Nous sommes confrontés à un défi. Si c'était simple, je ne serais pas devant vous et il n'y aurait pas autant de débats, et si l'engagement relevait de l'évidence, la réponse, quelles que soient les sensibilités politiques, aurait déjà été apportée à cette question.
À aucun moment le SNU n'est un projet exclusif, et à aucun moment nous n'opposons les engagements. Je suis particulièrement fière d'accompagner l'engagement des jeunes dans toute sa diversité. Qu'ils deviennent scouts ou jeunes sapeurs-pompiers (JSP), qu'ils rejoignent une association environnementale, qu'ils choisissent de consacrer des après-midi à la SPA – Société protectrice des animaux – ou qu'ils soient délégués de classe, tout cela a un sens.
La question est de savoir comment on reconnaît ceux qui agissent, comment on les regarde, comment on leur donne de l'importance, mais aussi ce qu'on fait pour ceux qui ne s'engagent pas. Ils n'ont pas toujours conscience de leur capacité à le faire. Parfois, c'est simplement de l'autocensure, parce qu'ils manquent de capital social, mais il arrive aussi qu'il n'y ait pas d'offre territoriale leur permettant de s'engager.
Ma mission ne consiste pas à créer des hiérarchies entre les engagements. Mon cœur vibre quand je vois sur les Champs-Élysées, le 14 juillet, le carré final des jeunes issus du SNU ou du service civique, que je n'ai opposés à un aucun moment. Le service civique fait même partie de la phase 3 du SNU.
Je ne sais pas si c'est aussi le cas pour vous, mais quand je vois des jeunes des lycées militaires ou de jeunes sapeurs-pompiers, cela me touche. Cette jeunesse donne de son temps. Leur présence sur les Champs-Élysées est un signe de la reconnaissance de la nation pour ces jeunes qui font du volontariat sur leur temps personnel. C'est parfois au détriment de moments plus ludiques ou plus festifs, mais cela les grandit, en plus de rendre notre pays plus fort. La fierté qui se lit dans le regard des parents lors de la remise des brevets des cadets de la gendarmerie, après un séjour au titre du SNU ou à l'issue de l'obtention du Bafa ou du BAFD – brevet d'aptitude aux fonctions de directeur – traduit la reconnaissance du début d'un parcours, d'un apprentissage de la citoyenneté.
Pour aller plus loin, madame Colboc, il faut arriver à toucher des jeunes qui ne se sentent peut-être pas concernés actuellement. Nous avons besoin, pour cela, de l'Éducation nationale, d'enseignants qui parlent et de témoignages. Un tiers des jeunes qui font leur SNU ont un ami, un copain ou un voisin qui leur en avait parlé. Neuf jeunes sur dix sont extrêmement satisfaits d'avoir fait le SNU : ce sont eux les meilleurs ambassadeurs du dispositif. Les encadrants, les responsables associatifs et les parents ont aussi une responsabilité forte. Le continuum éducatif doit jouer son rôle.
Pour toucher plus de jeunes, j'ai également besoin de vous, de votre capacité à mobiliser les maires et les structures associatives que vous connaissez. On dit tout le temps que les politiques publiques ne doivent pas être construites exclusivement à Paris, qu'elles ne doivent pas être descendantes. Je suis plus que jamais d'accord avec cette idée : il faut que tout le monde se mobilise.
C'est pourquoi je vous avais invités, toutes sensibilités confondues, à venir voir de vos propres yeux où on en est et ce qu'il faut améliorer, car c'est à un défi que nous avons affaire. Il faut assurer la transparence nécessaire et traiter les écueils qui peuvent se présenter à nous. Vos questions montrent la nécessité d'un débat parlementaire sur les opportunités qui s'ouvrent et sur les hypothèses envisagées pour la généralisation du SNU.
Toutes les évolutions qui ont eu lieu, en ce qui concerne le SNU, résultent d'une concertation avec des députés, des organisations syndicales de l'Éducation nationale et de l'éducation populaire, des associations de parents, mais aussi des hommes et des femmes qui accompagnent l'engagement des jeunes, c'est-à-dire plus largement le monde associatif et les élus locaux. Ceux qui permettent, au plus près de la vie quotidienne, à des jeunes de s'engager, ce sont les maires, les écoles et les associations, lesquelles font partie des piliers du lien social.
Madame Parmentier, vous avez évoqué certains dysfonctionnements. Il en existe en effet et ma mission consiste à les réduire au maximum. Le SNU a presque été victime de son succès. On nous a longtemps reproché, parfois d'une manière très personnelle, de ne pas avoir atteint les objectifs fixés, mais ce n'est pas un totem. Je ne fais pas une course aux chiffres. L'année dernière, le nombre de jeunes accueillis était inférieur à l'objectif, mais le plus important était de les accueillir dans de bonnes conditions. Je n'ai jamais considéré qu'il s'agissait simplement d'une case à cocher. Cette année, la situation est inverse : il y a plus de jeunes volontaires que de places ouvertes. Nous expertisons donc la possibilité d'une nouvelle période de séjour d'ici à la fin de l'année, en priorité pour ceux qui auront bientôt 17 ans et dont il ne faudrait pas amoindrir le goût de l'engagement. Les autres pourront bénéficier du SNU l'année prochaine, en particulier durant la période estivale.
Il arrive que des jeunes ne viennent pas. On l'apprend au dernier moment ou deux ou trois jours plus tôt. Pour les séjours qui ont eu lieu en juin, il fallait s'inscrire au plus tard en mai, et il arrive que des adolescents changent d'avis. Le plus important, c'est de nous le dire, afin de ne pas priver d'autres jeunes, inscrits sur liste d'attente, d'une occasion de dernière minute. C'est un peu tard, et cela implique effectivement de pouvoir bouger rapidement, mais nous proposons à d'autres jeunes de venir quand une place se libère ainsi – cela fait partie des améliorations en cours – au lieu de nous contenter d'une solution de facilité qui serait de ne rien changer. Il faut également faire passer un message de responsabilité : si un jeune qui s'est inscrit pour un séjour ne souhaite plus venir, ce n'est pas un drame, mais plus vite il le dit, en se comportant en citoyen, plus vite il permet à un autre jeune de venir, dans des conditions plus confortables que si c'est à la dernière minute.
Par ailleurs, il n'y a pas de rupture d'égalité. La priorité est de permettre à tout le monde de s'engager.
La reconnaissance de l'engagement au sein de Parcoursup a fait l'objet de questions bien légitimes, mais il n'y a pas que le SNU qui est reconnu à ce titre : on prend aussi en compte, par un bonus, la participation à la démocratie scolaire – quand on est écodélégué, délégué de classe ou membre d'un conseil académique de la vie lycéenne ou d'un conseil des délégués pour la vie lycéenne – et il en est de même quand on est membre d'un conseil municipal ou régional des jeunes, ou quand on est jeune sapeur-pompier. Ces jeunes méritent qu'on reconnaisse leur engagement. Quand on se préoccupe des autres, il n'y a pas de raison que cela compte pour du beurre. Si on s'engage dans le SNU, comme dans le service civique, au sein des cadets de la gendarmerie ou en tant que bénévole dans une association, il est normal que cela soit pris en compte par Parcoursup, au même titre que les autres formes d'engagement.