La commission entend M. Jean Pisani Ferry et Mme Selma Mahfouz, auteurs du rapport Les incidences économiques de l'action pour le climat.
Mes chers collègues, nous auditionnons aujourd'hui les auteurs d'un récent rapport de France Stratégie intitulé Les incidences économiques de l'action pour le climat : M. Jean Pisani-Ferry, économiste, et Mme Selma Mahfouz, inspectrice générale des finances.
Il s'agit d'un travail novateur, dans le champ macroéconomique, et plus que d'un seul rapport à proprement parler, d'une myriade de rapports, puisqu'il faut ajouter au rapport de synthèse pas moins de onze rapports thématiques. Il s'agit d'un travail qui joue aussi sur les jeux d'échelles, temporelles et spatiales, puisqu'il articule d'une part la question de la transition écologique dans une perspective de long terme et internationale ; et d'autre part, la question, plus concrète, de l'horizon 2030 pour notre pays, dans le contexte européen.
Il se dégage de votre rapport quelques constats percutants : le coût de l'inaction est supérieur au coût de l'action et la mutation est comparable à celle de la révolution industrielle, mais plus rapide et orientée par les choix publics. Il va falloir dégager en France un supplément d'investissement dépassant deux points de PIB par an d'ici 2030. La matière est riche, et suscite de nombreuses réflexions.
Je vous remercie de nous accueillir aujourd'hui. Nous sommes très heureux d'avoir cette occasion de présenter notre travail et de dialoguer avec vous.
Vous avez rappelé à juste titre que notre rapport s'ouvre en précisant que le coût de l'inaction est supérieur au coût de l'action pour le climat, lequel n'est pas non plus négligeable. L'enjeu de l'action climatique est effectivement de l'ordre d'une révolution industrielle. De 1800 à 2050, la composition de l'offre mondiale d'énergie témoigne de l'accélération forte qu'il convient de réaliser si l'on veut atteindre la neutralité carbone en 2050.
Cette révolution est beaucoup plus rapide que les précédentes et sera guidée par les choix publics et non pas par la technologie ou l'initiative privée. Sur le long terme, nous avons de bonnes raisons d'être optimistes : la baisse du coût des énergies renouvelables projetée sera très impressionnante. La capacité à réorienter le progrès technique a d'ailleurs été déjà démontrée par la chute plus rapide que prévue de ces coûts. Cela peut nous permettre un avenir qui n'est pas fait de souffrances, mais dans lequel la transition écologique fournira l'occasion de trouver des technologies sans doute plus efficaces que celles que nous avons eues jusqu'à présent et qui reposaient sur la disponibilité des combustibles fossiles.
Néanmoins, la transition ne sera pas simple non plus. Elle repose sur trois mécanismes principaux : la réorientation du progrès technique, dont j'ai déjà parlé, la sobriété, mais surtout la substitution de capital aux énergies fossiles.
Nous avons essayé de mettre en œuvre une approche économique de la transition climatique. La discussion sur ce sujet est en effet facilement confuse. Elle repose entre autres sur la volonté de sobriété, qui est philosophiquement intéressante : la croissance ce n'est pas le but de l'activité. Sortir de l'obsession de l'accumulation matérielle, en tout cas dans des sociétés avancées, est une bonne chose, mais les discussions sur les implications économiques de la transition écologique manquaient de clarté, selon nous.
Nous nous sommes donc attachés à clarifier ce point, en soulignant trois sujets principaux. Le premier concerne la réorientation du progrès technique, qui consiste à investir dans les champs suivants : l'innovation et la recherche de nouveaux procédés. Cet investissement s'est déjà avéré payant.
Le deuxième sujet est relatif à la sobriété, c'est-à-dire la réduction de la consommation d'énergie qui ne résulte pas de gains d'efficacité énergétique. Cela peut nécessiter par exemple de recourir à des modes de déplacements différents, à diminuer la température dans les logements ainsi que la consommation de viande.
Le troisième sujet porte sur la substitution de capital aux énergies fossiles. L'investissement doit être au départ consenti. Cet effort n'a pas de rendement immédiat, mais, graduellement, l'investissement se traduira par une économie de coûts d'exploitation. C'est un mécanisme générique, qu'il s'agisse de l'investissement dans les énergies renouvelables, du nucléaire, de la voiture électrique ou de l'isolation des bâtiments en règle générale.
Cet investissement deviendra progressivement producteur de bien-être, selon des modalités assez inédites. En effet, les investissements visent habituellement à accroître les capacités de production ou à améliorer la productivité du travail ou du capital. En l'espèce, ce n'est pas le cas. Dans un premier temps, la hausse de l'investissement n'induira ni augmentation des capacités de production, ni accroissement de la productivité. Il y aura probablement un effet négatif, que nous avons chiffré avec beaucoup d'imprécision, mais qui devrait aboutir à la diminution d'un quart de point de croissance de la productivité du travail sur la période de transition, soit dix ans.
Ensuite, nous nous sommes efforcés de recenser les investissements appelés par la transition écologique, en rappelant que le mécanisme principal repose sur la substitution du capital aux énergies fossiles. Ces investissements reposent en grande partie sur les bâtiments : sur les 60 à 70 milliards envisagés, une cinquantaine portent sur les bâtiments. Il s'agit donc d'un effort important.
Le reste des investissements concerne les transports, secteur où peu a été fait jusqu'à présent. Nous émettons une hypothèse sur la diminution de la flotte de véhicules, avec le développement d'une alternative à la voiture individuelle. Naturellement, cette hypothèse peut être contestée. L'investissement des entreprises est de l'ordre de 13 milliards, soit un montant relativement modeste.
D'un point de vue macroéconomique, j'ai déjà indiqué qu'il s'agissait d'investir plus pour produire la même chose. En matière de distribution des efforts, la transition est spontanément inégalitaire. Le taux d'effort, soit le montant de l'investissement divisé par le revenu, est élevé sur le logement et la voiture, y compris pour les classes moyennes (une année de revenus) et les classes populaires (deux années de revenus).
Cela renvoie à la question de l'impératif d'équité devant la transition écologique, qui impose une réflexion, non seulement en France mais aussi à l'étranger. Une partie de l'Allemagne s'est récemment révoltée face à l'obligation de changer de chaudière. Ce sujet de l'équité est exigeant : il ne s'agit pas de l'équité au sens traditionnel, c'est-à-dire la répartition des revenus et de la richesse, mais de la contribution de chacun et de l'effort collectif pour la survie de la planète. Elle s'assimile d'une certaine manière à la conception de l'équité en temps de guerre, fondée sur une juste répartition des efforts et sur l'absence d'exonération.
Par conséquent, cela nous conduit à évoquer la contribution directe des finances publiques au financement de cette transition. Il est ainsi possible d'avoir soit une contribution directe des finances publiques, soit des approches d'ingénierie financière pour essayer de donner accès au crédit dans de bonnes conditions à des ménages.
Poste par poste, nous avons regardé comment pourrait se répartir l'effort entre le public et le privé. Pour les bâtiments publics, les efforts seraient publics ; le financement pour le tertiaire privé serait essentiellement privé. Pour les autres postes, un partage plus ou moins important est effectué. Au total, 50 % des efforts seraient assumés par les finances publiques.
Comment financer les dépenses d'investissement ? Plusieurs solutions existent et elles devront faire l'objet d'un choix, dont vous serez conduit à débattre.
La première possibilité porte sur le redéploiement des dépenses publiques, et en particulier des dépenses brunes. Aujourd'hui, 10 milliards sont dépensés par l'État, dans une acception étroite de ces dépenses brunes. Par exemple, le fuel aérien non taxé n'est pas compté dans ces 10 milliards. En effet, il ne s'agit pas d'une niche, ni d'une dérogation fiscale. Cependant, vous savez à quel point il est difficile de s'y attaquer : dans ce domaine, le courage, y compris politique, peut manquer. Quoi qu'il en soit, le redéploiement des dépenses publiques nous semble être le premier levier évident.
D'autres solutions relèvent de l'ingénierie financière, c'est-à-dire de la possibilité d'améliorer les conditions de financement de cet investissement pour le logement et la voiture. Elles permettent à des ménages d'avoir accès à des financements privés. Je pense notamment au leasing pour les véhicules électriques, même si cette formule ne rencontre pas un grand succès pour le moment. D'autres mécanismes peuvent également être envisagés.
Les deux autres solutions disponibles concernent l'endettement et les prélèvements obligatoires. Notre rapport estime qu'il ne faut pas exclure le recours à l'endettement public. S'il existe des raisons de vouloir éviter l'endettement, le climat n'en fait pas partie. En matière climatique, les investissements ont un taux de retour assez faible, ce qui entraîne une période d'amortissement longue. Dans le cas des collectivités territoriales, les investissements porteront sur la rénovation des bâtiments publics, notamment le changement du vecteur de chauffage.
Le rendement de cet investissement ne permettra pas un retour sur investissement avant une vingtaine d'années au minimum. Cependant, il est possible de construire sur ces caractéristiques un véhicule financier d'endettement. En achetant un titre particulier pour le financement de la rénovation des bâtiments publics, le rendement identifié sera gagé sur les économies réalisées sur les dépenses de chauffage et de climatisation à base de combustibles fossiles.
L'autre source de financement porte selon nous sur une hausse temporaire des prélèvements obligatoires, qui a particulièrement retenu l'attention publique. Nous proposons ainsi un prélèvement exceptionnel et non récurrent sur le patrimoine financier des ménages les plus aisés.
Il ne s'agit pas d'un « ISF vert », même s'il a été popularisé de cette manière. Il s'agit plutôt d'un prélèvement unique, explicitement non récurrent, calibré par rapport au montant du financement de la transition écologique. L'idée consiste ici à définir pour les différents ménages qui y seraient assujettis le montant du prélèvement. Cela serait générateur d'une dette vis-à-vis de l'administration fiscale, qui pourrait ensuite être acquittée selon différentes modalités. Il conviendrait alors d'agir de manière souple et étalée dans le temps, pour ne pas provoquer des cessions d'actifs massives.
Enfin, le sujet de la compétitivité est de très haute importance. L'Union européenne s'est portée aux avant-postes de la transition écologique, à travers un pari industriel : la transition économique doit permettre de construire une économie verte, en avance du reste du monde. Ce choix est notable et courageux. Néanmoins, des motifs d'inquiétudes demeurent. On a cru un peu trop vite que le jour où les États-Unis rejoindraient l'accord de Paris, ils le feraient selon les termes qui correspondent au choix européen. S'ils ont bien rejoint l'accord de Paris, ils ont cependant opéré un choix stratégique complètement différent : la convergence des ambitions n'est pas similaire à la convergence des stratégies.
Aujourd'hui, l'Union européenne s'est fixé un certain nombre de contraintes. Elle cherche à la fois à préserver sa compétitivité et à être championne du climat, de la discipline budgétaire et du multilatéralisme. Les contraintes qu'elle s'est données sont sans doute excessives en comparaison. Nous nous inquiétons ainsi du manque d'ouverture européenne sur ces sujets.
L'intérêt de votre rapport réside notamment dans les objectifs chiffrés et les modalités envisagées pour les atteindre. Vous avez indiqué que le coût de l'inaction est supérieur à celui de l'action. Aujourd'hui, vous fixez la nécessité d'investissement à près de 70 milliards. Avez-vous une idée de ce qu'aurait été ce coût si vous aviez réalisé cette étude il y a cinq ans ? Quelle est l'augmentation de ce coût à chaque année perdue ?
Je m'interroge sur deux points. Les chiffres évoqués sur le transport me semblent faibles, car ils ne tiennent pas compte de ce qu'il faut faire en matière ferroviaire. Or un plan de 100 milliards d'euros est annoncé jusqu'en 2040 dans ce domaine. Quelle est votre opinion à ce sujet ? De même, votre rapport n'évoque pas l'agriculture, qui nécessite pourtant des investissements en matière de biodiversité.
Vous annoncez pour les dix ans qui viennent un risque de configuration inflationniste, et vous considérez qu'en conséquence les banques centrales doivent préciser leur doctrine, conduire la politique monétaire avec doigté et sans doute même opérer un relèvement de leur cible d'inflation. Le moins que l'on puisse dire est que cela ne semble pas pour le moment l'orientation retenue, tant les hausses des taux directeurs sont brutales et continues. Compte tenu des garanties d'indépendance qui entourent les choix des banques centrales, espérer un tel ajustement temporaire de leur politique monétaire ne relève-t-il pas de l'incantation ? Comment pourrait-on en arriver à une réelle inflexion de leur part, qui reviendrait à devoir renier ce en quoi elles ont depuis très longtemps cru, c'est-à-dire une politique monétariste ?
Il est également suggéré une tarification duale de l'énergie pour les ménages les plus modestes, avec un quota d'énergie à coût subventionné et le reste au prix du marché. Pourriez-vous revenir sur ces propositions complémentaires ?
Je souhaite par ailleurs revenir sur vos propositions de financement. Vous dites quelque chose qui me plaît assez, puisque vous considérez que la seule dette dont on peut mourir est la dette écologique, bien davantage que la dette financière. Dans ce cadre, vous indiquez qu'il faut peut-être recourir à plus de dette pour financer des investissements. Le gouvernement prévoit 2,7 % de déficit pour 2027. Avez-vous quantifié le poids supérieur de la dette pour précisément financer l'investissement ?
Vous évoquez également le redéploiement d'autres dépenses publiques. Le gouvernement envisage aujourd'hui des baisses de dépenses, au moment où les problèmes de logement et de santé sont particulièrement aigus. Or vous soulignez bien que les enjeux d'égalité et de justice doivent être pris en compte lorsqu'on lance une politique de transition écologique.
La proposition fiscale que vous avez formulée dans votre rapport et qui a le plus marqué les esprits est celle relative à un prélèvement exceptionnel et temporaire sur le patrimoine des plus fortunés, pour financer le surcroît d'investissements dans la transition énergétique. Votre étude a été réalisée avant la publication des travaux de l'Institut des politiques publiques sur une « sous-fiscalisation » des milliardaires. Ces travaux mettent en lumière le fait que les ressources disponibles se quantifient en milliards, voire en dizaines de milliards, alors même que les personnes concernées sont très peu nombreuses. Cela a-t-il renforcé votre analyse sur la possibilité d'un prélèvement exceptionnel. Ce prélèvement ne permet-il pas également de réduire le coût carbone des ultra-riches ?
Je vous remercie pour la grande qualité de votre rapport et son apport à la réflexion globale. Vous avez bien indiqué que ce rapport ne se résume pas à une proposition sur la fiscalité du capital. Il vient alimenter notre réflexion à point nommé, compte tenu de l'imminence de la loi énergie climat, de la révision de notre stratégie bas carbone et de la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE). Par cette audition, nous nous inscrivons donc bien dans cet élan collectif de la planification écologique.
Votre rapport mesure également les impacts négatifs de la nécessaire transition écologique sur la croissance, les finances et les recettes de l'État, la baisse de la productivité et l'augmentation de l'inflation. Votre travail nous aide à réfléchir collectivement sur un sujet qui nous appelle à dépasser les clivages pour trouver des solutions concertées. Il n'y a pas de solutions simples, mais dans l'intérêt général, nous devons être innovants. Notre majorité privilégie les solutions européennes et mondiales : nous ne voulons pas rajouter un problème de compétitivité à notre pays. Je voudrais vous interroger à ce sujet : vous étiez pessimistes sur les solutions européennes, mais quel type de taxation pourrait-il être imaginé aux niveaux mondial et européen ?
Lors de la crise de la Covid, l'Europe avait accepté une dette européenne supplémentaire, ce qui serait une bonne solution selon nous. En effet, nous ne voulons pas aggraver les prélèvements obligatoires. Nous ne souhaitons pas non plus augmenter le niveau national de dettes, dont la charge devrait nous coûter 71 milliards à l'horizon 2027, sauf si un cadre européen nous permet d'avoir une dette verte et de libérer ces contraintes. Nous sommes méfiants sur les prélèvements temporaires, qui risquent toujours de se pérenniser, même s'il faut regarder toutes les solutions. Nous ne voulons pas donner un signal négatif au moment où notre pays s'est redonné de l'attractivité et connaît des investissements industriels, qui nous permettent aussi de financer la transition écologique.
L'institut I4CE évalue à 84 milliards d'euros les dépenses d'investissement publiques et privées en faveur du climat en France en 2021, en progression depuis 2015. Cette trajectoire vous semble-t-elle être la bonne ? Quelles sont les dynamiques que vous envisagez ?
Ensuite, les collectivités territoriales représentent deux tiers de l'investissement public. Considérez-vous que deux tiers de l'investissement public de la transition écologique doivent donc être portés par les collectivités territoriales, l'État concentrant son soutien là où le retour sur investissement est le plus faible ? Je pense notamment à l'isolation des bâtiments publics.
Ma troisième question porte sur la compensation des pertes de certaines recettes fiscales que vous envisagez. Vous anticipez une baisse logique des recettes sur les accises relatives aux énergies fossiles, mais vous évoquez un report sur la consommation d'énergie décarbonée. Si l'on comprend l'intérêt en termes de recettes, n'est-ce pas malgré tout un frein au développement des énergies décarbonées ?
Enfin, certains économistes se déclarent favorables à l'établissement d'une économie de guerre écologique, en appelant à la mise en place de politiques monétaires et budgétaires clairement expansionnistes, s'appuyant sur l'abandon des cibles d'inflation et des règles d'encadrement budgétaire en vigueur en Europe N'est-ce pas en creux ce que vous préconisez de manière prudente dans votre rapport ?
Vous nous interrogez sur le coût des investissements et le différentiel par rapport à il y a cinq ans. Nous avons regardé la répartition entre les différents secteurs et les grands leviers si l'on veut atteindre une réduction de 150 millions de tonnes de nos émissions de CO2, diminution nécessaire pour remplir nos objectifs. On observe une répartition de 50 millions dans le bâtiment et à peu près autant dans le transport.
Si nous avions fait ce calcul il y a cinq ans, les prix des véhicules auraient été sans doute plus élevés, mais la diffusion aurait été plus faible. En revanche, tout ce qui n'est pas réalisé une année donnée se reporte. S'il faut remplacer trois millions de chaudières au fuel par des pompes à chaleur, le surcoût conduit à un montant de 3 millions d'euros par an. Si on l'avait étalé sur une plus longue période, le coût par année aurait été plus faible
En matière de transports, nous avons bien pris en compte les investissements nécessaires dans le ferroviaire, pour permettre un report modal du transport de voyageurs et un report du fret vers le ferroviaire, soit deux milliards d'euros par an. Dans notre méthodologie, nous calculons l'investissement supplémentaire par rapport à ce qui aurait eu lieu dans un scénario où l'on ne parviendrait pas à réduire nos émissions de CO2 de 150 millions de tonnes. Nous nous concentrons donc sur le supplément nécessaire pour nous permettre d'atteindre ces objectifs.
Nous recensons ainsi les investissements dans les infrastructures de transport en commun, notamment ferroviaire, en particulier le fret et le transport de voyageurs.
Dans l'agriculture, les principaux leviers portent sur les émissions de méthane liés à l'élevage, les engrais azotés et la décarbonation des engins agricoles. Il est assez difficile d'estimer les besoins d'investissement associés à ces trois leviers ; nous avons pour notre part établi un chiffre assez conservateur de 2 milliards d'euros par an.
Vous nous avez interrogés sur les conséquences de ces investissements en matière de dette. On estime que les besoins d'investissements publics correspondent à 5 à 6 points de PIB à l'horizon à 2030 et au double en 2040. Nous regardons également l'impact possible d'une moindre croissance, qui conduirait à une moindre recette. Vous nous questionnez également sur l'impact des pertes de recettes fiscales jusque-là obtenues sur les énergies carbonées. Nous formulons aussi une hypothèse de baisse de la consommation totale nécessaire pour remplir les objectifs. Par conséquent, le sujet ne porte pas seulement sur la substitution d'énergies décarbonées à des énergies carbonées.
Dans un précédent travail, nous avions chiffré l'impact de la réduction de la consommation d'énergie à environ 13 points de PIB de dette à l'horizon 2050. Dans le rapport, nous avons fait l'hypothèse que ce manque à gagner de recettes fiscales serait compensé. À titre d'exemple, le Royaume-Uni a commencé à mettre en place des taxes sur les véhicules. On peut donc envisager des taxes sur les déplacements ou sur des comportements que l'on souhaite décourager.
S'agissant des dépenses d'investissement vert, nous calculons le montant des investissements nécessaires pour financer les principales mesures de réduction d'émissions à l'horizon 2030, de manière relative, c'est-à-dire par rapport à une situation dans laquelle nous n'aurions pas réalisé cet effort. Cependant, les ordres de grandeur ne sont pas forcément très différents de ceux d'I4CE.
S'agissant des collectivités locales, il faut observer ligne à ligne. Sur les bâtiments publics, nous supposons que les financements sont pris en charge par les administrations publiques, avec une répartition entre l'État et les collectivités locales. Le soutien aux ménages, qui représente une grosse partie des dépenses, ne sera vraisemblablement pas assuré par les collectivités locales. Nous pensons plutôt à des dispositifs nationaux, comme « MaPrimeRénov' ». Je ne suis pas sûr que le partage un tiers pour l'État deux tiers pour les collectivités soit donc conservé.
Si l'on parle de révolution industrielle et de transformation profonde, il y aura de lourdes implications sur les politiques publiques, et en particulier les politiques fiscales. Il importe donc de s'interroger sur ce que peut être la bonne fiscalité dans une économie décarbonée. Cette réflexion s'applique à la France mais aussi à d'autres pays.
Même si l'accord de Paris ne retient pas cette notion, notre rapport insiste également sur le budget carbone, c'est-à-dire le montant total des émissions que l'on s'autorise d'ici la décarbonation complète. Raisonner en termes de budget carbone évite ainsi la tentation de repousser dans le temps, mais oblige à l'inverse de se fixer des objectifs intermédiaires. En résumé, si nous visons la limitation des températures, la notion correspondante en matière de réduction des émissions est celle de budget carbone.
S'agissant du risque de configuration inflationniste, un certain nombre d'éléments nous laissent penser que l'environnement des années futures sera différent de celui que nous avons connu lors des vingt dernières années, où nous nous battions pour créer de l'inflation. Nous allons connaître une volatilité certaine, puisqu'un grand nombre de pays vont se tourner vers les énergies renouvelables et les matériaux critiques. Quelles que soient les perspectives, les désajustements entre l'offre et la demande seront très marqués. D'un point de vue interne, les investissements supplémentaires ne seront pas compensés par des capacités de production équivalentes. La configuration sera donc inflationniste.
Les banques centrales doivent donc réfléchir à la manière dont elles vont y répondre. Elles doivent préserver les acquis de la stabilité des prix et se comporter de façon responsable. Simultanément, elles sont contraintes de s'interroger sur la manière d'adapter leur stratégie. Je pense notamment au relèvement de la cible d'inflation, dans ce contexte de grande instabilité et d'évolution importante des prix.
S'agissant de la tarification duale de l'énergie, la réflexion consiste à dire que les ménages auront un quantum d'énergie à prix administré et qu'à la marge, ils paieront le prix du marché. Une réflexion poussée a déjà débuté en Allemagne et il convient à notre tour de nous y plonger, dans le cadre de la sortie du bouclier tarifaire. À la marge, l'incitation à économiser de l'énergie et à émettre moins doit être très présente. Nous sommes des individus rationnels. Il ne faut donc pas négliger ces pistes, quelles que soient les inévitables difficultés techniques.
Je vous félicite pour ce rapport commandé par le gouvernement dans le cadre de la planification écologique. Il est sans précédent, en France comme dans les pays comparables. Je retiens deux messages principaux, qui confortent la ligne de notre majorité. Tout d'abord, la croissance est compatible avec la neutralité carbone. Il existe donc bien une troisième voie, entre le déni social des uns qui prônent la décroissance, et le déni climatique des autres. Ensuite, les efforts coûteux et nécessaires qui se présentent à nous impliqueront une mobilisation générale. Il importe donc de mettre l'ensemble de nos politiques économiques à l'heure de la planification écologique.
Il faudra mobiliser au plus vite l'intégralité des investissements publics nécessaires. Ces dernières années ont déjà amorcé une augmentation considérable des moyens, qu'il faudra poursuivre, dans le cadre d'une visibilité pluriannuelle. Il faudra également le faire sans dissuader les investissements privés en France, qui sont tout aussi indispensables à la transition écologique, ce que votre rapport souligne.
C'est la raison pour laquelle nous ne croyons pas à une augmentation du taux global de prélèvement au niveau national. Cela nécessite d'autant plus d'être volontariste sur les autres questions : réorientation de la structure des dépenses et des prélèvements en faveur de la transition écologique, initiatives fiscales internationales, distinction depuis le niveau européen jusqu'au niveau local entre les investissements verts et les autres, mobilisation beaucoup plus forte du secteur bancaire et financier. La question se pose au niveau de l'État, mais aussi des collectivités locales. Quel est votre avis sur l'articulation entre les deux ?
Enfin, cela devra se faire dans un cadre économique profondément transformé. Le marché de l'électricité ne peut plus être considéré comme dans les années 2000. Nous avons impérativement besoin de prix plus stables et plus prévisibles pour déclencher les investissements nécessaires en faveur de l'électrification. La mondialisation doit également être repensée : nous devons conduire de pair transition et réindustrialisation. C'est le sens du redressement de notre compétitivité, des annonces du Président de la République, du pacte vert européen et de la taxe carbone aux frontières. À votre avis, quelles mesures supplémentaires devraient être mises en œuvre pour riposter aux politiques non coopératives chinoises et américaines ?
Je vous remercie pour votre présentation, qui expose les défis, notamment financiers, pour la transition énergétique et la décarbonation de notre pays. Comme nous le répétons régulièrement, cette décarbonation, y compris avec la relance du nucléaire, nécessite des investissements massifs dans notre pays. À ce titre, le projet de loi relatif à l'industrie verte qui va être discuté à l'Assemblée nationale dans les prochains jours apparaît notoirement insuffisant.
La question essentielle porte donc sur le financement. Or, et votre rapport ne tranche pas tout à fait sur ce point, le financement ne peut pas, ne peut plus, être fondé sur la dette et la hausse des prélèvements obligatoires. Dans le cadre de la décentralisation, le gouvernement demande aux collectivités locales d'investir massivement dans le fonds vert, fonds dans lequel on veut faire rentrer le maximum de projets locaux, y compris la revalorisation du patrimoine. Dans la commune de Noroy-sur-Ourcq située dans ma circonscription, le maire a demandé des subventions pour la réfection de la mairie. La préfecture l'a réorienté vers le fonds vert, alors même que le projet n'entre dans pas dans les critères.
Il est demandé aux collectivités d'investir sur le très long terme pour l'action climatique, qui n'est pas de leur compétence au départ. Identifiez-vous des recettes nouvelles ou de moindres dépenses, par exemple liées à la rénovation thermique des bâtiments ou au moindre coût de l'énergie par la relance du nucléaire, qui pourraient directement leur profiter ? Peut-on les quantifier ?
Enfin, ne pourrait-on pas réfléchir à un financement, non pas budgétaire, mais monétaire, à l'échelle européenne ? Jusqu'à présent, les facilités monétaires de la Banque centrale européenne (BCE) étaient orientées vers le secteur bancaire. Ne pourrait-on faire financer la transition énergétique par la BCE ?
Je vous remercie à mon tour pour votre rapport. Vous insistez sur le volume important d'investissements nécessaires si l'on veut que la France respecte ses engagements climatiques. Vous proposez pour cela un recours à l'endettement public et un prélèvement exceptionnel sur le patrimoine financier des 10 % les plus aisés. À la suite de votre rapport, les ministres de l'économie et du budget ont écarté tout recours à l'endettement, en estimant que l'on ne peut pas se permettre de s'endetter pour financer la bifurcation écologique.
Que vous inspire cette priorité donnée au désendettement plutôt qu'aux investissements en faveur de la transition écologique ? Pensez-vous que l'on peut se permettre de ne pas s'endetter malgré l'urgence climatique ? De son côté, Emmanuel Macron rejette tout prélèvement national sur les plus riches mais se prononce désormais pour une taxe verte à l'échelle internationale. Cette piste vous semble-t-elle crédible ? L'urgence climatique nous permet-elle, de votre point de vue, d'atteindre un accord à l'échelle internationale ?
En outre, plusieurs études montrent que le coût de l'inaction climatique sera bien plus élevé pour nos finances publiques que les investissements détaillés dans votre rapport. Un rapport de France Stratégie du mois de mars revient sur les conséquences de notre inaction et, selon les estimations des organisations internationales, le coût de l'inaction climatique pourrait atteindre 30 % du PIB mondial. Nous sommes loin des deux points de PIB supplémentaires d'investissement que vous évoquez dans votre rapport. Avez-vous envisagé de chiffrer le coût de l'inaction climatique ?
Il existe d'autres pistes de financement. Ainsi, 157 milliards d'euros sont versés chaque année au titre des aides publiques aux entreprises. Ne serait-il pas temps d'établir un grand inventaire de l'ensemble de ces dispositifs et de les conditionner à la réalisation d'objectifs environnementaux et sociaux de la part des entreprises aidées ?
Enfin, vous avez parlé d'Europe. Des discussions sont en cours sur la réforme du Pacte de stabilité et de croissance. Quelle est votre analyse des propositions qui sont actuellement sur la table ? Estimez-vous qu'elles soient de nature à favoriser les investissements que vous recommandez ? Sont-elles au contraire de nature à les empêcher ?
Pour financer l'ensemble des moyens nécessaires à une transition climatique, vous envisagez deux pistes financières principales. La première entraîne un dérapage supplémentaire de notre dette, avec 10 points supplémentaires de PIB à l'horizon 2030, soit 300 milliards de plus au niveau de notre stock de dette, 15 points à l'horizon 2035 ; et 25 points à l'horizon 2040. La France figure déjà parmi les trois pays les plus endettés d'Europe. Comment envisagez-vous la soutenabilité de notre dette future ?
Votre deuxième piste porte sur un prélèvement exceptionnel, pour 5 milliards d'euros, ce qui est loin de couvrir le besoin en financement. Je rappelle que le taux de prélèvement obligatoire est déjà de 45,4 points en France. Avez-vous imaginé d'autres pistes, notamment la baisse de la dépense publique, qui me semble nécessaire ? On peut aussi financer de nouvelles dépenses par une maîtrise de la dépense publique, ou éventuellement une exit tax, par l'élargissement de la taxe sur les transactions financières, notamment les transactions intraday, et enfin par une contribution sur les secteurs autoroutiers et maritimes. Enfin, vous parlez beaucoup du véhicule électrique. Intégrez-vous dans le bilan carbone de la création du véhicule les batteries et l'absence de filière en France ?
Je vous remercie pour votre rapport éclairant. Dans le chapitre IV, vous évoquez les trois mécanismes économiques pour parvenir à la neutralité climatique d'ici 2050, dont la substitution de capital aux énergies fossiles. Cela signifie qu'il faudra investir massivement pour sortir des énergies fossiles au profit d'un système énergétique fondé sur les énergies renouvelables. Vous ajoutez que cet investissement devra aussi concerner, « secondairement », le nucléaire.
Dans vos recommandations, la question du nucléaire est très peu traitée. Quelle place accordez-vous au secteur nucléaire pour parvenir à la neutralité climatique ? Pensez-vous qu'il faille continuer d'investir massivement dans ce secteur ? Quelle est votre opinion sur le programme d'un milliard d'euros dans le cadre de France 2030 destiné à faire émerger de nouveaux types de réacteurs, comme les petits réacteurs modulaires ou des réacteurs innovants produisant moins de déchets ?
Dans le chapitre X de votre rapport, vous suggérez de financer une partie des investissements supplémentaires nécessaires pour atteindre la neutralité climatique par un prélèvement explicitement temporaire, qui pourrait être assis sur le patrimoine financier des ménages les plus aisés. Nous vous rejoignons dans l'idée qu'il faille trouver de nouvelles sources de recettes pour financer la transition écologique. Dans votre rapport, vous n'évoquez pas l'option d'une mobilisation massive de l'épargne privée en faveur des objectifs de neutralité climatique. Ne pensez-vous pas que développement d'une finance durable et efficiente pourrait permettre de relever le défi de la transition ? Ne pensez-vous pas qu'un prélèvement forfaitaire exceptionnel sur les 3 000 milliards de stocks d'actifs financiers aurait potentiellement des effets pervers ? On pourrait imaginer qu'un certain nombre de ménages doivent vendre une partie de leurs actifs pour payer cet impôt exceptionnel, avec le risque qu'ils soient vendus à des ménages aux moyens financiers équivalents ne résidant pas en France car non soumis à cet impôt sur la fortune. Que pensez-vous par exemple de mettre en place des mesures fiscales pour mieux taxer les flux financiers à l'échelle européenne ? Avez-vous réfléchi à l'option consistant à réformer des impôts existants ?
Enfin, dans votre rapport, vous montrez que le coût budgétaire du financement de l'action pour le climat reste très incertain. Face à cette incertitude, le caractère exceptionnel de l'impôt proposé, même limité à trente ans, n'est-il pas discutable ?
Je salue le sérieux avec lequel vous vous êtes appliqués à démontrer, chiffres à l'appui, ce que nous essayons d'expliquer ici à nos collègues des partis présidentiels : il faut faire contribuer les plus riches. Chers collègues des partis présidentiels, votre politique est punitive en matière d'écologie quand vous refusez de faire participer les plus riches à l'effort collectif.
Par ailleurs, votre rapport renforce nos alertes sur le risque que font peser sur la cohésion sociale les exonérations de charges et les suppressions d'impôts décidées par le gouvernement. Il est sans ambiguïté sur la nécessité, grâce à cette taxation des plus riches, de redistribuer cet argent vers les ménages les plus modestes. À titre d'exemple, le gouvernement souhaite encourager l'achat des voitures électriques et la rénovation thermique des bâtiments. On peut considérer que c'est un vœu pieux, quand pour le même effort, il faut deux ans de salaire pour les classes populaires et une petite minute pour Bernard Arnault.
Le rapport que vous présentez répondait à une commande de la Première ministre, laquelle a finalement renoncé à vous écouter. Dès lors, les parlementaires que nous sommes doivent prendre la mesure de leurs responsabilités pour engager des réformes urgentes afin de faire de la transition écologique une réalité immédiate. Votre rapport nous porte donc à l'optimisme, puisque vous soulignez que dégrader notre solde budgétaire n'est pas une folie mais une nécessité. S'endetter pour le climat est une exigence pour envisager un futur viable.
Considérant qu'un investissement annuel autour de 30 milliards d'euros est nécessaire pour mener à bien cette transition, si l'on n'envisage de ne pas recourir à l'endettement et si le gouvernement refuse la contribution des plus aisés, quels autres leviers voyez-vous ? Soutenez-vous par exemple le constat des économistes de l'IPP sur la nécessité de taxer les dividendes non distribués stagnant dans les holdings des très, très riches ?
Nous partageons naturellement les constats de ce rapport, notamment trois points essentiels : la transition écologique nécessite beaucoup de moyens et d'investissements, notamment publics, le choix entre croissance et climat n'est pas une obligation incontournable et enfin, la réussite de la transition écologique ne peut se réaliser que si des mécanismes équitables sont mis en place.
Ce mur d'investissements et le peu de marges de manœuvre de nos finances publiques vous conduisent à explorer trois voies de financement : l'endettement, l'augmentation des prélèvements obligatoires et le redéploiement des dépenses, notamment des dépenses budgétaires ou fiscales brunes.
Vous proposez un prélèvement forfaitaire exceptionnel de 5 % sur l'actif financier net des 10 % de ménages les mieux dotés, qui rapporterait 150 milliards d'euros. À quel niveau de patrimoine financier correspondent ces 10 % ? Ne craignez-vous pas des effets de bord importants si un tel prélèvement était mis en place, notamment la transformation du capital financier des ménages visés vers d'autres actifs non soumis à cette taxation ? Comment garantir que ce prélèvement serait temporaire, alors qu'il ne couvrirait qu'une partie des investissements nécessaires à la transition écologique ? Comment un prélèvement temporaire pourrait-il financer une dépense qui ne l'est pas ?
Ensuite, selon vous, la transition écologique sera d'abord pilotée par les politiques publiques et non par les innovations technologiques et les marchés. Pourquoi ? Quel rôle va jouer l'investissement privé dans la transition écologique selon vous ?
Enfin, vous constatez qu'aucun traitement de faveur n'est envisagé pour l'investissement vert en matière de règles budgétaires européennes. Seriez-vous favorable à un traitement spécifique de la dette dite verte ?
Le 25 mai dernier, vous remettiez à la Première ministre votre rapport, qui dresse un constat clair : la transition écologique est nécessaire, elle doit être rapide, elle est possible mais elle est coûteuse. Vous estimez à cet égard qu'à l'horizon 2030, le surplus d'investissement public pour la transition écologique devra être de 25 à 35 milliards d'euros pour atteindre 55 % de diminution des émissions de gaz à effet de serre en 2030.
Par ailleurs, vous notez que le redéploiement des dépenses néfastes au climat est nécessaire mais ne suffira pas. Pour financer cette transition, vous dégagez quelques pistes, parmi lesquelles une contribution exceptionnelle sur le patrimoine financier des 10 % les plus riches, dont l'empreinte carbone est trois fois supérieure à l'empreinte carbone des 10 % les plus pauvres. Vous évoquez également un nécessaire recours à l'endettement. Nous portons ces propositions depuis de nombreuses années.
Malheureusement, dès le lendemain de la publication de votre rapport, Bruno Le Maire a balayé du revers de la main les propositions. Pourtant, vous aviez soutenu Emmanuel Macron dès 2017 et étiez même responsable de son programme économique. Mais cela n'a pas suffi pour que le gouvernement sorte de son dogmatisme économique et prenne les mesures qui s'imposent. Au lieu de cela, le gouvernement a vanté les mérites d'une mobilisation de l'épargne des Français. Pensez-vous sérieusement que la solution du gouvernement est pertinente et surtout suffisante ? Cette solution ne revient-elle pas à ne financer que des prêts alors que nous avons besoin de subventions, notamment pour la rénovation thermique des logements, que vous avez chiffrée entre 10 et 14 milliards d'euros ?
Nous ne pouvons remettre en cause la nécessité d'intervenir sur une transition vers l'économie verte. Mais votre chiffrage s'établit à plusieurs douzaines de milliards, alors que le contexte général pose un certain nombre de questions.
La dette publique avoisine les 3 000 milliards ; les taux d'intérêt augmentent, ce qui entraîne la hausse des remboursements d'intérêts ; l'émission de dette s'est établie en 2022 à 270 milliards. Le commerce extérieur ne constitue pas un appui, puisque le déficit s'est élevé à 54 milliards en 2022 et les besoins sociaux sont considérables. Dans cette commission, nous recevons également nombre d'entreprises d'État qui nous font part des niveaux d'endettement massifs. Je pense notamment à EDF ou la SNCF.
Le financement de l'action pour le climat tel que vous le définissez dans votre rapport est-il tenable ? À quel niveau de croissance estimez-vous que ce financement serait soutenable ?
M. David Amiel nous a interrogés sur l'articulation entre l'État et les collectivités locales. L'État s'est fixé des objectifs en termes de réduction des émissions, mais cela est moins le cas pour les collectivités locales. Certaines l'ont fait, parfois sans savoir si leurs objectifs sont cohérents avec les objectifs nationaux. Il est sans doute nécessaire que les collectivités fassent des contributions volontaires, comme pour l'Accord de Paris, dans la mesure où une grande partie des actions doivent se mener à cet échelon.
Faut-il établir des mesures supplémentaires par rapport aux États-Unis et à la Chine ? La volonté européenne d'être simultanément les champions du climat, de la rigueur budgétaire et du multilatéralisme se fait peut-être au prix de notre compétitivité. Nous indiquons bien que des modifications doivent sans doute être accomplies, mais cela ne doit pas être une raison de retarder les mesures. Si nous attendons que les pompes à chaleur ou les batteries soient toutes produites en France, nous n'atteindrons pas les objectifs 2030 de réduction des émissions.
M. Dessigny, plutôt que de réaffecter des recettes aux collectivités locales, notamment aux mairies, nous estimons qu'une des pistes consiste à permettre aux collectivités de pouvoir s'endetter sur des périodes plus longues, par exemple auprès de la Banque des territoires, afin d'effectuer un certain nombre de travaux.
M. Bompard, le chiffrage du coût de l'inaction doit s'envisager à trois niveaux : en France, en Europe et dans le monde. Le coût de l'inaction au niveau mondial est forcément majeur. Au niveau français, l'impact est plus limité, mais nous avons clairement indiqué dans la première partie du rapport que celui-ci est malgré tout très élevé. Nous ajoutons que la première période de dix années sera difficile, mais qu'au-delà, il existe la perspective d'une croissance verte. Les investissements seront difficiles à financer à court terme, mais sont un passage obligatoire pour aller vers une situation qui ne se résume pas à un renoncement à la croissance et encore moins au bien-être. En effet, il ne faut pas négliger les co-bénéfices, notamment en termes de santé, de la réduction des émissions.
S'agissant des autres pistes de financement, nous n'avons pas évoqué la conditionnalité des aides, notamment aux entreprises, qui est un sujet récurrent. Cela peut être intégré dans le redéploiement des dépenses : cela revient à réorienter nos finances publiques vers nos priorités. Si l'on va vers une économie décarbonée, il est logique d'avoir une fiscalité et des dépenses publiques cohérentes.
Nous envisageons d'autres pistes en matière de baisse des dépenses publiques car nous indiquons clairement que la première des solutions porte sur un redéploiement des dépenses fiscales (notamment brunes) ou non fiscales favorables aux énergies carbonées, mais aussi des autres dépenses. Mais nous ne sommes pas sûrs que cela suffise et il ne faut donc pas exclure une hausse temporaire de l'endettement ou de la fiscalité.
M. Plassard, il s'agit bien d'une dépense temporaire face à un mur d'investissement. Une fois que l'on aura décarboné l'économie, elle ne sera pas récurrente. Aujourd'hui, les investissements dans les équipements décarbonés sont plus onéreux que dans des équipements carbonés. Tout l'enjeu de la transition et des aides consiste à faire en sorte qu'à terme, le progrès technique ne soit pas plus cher. Nous avons chiffré simplement le surcoût des véhicules électriques par rapport aux véhicules thermiques, dont nous pouvons espérer qu'il sera temporaire.
Nous ne souhaitons pas que la transition soit pilotée par les politiques publiques, mais, simplement, nous le constatons. Contrairement aux révolutions industrielles précédentes, cette transition n'est pas tirée par des innovations technologiques : nous décidons collectivement de sortir des énergies fossiles, pour réduire nos émissions. L'enjeu consiste à faire en sorte que le pilotage public s'atténue graduellement au profit de l'innovation.
Le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières n'est pas une taxe aujourd'hui, car celle-ci signifierait disposer d'une unanimité à ce sujet. Il contraindra les importateurs à se procurer des certificats carbone à la hauteur du contenu carbone des importations. Il faut se féliciter de la mise en place de ce mécanisme, mais il reste très imparfait : il ne couvre pas les questions de compétitivité à l'exportation ou les importations de biens élaborés disposant d'un contenu carbone. Cependant, ce dispositif est appelé à se sophistiquer, en tout cas dans un monde où une partie de la planète continue de conserver des techniques de production du passé. Quoi qu'il en soit, il est pertinent que l'Europe soit à l'initiative sur ce sujet.
M. Dessigny nous a interrogés sur le financement monétaire à l'échelle européenne. Celui-ci a pu intervenir dans certaines circonstances, notamment récemment, mais il ne constitue pas la panacée. En effet, ce financement est en réalité rémunéré au taux d'intervention de la banque centrale. Aujourd'hui, il est donc relativement coûteux.
M. Bompard, j'attends toujours de connaître la position du gouvernement. Pour le moment, il a surtout été question des impossibilités en matière d'endettement et de prélèvement. Nous connaîtrons assez vite le plan de financement que le gouvernement envisage. S'il identifie des sources de financement par le déploiement et s'il assume, je n'aurai pas de raisons d'être insatisfait. Si l'on raisonne sur la durée et l'horizon 2030, le montant d'investissement sera élevé et il importe probablement d'identifier des ressources plus importantes.
L'ingénierie financière est la capacité d'élargir l'accès au crédit pour le financement d'un certain nombre d'investissements, y compris ceux des ménages. Cette idée doit être explorée, tout en faisant attention à ne pas mettre en avant des solutions qui ne seraient pas réellement pérennes.
S'agissant de l'analyse des propositions européennes, le débat sur la réforme des règles budgétaires est bloqué aujourd'hui. Aucun accord ne se dessine à ce jour, notamment un accord qui laisserait une place à l'endettement pour le financement de la transition climatique. Cela ne me paraît pas tenable : l'Union européenne ne peut nous contraindre à des injonctions contradictoires de réduction de dette tout en nous demandant de réaliser des efforts en matière de transition climatique. Je ne suis pas favorable à l'endettement public sans limite, mais il me semble nécessaire d'élargir l'espace et de le définir de manière plus précise.
Je suis opposé à l'idée de sortir tout investissement vert des règles budgétaires et des normes du Pacte de stabilité. En revanche, il sera nécessaire d'adopter une définition précise et rigoureuse du type d'investissement pour lesquels le recours à l'endettement est possible et des conditions générales de la soutenabilité de la dette publique permettant de faire une place à cet endettement. Je pense en particulier à l'investissement des collectivités territoriales, qui est un investissement dont le taux de retour est lent à se manifester. Il importe donc de trouver les véhicules d'investissement adaptés et de mesurer le rendement économique correspondant à cet endettement.
Mme Dalloz, notre proposition ne repose pas sur une taxation permanente d'une fraction de la population la plus aisée. À cet égard, la proportion des 10 % est essentiellement illustrative. La dette générée à destination de l'administration fiscale peut être réglée sur une durée plus ou moins longue, de manière à ne pas aboutir à une cession massive qui serait préjudiciable. Si l'on permet que cette dette soit acquittée au moment de la succession, on organise quelque chose qui ne provoque pas le séisme financier que vous semblez redouter. Le fait de le réaliser de la sorte permet de garantir également l'absence d'impact sur les comportements, puisque la taxation est explicitement non récurrente.
M. Lecamp, à l'horizon 2030 sur lequel nous nous sommes concentrés, le « nouveau » nucléaire ne constitue pas une réponse. Sur cet horizon, nous comptons essentiellement sur les énergies renouvelables et les investissements dans la réduction de demande d'énergie. En résumé, je ne suis pas hostile au nucléaire, mais il n'est pas un sujet à l'horizon 2030.
Mme Sas, je n'ai pas de regret sur l'ISF, qui n'était pas un bon impôt. Les travaux ont montré qu'il n'avait pas de bonnes propriétés redistributives, qu'il taxait le sommet de la classe moyenne mais pas les plus fortunés. S'il faut reprendre le débat sur la fiscalité du patrimoine, ne le reprenons pas avec la nostalgie de cet impôt.
Vous nous avez questionnés également sur le risque de fuite. Si l'on est crédible, que l'on constate la valeur du patrimoine financier, que l'on détermine le montant du prélèvement qui pourra avoir lieu sur une période longue et au choix du contribuable, on limite grandement les risques de fuite.
Ensuite, l'ingénierie financière fait partie de la discussion. Notre approche consiste à indiquer que le soutien budgétaire est probablement nécessaire et qu'il existe des limites à ce que l'on peut faire grâce à l'ingénierie financière. Dans l'équation, nous comptons la nécessité de pouvoir financer par endettement ou par prélèvement parce que nous pensons que cette ingénierie ne peut pas résoudre l'ensemble des problèmes.
Permettez-moi de vous remercier pour la qualité de votre rapport. Vous envisagez deux leviers de financement : le recours à la dette et l'impôt. Il existe un risque sur la dette publique de 10 points de PIB à l'horizon 2030, de 15 points à l'horizon 2035 ; et de 25 points à l'horizon 2040. Le niveau de la dette française étant déjà très préoccupant, existe-t-il un scénario alternatif pour financer la transition sans faire appel à la dette ? La solution de la dette européenne est-elle pour vous envisageable et peut-elle être un succès ?
Je m'interroge également sur la rénovation énergétique. Vous signalez que l'efficacité de la transition passera par la rénovation des logements, qu'il s'agisse du chauffage ou de l'isolation. Le premier poste du coût annuel de la transition climatique pour le financement public à l'horizon 2030 porte sur la rénovation des logements. De votre point de vue, existe-t-il un frein matériel à la rénovation ? Je pense notamment aux territoires de montagne où 50 % des logements devront être rénovés dans les années à venir. Avons-nous suffisamment de temps pour rénover techniquement l'ensemble de la partie publique et privée ?
Je souhaite vous interroger sur le rapport entre sobriété, croissance et modèle social. En effet, j'ai eu l'impression que vous n'aviez pas tous les deux le même positionnement. Vous nous avez indiqué que la sobriété était l'une des trois conditions nécessaires à la transition. Elle implique la baisse de la consommation matérielle, que vous semblez appeler de vos vœux. Or on connaît le lien direct entre consommation, production, redistribution et modèle social français. Comment maintenez-vous un modèle social et une redistribution élevée, compte tenu de ce que vous indiquez sur la sobriété ?
Il convient également d'évoquer la relocalisation industrielle en Europe, que les Républicains partagent avec le gouvernement. Aujourd'hui, l'amélioration du déficit de la balance commerciale recèle potentiellement des ressources grâce à la relocalisation et des économies de carbone. Pouvez-vous nous confirmer que nos importations constituent la première source d'émissions de gaz à effet de serre de notre pays ?
Enfin, vous avez mentionné l'ajustement carbone aux frontières. Cependant, quelle modification de ce mécanisme préconisez-vous afin d'obtenir un impact réel sur le changement de production des économies les plus polluantes ?
Je vous remercie pour vos travaux éclairants qui mettent en lumière les défis auxquels nous sommes confrontés. Nos objectifs de baisse des émissions carbone sont extrêmement ambitieux, en Europe comme en France. Qui dit objectifs ambitieux dit modalités de mise en œuvre et financements. Vous chiffrez les dépenses à 60 milliards d'euros, chiffrage qui ne fait plus débat.
L'enjeu du financement fait en revanche débat. Il y a donc urgence à agir et donc à planifier et financer des investissements de la France et de l'Union européenne. La loi de programmation sur l'énergie et le climat est désormais proche, mais nous avons également besoin d'une loi de programmation du financement de ces investissements. Si l'on part du principe que l'on ne s'endette pas et que l'on n'augmente pas les prélèvements obligatoires, on ne fera rien. Il faut donc rester ouverts pour construire une programmation crédible de la France et de l'Union européenne, afin d'assurer le financement de ces investissements.
Dans quelle mesure le prélèvement exceptionnel ne ferait-il pas obstacle à la politique du gouvernement dans sa politique économique de l'offre et de baisse de la fiscalité ?
Votre étude s'est penchée sur des objets tels que les batteries, l'éco-conception, l'efficacité énergétique, la circularité, la production d'énergies durables et l'électrification. Même si à l'horizon 2030 le nucléaire n'est pas un enjeu massif, il faut d'ici là maintenir le parc et reconstituer une filière, notamment pour la maintenance, mais également pour la construction de nouveaux EPR.
Les rapporteurs du budget spécial à l'énergie se sont penchés sur cette question et se sont interrogés dans les termes de votre rapport, c'est-à-dire sur la clef de répartition entre le contribuable d'un côté et le consommateur d'énergie de l'autre. Dans quelques mois, la commission de régulation de l'énergie devra fixer le prix de long terme de l'énergie électrique. Il faudra alors décider si EDF doit porter une masse de prêts considérable ou si, au contraire, il est nécessaire de trouver d'autres modes de financement. J'aimerais connaître votre regard à ce propos, dans la mesure où il s'agit d'un enjeu déterminant pour la soutenabilité de l'effort que vous décrivez pour nos concitoyens.
Dans votre rapport, vous documentez et objectivez le lien entre réindustrialisation et transition écologique. Personne ne conteste ici la nécessite de mener à bien cette transition. Avez-vous pris connaissance des travaux d'Alexandre Rambaud et d'Hervé Gerbaud, chercheurs d'AgroParisTech, sur la comptabilité écologique ? Ces derniers nous invitent ainsi à prendre en compte les coûts écologiques non payés et à intégrer le coût de sanctions nécessaires dans le budget. Il ne s'agit pas de conduire un exercice de budget vert, mais de faire entrer les actions climatiques dans la méthodologie comptable.
Je souhaite aborder un sujet qui est quelque peu laissé de côté. Quand on évoque des incidences économiques de l'action pour le climat, on entend souvent parler de la nécessité de réduire notre consommation d'eau, qui aura un impact économique certain sur nos industries et notre agriculture. Or moins on produit, plus on importe. Quelle est la stratégie de notre pays en matière d'usage des eaux grises ? On apprend qu'à Barcelone, la moitié de l'eau qui sort du robinet est recyclée, contre seulement 0,2 % pour l'instant en France. Si nous adoptons une approche malthusienne, nos agriculteurs le paieront au prix fort et nous serons obligés d'importer davantage.
Un récent rapport de synthèse de l'Académie des technologies vient d'être publié. Il fait état de six constats, dont le quatrième me paraît particulièrement intéressant. Il indique ainsi que la sobriété nécessite une approche globale combinant comportements individuels, mesures systémiques, infrastructures, réglementations et évolutions de la structure de nos consommations. Le sixième constat est de l'ordre de la recommandation : il faut agir sans tarder.
Au-delà des chantiers sur lesquels cette Académie a concentré son étude (énergie, mobilité, habitat, industries, matériaux, agriculture et infrastructures), existe-t-il des champs d'action sur lesquels la sobriété pourrait être mise en œuvre ? Puisque nous sommes à la veille du projet de loi de finances pour 2024, avez-vous évalué ce qui se passera si nous n'agissons pas dès 2024 par rapport à vos prévisions de 2030 ?
Je ne suis pas sûr que la sobriété remette en cause notre modèle social, qui a connu de nombreuses transformations. Il s'est maintenu, il s'est développé malgré tout. La sobriété est un nouveau défi, qui nécessite des réponses et des adaptations du modèle social, mais elle ne le met pas en péril.
Ensuite, les importations ne constituent pas la première source des émissions. Il existe effectivement un écart entre l'empreinte carbone et les émissions territoriales, mais il est assez limité.
Mme Dupont, nous avons besoin d'allonger l'horizon et de mettre en cohérence la programmation des finances publiques et la programmation de l'action climatique. Les outils doivent être construits : l'horizon de l'action climatique est long et la mise en cohérence est indispensable. Il est essentiel de fournir de la visibilité et de programmer l'ensemble des réflexions et des actions sur les finances publiques au-delà de cet horizon. Ce sujet vous occupera donc pendant un temps certain.
M. Lacresse, votre question est particulièrement pertinente. Comment allons-nous répartir la charge de l'investissement dans le nouveau nucléaire entre l'endettement d'EDF et l'augmentation du prix de l'électricité ? Je ne connais pas suffisamment le dossier pour vous répondre de manière précise.
M. Mournet, la comptabilité écologique doit se développer. Lors des travaux préparatoires que nous avons menés, j'ai été frappé de voir à quel point l'idée de raisonner en PIB net des dommages causés à l'environnement est aujourd'hui acceptée par la communauté des comptables nationaux. Cela n'est certes pas facile à réaliser et implique notamment de mettre un prix sur les émissions et les dommages à la biodiversité. Cependant, le virage conceptuel a été opéré, ce qui me semble très important.
Vous nous avez interrogés sur les risques de freins matériels relatifs à la rénovation énergétique, dans la mesure où il s'agit déjà d'un des premiers postes de dépenses publiques. Les risques de difficultés de déploiement sont réels, ce qui doit nous conduire à commencer le mouvement rapidement.
Ensuite, la sobriété n'implique pas une baisse de la consommation matérielle. Elle implique une baisse de la consommation d'énergie. Limiter le gaspillage en éteignant son ordinateur la nuit, réduire la température de son logement ou privilégier le vélo permettent de réduire la facture énergétique et de consommer d'autres choses. Si nous organisons les villes différemment pour que les gens aient moins besoin de prendre leur voiture, ils consommeront moins d'essence, que nous importons par ailleurs. Il n'est certes pas simple de penser la sobriété, mais elle ne réduit pas nécessairement l'utilité, ni la consommation, ni le PIB. À l'horizon 2030, l'action de la sobriété se déploiera surtout dans le champ de la mobilité, à travers notamment le report modal, mais aussi dans le champ de l'agriculture.
Mme Arrighi, l'investissement que nous ne réaliserions pas en 2024 devrait être mené en 2025. Par exemple, les deux mesures de remplacement de trois millions de chaudières au fuel ou à gaz d'ici 2030 doivent entraîner 10 millions de tonnes de réduction des émissions.
En vous écoutant je me disais qu'il serait nécessaire de chiffrer le coût de l'inaction. Si ce calcul n'est pas effectué, le coût demeure imaginaire, impalpable.
Lors de ce travail, nous avons découvert que nous savons très peu de choses : nous sommes très loin de mesurer avec précision le coût de l'inaction, autant en France qu'à l'international.
Membres présents ou excusés
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire
Réunion du mercredi 28 juin 2023 à 11 heures
Présents. - M. David Amiel, Mme Christine Arrighi, M. Karim Ben Cheikh, M. Manuel Bompard, Mme Émilie Bonnivard, M. Mickaël Bouloux, M. Michel Castellani, M. Thomas Cazenave, M. Jean-René Cazeneuve, M. Éric Coquerel, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Jocelyn Dessigny, M. Fabien Di Filippo, Mme Stella Dupont, Mme Sophie Errante, Mme Marina Ferrari, M. Luc Geismar, Mme Perrine Goulet, M. David Guiraud, M. Victor Habert-Dassault, Mme Nadia Hai, M. François Jolivet, M. Emmanuel Lacresse, M. Michel Lauzzana, Mme Constance Le Grip, M. Pascal Lecamp, Mme Charlotte Leduc, M. Mathieu Lefèvre, Mme Patricia Lemoine, Mme Véronique Louwagie, M. Denis Masséglia, Mme Marianne Maximi, M. Benoit Mournet, Mme Christine Pires Beaune, M. Christophe Plassard, M. Robin Reda, M. Sébastien Rome, M. Xavier Roseren, M. Alexandre Sabatou, Mme Eva Sas
Excusés. - M. Christian Baptiste, M. Charles de Courson, M. Joël Giraud, M. Daniel Labaronne, Mme Karine Lebon, M. Philippe Lottiaux, M. Jean-Paul Mattei, Mme Mathilde Paris, M. Charles Sitzenstuhl
Assistaient également à la réunion. - M. Ian Boucard, M. François Ruffin