Intervention de Christine Arrighi

Réunion du mercredi 22 mai 2024 à 15h30
Commission d'enquête sur le montage juridique et financier du projet d'autoroute a

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristine Arrighi, rapporteure :

Monsieur Vincini, je tiens à vous remercier d'avoir ancré votre propos dans une réalité scientifique connue depuis le rapport Meadows de 1972. Depuis cette date, les scientifiques nous alertent sur la nécessité de réviser notre modèle pour éviter le scénario dans lequel nous nous trouvons aujourd'hui. Le rapport Meadows avait envisagé des scénarios extrêmement défavorables, qu'il jugeait improbables. Or ces scénarios se réalisent pourtant aujourd'hui. Nous sommes constamment alertés par les scientifiques, qui expriment leur lassitude face à l'inaction climatique, estimant que les actions politiques sont insuffisantes, voire inexistantes. Je partage entièrement votre point de vue : nous ne sommes plus dans une période de transition, mais de véritable bifurcation.

À cet égard, le projet de l'autoroute A69 est emblématique. L'État nous inflige une double peine, à la fois une peine environnementale, avec l'ajout de voies supplémentaires à une infrastructure existante, et une peine sociale et financière, puisqu'une infrastructure gratuite devient payante. Ce tarif reste à déterminer mais, sur la base des prix moyens communiqués par l'Autorité de régulation des transports (ART), nous pouvons considérer que le coût serait d'environ 20 euros aller-retour pour les particuliers, 26 euros pour les artisans, et compris entre 60 et 80 euros pour les camions. L'ART indique que, pour les camions, ce coût pourrait être majoré de 14 % par rapport aux prix moyens pratiqués. Ainsi, on impose aux usagers de payer pour une autoroute de desserte locale plutôt que mobiliser la solidarité nationale par l'impôt.

Il me semble nécessaire de réinterroger tout projet d'infrastructure à la lumière des réalités scientifiques contemporaines. En 2016, cette réévaluation aurait pu être effectuée, du moins sur le volet social, puisque la décision de l'État de construire une autoroute n'avait pas pris en compte les alternatives constituées par la RN126 et le transport ferroviaire. À cette époque, ce projet, dont le Commissariat général à l'investissement avait mis en évidence les risques financiers, n'était pas encore un chantier. L'autorité environnementale avait également émis des alertes concernant les études socio-économiques et environnementales.

Il est essentiel de rappeler que l'obtention d'une déclaration d'utilité publique ne suffit pas pour débuter les travaux. Une autorisation environnementale et un arrêté interdépartemental restent requis. Or l'arrêté interdépartemental du 1er mars 2023 s'appuie sur des études que la commission d'enquête juge biaisées, notamment en ce qui concerne la qualification des terres et l'impossibilité de les évaluer correctement, puisque tous les éléments n'ont pas été communiqués. Les biais concernent aussi les conditions financières, puisque nous avons appris par voie de presse, comme vous, monsieur Vincini, la participation du groupe Pierre Fabre au contrat via la société Tarn Sud Développement, ainsi que celle de la Chambre de commerce et d'industrie (CCI) du Tarn, et d'autres entreprises, dont l'identité ne nous a pas été communiquée.

Nous devons également aborder le projet de ferme solaire qui concerne toute l'emprise autoroutière. Bien que la Haute-Garonne ne soit concernée que partiellement, les ambitions de cette ferme solaire, qui produirait 40 mégawatts, méritent notre attention. Étant donné que la production d'un mégawatt nécessite, selon les estimations, entre un et trois hectares, cette ferme suppose de couvrir 80 hectares par des panneaux photovoltaïques. Bien que cela ne soit pas illégal, ces éléments étaient également grisés dans le contrat, échappant ainsi à la libre lecture des citoyens, de l'enquête publique et de l'autorité environnementale. Or il est crucial de s'assurer que les entreprises, en développant le photovoltaïque, n'empiètent pas sur les espaces destinés aux mesures compensatoires. Ainsi, deux options se présentent : soit ces terrains sont rendus à la nature, soit ils sont utilisés pour des fermes solaires. Mais, en tout état de cause, ces deux hypothèses sont exclusives.

Permettez-moi, monsieur Vincini, de vous demander une petite clarification. Vous avez évoqué les échéances EC1, EC2, EC5, EC6 et EC7. Qu'en est-il des échéances EC3 et EC4 ?

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion