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Intervention de Sarah El Haïry

Réunion du jeudi 20 juillet 2023 à 10h05
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Sarah El Haïry, secrétaire d'État :

Nous allons continuer à proposer de plus en plus de places ; la liste d'attente doit être aussi courte que possible. Quand on voit ces jeunes qui ont envie, cela nous oblige, il faut aller jusqu'au bout de la démarche.

Madame Périgault, le SNU transmet effectivement le goût de la nation, et le site de Sourdun, que vous avez évoqué, est magnifique. Vous avez également souligné un point important qui est l'unité de la formation et des messages.

Il ne faut pas laisser s'installer des idéologies – pour reprendre votre mot – dans les discours. Nous sommes extrêmement vigilants : tous les encadrants sont formés à une pédagogie active, qui vise à éviter aussi bien le laxisme qu'un excès de contraintes. Nous faisons appel à des professionnels de l'encadrement des jeunes, qui sont diplômés.

Comment faire, néanmoins, pour que des gens qui ont initialement des cultures très différentes – certains viennent de l'éducation populaire, associative ou sportive, d'autres de l'Éducation nationale, tandis que d'autres encore ont servi sous les drapeaux – développent une culture commune dans le cadre de ce projet, c'est-à-dire pour arriver à une sorte d'alignement ? Il faut non seulement des formations, mais aussi une fidélisation des encadrants. Nous projetons d'avoir, dès la rentrée prochaine, des centres permanents pour accueillir tout au long de l'année des classes engagées, grâce à des encadrants pérennes. Il y aura ainsi moins de recrutements, sinon au coup par coup, du moins séjour par séjour. Pour vous donner un ordre de grandeur, 15 000 encadrants ont été recrutés depuis début 2019, ce qui est énorme.

Nous sommes vigilants, je l'ai dit. Chaque fois qu'on m'a fait remonter un comportement pédagogique ou des propos ne correspondant pas au projet philosophique qui est celui du SNU, des mesures fermes ont été prises, de la suspension à un signalement au titre de l'article 40 du code de procédure pénale ou à la saisine, quand c'est nécessaire, de l'inspection générale. Quand des parents acceptent de nous confier la responsabilité de leurs enfants, qui sont ce qu'ils ont de plus cher, il faut être à la hauteur de leur confiance.

Monsieur Croizier, l'engagement de ces jeunes, qui suscite en eux une fierté profonde et permet de tisser des liens, est en effet absolument essentiel. Cela ne mérite donc aucune caricature. Chaque fois qu'un député, quelle que soit sa sensibilité politique, m'a saisie, je lui ai apporté des réponses.

Des défis se posent, en effet. Nous accueillons actuellement à peu près 10 % d'une classe d'âge : 80 000 jeunes sont passés par le SNU depuis sa création. Dans quelques mois, plus de 100 000 jeunes auront peut-être levé le drapeau, chanté La Marseille et mis ces uniformes qui créent quelque chose de commun et que les jeunes sont particulièrement fiers de porter.

Il n'existe ainsi plus aucune différence entre eux à l'instant t : on ne voit plus qui a les moyens de mettre le polo à la mode ou une parka très étanche et très agréable l'hiver, mais très chère. Les jeunes ont le sentiment, essentiel, de vivre une aventure dans laquelle il n'y a pas d'autre différence que le mérite et l'effort et qui est placée sous le signe de la découverte de l'autre. C'est fort, et cela leur demande d'aller chercher en eux autre chose. Ils ne viennent pas avec ce qu'ils ont, mais avec ce qu'ils sont. Cela demande parfois de leur part des choses un peu difficiles, comme de ne pas utiliser un téléphone portable pendant toute une journée, et il faut apprendre La Marseillaise ou Le Chant des partisans. Au début, ils rigolent un peu, mais très vite, comme ceux qui ont assisté aux cérémonies de clôture l'ont vu, ils sont émus, ils veulent être les derniers à lever le drapeau ou à chanter. Cela implique chez eux un dépassement, et cela crée des amitiés.

J'espère, monsieur Croizier, que les préfets et les maires mobiliseront les jeunes du SNU pour les cérémonies qui se déroulent dans les territoires. S'ils gardent leur uniforme à la fin de leur séjour, c'est pour pouvoir le remettre lorsqu'ils participent aux moments patriotiques et mémoriels et continuer ainsi à s'inscrire dans un parcours. Le séjour de cohésion n'est qu'une étape.

Madame Keloua Hachi, la sécurité est absolument essentielle. J'en ai déjà parlé avec un certain nombre d'organisations syndicales. Si vous avez été témoin de situations difficiles, ou si on vous en a rapporté, il faut actionner l'article 40 du code de procédure pénale. Je l'ai fait chaque fois que j'ai eu la moindre information ou le moindre doute. Ce sont des mineurs, encadrés par des majeurs.

S'agissant du recrutement, chaque homme ou chaque femme qui encadre ce projet a été formé, est titulaire d'un diplôme et a fait l'objet d'un contrôle d'honorabilité avec consultation du fichier judiciaire automatisé des auteurs d'infractions sexuelles et violentes, et du bulletin n° 2 du casier judiciaire. Les encadrants ont le Bafa ou le BAFD, voire davantage. Un tiers des encadrants viennent ainsi du monde de l'Éducation nationale : ce sont des CPE, des proviseurs ou des enseignants, qui encadrent des jeunes au quotidien. Un autre tiers est issu de l'éducation populaire : il s'agit de médiateurs, d'animateurs qui encadrent au quotidien nos enfants au sein du monde associatif, dans des colonies de vacances ou durant le temps extrascolaire ou périscolaire. Le dernier tiers est constitué de réservistes ou d'hommes et de femmes qui ont porté l'uniforme. Nous ne les recrutons pas sans formation, à la fois commune et particulière. Il ne faut pas jeter l'opprobre sur ces 15 000 encadrants, qui sont particulièrement formés et contrôlés.

S'agissant de l'utilisation du temps scolaire, la proposition de volontariat qui a été faite n'est pas sortie de nulle part. Elle a fait l'objet de consultations, que j'ai lancées en janvier. Les enseignants et les enseignantes qui le souhaitent pourront engager une classe, de même qu'ils peuvent déjà développer un projet pédagogique ou une classe thématique – il existe ainsi des classes centrées sur l'arbitrage, la défense ou la culture. Les voyages scolaires et l'école hors les murs n'ont jamais été des pertes de temps. Les compétences ainsi développées sont une chance.

Madame Bourouaha, j'ai eu le grand plaisir de débattre, il y a deux ans, lors de la Fête de l'Humanité, avec Léon Deffontaines, qui était alors le responsable des jeunes communistes – c'était avant qu'il devienne un des porte-parole du président Roussel. J'ai trouvé qu'il était moins catégorique, plus nuancé. Le projet communiste est un peu différent, mais il y a dans l'histoire de votre parti un goût très prononcé pour le projet républicain, pour le dépassement de l'assignation à résidence. Une seule émancipation est possible, par la République. Comment faire pour donner à des jeunes qui viennent de milieux différents une confiance en eux plus forte et pour qu'ils transforment ensuite cette confiance en engagement ? Quinze jours ne transforment pas tout : le séjour de cohésion n'est qu'une petite graine, une source de repères, de possibilités, d'une capacité de se projeter. Ce sont ensuite les parcours individuels – par des missions d'intérêt général ou un engagement long dans le cadre de la phase 3 – qui feront la différence, et ce sont les citoyens que ces jeunes deviendront qui composeront le visage de notre pays.

Vous avez suggéré que le SNU coûtait beaucoup trop cher. Ces 140 millions sont destinés à un projet complémentaire des formes d'engagement qui existaient déjà. Pas un euro n'a été pris sur l'éducation populaire – elle a bénéficié cette année de 15 millions supplémentaires, et 20 millions de plus sont allés au service civique. Les crédits mobilisés représentent 16 % du budget de la jeunesse. Je rappelle, en particulier, que le service civique bénéficie de 580 millions d'euros et qu'il fait partie de la phase 3 du SNU. Il n'y a donc pas d'opposition qui tienne. On me demande aussi pourquoi ces 140 millions ne sont pas ajoutés au budget de l'Éducation nationale, mais celui-ci s'élève à 59 milliards d'euros et il a augmenté de 10 % ! Ce qui émancipe, c'est l'école, bien sûr. Elle permet à notre jeunesse d'avoir un esprit bien fait dans un corps en bonne santé. Élever ses enfants, leur apporter des enseignements fondamentaux, est le projet de toute nation, mais il faut rester nuancé : j'ai rappelé les chiffres, et je crois que pas un euro consacré au SNU n'est mal dépensé. Un tiers des crédits – je pense que vous y serez sensible –, madame Bourouaha, va aux structures d'éducation populaire qui accueillent les séjours.

Madame Descamps, l'initiative que vous avez prise est très importante, car elle permet de montrer la pluralité des formes d'engagement, sans aucune idée de hiérarchie entre elles, ce qui est essentiel. On peut s'engager dans un Ehpad pour assurer le lien intergénérationnel, dans le Souvenir français pour faire vivre des questions mémorielles, en tant que JSP ou dans une association environnementale : aucun de ces engagements n'est supérieur aux autres. La question, c'est plutôt de savoir comment on fait en sorte que les jeunes s'engagent. Quand ils le font, ils prennent peut-être davantage conscience de ce qu'ils ont en commun, mais aussi de leur place et de leur responsabilité. Il cesse d'être témoins, de regarder ce qui se passe autour d'eux : ils bâtissent les choses, et donc ils en prennent soin.

Le SNU, au-delà du développement de l'engagement, du goût de l'autre et de la responsabilité, est une opportunité pour l'aménagement du territoire. Lors des séjours organisés en juillet, 127 sites ont servi à l'accueil de presque 17 000 jeunes. La généralisation dont il est question impliquerait une augmentation des capacités d'accueil et il y aura, dès la prochaine rentrée scolaire, des travaux pour installer des centres permanents capables d'assurer un accueil tout au long de l'année. Cela peut concerner des lieux qu'on veut faire revivre, du bâti communal hérité de l'éducation populaire ou des sites de colonies de vacances, dont le modèle économique serait ainsi beaucoup plus stable. Le collectif de l'éducation populaire a d'ores et déjà proposé plus de quarante sites permanents. Je le redis, n'opposons pas l'éducation populaire et les projets pédagogiques dans le cadre du SNU.

On peut faire des propositions pour que les choses évoluent, mais sans caricaturer un projet qui permet d'abord à des jeunes de choisir de servir, de se dépasser et de rendre fier leur entourage.

Vous m'avez aussi demandé pourquoi on ne mettait pas plus d'argent dans des projets permettant à des jeunes de partir en vacances. Vacances apprenantes a concerné 1 million de jeunes, et Colos apprenantes, qui fait partie du dispositif, a permis à plus de 250 000 d'entre eux de partir. Ce qui était initialement une réponse à la crise de la covid a été pérennisé pour la quatrième année consécutive – je remercie la majorité d'avoir conforté les budgets prévus. Nous croyons profondément que la question du départ en vacances est essentielle, et nous faisons preuve d'une certaine continuité en la matière. Par rapport à 2009, nous avons divisé par deux le nombre de jeunes qui ne partent pas en vacances au moins une semaine – ils étaient alors 17 %. Ils restent encore trop nombreux, et c'est pourquoi nous continuons à mener le combat, mais il ne faut pas oublier pour autant l'évolution qui a eu lieu. Parmi les travaux menés actuellement, un projet de pass colo est en cours d'expertise. Il permettra, j'en ai la certitude, à plus de 80 % d'une génération de partir en vacances.

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