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Intervention de Sarah El Haïry

Réunion du jeudi 20 juillet 2023 à 10h05
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Sarah El Haïry, secrétaire d'État auprès du ministre des Armées et du ministre de l'Éducation nationale et de la jeunesse, chargée de la jeunesse et du service national universel :

Je suis heureuse de pouvoir vous faire un retour explicite et transparent sur le SNU, d'autant que les sessions de juin et de juillet viennent de s'achever. L'actualité récente met en lumière un besoin d'engagement, de citoyenneté et de cohésion. Le ministre de l'Intérieur et des outre-mer l'a rappelé hier, le très jeune âge des émeutiers – les plus jeunes ayant entre 9 et 11 ans, pour une moyenne d'âge de 17 ans – nous interpelle fortement.

Vous l'avez souligné, madame la présidente, le SNU est d'abord un parcours, même s'il est, hélas, parfois caricaturé ou réduit à sa phase 1, celle du séjour de cohésion. Il représente bien davantage, même s'il est d'abord, en effet, pour des jeunes âgés de 15 à 17 ans, un séjour de cohésion incluant un enseignement – patriotisme, citoyenneté, civisme, apprentissage des gestes qui sauvent, lesquels gestes ont d'ailleurs permis, hier, en Loire-Atlantique, à trois jeunes, Étienne, Quentin et Paul, de sauver une jeune femme de la noyade. L'objectif est de donner aux volontaires les moyens d'être utiles, aux plus âgés, à leurs voisins ou à leur famille.

Le SNU, c'est également un idéal de fibre citoyenne, c'est une responsabilité qui fait partie de notre commun et de la cohésion nationale : quelle place prendre dans la société ? Tel est l'état d'esprit de la mission d'intérêt général – quatre-vingt-deux heures, ou deux semaines – qui permet à des jeunes issus de tous les milieux sociaux et de tous les territoires de prendre pleinement leur place dans un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), chez les jeunes sapeurs-pompiers ou encore au sein d'associations caritatives – Les Restos du cœur ou la protection civile, notamment pour faire face au risque climatique estival.

Ces temps ne s'opposent pas à la phase 3. Ils sont une période de découverte et d'apprentissage, et répondent aux besoins essentiels que nous rappellent les structures associatives : comment créer une fibre citoyenne et faire émerger une génération de bénévoles associatifs ? Lors de cette phase 3, les jeunes peuvent choisir un engagement sous les drapeaux – que ce soit sous la forme d'une réserve militaire pour la gendarmerie ou pour l'armée ou encore de la réserve civile de l'armée –, sous un statut civil – le service civique accueille une grande partie des jeunes qui font le choix d'un engagement compris entre six mois et un an, entre 16 et 25 ans –, ou dans le cadre de la coopération internationale – ONG, Instituts français –, le rayonnement de la France se situant aussi à l'extérieur de nos frontières.

Nous devons faire confiance à notre jeunesse en lui donnant les moyens de prendre sa part dans la construction du projet de société. Il nous faut aussi créer des repères partagés : comment une génération pourrait-elle être unie en l'absence de commun, de liens qui forgent l'appartenance à un grand pays, malgré les différences ? C'est le goût de l'engagement qui crée cette volonté de dépassement.

Au-delà des projets qui relèvent de l'Éducation nationale, à quel moment un jeune issu d'un milieu rural aura-t-il l'occasion de passer quinze jours avec un jeune urbain ? À quel moment un jeune des quartiers nord de Marseille prendra-t-il conscience de ce qu'il partage avec son alter ego du Loir-et-Cher ? Ils ont peut-être en commun des difficultés de mobilité ou de choix sur les offres de formation. À quel moment les jeunes issus d'un établissement privé et d'un établissement public se rendront-ils compte qu'ils ont bien plus de points communs que ce qu'ils imaginaient ? Voilà ce que permet le temps particulier proposé par le SNU : personne n'est traité de façon privilégiée et il n'y a pas de distinction selon l'origine sociale ; les jeunes proviennent indifféremment d'établissements professionnels ou d'établissements généraux d'excellence. Il leur est simplement demandé de s'engager, de se mobiliser et d'être à la hauteur de ce qui les attend – un ensemble de droits acquis, assortis d'un devoir d'engagement.

L'accompagnement est fait par trois types de personnalités fortes. Tout d'abord, il relève des hommes et des femmes venant de l'Éducation nationale – conseillers principaux d'éducation (CPE), infirmières scolaires, enseignants, proviseurs –, sur la base du volontariat. Depuis le début du SNU, 15 000 hommes et femmes ont fait le choix de porter l'uniforme couleur bordeaux, pour accompagner cette jeunesse : en plus de leur travail, ils contribuent à faire grandir en elle le sens de la nation et de la République ainsi que la culture de l'engagement.

Notre territoire dispose de plus de 127 structures d'accueil, en majorité communales ou de l'éducation populaire. Des conventions ont également été signées avec des grandes structures de l'éducation populaire – la Ligue de l'enseignement, les Francas, les centres d'entraînement aux méthodes d'éducation active (Cemea), la Fédération Léo-Lagrange, l'Union nationale des centres sportifs de plein air (UCPA), l'Union française des centres de vacances et de loisirs (UFCV) –, pour encadrer les jeunes. Enfin, ces hommes et ces femmes appartiennent aux corps en uniforme – gendarmes, pompiers, anciens policiers ou militaires, réservistes : s'ils ont servi sous nos drapeaux, ils relèvent d'un statut civil dans leurs fonctions d'encadrement des jeunes.

Le SNU concerne 57 % de filles, 5,7 % de jeunes issus des quartiers prioritaires de la ville et 2,7 % de personnes en situation de handicap. Profondément inclusif, il s'adresse à la jeunesse en situation de handicap déclaré. Cette année, le choix a été fait d'aller plus loin en ouvrant un centre expérimental à Garches : celui-ci a accueilli des jeunes qui ont un handicap plus lourd, nécessitant des soins. Le SNU doit ainsi être accessible à tous : tel est le rêve français. Les volontaires doivent être accompagnés, sans que jamais le coût financier ou la situation personnelle ou sociale ne constituent des freins.

Certes, la montée en charge du SNU se fait progressivement. En 2019 quelque 2 000 jeunes ont été accueillis, dans treize départements. En 2020, à l'exception de la Nouvelle- Calédonie, la crise sanitaire n'a pas permis d'organiser de nouvelles sessions. En 2021, 15 000 volontaires ont effectué des séjours de cohésion, et ils étaient 32 000 en 2022 ; en 2023, le nombre d'engagés atteint déjà 40 000 ; à son plus haut, la liste d'attente a d'ailleurs compté plus de 10 000 jeunes, et, l'année n'étant pas terminée, je compte sur cette liste pour intégrer de nouveaux volontaires.

Parmi les prochains défis du SNU figure l'organisation de séjours volontaires en complément du temps scolaire, pour ceux qui le souhaitent. Nous avons proposé aux enseignants et aux chefs d'établissement, publics comme privés, de s'inscrire dans la démarche « classes engagées » : un enseignant, volontaire, qui souhaite promouvoir le civisme, construit un projet pédagogique – une dotation financière est prévue à cet effet – sous la forme de sorties scolaires, de témoignages ou de la découverte de structures associatives, tout cela constituant un séjour de cohésion pour l'ensemble de sa classe. L'enseignant peut aussi choisir d'approfondir l'un des quatre thèmes prioritaires : la mémoire, la question environnementale, le sport et les Jeux olympiques et paralympiques – l'accent étant mis sur leur valeur émancipatrice –, l'aide à la population face aux catastrophes naturelles.

Des incitations sont prévues pour les volontaires, le projet étant reconnu pour les compétences transversales qu'il permet de développer sur le plan pédagogique. Il a vocation à compléter l'engagement personnel – les jeunes continuent à être volontaires, s'ils le souhaitent, sur le temps des vacances : j'invite le maximum d'établissements à postuler, d'ici à la fin du mois d'octobre, pour des séjours qui commenceront en mars. Prenez le temps d'échanger avec ces jeunes : dès que vous le faites en votre qualité de représentants de la France et de la République, vous leur délivrez un message de confiance mais aussi de responsabilité, vous leur donnez des repères et un cap.

Un point me tient particulièrement à cœur. Pendant ces séjours, les jeunes les plus fragiles parlent, témoignent et sont accompagnés – notamment les jeunes filles, dont la parole se libère sur des questions essentielles, telles que le harcèlement, le cyberharcèlement, les violences sexistes et sexuelles. Le renforcement de notre cohésion passe par celui de l'accès aux droits : le SNU permet de tenir cet engagement.

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