La séance est ouverte à dix heures quinze.
(Mme Isabelle Rauch, Présidente)
La commission auditionne Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel, sur le service national universel.
Nous accueillons aujourd'hui Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel, pour une audition consacrée au service national universel (SNU). Madame la secrétaire d'État, cette audition, prévue de longue date, prend évidemment une coloration particulière à la lumière des événements violents qu'a récemment connus notre pays et auxquels ont notamment pris part un certain nombre d'adolescents.
Un tel constat nous amène naturellement, en tant que responsables politiques, à nous interroger, sans complaisance mais avec lucidité, sur les raisons, multiples et complexes, qui ont pu mener une partie de la jeunesse de notre pays à participer à de tels actes. Il nous invite également à rechercher les voies et moyens pertinents pour reconstruire du commun au sein de notre société.
Les mesures que nous devrons mettre en œuvre pour y parvenir relèvent de l'ensemble des champs de l'action publique et de l'ensemble des acteurs, publics comme privés, nationaux comme locaux. S'il n'est pas le seul, le SNU, compte tenu de sa vocation, apparaît comme un levier spécifique et essentiel pour favoriser la cohésion et l'engagement, au service de l'intérêt général.
Madame la secrétaire d'État, si les questions que je souhaite vous poser vont au-delà des événements de l'actualité récente, elles y font toutefois écho. Le SNU a vocation à renforcer la cohésion nationale, à favoriser la mixité sociale et territoriale, à inciter les jeunes à s'engager et à contribuer à leur orientation. Fondé sur le volontariat, il a d'abord fait l'objet d'une première expérimentation dans treize départements et a concerné 1 941 jeunes en 2019. Lors des débats budgétaires sur le projet de loi de finances pour 2023, le Gouvernement avait indiqué que le dispositif avait vocation à accueillir 64 000 volontaires au sein des séjours de cohésion, en 2023. Cet objectif a-t-il été atteint ?
Par ailleurs, disposez-vous d'éléments statistiques sur la représentativité sociale et territoriale des jeunes participant au séjour de cohésion, correspondant à la phase 1 du dispositif ? Qu'en est-il des phases 2 – la participation à des missions d'intérêt général – et 3 – l'engagement volontaire ?
Je suis heureuse de pouvoir vous faire un retour explicite et transparent sur le SNU, d'autant que les sessions de juin et de juillet viennent de s'achever. L'actualité récente met en lumière un besoin d'engagement, de citoyenneté et de cohésion. Le ministre de l'Intérieur et des outre-mer l'a rappelé hier, le très jeune âge des émeutiers – les plus jeunes ayant entre 9 et 11 ans, pour une moyenne d'âge de 17 ans – nous interpelle fortement.
Vous l'avez souligné, madame la présidente, le SNU est d'abord un parcours, même s'il est, hélas, parfois caricaturé ou réduit à sa phase 1, celle du séjour de cohésion. Il représente bien davantage, même s'il est d'abord, en effet, pour des jeunes âgés de 15 à 17 ans, un séjour de cohésion incluant un enseignement – patriotisme, citoyenneté, civisme, apprentissage des gestes qui sauvent, lesquels gestes ont d'ailleurs permis, hier, en Loire-Atlantique, à trois jeunes, Étienne, Quentin et Paul, de sauver une jeune femme de la noyade. L'objectif est de donner aux volontaires les moyens d'être utiles, aux plus âgés, à leurs voisins ou à leur famille.
Le SNU, c'est également un idéal de fibre citoyenne, c'est une responsabilité qui fait partie de notre commun et de la cohésion nationale : quelle place prendre dans la société ? Tel est l'état d'esprit de la mission d'intérêt général – quatre-vingt-deux heures, ou deux semaines – qui permet à des jeunes issus de tous les milieux sociaux et de tous les territoires de prendre pleinement leur place dans un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), chez les jeunes sapeurs-pompiers ou encore au sein d'associations caritatives – Les Restos du cœur ou la protection civile, notamment pour faire face au risque climatique estival.
Ces temps ne s'opposent pas à la phase 3. Ils sont une période de découverte et d'apprentissage, et répondent aux besoins essentiels que nous rappellent les structures associatives : comment créer une fibre citoyenne et faire émerger une génération de bénévoles associatifs ? Lors de cette phase 3, les jeunes peuvent choisir un engagement sous les drapeaux – que ce soit sous la forme d'une réserve militaire pour la gendarmerie ou pour l'armée ou encore de la réserve civile de l'armée –, sous un statut civil – le service civique accueille une grande partie des jeunes qui font le choix d'un engagement compris entre six mois et un an, entre 16 et 25 ans –, ou dans le cadre de la coopération internationale – ONG, Instituts français –, le rayonnement de la France se situant aussi à l'extérieur de nos frontières.
Nous devons faire confiance à notre jeunesse en lui donnant les moyens de prendre sa part dans la construction du projet de société. Il nous faut aussi créer des repères partagés : comment une génération pourrait-elle être unie en l'absence de commun, de liens qui forgent l'appartenance à un grand pays, malgré les différences ? C'est le goût de l'engagement qui crée cette volonté de dépassement.
Au-delà des projets qui relèvent de l'Éducation nationale, à quel moment un jeune issu d'un milieu rural aura-t-il l'occasion de passer quinze jours avec un jeune urbain ? À quel moment un jeune des quartiers nord de Marseille prendra-t-il conscience de ce qu'il partage avec son alter ego du Loir-et-Cher ? Ils ont peut-être en commun des difficultés de mobilité ou de choix sur les offres de formation. À quel moment les jeunes issus d'un établissement privé et d'un établissement public se rendront-ils compte qu'ils ont bien plus de points communs que ce qu'ils imaginaient ? Voilà ce que permet le temps particulier proposé par le SNU : personne n'est traité de façon privilégiée et il n'y a pas de distinction selon l'origine sociale ; les jeunes proviennent indifféremment d'établissements professionnels ou d'établissements généraux d'excellence. Il leur est simplement demandé de s'engager, de se mobiliser et d'être à la hauteur de ce qui les attend – un ensemble de droits acquis, assortis d'un devoir d'engagement.
L'accompagnement est fait par trois types de personnalités fortes. Tout d'abord, il relève des hommes et des femmes venant de l'Éducation nationale – conseillers principaux d'éducation (CPE), infirmières scolaires, enseignants, proviseurs –, sur la base du volontariat. Depuis le début du SNU, 15 000 hommes et femmes ont fait le choix de porter l'uniforme couleur bordeaux, pour accompagner cette jeunesse : en plus de leur travail, ils contribuent à faire grandir en elle le sens de la nation et de la République ainsi que la culture de l'engagement.
Notre territoire dispose de plus de 127 structures d'accueil, en majorité communales ou de l'éducation populaire. Des conventions ont également été signées avec des grandes structures de l'éducation populaire – la Ligue de l'enseignement, les Francas, les centres d'entraînement aux méthodes d'éducation active (Cemea), la Fédération Léo-Lagrange, l'Union nationale des centres sportifs de plein air (UCPA), l'Union française des centres de vacances et de loisirs (UFCV) –, pour encadrer les jeunes. Enfin, ces hommes et ces femmes appartiennent aux corps en uniforme – gendarmes, pompiers, anciens policiers ou militaires, réservistes : s'ils ont servi sous nos drapeaux, ils relèvent d'un statut civil dans leurs fonctions d'encadrement des jeunes.
Le SNU concerne 57 % de filles, 5,7 % de jeunes issus des quartiers prioritaires de la ville et 2,7 % de personnes en situation de handicap. Profondément inclusif, il s'adresse à la jeunesse en situation de handicap déclaré. Cette année, le choix a été fait d'aller plus loin en ouvrant un centre expérimental à Garches : celui-ci a accueilli des jeunes qui ont un handicap plus lourd, nécessitant des soins. Le SNU doit ainsi être accessible à tous : tel est le rêve français. Les volontaires doivent être accompagnés, sans que jamais le coût financier ou la situation personnelle ou sociale ne constituent des freins.
Certes, la montée en charge du SNU se fait progressivement. En 2019 quelque 2 000 jeunes ont été accueillis, dans treize départements. En 2020, à l'exception de la Nouvelle- Calédonie, la crise sanitaire n'a pas permis d'organiser de nouvelles sessions. En 2021, 15 000 volontaires ont effectué des séjours de cohésion, et ils étaient 32 000 en 2022 ; en 2023, le nombre d'engagés atteint déjà 40 000 ; à son plus haut, la liste d'attente a d'ailleurs compté plus de 10 000 jeunes, et, l'année n'étant pas terminée, je compte sur cette liste pour intégrer de nouveaux volontaires.
Parmi les prochains défis du SNU figure l'organisation de séjours volontaires en complément du temps scolaire, pour ceux qui le souhaitent. Nous avons proposé aux enseignants et aux chefs d'établissement, publics comme privés, de s'inscrire dans la démarche « classes engagées » : un enseignant, volontaire, qui souhaite promouvoir le civisme, construit un projet pédagogique – une dotation financière est prévue à cet effet – sous la forme de sorties scolaires, de témoignages ou de la découverte de structures associatives, tout cela constituant un séjour de cohésion pour l'ensemble de sa classe. L'enseignant peut aussi choisir d'approfondir l'un des quatre thèmes prioritaires : la mémoire, la question environnementale, le sport et les Jeux olympiques et paralympiques – l'accent étant mis sur leur valeur émancipatrice –, l'aide à la population face aux catastrophes naturelles.
Des incitations sont prévues pour les volontaires, le projet étant reconnu pour les compétences transversales qu'il permet de développer sur le plan pédagogique. Il a vocation à compléter l'engagement personnel – les jeunes continuent à être volontaires, s'ils le souhaitent, sur le temps des vacances : j'invite le maximum d'établissements à postuler, d'ici à la fin du mois d'octobre, pour des séjours qui commenceront en mars. Prenez le temps d'échanger avec ces jeunes : dès que vous le faites en votre qualité de représentants de la France et de la République, vous leur délivrez un message de confiance mais aussi de responsabilité, vous leur donnez des repères et un cap.
Un point me tient particulièrement à cœur. Pendant ces séjours, les jeunes les plus fragiles parlent, témoignent et sont accompagnés – notamment les jeunes filles, dont la parole se libère sur des questions essentielles, telles que le harcèlement, le cyberharcèlement, les violences sexistes et sexuelles. Le renforcement de notre cohésion passe par celui de l'accès aux droits : le SNU permet de tenir cet engagement.
Vous l'avez dit, en 2019, le SNU a été déployé pour les jeunes âgés de 15 à 17 ans. Il se déroule en plusieurs phases : stage de cohésion, mission d'intérêt général et engagement citoyen, au-delà de trois mois. Cette phase a ses propres objectifs et permet aux jeunes de développer des compétences telles que le travail d'équipe, le sens des responsabilités et la solidarité. Les perspectives offertes par le SNU sont nombreuses. Celui-ci permet d'abord aux jeunes de découvrir de nouveaux horizons, de développer leur esprit critique, mais aussi de favoriser leur insertion professionnelle en leur offrant des formations et des stages en lien avec leurs projets d'avenir. Il permet de redonner un cap et du sens à l'avenir de la jeunesse.
Cependant des défis se posent à lui : certains jeunes peuvent ne pas être motivés par le programme qu'il propose, le voir comme une contrainte. Afin de susciter leur engagement, vous avez notamment annoncé le lancement du dispositif « classes engagées », qui permet aux jeunes de réaliser le stage de cohésion sur des périodes scolaires. Par ailleurs, la mixité sociale au sein des groupes peut être difficile à atteindre.
Malgré ces défis le SNU a connu, depuis sa mise en place, des avancées significatives : de plus en plus de jeunes y participent chaque année – près de 50 000 y ont déjà pris part depuis sa création –, ce qui témoigne d'un intérêt croissant pour le programme. Les retours sont globalement positifs et soulignent l'importance de cette expérience dans le développement personnel des jeunes, leur ouverture d'esprit et leur engagement citoyen : j'ai pu le vérifier auprès du centre de mon département d'Indre-et-Loire.
Pouvez-vous nous donner les perspectives d'évolution envisagées pour le SNU, en plus du dispositif « classes engagées » ? Comment favoriser l'engagement des jeunes issus de tous nos territoires et qui sont parfois en quête de sens, et ce au-delà même du SNU qui n'est pas obligatoire ?
Je souhaite appeler très concrètement votre attention sur les difficultés rencontrées cette année par une jeune candidate pour intégrer le SNU. Bien qu'intéressant, celui-ci est de plus en plus fragilisé par son côté « gadget présidentiel » : il ne touche qu'une toute petite partie de la population qu'il devrait concerner et il a raté son objectif de mixité sociale.
En premier lieu il n'offre pas assez de places. L'une de mes proches s'est inscrite au SNU en février dernier et a été placée sur liste d'attente. Combien de temps à l'avance faut-il s'inscrire pour espérer avoir une place ? Le 5 juillet dernier au soir, elle a reçu un message lui indiquant qu'elle pouvait rejoindre son centre de SNU avant vingt-deux heures trente le soir même, dernier délai, en raison de désistements de dernière seconde. Or elle n'avait plus la possibilité matérielle de le faire, d'où une déception et de la frustration. J'imagine que de nombreux jeunes sont dans son cas.
Rappelons qu'en 2018, Emmanuel Macron avait présenté le SNU comme la grande réforme de société du quinquennat. Cinq ans après, même ceux qui souhaitent le rejoindre ne le peuvent toujours pas. En l'espèce, le terme de volontariat n'est pas juste. Compte tenu de cette difficulté, comment justifiez-vous la rupture d'égalité quant au bonus accordé sur Parcoursup, entre les adolescents ayant participé au SNU et ceux qui, en dépit de toute leur bonne volonté, n'ont pu le faire ? Comment prévoyez-vous d'améliorer le dispositif ? Qu'en est-il de votre proposition de l'intégrer dans le parcours scolaire sur la base du volontariat ? Comment assurer la logistique, les structures adaptées et le nombre d'encadrants nécessaires à l'accueil de 800 000 jeunes ?
Lorsque Jacques Chirac annonce, le 28 mai 1996, la fin du service militaire obligatoire, c'est un soulagement pour nombre de jeunes hommes. Si le service militaire convenait parfaitement à certains, les alternatives n'étaient pas accessibles à tous : elles ressemblaient parfois à une punition, l'objection de conscience ayant pour conséquence le doublement du temps nécessaire pour remplir ses obligations nationales. Nombreux sont ceux qui mirent en péril leur santé, voire plus, pour y échapper ; nombreux sont ceux pour qui les souvenirs de cette année sous les drapeaux ne sont pas bons.
Nous étions cependant quelques-uns à penser que l'erreur du président Chirac était de ne pas le remplacer par un service national incluant seulement une option militaire, où chaque jeune adulte pourrait choisir sa manière de s'engager au service de l'intérêt général, de façon à donner à chacun et à chacune un sentiment d'utilité et d'appartenance à la communauté nationale. Et voilà que, sur une lubie du président Macron, le SNU est censé combler cette lacune. Or le SNU a tout faux.
Première aberration, il s'adresse aux jeunes de 15 à 17 ans. Il ne s'agit donc pas de l'engagement de jeunes majeurs au service de la nation, mais bien d'un stage de citoyenneté inepte, destiné à redresser – voire à dresser – des adolescents considérés a priori comme mal élevés. Deuxième aberration, il est une forme édulcorée du service militaire, réduisant les valeurs de la République au port de l'uniforme et au lever des couleurs. Troisième aberration, de recul en recul, vous chargez finalement l'Éducation nationale de rattraper le coup dans l'espoir de trouver assez d'enseignants de seconde volontaires pour priver leurs élèves de deux semaines de cours, en y ajoutant une indigne carotte – promettre aux élèves qui s'y plieront des points supplémentaires sur Parcoursup.
Que de contorsions pour imposer, contre toute logique, cette mauvaise idée ! Je vous en conjure, madame la secrétaire d'État, renoncez au SNU. Utilisez les crédits alloués pour soutenir notre école publique, qui en a bien besoin, ou pour relancer les colonies de vacances. Écoutez nos propositions pour un véritable service citoyen réservé aux jeunes adultes, et laissez l'éducation des adolescents aux professionnels.
Je rappelle que le SNU s'effectue sur la base du volontariat : votre référence aux jeunes mal élevés ne me semble donc pas pertinente. Pour rappel, mon rôle de présidente est de veiller à ce que nos débats se déroulent en toute sérénité et de rappeler chacun d'entre vous à l'ordre lorsque cela est nécessaire. Je n'hésite d'ailleurs pas à le faire à l'égard des députés de tous les groupes, y compris celui auquel j'appartiens.
Le groupe Les Républicains est évidemment très sensible aux sujets touchant la jeunesse, ainsi qu'à la transmission des valeurs de citoyenneté et de cohésion sociale qui sont celles du service national universel. Les événements récents montrent la nécessité d'apprendre à notre jeunesse à faire nation et de remobiliser autour de nos valeurs communes : le SNU pourrait en être l'un des moteurs. Dans ma circonscription de Seine-et-Marne, l'internat d'excellence de Sourdun a accueilli, cet été, deux séjours du SNU. Je me suis donc fait un devoir d'assister à leurs cérémonies de clôture, afin d'aller à la rencontre des jeunes Français, qui, pour la plupart d'entre eux, ont soif d'engagement bénévole.
À l'origine, le SNU a été créé pour favoriser le sentiment d'unité nationale autour des valeurs de citoyenneté, d'engagement et de cohésion sociale. Permettez-moi cependant, madame la secrétaire d'État, de vous faire part de mon étonnement sur deux points. Tout d'abord, lors des clôtures de séjour, j'ai pu constater qu'une certaine idéologie transparaissait dans les restitutions ou dans les présentations faites par les ateliers auxquels les jeunes avaient participé. La question qui en découle naturellement est donc simple : comment contrôlez-vous l'action des encadrants et des intervenants lors de ses séjours ? En discutant avec les volontaires, j'ai ensuite remarqué que nombre d'entre eux – souvent plutôt issus de la ruralité – venaient du même milieu social, alors que l'objectif est, comme vous l'avez indiqué, de favoriser le sentiment d'unité nationale, tant du rural que de l'urbain. Que comptez-vous faire pour favoriser une meilleure mixité sociale au sein des promotions du SNU ?
Les valeurs de la République sont un ciment pour l'unité de la nation. Elles sont ce qui permet de faire cohésion, ce qui unit les Français. Cet amour de la France et de la République, il nous revient de le transmettre : il s'agit là de l'une des missions qui vous ont été confiées à travers le service national universel. Le SNU est bien plus qu'un projet, c'est une ambition : celle de permettre à des jeunes de régions et de milieux sociaux différents de partager une période de leur vie, de s'émerveiller ensemble de la richesse de notre histoire, de la grandeur de notre culture et de notre patrimoine. Quelle belle ambition que de vouloir faire vivre intensément le lien entre les jeunes et la République, que de vouloir développer la culture de l'engagement, du devoir et de la solidarité !
À en croire le retour des jeunes, le pari semble réussi. Ils disent sortir grandis, avec une vision élargie du monde et une plus grande sensibilité aux valeurs de solidarité. À Besançon, dans ma circonscription, j'ai vu des jeunes fiers de chanter, ensemble, l'hymne national. J'ai vu des jeunes verser une larme à la fin de leur séjour. Je rêve de les voir défiler le 14 juillet, aux côtés de nos sapeurs-pompiers. Dans cette société très individualiste, où la caricature, l'opposition systématique et l'invective sont tellement plus faciles que la modération, l'apaisement ou le dépassement – n'est-ce pas, chers collègues du groupe LFI-NUPES –, nous avons tant besoin de ces liens de cohésion, d'engagement et d'amitié.
Je conclurai, madame la secrétaire d'État, en citant également Léon Gautier, dernier héros français du débarquement en Normandie, qui nous a récemment quittés. Il expliquait inlassablement que s'il s'était engagé, c'était parce qu'on lui avait appris à aimer la France. Pensez-vous que la généralisation du SNU puisse être l'une des clés sur ce point ?
Depuis le début de mon mandat je vous ai fait part, à de nombreuses reprises, de mon opposition ferme à la généralisation du SNU. Au gré de vos déclarations, vous n'avez malheureusement pas su atténuer mes doutes. Il y a quelques semaines, après un énième changement de cap, nous apprenions que le SNU empiéterait désormais sur le temps scolaire des lycéens, en totale déconnexion avec les programmes scolaires de seconde, puisque le Bulletin officiel n'a pas été modifié en ce sens.
Si mes questions sont nombreuses, je souhaite m'attarder sur la sécurité qui entoure l'organisation des séjours de cohésion. Mes doutes à cet égard ont été renforcés lors de ma visite d'un centre SNU, effectuée la semaine dernière dans mon département de la Seine-Saint-Denis. J'ai pu y constater le profil très disparate des encadrants ; la dénomination de leurs postes n'est d'ailleurs pas sans rappeler celle de l'armée – « tuteur de maisonnée », « cadre de compagnie », etc. Surtout, ils sont très jeunes et disposent rarement du brevet d'aptitude aux fonctions d'animateur (Bafa) ou d'une expérience précédente dans l'animation, alors qu'ils sont amenés à encadrer un public à peine plus âgé qu'eux.
L'absence de formation harmonisée et de profils types d'encadrants, et partant l'absence de garanties quant à leur capacité à encadrer un public mineur posent un véritable problème de sécurité. En l'absence d'une standardisation minimale, nous courons le risque de pratiques très aléatoires d'un centre à l'autre, et même parfois dangereuses, alors que nous parlons d'enfants âgés de 15 à 17 ans. Lors de ma visite, on m'a même fait part de certaines dérives liées au profil de plusieurs encadrants.
Comment comptez-vous agir pour garantir enfin la sécurité des mineurs qui participent à ces séjours de cohésion ? Comptez-vous assurer la formation et le profil adapté de leurs encadrants ? Vous ne pouvez pas laisser la sécurité des séjours de SNU au bon vouloir des encadrants ou au hasard.
Au lieu de commencer par vous poser une question, madame la secrétaire d'État, je vais d'abord y répondre moi-même : vous aurez bien sûr tout le loisir de revenir sur nos divergences. L'engagement est-il unique ? La réponse est bien évidemment non. C'est pourtant le contraire qui se dessine en filigrane du SNU ; ce qui s'y dessine, c'est l'uniformisation d'une classe d'âge en uniforme. Moi qui ai passé un an sous les drapeaux, je ne vois toujours pas l'intérêt d'un service réduit à une portion aussi congrue. L'expression « classes engagées » suggère d'ailleurs que seuls les élèves qui ont fait le SNU seront engagés, ou, du moins, cocheront les cases de votre vision de la société. Pourtant, les engagements de nos jeunes dans la vie familiale, scolaire, associative, militante, citoyenne, ou encore pour une cause ou dans leur commune, sont divers et il faut les reconnaître comme tels.
Vous avez déclaré, dans l'émission Télématin, que plus il y aura de jeunes qui feront le SNU, mieux le pays se portera. Ce serait si facile ! Je ne puis souscrire à des propos aussi réducteurs. Élargissez votre point de vue, sans promouvoir l'embrigadement et la pensée unique ! Notre pays ira mieux en offrant à la jeunesse le choix et, surtout, la confiance. Parfois, lorsque les jeunes s'engagent pour le climat et pour leur avenir, on les qualifie d'écoterroristes. Il y aurait donc les bons et les mauvais engagements. Les crédits supplémentaires attribués au SNU – comme les 1 000 euros par classe engagée – ou les rémunérations des encadrants par le pacte enseignant le seront-ils au détriment d'autres missions de l'Éducation nationale ou du soutien à la vie associative et à l'éducation populaire ? Le prix à payer me semble exorbitant, pour un objectif aléatoire ou illusoire : douze jours pour la cohésion et la mixité et pour l'engagement. Je préférerais, à titre personnel, que l'on encourage toutes les formes d'engagement – en particulier le service civique –, pour faire enfin confiance aux jeunes de ce pays.
Les députés communistes et le groupe GDR s'opposent au SNU depuis sa création. Les écueils que nous dénoncions n'ont fait que s'aggraver au fil des ajustements que le Gouvernement a apportés parce qu'il se rend bien compte bien que le dispositif ne répond pas aux objectifs fixés.
Le SNU coûte très cher – 140 millions d'euros cette année –, pour assurer des missions dont d'autres acteurs, l'Éducation nationale et les associations, peuvent s'occuper. Par ailleurs, c'est un fourre-tout résultant d'une dangereuse confusion entre l'armée, l'éducation populaire et l'éducation morale et civique.
Il est également inacceptable de retirer douze jours d'enseignement aux élèves, alors que la réforme du baccalauréat prive déjà certains d'entre eux de plusieurs semaines de cours à cause des épreuves anticipées. La mesure qui est prévue aggravera la diminution des volumes horaires d'enseignement.
Dans le même temps, les services publics sont malmenés. Les fermetures de classe continuent, le nombre de postes de professeurs diminue et on manque de remplaçants dans certaines académies, comme la mienne. Dans de nombreux endroits, l'Éducation nationale est exsangue.
J'ai déposé avec des collègues de la NUPES, il y a plusieurs semaines, une proposition de loi pour le droit aux vacances qui comporte des mesures concrètes et très simples, de nature à favoriser l'éducation durant les temps de vacances.
Nous regrettons tout l'argent mis sur la table pour le SNU, la cotutelle exercée par le ministère des Armées et la faisabilité plus que compromise du dispositif sur le plan financier, le coût étant à terme de 2 milliards d'euros, comme sur le plan de l'encadrement, alors que nous aurions souhaité un renforcement des structures existantes.
En effet, les dispositifs qui permettent déjà de favoriser l'engagement des jeunes et la mixité sociale ont besoin d'aide. La montée en charge du SNU, qui se traduit par 30 millions d'euros supplémentaires cette année, nous apparaît ainsi irresponsable. C'est la raison pour laquelle, madame la secrétaire d'État, il faut revenir sur ce dispositif.
Je vous remercie de votre présence parmi nous pour évoquer notre jeunesse, qui doit être au cœur de notre travail d'élus et des politiques menées – cela n'a pas été assez le cas jusqu'à présent –, et pour parler plus spécifiquement du SNU.
Atteindre les objectifs qui lui sont assignés est un véritable défi, qui suscite naturellement des interrogations chez les uns et des réserves chez les autres, par exemple en matière de financement, alors que d'autres actions en faveur de la jeunesse peuvent également être envisagées.
J'ai organisé dans ma circonscription une table ronde sur l'engagement de la jeunesse. Plus d'une centaine de personnes, des jeunes, mais pas seulement, ont répondu à l'appel. Chacun a fait part de sa vision de l'engagement dans le cadre d'un débat ouvert, riche, éclairant et même, parfois, émouvant. Je pense notamment au témoignage de Hugo, âgé de 19 ans, qui a expliqué que le SNU avait provoqué chez lui une véritable évolution de ce qu'il a appelé son « être-citoyen » et de sa façon de penser, avec un esprit critique, les grands défis de notre société. Un représentant du Staj – service technique pour les activités de jeunesse – de Valenciennes a expliqué qu'énormément de jeunes s'engageaient, de différentes manières, dans les quartiers comme dans les villages, sans forcément participer au SNU.
Comment faire pour toucher plus largement les jeunes, y compris ceux issus de milieux modestes, et pour leur donner envie de s'engager ? Un rapport sénatorial propose de surseoir au projet de généralisation du SNU, du fait d'obstacles logistiques. Parmi ceux-ci, il est très regrettable et contradictoire que des centres d'accueil du SNU ferment, comme l'École nationale de techniciens de l'équipement, à Valenciennes, et qu'il n'y ait plus de lieu dans le Valenciennois pour accueillir ces jeunes. Quelle réponse pouvez-vous nous apporter sur ce point ?
Nous sommes confrontés à un défi. Si c'était simple, je ne serais pas devant vous et il n'y aurait pas autant de débats, et si l'engagement relevait de l'évidence, la réponse, quelles que soient les sensibilités politiques, aurait déjà été apportée à cette question.
À aucun moment le SNU n'est un projet exclusif, et à aucun moment nous n'opposons les engagements. Je suis particulièrement fière d'accompagner l'engagement des jeunes dans toute sa diversité. Qu'ils deviennent scouts ou jeunes sapeurs-pompiers (JSP), qu'ils rejoignent une association environnementale, qu'ils choisissent de consacrer des après-midi à la SPA – Société protectrice des animaux – ou qu'ils soient délégués de classe, tout cela a un sens.
La question est de savoir comment on reconnaît ceux qui agissent, comment on les regarde, comment on leur donne de l'importance, mais aussi ce qu'on fait pour ceux qui ne s'engagent pas. Ils n'ont pas toujours conscience de leur capacité à le faire. Parfois, c'est simplement de l'autocensure, parce qu'ils manquent de capital social, mais il arrive aussi qu'il n'y ait pas d'offre territoriale leur permettant de s'engager.
Ma mission ne consiste pas à créer des hiérarchies entre les engagements. Mon cœur vibre quand je vois sur les Champs-Élysées, le 14 juillet, le carré final des jeunes issus du SNU ou du service civique, que je n'ai opposés à un aucun moment. Le service civique fait même partie de la phase 3 du SNU.
Je ne sais pas si c'est aussi le cas pour vous, mais quand je vois des jeunes des lycées militaires ou de jeunes sapeurs-pompiers, cela me touche. Cette jeunesse donne de son temps. Leur présence sur les Champs-Élysées est un signe de la reconnaissance de la nation pour ces jeunes qui font du volontariat sur leur temps personnel. C'est parfois au détriment de moments plus ludiques ou plus festifs, mais cela les grandit, en plus de rendre notre pays plus fort. La fierté qui se lit dans le regard des parents lors de la remise des brevets des cadets de la gendarmerie, après un séjour au titre du SNU ou à l'issue de l'obtention du Bafa ou du BAFD – brevet d'aptitude aux fonctions de directeur – traduit la reconnaissance du début d'un parcours, d'un apprentissage de la citoyenneté.
Pour aller plus loin, madame Colboc, il faut arriver à toucher des jeunes qui ne se sentent peut-être pas concernés actuellement. Nous avons besoin, pour cela, de l'Éducation nationale, d'enseignants qui parlent et de témoignages. Un tiers des jeunes qui font leur SNU ont un ami, un copain ou un voisin qui leur en avait parlé. Neuf jeunes sur dix sont extrêmement satisfaits d'avoir fait le SNU : ce sont eux les meilleurs ambassadeurs du dispositif. Les encadrants, les responsables associatifs et les parents ont aussi une responsabilité forte. Le continuum éducatif doit jouer son rôle.
Pour toucher plus de jeunes, j'ai également besoin de vous, de votre capacité à mobiliser les maires et les structures associatives que vous connaissez. On dit tout le temps que les politiques publiques ne doivent pas être construites exclusivement à Paris, qu'elles ne doivent pas être descendantes. Je suis plus que jamais d'accord avec cette idée : il faut que tout le monde se mobilise.
C'est pourquoi je vous avais invités, toutes sensibilités confondues, à venir voir de vos propres yeux où on en est et ce qu'il faut améliorer, car c'est à un défi que nous avons affaire. Il faut assurer la transparence nécessaire et traiter les écueils qui peuvent se présenter à nous. Vos questions montrent la nécessité d'un débat parlementaire sur les opportunités qui s'ouvrent et sur les hypothèses envisagées pour la généralisation du SNU.
Toutes les évolutions qui ont eu lieu, en ce qui concerne le SNU, résultent d'une concertation avec des députés, des organisations syndicales de l'Éducation nationale et de l'éducation populaire, des associations de parents, mais aussi des hommes et des femmes qui accompagnent l'engagement des jeunes, c'est-à-dire plus largement le monde associatif et les élus locaux. Ceux qui permettent, au plus près de la vie quotidienne, à des jeunes de s'engager, ce sont les maires, les écoles et les associations, lesquelles font partie des piliers du lien social.
Madame Parmentier, vous avez évoqué certains dysfonctionnements. Il en existe en effet et ma mission consiste à les réduire au maximum. Le SNU a presque été victime de son succès. On nous a longtemps reproché, parfois d'une manière très personnelle, de ne pas avoir atteint les objectifs fixés, mais ce n'est pas un totem. Je ne fais pas une course aux chiffres. L'année dernière, le nombre de jeunes accueillis était inférieur à l'objectif, mais le plus important était de les accueillir dans de bonnes conditions. Je n'ai jamais considéré qu'il s'agissait simplement d'une case à cocher. Cette année, la situation est inverse : il y a plus de jeunes volontaires que de places ouvertes. Nous expertisons donc la possibilité d'une nouvelle période de séjour d'ici à la fin de l'année, en priorité pour ceux qui auront bientôt 17 ans et dont il ne faudrait pas amoindrir le goût de l'engagement. Les autres pourront bénéficier du SNU l'année prochaine, en particulier durant la période estivale.
Il arrive que des jeunes ne viennent pas. On l'apprend au dernier moment ou deux ou trois jours plus tôt. Pour les séjours qui ont eu lieu en juin, il fallait s'inscrire au plus tard en mai, et il arrive que des adolescents changent d'avis. Le plus important, c'est de nous le dire, afin de ne pas priver d'autres jeunes, inscrits sur liste d'attente, d'une occasion de dernière minute. C'est un peu tard, et cela implique effectivement de pouvoir bouger rapidement, mais nous proposons à d'autres jeunes de venir quand une place se libère ainsi – cela fait partie des améliorations en cours – au lieu de nous contenter d'une solution de facilité qui serait de ne rien changer. Il faut également faire passer un message de responsabilité : si un jeune qui s'est inscrit pour un séjour ne souhaite plus venir, ce n'est pas un drame, mais plus vite il le dit, en se comportant en citoyen, plus vite il permet à un autre jeune de venir, dans des conditions plus confortables que si c'est à la dernière minute.
Par ailleurs, il n'y a pas de rupture d'égalité. La priorité est de permettre à tout le monde de s'engager.
La reconnaissance de l'engagement au sein de Parcoursup a fait l'objet de questions bien légitimes, mais il n'y a pas que le SNU qui est reconnu à ce titre : on prend aussi en compte, par un bonus, la participation à la démocratie scolaire – quand on est écodélégué, délégué de classe ou membre d'un conseil académique de la vie lycéenne ou d'un conseil des délégués pour la vie lycéenne – et il en est de même quand on est membre d'un conseil municipal ou régional des jeunes, ou quand on est jeune sapeur-pompier. Ces jeunes méritent qu'on reconnaisse leur engagement. Quand on se préoccupe des autres, il n'y a pas de raison que cela compte pour du beurre. Si on s'engage dans le SNU, comme dans le service civique, au sein des cadets de la gendarmerie ou en tant que bénévole dans une association, il est normal que cela soit pris en compte par Parcoursup, au même titre que les autres formes d'engagement.
Nous allons continuer à proposer de plus en plus de places ; la liste d'attente doit être aussi courte que possible. Quand on voit ces jeunes qui ont envie, cela nous oblige, il faut aller jusqu'au bout de la démarche.
Madame Périgault, le SNU transmet effectivement le goût de la nation, et le site de Sourdun, que vous avez évoqué, est magnifique. Vous avez également souligné un point important qui est l'unité de la formation et des messages.
Il ne faut pas laisser s'installer des idéologies – pour reprendre votre mot – dans les discours. Nous sommes extrêmement vigilants : tous les encadrants sont formés à une pédagogie active, qui vise à éviter aussi bien le laxisme qu'un excès de contraintes. Nous faisons appel à des professionnels de l'encadrement des jeunes, qui sont diplômés.
Comment faire, néanmoins, pour que des gens qui ont initialement des cultures très différentes – certains viennent de l'éducation populaire, associative ou sportive, d'autres de l'Éducation nationale, tandis que d'autres encore ont servi sous les drapeaux – développent une culture commune dans le cadre de ce projet, c'est-à-dire pour arriver à une sorte d'alignement ? Il faut non seulement des formations, mais aussi une fidélisation des encadrants. Nous projetons d'avoir, dès la rentrée prochaine, des centres permanents pour accueillir tout au long de l'année des classes engagées, grâce à des encadrants pérennes. Il y aura ainsi moins de recrutements, sinon au coup par coup, du moins séjour par séjour. Pour vous donner un ordre de grandeur, 15 000 encadrants ont été recrutés depuis début 2019, ce qui est énorme.
Nous sommes vigilants, je l'ai dit. Chaque fois qu'on m'a fait remonter un comportement pédagogique ou des propos ne correspondant pas au projet philosophique qui est celui du SNU, des mesures fermes ont été prises, de la suspension à un signalement au titre de l'article 40 du code de procédure pénale ou à la saisine, quand c'est nécessaire, de l'inspection générale. Quand des parents acceptent de nous confier la responsabilité de leurs enfants, qui sont ce qu'ils ont de plus cher, il faut être à la hauteur de leur confiance.
Monsieur Croizier, l'engagement de ces jeunes, qui suscite en eux une fierté profonde et permet de tisser des liens, est en effet absolument essentiel. Cela ne mérite donc aucune caricature. Chaque fois qu'un député, quelle que soit sa sensibilité politique, m'a saisie, je lui ai apporté des réponses.
Des défis se posent, en effet. Nous accueillons actuellement à peu près 10 % d'une classe d'âge : 80 000 jeunes sont passés par le SNU depuis sa création. Dans quelques mois, plus de 100 000 jeunes auront peut-être levé le drapeau, chanté La Marseille et mis ces uniformes qui créent quelque chose de commun et que les jeunes sont particulièrement fiers de porter.
Il n'existe ainsi plus aucune différence entre eux à l'instant t : on ne voit plus qui a les moyens de mettre le polo à la mode ou une parka très étanche et très agréable l'hiver, mais très chère. Les jeunes ont le sentiment, essentiel, de vivre une aventure dans laquelle il n'y a pas d'autre différence que le mérite et l'effort et qui est placée sous le signe de la découverte de l'autre. C'est fort, et cela leur demande d'aller chercher en eux autre chose. Ils ne viennent pas avec ce qu'ils ont, mais avec ce qu'ils sont. Cela demande parfois de leur part des choses un peu difficiles, comme de ne pas utiliser un téléphone portable pendant toute une journée, et il faut apprendre La Marseillaise ou Le Chant des partisans. Au début, ils rigolent un peu, mais très vite, comme ceux qui ont assisté aux cérémonies de clôture l'ont vu, ils sont émus, ils veulent être les derniers à lever le drapeau ou à chanter. Cela implique chez eux un dépassement, et cela crée des amitiés.
J'espère, monsieur Croizier, que les préfets et les maires mobiliseront les jeunes du SNU pour les cérémonies qui se déroulent dans les territoires. S'ils gardent leur uniforme à la fin de leur séjour, c'est pour pouvoir le remettre lorsqu'ils participent aux moments patriotiques et mémoriels et continuer ainsi à s'inscrire dans un parcours. Le séjour de cohésion n'est qu'une étape.
Madame Keloua Hachi, la sécurité est absolument essentielle. J'en ai déjà parlé avec un certain nombre d'organisations syndicales. Si vous avez été témoin de situations difficiles, ou si on vous en a rapporté, il faut actionner l'article 40 du code de procédure pénale. Je l'ai fait chaque fois que j'ai eu la moindre information ou le moindre doute. Ce sont des mineurs, encadrés par des majeurs.
S'agissant du recrutement, chaque homme ou chaque femme qui encadre ce projet a été formé, est titulaire d'un diplôme et a fait l'objet d'un contrôle d'honorabilité avec consultation du fichier judiciaire automatisé des auteurs d'infractions sexuelles et violentes, et du bulletin n° 2 du casier judiciaire. Les encadrants ont le Bafa ou le BAFD, voire davantage. Un tiers des encadrants viennent ainsi du monde de l'Éducation nationale : ce sont des CPE, des proviseurs ou des enseignants, qui encadrent des jeunes au quotidien. Un autre tiers est issu de l'éducation populaire : il s'agit de médiateurs, d'animateurs qui encadrent au quotidien nos enfants au sein du monde associatif, dans des colonies de vacances ou durant le temps extrascolaire ou périscolaire. Le dernier tiers est constitué de réservistes ou d'hommes et de femmes qui ont porté l'uniforme. Nous ne les recrutons pas sans formation, à la fois commune et particulière. Il ne faut pas jeter l'opprobre sur ces 15 000 encadrants, qui sont particulièrement formés et contrôlés.
S'agissant de l'utilisation du temps scolaire, la proposition de volontariat qui a été faite n'est pas sortie de nulle part. Elle a fait l'objet de consultations, que j'ai lancées en janvier. Les enseignants et les enseignantes qui le souhaitent pourront engager une classe, de même qu'ils peuvent déjà développer un projet pédagogique ou une classe thématique – il existe ainsi des classes centrées sur l'arbitrage, la défense ou la culture. Les voyages scolaires et l'école hors les murs n'ont jamais été des pertes de temps. Les compétences ainsi développées sont une chance.
Madame Bourouaha, j'ai eu le grand plaisir de débattre, il y a deux ans, lors de la Fête de l'Humanité, avec Léon Deffontaines, qui était alors le responsable des jeunes communistes – c'était avant qu'il devienne un des porte-parole du président Roussel. J'ai trouvé qu'il était moins catégorique, plus nuancé. Le projet communiste est un peu différent, mais il y a dans l'histoire de votre parti un goût très prononcé pour le projet républicain, pour le dépassement de l'assignation à résidence. Une seule émancipation est possible, par la République. Comment faire pour donner à des jeunes qui viennent de milieux différents une confiance en eux plus forte et pour qu'ils transforment ensuite cette confiance en engagement ? Quinze jours ne transforment pas tout : le séjour de cohésion n'est qu'une petite graine, une source de repères, de possibilités, d'une capacité de se projeter. Ce sont ensuite les parcours individuels – par des missions d'intérêt général ou un engagement long dans le cadre de la phase 3 – qui feront la différence, et ce sont les citoyens que ces jeunes deviendront qui composeront le visage de notre pays.
Vous avez suggéré que le SNU coûtait beaucoup trop cher. Ces 140 millions sont destinés à un projet complémentaire des formes d'engagement qui existaient déjà. Pas un euro n'a été pris sur l'éducation populaire – elle a bénéficié cette année de 15 millions supplémentaires, et 20 millions de plus sont allés au service civique. Les crédits mobilisés représentent 16 % du budget de la jeunesse. Je rappelle, en particulier, que le service civique bénéficie de 580 millions d'euros et qu'il fait partie de la phase 3 du SNU. Il n'y a donc pas d'opposition qui tienne. On me demande aussi pourquoi ces 140 millions ne sont pas ajoutés au budget de l'Éducation nationale, mais celui-ci s'élève à 59 milliards d'euros et il a augmenté de 10 % ! Ce qui émancipe, c'est l'école, bien sûr. Elle permet à notre jeunesse d'avoir un esprit bien fait dans un corps en bonne santé. Élever ses enfants, leur apporter des enseignements fondamentaux, est le projet de toute nation, mais il faut rester nuancé : j'ai rappelé les chiffres, et je crois que pas un euro consacré au SNU n'est mal dépensé. Un tiers des crédits – je pense que vous y serez sensible –, madame Bourouaha, va aux structures d'éducation populaire qui accueillent les séjours.
Madame Descamps, l'initiative que vous avez prise est très importante, car elle permet de montrer la pluralité des formes d'engagement, sans aucune idée de hiérarchie entre elles, ce qui est essentiel. On peut s'engager dans un Ehpad pour assurer le lien intergénérationnel, dans le Souvenir français pour faire vivre des questions mémorielles, en tant que JSP ou dans une association environnementale : aucun de ces engagements n'est supérieur aux autres. La question, c'est plutôt de savoir comment on fait en sorte que les jeunes s'engagent. Quand ils le font, ils prennent peut-être davantage conscience de ce qu'ils ont en commun, mais aussi de leur place et de leur responsabilité. Il cesse d'être témoins, de regarder ce qui se passe autour d'eux : ils bâtissent les choses, et donc ils en prennent soin.
Le SNU, au-delà du développement de l'engagement, du goût de l'autre et de la responsabilité, est une opportunité pour l'aménagement du territoire. Lors des séjours organisés en juillet, 127 sites ont servi à l'accueil de presque 17 000 jeunes. La généralisation dont il est question impliquerait une augmentation des capacités d'accueil et il y aura, dès la prochaine rentrée scolaire, des travaux pour installer des centres permanents capables d'assurer un accueil tout au long de l'année. Cela peut concerner des lieux qu'on veut faire revivre, du bâti communal hérité de l'éducation populaire ou des sites de colonies de vacances, dont le modèle économique serait ainsi beaucoup plus stable. Le collectif de l'éducation populaire a d'ores et déjà proposé plus de quarante sites permanents. Je le redis, n'opposons pas l'éducation populaire et les projets pédagogiques dans le cadre du SNU.
On peut faire des propositions pour que les choses évoluent, mais sans caricaturer un projet qui permet d'abord à des jeunes de choisir de servir, de se dépasser et de rendre fier leur entourage.
Vous m'avez aussi demandé pourquoi on ne mettait pas plus d'argent dans des projets permettant à des jeunes de partir en vacances. Vacances apprenantes a concerné 1 million de jeunes, et Colos apprenantes, qui fait partie du dispositif, a permis à plus de 250 000 d'entre eux de partir. Ce qui était initialement une réponse à la crise de la covid a été pérennisé pour la quatrième année consécutive – je remercie la majorité d'avoir conforté les budgets prévus. Nous croyons profondément que la question du départ en vacances est essentielle, et nous faisons preuve d'une certaine continuité en la matière. Par rapport à 2009, nous avons divisé par deux le nombre de jeunes qui ne partent pas en vacances au moins une semaine – ils étaient alors 17 %. Ils restent encore trop nombreux, et c'est pourquoi nous continuons à mener le combat, mais il ne faut pas oublier pour autant l'évolution qui a eu lieu. Parmi les travaux menés actuellement, un projet de pass colo est en cours d'expertise. Il permettra, j'en ai la certitude, à plus de 80 % d'une génération de partir en vacances.
Madame la secrétaire d'État, le mois dernier, vous avez annoncé la création d'un séjour de cohésion de douze jours dans le cadre du SNU, sur une base de volontariat, à compter de mars 2024. Ce séjour, qui se déroulera dans le cadre d'un projet pédagogique de classe, permettra d'offrir à un plus grand nombre de jeunes l'occasion de développer leur culture de l'engagement et de vivre un brassage sociogéographique. La mixité attendue suppose que les élèves d'une même classe soient regroupés avec des jeunes venant d'autres horizons géographiques et d'autres types d'établissements scolaires. Les classes de CAP – certificat d'aptitude professionnelle –, par exemple, seront-elles incluses, ou uniquement les secondes ? Est-il confirmé que les jeunes changeront de département ou de région et d'environnement – rural ou urbain, par exemple ? Quelles contraintes inclurez-vous dans l'organisation afin d'éviter que plusieurs classes du même établissement ou issues de villes ou d'établissements trop proches se retrouvent dans le même lieu au même moment ?
Dans une interview au Figaro, le 15 juin, vous esquissez le nouveau format du SNU, qui prendrait selon vous une forme de projet pédagogique de classe proposé à des élèves de seconde issus de lycées volontaires. Vous ajoutez qu'« il n'y aura pas de pas d'obligation, un peu comme un voyage scolaire ».
Passer d'un SNU à une sorte de classe verte ne me semble pas être un signal fort indiquant une volonté de l'Élysée de tendre vers un renforcement de la cohésion au sein de la jeunesse, après des journées d'émeutes où nous avons vu des jeunes gens scolarisés détruire et brûler de nombreux établissements scolaires. L'intégration du SNU à l'un des multiples projets pédagogiques de l'Éducation nationale vous semble-t-elle le meilleur moyen de renforcer la cohésion de la jeunesse autour de la nation ?
Alors que notre société aspire toujours plus à une meilleure égalité entre les femmes et les hommes, il est essentiel d'examiner la contribution qu'apporte le SNU à cette démarche. Le SNU permet en effet de renforcer le sentiment d'appartenance à la nation, de promouvoir les valeurs de citoyenneté et de solidarité, tout en favorisant l'engagement des jeunes. Il est donc primordial que les jeunes femmes et les jeunes hommes puissent y jouer un rôle actif. À ce titre, vous nous avez informés que les filles participaient à hauteur de 57 % à cette initiative : bravo à elles et bravo à vous ! Des mesures doivent-elles être envisagées pour assurer la participation des jeunes garçons à cette expérience nationale ?
Par ailleurs, le SNU est un outil majeur de formation et d'acculturation des jeunes générations afin d'apporter des réponses concrètes aux discriminations de genre. Pourriez-vous nous confirmer que les activités réalisées par les jeunes citoyens au sein du SNU, ainsi que leur cadre de vie lors de ce service, prônent et assurent le respect de l'égalité entre les femmes et les hommes ?
Vous avez bien résumé le projet que porte le gouvernement auquel vous appartenez : moins d'école et plus de SNU. Moins d'école, en effet, avec douze jours de moins, consacrés à ces séjours de cohésion que vous envisagez à partir de l'année prochaine – et donc plus de SNU. Moins d'école, ce sont aussi les 1 500 postes d'enseignants supprimés par le budget 2003, suppression qui va de pair avec l'augmentation des moyens du SNU – 200 millions d'euros.
Ce choix traduit une conviction idéologique très marquée, presque caricaturale : il vaudrait mieux assurer à notre jeunesse plus d'encadrement militaire que d'encadrement pédagogique ! Il n'est ainsi pas surprenant de voir se dessiner un arc, plus autoritaire que républicain, qui va de l'extrême droite jusqu'à la Macronie pour soutenir votre projet et votre politique, alors que de nombreuses organisations lycéennes et des fédérations de parents d'élèves, comme la Fédération des conseils de parents d'élèves, et les organisations syndicales enseignantes dénoncent votre conception de la place de notre jeunesse et votre projet de SNU.
Vous êtes manifestement engagée dans une entreprise de recomposition idéologique qui vous rapproche chaque jour un peu plus du projet de société de l'extrême droite. Allez-vous tenir notre jeunesse à l'écart de cette entreprise politicienne ?
En Corrèze, le SNU est un succès. Les séjours de cohésion organisés dans le département ont d'excellents retours et le dispositif tourne très bien. Aucune des dérives observées ailleurs n'a été constatée. Les encadrants mobilisés pour suivre les jeunes sont très professionnels et performants, présentant des profils complémentaires, et ils font preuve d'un engagement sans faille pour transmettre à la jeune génération les valeurs de notre République et du bien vivre ensemble.
La Corrèze, terre de résistance, authentique et chiraquienne, reste candidate à l'accueil de séjours dans le cadre du SNU, car elle dispose d'infrastructures sportives et culturelles adaptées et de toutes les ressources humaines nécessaires à la réussite de l'accompagnement des jeunes. Au vu de ce retour d'expérience positif, je serais, pour ma part, favorable à la généralisation du SNU pour tous les jeunes en âge d'y participer, sans dispense. Il est en effet trop important, et même urgent, compte tenu des événements qui ont secoué récemment notre pays, de consolider chez nos jeunes les valeurs de respect, de solidarité, de mémoire, d'inclusion et d'effort, ainsi que le sentiment de fierté et d'appartenance à la nation.
Nous avons en revanche besoin de plus de visibilité quant à une éventuelle généralisation. Le Président de la République semblait l'écarter en mars dernier, mais les violences récemment perpétrées ne changeraient-elles pas la donne ? Si tel était le cas, quels moyens financiers et humains doivent être mis en œuvre pour généraliser un séjour SNU sur la base de la cohésion, des valeurs de la République, du savoir-être et du savoir-vivre ? Quel bonus supplémentaire afin de récompenser leurs engagements citoyens ?
Je tiens à souligner les retours positifs que suscite le service national universel, en particulier chez les jeunes du département de la Moselle qui ont pu en bénéficier. Leurs témoignages réguliers mettent en évidence l'impact bénéfique de ce programme sur leur développement personnel et leur engagement citoyen. Cet engagement pourra se traduire, comme vous l'avez évoqué dans votre propos liminaire, madame la secrétaire d'État, par leur participation à l'organisation des prochains Jeux olympiques et paralympiques, pour faire mixité et construire cette nation sportive.
Le SNU est fondé sur le volontariat, lequel peut aussi avoir ses limites, comme le montrent certaines enquêtes d'opinion. Comment aller chercher ces jeunes très éloignés de l'école et de l'emploi, parfois en rupture familiale – je pense notamment aux jeunes de nos quartiers prioritaires de la politique de la ville –, pour permettre une plus grande mixité ?
L'actualité récente, avec les émeutes et leur lot de violences, nous démontre qu'une partie de notre jeunesse est complètement désœuvrée et, pour ainsi dire, perdue – la moitié des personnes interpellées étaient des mineurs. Quand l'autorité de l'État est quotidiennement attaquée et que nos valeurs communes sont bafouées, le SNU pourrait être un formidable outil de transmission des valeurs de la République et de l'amour de la France. Or son bilan est aujourd'hui contrasté, en ce qu'il est un peu à la frontière entre la colonie de vacances et le service militaire. Coûteux, mal encadré, il peine à trouver son public : avec un potentiel de 800 000 jeunes concernés chaque année, seuls 32 000 participants se sont lancés en 2022, avec un objectif annoncé de 50 000.
Comment comptez-vous transformer le SNU, qui tient plutôt aujourd'hui d'un stage accéléré de citoyenneté, en un projet plus ambitieux, plus sérieux et plus utile, pour que les jeunes retrouvent le goût de l'engagement au service de la France ?
On ne compte plus les dysfonctionnements dans l'organisation du service national universel, que Politis qualifiait même de « bourbier logistique ». Les critiques sont nombreuses et Florence Ihaddadene, sociologue spécialisée dans l'engagement et le travail des jeunes, estime même que le SNU est avant toute une mise au pas des jeunes, considérés comme des sous-citoyens. À ce titre, l'aspect militaire du SNU semble fonctionner correctement et le site du ministère des Armées fait même la promotion d'une préparation militaire effectuée en février dernier par une vingtaine de jeunes âgés de 15 à 17 ans. Esprit de corps et maniement du fusil réglementaire de l'armée, parcours d'obstacles et marche suivie d'un bivouac : comme l'indique le site, le SNU, c'est aussi l'aventure.
Gabriel Attal, votre prédécesseur à ce poste, affirmait que le SNU était la réforme de société la plus puissante des dernières années. Promotion de l'ordre plutôt que de la loi, respect de la hiérarchie plutôt qu'esprit critique, obéissance plutôt qu'émancipation : sont-ce vraiment les valeurs que vous souhaitez inculquer à nos jeunes ?
Permettez-moi d'abord de saluer, en tant que député de Boulogne-Billancourt, les efforts du Gouvernement pour promouvoir la participation et l'inclusion des jeunes dans cette initiative ambitieuse. Le SNU joue un rôle essentiel dans la formation citoyenne et le renforcement des valeurs communes. Il est crucial que tous les jeunes, indépendamment de leur nationalité, puissent y participer pleinement.
Cependant je m'inquiète de savoir comment le SNU aborde spécifiquement la situation des élèves étrangers inscrits dans une classe volontaire pour un séjour de cohésion. Quelles mesures concrètes sont mises en place pour garantir que ces élèves étrangers bénéficient d'une expérience aussi enrichissante et inclusive que leurs pairs français, tout en respectant leur identité culturelle et leur diversité linguistique ?
Vous avez déjà largement abordé dans votre intervention la question que je souhaitais poser. Je tiens cependant à vous remercier pour votre dynamisme, qui imprègne votre présentation du SNU. Ce dispositif, intéressant pour nos jeunes, pourrait être largement valorisé dans un CV.
Le mot d'un sapeur-pompier encadrant le séjour organisé à Douai, qui expliquait judicieusement dans un journal local qu'à cet âge, les jeunes sont des éponges et que c'est le bon moment pour leur inculquer les valeurs et l'esprit de cohésion, est d'autant plus vrai après les violences que la France a connues dernièrement et auxquelles des mineurs ont participé. Le séjour, qui trouve un équilibre entre loisir et discipline, oblige les jeunes à se retrouver sur un pied d'égalité et semble faire naître des amitiés, des réflexions et des comportements jusqu'alors insoupçonnés chez certains, ce qui est une très bonne chose.
Cependant la physionomie du public accueilli manque de représentativité. En 2022, en effet, un tiers de ces jeunes avaient un parent issu d'une d'un corps en uniforme, alors que ces derniers ne représentent que 2 % de la population. Ne faudrait-il pas accélérer l'expérimentation ou la généralisation, afin que l'ensemble des jeunes se sentent concernés dès maintenant.
Enfin, combien de lycées se sont-ils portés volontaires pour cette initiative ?
Les témoignages et la voix des plus anciens de notre pays sont souvent empreints d'une émotion toute particulière lorsqu'ils évoquent la période de leur service militaire – devenu service national en 1997, puis service volontaire. Cette émotion est parfois nourrie par des amitiés anciennes et persistantes, scellées durant cette expérience de jeunesse si structurante, qui a aussi mis en lumière des vertus que l'on ne retrouvait pas toujours ailleurs – celles d'un brassage transcendant les origines sociales des uns et des autres.
Ma question porte donc sur le profil des participants au SNU : comment mieux y favoriser la mixité sociale ? De fait, les chiffres d'octobre 2022 de l'Institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire (Injep), par exemple, montrent une sous-représentation des publics issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville et des enfants d'ouvriers.
La question de savoir si le service national universel deviendra obligatoire est sur les lèvres de tous les lycéens. Le Président de la République avait en effet assuré dès sa campagne présidentielle de 2017 qu'il voulait renforcer le lien entre l'armée et la nation grâce à l'instauration d'un service national de courte durée, obligatoire et universel. En raison du défi logistique qu'elle représente, cette généralisation ne pourra pas se faire du jour au lendemain : se concrétisera-t-elle ? Une partie de notre jeunesse est perdue. Une partie des repères nationaux s'effritent et beaucoup ne se reconnaissent pas dans nos valeurs républicaines. Le SNU pourrait être une machine formidable pour créer des citoyens français – c'est un beau projet sur le papier mais, dans la réalité, c'est plutôt un flop.
Alors que l'objectif avait été fixé à 50 000 jeunes de 15 à 17 ans en 2022, seuls 32 416 ont participé au SNU l'an passé. Comment ferez-vous pour rendre ce projet plus attractif ? S'il est obligatoire, à quel moment sera-t-il mis en place ? Les jeunes feront-ils leur stage de deux semaines au mois de juin, après la fin des cours, ou voulez-vous l'inscrire dans le temps scolaire, sous la forme de modules de quelques heures par mois ?
En Haute-Savoie, le SNU fonctionne bien. Cette initiative répond à des besoins égaux sur tout le territoire. Cependant on y trouve encore beaucoup d'enfants de cadres ou de gendarmes, qui savent déjà ce qu'ils y trouveront. La question de la mixité est donc très importante. Née en 1969, j'ai connu l'époque où les garçons faisaient encore leur service national, lieu où les gens du Midi rencontraient ceux du Nord, où les cadres rencontraient les ouvriers et où l'on traitait l'illettrisme. Il s'agissait d'un passage qui avait vocation à forger une citoyenneté et permettait aux jeunes de faire nation. Sans remettre en cause le fait que notre armée soit aujourd'hui professionnelle, je souscris à l'idée d'une généralisation du SNU et je souhaiterais avoir votre avis sur le rapport du Sénat, notamment sur les enjeux financiers.
Je poserai trois questions, politiques et non polémiques. La première, que vient de poser Mme Pollet, est de savoir si le Gouvernement a l'intention de rendre le SNU obligatoire et, si tel est le cas, avec quel budget et selon quel calendrier.
En deuxième lieu, si le SNU demeure facultatif, du moins pendant quelques années, comment le rendre plus incitatif pour les publics de jeunes qui en auraient le plus besoin – en particulier à ceux qui habitent les 300 quartiers prioritaires de la politique de la ville ? Pouvez-vous entreprendre quelque chose visant plus directement ces jeunes ?
Pour ce qui est enfin de l'articulation entre le SNU et le lycée, ne faudrait-il pas réfléchir à une convention entre le ministère de l'Éducation nationale et le vôtre qui permettrait que le SNU trouve sa place au mois de juin, qui est de toute façon un mois perdu – le ministre vient de le découvrir, mais c'est ainsi depuis trente ans ?
Tous les enfants et tous les jeunes sont égaux devant la volonté de faire ou non le SNU : il n'y a pas lieu de viser certains quartiers plutôt que d'autres. Le SNU est universel.
Madame la secrétaire d'État, on sent que vous êtes passionnée par vos missions ministérielles. Je partagerai un témoignage plus personnel : j'ai en effet eu l'honneur de faire mon service militaire et, comme de nombreuses personnes dans cette pièce, j'en ai tiré des choses très positives. Je suis de la classe 96/10 : je faisais alors mes études et il n'a pas été facile de devoir les interrompre pour les reprendre ensuite. Je suis allé jusqu'au bout, et cela n'a pas été simple, mais j'ai côtoyé des personnes, qui venaient d'ailleurs – principalement d'outre-mer – et qui m'ont beaucoup appris. Certains se réjouissent parfois de l'arrêt du service militaire, mais c'était un temps d'échanges et de transmission.
J'ai été surpris d'entendre que 5,7 % seulement d'enfants issus des quartiers effectueraient un SNU. Ce chiffre très faible interroge. En tout cas, passer quelque temps au SNU ne ferait pas de mal aux jeunes interpellés à l'occasion des récents événements. Je crois beaucoup à la transmission des valeurs de la République et de leur respect.
J'ai rencontré aussi…
Madame Piron, le brassage territorial et la mixité sont essentiels. Souvent, la notion de mixité n'est associée qu'à la mixité sociale, mais il faut penser ce mot au pluriel, en combinant mixité territoriale et mixité sociale. Nous nous intéressons bien sûr aux métiers des parents et aux origines sociales des jeunes, mais nous voulons aussi créer l'unité en combinant les territoires les plus ruraux et les plus urbains ou périurbains, auxquels correspondent des réalités de vie assez différentes. Pour répondre à votre inquiétude légitime, je précise que, dans le projet des classes engagées, même lorsqu'une classe se rend dans un même lieu, les jeunes qui la composent ne restent pas ensemble dans leur groupe de classe et sont, au contraire, mélangés selon des critères territoriaux, la mixité procédant ainsi de la composition des maisonnées.
Madame Blanc, vous me donnez l'occasion d'expliciter une expression que j'ai employée dans le Figaro et qui aurait en effet pu être plus claire : le SNU n'est pas un voyage scolaire pour les classes engagées, mais les modalités s'y apparentent pour ce qui est de la contrainte ; de même qu'un parent peut refuser que son fils ou sa fille participe à un voyage scolaire, il peut refuser sa participation à ce séjour. Le volontariat de la classe ne remet pas en cause l'autorité exercée par le parent sur ses enfants et la nécessité de recueillir son autorisation.
Madame Calvez, merci de souligner la forte mobilisation des jeunes filles, dont la représentation plus forte se confirme d'année en année. C'est le signe d'une volonté plus forte de s'engager, dans des engagements peut-être beaucoup plus universels – peut-être parce que plus récents. Cette génération a le goût de l'égalité réelle, et le dispositif va dans ce sens.
Pour garantir les besoins fondamentaux de nos sociétés, les questions d'égalité et de consentement sont évoquées dès le début du séjour. En effet, ces jeunes de 15 à 17 ans, issus de milieux très différents, ne se connaissent pas : il faut du commun, et le commun suppose des règles communes, lesquelles couvrent, outre celles de l'emploi du temps, les questions de violences sexuelles et sexistes, de consentement, de harcèlement. La parole commence à se libérer après deux ou trois jours, donnant lieu à des témoignages et parfois, a posteriori, à l'engagement des procédures requises.
Monsieur Vannier, vous avez eu des propos très durs contre les jeunes qui s'engagent – contre moi aussi, mais j'ai l'habitude. Ma mission n'est pas d'être la police de la morale, qui jugerait les engagements des jeunes. S'ils souhaitent participer, et si plus de 70 % d'entre eux souhaitent exécuter leur mission d'intérêt général dans l'année qui suit, je ne vois pas pourquoi ils seraient moins bien accompagnés que d'autres – au contraire ! Chaque jeune a – et c'est heureux – le droit et la liberté de choisir ce qui le touche le plus.
Quant à la promotion du SNU sur les sites des armées, qu'évoquait M. Boumertit, elle est tout aussi légitime que sur le site de l'Éducation nationale. L'initiation au maniement des armes n'a aucunement lieu durant la phase du séjour de cohésion. En revanche, dans le cadre de leur mission d'intérêt général, les jeunes peuvent choisir de s'engager dans une préparation militaire, comme ils peuvent choisir de rejoindre la SPA ou les jeunes sapeurs-pompiers : ils sont libres de leur choix. Je suis aussi fière d'un jeune qui choisit de rejoindre une préparation militaire que d'un autre qui décide de rejoindre la Croix-Rouge. Nos armées se mobilisent aussi pour permettre des engagements et il est intéressant de noter que cette jeunesse, même lorsqu'elle ne souhaite pas faire une carrière militaire, a envie de découvrir les hommes et les femmes qui nous protègent au quotidien et, au-delà, protègent des valeurs. La première phase, en tout cas, je le répète, est purement civile et ne comporte aucun maniement d'armes.
Monsieur Dubois, vous avez évoqué à très juste titre le savoir-vivre que promeut le SNU. De fait, si certains jeunes participants ont la chance d'avoir des parents très mobilisés à leurs côtés et ont déjà intégré, par exemple dans le cadre du scoutisme ou des colonies de vacances, des règles de vie en collectivité, ce n'est pas le cas pour certains autres. C'est une réalité. Le séjour de cohésion pose la question de savoir comment créer du commun et des repères qui leur permettront de trouver les codes partagés que requiert la société.
Ma mission est aussi de faire en sorte que ces engagements citoyens soient pluriels : nous leur proposons de rencontrer des hommes et des femmes passionnés, souvent des élus ou des bénévoles, et cette passion de l'engagement s'incarne – ce qui est essentiel – dans des visages qui deviennent des role models. Ce sont des héros du quotidien, de notre vie commune, ce qui leur donne la capacité de se projeter et de dépasser parfois des autocensures qui les privent de cette capacité. Cela leur permet aussi, comme le rappelait M. Cordier, de rencontrer des jeunes très différents d'eux-mêmes.
Monsieur Cordier, je suis très attaché au fait que des jeunes de l'Hexagone partent vers les outre-mer et que les jeunes d'outre-mer viennent dans l'Hexagone, car ces territoires font France et ont besoin de vivre des temps de communauté. Le voyage est certes plus long, mais les jeunes métropolitains qui partent en outre-mer sont généralement très heureux d'avoir été parmi les chanceux qui le font. C'est ainsi que l'on crée quelque chose qui nous transcende. Ce qui nous fait nous dépasser, c'est un projet, un idéal. Les jeunes doivent donc se rendre compte qu'ils ont tous part à cet idéal – et cela va dans le sens de vos propos.
Quant à la généralisation, elle est souhaitable, mais la question des dispenses se posera, car l'absence de dispenses signifierait que le dispositif est obligatoire, ce qui nécessite un débat parlementaire et une évolution législative relevant de la seule représentation nationale. Ce que je suis en train de construire aujourd'hui, c'est l'acceptabilité la plus forte, la solution au défi logistique, la création de centres permanents et la capacité à accueillir humainement ces jeunes. Viendra ensuite le débat parlementaire : ce sera alors votre volonté ou votre souhait qui fera que le SNU continuera à relever de l'incitation ou qu'il fera l'objet d'une obligation.
Si nous voulions rendre le SNU plus incitatif encore, plusieurs pistes sont à l'étude. Le programme présidentiel posait ainsi la question du permis de conduire sur un cycle long – question qui se posera tôt ou tard dans le débat. D'autres possibilités sont en discussion, mais pas encore assez mûres pour être pleinement arbitrées, qui vont de la reconnaissance d'un parcours scolaire au Bafa ou au PSC1 – certificat de prévention et secours civiques de niveau 1. Il faut de la diversité. On parle beaucoup aujourd'hui de la formation aux gestes qui sauvent, à la santé mentale ou au PSC2 pour ceux qui ont déjà obtenu le PSC1. Il faut une reconnaissance de celui qui donne, un équilibre entre les droits et les devoirs : on donne et reçoit, et le mouvement va plutôt dans le bon sens.
Monsieur Belhaddad, vous avez évoqué les nombreuses perspectives que le sport offre et je connais votre engagement en ce domaine. Vous avez également souligné l'intérêt que présente le service national universel pour favoriser la mixité et vous vous demandez comment nous pourrions inciter à s'engager des jeunes à qui cela ne viendrait naturellement pas à l'esprit. Les premiers prescripteurs sont les camarades de classe ainsi que les enseignants mais, pour ceux qui sont plus éloignés de l'école ou de l'emploi ou qui se retrouvent en rupture familiale, les associations jouent un rôle essentiel. Je pense ainsi aux enfants placés sur décision judiciaire ou aux jeunes particulièrement vulnérables. Nous avons signé des partenariats avec des associations enracinées dans les territoires, comme la fondation Face – Fondation Agir contre l'exclusion. Elles accomplissent un travail en profondeur pour sensibiliser les jeunes aux projets qu'elles soutiennent. Je profite de ce que vous êtes encore assez nombreux dans la salle pour signaler que de nombreux maires informent leurs citoyens des propositions existantes dans les bulletins municipaux, que beaucoup de gens lisent.
Monsieur Bilde, vous avez parlé d'amour de la France. Il se trouve que ce sont les termes même qu'a tenus à des jeunes du SNU, dans le Calvados, le héros Léon Gautier qui fut le dernier des Français du commando Kieffer et à qui nous avons récemment rendu hommage. À ces jeunes qui lui demandaient, avec une touchante naïveté, pourquoi donc il était allé rejoindre le général de Gaulle, il a répondu qu'on lui avait appris à aimer la France. Je crois, en effet, que c'est une chose qui s'apprend, à l'école, dans les engagements mais aussi au travers de vos témoignages, lesquels valorisent les actions de ces jeunes et leur permettent de prendre conscience de leur importance à vos yeux. J'ai reçu pour mission, notamment, de poser les bases d'une généralisation du SNU. Un décret a institué un délégué général au service national universel, ayant rang de directeur d'administration centrale. C'est une préfète qui remplit ce rôle. Elle est assistée d'une directrice académique des services de l'Éducation nationale et d'un général cinq étoiles, à présent général 2S – 2e section. C'est avec le soutien de l'Éducation nationale, des armées et du monde associatif que nous réussirons à fédérer autour de ce projet des jeunes qui viennent de milieux différents et ont des cultures différentes. Il est important de recourir à toutes les forces vives de notre pays pour renforcer les liens et construire en commun. La question de savoir s'il faudra ou non rendre obligatoire le SNU relèvera du débat parlementaire. En attendant, plus de 80 000 jeunes se sont déjà engagés dans le SNU, soit près de 10 % d'une génération et 600 000 jeunes ont choisi le service civique en dix ans. La jeunesse est engagée mais que cela ne nous exonère pas de faire des efforts pour renforcer encore les liens.
Monsieur Pellerin, toute la classe pourra partir, il n'y a pas de jeune qui en serait privé, quelle que soit sa nationalité, même si les séjours de cohésion restent réservés aux Français de 15 à 17 ans. Au-delà de cette réserve, tous les jeunes scolarisés peuvent partir.
Monsieur Fait, vous avez raison pour ce qui concerne le CV. Que voit un recruteur, en effet ? Un jeune qui s'est engagé dans le SNU, qui a pris des responsabilités associatives, qui a choisi de donner de son temps, de développer des compétences. Je pense par exemple aux chefs scouts qui se sont occupé d'autres jeunes. Bref, le recruteur verra un jeune qui a le goût de l'autre, qui a pu passer son Bafa pour se former à l'encadrement, à l'écoute, un jeune qui a su devenir autonome. Nombreuses sont les entreprises qui plébiscitent à présent le service civique, la troisième phase du SNU, et proposent d'accueillir des jeunes et de leur faire découvrir des métiers. Beaucoup d'entre eux font leur service civique dans la fonction publique ou dans le monde associatif, en particulier dans le secteur de l'économie sociale et solidaire, mais certains iront dans des exploitations agricoles ! L'évolution de l'unité passe par la compréhension des territoires et la diversité des milieux.
C'est vrai, madame Ranc, les jeunes de 15 à 17 ans sont des éponges et c'est le bon moment pour leur inculquer les valeurs citoyennes. Vous pensez qu'il faudrait élargir le champ du public concerné car un tiers des jeunes engagés ont des parents qui portent l'uniforme et vous craignez que le projet ne soit réservé à une certaine catégorie sociale. Tout d'abord, les parents doivent s'entendre au sens large de membres de la famille – cela peut être le grand-père ou l'oncle. D'autre part, la proportion de ces jeunes a tendance à baisser même si je suis fière qu'ils aient répondu à l'appel. En effet, le projet est mieux connu et compris et ce qui n'était au départ qu'une sorte d'expérimentation touchant un peu moins de 2 000 jeunes, se généralise, ce qui favorise une meilleure mixité sociale et territoriale.
Monsieur Le Vigoureux, l'Injep a été chargé d'évaluer chaque année le SNU, en particulier le séjour de cohésion. Les rapports qu'il a rendus sont précieux en ce qu'ils nous renseignent sur l'évolution du paysage sociologique ou de la mixité. Les retours d'expérience des jeunes nous permettent de faire évoluer la proposition. Nous nous sommes ainsi rendu compte qu'ils étaient très informés sur le sujet environnemental et qu'ils préféraient mener des actions sur le terrain plutôt que suivre un enseignement théorique.
Madame Pollet, je l'ai dit, le caractère obligatoire du SNU relève du débat parlementaire. Nous ne proposons pas de module séquencé. Le projet évoluera en fonction du nombre de volontaires et de notre capacité à les accueillir. C'est vrai, il faut reconquérir le mois de juin. Les séjours continueront à se dérouler tout au long de l'année mais il faudra aller jusqu'à son terme. C'est d'ailleurs pour cette raison que les programmes sont prévus pour s'étaler jusqu'à la fin juin. Lorsque deux semaines sont consacrées à un projet pédagogique, ce ne sont pas deux semaines de cours en moins mais deux semaines d'apprentissage différent.
Il faut bien entendu favoriser la mixité, madame Riotton ; d'où l'importance des évaluations qui permettent de s'assurer qu'elle progresse. Je vous l'ai dit, 5,7 % des jeunes sont issus des quartiers prioritaires de la ville. Je suis convaincue que nous pouvons faire mieux, ne serait-ce qu'en mobilisant les parents, au travers de réunions organisées dans les établissements scolaires qui auraient pour objet de les informer, de les sensibiliser mais aussi de leur donner confiance. Ce n'est pas anodin que de laisser son enfant s'engager dans le SNU.
Monsieur Chudeau, vous avez soulevé des questions qui auraient pu être polémiques mais qui ne le sont pas, en réalité, car aucun sujet n'est tabou. J'ai répondu pour ce qui concerne le caractère obligatoire. Le budget évolue en fonction du nombre de jeunes concernés. Plus nous avons d'uniformes, plus le coût à l'unité baisse. En l'état actuel, le budget est évalué à 2 200 euros pour chaque jeune. J'ai également évoqué les diverses mesures incitatives : permis de conduire, Bafa, reconnaissance, sans parler du regard que porte la nation, par l'intermédiaire des élus et des associations, sur ces jeunes.
Monsieur Cordier, je salue le souvenir qui fut le vôtre du service militaire. Nos militaires sont tous des professionnels à présent mais nous avons conservé la volonté de disposer d'une réserve opérationnelle forte. Tout le monde peut s'engager ; à nous de présenter les différentes propositions en permettant à chacun de ne pas se sentir emprisonné dans un schéma social ou limité par ses compétences. Cette démarche n'est pas exclusive mais elle est loin d'être inutile, j'en ai acquis la certitude depuis trois ans.
Que pensez-vous de l'obligation qui pourrait être imposée aux jeunes interpellés lors des émeutes de s'engager dans le SNU ?
Le SNU n'est pas une punition. En y intégrant de force les jeunes interpellés lors des émeutes, nous prendrions le risque d'altérer l'ambiance qui règne dans les séjours de cohésion. Du reste, les jeunes qui prennent un engagement citoyen ou accomplissent le SNU ne s'attaquent pas, en général, aux mairies, au drapeau ou aux écoles car ils ont le goût de la chose publique. En revanche, la réponse pénale qui sera apportée aux jeunes coupables de violences lors des dernières émeutes devra être ferme, de même que la réponse éducative, par des stages de citoyenneté notamment. Ces agissements ne doivent en aucun cas rester impunis.
La séance est levée à onze heures cinquante.
Informations relatives à la commission
La commission désigne :
– M. Karl Olive et Mme Claudia Rouaux co-rapporteurs de la mission d'information sur le sport au travail ;
– M. Paul Vannier et M. Christopher Weissberg co-rapporteurs de la mission d'information sur le financement public de l'enseignement privé sous contrat.
Présences en réunion
Présents. - M. Belkhir Belhaddad, M. Philippe Berta, M. Bruno Bilde, Mme Sophie Blanc, M. Idir Boumertit, Mme Soumya Bourouaha, Mme Céline Calvez, M. Roger Chudeau, Mme Fabienne Colboc, M. Laurent Croizier, Mme Béatrice Descamps, M. Francis Dubois, M. Philippe Fait, Mme Fatiha Keloua Hachi, M. Fabrice Le Vigoureux, Mme Sarah Legrain, Mme Caroline Parmentier, M. Emmanuel Pellerin, Mme Isabelle Périgault, Mme Béatrice Piron, Mme Lisette Pollet, Mme Isabelle Rauch, M. Jean-Claude Raux, Mme Véronique Riotton, M. Paul Vannier, M. Léo Walter, M. Christopher Weissberg
Excusés. - Mme Béatrice Bellamy, Mme Aurore Bergé, Mme Agnès Carel, M. Raphaël Gérard, M. Frantz Gumbs, M. Stéphane Lenormand, M. Frédéric Maillot, M. Karl Olive, M. Jérémie Patrier-Leitus, Mme Claudia Rouaux, M. Boris Vallaud
Assistait également à la réunion. - M. Pierre Cordier