La commission des affaires économiques a auditionné M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications.
Monsieur le ministre, nous sommes ravis de vous accueillir pour faire le point sur votre feuille de route des prochains mois, dans le cadre de notre cycle d'auditions qui nous permet d'entendre tous les membres du Gouvernement relevant du domaine de compétences de la commission des affaires économiques. Vous intervenez après votre ministre de tutelle Bruno Le Maire, vos collègues ministres délégués Roland Lescure et Olivia Grégoire, et la ministre de la transition énergétique Agnès Pannier-Runacher.
Mes collègues vous adresseront certainement des questions très diverses. En matière de télécommunications, vous serez probablement interrogé sur la mise en œuvre des engagements pris par les opérateurs, en 2018, pour accélérer la couverture mobile des territoires, ce qu'on a appelé le New Deal mobile. Pourriez-vous faire le point, en particulier, sur l'obligation de couvrir les axes routiers prioritaires ?
La diffusion de l'usage du numérique dans les entreprises, plus spécifiquement dans les très petites entreprises (TPE) et les petites et moyennes entreprises (PME), est un autre défi qu'il vous appartient de relever. Olivia Grégoire et vous-même avez présenté récemment le dernier baromètre France Num, qui vise à mesurer le degré de numérisation des entreprises et leur appétence pour les outils numériques. La crise sanitaire a démontré tout l'intérêt de ces outils pour garder le lien avec les clients et pour accéder à un marché plus étendu. Pourriez-vous nous donner des éléments d'information sur les soutiens mis en place pour ces entreprises et sur les résultats obtenus ?
Le développement du numérique soulève des interrogations sur de nombreux points : l'appropriation de ces nouveaux outils par certains de nos concitoyens ; la préservation de notre souveraineté, qui passe par la régulation des plateformes numériques et par des instruments tels que la stratégie nationale pour le cloud, lancée en mai 2021 – nous étions d'ailleurs récemment ensemble, en Alsace, pour inaugurer un nouveau data center ; la cybersécurité, autre élément de notre souveraineté ; la sobriété énergétique de toutes les infrastructures mobilisées par le numérique. Je ne peux omettre ce dernier sujet, sachant que notre commission a engagé un important travail sur la crise énergétique actuelle. Voilà quelques pistes pour nourrir notre débat.
C'est un grand honneur pour moi de prendre pour la première fois la parole à l'Assemblée nationale, devant votre commission. C'est un grand plaisir aussi de retrouver ici un certain nombre d'anciens collègues députés, pour lesquels j'ai de l'estime, et qui ont contribué, par leurs rapports et leurs différents travaux, à l'action menée par le Gouvernement depuis cinq ans. Nous aurons sans doute beaucoup de sujets à traiter ensemble, qui relèvent ou non du domaine de la loi. Je souhaite entretenir des relations étroites avec les membres de la commission qui s'intéressent aux sujets dont j'ai la charge. Les membres de mon cabinet se tiennent à votre disposition à tout moment.
J'évoquerai pour commencer la politique que nous devons mener pour que la France tienne son rang de grande nation du numérique, politique que j'entends conduire sous l'autorité de la Première ministre et du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Il s'agit de relever trois défis : soutenir l'innovation et assurer notre autonomie stratégique ; garantir le respect des droits et des devoirs dans l'espace numérique ; faire en sorte que la transition numérique bénéficie à chacun et à la société dans son ensemble. Innover, protéger et démocratiser, tel sera donc le triptyque qui guidera mon action, résolue, au service de nos concitoyens.
Le premier défi, celui de l'innovation et de l'autonomie stratégique, a trait à la souveraineté du pays. Rappelons que depuis cinq ans, sous l'impulsion du Président de la République, la France a retrouvé le goût de l'audace et de l'innovation. Près d'un million d'entreprises ont été créées l'année dernière, ce qui est un record. L'année 2021 a également été une année record pour le nombre de licornes, ces entreprises à très forte croissance et au rayonnement européen et mondial. Nous avons en effet atteint le chiffre de vingt-sept licornes, contre trois au début du quinquennat précédent. C'est un motif de satisfaction, mais c'est surtout le signe d'un changement de climat : il est désormais possible d'innover et de grandir, en France, quand on est une entreprise, alors que c'était plus difficile auparavant. Notre ambition est d'aller plus loin : le Président de la République a annoncé un objectif ambitieux de cent licornes à la fin du quinquennat, dont vingt-cinq vertes et trois dans le domaine de la cybersécurité.
Ce soutien à l'innovation doit nous permettre de gagner notre autonomie stratégique sur des briques technologiques clés, pour lesquelles d'autres régions du monde ont une longueur d'avance : la cybersécurité, l'intelligence artificielle, le quantique, la 5G et le cloud. Autrement dit, il s'agit de toute l'infrastructure numérique sur laquelle reposent les nombreuses applications développées par les entreprises innovantes au cours des cinq dernières années. Il ne faut pas oublier non plus le metavers, dans lequel nous devons insuffler un esprit français.
Comment y parvenir ? Tout d'abord, grâce au formidable levier que représente le plan « France 2030 » et à cinq stratégies d'accélération pour le numérique, qui correspondent aux cinq briques technologiques que je viens d'évoquer – la cybersécurité, l'intelligence artificielle, le quantique, la 5G et le cloud. Ensuite, grâce à l'accompagnement sur mesure fourni par la direction générale des entreprises et la mission French Tech, à toutes les étapes de la vie de ces entreprises, avec une attention particulière pour certains secteurs. Nous avons lancé cette année plusieurs programmes d'accompagnement de start-up, dédiés à des technologies avancées de l'agriculture, de la transition écologique et de la Deep Tech. Enfin, grâce à la formation – question que j'entends prendre à bras-le-corps avec mes collègues Sylvie Retailleau, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, et Carole Grandjean, ministre déléguée chargée de l'enseignement et de la formation professionnelle. Le Président de la République s'est engagé à ce que quatre cent mille professionnels du numérique soient formés d'ici à la fin du quinquennat.
Le deuxième défi est celui de la régulation, c'est-à-dire le respect des droits et des devoirs, avec la mise en œuvre de l'encadrement nouveau des géants du numérique. Je tiens à saluer les deux réussites majeures de la présidence française de l'Union européenne que sont le règlement sur les marchés numériques ou Digital Markets Act (DMA) et le règlement sur les services numériques ou Digital Services Act (DSA), qui forment l'un des cadres réglementaires les plus ambitieux depuis cinquante ans et changent véritablement la donne : pour la première fois, une région du monde, l'Europe en l'occurrence, parle d'une seule voix pour imposer aux géants du numérique de nouvelles règles du jeu.
En adoptant le DMA, qui instaure une régulation économique, l'Europe a adressé un message fort, entendu dans l'ensemble du monde : désormais, si l'on veut accéder au marché unique, il n'est plus possible de recourir à des pratiques anticoncurrentielles, comme c'était le cas auparavant. Aujourd'hui, quand vous achetez un smartphone, on vous vend en même temps un navigateur, un service de messagerie, etc. C'est ainsi que les géants du numérique se sont octroyé des situations de monopole sur les marchés du monde entier, singulièrement en Europe. Grâce au DMA, un certain nombre de ces marchés vont être rouverts. Cela donnera plus de liberté aux consommateurs et permettra aux entreprises françaises et européennes d'entrer sur ces marchés, qui leur étaient fermés jusqu'à présent. C'est la grande nouveauté.
Le DSA, quant à lui, met au premier rang la question de la responsabilité. Jusqu'à présent, les grands réseaux sociaux ou les grandes places de marché n'étaient pas tenus de rendre compte des contenus – qu'il s'agisse des messages, des biens ou des services – transitant sur leur plateforme. Désormais, avec le DSA, elles devront se doter de processus de signalement et être en mesure de retirer, si nécessaire, ces messages, biens ou services.
Si les entreprises ne respectent pas ces règles, elles seront soumises à des pénalités ou amendes pouvant atteindre 6 % du chiffre d'affaires pour le DSA et 10 % pour le DMA. Je salue la volonté du Président de la République, du commissaire européen au marché intérieur Thierry Breton et de mon prédécesseur Cédric O, qui ont mené ces négociations au niveau européen et ont permis à ces deux textes d'aboutir.
Pour adapter la législation française à ces deux règlements, il nous faudra discuter ensemble d'un projet de loi, qui devrait être présenté dans le courant de l'année 2023. Je souhaite lancer, d'ici à la fin octobre, les premières consultations politiques à ce sujet. Ce texte sera peut-être l'occasion d'aller un peu plus loin. Il pourra être nourri par les états généraux du droit à l'information, pour ce qui concerne notamment la confiance dans les médias en ligne, l'économie de l'attention et la transparence des plateformes. Ces états généraux seront lancés cet automne et seront copilotés par le ministère de la culture, le ministère de l'Europe et des affaires étrangères et les services mis à ma disposition.
Il nous faudra aussi aller plus loin au niveau européen. Cet automne se tiendront, sous présidence tchèque, des discussions sur l'accès aux données, dans le cadre du Data Act, mais aussi sur l'intelligence artificielle et sur l'identité numérique.
Vous êtes régulièrement amenés à évoquer les questions européennes. Il est très important de faire connaître ces nouvelles règles qui vont s'imposer aux géants du numérique. C'est une vraie révolution en matière de responsabilité et de concurrence. Les entreprises devront s'y soumettre si elles veulent accéder au marché du plus grand espace démocratique du monde.
Autre enjeu de régulation dans l'espace numérique : la cybersécurité. Pas plus tard qu'hier soir, la mairie de Caen a été la cible d'une cyberattaque. Il s'agit là d'une des grandes menaces de notre époque. Elle se transforme pour contourner nos défenses et touche l'ensemble des acteurs de la société et de notre économie, que ce soient les administrations, les entreprises – petites et grandes – ou les particuliers. Nous aurons prochainement à transposer la directive dite « NIS 2 », relative à la sécurité des réseaux et qui étendra le champ des entités suivies par l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI). Ce sera l'occasion d'aller plus loin dans les dispositifs de protection.
Dans le cadre du plan « France relance », l'ANSSI avait proposé un parcours de cybersécurité aux administrations, aux collectivités territoriales et aux hôpitaux. Sur les 950 opérateurs d'importance vitale (OIV) concernés, 900 ont déjà suivi ce parcours de sécurisation. L'hôpital de Corbeil-Essonnes, victime d'une cyberattaque très brutale en août dernier, avait engagé le processus, sans toutefois aller jusqu'à son terme. Ayons bien conscience de l'importance de la menace et de la nécessité de la prévenir : dans le cas de l'hôpital de Corbeil-Essonnes, où travaillent 3 700 agents, la téléphonie et toutes les communications électroniques, notamment les messageries, ont été mises hors service en quelques minutes, ainsi que les alarmes dans les salles de naissance. L'hôpital a été contraint de procéder en urgence au transfert de treize bébés très prématurés vers d'autres hôpitaux franciliens, ce qui ne s'était jamais produit auparavant dans notre pays.
Le plan « France 2030 » comprend en outre une stratégie d'accélération en matière de cybersécurité. L'ambition est de porter à 25 milliards d'euros le chiffre d'affaires du secteur de la cybersécurité, c'est-à-dire de le multiplier par trois d'ici à 2025. Trois axes majeurs ont été définis : la formation aux métiers de la cybersécurité ; l'accompagnement public et financier de l'élévation du niveau de sécurisation ; la sensibilisation de nos concitoyens. Sur ce dernier point, les travaux parlementaires menés sous la précédente législature vont nous aider. Ainsi, nous sommes en train de mettre en œuvre le « cyberscore », issu d'une proposition de loi du Sénat. J'aurai l'occasion de faire un bilan de notre stratégie « cyber » dans quelques semaines, lors d'un déplacement au Campus Cyber. J'invite d'ailleurs les membres de la commission intéressés à visiter ce campus, car c'est un exemple assez unique en Europe de coordination des écoles, des entreprises et des administrations concernées.
Dernier sujet relatif à la régulation : la protection des enfants et des adolescents contre le cyberharcèlement. Aujourd'hui, l'âge moyen auquel ils reçoivent leur premier smartphone est de 9 ans, c'est-à-dire lors de leur entrée au collège ou peu avant. Nous travaillons à des mesures de prévention, en lien étroit avec le ministre de l'éducation nationale. Nous devons faire en sorte que les élèves de sixième bénéficient d'une sensibilisation aux dangers auxquels ils s'exposent sur internet, puis aient accès à des mécanismes de remédiation, lorsque le cyberharcèlement est constaté. Il existe un numéro unique, le 30 18, qui est également une application. Nous devons continuer à le faire connaître pour que les enfants victimes de cyberharcèlement trouvent une oreille attentive et une remédiation.
Il y a ensuite la question du contrôle parental. Je salue les travaux parlementaires menés sous la législature précédente, en particulier la loi adoptée à l'initiative de Bruno Studer. Nous avons pris les décrets d'application au début du mois de septembre pour que, dès l'année prochaine, un système de contrôle parental unifié et harmonisé soit disponible sur l'ensemble des smartphones et tablettes commercialisés dans notre pays. Ce dispositif permettra de contrôler le temps passé sur les écrans et intégrera, de manière automatique, les contraintes d'âge sur les contenus illicites et sur les différents réseaux sociaux.
Le troisième défi est de faire en sorte que la transition numérique bénéficie à tous. La première étape consiste à parachever la couverture du territoire en réseaux fixe et mobile – vous l'avez évoqué, Monsieur le président.
Le déploiement de la fibre est sans doute le plus grand chantier du début du XXIe siècle. En France, c'est un grand succès, puisque 72 % des locaux sont désormais éligibles, contre seulement 26 % en Allemagne. La France est en avance : c'est le pays le plus fibré d'Europe. Néanmoins, il y a des mécontentements, légitimes, de celles et ceux qui ne sont pas encore raccordés ou subissent des problèmes de qualité. Vous en avez entendu parler dans vos circonscriptions ; j'en ai entendu parler très souvent dans la mienne. C'est la raison pour laquelle j'ai réuni, au début du mois de septembre, les opérateurs d'infrastructures, les opérateurs commerciaux et l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP). Les opérateurs ont pris hier de nouveaux engagements pour garantir la qualité des raccordements à la fibre et la certification des services qui interviennent sur les points de mutualisation.
S'agissant du réseau mobile, je tiens à rendre hommage à mes prédécesseurs, Cédric O et Julien Denormandie, qui ont lancé le New Deal mobile, grand plan d'effacement des zones blanches. Celui-ci a permis de couvrir 90 % du territoire en 4G. Quelque 3 795 sites ont déjà bénéficié du programme et 600 nouveaux sites seront couverts. J'informerai très prochainement les parlementaires et les présidents de conseils départementaux de la dotation pour 2023.
Dernier sujet relatif au déploiement : l'extinction des anciens réseaux, en particulier de celui en cuivre, que nous allons déposer. Cette opération est importante pour des raisons économiques – nous n'allons pas maintenir deux réseaux en parallèle – mais aussi énergétiques, puisque la fibre est trois fois moins énergivore que le cuivre. Au début de cette année, Orange a présenté son plan à l'ARCEP, qui l'a mis en consultation. Des expérimentations ont lieu. La commune de Lévis-Saint-Nom dans la deuxième circonscription des Yvelines, que je connais bien, est la première de France où le réseau de cuivre a été déposé, après avoir été intégralement fibrée. Si nous voulons réussir la bascule définitive du cuivre vers la fibre, il nous faudra apporter des garanties à nos concitoyens. Cette question nous occupe beaucoup.
L'étape suivante est d'assurer à chacun l'accès aux services numériques, en réduisant la fracture numérique. Il s'agit, d'une part, d'inclure les personnes. En France, 13 millions de personnes déclarent rencontrer des difficultés dans l'accès aux services numériques. Cédric O et Jacqueline Gourault ont lancé un dispositif, les conseillers numériques, qui est très apprécié des élus locaux, des associations et des acteurs de l'inclusion. Je compte annoncer jeudi prochain le lancement d'un travail de réactualisation de la stratégie nationale pour un numérique inclusif. Il s'agit, d'autre part, d'inclure les entreprises : si nous sommes très en avance pour la fibre, nous sommes très en retard en matière de numérisation des PME et des TPE.
Pour que le numérique bénéficie à tous, il faut par ailleurs que le secteur réduise, comme tous les autres secteurs, son empreinte carbone. L'action que nous allons mener s'inscrira dans le cadre de la planification écologique voulue par le Président de la République et engagée par la Première ministre. L'empreinte carbone du numérique n'est pas aussi importante qu'on le dit généralement. En revanche, elle est appelée à progresser très fortement. Environ 80 % de cette empreinte est imputable à la fabrication des terminaux, à savoir les smartphones et autres tablettes. Tout l'enjeu est donc d'accélérer le déploiement de nos filières de reconditionnement et de réemploi de ces appareils. Nous aurons des discussions à ce sujet, peut-être dès l'examen du projet de loi de finances pour 2023.
L'attention du monde se concentre aujourd'hui sur la guerre et sur les crises géopolitiques, climatique, économique. C'est bien normal. Mais une menace plus subreptice, plus souterraine, n'a cessé de croître ces dernières années : la menace cyber. D'après les évaluations de PricewaterhouseCoopers, du Forum de Davos ou encore de France Assureurs, c'est désormais le risque numéro un. Les cyberattaques sont une activité très lucrative menée par des organisations criminelles extrêmement organisées, devenues pour certaines de véritables entreprises commerciales de la rançon. Ces attaques continueront à se multiplier.
En 2021, plus d'une entreprise française sur deux a subi au moins une cyberattaque. Selon une étude réalisée en Occitanie, 60 % des PME attaquées déposent le bilan. Les hôpitaux sont également des cibles tantôt privilégiées, tantôt d'opportunité pour les cybercriminels, avec au moins une attaque hebdomadaire en 2021. Ces attaques mettent parfois directement en danger la vie des patients – vous l'avez rappelé, Monsieur le ministre délégué, en évoquant le rançongiciel qui a récemment frappé l'hôpital de Corbeil-Essonnes. Il nous faut réévaluer le risque cyber à son juste niveau et lutter résolument contre ce fléau.
Plusieurs initiatives ont été prises et vont dans le bon sens. Je pense bien sûr aux moyens alloués pour renforcer notre résilience : 1 milliard d'euros débloqués l'an dernier – c'est du jamais-vu ! – pour faire émerger des champions français de la cybersécurité et garantir la maîtrise des technologies essentielles pour notre souveraineté ; 176 millions d'euros dans le cadre du plan « France relance » pour renforcer la sécurité de nos institutions, tout en dynamisant l'écosystème français ; une enveloppe de 20 millions d'euros annoncée par le ministre de la santé qui s'ajoutera aux 25 millions d'euros déjà prévus pour accompagner les hôpitaux et empêcher que la santé de nos concitoyens ne soit prise en otage.
Pouvez-vous nous en dire plus sur la manière dont sont répartis ces fonds, en particulier ceux du plan de relance ? Pouvez-vous nous exposer votre feuille de route en la matière ? Quelles sont les priorités face aux cybermenaces ? Quelles sont les ambitions quant au renforcement des moyens de lutte contre la cybercriminalité ? Quid, par exemple, du filtre anti-arnaque ?
Je tiens à saluer votre engagement constant sur ces questions d'importance majeure, Monsieur Bothorel.
Dans le cadre du plan de relance, vous l'avez rappelé, 176 millions d'euros ont été consacrés à la prévention des attaques contre les OIV – hôpitaux, collectivités territoriales et opérateurs publics. Sur cette somme, 25 millions d'euros étaient destinés aux hôpitaux, auxquels va s'ajouter une enveloppe supplémentaire de 20 millions d'euros consentie par le ministre de la santé à la suite de l'attaque subie par l'hôpital de Corbeil-Essonnes. C'est une bonne nouvelle, car cela nous permettra de porter de 150 à plus de 300 – nous faisons donc plus que le doubler – le nombre d'hôpitaux bénéficiant du parcours de sécurisation.
Le plan « France 2030 » comprend une stratégie d'accélération, dotée de 1 milliard d'euros, qui vise à la fois à développer la filière et à renforcer la souveraineté de notre pays, selon plusieurs axes : le développement de solutions innovantes, la structuration de l'écosystème et la formation. La stratégie est bien engagée puisque quatre appels à projets, deux appels à manifestation d'intérêt et un programme et équipement prioritaire de recherche (PEPR) exploratoire ont d'ores et déjà été lancés. Je veillerai, en lien avec vous, à ce que cette stratégie d'accélération réponde bien aux besoins de notre pays.
Enfin, il s'agit de protéger nos concitoyens, qui sont régulièrement la cible de ces attaques dans leur vie privée. Le Président de la République a pris comme engagement de campagne de proposer à tous les Français un filtre anti-arnaque, qui sera gratuit et ouvert à tous – vous avez été l'un des promoteurs de cette idée. Ce dispositif filtrera de manière préventive toutes les adresses internet correspondant à des sites malveillants connus, ce qui évitera aux internautes peu avertis de télécharger un logiciel infecté susceptible d'endommager ou de crypter des données. C'est un chantier technique, auquel nous devrons travailler collectivement pendant environ un an. Le travail est engagé ; nous avons bon espoir de le faire aboutir, conformément au souhait du Président de la République.
Le grand sujet, le seul qui compte pour l'avenir de la puissance française, c'est notre souveraineté numérique. La seule question que nous devons nous poser est la suivante : comment allons-nous bouter hors de France les GAFAM et autres BATX ? Notre pays est parasité par des entreprises étrangères qui pillent les données des Européens, sans vergogne et, malheureusement, avec votre complicité.
En effet, vous êtes le marchepied des ambitions des entreprises américaines et chinoises, et les exemples sont légion. Votre gouvernement a accompagné l'infiltration de Microsoft dans le projet de cloud européen Gaia-X, dans celui d'Orange, dénommé « Bleu », et dans le Health Data Hub. Votre inaction coupable face à TikTok favorise le vol de données de millions de jeunes. Vous avez laissé dernièrement la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, conclure avec les États-Unis un marché consistant à troquer les données personnelles des Européens contre du gaz de schiste.
Au Rassemblement national, nous connaissons l'importance du numérique pour les décennies à venir et nous savons que les données des Européens ne sont pas négociables. Les mesures que nous proposons sont claires. Premièrement, nous désirons un contrôle plus étroit des investissements étrangers en France. Nous ne pouvons plus nous permettre de perdre des entreprises comme PriceMinister ou Aldebaran. L'été dernier encore, nous avons perdu un fleuron électronique français, Exxelia, passé sous pavillon américain. Deuxièmement, nous voulons, comme l'avait promis le commissaire européen Thierry Breton, que les données françaises soient obligatoirement hébergées en Europe. Troisièmement, nous souhaitons que la commande publique soit enfin réservée aux entreprises françaises et européennes.
Nous ne sommes pas condamnés à vivre dans la dépendance permanente. Il suffit de regarder autour de nous : au Danemark, on bannit Google des écoles ; aux États-Unis, on tente d'interdire TikTok ; en Inde, c'est déjà fait. Quand d'autres pays prennent des mesures fortes, la France hésite. Il y a urgence. Combien faudra-t-il de données vendues, pillées ou volées pour que votre gouvernement agisse ?
En tant que rapporteur pour avis du projet de loi de finances sur les crédits consacrés aux communications électroniques et à l'économie numérique, je tiens à relayer ici le cri de désespoir que j'entends chez tous les professionnels du secteur lors de mes auditions : quand la commande publique se tournera-t-elle uniquement vers des solutions françaises et européennes ?
Grâce à la volonté et à la ténacité du Président de la République et du commissaire européen Thierry Breton, la France est le premier pays du monde libre – laissons de côté la Chine – à avoir imposé aux GAFA, grâce à l'Europe, un certain nombre de règles conditionnant leur intervention sur le marché unique. Le DMA et le DSA constituent ensemble, je l'ai dit, une véritable révolution.
Vous vous inquiétez de l'hébergement des données. Or c'est la France qui, la première, a créé une certification, SecNum Cloud, qui va s'imposer aux administrations et aux entreprises. Elle s'imposera soit d'elle-même soit par la contrainte, si jamais les entreprises ne font pas le nécessaire pour le stockage des données sensibles des Français. C'est aussi la France qui, au niveau européen, plaide pour la création d'une certification similaire avec l'ensemble de ses partenaires.
Vous citez d'autres pays, mais nous n'avons aucune leçon à recevoir. C'est la France qui, en Europe, fait entendre cette voix-là : nous ne pouvons plus nous laisser marcher sur les pieds, nous devons rouvrir les marchés aux entreprises européennes, nous devons protéger les données des Européens.
La loi relative à la croissance et la transformation des entreprises (PACTE) a renforcé la capacité du Gouvernement à contrôler les investissements étrangers. En 2021, 338 dossiers ont été déposés et 67 ont donné lieu à une autorisation assortie de conditions. L'administration veille attentivement à ce qu'aucune pépite ni aucune technologie française ne quittent notre pays.
L'article 152 de la loi PACTE, que nous avons adoptée lors de la précédente législature, a effectivement renforcé la capacité de contrôle sur les investissements dans les entreprises stratégiques. Il a notamment permis d'étendre la liste des secteurs concernés, fixée par décret. Un rapport à ce sujet est remis régulièrement à l'Assemblée.
Je regrette que la sobriété énergétique et l'écologie numérique aient fait l'objet du dernier point de votre propos introductif. Cela montre clairement que cette question ne domine pas votre feuille de route, bien que vous soyez rattaché à la ministre chargée de la planification écologique.
En juillet dernier, néanmoins, vous avez lancé le groupe de travail « Numérique et télécommunications ». Votre objectif était que les acteurs du secteur s'engagent dans la sobriété énergétique et réduisent de 10 % leur consommation d'énergie dans les deux ans. Je rappelle que le numérique, c'est 12 % de la consommation d'électricité, 3 % de la consommation d'énergie finale et 3,5 % des émissions de gaz à effet de serre, soit davantage que le trafic aérien. On sait aussi qu'entre 2017 et 2025, la consommation énergétique du numérique aura doublé. Au regard de ces chiffres, la réduction de 10 % que vous planifiez paraît bien dérisoire. Quant à la mesure prise par Orange – l'extinction de la lumière dans ses boutiques trente minutes après la fermeture – et aux autres effets d'annonce de ce type, ce sont des pis-aller.
Monsieur le ministre délégué, ne tombez pas dans l'inaction climatique ! Ne cédez pas à la facilité ! Dans ce domaine, les enjeux sont considérables, et il y a beaucoup à faire. À titre de contribution, je cite quelques exemples : la limitation de l'essor de l'internet des objets ; l'optimisation du taux d'utilisation des data centers ; la nécessité de contenir la croissance du parc d'équipements – vous avez évoqué rapidement le reconditionnement ; la question de la sobriété des données et les mesures à prendre pour contenir l'explosion du trafic – compte tenu des changements de mode de vie, notamment du télétravail.
Faites de l'écologie numérique un axe majeur, voire un axe directif de votre feuille de route ! Il manque dans celle-ci des objectifs chiffrés et une planification. Il faut planifier tout cela dès maintenant. Prêtez-y attention, car c'est ce qui sera déterminant dans les cinq prochaines années face à la crise énergétique, les ressources de la planète étant limitées.
Concernant la neutralité du net, ne faites pas ce que Donald Trump a fait aux États-Unis en 2018. En Europe, nous sommes protégés par un arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne. Je vous demande de ne pas soutenir Thierry Breton dans sa volonté de remettre en cause le principe fondamental de la neutralité du net.
Madame Chikirou, vous m'avez attribué une nouvelle autorité de tutelle ! Je suis rattaché à Bruno Le Maire, non à la ministre de la transition énergétique. Cela dit, cela n'a guère d'importance, puisque l'ensemble des ministères seront associés à la planification écologique voulue par le Président de la République et mise en œuvre par la Première ministre.
J'ai évoqué la transition écologique à la fin de mon propos liminaire, mais, vous l'avez rappelé avec raison, c'est le premier sujet dont je me suis emparé lorsque j'ai pris mes fonctions : très vite, j'ai convoqué les opérateurs et les acteurs du numérique pour leur demander de s'engager à réduire leur consommation énergétique, qui représente environ 10 % de la consommation énergétique dans notre pays. C'était nécessaire compte tenu de la situation énergétique de notre pays, et ils ont été parmi les premiers à s'engager dans cette voie.
Concernant l'objectif de long terme, à savoir la neutralité carbone, il faut prendre les sujets dans le bon ordre : le premier est le reconditionnement des terminaux, puisque leur fabrication représente 80 % de l'empreinte carbone du numérique ; viennent ensuite la consommation des data centers, qui en représente 15 %, et les usages, qui comptent pour 5 %.
La connexion aux réseaux internet et mobile conditionne l'attractivité des territoires. Dans votre exposé liminaire, vous avez indiqué que 90 % du territoire était désormais couvert et que le Gouvernement avait résolu la question des zones blanches. Or force est de constater qu'il y a encore des problèmes de connexion, notamment dans les zones rurales, ce qui crée des difficultés tant pour les particuliers que pour les administrations. L'attractivité économique en pâtit également, puisque les entreprises ne peuvent pas s'implanter là où les réseaux ne sont pas accessibles. Quelles mesures le Gouvernement a-t-il inscrites dans sa feuille de route pour garantir à tous les Français, dès à présent, une couverture mobile et internet correcte ?
Des particuliers et des entreprises nous font en outre remonter des difficultés de plus en plus fréquentes dans leurs relations avec les opérateurs de téléphonie. Avez-vous prévu de fluidifier ces relations, qui posent de vrais problèmes ?
Certains territoires ont mis en place des politiques de déploiement de la fibre, mais celui-ci se fait de manière inégale sur le territoire. L'État envisage-t-il un pilotage national pour vérifier que l'ensemble du territoire est couvert ?
Les Républicains ont émis le souhait que soit indiquée une préférence française ou européenne lors de l'achat de logiciels, notamment à l'occasion des commandes publiques. Le Gouvernement compte-t-il faire sienne cette proposition ?
Vous avez tout à fait raison, Madame Blin, il reste encore des zones blanches dans notre pays, mais nous sommes en train de les effacer l'une après l'autre. Dans le cadre du New Deal mobile, 724 pylônes ont été installés cette année, et 600 le seront ensuite, ce qui supprimera des zones blanches résiduelles. Nous vous ferons connaître la liste des sites dès qu'elle sera finalisée. Nous allons continuer à identifier les zones concernées jusqu'en 2025 et à y installer des pylônes jusqu'en 2027.
Il existe des freins au déploiement du New Deal mobile. Ce sont, premièrement, les délais d'installation des pylônes : dix-huit mois en moyenne après la publication de l'arrêté correspondant. Vous serez saisis prochainement d'un projet de loi relatif à l'accélération de la production d'énergies renouvelables. En réalité, la question est assez similaire pour l'installation des antennes. Deuxièmement, il y a des contradictions entre l'objectif de déploiement rapide des antennes et certaines dispositions du code de l'environnement. Le droit du littoral, en particulier, freine l'installation d'antennes le long des côtes, où les zones blanches sont dès lors plus difficiles à effacer.
Pour la fibre, l'objectif est de généraliser le très haut débit en 2025, pour que l'on puisse ensuite procéder à la dépose définitive du réseau de cuivre. Nos concitoyens bénéficieront alors de garanties de débit, de tarif et de continuité. Je rappelle que 72 % des locaux sont désormais éligibles à la fibre en France, contre 26 % en Allemagne. Néanmoins, nous ne relâcherons pas notre vigilance tant que le territoire ne sera pas intégralement couvert.
Ma question concerne le volet numérique du plan « France 2030 ». Le numérique peut être un vecteur merveilleux en bien des domaines, pour bien des usages, apportant échange, créativité et, souvent, des solutions à des problèmes que l'on croyait insolubles. Cependant, dernièrement, la ville de Caen, l'hôpital de Corbeil-Essonnes ou encore, l'année dernière, près de chez moi, l'hôpital de Villefranche-sur-Saône ont été victimes de cyberattaques. Dans ce dernier cas, toutes les données ont été perdues et l'établissement a mis plusieurs semaines pour retrouver un fonctionnement normal. Chaque jour, la cybercriminalité déploie de nouveaux visages, plus dangereux, plus offensifs.
Devant ce risque, qui pose d'importants problèmes pour la souveraineté nationale, le Gouvernement a choisi d'affecter 2,6 milliards d'euros au renforcement des positions de notre pays dans plusieurs secteurs d'avenir, dont la cybersécurité. La question de la protection des données personnelles est également un élément capital de notre souveraineté. Quelle est la stratégie à long terme de l'exécutif en matière de cybersécurité, au travers notamment du quatrième programme d'investissements d'avenir (PIA 4) et du plan « France 2030 » ?
Merci pour votre question, Monsieur Daubié, qui me donne l'occasion de compléter les propos que j'ai tenus tout à l'heure.
Face à la menace cyber, dont l'attaque sur la mairie de Caen nous rappelle une nouvelle fois la réalité, l'État agit et déploie des mécanismes de prévention et de protection. Il fait en sorte que les moyens soient « au bon niveau » : c'est tout le sens de la stratégie d'accélération que j'ai évoquée. Pour remédier aux difficultés telles que celles que nous avons connues à l'hôpital de Corbeil-Essonnes – à Caen, la situation est relativement maîtrisée, grâce à des mesures prises très rapidement après l'attaque –, il faut aussi que l'ANSSI, qui joue un rôle essentiel en la matière, dispose des moyens humains adéquats. C'est pourquoi la Première ministre, qui a autorité sur l'ANSSI par l'intermédiaire du Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN), a décidé de renforcer substantiellement ces moyens, avec une projection pluriannuelle. La tranche 2023 permettra le recrutement d'un effectif d'environ cinquante agents. Nous resterons vigilants quant à l'adéquation des capacités de prévention, d'intervention et de remédiation à l'évolution de la menace.
Pour les particuliers, les collectivités et les petites entreprises, il existe un outil précieux et trop peu connu : le groupement d'intérêt public Action contre la cybermalveillance (GIP ACYMA). Il s'agit d'un dispositif essentiel, qui monte en puissance depuis sa création, en 2017. Il communique sur son site internet cybermalveillance.gouv.fr des informations utiles relatives à la sensibilisation et à la prévention. Son guide pratique sur le télétravail sécurisé, en particulier, a été très largement consulté pendant la crise de la covid, au début de laquelle un pic de cyberattaques avait été constaté. Le GIP remplit également une fonction d'assistance et de mise en relation pour les victimes d'incidents. Il leur propose des conseils et l'intervention de prestataires de sécurité de qualité, labellisés « Experts cyber ». De tels prestataires sont présents sur l'ensemble du territoire.
Nous disposons d'un autre outil très intéressant, l'Alerte cyber, qui repose sur la mobilisation des organisations patronales : lorsqu'une PME fait l'objet d'une cyberattaque, l'information est partagée, dans les minutes ou les heures qui suivent, avec l'ensemble du réseau d'entreprises auquel elle appartient.
Dans quelle mesure les opérateurs de télécommunication seront-ils protégés en cas de délestages ou de coupures d'électricité cet hiver ? Il convient d'assurer les communications, mobiles et fixes, vers les services de sécurité et d'urgence, et entre ces services. À défaut, les Français pourraient être dans l'impossibilité de les joindre, sachant que l'autonomie de certains équipements ne dépasse pas deux heures. En d'autres termes, les opérateurs relèveront-ils du prioritaire ?
Au côté d'autres opérateurs européens, Orange, Bouygues et SFR ont appelé les géants de la Big Tech à les soutenir dans le déploiement et l'entretien des réseaux fixe et mobile. Que pensez-vous de cette démarche ? Dans cette période de forte augmentation des coûts et d'appel à la sobriété, il s'agirait, en fin de compte, de faire contribuer les plus gros générateurs de trafic. Quelle est votre position sur ce partage des coûts ?
Avez-vous réfléchi pour 2023, à titre exceptionnel, à une limitation de la hausse de l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseau (IFER) mobile résultant de son indexation sur l'inflation ? On connaît son incidence très forte sur les coûts et, partant, sur le déploiement des réseaux.
Il y a effectivement des réflexions à mener sur l'IFER. À ma connaissance, aucune mesure n'est inscrite à ce sujet dans le projet de loi de finances pour 2023, mais nous aurons probablement l'occasion d'y revenir pour les textes budgétaires à venir.
Votre deuxième question me permet de compléter ma réponse à Mme Chikirou. Le commissaire européen Thierry Breton défend un projet de péage qui s'imposerait aux cinq principaux éditeurs de contenu – dont Netflix et Disney –, qui occupent environ 55 % de la bande passante. Ce projet suscite un débat : certains font valoir que le péage permettrait de faire contribuer précisément ceux qui utilisent la bande passante au financement des infrastructures et les inciterait à envoyer un flux moins important, plus sobre et plus économe ; d'autres invoquent la neutralité du net et s'y opposent. Le Gouvernement soutient l'initiative de Thierry Breton, de même qu'un certain nombre de députés ici présents.
Les éventuels délestages sont, pour moi, un sujet de préoccupation depuis que j'ai pris mes fonctions. La Première ministre l'a dit, l'État met tout en œuvre, notamment en mobilisant les acteurs, pour éviter les délestages, qui sont une solution de dernier recours. Néanmoins, nous préparons cette éventualité, en étroite collaboration avec la ministre Agnès Pannier-Runacher et le SGDSN. Il s'agit d'élaborer un dispositif technique permettant de préserver les nœuds de raccordement prioritaires du réseau de télécommunication, pour éviter qu'un délestage éventuel ne conduise à une perte de connectivité, y compris à l'extérieur de la maille de délestage concernée. Les craintes des opérateurs sont légitimes ; celles que vous évoquez le sont aussi. Les opérateurs sont régulièrement conviés à des réunions techniques, en présence d'Enedis et de l'État, pour préparer et anticiper ce scénario de dernier recours.
C'est ce que nous sommes en train d'examiner. L'important était de superposer la carte du réseau Enedis à celle des antennes et des nœuds de raccordement, ce qui n'avait jamais été fait jusqu'à présent.
Je voudrais évoquer la relation existant entre le client et les différents opérateurs qui interviennent en France. Contracter un abonnement avec un opérateur, ce n'est pas trop compliqué ; mais le modifier… c'est la croix et la bannière ! Je prends l'exemple d'un couple : monsieur décède, madame veut modifier le nom de l'abonné ou supprimer l'abonnement téléphonique de monsieur ; au bout de trois mois, ce n'est toujours pas fait ! Et il s'agit d'un opérateur bien connu. De même, lorsqu'une ligne est détériorée, impossible de se faire comprendre et d'obtenir une intervention. Dans ma circonscription, une entreprise de travaux publics a dû attendre un mois et demi avant que l'opérateur procède à la réparation. C'est incompréhensible ! Il est inadmissible, en 2022, qu'une entreprise ne puisse pas être jointe par ses clients.
J'en viens au déploiement de la fibre optique. Il y a cinquante ans, la France a déployé son réseau de cuivre de manière consciencieuse et méticuleuse sur tout le territoire, y compris dans les hameaux les plus reculés. En 2022, notamment dans les zones rurales, le déploiement de la fibre est réalisé par des entreprises parfois peu connues – des sous-traitants de sous-traitants de sous-traitants. Le travail est bâclé : des fibres mal fixées aux poteaux tomberont au premier coup de vent ; dans des maisons ou des appartements, les murs, portes et fenêtres sont purement et simplement massacrés. Il n'y a plus de conscience professionnelle. Que peuvent faire le Gouvernement et l'ARCEP ?
Quel monde construisons-nous ? Alors que la fibre devrait rapprocher les populations, elle les éloigne. Pis, elle les désespère quant à la capacité des opérateurs et de la puissance publique à agir.
Vous avez raison, Monsieur Benoit, il y a un certain nombre de problèmes associés au déploiement de la fibre. Le déploiement du cuivre a pris plusieurs décennies ; celui de la fibre, moins de dix ans. C'est notamment parce que l'opération a été très rapide – plus que partout ailleurs dans le monde – que nous constatons des problèmes de qualité. Cela ne les rend pas plus acceptables, puisque chacun doit pouvoir bénéficier d'une connexion, mais cela les explique en partie.
Les opérateurs commerciaux et les opérateurs d'infrastructures ont pris en compte ces problèmes qui remontaient de toutes parts – notamment par l'intermédiaire des parlementaires, y compris moi-même – et ont pris des mesures. Ainsi, les chaînes de sous-traitance que vous avez évoquées n'existent plus. Les opérateurs chargés du déploiement se sont engagés à limiter la sous-traitance à deux niveaux. Cette semaine, ils ont pris de nouveaux engagements pour améliorer les processus de raccordement, notamment pour éviter les dégâts que vous avez mentionnés dans les logements. Nous veillerons, avec l'ARCEP, à ce que la situation s'améliore dans les prochaines semaines et les prochains mois.
Si nous voulons convaincre l'ensemble de nos concitoyens de basculer définitivement du cuivre vers la fibre, il faudra à terme que l'on puisse leur garantir un débit minimal, un tarif maximal et des délais de rétablissement raisonnables en cas d'interruption de leur connexion. Nous discutons de ces questions avec l'ARCEP.
Je pense comme vous qu'il devrait être aussi simple de résilier un abonnement que d'en souscrire un. Si tel n'est pas le cas, il faut que l'on trouve les moyens d'avancer dans cette direction.
Qu'il s'agisse de déclarer ses revenus en ligne, de renouveler une demande de logement social ou de solliciter des aides sociales, l'administration française recourt de plus en plus à la dématérialisation des démarches. C'est une bonne chose, car cela permet une accessibilité immédiate et la sécurisation des documents en même temps qu'une réduction de l'empreinte écologique, grâce à une économie de papier. Pour bon nombre de nos concitoyennes et de nos concitoyens, cela facilite les démarches ; pour d'autres, en revanche, le tout-numérique se dresse comme une barrière, qui les empêche parfois d'accéder à certains de leurs droits.
Les obstacles sont nombreux. Il existe encore, sur notre territoire, des inégalités d'accès à internet, notamment en matière de qualité du réseau. Par ailleurs, les publics les plus défavorisés sont les plus touchés : 34 % des personnes peu ou pas diplômées n'ont pas accès à internet depuis leur domicile ; c'est aussi le cas des 16 % des ménages les plus modestes. La fracture numérique est également très importante dans les territoires d'outre-mer.
Les inégalités d'équipement persistent : si 83 % des ménages possèdent un ordinateur, ce taux tombe à 68 % chez les 10 % de ménages les plus modestes, alors qu'il atteint 95 % chez les ménages les plus aisés. Seules 47 % des personnes de plus de 75 ans ont accès à un ordinateur.
À cela s'ajoute la difficulté de maîtriser ces outils en l'absence de formation. Selon l'INSEE, l'illectronisme, c'est-à-dire l'inaptitude à utiliser les outils numériques du quotidien, touche 17 % de la population, soit près de 13 millions de Françaises et de Français. Ce taux grimpe à 67 % chez les personnes de plus de 75 ans.
Le service public doit être en mesure de répondre aux besoins de la population : formation des citoyens aux outils du numérique ; accès à un réseau internet de qualité ; achat de matériel et de fournitures. Dans votre propos introductif, vous avez évoqué rapidement le fait que la transition numérique doit bénéficier à chacun. Pouvez-vous apporter des précisions à ce sujet ?
C'est exact, Madame Bourouaha, 13 millions de Français déclarent rencontrer des difficultés d'accès aux services numériques. C'est le Défenseur des droits, Jacques Toubon, qui avait évoqué ce chiffre en 2020. Vous avez bien détaillé les aspects du problème : accès au réseau internet, équipement, maîtrise des outils. Dans ces 13 millions de Français figurent des personnes âgées, mais aussi des jeunes, pourtant très à l'aise avec les réseaux sociaux ou les jeux vidéo. Certains d'entre eux ne savent pas envoyer un message électronique ou répondre à un questionnaire en ligne lorsqu'il s'agit de dialoguer avec l'administration ou une entreprise privée qui offre tel ou tel service.
La réduction de la fracture numérique est un enjeu majeur : la France ne pourra pas être une grande nation numérique si elle laisse sur le bord du chemin toute une partie de sa population. C'est donc un pilier important de l'action que nous voulons mener. Je l'ai dit tout à l'heure, nous entendons réactualiser la stratégie nationale pour un numérique inclusif, en fixant un cap pluriannuel d'organisation et de financement ; en valorisant la filière métiers de la médiation numérique, avec un objectif de 20 000 aidants numériques à la fin du quinquennat ; en instituant une gouvernance qui intègre toutes les parties prenantes à l'échelle départementale – c'est en tout cas à cette échelle que nous l'envisageons actuellement.
Le Président de la République a fixé un objectif de cent licornes en 2030, dont vingt-cinq licornes vertes : c'est bon pour l'innovation et la transition écologique, c'est bon pour la souveraineté et c'est bon pour l'emploi. En France, la situation est particulière, puisque la création nette d'emplois se fait dans les jeunes entreprises, de moins de deux ou trois ans. Autrement dit, nous n'atteindrons pas le plein-emploi sans la French Tech.
La French Tech s'est très bien développée ces dernières années, mais nous entrons dans une période macroéconomique très différente, avec notamment une hausse des taux, qui risque de rendre très difficiles les levées de fonds dans les prochains mois, voire les prochaines années. Comment anticipez-vous cette situation macroéconomique ? Quelles mesures comptez-vous prendre pour soutenir la French Tech et atteindre l'objectif des cent licornes ?
Les possibilités offertes par les nouvelles technologies ne se concrétiseront que s'il y a des gens compétents et formés dans les différents métiers du numérique. Seriez-vous favorable à ce que les parents ou les grands-parents qui envoient des enfants dans des écoles d'ingénieurs ou de techniciens, lesquelles sont principalement privées – je parle sous votre contrôle –, bénéficient d'un avantage fiscal de 66 %, au même titre que ceux qui font des dons à des associations reconnues d'utilité publique ? Cela permettrait aux familles des classes moyennes, qui ne peuvent pas toucher de bourses, d'inscrire quand même leurs enfants dans ces filières. Ce serait une mesure efficace et utile pour l'avenir de la nation.
Vous l'avez souligné, Monsieur le ministre délégué, les entreprises du numérique et de télécommunication peuvent jouer un rôle clé dans la nécessaire transition énergétique. Cependant, l'objectif tout à fait louable de réduction de 10 % de notre consommation énergétique, fixé dans le plan de sobriété énergétique, ne doit pas nous faire oublier que le développement numérique est une urgence dans les territoires ruraux, notamment dans le département de la Haute-Loire. L'État doit rester vigilant sur la question des zones blanches, véritable fléau, même si la situation s'améliore au fil des années, grâce à son engagement aux côtés des collectivités territoriales. Le plan de sobriété énergétique ne risque-t-il pas de retarder le déploiement du numérique dans les territoires ruraux ?
Par ailleurs, n'oubliez pas de nous aider à résoudre le problème, que vous connaissez bien, du pylône de Mazeyrat-d'Allier !
Je souhaite évoquer la situation des territoires dits « d'outre-mer », notamment la question de la vie chère. Les dépenses de communication, contraintes, y représentent une part non négligeable du budget des ménages. En 2019, l'Autorité de la concurrence a montré que, dans les Antilles et en Guyane, les prix des services de téléphonie mobile étaient supérieurs de 60 % à ceux de l'Hexagone ; à La Réunion, ils l'étaient de 20 %. Quant aux tarifs d'accès à internet, ils étaient plus chers de 40 %. Il est aujourd'hui indispensable d'accéder aux différents services proposés sur internet. Que comptez-vous faire pour abaisser les prix des télécommunications et d'internet dans les territoires d'outre-mer ? Quelle est, de ce point de vue la question prioritaire : celle des marges des opérateurs ou celle du coût de la bande passante des câbles sous-marins qui vont vers les États-Unis ?
La cybersécurité est un enjeu de plus en plus prégnant pour les administrations comme les entreprises. Le piratage récent du système informatique du centre hospitalier de Corbeil-Essonnes et l'attaque subie hier par la ville de Caen illustrent la vulnérabilité de certaines de nos installations, pourtant vitales. Les hackers n'ont d'ailleurs aucun scrupule à diffuser les données de santé piratées. Ce fléau concerne non seulement les établissements de santé, mais aussi, de plus en plus, les universités et les centres de recherche. Un article récent de Challenges rapporte la cyberattaque dont a été victime l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (IFREMER) en début d'année. Ainsi, le risque cyber menace les études et les contenus scientifiques produits par les chercheurs français. Cet « or gris », constitué de données stratégiques pour l'innovation et la souveraineté de notre pays, peut être dérobé par des puissances étrangères pratiquant l'espionnage économique. Quelles actions de sensibilisation et quels moyens le Gouvernement compte-t-il engager pour que nos universités soient mieux protégées ? Ne faut-il pas prévoir une enveloppe ad hoc dans le prochain collectif budgétaire ?
À l'heure du développement numérique, notamment grâce au dispositif France Num et au plan de relance, je voudrais insister sur le caractère indispensable du développement de l'offre numérique, de la fibre et des réseaux mobiles dans nos territoires ruraux. La progression du télétravail, due aux crises sanitaire et climatique, a bouleversé l'organisation, notamment dans les entreprises. Dans le domaine médical, les téléconsultations permettent de répondre à un enjeu majeur d'accès aux soins, dans un contexte de tension démographique. Le numérique est donc un outil primordial d'attractivité des territoires ruraux, qui permet un réel accompagnement de proximité. Quelles sont les orientations politiques et budgétaires, en cours et à venir, en la matière ?
Le développement de la fibre dans les zones d'appel à manifestation d'engagements locaux (AMEL) n'est pas un long fleuve tranquille ! Dans le département de la Savoie, l'opérateur chargé de développer la fibre a pris beaucoup de retard. L'ARCEP a été saisie et l'État soutient le département, mais, malgré des mises en demeure, les retards s'accumulent et la qualité annoncée au départ n'est pas au rendez-vous : la fibre est souvent déployée en aérien, ce qui est risqué – en Savoie, il n'y a jamais de neige ni d'intempéries… – et constitue en outre une pollution visuelle. La Savoie vous demande donc de continuer à mettre la pression, si je puis dire, sur les opérateurs qui ne respectent pas leurs engagements.
Dans son programme de campagne, le président sortant, Emmanuel Macron, a exprimé la volonté de créer un monde virtuel souverain, un metavers européen. Il pourrait s'agir à l'horizon 2030, soit dans moins de dix ans, d'un marché de 678 milliards d'euros. Il est urgent d'agir, afin de ne pas prendre le même retard que pour les réseaux sociaux ou les sites de e -commerce. Pouvez-vous nous faire un point d'avancement sur les travaux en ce sens ?
La majorité présidentielle a modernisé la loi pour mieux garantir la protection en ligne de nos jeunes, d'abord en 2020 en imposant un contrôle d'âge sur les sites pornographiques, sous peine de blocage, puis cette année avec la loi visant à encourager l'usage du contrôle parental sur internet. Pourtant, de nombreux collectifs de victimes et de nombreux citoyens, certains plus connus que d'autres, nous interpellent régulièrement. Le rappeur Booba nous alerte ainsi sur les dangers que les réseaux sociaux continuent de présenter pour notre jeunesse. Des plateformes comme Instagram et TikTok permettent les pratiques et l'enrichissement de certains influenceurs, parfois installés dans des paradis fiscaux, qui véhiculent de tristes valeurs, recourent au dropshipping et aux fausses réductions ou promeuvent des stratégies douteuses de pronostics ou de copy trading.
Dans votre propos liminaire, Monsieur le ministre délégué, vous avez mentionné l'adaptation du droit français au DSA. Comment pouvons-nous aller plus loin dans la protection des jeunes et des moins jeunes face à ces arnaques, à ces abus flagrants et aux mauvaises influences ?
Monsieur le ministre délégué, je vous pose la même question qu'à votre ministre de tutelle, Bruno Le Maire, qui n'y a pas répondu. Vous avez évoqué la certification SecNum Cloud, qui permettra un accès privilégié à la commande publique. Le cloud de confiance de Thales et de Google ou le cloud « Bleu » d'Orange et de Microsoft pourront-ils obtenir demain cette labellisation ?
Concernant les rançongiciels, j'ai lu que vous alliez autoriser les assurances à rembourser les rançons payées par les citoyens et les entreprises piratées. Cela ne risque-t-il pas d'être contre-productif, au regard des efforts cyber de la France ?
Le poids du numérique dans notre économie croît de jour en jour. La France, avec l'Europe, affirme sa volonté d'autonomie en la matière. Pour y parvenir, on estime qu'il ne faudrait pas moins de cinquante mille informaticiens supplémentaires dans notre pays. Ayant engagé 2,5 milliards d'euros dans les filières d'avenir dans le cadre du plan « France 2030 », le Gouvernement s'en donne les moyens. Des territoires y contribuent également, en créant des écosystèmes qui réunissent formations au numérique, incubateurs de start-up et entreprises. Toutefois, des freins demeurent : les formations sont souvent perçues comme onéreuses ou élitistes, voire réservées aux hommes ; le financement des bâtiments destinés à les accueillir incombe souvent aux seules collectivités locales. Pouvez-vous nous présenter vos pistes de réflexion et d'action pour renforcer l'accès aux métiers du numérique et soutenir les projets lancés dans les territoires ?
Monsieur Midy, il nous semble que l'objectif de cent licornes est atteignable. Les fondamentaux sont bons et les technologies développées aujourd'hui dans notre pays ont le potentiel de rayonner aux niveaux européen et mondial. Vous l'avez rappelé, nous traversons une phase plus compliquée pour les financements, en raison de l'incertitude concernant la situation économique mondiale. Néanmoins, nous avons interrogé les entreprises suivies par la mission French Tech, et la plupart d'entre elles avaient réussi à lever des fonds avant le début des difficultés actuelles, au moment où les conditions étaient très favorables aux financements. Nous sommes vigilants, mais confiants. Nous pensons que, pour l'essentiel, notre écosystème sera résilient, qu'il traversera la période qui s'ouvre sans dommage et qu'il parviendra à faire émerger ces cent licornes, dont vingt-cinq vertes et trois cyber.
Monsieur de Lépinau, nous poursuivons le même objectif : développer les formations aux métiers du numérique. Toutefois, nous empruntons un chemin différent de celui que vous proposez. Pour notre part, nous entendons jouer sur deux leviers. D'une part, je l'ai dit, le plan « France 2030 » prévoit un financement de 2,5 milliards d'euros pour les formations aux métiers d'avenir, dont la moitié pour les métiers du numérique. D'autre part, en application de la réforme de l'apprentissage engagée au cours du quinquennat précédent, les jeunes peuvent entrer dans ces écoles ou accéder à des formations aux métiers du numérique grâce à des contrats d'apprentissage – cela rend le coût de la formation neutre pour eux.
Monsieur Vigier, la sobriété numérique ne va pas ralentir le développement du numérique. Certaines technologies, en particulier la fibre et la 5G, sont plutôt de nature à nous faire économiser de l'énergie et à réduire notre empreinte carbone. La fibre est ainsi trois fois moins énergivore que le cuivre, et la 5G, dix fois moins que la 4G en zones denses. Tout cela va dans le même sens.
Dans le cadre du New Deal mobile, dix nouveaux pylônes sont programmés dans le département de la Haute-Loire pour l'année qui vient. S'agissant du pylône de Mazeyrat-d'Allier, une réunion s'est tenue cette semaine en préfecture. Nous espérons que le dossier pourra aboutir dans les meilleurs délais, tout en sachant qu'une expertise judiciaire est en cours et qu'il faut laisser à la justice le temps de faire son travail.
Monsieur Hajjar, la concurrence est bonne dans certains départements ou territoires d'outre-mer, mais elle est insuffisante dans d'autres. Nous ferons preuve de vigilance. Nous sommes à votre disposition pour discuter des voies et moyens pour améliorer la situation.
Madame Duby-Muller, j'ai évoqué tout à l'heure les moyens financiers engagés dans le cadre du plan de relance et de la stratégie d'accélération cyber. Plusieurs appels à projets et appels à manifestation d'intérêt sont déjà engagés. S'il apparaît nécessaire de trouver des compléments pour certains opérateurs, en particulier les universités, nous pourrons y réfléchir dans le cadre des prochaines vagues d'appels à manifestation d'intérêt ou d'appels à projet. J'ajoute que le ministère de l'intérieur va développer de nouveaux outils pour renforcer la protection contre la menace cyber. Ce point figurera dans la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (LOPMI), que Gérald Darmanin vous présentera très prochainement.
Monsieur Bouyx, dans le projet de loi de finances pour 2022, 150 millions d'euros étaient prévus pour la poursuite des déploiements, dont 80 millions pour l'année 2022. Je vous donnerai une réponse plus précise en ce qui concerne le projet de loi de finances pour 2023.
Monsieur Rolland, le déploiement de la fibre a effectivement pris un peu de retard en Savoie. Ce département fait partie des quelques territoires pour lesquels nous sommes particulièrement vigilants, de même que l'ARCEP. Je suis tout à fait d'accord pour continuer à mettre la pression sur l'opérateur.
Monsieur Izard, le metavers est, à ce stade, un concept développé par l'un des GAFAM, pour essayer d'établir une emprise sur nos marchés, en imposant sa vision de ce que doit être ce monde virtuel. Nous pensons qu'en réalité, le metavers a été créé il y a bien longtemps, en France et en Europe, par des entreprises comme Dassault Systèmes, avec les jumeaux numériques, ou encore Ubisoft, avec le jeu vidéo. Ceux qui ont joué à World of Warcraft – ce n'est pas trop mon cas – savent que les espaces immersifs ont été inventés il y a bien longtemps.
Notre objectif, en lien avec la ministre de la culture, est de donner corps à l'engagement du Président de la République de faire naître un metavers européen qui s'appuie sur des briques technologiques françaises. Notre pays abrite des acteurs et des établissements culturels parmi les plus connus au monde. Des convergences doivent naître entre ces deux univers pour donner à voir le savoir-faire français, en matière technologique et culturelle. Il s'agit de résister à la pression commerciale de certains géants du numérique, qui n'ont pas le monopole du metavers.
Monsieur Vojetta, le DSA interdira la publicité ciblée sur les mineurs. Le filtre anti-arnaque sera un moyen de protéger les particuliers contre les arnaques telles que celles qui sont dénoncées par le rappeur Booba. Par ailleurs, le contrôle parental prévu par la loi Studer sera mis en œuvre au début de l'année 2023. Il intégrera les limites d'âge sur les contenus et sur les réseaux sociaux, limites qui existent déjà mais sont très faciles à contourner – il suffit de répondre « oui » lorsqu'on vous demande si vous avez l'âge requis.
Monsieur Lopez-Liguori, la réponse à votre question est simple : soit Google et Thales, d'un côté, et Microsoft et Orange, de l'autre, parviennent à se faire certifier SecNum Cloud par l'ANSSI, soit ils n'y parviennent pas. La même règle du jeu s'applique à tous. À ceci près que Bruno Le Maire et moi avons annoncé à Strasbourg un coup de pouce financier pour permettre aux petites structures d'accéder plus facilement à la certification SecNum Cloud.
S'agissant de l'assurance cyber, rien de nouveau sous le soleil ! Aujourd'hui, il est légal de payer une rançon, même si ce n'est recommandé ni par l'ANSSI ni par les assureurs. Le rapport de la direction générale du Trésor préconise simplement qu'une plainte soit déposée dans le cas où la rançon est payée et remboursée par l'assureur. Cela permettrait à l'ANSSI, notamment, de suivre l'évolution de la menace et de connaître les cibles concernées. Cette mesure, qui figure dans la LOPMI, nous permettra d'améliorer nos dispositifs de prévention et de riposte.
Monsieur Marchive, la formation est une des priorités du Président de la République et du Gouvernement. Il faut que l'on puisse mailler l'ensemble des compétences et des qualifications requises, notamment dans les secteurs d'avenir que sont le cloud, le quantique, l'intelligence artificielle, la cybersécurité et la 5G. Cela doit se faire dans l'ensemble des territoires. C'est l'objectif de l'appel à manifestation d'intérêt « Compétences et métiers d'avenir », doté de 2,5 milliards d'euros, élément central du plan « France 2030 ». Je suis à votre disposition pour en discuter.
Informations relatives à la commission
La commission des affaires économiques se saisit pour avis de deux articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2023 (n° 273) :
– l'article 6, prorogeant le volet fiscal du « bouclier tarifaire » mis en place depuis février 2022 pour protéger nos concitoyens de la hausse des prix de l'électricité ;
– l'article 7, portant adaptation du système fiscal aux exigences de la transition énergétique.
Mme Nicole Le Peih est nommé rapporteure pour avis sur ce texte .
Membres présents ou excusés
Commission des affaires économiques
Réunion du mardi 27 septembre 2022 à 17 heures
Présents. – Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Thierry Benoit, Mme Anne-Laure Blin, M. Éric Bothorel, Mme Soumya Bourouaha, M. Bertrand Bouyx, Mme Maud Bregeon, Mme Sophia Chikirou, M. Romain Daubié, M. Julien Dive, Mme Virginie Duby-Muller, Mme Christine Engrand, M. Johnny Hajjar, M. Alexis Izard, M. Guillaume Kasbarian, M. Pascal Lavergne, Mme Annaïg Le Meur, Mme Nicole Le Peih, M. Hervé de Lépinau, M. Aurélien Lopez-Liguori, M. Bastien Marchive, M. Éric Martineau, M. Paul Midy, Mme Louise Morel, M. Dominique Potier, M. Charles Rodwell, M. Vincent Rolland, M. Jean-Pierre Vigier, M. Stéphane Vojetta
Excusés. – M. Laurent Alexandre, Mme Mathilde Hignet, M. Sébastien Jumel, Mme Bénédicte Taurine