donner des moyens aux militaires, c'est bien ; donner des moyens aux diplomates, c'est mieux !
Cette option n'est pas pour l'instant une option prioritaire du Gouvernement, et voici son raisonnement : il existe déjà une loi de programmation pour l'aide au développement. Celle-ci rassemble la plupart des moyens budgétaires du ministère de l'Europe et des affaires étrangères. Les sommes dont il est question pour le fonctionnement diplomatique, le fonctionnement consulaire et la coopération culturelle, scientifique et technique ne sont pas d'une telle ampleur que l'on puisse les comparer à celles qui sont traditionnellement inscrites dans une loi de programmation.
Je pense que l'un des critères sur lesquels la modernisation du ministère sera jugée résidera dans sa capacité à développer un plan d'action pluriannuel qui affiche comment on assure la modernisation numérique, la modernisation consulaire, la remise à niveau de la coopération culturelle, scientifique et technique, le maintien et le développement de la présence diplomatique et politique. Pour ma part, je vois assez bien comment le ministère devrait mener à bien ce plan d'action pluriannuel. En revanche, s'exprimer sur l'opportunité d'une loi de programmation dépasse les attributions d'un haut fonctionnaire tenu par un certain nombre d'obligations.
Si les états-généraux de la diplomatie avaient, comme le bon sens l'exige, eu lieu avant la décision monarchique de supprimer les corps diplomatiques, nous n'en serions pas arrivés là. Je persiste à penser qu'il ne s'agit pas d'une transformation de la haute fonction publique mais d'une démolition. En cas d'alternance, il faudra rétablir ces corps diplomatiques. Malgré votre talent de diplomate, les fonctionnaires du ministère des affaires étrangères n'oublient pas qu'ils ont été sacrifiés.
Nous nous réjouissons tous du coup d'arrêt donné à la diminution des moyens mais je me méfie des promesses en l'air. La proposition de notre collègue Lecoq est excellente : il faudrait une loi de programmation, qui englobe l'AFD. En effet, pourquoi l'AFD est-elle séparée dans la programmation ? L'AFD est un moyen au service de notre diplomatie et de notre politique étrangère et non une citadelle, ce qu'elle est pourtant devenue aujourd'hui.
Quand on va sur le terrain, comme je l'ai fait récemment au Brésil an tant que président du groupe d'amitié France-Brésil, on ne peut que constater que les coupes continuent : les Alliances françaises ferment et nous sommes encore très loin du compte. Pour justifier l'existence de la citadelle de l'AFD, vous évoquiez ce qui se passait en Afrique en matière de coopération. Mais cela n'était pas la même chose : à l'époque, le ministère de la coopération connaissait le terrain et ne le jugeait pas de l'extérieur. Il défendait la France beaucoup plus que l'AFD ne le fait. Il faut donc remettre l'AFD sous l'autorité du ministère des affaires étrangères.
Enfin, s'agissant de la perte de sens, il faut remarquer que lorsque l'on a une politique étrangère indépendante, on a un ministère des affaires étrangères heureux. Le général De Gaulle avait anticipé un monde multipolaire et avait incarné cette voix de la France. Jacques Chirac l'avait prolongé dans son discours de Johannesburg et lors de sa prise de position sur l'Irak. Mais au moment où le monde devient multipolaire et où il attend une France indépendante, les pays constatent que la France est devenue un allié obéissant des États-Unis. Les fonctionnaires du ministère des affaires étrangères retrouveront de l'espoir quand ils verront que la France a retrouvé une politique étrangère.
Le traumatisme des personnels diplomatiques ne portait pas seulement sur la baisse des moyens. L'idée de supprimer les corps diplomatiques au terme d'une longue pénitence qui leur avait été imposée constituait un signal absolument terrifiant. Pour ma part, je n'ai toujours pas compris cette suppression. L'exigence de mobilité devait être encouragée. Vous l'avez d'ailleurs située de manière intéressante, en indiquant que la véritable mobilité était la capacité des diplomates à entrer dans d'autres administrations de l'État. De fait, il n'y a pas assez d'ambassadeurs à Bercy. Le métier diplomatique comporte des sujétions épouvantables et l'on ne peut pas l'improviser pendant dix à quinze ans. Nous avons un peu le sentiment qu'un marteau-pilon a été utilisé pour effectuer un petit travail, alors qu'il suffisait en réalité de développer cette mobilité.
Ensuite, nous allons assez souvent dans les postes en Afrique, où une seule priorité nous saute aux yeux : la libération de la politique des visas. L'engorgement actuel n'est plus supportable ; la machine ne répond plus. À ce titre, je rappelle que Marielle de Sarnez avait formulé des propositions dans un rapport, notamment concernant les visas de longue durée. Mais la combinaison du ministère des affaires étrangères, du ministère de l'intérieur et l'absence de totale de moyens aboutit à la réalité que nous connaissons aujourd'hui et qui conditionne très largement notre politique africaine, beaucoup plus qu'on ne peut le penser. Ce blocage tient à la politique administrative, à la politique du personnel et à l'interministériel.
De toute manière, en définitive, nous jugerons sur pièces, c'est-à-dire sur lors de l'examen du budget. J'espère que nous ne serons pas déçus dans le projet de loi de finances pour 2024, lorsqu'il nous sera soumis. Nous verrons bien si le coup d'arrêt aux coupes claires est réel et s'il donne naissance au mouvement inverse annoncé par le président de la République.
Je donne maintenant la parole aux collègues inscrits qui souhaitent poser des questions à titre individuel.
Je suis rassuré par votre audition et j'ai particulièrement apprécié votre approche. Depuis six ans, en ma qualité de rapporteur pour avis sur les crédits de la mission « Action extérieure de l'Etat », j'affirme que nous sommes confrontés à un souci de cohérence de notre action à l'étranger et à un problème de cohérence des métiers. Lors des états-généraux de la diplomatie, il a précisément été question d'un nouveau métier, sur le périmètre duquel je m'interroge. Par exemple, les services économiques dans les ambassades font-ils partie de votre définition du nouveau métier ? Qu'en est-il des unités mixtes de recherche à l'étranger (UMIFRE) ? La fonction d'administrateur de l'AFD constitue-t-elle un métier ? Je rappelle que nous avons transformé, dans la loi du 4 août 2021, le conseil d'administration de l'AFD.
S'agissant du périmètre, il faut établir des filières : tout le monde ne peut pas être généraliste. Nous avons besoin de diplomates qui ont une compétence européenne en plus de quelques autres compétences, comme une compétence « stratégie », une compétence « développement » et une compétence « affaires globales ». Nous devons construire les systèmes de carrière des agents, afin qu'ils aient toujours leur spécialité géographique et cette compétence spécialisée leur permettant d'être crédibles dans les affaires dont ils traitent avec les autres ministères.
Ensuite, il faut accepter l'idée que, dans le monde moderne, l'action de la France à l'extérieur doit rester plurielle. Si vous enlevez l'indépendance intellectuelle des UMIFRE, ils ne servent plus à rien. Ils ne figurent pas dans notre rapport, dans la mesure où ce réseau est rattaché au Quai d'Orsay mais composé exclusivement de personnes choisies par leurs pairs et qu'il est financé soit par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères, soit par le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, selon les cas. Nous exerçons une protection bienveillante mais nous nous gardons bien d'intervenir dans leur travail car cela serait radicalement contraire à leur indépendance et à la manière dont ils regardent le monde. Il est important pour la France de garder la capacité de doubler le regard des diplomates, qui sont des opérationnels, par celui des universitaires et des scientifiques, qui ont une capacité de projection plus profonde et plus large.
Nous avons décidé de ne pas revendiquer un accroissement du ministère par absorption des services économiques extérieurs, parce qu'il nous a semblé que le combat n'était pas gagnable dans l'état actuel des choses. Nous avons considéré qu'il fallait d'abord renforcer le ministère dans sa structure et ses fonctions actuelles, avec un professionnalisme accru. Ce choix est sans doute discutable et discuté mais nous l'avons fait au nom de la capacité à présenter des options réalisables, dans les circonstances dans lesquelles nous opérons aujourd'hui.
Je souhaite m'attarder un instant sur les relations que le ministère des affaires étrangères souhaite développer. Je pense notamment à la fiche 12 de votre rapport, qui concerne le travail à entreprendre en plus étroite collaboration avec le Parlement. Dans le point 2 des enjeux, vous mentionnez que des mécanismes d'information spécifiques existent au profit des parlementaires européens. Existe-t-il des moyens comparables pour les députés de l'Assemblée nationale ?
De plus, dans votre état des lieux au point 1-6-5, vous mentionnez que « dans un contexte où les opinions publiques deviennent de plus en plus une cible de nos concurrents et rivaux, il importe que le ministère des affaires étrangères développe une politique d'influence en France en se projetant plus fortement dans les territoires ». L'immigration sur notre sol est-elle si importante que le ministère des affaires étrangères souhaite traiter d'affaires étrangères chez nous ?
Ces dernières années, nous avons pu assister à un renforcement de l'association des agents du ministère aux travaux et à l'information de la représentation nationale. Au début de ma carrière, il était rare qu'un fonctionnaire se présente devant une commission de l'Assemblée nationale ou du Sénat. Désormais c'est une obligation, et c'est très bien ainsi. Il existe un devoir d'information et de partage.
S'agissant des régions, nous avons été frappés de constater qu'en général, les Français ne savent pas ce que font les diplomates. De plus, si nous voulons recruter « large », nous devons rechercher en dehors de Paris. Trop encore, les agents du ministère de l'Europe et des affaires étrangères ont le profil Sciences-Po Paris et Institut national des langues et civilisations orientales (INALCO), avec ce que cela signifie en termes d'origines socio-professionnelles.
Cela rejoint une question qui m'avait été posée précédemment et à laquelle je n'avais pas eu suffisamment de temps pour répondre : autant il est parfaitement normal d'exiger d'un haut fonctionnaire qu'il ait passé des concours méritocratiques et que la garantie de professionnalisme soit là, à l'issue des concours, autant il n'est pas normal qu'un corps qui représente la France à l'étranger soit indifférent à sa représentativité par rapport à ce qu'est la société française. De ce point de vue, nous effectuons des efforts en direction des lycées de province et des universités en dehors de Paris pour explique ce métier diplomatique, consulaire et de coopération à des gens qui n'en ont jamais entendu parler. En outre, nous constatons la croissance des coopérations décentralisées et la part grandissante des élus territoriaux dans l'action extérieure de la France.
Il faut y voir là un enrichissement et mettre davantage la diplomatie française au service des représentations des élus nationaux ou territoriaux et de leur volonté de rayonnement à l'international. Cela signifie être plus présent dans les régions et les grandes communes.
Je souhaiterais obtenir quelques précisions sur les recommandations de votre rapport. Dans la fiche 28, vous indiquez qu'il faut des femmes à des postes qui n'ont jamais été encore occupés par des femmes. Quelques lignes plus loin, vous précisez ne plus vouloir souhaiter faire de communication avec des stéréotypes de genres. Comment allez-vous annoncer qu'une femme serait nommée à un poste si vous vous l'interdisez ?
À la fiche 30, vous voulez prendre les enjeux propres à l'appareil diplomatique français en évitant toute forme d'assignation identitaire. Ne faut-il plus de Français pour représenter les Français hors de France ? Les intérêts français sont-ils trop connotés pour être défendus par Français ?
Depuis 2017 et après cinq siècles d'existence, le ministère fait désormais passer l'Europe avant les affaires étrangères. Dans votre rapport, vous préconisez que le ministère encourage les intérêts woke d'une minorité plutôt que les intérêts de la France à l'étranger et les ressortissants expatriés. Pensez-vous que la France, disposant du troisième réseau d'influence diplomatique au monde, paraisse plus sérieuse aux yeux des autres nations en cédant aux effets de mode ?
Je travaille à Genève, où 181 représentations permanentes sont présentes. Parmi elles figurent une trentaine de pays européens, une soixantaine de pays occidentaux et le reste est essentiellement composé des pays africains et asiatiques, qui rassemblent 7 des 8 milliards d'habitants de la planète. Quand vous voulez faire voter un traité ou une résolution, un État vaut une voix, quel que soit son poids. Si la France semble vouloir s'extraire du mouvement du monde et attacher plus d'importance à un passé glorieux qu'à un futur en transformation, elle se décrédibilise aux yeux de tous ceux pour qui le monde est en train de bouger à toute vitesse. Il est de ce fait important que la France démontre au monde qu'elle a une diplomatie dans laquelle les femmes exercent des fonctions de responsabilité au même niveau et au même titre que les hommes, et dans laquelle il n'y a pas d'assignation faisant que quelqu'un qui naîtrait pauvre et isolé n'aurait pas de chance de progression dans l'appareil d'État.
Cette qualité républicaine, qui a toujours été notre marque de fabrique, constitue un enjeu de crédibilité pour notre diplomatie multilatérale. Lorsque nous avons passé l'examen périodique universel devant le Conseil des droits de l'Homme des Nations Unies, le fait que la délégation française soit interministérielle, paritaire et diverse a été relevé par toutes les délégations. Cela a été compris comme le message que la France continue à porter des valeurs universelles et continue à mettre ses actes en cohérence avec les principes qu'elle affiche.
Un diplomate français ne se reconnaît absolument pas dans le terme de wokisme. Pour un diplomate français, les droits de l'Homme sont individuels et universels. Ce sont les droits de chaque personne, quelles que soient sa race et son identité. Croyez-moi, cette spécificité fait que la France conserve une voix qui porte. Comme nous sommes viscéralement attachés à ce principe, notre voix est écoutée lorsque nous parlons de ces grands sujets.
Il y a un mois, le président de la République se rendait en Chine accompagné de Mme Ursula von der Leyen pour tenter, sans grand succès, de relancer les relations euro-chinoises. Ce déplacement était inédit car il s'agissait pour le président de la République de se positionner en tant que représentant des intérêts européens. Le chancelier Olaf Scholz ne participait pas à ce voyage, préférant négocier en tant que représentant du peuple allemand.
Comment comptez-vous articuler le réarmement et le renforcement de notre diplomatie nationale avec le fait que le président de la République manifeste délibérément sa volonté d'englober notre souveraineté et notre liberté diplomatique dans le grand ensemble européen, faisant des priorités des Français un critère secondaire de son action à l'étranger ?
Votre question s'adresse plus à un ministre ou un responsable politique qu'à un fonctionnaire. En revanche, s'agissant de l'articulation entre la diplomatie française et la diplomatie européenne, nous vivons en permanence avec ce sujet, que cela soit à Bruxelles, à Genève, à New York ou dans notre action bilatérale.
Au fond, depuis le Brexit, il ne reste plus beaucoup de grands pays à très grande capacité de rayonnement mondial en Europe. Ces pays en ont acquis un poids et une responsabilité supérieurs dans la réflexion et la définition des politiques européennes. Nous sommes très peu de pays à pouvoir assoir un raisonnement diplomatique sur une expérience mondiale, et par conséquent irriguer la diplomatie européenne en cours de création d'un savoir tiré de l'expérience et du terrain.
De ce fait, les diplomaties allemandes, italienne, espagnole et française ont une capacité d'influence sur la diplomatie européenne à hauteur de leur engagement. C'est par une forme de magistrature d'influence intellectuelle et diplomatique que, au-delà de ce qui est fait au Conseil européen ou au Conseil affaires étrangères, nous parvenons à inspirer dans le cadre européen une politique diplomatique et une vision du monde cohérente avec la façon dont nous conduisons nous-mêmes notre action diplomatique autonome.
Monsieur l'ambassadeur, je vous exprime la reconnaissance profonde de notre commission pour la qualité et la précision de vos interventions mais aussi pour la disponibilité manifestée aux différentes interrogations de nos collègues.
Vous avez compris l'état d'esprit dominant de cette commission vis-à-vis du ministère de l'Europe et des affaires étrangères. Nous avons été frappés par une grande inquiétude et une très grande incompréhension en raison du mouvement d'abandon progressif des moyens administratifs, financiers et humains de l'action internationale de la France, couplé avec un recul évident de la francophonie. Budget après budget, nous avons souffert de la façon dont laquelle le Quai d'Orsay a été désarmé.
La cohérence de la séquence de la tenue de ces états-généraux après la décision de supprimer les corps diplomatiques ne nous a pas sauté aux yeux. Il fallait plutôt, me semble-t-il, procéder dans le sens inverse. Cependant, nous voudrions que cet exercice soit véritablement l'occasion d'un nouveau départ et nous considérons que le métier de diplomate doit être maintenu. Quel que soit l'emballage administratif, il faut conserver les exigences d'un métier, qui diffère de celui des autres fonctionnaires.
Nous voulons que le ministère de l'Europe et des affaires étrangères soit plus présent dans l'ensemble de l'administration d'État et qu'il ait les moyens financiers et humains d'y parvenir. Par ailleurs, je vous avoue que je n'ai toujours pas vraiment compris comment nous allions recruter les gens à la sortie de ce qui ne s'appelle plus l'École nationale d'administration.
Bien évidemment, la pierre de touche sera le budget. Cette démarche ne sera véritablement crédible que si le Quai d'Orsay réussit, dans les arbitrages interministériels, à maintenir le renversement de tendance des quinze dernières années et à poursuivre ce que vous qualifiez de « réarmement ». Je vous remercie pour votre démonstration brillante et cohérente. Pour prendre une allégorie sportive, je dirai : le score est désormais d'un but partout ; la belle se déroulera à l'automne, lors de l'examen du budget !
Monsieur le président, je vous remercie pour votre attention aux intérêts extérieurs de la France, votre ouverture et votre bienveillance.
La séance est levée à 13 h 00
Membres présents ou excusés
Présents. - M. Damien Abad, Mme Nadège Abomangoli, Mme Farida Amrani, M. Carlos Martens Bilongo, Mme Chantal Bouloux, M. Jean-Louis Bourlanges, M. Louis Boyard, M. Jérôme Buisson, Mme Mireille Clapot, M. Pierre Cordier, M. Alain David, Mme Julie Delpech, M. Pierre-Henri Dumont, M. Nicolas Dupont-Aignan, M. Frédéric Falcon, M. Guillaume Garot, Mme Maud Gatel, M. Hadrien Ghomi, Mme Olga Givernet, M. Philippe Guillemard, M. Michel Guiniot, Mme Marine Hamelet, M. Joris Hébrard, M. Alexis Jolly, Mme Brigitte Klinkert, M. Arnaud Le Gall, M. Jean-Paul Lecoq, Mme Emmanuelle Ménard, M. Nicolas Metzdorf, M. Frédéric Petit, M. Jean-François Portarrieu, M. Adrien Quatennens, Mme Laurence Robert-Dehault, Mme Laetitia Saint-Paul, Mme Sabrina Sebaihi, M. Vincent Seitlinger, Mme Ersilia Soudais, Mme Laurence Vichnievsky, M. Lionel Vuibert, M. Christopher Weissberg, M. Éric Woerth, Mme Caroline Yadan, M. Frédéric Zgainski
Excusés. - M. Moetai Brotherson, Mme Eléonore Caroit, M. Sébastien Chenu, M. Olivier Faure, M. Bruno Fuchs, M. Meyer Habib, M. Michel Herbillon, M. Hubert Julien-Laferrière, Mme Amélia Lakrafi, M. Tematai Le Gayic, Mme Marine Le Pen, M. Vincent Ledoux, M. Laurent Marcangeli, Mme Nathalie Oziol, Mme Mathilde Panot, Mme Barbara Pompili, Mme Estelle Youssouffa
Assistait également à la réunion. - M. Karim Ben Cheikh