La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures quarante-cinq.
La parole est à Mme la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
Je suis heureuse d'évoquer devant vous des personnels essentiels au fonctionnement de l'éducation nationale et dont je tiens à saluer l'engagement : les accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH). Ces accompagnants – peut-être devrais-je dire ces accompagnantes, car il s'agit très souvent de femmes – prennent en charge une mission indispensable pour faire de l'école pour tous une réalité tangible à laquelle le Gouvernement et cette majorité sont très attachés.
Je remercie le sénateur Cédric Vial, à l'origine de cette proposition de loi, ainsi que la rapporteure de l'Assemblée, Virginie Lanlo, de nous donner l'occasion de débattre et, je l'espère, de faire progresser la situation des AESH.
L'école doit faire face à un véritable défi : celui de la scolarisation de tous les élèves, de la maternelle au lycée, en tenant compte de tous les besoins éducatifs particuliers. L'accueil des enfants en situation de handicap à l'école est incontournable, et c'est notre rôle de proposer les meilleures adaptations possibles afin que ces enfants vivent pleinement leur vie, l'école étant le premier lieu de la solidarité nationale.
Cela implique de faire évoluer, là où c'est nécessaire, les formes de l'enseignement, les relations entre les élèves et les professeurs, l'environnement scolaire et le matériel, en un mot : le quotidien de nos écoles et de nos établissements.
Mais il est également nécessaire de changer, de manière plus profonde, le regard que nous portons sur le handicap dans toute sa diversité. Nous devons absolument apporter des réponses à ces jeunes, de sorte que l'institution scolaire remplisse à leur égard les missions qui lui sont assignées : permettre la réussite et garantir le bien-être de tous les élèves dans leur diversité.
Garantir la continuité de l'accompagnement humain des élèves en situation de handicap sur toute l'amplitude de la journée d'école, en incluant donc le temps méridien, est une nécessité pour favoriser une scolarité sereine et efficace. C'est aussi un pas supplémentaire en faveur de l'inclusion de tous dans notre société.
Ce défi est d'autant plus grand que nous assistons à une progression constante du nombre d'élèves en situation de handicap scolarisés en milieu ordinaire, et que l'école et ses professeurs ont besoin d'appuis. Ces élèves sont désormais 470 000, soit 8 % de plus qu'il y a un an et 46 % de plus qu'en 2017.
Nous détectons mieux, nous repérons mieux, nous accompagnons mieux ; ce sont des progrès incontestables, même s'il reste beaucoup à faire. Sur la même période, le nombre d'AESH a augmenté de 62 % en équivalents temps plein (ETP), pour atteindre 86 502 ETP et près de 140 000 personnes.
S'il était encore besoin de souligner l'importance de ce métier pour notre école, je rappellerai que les AESH sont devenus, en effectifs, le deuxième métier de l'éducation nationale et que nous prévoyons de recruter 3 000 ETP supplémentaires à la rentrée 2024.
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Le Gouvernement et cette majorité ont agi avec force pour que ces personnels soient reconnus comme ils le méritent.
C'est pourquoi nous avons largement revalorisé leur salaire, avec une progression moyenne de 26 % entre 2021 et 2024, soit 200 euros net supplémentaires par mois.
Ils touchent 800 euros par mois : ils sont en dessous du seuil de pauvreté !
Il s'agit d'un progrès important et attendu dont nous sommes fiers.
La présente proposition de loi s'inscrit pleinement dans cette dynamique en prévoyant, à partir de la rentrée prochaine, la prise en charge à 100 % par l'État du financement de l'accompagnement des élèves en situation de handicap, sur la pause méridienne en plus du temps scolaire.
En outre, au-delà de la prise en charge des rémunérations, ce texte simplifiera la gestion des personnels du fait de la fin du cumul d'emplois entre l'État – sur le temps scolaire – et les collectivités – sur les temps périscolaires. Cela permettra de mieux mobiliser les personnels en fonction de leur emploi du temps et de renforcer, en conséquence, la continuité de l'accompagnement des élèves.
C'est une avancée importante mais, comme l'a rappelé ma collègue Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités, lors de l'examen de ce texte au Sénat, la mise en œuvre de ces dispositions devra s'accompagner d'une réforme de plus grande ampleur des modalités de prescription, ce qui suppose une concertation avec tous les acteurs concernés, notamment les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH).
Cela suppose aussi de remettre sur le métier les modes d'intervention et d'appui en milieu scolaire des professionnels des secteurs médico-social et paramédical, en prenant soin de conserver à l'école son rôle fondamental de transmission des savoirs et de construction des compétences. Nous devrons agir ensemble pour que l'école exerce pleinement son rôle et que nos enseignants exercent leurs fonctions avec tous les appuis nécessaires.
Il est de notre devoir collectif de garantir à tous les jeunes, quels que soient leurs besoins spécifiques, une société accueillante et qui sache s'adapter. Si ce texte embarque tout le Gouvernement, le ministère de l'éducation nationale réfléchit déjà à un renforcement de la formation des enseignants et de tous ses personnels. En effet, tous doivent être accompagnés pour prendre en charge cette réalité nouvelle de l'école pour tous. Il y va de leur bien-être au travail, ainsi que de celui de tous les élèves.
Le soutien aux personnes en situation de handicap est donc au cœur de l'action du Gouvernement.
C'est particulièrement vrai en ce qui concerne l'école. Nous devons ce chemin vers l'école pour tous à nos concitoyens, et nous savons qu'il est encore long, mais nous avançons dans la bonne direction.
Je vous le confirme, monsieur le député : nous avançons dans la bonne direction. J'espère que l'examen de ce texte saura nous rassembler car ses enjeux méritent le concours de tous.
Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes RE, Dem, HOR et LIOT.
La parole est à Mme Virginie Lanlo, rapporteure de la commission des affaires culturelles et de l'éducation.
Je suis particulièrement heureuse de vous présenter, en tant que rapporteure, la proposition de loi visant la prise en charge par l'État de l'accompagnement humain des élèves en situation de handicap sur le temps méridien.
Cette proposition de loi est importante. Elle est aussi la bienvenue pour l'inclusion scolaire des élèves en situation de handicap. En effet, elle doit permettre de répondre aux difficultés constatées sur le terrain, en particulier dans les écoles, difficultés qui découlent, comme vous le savez tous, d'un arrêt du Conseil d'État de novembre 2020.
Par cette décision, le juge administratif, rompant avec la jurisprudence antérieure, a considéré que les temps scolaire et périscolaires relèvent de deux autorités distinctes pour leur prise en charge : l'État pour le temps scolaire, les collectivités locales pour les temps périscolaires. Ces derniers incluent le temps de la pause méridienne, au cœur du présent texte.
La décision du Conseil d'État a créé des situations compliquées pour les élèves, leurs familles, les AESH et les collectivités. Il est heureux que nous puissions apporter des solutions, d'autant que, si les temps péri et extrascolaires dépendent des seules collectivités territoriales en matière d'organisation et de responsabilité, la proposition de loi sous-entend que le temps méridien est, indirectement, une compétence partagée entre les collectivités et le ministère de l'éducation nationale, afin d'éviter les ruptures de parcours du temps scolaire.
Ce texte est d'origine sénatoriale et je salue son auteur, Cédric Vial, que je remercie de sa présence dans les tribunes.
Un sénateur que je connais bien puisque nous avons siégé ensemble à la commission éducation de l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité (AMF) pendant de nombreuses années. Impliqués depuis longtemps sur les sujets liés au handicap, nous avons la même conviction : il faut éviter les ruptures de parcours.
Ce texte a été voté à l'unanimité au Sénat, ainsi qu'en commission à l'Assemblée le 3 avril dernier. J'espère qu'il en sera de même ce soir en séance.
Tous les acteurs que nous avons auditionnés sont favorables à la proposition de loi : associations impliquées dans le handicap, collectivités locales, bien entendu, mais aussi représentants des MDPH. La Défenseure des droits m'a également fait part de son intérêt pour le texte.
Reste qu'une partie de ces acteurs – c'est aussi mon cas – considère qu'il ne s'agit que d'une étape et qu'il faudra aller plus loin car nos enfants en situation de handicap ne le sont pas uniquement pendant le temps scolaire et pendant la pause méridienne. Il faut repenser leur parcours de vie en simplifiant et en améliorant la cohérence des notifications des MDPH, afin d'éviter aux familles de devoir faire valoir les besoins de leurs enfants et de formuler des demandes à plusieurs reprises et auprès de plusieurs entités – notamment les collectivités locales.
Bien sûr, les besoins de chaque enfant lui sont propres, et ces enfants n'exigent pas systématiquement une aide humaine, individuelle ou collective.
Ensuite, cette proposition de loi s'inscrit dans une suite de textes en faveur de l'inclusion scolaire. Ainsi, en dépit des problèmes rencontrés sur le terrain et de nombreuses autres difficultés, qu'il ne faut pas occulter, force est de reconnaître que la prise en charge des élèves en situation de handicap en milieu scolaire ordinaire a progressé depuis la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Le principe de l'inclusion scolaire a en outre été renforcé par les lois successives du 8 juillet 2013 d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République et du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance.
La scolarisation inclusive de tous les enfants, sans distinction aucune, est inscrite dans les objectifs de l'éducation, au-delà des seuls enfants en situation de handicap d'ailleurs – même si c'est d'abord à eux que l'on pense. La preuve de la progression de la scolarisation inclusive en milieu ordinaire : depuis 2006, le nombre des élèves concernés a quadruplé, passant de moins de 120 000 à presque 480 000 à la rentrée 2023.
Enfin, sans les AESH, le principe de la scolarisation inclusive resterait lettre morte. C'est un métier difficile que nous devons continuer à valoriser par une meilleure reconnaissance et une appartenance pleine et entière à la communauté éducative. Ils sont mal rémunérés du fait de temps de travail incomplets – identiques au temps scolaire, soit vingt-quatre heures par semaine.
En dépit de toutes ces difficultés, les chiffres sont parlants : de moins de 53 000 équivalents temps plein en 2017, on est passé à environ 85 000 aujourd'hui, pour un nombre d'agents estimé à environ 133 700, selon les données transmises par le ministère de l'éducation nationale.
Alors qu'ils étaient personnels d'assistance particulière dans les années 1980, puis auxiliaires de vie sociale (AVS) dans les années 2000, les AESH sont désormais recrutés en contrat de droit public pour une durée minimale de trois ans, bénéficiant notamment d'un droit à formation de soixante heures.
Cependant, le métier reste peu attractif. La Défenseure des droits l'a rappelé dans son rapport de 2022 : la précarité de la fonction s'accompagne d'un fort sentiment de manque de reconnaissance et d'isolement au sein de la communauté éducative. Beaucoup d'AESH regrettent de ne pouvoir dialoguer régulièrement avec leurs pairs, mais aussi avec la communauté éducative, tant sur le quotidien que sur leurs pratiques. C'est aussi une question de rémunération puisqu'ils travaillent à temps incomplet.
Si nous considérons que la communauté éducative ne s'arrête pas aux murs de l'école, qu'elle est constituée de toutes celles et ceux qui prennent en charge les enfants sur d'autres temps que le seul temps scolaire, et que l'élève en situation de handicap est avant tout un enfant qui doit pouvoir bénéficier d'un parcours sans rupture, ne nous faudra-t-il pas repenser les missions des AESH, les accompagnants des élèves en situation de handicap, en les élargissant au-delà de l'école pour en faire les accompagnants des enfants en situation de handicap ?
Ce contexte et ce constat énoncés, venons-en à la proposition de loi. Que dit-elle et qu'apporte-t-elle exactement ? D'abord, ce qu'elle dit se résume en une phrase : l'accompagnement des enfants en situation de handicap pendant la pause méridienne sera désormais pris en charge par l'État. C'est une décision importante venant clore une séquence d'incertitudes et de confusion qui dure depuis plus de trois ans et a parfois eu pour effet d'interrompre l'accompagnement des enfants pendant le temps méridien, la collectivité n'ayant pas forcément pris le relais à la suite du désengagement de l'État.
Ensuite, qu'apporte cette proposition de loi, qui fait de l'État l'unique employeur des AESH intervenant pendant le temps scolaire et la pause méridienne ? Premièrement, en ce qui concerne les familles, elle tend à favoriser la continuité de l'accompagnement par un AESH pendant la pause méridienne. C'est un enjeu fondamental car le système doit être organisé en premier lieu pour assister le jeune et sa famille. Cela simplifiera la vie des familles qui ne seront plus contraintes de solliciter les deux autorités publiques – État d'un côté, collectivité de l'autre – en constituant deux dossiers distincts.
Deuxièmement, la proposition de loi simplifie la vie des AESH. Actuellement, ils ont deux contrats indépendants l'un de l'autre, ce qui peut compromettre leur temps de repos si les employeurs ne s'entendent pas dans l'organisation des emplois du temps. Le texte apportera une clarification puisqu'il n'y aura plus qu'un seul contrat pour les deux temps. Il permettra également aux AESH de tendre vers un temps presque complet, en ajoutant aux vingt-quatre heures de temps scolaire huit heures de pause méridienne. Ce n'est pas encore un temps complet, certes, mais on s'en approche.
Troisièmement, enfin, la proposition de loi réduira les inégalités entre les territoires, ce qui profitera aux familles et aux enfants. Actuellement, en effet, l'accompagnement diffère selon les communes : certaines prennent en charge la pause méridienne – parfois parce que c'est l'État lui-même qui met gratuitement à disposition un AESH – tandis que d'autres ne le font pas.
Voilà en quelques mots les principaux enjeux du texte qui, je l'ai dit, doit être considéré comme une étape : il n'a pas vocation à résoudre tous les problèmes. J'ai déjà évoqué les difficultés liées à l'attractivité du métier d'AESH ; je n'y reviens donc pas. Cette proposition, j'en suis persuadée, va dans le bon sens pour les AESH, mais son champ d'action devra être complété.
Avant de conclure, je souhaite aborder la question des MDPH. Actuellement – cela a été rappelé par leurs représentants lors des auditions –, les notifications transmises par les MDPH qui concernent l'accompagnement pendant la pause méridienne montrent une absence complète d'homogénéité. Certaines MDPH n'abordent pas le sujet, d'autres font de simples préconisations, d'autres enfin font des prescriptions dont on peine à savoir si elles ouvrent des droits opposables, comme c'est le cas pour les prescriptions concernant le temps scolaire. C'est un sujet qu'il faudra étudier dans un avenir proche si nous voulons mener une politique homogène sur l'ensemble du territoire.
Vous l'aurez compris, engagée depuis plus de quinze ans sur les sujets éducatifs, je considère qu'il nous appartient de décloisonner l'organisation des temps de l'enfant, afin de lui assurer un parcours de vie sans rupture. Voilà, chers collègues, ce que je souhaitais préciser pour la défense de ce texte qui, j'en suis persuadée, saura recueillir une large majorité voire l'unanimité car c'est là une première étape attendue par les familles et leurs enfants.
Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes RE, Dem et HOR. – Mme Béatrice Descamps applaudit également.
« Le service public de l'éducation […] veille à la scolarisation inclusive de tous les enfants, sans aucune distinction. » Ce principe fondamental d'une école inclusive, inscrit dans le code de l'éducation, nous l'approuvons. Le désaccord que nous avons avec le Gouvernement a trait aux moyens déployés pour rendre effectif le droit à la scolarité des 470 000 élèves en situation de handicap. En effet, scolariser des élèves en situation de handicap sans l'accompagnement nécessaire, ce n'est pas de l'inclusion : c'est au contraire, une fois de plus, une charge excessive que l'on fait reposer sur les parents, sur les enseignantes et les enseignants, et sur les établissements. Pourtant, notre service public d'éducation est national ; en toute logique, c'est donc à l'État de prendre ses responsabilités.
Par sa décision du 20 novembre 2020, le Conseil d'État a mis à mal l'organisation déjà fragile de l'accompagnement des élèves en situation de handicap. Il a considéré que la rémunération de leurs accompagnatrices et accompagnateurs pendant la pause méridienne revenait non à l'État mais aux collectivités territoriales. Depuis lors, nous nous trouvons dans une situation ubuesque et à tous égards.
Elle est ubuesque d'abord pour les élèves, qui peuvent se retrouver sans accompagnatrice ou accompagnateur durant la pause méridienne, en dépit de leurs besoins. Cela brise la continuité du service public et met en péril la poursuite de leur scolarisation en milieu ordinaire. Le problème repose alors sur les parents qui doivent soit entreprendre des démarches auprès de la collectivité pour obtenir un AESH pour la pause méridienne, soit assurer eux-mêmes cet accompagnement. C'est une source d'inégalités dans l'éducation nationale.
Elle est ensuite ubuesque pour les AESH qui doivent naviguer entre deux employeurs et deux contrats dont les dispositions salariales diffèrent. Cela contribue à dégrader les conditions de travail – déjà précaires – de ces salariés et c'est aussi une source d'inégalités dans l'éducation nationale.
La situation est ubuesque, enfin, pour les collectivités territoriales qui doivent désormais assurer, en remplacement de l'État, la rémunération des AESH pour le temps méridien. Quand on connaît les contraintes financières qui pèsent sur les petites communes ou les difficultés budgétaires des départements, comment peut-on faire reposer cet accompagnement sur leurs capacités financières, tout en alourdissant inutilement leur gestion des ressources humaines ? C'est une source d'inégalités – territoriales, cette fois – dans l'éducation nationale.
La présente proposition de loi de notre collègue sénateur Cédric Vial répond à ce problème particulier. Elle précise dans la loi que la rémunération des AESH pour la pause méridienne incombe à l'État : c'est la meilleure voie pour assurer l'égalité entre tous les élèves. Le groupe Écologiste – NUPES votera donc pour le texte.
Cependant, il faudra aller bien plus loin pour améliorer les conditions de travail des AESH et l'accompagnement des élèves en situation de handicap. Nous réaffirmons notre volonté d'intégrer les AESH en tant que titulaires dans la fonction publique, par la création d'un corps de catégorie B. De par leur nombre, ils sont la deuxième composante salariale de l'éducation nationale ; or c'est une composante précarisée, qui travaille à temps partiel et dont les rémunérations sont faibles – sans surprise, elle comprend plus de 90 % de femmes.
Les besoins sont connus et les compétences requises indéniables ; la titularisation des accompagnatrices et accompagnateurs d'élèves en situation de handicap est seule à même de revaloriser ce métier – ou de créer un choc d'attractivité, comme vous diriez. L'évaluation du besoin d'accompagnement des élèves en situation de handicap est un autre problème à résoudre. Les réalités locales montrent une grande diversité dans les pratiques des maisons départementales des personnes handicapées – vous l'avez rappelé, madame la rapporteure – et l'on ne peut s'en satisfaire. Un traitement différencié selon le département de résidence de l'élève est contraire à l'égalité du droit à la scolarité. Plus que l'uniforme ou les groupes de niveaux, l'inclusion et l'école pour tous devrait constituer un chantier prioritaire pour l'éducation nationale.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC et GDR – NUPES.
Ce texte du sénateur Cédric Vial, que je salue, nous donne la possibilité de concrétiser ce qui est autant un engagement fort de notre majorité en faveur du renforcement de l'inclusion qu'une demande du terrain – particulièrement des collectivités locales. Cette proposition de loi répond à un objectif unique et bien précis : la prise en charge par l'État de l'accompagnement humain des élèves en situation de handicap sur le temps méridien.
Il ne sera pas question, ici, des conditions de travail, de la rémunération ou même de la fonctionnarisation des AESH, même si ces questions sont d'une grande importance. Depuis 2017, notre majorité a soutenu plusieurs avancées visant à reconnaître le métier d'AESH et sa place essentielle au sein de la communauté éducative, notamment en faisant augmenter leur salaire et en leur offrant des possibilités d'évolution professionnelle. L'amélioration des conditions d'exercice de ce métier, autant que celle des conditions de travail des enseignants accueillant des enfants en situation de handicap dans leur classe, est et restera évidemment un engagement fort de la majorité.
Le Conseil d'État a décidé en novembre 2020 qu'il revenait aux collectivités territoriales d'assurer la prise en charge des AESH pour l'ensemble des temps périscolaires et du temps méridien en particulier. Depuis, cette décision a posé plusieurs problèmes, à commencer par la lourde charge financière qui s'est imposée aux collectivités. Des ruptures d'égalité ont ainsi été constatées : les traitements proposés aux AESH pour les temps périscolaires diffèrent en fonction des moyens dont dispose chaque collectivité.
La proposition de loi apporte des réponses à ces problèmes en introduisant un contrat unique et une rémunération selon les grilles indiciaires de l'éducation nationale, donc identique sur l'ensemble du territoire. Conformément aux engagements pris par le Président de la République et par le Gouvernement, l'école républicaine doit demeurer un infaillible fer de lance de la lutte contre les inégalités – quelles qu'elles soient –, lutte dont les premiers bénéficiaires doivent bien évidemment être les élèves.
Au cours des auditions menées par Mme la rapporteure, on a souvent entendu qu'il était important, pour un élève, de garder son AESH à ses côtés durant le temps méridien, afin de créer une forme de continuité tout au long de la journée. Si je comprends l'intérêt d'une telle organisation, dont je pense moi aussi qu'elle peut être bénéfique à certains élèves, j'exprimerai tout de même une légère réserve. Pour l'heure, on ne peut pas garantir que les élèves concernés garderont nécessairement, pour le temps méridien, l'accompagnant qui les suit pour le temps scolaire. Pour que cela arrive, il faudrait d'abord que l'AESH soit d'accord pour augmenter son temps de travail ; ensuite, il faudrait veiller à ce qu'il soit suffisamment formé pour la prise en charge spécifique du temps méridien, car cette tâche diffère de l'accompagnement sur le temps scolaire. Enfin, il faudra s'assurer, comme pour les agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (Atsem), que les AESH bénéficient bien d'une pause déjeuner.
Je tiens à saluer le travail constructif accompli en commission des affaires culturelles et de l'éducation, car il nous a permis d'améliorer le texte. À titre personnel et eu égard à mes engagements pour l'amélioration des conditions de travail de nos directrices et directeurs d'école, je salue la réponse de Mme la rapporteure quant à la possibilité d'instaurer une convention permettant de faire passer les AESH sous la responsabilité des collectivités territoriales durant le temps méridien, dans les établissements scolaires du premier degré – et cela même s'ils sont des personnels de l'éducation nationale, rémunérés en tant que tels sur ledit temps. Madame la ministre, les décrets d'application du texte devront être parfaitement clairs et précis sur ce point car le temps méridien n'est pas un temps pédagogique ; par conséquent, les directrices et directeurs ne sont pas supposés travailler pendant leur pause de midi. Une telle évolution semble dès lors souhaitable, pour ne pas dire impérative.
Enfin, il n'aura pas échappé à votre attention que le texte opère un transfert de charge des collectivités territoriales vers l'État, qui pourrait intervenir dès le vote du texte. Il faut donc prévoir un nombre suffisant d'ETP pour que soient pris en charge tous les élèves qui ont actuellement besoin d'un accompagnement humain pour le temps méridien, mais aussi anticiper l'augmentation du nombre d'élèves en situation de handicap qui pourraient rester à l'école pendant la pause méridienne.
Nous avons ainsi voté, en commission, un amendement qui fait entrer la loi en vigueur le 1er
Chers collègues, vous l'aurez compris, le groupe Renaissance votera la proposition de loi, tout en restant attentif à sa mise en œuvre effective. En commission des affaires culturelles et de l'éducation, nous l'avons votée à l'unanimité ; il doit en être de même ce soir en séance.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. – Mme Sophie Mette applaudit également.
Cette proposition de loi d'origine sénatoriale vise à combler opportunément une lacune législative concernant l'emploi des AESH, en assurant la continuité de la prise en charge des élèves souffrant d'un handicap dans l'enseignement public, y compris pendant la pause méridienne. S'agissant de l'enseignement privé, cette nouvelle disposition législative permettra aux établissements de diminuer le coût de la prise en charge des élèves handicapés durant cette même pause. Parce que ce texte mettra ainsi fin à des situations ressenties douloureusement par les élèves et leurs familles, le groupe Rassemblement national le votera donc.
On ne peut cependant que regretter qu'une proposition de loi portant sur un sujet aussi central en matière éducative, qui représente un enjeu d'inclusion et de solidarité nationale vis-à-vis des plus fragiles d'entre nos enfants, se cantonne à la seule question de la pause méridienne. Elle aurait pu, à tout le moins, couvrir aussi l'accompagnement des activités périscolaires et extrascolaires des élèves souffrant d'un handicap, qui demeure pour l'heure à la charge des collectivités territoriales.
Le débat de ce soir offre aussi l'occasion de constater une nouvelle fois que la question de l'organisation et de la gestion des AESH, malgré d'incontestables progrès, reste entière. Que ce soit à l'occasion du débat budgétaire de 2024 ou à la suite de rapports parlementaires, la volonté de la représentation nationale – en tout cas des oppositions – de donner un cadre clair, un statut social, une situation stable et une rémunération digne aux quelque 140 000 AESH s'est exprimée sans ambiguïté.
Il nous semble en effet que, comme le rapport d'information du Sénat du 3 mai 2023 le souligne d'ailleurs également, le pilotage dual des AESH, avec un prescripteur – la MDPH – distinct du payeur et gestionnaire – le ministère de l'éducation nationale –, est source d'innombrables problèmes, préjudiciables à la qualité du service public d'accompagnement des élèves. Il n'est pas logique, pour qui se soucie d'organiser un service public ou de maîtriser les dépenses publiques, que le payeur ne soit pas aussi le prescripteur et le maître d'œuvre. Les pôles inclusifs d'accompagnement localisé (Pial) tentent de corriger ce défaut originel, mais n'y parviennent pas, car la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) reste seule décisionnaire de l'affectation des AESH.
Rappelons qu'avant la loi de 2005, les directeurs des services départementaux de l'éducation nationale (DSDEN), présidaient, par délégation du préfet, les commissions départementales de l'éducation spéciale (CDES) de l'époque et prescrivaient, sur la base des expertises du service de l'adaptation scolaire et de la scolarisation des élèves handicapés (ASH), l'attribution et les quotités horaires de ceux qui étaient alors les AVS.
La politique d'inclusion scolaire conduite par l'éducation nationale, ses personnels et ses structures, ne devrait pas dépendre de décisions prises selon une logique exogène à l'institution scolaire. L'inclusion scolaire a ses spécificités, ses contraintes et ses limites. De beaucoup d'établissements remontent des témoignages faisant état des difficultés rencontrées par les professeurs dans l'exercice de leur métier lorsqu'ils sont appelés à accueillir plusieurs élèves souffrant de différents handicaps, accompagnés ou non d'AESH plus ou moins formés à cette tâche. S'ensuivent parfois – ce n'est pas un tabou – de lourdes difficultés à conduire la classe et à dispenser les enseignements. Il nous semble envisageable que l'éducation nationale reprenne la main sur l'affectation des élèves et des AESH, dans l'intérêt des élèves souffrant d'un handicap et en vue de réussir la politique d'inclusion voulue par le législateur de 2005.
Nous appelons donc de nos vœux une unification de la chaîne de décision et de mise en œuvre en la matière, sous l'égide de l'État. Pour ce qui est de la gestion des 140 000 AESH, nous considérons qu'il faut sauter le pas et créer une fonction éducative spécifique au sein du service public de l'éducation. Les fonctions d'appui ou de soutien, comme celle des AESH, peuvent parfaitement être assurées dans des conditions stables et attractives par des personnes disposant du statut d'agent contractuel de l'État et bénéficiant d'un CDI. Nous estimons donc que les AESH doivent être recrutés sur examen, puis suivre une formation d'adaptation à l'emploi de plusieurs mois, assurée par l'employeur – c'est-à-dire par le ministère de l'éducation nationale, en lien avec celui de la santé. La fonction d'AESH combine en effet des actes professionnels relevant à la fois de l'aide à la personne et du soutien pédagogique. Il s'agit d'un métier. C'est pourquoi la formation ou la validation des acquis de l'expérience (VAE) doit déboucher sur des certifications pouvant atteindre le niveau 4.
Les AESH agissent dans le cadre du projet d'établissement et contribuent à l'application des protocoles d'inclusion. À ce titre, leur activité doit être évaluée par l'employeur, c'est-à-dire par les inspecteurs ASH des directions académiques des services de l'éducation nationale (Dasen). Les AESH doivent assurer un service complet incluant, comme le prévoit la présente proposition de loi, le temps méridien, mais aussi le temps et les activités périscolaires et extrascolaires, l'accueil matinal ou vespéral, le transport, ou encore la formation continue. Il serait donc parfaitement possible de leur comptabiliser un temps complet, ce qui ouvrirait la voie à une rémunération décente. Celle-ci, devenue attractive, contribuerait à la stabilité de ces personnels, laquelle bénéficierait évidemment d'abord aux élèves handicapés eux-mêmes.
Il semblerait que le Gouvernement envisage de faire évoluer l'emploi des AESH, dans un délai toutefois non précisé. Nous verrons ce qu'il en est mais le groupe Rassemblement national travaille dès à présent à élaborer une proposition de loi en ce sens.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Sandrine, AESH dans le second degré – et qui a la chance, dit-elle, d'être employée à trois-quarts temps –, m'a écrit : « Je suis AESH depuis février 2009, en CDI depuis 2015, et je m'insurge contre cette mutualisation systématique, contre la logique des pouvoirs publics consistant à réduire encore et toujours le nombre d'heures accordées aux élèves, c'est-à-dire, en pratique, le nombre d'AESH. Cela entraîne toujours plus de précarité, ainsi qu'une forme de maltraitance des élèves et des accompagnants. » Ce devrait être pour aider Sandrine, Valérie et toutes les AESH du pays que nous examinons cette proposition de loi.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Or non seulement le texte n'améliorera en rien leurs conditions de travail, mais il n'atteindra pas son objectif de simplification de leur mode de rémunération.
Après cette réforme, l'État prendra certes en charge l'accompagnement des élèves pendant les temps scolaires et méridiens, mais les collectivités continueront de le faire pendant les autres temps périscolaires, c'est-à-dire la garderie du matin et du soir. Je ne doute pas que les personnels administratifs chargés de la paye s'adapteront, mais si le but de cette proposition de loi était de désigner un employeur unique pour les AESH, c'est raté.
Il est vrai que le dispositif allégera les budgets des collectivités territoriales, qui en ont bien besoin, mais ces dernières devront tout de même s'acquitter des temps du matin et du soir qui leur auront été notifiés. Il eût fallu aller au bout de la démarche et prévoir la prise en charge des AESH par l'État pour l'intégralité des temps expressément spécifiés sur les notifications de la MDPH. Il eût surtout fallu voter la proposition de loi que nous avions présentée au cours de notre journée de niche parlementaire le 24 novembre 2022.
« Eh oui ! » et applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Nous y proposions de créer un corps d'AESH composé de fonctionnaires de catégorie B, c'est-à-dire de leur reconnaître un statut conforme à ce qu'elles font effectivement. Il eût fallu reconnaître le métier d'accompagnant d'élèves en situation de handicap au même titre que celui d'enseignant – car leurs tâches constituent bien un métier et non une simple mission.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Or qui dit métier dit formation, diplôme, statut et carrière.
Mais vous, macronistes, Républicains et élus du Rassemblement national, avez vidé le texte de sa substance. Vous auriez pu créer un beau métier d'intérêt public ; instaurer un temps complet de vingt-quatre heures par semaine en reconnaissant le travail invisible de préparation, de réunion, de formation ; améliorer l'attractivité du métier d'AESH et, par là même, l'accompagnement des élèves en situation de handicap. Vous ne l'avez pas fait. Les AESH gardent un statut précaire, subissent des temps partiels imposés et ne peuvent obtenir – je dis bien qu'elles le peuvent, car cela n'a rien d'automatique – un CDI qu'après trois ans en CDD, soit trois ans de période d'essai ! On ne parle même plus en mois, mais en années ! Elles gagnent entre 800 et 1 000 euros par mois pour supporter journées à rallonge et fatigue. C'est bien la raison pour laquelle il devient difficile de recruter des AESH de façon pérenne. Malgré cela, le ministère se satisfait de ce statut contractuel précaire.
Nous craignons également qu'avec cette réforme certaines AESH voient leur salaire baisser car elles sont parfois mieux rémunérées par les collectivités que par l'État. C'est à ce titre que j'ai déposé un amendement, n° 7 , visant à assurer le maintien de leur salaire.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – M. Jean-Claude Raux applaudit également.
Estelle, maman d'un enfant autiste scolarisé au collège, m'a expliqué avoir été amenée à payer une séance chez l'ergothérapeute pour son fils et l'AESH, afin que celle-ci puisse se familiariser avec le logiciel qu'il utilise en cours. Vous avez bien compris : c'est la maman qui a payé cette séance de formation pour l'AESH. Les parents doivent déjà attendre très longtemps pour obtenir la notification de la MDPH, puis pour que l'accompagnement soit effectif. Et ils devraient en plus financer la formation de l'AESH ? Ce n'est pas possible !
Les familles d'enfants en situation de handicap doivent effectuer un véritable parcours du combattant pour améliorer la vie de leur enfant. Je suis certaine que tous, ici, vous avez été interpellés dans vos circonscriptions par des familles démunies face au manque d'accompagnement ou au manque criant des structures d'accueil que sont par exemple les instituts médico-éducatifs (IME) ou les instituts thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques (Itep).
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
L'association Ambition école inclusive dénombre 200 000 enfants déscolarisés faute d'accompagnement ou de places en structure. La scolarisation des enfants en situation de handicap ne saurait se faire au prix d'une précarisation croissante des AESH, sans une réforme structurelle des règles qui leur sont applicables.
Je le répète donc : cette proposition de loi n'est pas à la hauteur de l'action à mener pour les AESH, pour les élèves en situation de handicap, pour leurs familles, et, par conséquent, pour l'intérêt de tous. Car l'inclusion à l'école, c'est aussi l'apprentissage, pour tous les élèves, de l'empathie et de l'acceptation de l'autre dans sa différence.
Mêmes mouvements.
L'école inclusive est une cause d'intérêt général. Pourtant, vous refusez d'offrir un statut à la deuxième profession de l'éducation nationale. Nous devons faire mieux !
« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Le groupe Les Républicains votera évidemment pour cette proposition de loi, pour plusieurs raisons. Premièrement, elle est au cœur de l'ADN de notre famille politique. C'est en effet la loi du 11 février 2005, voulue par le président Jacques Chirac, qui a permis cette formidable avancée scolaire qu'est l'école inclusive.
Deuxièmement, cette proposition de loi de notre collègue sénateur Les Républicains Cédric Vial, que je salue, répond à de fortes inquiétudes locales, exprimées à la fois par les maires et par les départements. Nous sommes donc très heureux qu'elle ait été adoptée à l'unanimité par le Sénat le 23 janvier dernier.
Troisièmement – et c'est la raison la plus importante –, nous voterons ce texte parce qu'il est tout simplement attendu par les familles. En effet, à rebours de la dynamique engagée depuis la loi de 2005, la décision du Conseil d'État du 20 novembre 2020 avait engagé une véritable marche en arrière pour les familles et les enfants, en empêchant l'État de prendre en charge leur accompagnement, pourtant nécessaire, pendant la pause méridienne. Ce faisant, le Conseil d'État a créé les conditions d'une rupture de prise en charge particulièrement problématique, injuste et indéfendable.
La proposition de loi du sénateur Cédric Vial vise à répondre à ces difficultés en élargissant la compétence de l'État au temps méridien. Elle constitue une réponse simple, juste et efficace. Nous espérons donc qu'aucune voix ne manquera pour la faire adopter.
Je ne voudrais pas, néanmoins, que nous quittions cet hémicycle en taisant tous les autres problèmes qui jalonnent le parcours des enfants en situation de handicap, mais aussi des familles, des enseignants et des AESH.
En 2023, j'ai été rapporteur de la mission d'information sur l'instruction des enfants en situation de handicap, conduite par la nouvelle délégation aux droits des enfants de l'Assemblée. Pendant plus de six mois d'auditions et de visites de terrain, j'ai pu non seulement mesurer combien cette décision du Conseil d'État avait fait de dégâts, mais aussi constater l'ampleur des difficultés qui sont encore devant nous.
Le Gouvernement aime par exemple à vanter le chiffre de 430 000 enfants en situation de handicap scolarisés en France. Quantitativement, il est en effet impressionnant puisqu'il traduit une multiplication par trois du nombre de ces enfants scolarisés depuis que notre pays a fait le grand choix de l'école inclusive. Qualitativement, en revanche, c'est une tout autre histoire. Dans les faits, la plupart des jeunes concernés sont très loin d'être accueillis à l'école vingt-quatre heures par semaine : beaucoup ne le sont qu'une heure ou deux. Est-ce vraiment là notre ambition ? Pire, l'État ne sait même pas dire combien d'enfants en situation de handicap ne sont pas scolarisés, ce qui est impensable pour un grand pays comme la France.
En vérité, le culte du chiffre cache l'oubli de l'humain, la comptabilité prend quotidiennement le pas sur la pédagogie, et le dogme du tout inclusif conduit trop souvent à s'asseoir sur les besoins réels des enfants et les attentes des familles.
Ces dernières se sentent souvent seules et impuissantes face à un enchevêtrement de démarches complexes et opaques, qu'elles décrivent comme un véritable mur administratif. Humainement, le recours massif aux AESH – qui forment le deuxième métier de l'éducation nationale, comme la ministre l'a rappelé à raison – apparaît comme une réponse partielle et problématique, notamment par son instabilité. Quand un enfant peut être suivi par jusqu'à huit AESH différents au cours d'une même année, le système est clairement contre-productif, encore plus lorsqu'il s'agit de gérer certains troubles comme l'autisme.
Que dire, aussi, de la formation des AESH, qui se limite, de façon assez inédite, à soixante heures dispensées après leur recrutement – quand elle a lieu et ne se résume pas à la remise en mains propres d'une clé USB, comme cela nous a été rapporté au cours des auditions ? Pourquoi, ensuite, l'expérience acquise par les AESH au fil des années n'est-elle pas systématiquement valorisée lors de leur affectation ? Est-ce pour ne pas les payer correctement qu'on refuse de valoriser leur savoir-faire et les compétences acquises, comme on le fait pour tout métier ?
On le voit : il n'est plus acceptable de repousser plus longtemps la grande réponse qui doit être apportée au défi du handicap à l'école ni de se cacher derrière le dogme du tout inclusif pour masquer le fait que l'État, en la matière, fait des économies sur le dos de l'école, des enseignants et des AESH. La situation invraisemblable à laquelle sont confrontés ces derniers n'est que la face émergée de l'iceberg. Si nous voulons y remédier, il faudra non seulement du courage, mais aussi des moyens, car ce n'est pas à coups de tapes sur l'épaule qu'on permettra à l'école d'être à la hauteur de la promesse républicaine, et à la France d'être à la hauteur de sa vocation humaniste.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Le groupe Démocrate remercie à nouveau Mme la rapporteure d'avoir défendu la proposition de loi du sénateur Olivier Vial, présent dans les tribunes du public. Dans la chambre haute, ce texte a été conçu, travaillé et adopté dans un esprit de consensus. Il est court mais efficace, vecteur de simplification et de bon sens pour les élèves en situation de handicap.
Grâce à ses qualités, il a été adopté à l'unanimité par la commission des affaires culturelles et de l'éducation. La dernière version du texte propose l'ajout d'un article 3, précisant qu'il entrera en vigueur à la rentrée scolaire prochaine. Septembre 2024, c'est un cap assez éloigné pour permettre la bonne mise en œuvre des dispositifs et un cap assez proche pour assurer le bien-être des élèves concernés d'ici quelques mois. Nous nous réjouissons de ce compromis.
Rappelons la réalité de la situation qui imposait une réaction. Depuis 2006, le nombre d'enfants en situation de handicap scolarisés en milieu ordinaire a quadruplé. Cette augmentation s'est accompagnée d'une hausse de 55 % du nombre de leurs accompagnants, les AESH, entre 2017 et 2023. Ceux-ci, ou plutôt devrais-je dire celles-ci tant cette profession est majoritairement composée de femmes, constituent à présent le deuxième métier de l'éducation nationale. Nous pouvons nous en réjouir et les saluer : leur travail dévoué et précieux est essentiel.
Ces personnels sont plus sollicités que jamais alors même que leur métier, malgré les efforts entrepris, apparaît peu attractif. Cela est notamment dû aux conséquences de la décision du Conseil d'État du 20 novembre 2020 : en jugeant que la compétence de l'État se limitait à la prise en charge des situations de handicap pendant le temps scolaire, à l'exclusion de la pause méridienne, il a rendu incertaine la continuité de leur parcours à l'école.
Trois acteurs sont en réalité fragilisés par cette décision : en premier lieu, l'élève en situation de handicap, souvent accompagné par un AESH différent pour les temps scolaire et méridien – quand il est encore accompagné –, ce qui engendre des inégalités de situation fortement dommageables. Les AESH ensuite : ils sont employés désormais par les collectivités territoriales et par l'État, dualité qui peut conduire à des incohérences susceptibles de dégrader leurs conditions de travail. Les communes enfin : elles doivent bien souvent assumer, avec difficulté, une charge financière supplémentaire pour permettre l'accompagnement des élèves pendant le temps de restauration.
Ce texte modifie le code de l'éducation de manière que l'État assure la rémunération des personnels AESH pendant la pause méridienne. Il est bienvenu car c'est le devoir et l'honneur de l'État de s'acquitter de cette charge.
En simplifiant le droit, cette proposition de loi est de nature à favoriser le bien-être et la réussite des élèves dans leur diversité mais aussi à renforcer le statut des AESH dont l'État devient l'unique employeur. Elle constitue aussi un soulagement pour les communes dont l'engagement doit être salué.
Depuis la loi pour l'égalité des droits et des chances du 11 février 2005, l'État s'est engagé en faveur du renforcement de la scolarisation des enfants en situation de handicap. Il a consacré leur droit à une scolarisation continue en milieu ordinaire et a inscrit le principe d'inclusion scolaire dans le code de l'éducation. La décision du Conseil d'État en date du 20 novembre 2020 – décision juridique, objective et étayée pour laquelle la juridiction ne saurait être blâmée – a mis à mal ce droit et ce principe. En complétant la loi, nous rétablissons leur portée.
Vous l'aurez compris, le groupe Démocrate votera de nouveau en faveur de ce texte tel qu'issu des travaux en commission.
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur quelques bancs du groupe RE.
Je me réjouis d'être devant vous ce soir. En janvier 2024, à l'initiative de notre collègue sénateur Cédric Vial, la Chambre haute a voté à l'unanimité cette proposition de loi permettant la prise en charge par l'État de l'accompagnement humain des enfants en situation de handicap pendant la pause méridienne. Il s'agit d'une traduction rapide de l'engagement pris par le Premier ministre à l'occasion de sa déclaration prononcée à la tribune du Sénat le 31 janvier.
Notre assemblée a souhaité poursuivre ce travail en inscrivant ce texte à l'ordre du jour et nous avons l'occasion d'apporter ce soir une réponse à l'attente de nombreuses familles.
Cette proposition de loi parachève le travail entamé par le Gouvernement et la majorité présidentielle, marqué par le vote, le 26 juillet 2019, de la loi sur l'école de la confiance.
Sur la base de ce texte, les AESH avaient pu bénéficier d'un statut renforcé, notamment grâce au versement d'une nouvelle indemnité et à une amélioration de leur formation. La mise en place des Pial destinés à mieux coordonner les aides nécessaires aux élèves et la création du plan Mercredi, permettant l'accueil de loisirs éducatifs pour tous les enfants ce jour-là, sont allés dans le même sens.
Cependant, la décision rendue le 26 novembre 2020 par le Conseil d'État a marqué un coup d'arrêt à cette évolution. La plus haute juridiction administrative a jugé que la compétence de l'État se limitait à la prise en charge des enfants en situation de handicap pendant le temps scolaire, laissant ainsi aux collectivités territoriales la gestion et l'organisation du temps méridien. Cette décision a entraîné des différences de traitement et d'organisation entre le premier et le second degré, ainsi qu'entre les établissements publics et les établissements privés sous contrat.
Grâce au présent texte, nous avons la possibilité de remédier à une situation qui a pénalisé bon nombre d'enfants mais aussi de parents. En effet, lors de la rentrée scolaire 2023, près de 478 000 enfants en situation de handicap recensés dans les différents établissements, et autant de familles, attendaient une réponse unanime du Parlement pour le bien-être de leurs enfants.
Le groupe Horizons se félicite par ailleurs de la création pour la rentrée 2024 de 4 800 postes d'AESH, s'ajoutant aux 4 000 postes créés lors de chacune des deux rentrées précédentes. Le nombre d'AESH est ainsi passé de près de 53 400 équivalents temps plein annuel travaillé (ETPT) en 2017 à 86 000 ETPT en 2023. Cependant, nous savons tous qu'il faut poursuivre cet effort afin que chaque enfant puisse être accompagné dans de bonnes conditions.
La semaine dernière, à l'occasion de son examen au sein de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, le texte a été adopté à l'unanimité dans une version modifiée par un amendement de la rapporteure prévoyant l'entrée en vigueur de la réforme dès la rentrée prochaine, soit dès le mois septembre 2024.
Le groupe Horizons et apparentés soutient cette proposition de loi et, donc, la votera car l'école doit pouvoir accueillir convenablement et dignement tous les élèves, quel que soit leur état de santé. Nous ne pouvons pas nous satisfaire de laisser à eux-mêmes, pendant le temps méridien ou pendant le temps scolaire, des élèves qui ont besoin d'être aidés pour apprendre au mieux à l'école.
Applaudissements sur les bancs du groupe HOR et sur quelques bancs des groupes RE et Dem.
Combien d'AESH manque-t-il en France pour accompagner nos élèves en situation de handicap ? Chaque année, au moment de l'examen du projet de loi de finances (PLF), l'État transmet dans le bleu budgétaire un indicateur important en matière d'inclusion : le taux de couverture des notifications MDPH. Ce taux correspond à la proportion d'enfants pour lesquels la MDPH a reconnu la nécessité d'une aide humaine durant le temps scolaire mais qui ne bénéficient pas d'AESH faute de personnels en nombre suffisant. Il s'élevait à un peu plus de 6 % des enfants en situation de handicap, en 2020, et un peu plus de 8 % en 2022. La part d'élèves dépourvus d'AESH est donc en augmentation. Pour vous donner une idée, pour résorber ce déficit, il faudrait 8 000 AESH supplémentaires. Le Gouvernement, qui connaît ces chiffres puisqu'il les publie, a pourtant décidé dans le dernier PLF de ne financer que la moitié des postes nécessaires.
Et il faut observer que si 4 000 postes supplémentaires d'AESH étaient créés, ils combleraient uniquement les besoins des enfants qui ne bénéficient pas du tout d'AESH actuellement. Une telle mesure ne prendrait pas en compte les trop nombreuses situations – signalées dans nos circonscriptions – pour lesquelles, alors que la MDPH constate la nécessité d'un accompagnement pour la totalité du temps scolaire, l'enfant ne bénéficie que de quelques heures d'accompagnement.
Si je souhaitais commencer ainsi mon intervention, c'est parce que cette proposition de loi ne doit pas être l'arbre qui cache la forêt. Évidemment, la prise en charge par l'État, et non par les collectivités territoriales, du financement de l'accompagnement des enfants en situation de handicap durant le temps méridien est une bonne chose. Lorsqu'il est nécessaire, l'accompagnement des enfants doit être continu, ce qui n'est pas le cas actuellement, l'accompagnement durant le temps méridien différant selon les territoires, en fonction de la volonté politique des collectivités et de leurs choix budgétaires.
Toutefois, malgré l'apport de cette proposition de loi, trois points d'attention subsistent.
Premièrement, une vive inquiétude perdure quant à la possibilité pour l'État de mettre en place cet accompagnement pour le temps méridien alors même que l'accompagnement pour le temps scolaire est largement incomplet. Le nombre de postes d'AESH ouverts est en effet insuffisant – pour mémoire, alors qu'il en manque 8 000, le Gouvernement a prévu d'en créer 4 000 seulement – et tous les postes ouverts ne sont pas pourvus, en raison de la faible attractivité du métier.
Il s'agit en effet d'un métier précaire, eu égard au salaire versé et aux conditions de travail largement dégradées depuis la mise en place des Pial sous le premier quinquennat d'Emmanuel Macron. Certains accompagnants travaillent dans plusieurs établissements à la fois, parfois même dans des villes différentes. Imaginez la vie de ces AESH qui parcourent des kilomètres pour s'occuper d'un enfant le matin et d'un autre enfant l'après-midi et, parfois, de deux enfants le matin et de deux enfants l'après-midi !
Le deuxième point d'attention concerne le temps de travail des AESH. Elles sont pour la grande majorité d'entre elles en temps partiel forcé. Je dis « elles » car 85 % des AESH sont des femmes.
Disons 96 % – et donc « elles ». La prise en charge financière par l'État de la pause méridienne, n'y changera rien : elles continueront à travailler trente-deux heures par semaine et non trente-cinq.
Cette mesure, qui doit permettre de compléter leur service et ainsi d'augmenter leur rémunération – laquelle ne dépasse pas aujourd'hui en moyenne les 900 euros par mois –, est insuffisante. Par ailleurs, l'AESH doit aussi déjeuner. Comment faire si elle travaille pendant la pause méridienne ? Il faudra trouver une solution.
Pour mémoire, depuis de nombreuses années, les socialistes en défendent une. Ils proposent que le temps de préparation des heures en classe et d'adaptation au handicap de l'enfant ainsi que les nombreuses heures de coordination et de concertation avec les enseignants soient comptés en plus des vingt-quatre heures de présence auprès de l'enfant, les AESH réalisant ainsi un temps plein. Cette mesure augmenterait significativement l'attractivité du métier.
Enfin, notre collègue Philippe Naillet a déposé un amendement, très important pour notre groupe, afin de ne pas oublier les territoires ultramarins, dans lesquels la rentrée scolaire ne se fait pas en septembre mais plus tôt.
Nous voterons donc cette proposition de loi même s'il reste beaucoup de chemin à parcourir.
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LFI – NUPES, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
La proposition de loi que nous examinons ce soir pose une première question : quelle est notre ambition pour une école réellement inclusive ? Elle en soulève une autre, corollaire : comment permettre aux personnes en situation de handicap de prendre toute leur place dans notre société ? Car le handicap – sous toutes ses formes – fait partie intégrante de notre société.
En ce sens, nous devons défendre une ambition claire et affirmée : inclure réellement les enfants en situation de handicap au sein de l'école de la République.
Au vu des chiffres précis et détaillés de l'association Ambition école inclusive, nous devons admettre que nous sommes loin du compte. En effet, quelque 200 000 enfants sont aujourd'hui déscolarisés, faute d'accompagnement ou de place dans des structures adaptées.
Bien sûr, nous pouvons nous enorgueillir qu'entre 2004 et 2022, le nombre d'élèves en situation de handicap scolarisés en milieu ordinaire soit passé de 134 000 à 430 000 – mais dans quelles conditions ? Combien de parents, faute d'AESH, faute de place, faute d'un accompagnement complet de leur enfant, parce que l'État est défaillant, sacrifient leur emploi ou occupent des emplois précaires à temps partiel pour être présent auprès de leur enfant ? Combien d'enfants sont accompagnés quelques heures par-ci, par là à défaut d'une prise en charge complète ?
Cette situation est intolérable pour les enfants, pour les familles, pour les AESH et pour les enseignants. La colère de ces derniers, qui se trouvent souvent seuls, confrontés à des situations difficiles, est plus que légitime face à ces dysfonctionnements.
Le groupe GDR, évidemment, soutiendra cette proposition de loi car elle résout en partie l'une des nombreuses difficultés rencontrées. Je m'interroge toutefois sur l'effectivité de son application.
Premièrement, qu'en est-il du rôle des MDPH ? Celles-ci instruisent les dossiers dans des délais bien trop longs et, dans certains départements, ne notifient pas les besoins, ou font de simples préconisations, sur le temps périscolaire ? Est-il possible d'assumer la prise en charge du temps méridien alors que les effectifs des AESH paraissent déjà insuffisants pour assurer l'accompagnement des enfants sur le temps scolaire ?
Je suis inquiète car, compte tenu des difficultés de recrutement et de la faible valorisation de ce métier, on risque de retirer des heures d'accompagnement sur le temps scolaire pour les flécher vers les temps méridiens.
Pour que cette mesure soit efficace, il faut un recrutement massif et une revalorisation du métier d'AESH. Majoritairement féminin, il se caractérise par un salaire moyen inférieur à 800 euros, une majorité de CDD, des temps partiels subis et une mutualisation effectuée par les Pial – source de dégradation de l'accompagnement et des conditions de travail.
Le groupe GDR défend plusieurs propositions, notamment la création d'un corps d'accompagnants d'élèves en situation de handicap de catégorie B. Cette réforme est inéluctable ; il est grand temps que le Gouvernement s'en saisisse.
Afin d'enrichir ce texte, nous avons déposé deux amendements. Le premier vise à garantir le niveau de rémunération et les droits acquis par les AESH avant la prise en charge par l'État de leurs heures de travail durant la pause méridienne. Le second, qui prévoit un rapport pour chiffrer précisément le nombre d'élèves en situation de handicap, leur mode de scolarisation ainsi que leurs besoins en matière d'accompagnement humain sur le temps scolaire et périscolaire, a été jugé irrecevable. C'est dommage : alors qu'il est essentiel de connaître les besoins exacts pour se projeter, les données manquent.
Si nous soutenons l'adoption de cette mesure, c'est parce que le groupe GDR la défend depuis plusieurs années : elle figurait parmi les cinquante-sept préconisations formulées en 2019 par Sébastien Jumel, dans le rapport de la commission d'enquête sur l'inclusion des élèves handicapés dans l'école et l'université de la République. Nous saluons l'apport de ce texte, proposé par le sénateur Cédric Vial et défendu par Virginie Lanlo, mais nous estimons que cette avancée doit s'accompagner d'une réforme plus large, qui inclue notamment la fonctionnarisation du métier d'AESH.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Depuis 2006, le nombre d'élèves en situation de handicap scolarisés en milieu ordinaire a quadruplé, passant de 118 000 à plus de 470 000 à la rentrée 2023. Leurs accompagnants ont vu leurs effectifs croître dans le même temps, c'est indéniable, et constaté quelques améliorations, bienvenues. Mais celles-ci demeurent insuffisantes. La situation des AESH, qui représentent le deuxième métier de l'éducation nationale et jouent un rôle essentiel dans l'inclusion scolaire, reste précaire. À mon tour, je salue leur engagement.
Comme l'a rappelé la Défenseure des droits, la mise en œuvre des décisions du Conseil d'État des 20 novembre et 30 décembre 2020 a fait apparaître des difficultés, notamment financières. Celles-ci ont « en pratique, induit des ruptures de prise en charge importantes pour nombre d'enfants, portant alors atteinte à leur droit à l'éducation ». Inévitablement – nous l'avions dit – des inégalités, selon les collectivités, se sont fait jour. Ce n'est pas admissible.
Le groupe LIOT soutiendra cette proposition de loi bienvenue. Mais son examen doit être l'occasion d'entamer de nouvelles discussions sur le métier d'AESH et d'agir sur les insuffisances persistantes.
Nous regrettons que le champ d'application du texte se limite au temps méridien et n'inclue pas tout le temps périscolaire, dont la Défenseure des droits, à juste titre, affirme qu'il « s'inscrit dans la continuité du temps scolaire » et « fait partie intégrante du droit à l'éducation ». La même considère que « ne pas permettre à l'enfant en situation de handicap d'être accueilli sur les temps périscolaires constitue une atteinte à son droit fondamental à l'éducation et à la scolarisation ».
Les conséquences d'une telle approche sont importantes pour les familles. Les mères, particulièrement, sont souvent conduites à abandonner leur activité professionnelle pour s'occuper de leur enfant durant le temps périscolaire.
L'accompagnement humain est une solution qui n'est ni unique ni toujours la plus adaptée pour favoriser l'inclusion des élèves en situation de handicap. Nous devons réfléchir, au-delà, à l'accompagnement global des enfants en situation de handicap.
C'est pourquoi il est important de bien évaluer les besoins des enfants. Aujourd'hui, la loi prévoit que les CDAPH notifient les besoins d'accompagnement des enfants sur le temps scolaire, mais rien s'agissant du temps périscolaire – a fortiori de la pause méridienne. Le manque de clarté de la loi fait que certaines commissions formulent des préconisations sur ce temps, d'autres pas. Sans doute ce texte aura-t-il pour effet de les y inciter mais il faudrait que loi confie aux CDAPH la mission de notifier les besoins sur le temps méridien et périscolaire.
Il faudra veiller, néanmoins, à ce que l'accompagnement durant la pause méridienne ne soit pas prévu au détriment de l'accompagnement sur le temps scolaire.
D'autres actions doivent être menées. Les AESH méritent que les heures de travail qu'ils effectuent en dehors du temps passé avec l'élève soient décomptées. Ils doivent avoir des perspectives de carrière ; il faut qu'ils puissent faire valoir leurs acquis et intégrer les formations aux métiers de l'enseignement.
Nous nous devons également de lutter contre la précarité de ce métier si essentiel.
Il est plus que nécessaire de voter cette proposition de loi qui va dans le bon sens. Mais le chemin est encore long.
De façon fort compréhensible, la commission a adopté un amendement visant à décaler l'entrée en vigueur du texte à la rentrée 2024, afin que les services de l'État s'adaptent et soient pleinement opérationnels. Cela nous fait craindre que l'adoption de la proposition de loi soit retardée d'autant. La rapporteure a indiqué, cependant, que le Gouvernement s'était engagé à ce que le texte soit inscrit à l'ordre du jour du Sénat avant l'été. Madame la ministre, confirmez-vous que cet engagement sera tenu ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT et sur quelques bancs des groupes LR et Dem.
La parole est à Mme la ministre.
Nous sommes en train de construire la politique d'accueil des enfants en situation de handicap.
C'est un bouleversement profond pour l'école que de devenir l'école pour tous. Nous avons pris ces changements à bras-le-corps.
Nous avons fait beaucoup en la matière avec la majorité parlementaire – j'aurai l'occasion de le préciser au moment de donner l'avis du Gouvernement sur les amendements. Il reste encore beaucoup à faire, j'en ai conscience. Ce que vous pointez, c'est bien ce que me rapportent les enseignants dans les écoles que je visite.
Cette proposition de loi est capitale dans la construction de cette politique d'accueil car elle répond à une attente des familles. Je relisais tout à l'heure l'avis rendu en 2022 par la Défenseure des droits. Elle y demande un accueil entre midi et deux, expliquant que les enfants ont besoin d'une prise en charge continue dans le temps.
C'est à cette tâche que nous devons nous atteler. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement soutient la proposition de loi qui lui est présentée.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
J'appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi.
Cette proposition de loi vise à inscrire dans le code de l'éducation que la rémunération des AESH durant la pause méridienne – ou pause-déjeuner – sera désormais assurée par l'État, comme c'est le cas actuellement pour le temps scolaire.
Je me réjouis de cette mesure qui clarifie les compétences. Grâce à la prise en charge par l'État de la pause méridienne, la situation des AESH est sécurisée et les familles sont rassurées.
La décision du Conseil d'État du 20 novembre 2020 a créé le trouble partout en France autour de la question du financement des AESH puisqu'elle dégageait l'éducation nationale de toute obligation en la matière en dehors du temps scolaire. Elle a induit une rupture de la prise en charge au quotidien des enfants en situation de handicap. Surtout, elle est contraire à l'esprit des dernières lois relatives tant à l'éducation qu'au handicap, qui prônent une éducation toujours plus inclusive.
Dans le Finistère, pas moins de 6 645 élèves ont reçu cette une année une notification de la MDPH ; on compte actuellement 1 538 ETP d'AESH, parmi lesquels 123 sont directement concernés par la décision du Conseil d'État. Vous le voyez, ce n'est pas anecdotique.
Voilà pourquoi je tenais à défendre l'article 1
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Ce texte est l'occasion de mettre en lumière le courage et le dévouement des personnels qui travaillent auprès des enfants. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous devons faire preuve d'unité sur cette question.
Je tiens à saluer les parents dévoués qui rencontrent tant de difficultés en matière d'accompagnement qu'ils doivent se tourner vers les pays frontaliers – dans le département du Nord, ils n'ont parfois d'autre solution que de placer leur enfant dans un établissement belge.
Sacha, 8 ans, autiste, vit les limites de l'inclusion : il a été expulsé de la cantine et de la garderie parce qu'il n'y avait pas de prise en charge sur le temps périscolaire. Ses parents, qui travaillent à plusieurs kilomètres de leur domicile, se sont retrouvés démunis ; ils ont été obligés de faillir à leur devoir professionnel afin d'aller chercher leur enfant et de le ramener à l'école après le temps de pause méridien. Ils se sont entendu dire qu'ils devaient recruter et rémunérer une personne pour s'occuper de leur fils pendant les temps périscolaires, une situation inacceptable !
Qui peut s'occuper de ces enfants livrés à leur sort, lâchés par la collectivité, à part leurs parents, obligés alors de quitter leur travail ? Nous espérons, madame la ministre, que tous les petits Sacha et leurs parents pourront avoir l'assurance d'un réel accompagnement. L'État doit assumer sa responsabilité et son devoir de secours envers les personnes les plus vulnérables.
Je conclurai en rappelant que les AESH demandent surtout davantage de reconnaissance alors que leurs conditions de travail sont extrêmement dégradées.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Tout le monde m'appelle « le chauffeur de Mélenchon », mais j'ai aussi été le taxi d'enfants handicapés que j'emmenais tous les matins à l'école – j'ai donc eu affaire aux AESH. Vous êtes des technocrates, vous racontez plein de choses, mais je vais vous en expliquer une seule, et très importante, car il y a la valeur.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Exclamations sur plusieurs bancs des groupes Dem et LR.
C'est la vérité. Quand l'enfant est accompagné par des AESH, si c'est plutôt l'État qui prend en charge le salaire et qui s'occupe réellement de son temps de travail scolaire…
Ça rame ? Chez vous sûrement ! Mais je ne vous demande pas votre avis, c'est moi qui suis en train de parler !
Ces enfants-là, ils voient des personnes passer : un jour, c'est une AESH, le lendemain c'en est une autre, et pendant ce temps, leurs souffrances ne font que s'aggraver !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Et vous tous, sur ces bancs, vous êtes en train de faire semblant, vous mettez un pansement sur une jambe de bois. Ce n'est pas la bonne chose à faire !
On vous demande tout simplement de créer un corps de fonctionnaires de catégorie B.
Mêmes mouvements.
Moi, je n'ai pas écrit mon discours, mais je vous explique qu'à chaque fois que je vais les voir, quel que soit l'école ou le collège, les AESH me décrivent la même situation : elles sont abandonnées par l'État, leurs salaires sont très précaires et elles n'ont aucune solution pour s'occuper réellement des enfants pris en charge par notre république.
Donc s'il vous plaît, madame la ministre, je vous demande juste une chose : de créer un corps de fonctionnaires de catégorie B pour donner aux AESH un peu de souffle .
Mêmes mouvements
Leur travail et leur rémunération sont très précaires. On a besoin de vous pour revaloriser leur salaire et leur temps de travail.
Mêmes mouvements.
Depuis une décision du Conseil d'État du 20 novembre 2020, l'éducation nationale est dégagée de toute responsabilité dans le financement des emplois d'AESH en dehors du temps scolaire. Cela pose de grandes difficultés à de nombreuses familles : les parents d'élèves sans aide à l'heure du déjeuner sont obligés de prendre le relais, ce qui s'avère très compliqué lorsqu'ils travaillent, de recourir à des accompagnants privés, voire de renoncer à la scolarisation de leur enfant.
L'article 1er , très attendu des familles, prévoit que l'État prendra financièrement en charge les AESH lorsqu'ils accompagnent ces élèves durant le temps méridien. C'est une bonne nouvelle mais il ne faut pas oublier les autres difficultés que les familles rencontrent pour scolariser leur enfant en situation de handicap. Nous n'avons pas pu évoquer les Pial, qui ont fortement dégradé les conditions de travail des AESH en mutualisant l'accompagnement entre plusieurs écoles et établissements, au détriment de l'accompagnement individualisé des élèves.
Par ailleurs, malgré un ajustement de la grille au 1er
Nous faisons donc un pas essentiel ce soir, mais beaucoup reste à accomplir pour que tous les enfants soient accueillis dans de bonnes conditions dans l'école de la République.
Mme Emmanuelle Anthoine applaudit.
En décembre 2019, j'avais eu l'honneur d'être rapporteur d'une commission d'enquête sur l'école inclusive, dont les préconisations avaient été votées à l'unanimité. Je me propose de vous transmettre le rapport, afin que nous évaluions ensemble leur mise en œuvre. Il reste beaucoup de chemin à accomplir pour concrétiser l'école inclusive.
Emmanuel Macron, en pleine crise sanitaire, avait dit qu'il faudrait que notre économie se souvienne de celles et ceux dont le métier n'est pas reconnu et mal rémunéré. Force est de constater que, pour ce qui concerne les AESH, cette promesse n'a pas été tenue et qu'en guise de reconnaissance et de remerciements, elles ont été, comme d'autres, percutées par la réforme des retraites – travaillant à temps partiel, elles ont été très pénalisées par le recul de l'âge de départ.
J'appelle votre attention sur trois points.
Les Pial sont un outil de rationalisation qui remet en cause le droit individuel à l'accompagnement pour un grand nombre d'enfants. Il faudra tirer les enseignements de ce dispositif.
Les MDPH accusent des délais de traitement de dossiers trop longs et leur mode de gestion est déshumanisé – le Défenseur des droits, chaque année, rappelle que les droits numérisés sont des droits non revendiqués. La situation mériterait que l'État qui protège, que l'État qui prend soin, harmonise, dans l'intérêt des enfants et des parents, les délais d'inscription et de prescription.
Enfin, on a progressé sur l'inclusion, mais le nombre d'heures scolaires réellement effectuées par ces enfants reste une question centrale. Je souhaite connaître précisément le volume d'heures d'enseignement dispensées aux enfants en situation de handicap. Quand l'inclusion se résume à quatre heures seulement, elle ne correspond pas tout à fait à l'image que nous avons de l'école pour tous.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES.
L'article 1er est adopté.
Notre souhait, à tous, est de développer l'école inclusive. Nous avons créé de nouveaux métiers pour la faire vivre et prévu une formation pour ces professionnelles – parce que ce sont surtout des femmes – dans leur première année ainsi qu'une formation continue. Nous sommes à l'œuvre pour faire de l'accompagnement un métier à part entière. Nous avons déjà sorti ces professionnelles de l'extrême précarité dans laquelle elles étaient puisqu'il s'agissait de CDD, d'emplois aidés très souvent. Il est dorénavant possible de passer en CDI au bout de trois ans, ce qui est long, certes, mais ouvre des perspectives professionnelles.
Les AESH sont les clés de voûte de l'école inclusive. Sans elles, il n'y aurait pas d'enfants en situation de handicap dans les écoles, donc pas d'école inclusive.
C'est un pas supplémentaire que nous faisons ensemble ce soir et je salue l'initiative du sénateur Vial. Mais nous avons encore beaucoup à faire. Nous pourrions ainsi rendre pleinement effective la formation, faire en sorte que le métier soit reconnu et l'AESH intégré au sein de l'équipe pédagogique. Même si les choses avancent – je le constate dans mon département, où je fais le point chaque année sur le Pial le plus important avec l'ensemble des AESH et des fonctionnaires –, il faut encore travailler pour que ces professionnels soient placés au cœur du dispositif et qu'ils soient pleinement reconnus, y compris par leur rémunération.
Mme Liliana Tanguy applaudit.
Les AESH méritent une reconnaissance à la hauteur de leur dévouement exceptionnel envers les plus fragiles, sans même qu'ils bénéficient d'une rémunération à la hauteur. De nombreuses associations, telles que Les Papillons blancs ou Partage et Vie, nous ont alertés dès 2023 sur la situation désastreuse de l'accueil des accompagnants des enfants polyhandicapés dans le département du Nord mais également sur tout notre territoire.
Selon une enquête réalisée par l'union départementale de l'association des Papillons blancs, plus de 8 000 personnes en situation de handicap intellectuel cherchent une solution d'accompagnement dans le Nord, dont plus de 848 au sein de l'arrondissement de Douai, dans ma circonscription. Malheureusement, les parents, dans la plus grande des détresses, sont souvent obligés de placer leurs enfants en Belgique par manque d'accompagnement, par manque de place ou par manque de structures adaptées. C'est une honte pour la France.
Lors de la présidentielle de 2022, Marine Le Pen était la seule candidate à avoir proposé la création de 10 000 places supplémentaires dans les établissements spécialisés d'ici à 2027, pour pallier évidemment la grande détresse de ces parents.
Dans ces conditions, il est essentiel de se préoccuper de la rémunération des accompagnants, non seulement sur le temps méridien mais également sur le temps consacré aux élèves en dehors des heures de cours, ainsi que du recrutement des personnels nécessaires. Face à cette détresse, qu'attendez-vous pour agir, madame la ministre ? Qu'attendez-vous pour faire respecter la Constitution qui garantit l'égalité d'accès à l'éducation pour tous et à tous les degrés ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.
Le handicap est un combat quotidien pour plusieurs millions de Français. Et pour accompagner les enfants en situation de handicap au sein de l'institution scolaire, les AESH sont essentiels. Si quelques avancées en leur faveur ont été récemment obtenues et si cette proposition de loi en permet une nouvelle, de nombreuses difficultés demeurent et la mesure proposée reste bien anecdotique au regard des enjeux. Le cadre d'emplois des AESH reste trop rigide, ils ne disposent d'aucun statut ni d'une formation suffisante et exercent un métier peu attractif et faiblement rémunéré. Et surtout, ils sont trop peu nombreux pour que les demandes légitimes des familles d'enfants handicapés trouvent une réponse.
Les AESH, madame la ministre, méritent toute notre considération et une reconnaissance qui irait bien au-delà de la prise en charge de leur rémunération sur le temps méridien. Pourquoi ne pas aller plus loin et proposer, comme je le fais depuis plusieurs années, qu'ils puissent être directement recrutés en CDI ou qu'ils bénéficient d'une majoration du temps de travail pour tenir compte du temps de préparation des cours ? Quand allez-vous vous saisir de ces sujets ? Nous attendons votre réponse, et les 140 000 AESH aussi !
Il s'agit d'un amendement rédactionnel pour une mise en cohérence avec l'article 1er .
L'amendement n° 18 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Par cet amendement, nous souhaitons nous assurer que l'entrée en vigueur de cette réforme ne s'accompagne pas d'une baisse de revenus pour les AESH. En effet, les collectivités territoriales étant libres de fixer le niveau de rémunération, certaines d'entre elles rémunèrent les AESH davantage que ce que l'État versera après la réforme.
Comme nous ne cessons de vous le répéter, la situation économique et sociale des AESH reste très précaire avec des niveaux de rémunération très faibles – entre 800 euros et 1 000 euros en moyenne, soit un niveau inférieur au Smic mensuel. Il est inacceptable que cette réforme puisse précariser davantage la situation économique et sociale de certaines AESH.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Cette proposition de loi n'a déjà pas pour vocation d'améliorer les conditions de travail des AESH ; il ne faudrait pas qu'elle entraîne, en plus, une baisse de leur salaire !
En commission, madame la rapporteure, vous avez donné un avis de sagesse et avez même indiqué que vous proposeriez d'ajouter un alinéa. Je n'ai rien vu venir ; qu'en est-il ?
Mêmes mouvements. – M. Jean-Claude Raux applaudit également.
La parole est à Mme Soumya Bourouaha, pour soutenir l'amendement n° 15 .
Nous souhaitons garantir le maintien du niveau de rémunération et des droits acquis des AESH car, oui, certaines villes rémunèrent les accompagnants pendant la pause méridienne à un niveau au-dessus de la grille indiciaire de l'éducation nationale.
Par conséquent, il y a un risque de perte de salaire pour certaines AESH. Dans le contexte actuel, ce n'est pas concevable. Les salaires des AESH sont déjà extrêmement faibles : il est inimaginable qu'ils soient rognés ! D'où notre amendement.
Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements en discussion commune ?
Il est vrai qu'en commission, j'avais émis un avis de sagesse en vue d'approfondir la question. Or, comme il est indiqué dans le décret du 27 juin 2014, la rémunération des AESH est déterminée par référence aux indices et valeur du point de la fonction publique. Qu'ils soient recrutés par l'État ou par la collectivité territoriale, ils relèvent d'une grille indiciaire commune, qui a d'ailleurs été rénovée en septembre dernier.
Avis défavorable sur les deux amendements.
Même avis.
D'abord, une telle disposition ne relève pas, me semble-t-il, du domaine de la loi. Il existe un cadre réglementaire de gestion des AESH et c'est ce cadre réglementaire qui garantit leur niveau de rémunération.
Ensuite, sur le fond, je rappelle que depuis cinq ans, les AESH font l'objet de mesures qui visent à mieux reconnaître leur rôle et leur place. Mme Dupont a employé l'expression de « clé de voûte » et je crois que pour l'école inclusive, c'est effectivement le rôle qu'ils jouent. Cette reconnaissance s'est traduite par une amélioration de leurs conditions d'exercice et de leur rémunération.
En 2019, les conditions d'emploi ont été sécurisées par l'édiction de règles claires concernant le décompte de leur temps de travail et le calcul de leur rémunération. Depuis 2021, Mme la rapporteure vient de le préciser, celle-ci est encadrée par une grille indiciaire, avec une progression automatique tous les trois ans et des revalorisations successives. Cette grille a été rénovée en septembre 2023, et l'indice de recrutement placé cinq points au-dessus de l'indice minimal de traitement de la fonction publique. Une indemnité de fonction, d'un montant de 1 529 euros brut annuels, a en outre été créée.
D'autre part, je le répète, la rémunération brute d'un agent public ne peut en aucun cas être inférieure au montant brut du Smic – au prorata, bien entendu, de la durée des services.
Enfin, les AESH peuvent désormais se voir proposer un contrat à durée indéterminée après trois ans de contrat à durée déterminée.
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Les AESH ont par ailleurs bénéficié des mesures issues du rendez-vous salarial de la fonction publique en juin 2023. Au total, leur rémunération aura progressé de 12 % à 14 % entre juin 2023 et juin 2024.
La rémunération moyenne que vous avez citée, madame Lepvraud, n'a plus court à partir du moment où l'on considère qu'elle est calculée au prorata de leur temps de service et qu'elle ne peut être inférieure au Smic horaire.
Bien entendu, nous faisons tout pour améliorer ce statut. Les différentes mesures que j'ai évoquées devant vous en témoignent.
Madame la ministre, admettons ensemble que, malgré toutes les mesures que vous venez de citer, et que je ne conteste pas, les AESH, vu le travail extraordinaire qu'elles font – je dis « elles » parce que ce sont essentiellement des femmes –, ne sont pas rémunérées à leur juste valeur. On ne cessera de le répéter.
Nous allons voter pour cette proposition de loi, mais vous faites le choix, contestable, de considérer que le temps de pause méridienne, qui est normalement sous la responsabilité des maires, sera sous la responsabilité juridique de l'État, puisque vous étendez les contrats de travail des AESH au temps du midi – ce qui soulève des questions de nature juridique.
Nous allons conventionner !
Certes, mais j'appelle votre attention sur le fait que, s'agissant d'un contrat de droit privé, le niveau de salaire est une clause substantielle du contrat de travail. Si la commune a fait le choix de les payer davantage, parce qu'il existe dans cette commune des acquis sociaux qui permettent de le faire, vous serez tenus de ne pas remettre en cause cette clause, en application du principe de la continuité du contrat de travail – puisque vous étendrez un contrat de travail existant. Si vous voulez être à l'abri des contentieux, il faut adopter notre amendement !
Vous dites que ce texte va régler la question des doubles contrats, mais c'est faux : dans la réalité, les AESH qui assurent le temps de pause méridienne sont souvent recrutées par la collectivité territoriale pour assurer aussi le temps périscolaire avant et après les heures de cours, ce qui leur permet de compléter utilement leur rémunération.
À ce propos, dans la perspective d'une amélioration du statut des AESH, voulez-vous les faire travailler trente-cinq heures à tout prix ou envisagez-vous de les payer trente-cinq heures en intégrant dans le temps de travail le temps de formation, le temps de travail collectif, etc. ? Demander aux AESH de faire trente-cinq heures devant les élèves, ce n'est pas acceptable !
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES.
Monsieur Jumel, vous avez raison de montrer que ces amendements ne sont pas identiques !
J'ai une question à vous poser, chers collègues de La France insoumise. Comment pouvez-vous concilier une demande de fonctionnarisation des AESH, avec une grille indiciaire unique, et une demande de différenciation des rémunérations en fonction des communes ?
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 90
Nombre de suffrages exprimés 74
Majorité absolue 38
Pour l'adoption 20
Contre 54
L'amendement n° 7 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 90
Nombre de suffrages exprimés 73
Majorité absolue 37
Pour l'adoption 20
Contre 53
L'amendement n° 15 n'est pas adopté.
L'article 2, amendé, est adopté.
Madame la ministre, depuis le début de cette discussion, vous êtes dans l'autocongratulation. Pourtant, cela fait sept ans que vous êtes au pouvoir. Peut-être serait-il temps d'examiner la situation avec lucidité, du point de vue de cette belle promesse républicaine qu'est l'école inclusive ? Le constat auquel cet examen lucide aboutit, c'est celui de la faillite de votre politique.
Dans ma circonscription – mais c'est le cas, j'en suis certain, dans toutes –, à chacune des prérentrées auxquelles j'assiste depuis que je suis député, on compte, dans toutes les écoles, sans exception, bien plus de notifications que d'AESH. Les directions d'écoles sont soumises à ce tourment qui consiste à établir des priorités parmi les élèves qui bénéficient d'une notification
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Mme Fatiha Keloua Hachi applaudit aussi
et à se tourner vers les familles, plus particulièrement vers les mères – parce que ce sont toujours à elles qu'on s'adresse pour ce genre de choses –, pour leur demander quand elles pourront garder chez elle leur enfant, de manière à organiser une sorte de roulement avec les autres parents. Cela, madame la ministre, c'est le bilan de votre politique ; depuis sept ans, vous maintenez les AESH sous le seuil de pauvreté.
Exclamations sur les bancs du groupe RE.
Depuis tout à l'heure, vous ne cessez de parler des revalorisations que vous leur avez concédées. Pourtant, elles vivent dans un état de misère absolue.
Par votre politique de mutualisation, vous avez détruit le métier d'AESH, le lien qu'elles avaient noué avec les élèves.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Vous les forcez à se déplacer d'une école à l'autre, vous les conduisez à la démission, même celles qui ont la passion de ce métier.
Si vous voulez être à la hauteur de la promesse républicaine, il faudra faire mieux qu'un pansement sur une jambe de bois et créer un corps de fonctionnaires de catégorie B de manière à reconnaître la qualification de ce métier essentiel.
Mêmes mouvements.
La parole est à M. Philippe Naillet, pour soutenir l'amendement n° 12 .
Cet amendement vise à tenir compte du calendrier scolaire des régions ultramarines. Il s'agit, concrètement, de substituer aux mots « le 1er
Effectivement, nous avons retenu la date du 1er
La référence au 1er
L'amendement de notre collègue est de bon sens.
Je voudrais appeler votre attention, madame la ministre – n'y voyez pas une mise en cause personnelle –, sur le fait que la disposition que nous allons adopter ce soir est proposée à l'Assemblée nationale depuis la décision du Conseil d'État de 2019. Chaque année, l'AMF demande qu'on trouve une solution pour compenser auprès des communes ce qui, selon la décision du Conseil d'État, relève de leur responsabilité. Évidemment, nous attendrons la rentrée pour mettre en œuvre cette mesure, mais comprenez qu'il faut rapporter ce temps d'attente au parcours du combattant que doivent effectuer les familles. En Seine-Maritime, il faut attendre quinze mois pour obtenir une notification de la MDPH, puis plusieurs mois que cette notification se concrétise !
Dans une République une et indivisible, ces inégalités territoriales ne sont pas acceptables.
L'amendement n° 12 est adopté.
Mme Fatiha Keloua Hachi applaudit.
L'article 3, amendé, est adopté.
Je suis saisi de plusieurs amendements portant article additionnel après l'article 3.
La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 19 de la commission des affaires culturelles et de l'éducation.
Par cet amendement, nous demandons que le Gouvernement remette au Parlement, dans un délai de dix-huit mois à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi, un rapport sur la situation des accompagnants des élèves en situation de handicap intervenant pendant les temps scolaires et de pause méridienne.
En effet, certains d'entre vous ont fait remarquer qu'il pouvait exister un écart entre le nombre de notifications émises par les MDPH et le nombre d'élèves bénéficiant d'un AESH. Avec la possibilité désormais ouverte d'un financement par l'État des AESH pendant la pause méridienne, il faut veiller à ce que les MDPH puissent formuler des prescriptions pour ce moment-là de la journée. Ce n'est pas le cas actuellement, alors que cela simplifierait beaucoup la vie et l'organisation des familles. Cet amendement vise à obtenir plusieurs éléments chiffrés, dont le nombre d'élèves bénéficiant d'un AESH pendant les temps scolaires et pendant la pause méridienne, et à veiller à ce que les prescriptions des MDPH soient suivies d'effet.
Je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.
L'amendement n° 19 est adopté.
Nous demandons un rapport d'évaluation des conséquences de cette proposition de loi. En effet, elle risque de faire augmenter le temps de travail des AESH. Parce qu'elle réduit leur temps de pause et ne propose aucune amélioration structurelle, elle pourrait entraîner une dégradation de leurs conditions de travail. Par ailleurs, elle fait courir le risque d'une perte de salaire puisque certaines collectivités versent des rémunérations dont le montant est supérieur à celui proposé par l'État – je rejoins sur ce point la leçon juridique prodiguée par notre collègue Jumel.
Ce rapport éclairera le législateur et informera les AESH, principales concernées, des évolutions réelles de leurs conditions de travail.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Cette demande est satisfaite par l'adoption de l'amendement précédent, qui prévoit que le Gouvernement remettra un rapport sur l'évolution de la situation des AESH dix-huit mois après l'entrée en vigueur de la proposition de loi. Je demande donc le retrait de l'amendement ; à défaut, mon avis sera défavorable.
Même avis.
Madame la ministre, avez-vous peur que nous évaluions cette loi ? Peut-être redoutez-vous que, contrairement à ses objectifs affichés, elle n'aggrave la situation ? Votre proposition de faire travailler les AESH du matin au soir sans interruption, puisque la pause méridienne sera désormais un temps de travail, pourrait conduire à un épuisement de ces personnels et à une augmentation du nombre de démissions.
De même, votre position – relevée au cours des débats –, qui consiste à ne pas garantir le maintien des niveaux de traitement offerts par certaines collectivités, pourrait entraîner un appauvrissement des AESH, la démission d'une partie d'entre elles et, à tout le moins, une moindre attractivité du métier.
Plus globalement, le texte considère les AESH – pour 90 % des femmes – comme des femmes à tout faire. Aujourd'hui, elles participent au temps éducatif ; elles devront demain intervenir à d'autres moments, notamment pendant la pause méridienne. Ce texte porte en lui le risque d'une déqualification du métier.
Il faudra donc évaluer les conséquences de cette proposition de loi. Madame la ministre, si vous pensez que la future loi est bonne, soutenez cet amendement ! Si vous le rejetez, c'est peut-être que vous avez quelque chose à cacher.
Je n'ai rien à cacher, surtout pas au Parlement, que je respecte profondément et à qui je dois une totale transparence. Si je refuse cette nouvelle demande de rapport – je viens de donner un avis favorable à l'amendement précédent de la rapporteure –, c'est qu'il me semble que les documents budgétaires soumis au Parlement, comme le projet annuel de performance ou le rapport annuel de performance, comportent des données suffisantes, aussi bien quantitatives que qualitatives. Nous aurons des éléments sur le nombre d'élèves bénéficiant d'une prescription d'accompagnement et sur les moyens mobilisés pour cet accompagnement, matériel ou pédagogique.
L'amendement n° 8 n'est pas adopté.
Sur l'ensemble de la proposition de loi, je suis saisi par le groupe Renaissance d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à Mme Farida Amrani, pour soutenir l'amendement n° 13 .
Le temps périscolaire, inscrit dans la continuité du temps scolaire, fait partie intégrante du droit à l'éducation. Par sa décision de 2020, le Conseil d'État a estimé que sa gestion devait revenir aux collectivités territoriales, collectivités que le Gouvernement n'a cessé de ponctionner. En effet, elles ont vu le nombre de leurs missions croître alors que la dotation globale de fonctionnement (DGF) stagne et que les compensations de l'État pour ces nouvelles compétences ne sont pas à la hauteur. Après la décision de 2020, le Gouvernement aurait dû augmenter les moyens alloués aux communes mais il a préféré faire des économies sur le dos des collectivités…
Ridicule : il y a eu 320 millions d'euros de plus !
…et, in fine, sur le dos de l'accompagnement des enfants en situation de handicap.
Dès lors, la prise en charge n'est pas la même d'une collectivité à une autre. En Essonne, en 2023, sur 6 500 élèves concernés, 844 enfants étaient toujours en attente d'une AESH, 1 610 enfants d'un renouvellement.
Très souvent, les AESH sont chargées de suivre cinq élèves en même temps. Elles devraient pourtant être considérées pour le travail précieux qu'elles effectuent. Cette situation oblige des parents à prendre eux-mêmes le relais ; certains doivent renoncer à leur emploi pour s'occuper de leur enfant pendant le temps périscolaire ou la pause déjeuner ; d'autres se résolvent à déscolariser leur enfant.
Le rapport que nous demandons par cet amendement fera la lumière sur les inégalités dans la prise en charge par les collectivités territoriales des élèves en situation de handicap pendant le temps périscolaire.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Cette demande dépasse le cadre de la proposition de loi puisque le rapport viserait à dresser un état des lieux de la prise en charge des élèves pendant le temps périscolaire par les collectivités. J'émets un avis défavorable, d'autant que mon amendement n° 19 était aussi une demande de rapport, mais en lien avec l'objet du texte.
Même avis.
Ce rapport s'intéresserait notamment aux AESH privés, dont j'ai découvert l'existence en septembre 2023 dans une école d'Argenteuil. Sans doute en raison d'une pénurie de personnel, il avait été suggéré à une famille de recourir à de tels services.
Cela coûte 3 000 euros par mois, une dépense inenvisageable pour l'écrasante majorité de nos compatriotes. Cette façon de se retourner vers les familles est insupportable car elle les culpabilise, car elle les charge d'une responsabilité qui découle du défaut de l'État et du Gouvernement.
Madame la ministre, si vous n'appuyez pas cette demande de rapport, je vous poserai deux questions. Avez-vous des informations sur le nombre d'AESH privés présents dans les établissements scolaires publics ? Existe-t-il des consignes, qui passeraient par les recteurs ou les directeurs académiques, suggérant aux chefs d'établissement de pousser les familles qui le peuvent à recourir à des AESH privés ? Je le demande car, il y a quelques mois, l'ancienne rectrice de l'académie de Versailles, a pu m'indiquer qu'au moins deux AESH privés intervenaient à Argenteuil. Elle connaissait donc le nombre d'AESH privés présents dans les établissements publics de l'une des communes de ma circonscription.
Pouvez-vous éclairer la représentation nationale sur cette réalité attentatoire au principe d'égalité d'accès aux services publics, que devrait garantir notre République ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Les rapports, c'est bien, mais l'action, parfois, c'est mieux. Dans le Douaisis, la situation des maisons d'accueil spécialisées (MAS) et des enfants polyhandicapés est terrible, de même que celle des enfants en situation de handicap scolarisés. Un ancien ministre, M. Pap Ndiaye, avait envoyé, au nom de l'éducation nationale, un courrier recommandé à tous les parents des élèves polyhandicapés du MAS de Féchain les mettant en demeure de scolariser de manière urgente leurs enfants. Plutôt que de demander des rapports d'évaluation, il faudrait urgemment résoudre la situation dans les MAS et celle de l'ensemble des AESH.
L'amendement n° 13 n'est pas adopté.
Il s'agit d'un amendement rédactionnel pour mettre en cohérence le titre avec la rédaction des articles 1er et 2.
L'amendement n° 20 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Je note que Mme la ministre n'a pas éclairé l'Assemblée nationale sur mes deux questions à propos des AESH privés.
Cette proposition de loi est un pansement sur une jambe de bois. Quel que soit l'acteur chargé de leur rémunération pendant la pause méridienne, elle maintiendra les AESH sous le seuil de pauvreté. Elle les poussera probablement à l'épuisement, avec des journées de travail interminables. Elle confirme la négation de la dimension éducative de leur travail et nous éloigne de la reconnaissance d'un métier pourtant essentiel à l'éducation nationale.
Elle ne résoudra pas non plus la souffrance des familles et des élèves en situation de handicap qui ne trouvent pas de place dans notre école, faute d'accompagnants en nombre suffisant. Elle ne représente pas le choc d'attractivité nécessaire et porte en elle les conditions qui peuvent conduire à ce qu'un nombre toujours aussi important d'AESH démissionnent en raison d'un épuisement professionnel.
Je vous le répète, madame la ministre : tant que vous ne créerez pas un corps de fonctionnaires de catégorie B qui garantira la reconnaissance d'un équivalent temps plein pour vingt-quatre heures de service et une rémunération digne permettant de vivre de son travail, vous ne résoudrez pas le problème. Vous ne sortirez pas de cette faillite, vous ne vous extirperez pas de cette impossibilité de tenir la promesse de l'école inclusive.
Si vous ne le faites pas, nous, nous le ferons ; un jour, nous reconnaîtrons le deuxième métier de l'éducation nationale.
Le groupe LFI s'abstiendra…
…parce que, si nous ne pouvons pas valider le contenu de la proposition de loi, nous sommes conscients de l'extrême détresse financière de ces personnels et de l'état d'agonie des finances des collectivités.
Le groupe Renaissance votera bien entendu en faveur de cette proposition de loi. Nous remercions Mme la rapporteure pour son implication, le sénateur Vial et nos collègues, notamment ceux de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, qui ont participé de manière constructive aux débats.
Nous espérons un vote conforme au Sénat, pour que la loi puisse être rapidement promulguée, et qu'elle entre en vigueur dès la rentrée de septembre – voire d'août pour Mayotte et La Réunion –, afin de répondre aux attentes des familles et des collectivités territoriales.
Je l'ai indiqué dans la discussion générale, le groupe Les Républicains votera pour la proposition de loi. Nous sommes conscients qu'elle ne réglera pas tous les problèmes, mais l'ambition initiale était d'en traiter un seul, à savoir la situation inconfortable qui résultait, pour les communes, pour les familles et pour les enfants, d'une décision prise par le Conseil d'État – tel a été, il faut le rappeler, le point de départ.
Nous n'aurions jamais dû nous trouver dans cette situation, le Gouvernement ayant traîné pendant près de quatre ans avant de la résoudre. Nous le regrettons, mais ce qui compte, c'est que l'on avance. Je tiens à saluer le travail de notre collègue sénateur Cédric Vial, auteur de la proposition de loi.
« Très bien ! » sur les bancs du groupe LR.
Madame la ministre, de nombreux problèmes demeurent, et on ne peut pas feindre de ne pas les voir
« Eh oui ! » sur les bancs du groupe LR.
À ce stade, vous n'avez pas proposé de solutions. La mission d'information sur l'instruction des enfants en situation de handicap, menée l'année dernière par la délégation aux droits des enfants, a mis au grand jour les lourdeurs administratives monstrueuses auxquelles sont confrontées les familles ; c'est pour elles un véritable parcours du combattant. Les délais sont parfois incompréhensibles, et les inégalités territoriales sont majeures en la matière : certains départements traitent les dossiers en huit mois, quand d'autres le font en deux mois. Malheureusement, l'État ne garantit pas à chaque enfant le droit à l'éducation.
Certains cas sont invraisemblables. La situation créée par la décision du Conseil d'État a révélé nettement les inégalités entre le public et le privé. En outre, les défaillances statistiques sont majeures. On se vante de scolariser 430 000 enfants en situation de handicap, mais cette scolarisation n'a pas la même portée pour tous, ce qui n'est pas acceptable.
« C'est vrai ! » et « Il a raison ! » sur les bancs du groupe LR.
Nous avons besoin de données précises, qui font pour l'instant défaut. Il y a un trou dans la raquette : on n'est pas en mesure de nous dire clairement combien d'enfants en situation de handicap ne sont pas scolarisés. C'est inacceptable, et nous n'avons toujours pas obtenu de réponse à ce sujet.
Inclure les enfants à l'école, ce n'est pas simplement faire de la garderie, c'est instruire, enseigner, en assumant une véritable ambition pédagogique. Votre majorité est au pouvoir depuis sept ans. Or nous ne comprenons pas quel cap vous avez fixé pour l'école inclusive, ni quelle ambition pédagogique vous soutenez – il faudra, à un moment donné, que nous en assignions une dans cet hémicycle ! Pour notre part, nous vous proposons de travailler à un acte II de l'école inclusive ; nos enfants le méritent.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Le groupe Socialistes et apparentés votera pour cette proposition de loi, parce qu'elle soulagera les collectivités territoriales d'une lourde dépense et parce que les familles ont besoin d'une prise en charge pendant la pause méridienne. Toutefois, comment les enseignants et les coordonnateurs de Pial, qui sont souvent des directeurs, feront-ils face à la situation lorsqu'ils réorganiseront, à partir du 16 août, le fonctionnement des établissements ?
Prenons un exemple concret : dans mon département, la Seine-Saint-Denis, le déficit d'AESH sera de 40 % à la rentrée scolaire. Autrement dit, pour cent enfants élèves en situation de handicap ayant besoin d'une prise en charge totale, il y aura seulement soixante AESH. Dès lors, le Pial essaiera de trouver des solutions, qui relèveront nécessairement du rafistolage, pour que les élèves aient une AESH devant eux. Certains Pial cherchent à mutualiser, mais ce qui se veut un outil de gestion et de rationalisation devient un outil de destruction. Les AESH travaillent déjà dans plusieurs établissements et s'occupent d'un grand nombre d'enfants. Leur charge horaire passera de vingt-quatre à trente-deux heures. Sachant qu'il manquera 40 % d'AESH, je l'ai dit, en Seine-Saint-Denis, quel calcul fera l'éducation nationale ? Ce ne sera certainement pas le bon.
La proposition de loi est positive pour les collectivités et les familles. Dorénavant, il faudrait que l'éducation nationale tienne compte de la réalité à laquelle font face les Pial et mette fin aux mesures de mutualisation, qui ne servent à rien, sinon à détruire le métier d'AESH.
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et LFI – NUPES.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 97
Nombre de suffrages exprimés 86
Majorité absolue 44
Pour l'adoption 86
Contre 0
La proposition de loi est adoptée.
Applaudissements sur les bancs des commissions.
Prochaine séance, demain, à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire, du projet de loi relatif à l'organisation de la gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection pour répondre au défi de la relance de la filière nucléaire ;
Discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire, du projet de loi organique modifiant la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution ;
Discussion, en lecture définitive, du projet de loi visant à renforcer la lutte contre les dérives sectaires et à améliorer l'accompagnement des victimes.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt-trois heures cinquante.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra