La séance est ouverte à quinze heures trente-cinq.
Nous poursuivons notre cycle d'auditions consacré au volet financier de la convention de concession de l'autoroute A69. Je souhaite la bienvenue à M. Sébastien Vincini, président du conseil départemental de la Haute-Garonne.
L'annexe 21 de la convention de la concession prévoit que 23,13 millions d'euros sont apportés par la puissance publique au concessionnaire Atosca, répartis à parts égales entre l'État et cinq collectivités territoriales. Cette somme constitue la subvention d'équilibre. Le département de la Haute-Garonne contribue à hauteur de 355 140 euros. Ce montant représente la part la plus modeste des contributions des collectivités locales, mais s'explique par le fait que la majorité de l'A69 se situe dans le Tarn.
Votre audition, monsieur Vincini, ne portera pas uniquement sur l'aspect financier, elle revêt aussi un caractère éminemment politique. En effet, un engagement budgétaire reflète toujours une orientation politique. En outre, vous avez indiqué le 23 octobre 2023 que vous respecteriez la parole de votre prédécesseur, M. Georges Méric, tout en précisant que vous n'ajouteriez pas un centime de plus à ce projet. À cette occasion, vous avez déclaré : « Je ne porte aucun jugement sur les décisions ayant conduit nos voisins tarnais à porter ce projet, pensé voici trente ans pour le désenclavement et le développement économique du bassin castrais. Mais aujourd'hui, au regard du défi climatique, ce type d'infrastructures interroge ». À l'appui de ces propos, vous avez indiqué avoir été particulièrement sensible à la déclaration de scientifiques sur le dérèglement climatique. Nous avons auditionné trois des signataires de cette déclaration le 12 mars dernier, à la demande de Mme Christine Arrighi, rapporteure de notre commission d'enquête, alors que nous examinions le volet environnemental de la convention de concession.
Avant de laisser la parole à Mme Christine Arrighi, je vous rappelle, monsieur Vincini, que notre audition est publique et retransmise sur le portail de l'Assemblée nationale. L'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes auditionnées par une commission d'enquête de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous invite à lever la main droite et à dire : « Je le jure ».
(M. Sébastien Vincini prête serment)
La dotation du département de la Haute-Garonne, évoquée par monsieur le président, est inscrite à l'article 3 de l'annexe 21 de la convention de concession, et peut faire l'objet d'une actualisation en application de l'article 5. Vous respectez ainsi un engagement pris par votre prédécesseur, mais vous appelez l'État à reconsidérer le projet en raison de son décalage par rapport aux exigences actuelles. Plusieurs membres de cette commission d'enquête, notamment mes collègues Karen Erodi et Anne Stambach-Terrenoir, ainsi que moi-même, avons souligné l'aberration écologique que constitue cette autoroute. Les atteintes à l'environnement et à l'agriculture seront détaillées dans le rapport de notre commission, dont je commencerai prochainement la rédaction.
Cette commission structure ses auditions autour du volet environnemental du projet d'autoroute, de son volet économique, social et tarifaire, et enfin de son volet financier. Ces volets interagissent les uns sur les autres. Par exemple, des conditions financières trop restrictives pourraient limiter certaines mesures compensatoires. De même, des tarifs trop élevés pourraient affecter l'équilibre financier de l'autoroute et, à terme, le suivi des mesures compensatoires et des indemnisations des agriculteurs. Il convient d'appréhender l'ensemble de ces éléments. Pour clarifier ces trois volets, j'ai souhaité les séparer distinctement afin d'éviter toute confusion, et permettre à chacun de s'approprier ces éléments. Mon objectif est de rendre cette commission la plus démocratique et transparente possible. En effet, ce dossier a souffert d'un manque de transparence, notamment en raison des nombreuses zones occultées dans le contrat de concession.
Nous allons examiner plus en détail, dans le cadre de cette audition, les éléments inclus dans le questionnaire qui vous a été adressé. Ce même questionnaire a été envoyé aux autres collectivités territoriales impliquées dans le financement de cette concession. Je comprends le respect que vous accordez à une décision publique qui concerne davantage le Tarn que la Haute-Garonne, et qui témoigne de votre grande attention aux libertés locales. Toutefois, je souhaiterais savoir si, à ce stade des travaux, vous estimez que l'ouverture de cette autoroute, prévue pour juillet 2025, est inéluctable, ou bien s'il est encore possible de l'arrêter.
Parallèlement à ces considérations politiques, cette audition vise à comprendre les modalités selon lesquelles le département de la Haute-Garonne a été conduit à apporter un soutien public au concessionnaire Atosca. Nous souhaitons savoir comment a été déterminée la dotation du département et, plus globalement, ce que vous attendez en retour de votre engagement financier.
Nous évoquerons également la gestion de l'eau, alertés sur ce sujet par un membre du conseil départemental de la Haute-Garonne, monsieur Hébrard, dans le cadre de ses fonctions au sein du syndicat d'aménagement et de gestion des eaux (Sage), sur l'impact potentiel de la surélévation de l'autoroute sur les zones inondables des villages environnants.
Je tiens en premier lieu à saluer la démarche des parlementaires ayant conduit à la constitution de cette commission d'enquête, qui honore notre modèle démocratique en visant la transparence.
Avant de répondre aux questions que vous m'avez adressées par écrit, je souhaite rappeler quelques éléments de contexte. J'ai été élu conseiller départemental en 2015, et le président Georges Méric m'a confié la mission de rapporteur général du budget, en charge du personnel et du patrimoine départemental. En 2021, réélu, j'ai été nommé premier vice-président en charge des finances, du numérique et de l'innovation. Enfin, j'ai été élu président du conseil départemental de Haute-Garonne le 13 décembre 2022.
Ma première prise de parole publique sur le projet de l'A69, en septembre 2023, était liée, en effet, à la déclaration de plus de 1 500 scientifiques, parmi lesquels Christophe Cassou et Valérie Masson-Delmotte, à laquelle j'ai été particulièrement sensible. L'objectivité et la rationalité scientifiques sont les fondements de mon engagement, tant professionnel, en tant qu'ingénieur agronome de formation et ingénieur territorial, que personnel et politique. Je considère que les décideurs publics ne peuvent nier sciemment les faits scientifiques sans compromettre le caractère démocratique de leurs décisions. Le Grand Sud de la France est aujourd'hui considéré par les scientifiques comme un hotspot du réchauffement climatique. Concrètement, depuis le début du XXIe siècle, la Haute-Garonne a enregistré une augmentation de la température moyenne de plus de 1,7 degré. Les années 2022 et 2023, ainsi que les premiers mois de 2024, constituent déjà de nouvelles références en matière d'emballement climatique, avec des répercussions importantes.
En tant que décideur public, je me dois de prendre en compte ces données scientifiques pour orienter mes actions et décisions. Depuis ma prise de fonction, j'ai impulsé une politique de bifurcation écologique, favorisant l'adaptation à ces bouleversements à l'échelle locale, et leur atténuation. Dans cette perspective, j'exige que chaque projet d'infrastructures sous la maîtrise d'ouvrage directe du conseil départemental de la Haute-Garonne soit examiné en tenant compte des rapports scientifiques sur le changement climatique, de ses impacts environnementaux, et de l'accélération des phénomènes observés dans notre département.
Je considère que, face au défi climatique, il convient de reconsidérer le projet de l'A69. J'ai d'ailleurs interpellé l'État, qui en est le maître d'ouvrage, et lui ai suggéré un moratoire. Je comprends encore aujourd'hui les décisions prises il y a trente ans pour envisager ce type d'infrastructure, ainsi que les choix de mes voisins tarnais de solliciter ce projet. Je ne porte aucun jugement de valeur sur ces décisions, ni même sur les attentes des populations du bassin castrais, qui perçoivent leur situation comme une forme d'enclavement.
La contribution de notre collectivité reste marginale à l'échelle du projet. Bien que ma vision soit différente de celle de mon prédécesseur, il m'appartient, en tant que président, d'assumer la continuité des décisions et des engagements contractuels pris antérieurement. Sous ma présidence, nous avons émis des réserves chaque fois que notre avis a été sollicité sur ce projet. Comme je l'ai indiqué, le département de la Haute-Garonne ne mettra pas un centime supplémentaire sur ce projet. Il ne me revient pas de me prononcer sur la conformité juridique de ce projet, pour lequel toutes les autorisations requises ont été obtenues, sous réserve de l'éventuel aboutissement des recours. Je suis ici pour clarifier, sur la base des éléments en ma possession, les décisions prises par le conseil départemental de Haute-Garonne. À ce titre, je vais répondre aux questions que vous m'avez transmises.
L'une des premières questions concerne les principes et modalités du versement du concours public. Il est d'abord question du processus décisionnel ayant conduit au principe de cette dotation, puis au montant finalement retenu pour le concours public à verser par les collectivités. À ma connaissance, la première sollicitation formelle du département de la Haute-Garonne concernant les concours publics dans le cadre d'un contrat concessif, remonte à un courrier du préfet de la région Midi-Pyrénées et de la Haute-Garonne, M. Henri-Michel Comet, daté du 15 janvier 2014, adressé au président d'alors du conseil général de la Haute-Garonne. Dans ce document, le préfet demandait au conseil général de bien vouloir exprimer son avis sur le principe d'une concession autoroutière pour l'aménagement de la route nationale 126.
L'aménagement complet à deux fois deux voies était alors estimé à 500 millions d'euros toutes taxes comprises. En cas de concession, la subvention d'équilibre versée par les partenaires publics au concessionnaire était estimée à 180 millions d'euros, dont 90 millions d'euros à la charge des collectivités locales. En cas de maîtrise d'ouvrage public, en tenant compte des clés de financement habituelles entre l'État et les collectivités locales, la part de financement des collectivités était estimée à 230 millions d'euros hors taxes.
À ma connaissance, aucune initiative n'a été prise par le conseil général pour le versement d'un concours public. D'ailleurs, par un courrier en date du 21 mars 2014, le président d'alors, M. Pierre Izard, a répondu au préfet en transmettant la délibération prise par l'Assemblée départementale du 29 janvier 2014, qui se prononçait à l'unanimité en faveur d'un aménagement gratuit, durable et concerté pour l'amélioration de l'itinéraire Toulouse-Castres. À ma connaissance, le département n'a jamais été sollicité pour contribuer à un plan de financement dans le cadre d'un simple élargissement, sous maîtrise d'ouvrage public, de la RN 126. Le courrier du préfet, datant de 2014, est par conséquent la dernière évocation d'une maîtrise d'ouvrage public.
En 2014, le Gouvernement a décidé de poursuivre l'aménagement de la liaison sous forme de concession autoroutière, et de relancer les études préalables à l'enquête publique. La concertation s'est poursuivie jusqu'à la décision du préfet de région, qui a validé le tracé le 31 juillet 2014. Ainsi, entre 2014 et début 2016, période durant laquelle les services de l'État ont réalisé les études, les échanges avec les collectivités ont été interrompus. Ce n'est que lors d'un comité de pilotage, le 11 février 2016, que l'État a réaffirmé son engagement sur ce projet, en présentant un calendrier détaillé pour le lancement de l'enquête publique prévue à la fin de l'année 2016.
Lors de la séance du 29 juin 2016, avant l'ouverture de l'enquête publique, le conseil départemental de Haute-Garonne s'est positionné sur plusieurs points : améliorer l'itinéraire entre Castres et Toulouse tout en préservant les territoires traversés, notamment Verfeil, à la faveur d'un projet financièrement supportable, refuser la réalisation d'un barreau autoroutier neuf proche de la zone urbanisée de Verfeil, et accepter l'intégration de la route départementale 20, en déviation de Verfeil, dans l'autoroute Castres-Toulouse, tout en maintenant cette déviation gratuite, en reportant le péage à l'Est de Verfeil. Après la clôture de l'enquête publique, des réserves ont été émises, notamment concernant l'impact sur la commune de Verfeil. Lors du comité technique du 18 mai 2017, et du comité de pilotage du 19 juin 2017, l'État a présenté trois options pour traiter cette réserve. L'option finalement retenue consistait à intégrer dans le tracé de l'autoroute une partie de la déviation actuelle de Verfeil sur la RD20, qui prolonge la RN126, en laissant la portion correspondante libre de péage.
Lors de ce comité technique du 18 mai 2017, nous avons discuté de la répartition de la part restant à la charge des collectivités territoriales, soit 50 % de la subvention d'équilibre. Il a été proposé de baser le calcul sur le linéaire de l'infrastructure par département, afin de déterminer la part respective de chaque département. L'État avait alors estimé le montant de la subvention d'équilibre à 230 millions d'euros. Ce montant, de même que la clé de répartition et les modalités de versement, avaient été établis par l'État. Sur cette base, nous avons initié le tour de table financier avec les collectivités, en adoptant la répartition suivante : 50 % pour l'État et 50 % pour les collectivités, dont 25 % pour la région et les départements de la Haute-Garonne et du Tarn, et les 25 % restants répartis selon les ratios kilométriques. La part du conseil départemental de la Haute-Garonne a été calculée sur la base du ratio kilométrique du linéaire d'autoroute construit en Haute-Garonne, soit 13 % de ce linéaire. Le conseil départemental a ensuite demandé de déduire 50 % du coût de la déviation de Verfeil, réalisée par le département en 2003, et financée à parts égales entre la région et le département. Le 17 octobre, le département a délibéré sur sa participation financière, qui s'élevait à 3,5 millions d'euros, soit 0,9 % du coût total.
Le conseil départemental de Haute-Garonne n'a pas déterminé librement le montant de son concours. Comme pour tout projet partenarial, une collectivité ne décide pas seule. Il convient toutefois de préciser que ma collectivité n'a jamais remis en cause le principe de la subvention d'équilibre, tant qu'un modèle concessif était retenu. Dans ce cadre, nos seuls interlocuteurs ont été les services de l'État, notamment les ministères, la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal), les préfectures, le secrétaire général pour les affaires régionales, la direction départementale des territoires et les collectivités partenaires. Le montant du concours du conseil départemental est resté inchangé jusqu'à la désignation par l'État du concessionnaire. À aucun moment nous n'avons été associés aux décisions du concessionnaire, avec lequel nous n'avons pas échangé avant sa désignation.
Quant à la réduction du montant du concours public de 230 millions d'euros à 23 millions d'euros, le règlement de la consultation pour l'attribution de la concession prévoyait, parmi les critères de jugement des offres, celui du niveau des concours publics. Ainsi, tous les candidats ont été incités à déposer des offres où les concours publics étaient réduits. Le candidat retenu a probablement proposé un montage financier divisant par dix le niveau des concours publics, par rapport à l'estimation administrative.
Mes services n'ont bénéficié que d'une présentation très succincte et anonymisée des trois candidatures le 2 septembre 2021, en présence de l'ensemble des partenaires. Au final, le concours du conseil départemental, conformément aux dispositions du cahier des charges de la concession, s'élève à 355 140 euros, soit 0,08 % du financement total. Ma collectivité est engagée en ce sens par le biais de deux conventions contractuelles financières, l'une entre l'État et les collectivités locales contributrices, l'autre associant le concessionnaire, annexée au cahier des charges du contrat de concession. Ces deux conventions ont été approuvées par deux délibérations de ma collectivité, le 25 novembre 2021 et le 16 décembre 2021.
Vous m'avez demandé par écrit si ce montant de 23,13 millions d'euros est un montant maximum, et s'il pouvait être réduit. Je rappelle que le cahier des charges de la concession stipule qu'il s'agit d'un montant maximum. Toutefois, les conventions contiennent des échéanciers de versement précis. À ma connaissance, aucune discussion n'a eu lieu en vue d'une réduction de ce montant.
Ensuite, vous m'avez demandé si ma collectivité avait connaissance des valeurs actualisées des sommes à verser. À ce jour, il n'existe pas de montant globalisé actualisé de notre contribution. Cette actualisation nous est communiquée lors de chaque demande de versement. Les appels de fonds se font selon un échéancier contractuel, et leur déclenchement dépend d'événements liés à l'opération. Les autorités adressent alors aux collectivités un titre de paiement à régler en remboursement de leur avance. À ce jour, ma collectivité a versé à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit) la somme de 36 888,09 euros en novembre 2022, correspondant aux événements clés EC1 et EC2, ainsi que 159 010,02 euros en mars 2024, pour les événements clés EC5, EC6, EC7, en tenant compte d'une révision moyenne de 3 %. J'ai indiqué que le département ne verserait pas un centime de plus dans le cadre de ce projet. C'est la raison pour laquelle j'ai demandé à mes services d'étudier toutes les modalités permettant de plafonner strictement la contribution de ma collectivité au montant contractuel de 355 140 euros.
Vous avez posé des questions relatives aux dispositions des conventions financières régissant la répartition du concours public et le remboursement, à la possibilité de définir une répartition différente entre collectivités, et à la possibilité d'intégrer de nouveaux financements publics et de prévoir un versement de la part du concessionnaire. À ce jour, ma collectivité n'a participé à aucune discussion relative à la mise en œuvre de tels mécanismes.
Plusieurs de vos questions portaient sur les évolutions du montant de la subvention d'équilibre. J'ai déjà répondu sur la réduction du concours du département. Aucun échange n'a eu lieu avec l'État durant la procédure d'attribution de la concession. Deux des trois candidatures présentées lors du comité technique du 2 septembre 2021, qui s'est déroulé en présence de l'ensemble des co-financeurs, proposaient une réduction importante de la subvention d'équilibre. À cet égard, il est évident que le département n'avait aucune appréciation sur la stratégie de réponse de chaque candidat. Le 25 septembre 2021, lors d'une visite, le Premier ministre d'alors, M. Jean Castex, a annoncé le nom du concessionnaire pressenti, à savoir NGE Concessions, désigné le 22 octobre, NGE comme concessionnaire par décision ministérielle. Le montant exact du concours du département a donc été communiqué durant cette période, et figure dans les conventions financières approuvées par l'Assemblée départementale des 25 novembre et 16 décembre 2021, informant ainsi les membres de l'assemblée départementale de cette diminution.
Sur les variations de chiffres relevées entre l'article 24 du contrat de concession et son annexe 18, je précise qu'à ma connaissance, mes services n'ont pas eu accès à cette annexe. Le montant indiqué dans la convention financière, soit l'annexe 21 du cahier des charges, est de 23 134 904 euros. Le conseil départemental de Haute-Garonne considère comme valeur définitive celle qui a été affichée dans les conventions signées et délibérées à la fin de 2021.
Je souhaite maintenant aborder la question du lien entre les subventions d'équilibre et les tarifs de péage. Selon moi, l'idée que l'évolution de la subvention d'équilibre puisse impacter les tarifs de péage est purement virtuelle. D'abord, la corrélation entre le niveau du concours public et les tarifs de péage n'est pas démontrée. Ensuite, la possibilité de revoir les termes du montage financier fixé par le contrat de concession n'est pas établie. Enfin, les sommes issues du partage des éventuels gains financiers, du partage des éventuels fruits de la concession et de l'éventuel reliquat non utilisé des sommes prévues pour la politique « 1 % paysage, développement et cadre de vie », seront prioritairement affectées au remboursement des concours publics. Vous m'avez interrogé sur l'hypothèse d'une affectation de ces sommes à la diminution des tarifs de péage. Je n'y suis pas favorable. Le cas échéant, je proposerai à l'Assemblée départementale de diriger ces sommes éventuelles vers le financement d'actions en faveur de la bifurcation écologique et de la décarbonation des mobilités haut-garonnaises.
J'ai pris connaissance par voie de presse de la participation du groupe Pierre Fabre au pacte actionnarial, via la société Tarn Sud Développement. Quant à la participation de cette société à l'initiative d'Atosca et de Gaïa Energy Systems, ni mes services ni moi-même n'en avions connaissance avant de découvrir votre questionnaire.
En ce qui concerne un éventuel transfert de charges au conseil départemental de Haute-Garonne à la suite de l'ouverture de l'autoroute, je tiens à préciser que le conseil départemental n'est, en principe, pas concerné. En effet, la route nationale 126 n'existe plus côté haut-garonnais. En Haute-Garonne, il s'agit de la RD20, déjà gérée par ma collectivité territoriale puisqu'elle faisait partie des routes nationales transférées entre 2003 et 2005. Il convient de relever la particularité de la commune de Vendine, enclavée par le Tarn, et traversée par une portion de la RD20, anciennement RN26, sur 900 mètres précisément. Cette portion, transférée à ma collectivité en 2005, a continué à être gérée de manière opérationnelle et financière par l'État, sans compensation pour ma collectivité. Si la RN126 devait passer sous la gestion du département du Tarn, il serait nécessaire de redéfinir la gestion de ces 900 mètres de la RD20, sous maîtrise d'ouvrage départementale haute-garonnaise, afin d'en assurer la cohérence. Enfin, la portion de la RD20 constituant la déviation de Verfeil est parfaitement intégrée dans le périmètre de la concession, et fait l'objet de travaux dans le cadre de la construction de l'autoroute A69. Elle sera gérée par le concessionnaire, sans contribution financière du conseil départemental.
En conclusion, je souhaite, au-delà des problèmes introduits par le projet de l'autoroute A69, que les travaux et les conclusions de votre commission permettent à l'avenir d'anticiper et de résoudre les tensions potentielles entre la légalité et la légitimité de ce type d'infrastructure.
Je vous remercie pour ces premières réponses. Vous avez raison de souligner l'importance de l'équilibre entre la légalité et la légitimité d'un projet. En l'occurrence, il m'apparaît que ce projet est aussi légal que légitime. Je me permets de citer votre homologue du Tarn, M. Christophe Ramond, qui, en octobre 2023, affirmait que l'État ne devait pas renier ses engagements, ni céder face à une minorité contestant des décisions légales prises démocratiquement. Les travaux menés jusqu'à présent montrent que toutes les étapes et toutes les consultations ont été respectées. Bien que nous ayons certaines divergences avec Mme Arrighi, la légitimité de ce projet ne saurait être remise en cause, compte tenu de l'approbation unanime des collectivités territoriales impliquées dans son financement. Depuis trente ans, toutes les forces vives de ce territoire ont pris des décisions démocratiques en faveur de la réalisation de cette infrastructure autoroutière.
Je comprends que des interrogations puissent subsister concernant ce projet. Toutefois, je suis défavorable à une remise en question. Le Sud du Tarn, avec la montagne Noire, constitue le poumon vert de l'Occitanie, et il a besoin d'être désenclavé.
J'entends que le conseil départemental de Haute-Garonne ne mettra pas un centime supplémentaire dans le projet de l'A69. Soyez rassuré, monsieur Vincini, nous ne vous le demanderons pas. Toutefois, cette position me semble regrettable. L'apport d'une autoroute reliant Toulouse et Albi est en effet indéniable, notamment pour les habitants de Saint-Sulpice-la-Pointe, de Labastide-Saint-Georges, de Rabastens, de Gaillac ou de Lavaur, tous desservis par cette infrastructure autoroutière. Le développement de la Haute-Garonne bénéficiera également de cette portion de l'autoroute A69, sans aucun doute. Il existe des synergies communes, et il est regrettable de ne pas les accompagner. Vous avez indiqué très clairement que vous ne reviendriez pas sur les engagements pris par votre prédécesseur. Je pense qu'il serait pertinent d'être plus proactif en considérant que le Sud du Tarn a le droit de se désenclaver, ce qui aura également des répercussions significatives pour le département de la Haute-Garonne.
Monsieur Vincini, je tiens à vous remercier d'avoir ancré votre propos dans une réalité scientifique connue depuis le rapport Meadows de 1972. Depuis cette date, les scientifiques nous alertent sur la nécessité de réviser notre modèle pour éviter le scénario dans lequel nous nous trouvons aujourd'hui. Le rapport Meadows avait envisagé des scénarios extrêmement défavorables, qu'il jugeait improbables. Or ces scénarios se réalisent pourtant aujourd'hui. Nous sommes constamment alertés par les scientifiques, qui expriment leur lassitude face à l'inaction climatique, estimant que les actions politiques sont insuffisantes, voire inexistantes. Je partage entièrement votre point de vue : nous ne sommes plus dans une période de transition, mais de véritable bifurcation.
À cet égard, le projet de l'autoroute A69 est emblématique. L'État nous inflige une double peine, à la fois une peine environnementale, avec l'ajout de voies supplémentaires à une infrastructure existante, et une peine sociale et financière, puisqu'une infrastructure gratuite devient payante. Ce tarif reste à déterminer mais, sur la base des prix moyens communiqués par l'Autorité de régulation des transports (ART), nous pouvons considérer que le coût serait d'environ 20 euros aller-retour pour les particuliers, 26 euros pour les artisans, et compris entre 60 et 80 euros pour les camions. L'ART indique que, pour les camions, ce coût pourrait être majoré de 14 % par rapport aux prix moyens pratiqués. Ainsi, on impose aux usagers de payer pour une autoroute de desserte locale plutôt que mobiliser la solidarité nationale par l'impôt.
Il me semble nécessaire de réinterroger tout projet d'infrastructure à la lumière des réalités scientifiques contemporaines. En 2016, cette réévaluation aurait pu être effectuée, du moins sur le volet social, puisque la décision de l'État de construire une autoroute n'avait pas pris en compte les alternatives constituées par la RN126 et le transport ferroviaire. À cette époque, ce projet, dont le Commissariat général à l'investissement avait mis en évidence les risques financiers, n'était pas encore un chantier. L'autorité environnementale avait également émis des alertes concernant les études socio-économiques et environnementales.
Il est essentiel de rappeler que l'obtention d'une déclaration d'utilité publique ne suffit pas pour débuter les travaux. Une autorisation environnementale et un arrêté interdépartemental restent requis. Or l'arrêté interdépartemental du 1er mars 2023 s'appuie sur des études que la commission d'enquête juge biaisées, notamment en ce qui concerne la qualification des terres et l'impossibilité de les évaluer correctement, puisque tous les éléments n'ont pas été communiqués. Les biais concernent aussi les conditions financières, puisque nous avons appris par voie de presse, comme vous, monsieur Vincini, la participation du groupe Pierre Fabre au contrat via la société Tarn Sud Développement, ainsi que celle de la Chambre de commerce et d'industrie (CCI) du Tarn, et d'autres entreprises, dont l'identité ne nous a pas été communiquée.
Nous devons également aborder le projet de ferme solaire qui concerne toute l'emprise autoroutière. Bien que la Haute-Garonne ne soit concernée que partiellement, les ambitions de cette ferme solaire, qui produirait 40 mégawatts, méritent notre attention. Étant donné que la production d'un mégawatt nécessite, selon les estimations, entre un et trois hectares, cette ferme suppose de couvrir 80 hectares par des panneaux photovoltaïques. Bien que cela ne soit pas illégal, ces éléments étaient également grisés dans le contrat, échappant ainsi à la libre lecture des citoyens, de l'enquête publique et de l'autorité environnementale. Or il est crucial de s'assurer que les entreprises, en développant le photovoltaïque, n'empiètent pas sur les espaces destinés aux mesures compensatoires. Ainsi, deux options se présentent : soit ces terrains sont rendus à la nature, soit ils sont utilisés pour des fermes solaires. Mais, en tout état de cause, ces deux hypothèses sont exclusives.
Permettez-moi, monsieur Vincini, de vous demander une petite clarification. Vous avez évoqué les échéances EC1, EC2, EC5, EC6 et EC7. Qu'en est-il des échéances EC3 et EC4 ?
Elles ne feront pas l'objet d'un appel de fonds pour ma collectivité, puisqu'elles ne font pas partie des éléments clés sur lesquels nous sommes contractuellement engagés.
Merci, cela correspond en effet au tableau de l'annexe 21 de la convention financière. Lorsqu'on évoque le passage du concours public de 230 millions d'euros à 23 millions d'euros, on omet souvent de mentionner que ces 23 millions d'euros sont complétés par un apport en nature de 75 millions d'euros, correspondant au financement de la route à deux fois deux voies, qui existe aujourd'hui sur 9 kilomètres. Cette route sera privatisée, et les contribuables qui l'ont financée devront désormais payer pour en avoir l'usage. Cet apport en nature a-t-il été évoqué au cours des discussions sur la diminution du concours public, lors de réunions de comité de suivi ou lors de la réunion avec la Dreal en septembre 2021 ?
Je ne dispose pas d'éléments suffisants pour répondre à cette question. Je propose de procéder, avec mon administration, à une lecture approfondie des comptes rendus des réunions du comité technique et du comité de pilotage, puis de vous fournir une réponse écrite.
Je rappelle que l'État a déterminé les conditions auxquelles les différentes sociétés devaient répondre à l'appel d'offres, en incluant cet apport en nature. J'imagine que vous n'avez pas été consulté au préalable.
Je n'ai pas été consulté à titre personnel. Cependant, puisque je m'exprime devant vous sous serment, je ne peux pas exclure qu'une information ait été communiquée lors d'une réunion technique ou d'un comité de pilotage. Cette information aurait pu être consignée dans un compte rendu, et mes services auraient ainsi pu en être informés. En outre, cela concerne principalement la partie tarnaise, puisque c'est la route nationale gérée par l'État sur ce territoire qui pourrait être impactée. Je ne peux donc pas affirmer que nous n'avons jamais reçu cette information, et je préfère vous répondre par courrier.
Je vous remercie, monsieur Vincini, d'apporter des réponses précises. Il serait pertinent de consulter les documents relatifs aux comités de suivi ou aux réunions de la Dreal, puisqu'il est en effet possible qu'une question ait été posée par un élu concernant la divine surprise que constitue la division par dix du concours public. Celle-ci est bénéfique pour les collectivités locales et pour l'État, qui participe à hauteur de 50 %, mais mérite d'être examinée. Si de telles divines surprises se produisent avec des concessionnaires, qu'il s'agisse d'autoroutes ou d'autres types de concessions, il est essentiel que les citoyens obtiennent des réponses à leurs interrogations légitimes, et que les députés puissent exercer leur mission de contrôle de l'action de l'État et d'évaluation des politiques publiques.
Je vous dois une réponse quant au statut de la RN126. Lorsque l'autoroute ouvrira, la route nationale sera déclassée en route départementale, conformément à la loi, et intégrée dans le patrimoine du conseil départemental de la Haute-Garonne, qui en assurera l'entretien. Cela représente une troisième peine infligée aux contribuables, qui ont payé pour ces 9 kilomètres, et qui devront payer pour utiliser l'autoroute Toulouse-Verfeil, ainsi que l'entretien de cette route départementale, dont le coût était auparavant pris en charge par la solidarité nationale en tant que route nationale.
Les conséquences environnementales de ce projet sont susceptibles de représenter des conséquences financières graves. En effet, ce sont les habitants et les collectivités qui les subissent, notamment en cas d'inondation, et sont parfois contraints de faire appel à la solidarité nationale lorsque les risques sont trop élevés. Les constructions inadaptées au dérèglement climatique, comme on le constate aujourd'hui sur nos fronts de mer, entraînent des catastrophes humaines et financières, ainsi que l'illustrent les récentes inondations dans le Pas-de-Calais.
Lors de son audition, M. Gilbert Hébrard, conseiller départemental de Haute-Garonne, président du syndicat d'aménagement de gestion des eaux de Hers Mort Girou et de la commission locale de l'eau, a exprimé ses préoccupations concernant l'augmentation des risques d'inondation. En effet, l'autoroute A69 traverse toute la plaine du Girou, qui est une zone inondable. Nous sommes particulièrement préoccupés par la formation d'une sorte de digue entre l'autoroute et la rivière. En cas de mauvais écoulement, les nombreux affluents du Girou pourraient provoquer l'inondation des villages les plus exposés de Haute-Garonne. M. Hébrard a également abordé la question de la qualité des eaux, notamment l'utilisation des bassins de rétention construits pour l'autoroute, qui se rempliront dès les premières pluies et deviendront inutiles lorsque la rivière débordera.
Une infrastructure de deux fois deux voies, parallèle à une route et à une voie ferrée, est prévue dans cette plaine aussi fertile que très difficile à urbaniser. Avez-vous discuté de ce sujet avec M. Hébrard, mais aussi avec les maires des communes de Haute-Garonne concernées ? Une alerte concernant ces risques d'inondation a-t-elle été émise et confirmée par des écologues experts sur le sujet ?
Je n'ai pas eu d'échanges avec M. Hébrard sur cette question. J'ai découvert ses propos en visionnant son audition devant votre commission. Je ne dispose d'aucun élément concernant ce risque spécifique. Dès lors que l'on entreprend un ouvrage, on crée inévitablement un obstacle au libre écoulement des eaux. Les études d'impact doivent en tenir compte, et des aménagements sont souvent prévus pour garantir ce libre écoulement. La loi sur l'eau, en vigueur depuis 1992, impose de ne pas créer d'obstacles artificiels au libre écoulement des fossés et des cours d'eau permanents ou intermittents, afin de prévenir les risques d'inondation.
Dans les avis que nous avons transmis à la préfecture le 10 janvier 2023, après la délibération du 15 décembre 2022, nous avons formulé des réserves dans le cadre des demandes d'autorisation environnementale. Ce point précis n'a pas été expertisé par nos services et n'est pas mentionné dans notre délibération. Nous avons soulevé des difficultés à émettre un avis formel sur ce projet en raison de certains éléments manquants. Le risque d'inondation n'a donc pas été évalué par mes services lors de cet avis, et je n'ai pas d'opinion particulière à émettre sur cette question.
Monsieur Vincini, je souhaite revenir sur l'avis du conseil départemental du 15 décembre 2022. Vous aviez indiqué que le dossier d'études d'impact présentait des insuffisances en matière de connaissances de la biodiversité, ainsi qu'un sous-dimensionnement de la compensation écologique et de la compensation en matière d'imperméabilisation des sols. Vous aviez également demandé aux représentants du conseil départemental, lors de la réunion du conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques (Coderst), de s'abstenir sur la question concernant les résultats de l'enquête publique, en raison de la faiblesse des réponses apportées aux principales réserves évoquées précédemment. Ces réserves ont malheureusement été confirmées par les auditions qui se sont déroulées dans le cadre de cette commission d'enquête. Nous avons notamment entendu que la fameuse annonce « cinq arbres plantés pour un arbre abattu » était avant tout une facilité de communication. Il a été également confirmé que le concessionnaire ne dispose toujours pas de la maîtrise foncière nécessaire à la mise en œuvre des mesures de compensation. De plus, la mise en œuvre de certaines de ces mesures peut occasionner des dommages environnementaux, par exemple la création d'une zone humide sur la zone du Dicosa, qui nécessite l'abattage d'une cinquantaine d'arbres.
De manière générale, ces mesures de compensation sont complètement sous-dimensionnées. À titre d'exemple, les inventaires de la faune et de la flore ont été qualifiés d'insuffisants par le Conseil national de la protection de la nature (CNPN). Au regard de ces éléments, quel regard portez-vous sur le fait que les réserves exprimées à la fois par le CNPN, par l'Autorité environnementale et par le conseil départemental que vous présidez, n'aient manifestement pas été prises en compte ? Diriez-vous que ce projet d'autoroute est aujourd'hui anachronique, et inadapté aux enjeux environnementaux ?
Le 27 juin 2023, deux vœux ont été présentés à l'assemblée départementale. Le premier demandait la suspension des travaux jusqu'au jugement des recours, le second proposait d'interpeller le ministre des transports quant à l'étude d'une alternative à l'autoroute. Ces vœux ont été rejetés au motif qu'il appartenait à la justice de se prononcer sur le fond. Or les décisions de justice interviennent parfois lorsqu'il est trop tard. Nous en avons eu une illustration en avril, lorsque le tribunal administratif d'Amiens a annulé la dérogation ayant permis la construction d'une route, alors que celle-ci était déjà construite.
Lors de nos auditions, notamment celles des préfets du Tarn et de l'Occitanie, il a été affirmé que des mises en demeure étaient susceptibles d'être émises en cas de manquements constatés. Cependant, ces mises en demeure interviennent elles aussi après plusieurs mois d'attente, lorsque les dégâts sont déjà avérés, et n'influent pas sur les pratiques actuelles. Dès lors, je m'interroge sur le vote du 27 juin 2023, et j'aimerais entendre votre explication à ce sujet. Est-ce une manière de ne pas se positionner clairement contre le projet d'autoroute ? Cette position me semble en effet en contradiction avec les propos que vous avez tenus en ouverture de cette audition, ainsi qu'avec la forte opposition citoyenne à ce projet en Haute-Garonne, où la manifestation du 21 avril dernier a rassemblé plus de cinq mille personnes.
Je souhaite également revenir sur ce que vous venez de dire concernant les déclarations de M. Hébrard devant notre commission d'enquête. Vous semblez découvrir ses propos, et affirmez ne pas disposer de données de vos services concernant les problèmes liés à de possibles inondations. Que comptez-vous entreprendre face à ces risques révélés par M. Hébrard ? Je rappelle que le plan de gestion du risque d'inondation 2022-2027 du bassin Adour-Garonne impose d'éviter toute nouvelle construction de remblais en zone inondable. Pourriez-vous, compte tenu de ces éléments, solliciter la préfecture pour l'établissement d'un nouvel arrêté visant à élaborer un nouveau plan préparatoire de risque d'inondation ?
Je souhaite rappeler quelques éléments de contexte. Nous sommes dans le cadre d'une procédure ayant fait l'objet d'une déclaration d'utilité publique. Le projet de l'autoroute A69, actuellement en chantier, bénéficie d'une autorisation environnementale. Par ailleurs, diverses procédures contestent cette autorisation devant le tribunal administratif. Ces procédures ont donné lieu à des référés, qui ont été rejetés par cette même juridiction.
Je tiens également à rappeler que notre commission se concentre sur le montage juridique et financier de l'autoroute A69. Il ne s'agit pas de commenter l'exécution des travaux en cours, ni les éventuelles mises en demeure adressées par l'État aux concessionnaires. Ces aspects sont, à mon sens, très éloignés du périmètre de notre commission d'enquête.
Vous posez, madame Stambach-Terrenoir, une question fondamentale. Notre collectivité, dès lors qu'elle est sollicitée, émet des avis officiels par le biais de l'assemblée départementale, où se produisent nos délibérations. Les vœux sont des déclarations préalables sur lesquelles notre collectivité vote, mais ils n'ont aucune portée juridique. En revanche, les délibérations, sur la base desquelles nous devons émettre un avis formel, sont opposables à des tiers et engagent la collectivité, même si, souvent, l'avis du conseil départemental n'a pas force de loi.
Nous avons exprimé nos réserves à propos de l'étude d'impact. Les élus représentant l'assemblée départementale se sont exprimés lors du Coderst, comme vous l'avez souligné. Dès lors, j'estime que, de l'élaboration à la prise de décision et à l'arrêté de déclaration d'utilité publique (DUP), ma collectivité s'est exprimée en temps et en heure, conformément à ses convictions citoyennes sur ce projet. Cependant, à partir du moment où ce projet a reçu des décisions favorables, il est entré dans le cadre de la légalité, en dépit des possibilités de recours, et, en tant que président d'une collectivité territoriale responsable, je ne peux pas ouvrir des débats permanents au sein de mon assemblée sur des projets déjà actés. Cela ne signifie pas que nous ne prenons pas position. À l'automne 2023, j'ai été interpellé dans les médias, et j'ai pu exprimer ma position, à savoir que je m'en remets à l'expertise de scientifiques ayant rendu un jugement sur ce projet.
S'agissant de l'exécution des travaux, celle-ci se fait sous le contrôle des services de l'État et doit être réalisée conformément à la réglementation, notamment en matière de gestion de l'eau. Aujourd'hui, tout impact sur le libre écoulement des eaux est supposé être encadré. Dès lors, j'ose espérer que ces travaux s'effectuent en conformité avec la réglementation.
Monsieur Vincini, je tiens à saluer la mesure et la clarté de vos propos, qui témoignent de votre attachement à la continuité du service public et des institutions. Vous avez également su prendre en compte les enjeux environnementaux et écologiques de notre époque, ce que je ne peux que saluer. J'ai trouvé en vous écoutant toutes les réponses aux questions que je me posais, et je vous remercie d'avoir fait le déplacement jusqu'à Paris.
Les visioconférences ont permis de maintenir la continuité du service public et de prendre des décisions politiques cruciales durant la crise du Covid-19. Aujourd'hui, je m'efforce de les limiter, tout en évitant les déplacements inutiles. Cependant, pour cette audition sous serment, il était essentiel pour moi d'être présent physiquement.
Les financements des collectivités représentent 6 % du financement total du projet de l'autoroute A69. Le département de la Haute-Garonne est le plus petit contributeur, avec une somme de 355 140 euros, soit dix fois moins que le département voisin du Tarn. Cette différence s'explique par la localisation de l'autoroute, majoritairement située dans le Tarn. À l'époque où ce financement a été accordé par le conseil départemental de Haute-Garonne, vous n'en étiez pas le président, mais le premier vice-président en charge des finances, du numérique et de l'innovation. Vous avez toujours exprimé des réserves quant à l'utilité du projet de l'autoroute A69. Dans le cadre de vos responsabilités, avez-vous eu l'occasion d'évoquer avec le président du conseil départemental de l'époque, M. Georges Méric, vos interrogations concernant la pertinence d'une participation financière du département ? Vous êtes-vous prononcé sur le montant accordé lors des discussions ?
Il est difficile de se replacer dans le contexte où je me trouvais, à titre personnel. Lorsqu'on est premier adjoint, on n'est pas maire. De même, lorsqu'on est premier vice-président, on n'est pas président. Passer de la casquette de premier adjoint à celle de maire, ou de premier vice-président à président, implique une autre intensité dans la prise de conscience des problématiques. Les conseillers départementaux haut-garonnais, lorsqu'ils délibèrent, prennent en compte l'intérêt des contribuables de Haute-Garonne et celui de leur périmètre administratif. Ils ont toujours veillé, ce que je salue, à ce que l'impact financier des projets soit le moins lourd possible pour les contribuables de Haute-Garonne. Ainsi, ils ont pris en compte les travaux engagés sur la RD20. Cela faisait partie des réserves préalables sur lesquelles j'ai pu émettre un avis, même si je ne m'étais pas prononcé à titre personnel. J'ai toujours participé aux séances sur ce sujet.
Lors de l'examen des déviations, mon nom apparaît parmi ceux qui ont défendu l'intégration de la déviation de Verfeil, pour laquelle nous étions engagés financièrement à hauteur de 50 %. Nous avons également veillé à ce que le péage soit décalé à l'Est de Verfeil, afin d'éviter la construction d'un deuxième barreau à Verfeil, ce qui aurait encore impacté l'agriculture et empiété sur des terres. Nous avons par conséquent utilisé la déviation existante sans l'intégrer dans un tronçon à péage déjà financé par les contribuables. Cette déduction a été prise en compte dans le montage financier et la répartition des contributions. Vous avez raison de souligner que nous sommes concernés par 13 % du linéaire, dont une partie sur laquelle nous avions investi il y a moins de vingt ans, pour un montant déduit de notre contribution. Notre part est donc, en effet, très relative.
Je n'ai aucun élément de comparaison pour évaluer l'équilibre financier et la subvention d'équilibre par rapport à d'autres projets autoroutiers. Cependant, je suis bien conscient des investissements de ma collectivité dans les projets d'infrastructures. Ainsi, je connais le coût du tristement célèbre pont de Mirepoix-sur-Tarn. De même, je n'ignore pas que le contournement, bien que modeste, de la commune de Bessières, destiné à éviter le passage des poids lourds, représente un investissement significatif. Chaque année, nous allouons des fonds considérables pour renforcer, sécuriser et aménager nos réseaux routiers, qui s'étendent sur plus de 6 000 kilomètres de routes départementales. Pour maintenir ces routes en bon état et circulables, il nous faut mobiliser entre 45 et 65 millions d'euros.
À l'échelle des investissements publics de ma collectivité, la contribution à ce projet d'autoroute est donc très modeste. À titre de comparaison, un rond-point sur une route départementale de grand gabarit coûte entre 800 000 et 1 million d'euros en aménagement de sécurisation. Un ouvrage d'art, tel que le pont de Mirepoix-sur-Tarn, a nécessité un investissement de 14 millions d'euros. De plus, aucune subvention ne vient équilibrer ces dépenses, et il n'existe pas de péage pour les compenser. Ainsi, c'est le contribuable haut-garonnais qui finance ces 14 millions d'euros d'investissement net. Je ne cherche pas à minimiser l'importance de ces ouvrages dans le débat public, mais il est essentiel de comprendre que, du point de vue du contribuable haut-garonnais, l'impact de notre contribution est très relatif.
Monsieur Vincini, vous n'avez pas répondu précisément à ma question. Vous avez mentionné qu'il est difficile de se replacer dans le contexte de l'époque, mais il ne s'agit pas d'une décision datant du siècle dernier. Vous avez raison de souligner qu'un vice-président n'est pas un président, et inversement. Cependant, ma question ne portait pas sur un point de vue personnel. À l'époque où vous étiez vice-président, vous étiez responsable des finances, notamment lors des discussions sur ce projet avec le président, M. Méric. C'est pourquoi je vous demande si, à ce moment-là, vous aviez exprimé des interrogations concernant l'utilité du projet ou la pertinence d'une participation financière, ainsi que le montant que vous envisagiez de consacrer à celle-ci.
Je comprends mieux le sens de votre question. Vous souhaitiez connaître l'avis du vice-président aux finances que j'étais sur l'impact budgétaire de la contribution du conseil départemental au projet de l'A69, à travers les deux conventions financières approuvées fin 2021. Cette contribution, bien que non négligeable, représente 355 140 euros sur un budget de 65 millions d'euros pour les infrastructures routières et départementales. Cette somme, bien que modeste, doit être justifiée.
Vous me demandez si j'avais exprimé, à l'époque, les réserves que j'exprime aujourd'hui. Je ne me suis exprimé publiquement en séance sur ce projet qu'en septembre 2023, alors que j'étais devenu président du conseil départemental. Je n'avais pas eu de discussion personnelle avec mon prédécesseur sur ce projet, ni pour le soutenir ni pour m'y opposer. Je n'en étais simplement ni un défenseur, ni un opposant.
En tant qu'ingénieur, je tiens à souligner l'importance de la parole de personnalités telles que Christophe Cassou et Valérie Masson-Delmotte. Ces figures éminentes dans le domaine scientifique conseillent des élus du monde entier, elles ont animé des séminaires rassemblant des personnes de toutes orientations politiques, y compris issues du gouvernement actuel, pour les sensibiliser aux enjeux environnementaux et aux nouvelles réalités du changement climatique. Leur implication est significative et m'a personnellement interpellé. Je ne saurais vous le dire plus clairement.
Pour revenir sur le rôle de cette commission d'enquête, je rappelle que les annexes 8, 9, 10 et 11 se rapportent particulièrement à la réalisation du chantier et aux conditions de son déroulement. Il est essentiel de garantir que, durant toute la durée du chantier, un suivi rigoureux est assuré. Signer une concession avec un acteur privé sans contrôle continu de l'exécution serait inacceptable. Bien que nous ne traitions pas ici de la question de l'eau, nous serons tenus d'y revenir par rapport aux conditions fixées dans le cadre du contrat, notamment en cas d'atteinte aux nappes phréatiques. Je me permets ce rappel méthodologique, qui précise le champ d'action de nos travaux. À aucun moment, nous ne dérogeons aux préconisations de la proposition de résolution, notamment sur les conditions juridiques et financières du contrat.
La loi sur l'eau impose aux projets d'infrastructures telles que les autoroutes, des mesures à mettre en place pour le ruissellement, qui influent sur le coût du chantier en fonction de l'appréciation de ce qui constitue une zone humide. Cette appréciation entraîne des coûts différents, selon que l'on considère que la zone humide est alimentée par des résurgences d'une rivière située en amont, ou par des écoulements d'eau venant de l'aval. La zone humide du château de Maurens illustre parfaitement ce point. Selon le rapport des écologues d'Atosca, cette zone serait alimentée par une rivière encaissée, le Girou. En réalité, elle est alimentée par des écoulements d'eau nécessitant des travaux spécifiques pour préserver cette zone humide. Or ces travaux, à ce stade, ne sont pas prévus.
L'article 11 de l'annexe 21, qui est la convention financière relative aux obligations d'information du concessionnaire vis-à-vis de l'État et des collectivités contributrices, impose au concessionnaire de communiquer le compte rendu d'exécution du contrat de concession avant le 1er juillet de chaque année. Cette obligation inclut donc la période de déroulement du chantier. Avez-vous reçu ce compte rendu d'exécution du contrat, en dehors des appels de fonds qui ont été clairement identifiés ?
Je l'ignore, et je vous propose de vous fournir une réponse écrite et détaillée sur ce point.
Au moment où vous avez été sollicité pour participer au plan de financement, des études concernant les alternatives que représentent l'aménagement de la RN126 et l'aménagement de la ligne ferroviaire vous ont-elles été présentées ?
Aucune étude sur la ligne ferroviaire ne m'a été présentée. Sur les autres alternatives, la présentation était particulièrement succincte.
Ces alternatives ont bien été évoquées, et ont permis la DUP du projet de l'A69, validée par le Conseil d'État le 5 mars 2021.
Lorsque la décision de concession a été prise par le ministre, M. Dominique Perben, elle n'était fondée sur aucune étude, ce dont j'ai la preuve.
Ma dernière question porte sur les fermes solaires. Avez-vous été contacté par la société Gaïa Energy Systems ou par Atosca au sujet d'une joint-venture mise en place avec le groupe Pierre Fabre pour l'équipement de fermes solaires sur les terrains délaissés ?
J'ai découvert, comme mes services d'ailleurs, l'existence de ce montage en lisant votre document. À ma connaissance, mes services n'ont pas été contactés. Je ne sais pas si, pour les futurs terrains délaissés, en particulier sur la partie haut-garonnaise, il est prévu d'installer des panneaux solaires, ce qui pourrait avoir un impact sur le réseau actuel et sur les futurs ouvrages. Les travaux ont déjà commencé, et je ne nie pas cette réalité. Dès lors, des échanges techniques se déroulent sur le terrain. Mes services y participent, et je n'ai pas le droit de les interdire. Il est donc possible que cette question ait été abordée avec mes services. Je les consulterai afin de vous apporter une réponse formelle.
Il est effectivement nécessaire d'expertiser cette question, car dans le contrat de concession, cette partie était grisée pour une raison qui m'échappe. On se demande en effet pourquoi, et par qui, cette décision a été prise. Il est explicitement indiqué qu'Atosca a déjà engagé une étude prospective sur ce projet. Une dizaine de sites répondant aux premiers critères de délaissement, et sans enjeux environnementaux, ont été identifiés, avec pour objectif d'installer 40 mégawatts opérationnels dès la mise en service de l'autoroute. On se demande bien qui a décidé que ces terrains étaient dépourvus d'enjeux environnementaux.
Par ailleurs, le contrat indique qu'une joint-venture sera créée spécifiquement avec un développeur de projet énergétique expérimenté. Nous découvrons, en page 21, qu'il s'agit de Gaïa Energy Systems, du groupe Pierre Fabre et d'Atosca. Ma question mérite donc d'être approfondie en ce qui concerne les consultations ou les demandes qui auraient pu être faites auprès des services techniques, sans en informer les élus et sans leur permettre de délibérer sur ce point.
J'affirme que nous n'avons pas été consultés officiellement. Cependant, je n'exclus pas la possibilité que des échanges techniques informels aient eu lieu sur le terrain.
Je tiens à vous rappeler, monsieur Vincini, que si cette information est susceptible d'être confidentielle en raison du secret des affaires, elle est bien prévue dans le cahier des charges de la concession, qui autorise le concessionnaire à utiliser le domaine public autoroutier pour des activités annexes, selon des dispositions en vigueur. Ces projets, s'ils aboutissent, seront soumis à des consultations et à des autorisations environnementales. Vous en serez nécessairement informé. Je souhaite également vous rassurer quant au fait que ces éléments n'impacteront pas les compensations auxquelles le concessionnaire est tenu dans le cadre de ses obligations.
Rien ne me dérangerait sur ces sujets, si tout était public. Or, si une commission d'enquête n'avait pas été constituée, tout ce dont nous parlons n'aurait pas été porté à la connaissance des citoyens et des élus. Les auditions que nous avons menées font apparaître que les élus locaux ne sont pas informés, et que nous, élus nationaux, ne le sommes pas non plus. Le ministre lui-même se laisse influencer par la communication de la société Atosca, qui affirme qu'elle va planter cinq arbres pour tout arbre abattu.
Nous découvrons, à la faveur d'une commission d'enquête, des réalités écologiques, financières et sociales, notamment en ce qui concerne les tarifs. Ces informations devraient être disponibles dans le cadre des enquêtes publiques liées à une DUP et aux autorisations environnementales. En effet, que les terrains délaissés soient consacrés à la renaturation ou à des fermes photovoltaïques, ce n'est pas du tout la même chose.
Je tiens à souligner, monsieur Vincini, la qualité des réponses apportées, non pas parce qu'elles correspondent à ce que je considère utile pour ce dossier, mais surtout parce qu'elles sont extrêmement complètes, bien documentées et très pertinentes. J'apprécie grandement le temps et les efforts consacrés à approfondir l'ensemble des questions posées. De plus, vous nous avez transmis les documents sur lesquels vous avez fondé vos propos concernant les assemblées délibérantes et les décisions prises au niveau du conseil départemental.
Je vous remercie à mon tour pour votre présence aujourd'hui à cette commission d'enquête, ainsi que pour la sincérité et la précision des informations fournies. Il est important de souligner le rôle modeste en termes de financement du conseil départemental de la Haute-Garonne. Néanmoins, ce rôle revêt une importance politique significative. Vous avez rappelé l'importance de ne pas s'opposer aux décisions prises par votre prédécesseur, ce qui témoigne de constance dans les prises de position politique. Je remercie également le conseil départemental de la Haute-Garonne pour son soutien financier à la réalisation de cette infrastructure autoroutière destinée à désenclaver le Sud du département du Tarn. Ce soutien est bienvenu et apprécié.
La séance s'achève à dix-sept heures dix.
Membres présents ou excusés
Présents. – Mme Christine Arrighi, Mme Karen Erodi, M. Laurent Esquenet-Goxes, M. Philippe Frei, Mme Anne Stambach-Terrenoir, M. Jean Terlier, Mme Corinne Vignon