M. David Amiel nous a interrogés sur l'articulation entre l'État et les collectivités locales. L'État s'est fixé des objectifs en termes de réduction des émissions, mais cela est moins le cas pour les collectivités locales. Certaines l'ont fait, parfois sans savoir si leurs objectifs sont cohérents avec les objectifs nationaux. Il est sans doute nécessaire que les collectivités fassent des contributions volontaires, comme pour l'Accord de Paris, dans la mesure où une grande partie des actions doivent se mener à cet échelon.
Faut-il établir des mesures supplémentaires par rapport aux États-Unis et à la Chine ? La volonté européenne d'être simultanément les champions du climat, de la rigueur budgétaire et du multilatéralisme se fait peut-être au prix de notre compétitivité. Nous indiquons bien que des modifications doivent sans doute être accomplies, mais cela ne doit pas être une raison de retarder les mesures. Si nous attendons que les pompes à chaleur ou les batteries soient toutes produites en France, nous n'atteindrons pas les objectifs 2030 de réduction des émissions.
M. Dessigny, plutôt que de réaffecter des recettes aux collectivités locales, notamment aux mairies, nous estimons qu'une des pistes consiste à permettre aux collectivités de pouvoir s'endetter sur des périodes plus longues, par exemple auprès de la Banque des territoires, afin d'effectuer un certain nombre de travaux.
M. Bompard, le chiffrage du coût de l'inaction doit s'envisager à trois niveaux : en France, en Europe et dans le monde. Le coût de l'inaction au niveau mondial est forcément majeur. Au niveau français, l'impact est plus limité, mais nous avons clairement indiqué dans la première partie du rapport que celui-ci est malgré tout très élevé. Nous ajoutons que la première période de dix années sera difficile, mais qu'au-delà, il existe la perspective d'une croissance verte. Les investissements seront difficiles à financer à court terme, mais sont un passage obligatoire pour aller vers une situation qui ne se résume pas à un renoncement à la croissance et encore moins au bien-être. En effet, il ne faut pas négliger les co-bénéfices, notamment en termes de santé, de la réduction des émissions.
S'agissant des autres pistes de financement, nous n'avons pas évoqué la conditionnalité des aides, notamment aux entreprises, qui est un sujet récurrent. Cela peut être intégré dans le redéploiement des dépenses : cela revient à réorienter nos finances publiques vers nos priorités. Si l'on va vers une économie décarbonée, il est logique d'avoir une fiscalité et des dépenses publiques cohérentes.
Nous envisageons d'autres pistes en matière de baisse des dépenses publiques car nous indiquons clairement que la première des solutions porte sur un redéploiement des dépenses fiscales (notamment brunes) ou non fiscales favorables aux énergies carbonées, mais aussi des autres dépenses. Mais nous ne sommes pas sûrs que cela suffise et il ne faut donc pas exclure une hausse temporaire de l'endettement ou de la fiscalité.
M. Plassard, il s'agit bien d'une dépense temporaire face à un mur d'investissement. Une fois que l'on aura décarboné l'économie, elle ne sera pas récurrente. Aujourd'hui, les investissements dans les équipements décarbonés sont plus onéreux que dans des équipements carbonés. Tout l'enjeu de la transition et des aides consiste à faire en sorte qu'à terme, le progrès technique ne soit pas plus cher. Nous avons chiffré simplement le surcoût des véhicules électriques par rapport aux véhicules thermiques, dont nous pouvons espérer qu'il sera temporaire.
Nous ne souhaitons pas que la transition soit pilotée par les politiques publiques, mais, simplement, nous le constatons. Contrairement aux révolutions industrielles précédentes, cette transition n'est pas tirée par des innovations technologiques : nous décidons collectivement de sortir des énergies fossiles, pour réduire nos émissions. L'enjeu consiste à faire en sorte que le pilotage public s'atténue graduellement au profit de l'innovation.