La commission entend Mme Carole Delga, présidente de Régions de France.
Mes chers collègues, je profite de notre première commission de l'année pour vous souhaiter ainsi qu'à vos proches et à vos collaborateurs mes meilleurs vœux pour 2024. Sans esprit partisan, je souhaite que nous ayons davantage l'occasion de voter et de débattre du budget en cette année 2024.
Comme en septembre 2022, j'ai souhaité que la commission effectue un tour d'horizon du sujet des finances publiques locales en menant un cycle d'audition des principales associations d'élus locaux. En effet, il est utile de préparer la suite de l'année à l'aide d'un certain nombre d'auditions portant sur ce sujet, qui ont été au cœur des discussions de ce dernier budget. L'audition de l'association Régions de France est la première de ce cycle. Nous avons aujourd'hui le plaisir de recevoir Madame Carole Delga, présidente de la région Occitanie et de Régions de France.
Nous poursuivrons ce cycle le mercredi 31 janvier avec l'audition de M. François Sauvadet, président de Départements de France, puis le mercredi 13 mars avec celle de MM. David Lisnard et André Laignel, respectivement président et vice-président de l'association des maires de France et des présidents d'intercommunalités.
Je remercie Madame Carole Delga d'avoir bien voulu répondre en premier lieu à notre invitation. Je lui cède la parole pour un propos général avant que nous engagions la discussion.
Monsieur le président, monsieur le rapporteur général, mesdames et messieurs les députés, je vous présente mes meilleurs vœux pour cette année 2024. Malgré un contexte complexe au niveau international, malgré l'urgence sociale, écologique et républicaine, je souhaite que 2024 soit une année d'espoir. Lorsque j'ai été élue députée en 2012, je siégeais à la commission des finances, que j'ai le plaisir de retrouver aujourd'hui.
Je vous remercie, monsieur le président, d'avoir amorcé ces rencontres portant sur la question des finances locales. Notre pays doit répondre à des enjeux de cohésion sociale et d'urgence environnementale. Dans ce cadre, le couple État-région est absolument indispensable pour pouvoir relever ces défis.
Les régions ont dû relever de nouveaux défis à travers les nouvelles compétences et leur nouveau périmètre, pour une majorité d'entre elles. Aujourd'hui, elles sont confrontées à une difficulté financière particulièrement préoccupante. Les présidentes et les présidents de région ont toujours souhaité adopter une position constructive afin de livrer la bataille de l'emploi.
À cet égard, les chiffres des dernières années et la baisse du taux de chômage demeuraient encourageants. Pour autant, nous observons une légère reprise de la hausse du chômage, qu'il convient de surveiller. En outre, de nombreuses personnes restent éloignées durablement de l'emploi. Nous devons donc continuer à travailler ensemble afin que la forte demande des entreprises en matière de recrutement puisse bénéficier aux personnes éloignées de l'emploi, ce qui requiert des moyens financiers fléchés de façon différente.
Voici huit ans, ce fléchage s'effectuait à l'aune du nombre de places de formation. Le taux de chômage était alors très supérieur au taux actuel. Aujourd'hui, nous devons mieux cibler les formations sur l'acquisition de fondamentaux, la réappropriation de l'estime de soi par les personnes ayant connu de nombreuses difficultés et la nécessité de former les personnes aux nouveaux métiers liés à la transition écologique et énergétique et aux enjeux de souveraineté industrielle.
Le partenariat entre l'État et les régions doit également nous permettre d'adapter nos politiques aux territoires. En effet, la question de l'emploi revêt des réalités qui peuvent être différentes au sein d'un même département. Il est indispensable que les politiques soient adaptées aux bassins de vie et aux bassins d'emploi.
Le partenariat État-région est également indispensable pour traiter la question des mobilités. Voici près de dix-huit mois, les dix-huit présidents de région ont signé une tribune demandant de faire du ferroviaire l'axe prioritaire des mobilités en France, avec un investissement renforcé en provenance du budget de l'État et des crédits européens. Il en va de la lutte contre le réchauffement climatique et de notre souveraineté industrielle. Certes, la France dispose encore aujourd'hui d'un temps d'avance en matière de mobilités. Cependant, nous devons renforcer significativement nos dispositifs face à une concurrence internationale exacerbée, dont celle du groupe chinois CRRC.
Dans le domaine de l'éducation, nous demandons des pouvoirs renforcés au niveau de l'orientation. Les dispositifs liés au lycée et à l'apprentissage ont été modifiés en 2018. Néanmoins, l'ensemble des présidents de région observent une méconnaissance des enfants, selon leur niveau social, de la réalité et de la diversité des métiers et des cursus de formation. Afin de lutter contre le déterminisme social, il est absolument indispensable de mettre en œuvre une politique nettement plus offensive sur les questions d'orientation scolaire.
Par ailleurs, dans le cadre du partenariat État-régions, une concertation a lieu actuellement sur la mise en œuvre de l'objectif de « zéro artificialisation nette », ainsi que sur les objectifs de rénovation énergétique.
En d'autres termes, les partenariats État-régions visent des enjeux majeurs pour notre pays, pour l'Europe et pour notre planète. Or la situation financière des régions s'avère particulièrement préoccupante. Entre 2019 et 2022, nous avons augmenté de 20 % nos dépenses d'investissement liées à la crise sanitaire, car nous avons été partenaires de l'ensemble des plans de relance. Il était nécessaire d'atténuer les effets économiques de la crise sanitaire en aidant de façon significative les entreprises dans leur adaptation aux différents enjeux, qu'il s'agisse des économies d'énergie ou de la question du numérique. Il était également nécessaire de soutenir la commande publique à travers l'investissement régional et le soutien aux projets communaux et intercommunaux.
Conformément aux engagements que nous avons pris auprès des différents Premiers Ministres par voie contractuelle, nos dépenses d'investissement sont donc en hausse. De plus, nous relevons l'explosion de nos dépenses de fonctionnement, dont les dépenses d'énergie et les dépenses de carburant, sachant que les seules collectivités locales concernées par les dépenses de carburant sont les régions à travers les services de mobilité.
En tout état de cause, cette hausse des dépenses d'investissement impacte significativement nos capacités d'investissement car elle est couplée à un accroissement insuffisant des recettes de fonctionnement pour compenser l'augmentation des dépenses de fonctionnement. En 2023, l'écart entre l'augmentation de nos recettes de fonctionnement et des dotations liées à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et nos dépenses de fonctionnement est de 1 milliard d'euros. En conséquence, de nombreux présidents de région sont contraints de réduire leurs investissements. Nous alertons le gouvernement sur ce différentiel significatif.
La situation des régions se caractérise par ailleurs par la nécessité d'amplifier l'investissement dans le ferroviaire et dans la rénovation énergétique. Pour autant, les régions constituent le seul niveau des collectivités locales à ne pas percevoir une compensation de l'augmentation des dépenses énergétiques. Pour leur part, les métropoles ont bénéficié d'une aide de 100 millions d'euros. Pour rappel, leur dynamique ne bénéficie pas aux régions, car ces dernières sont dépendantes des dotations de l'État à hauteur de 94 %.
La seule « autonomie fiscale » des régions concerne les cartes grises. Or la dynamique fiscale des cartes grises est en baisse constante. À cet égard, nous avons demandé qu'une réflexion s'ouvre sur ces impôts dits « voiture » en diminution, qui représentent pour les régions un manque à gagner.
Les régions ont plaidé contre une baisse des dotations. Madame Élisabeth Borne, ancienne Première Ministre, a décidé de ne pas réduire ces dotations dans le cadre de la loi de finances 2023 et de la loi de finances 2024, après six années de baisse constante. Je rappelle que les régions ont constitué l'unique strate de collectivités locales ayant supporté une diminution de dotation. Je rappelle également qu'en 2017 et 2018, le transfert de la compétence du développement économique entre les départements et les régions a entrainé un transfert de charges estimé à 1,6 milliard d'euros.
Les régions n'ont perçu qu'une compensation de 600 millions d'euros. Elles ont accepté ce différentiel au regard de la dynamique de TVA. Or celle-ci s'avère moins importante que prévu et se traduit par une situation financière difficile. En outre, la structuration de nos dotations liées à la TVA s'approche désormais de celle des départements. En effet, les ressources des régions sont liées à plus de 34 % à la TVA, contre 28 % pour les départements en résultat des nouvelles réformes.
En tout état de cause, l'argument de la dynamique de la TVA bénéficie aussi bien aux régions qu'aux départements. L'autre dynamique fiscale qui bénéficie aux départements, à savoir les droits de mutation à titre onéreux (DMTO), reste très forte. Elle leur offre une capacité de réserve non négligeable, les départements ayant connu une forte augmentation de leurs droits de mutation à titre onéreux. Pour leur part, les régions ne disposent pas d'autres dynamiques fiscales et leurs impôts « voiture » sont en baisse.
Cette situation nous conduit à demander au gouvernement un pacte d'engagement reposant sur un fonds de 350 millions d'euros. Nous avions entamé les discussions avec Élisabeth Borne en décembre 2023. Nous entendons les poursuivre avec M. le Premier Ministre Gabriel Attal, que je dois rencontrer le 29 ou le 30 janvier.
Nous souhaitons disposer d'un fonds d'investissement. Nous ne demandons pas d'enveloppe de fonds de fonctionnement, contrairement aux départements. L'objectif des régions est bien de répondre aux enjeux de transition écologique et énergétique, sachant qu'elles ne sont pas éligibles au fonds vert dont bénéficient essentiellement les communes et les intercommunalités.
Nous devons donc mener un travail avec le nouveau gouvernement afin de permettre aux régions de continuer à investir afin d'atteindre des objectifs européens et français. L'enjeu est également d'apporter des services à la population, dans un pays profondément divisé et profondément inquiet pour l'avenir. Cette proposition sera complétée par la demande réitérée d'élaboration d'une nouvelle dynamique fiscale se substituant à celle des impôts « voiture ».
L'ensemble des propositions est partagé par tous les présidents de région. En tout état de cause, les régions entendent continuer à investir massivement. Pour rappel, en moyenne un tiers de leurs dépenses de fonctionnement est consacré au rail, c'est-à-dire à la SNCF, et un quart de l'investissement couvre la question des mobilités. Les mobilités et l'éducation constituent les deux budgets majeurs des régions. Ces ordres de grandeur excluent Île-de-France Mobilités, qui fait l'objet d'un dispositif spécifique et d'un financement autonome.
Par ailleurs, je souhaite mettre en exergue la hausse significative des tarifs des péages ferroviaires. Cette augmentation est prévue à hauteur de 24 % en 2024 et 2026. Dans la tribune que l'ensemble des présidents de région ont présentée, ces derniers ont demandé un « choc de l'offre ferroviaire », avec un investissement de 100 milliards d'euros. Le budget de l'État consacré au ferroviaire est trois fois plus faible que celui de l'État allemand, par exemple.
En outre, les régions françaises contribuent à hauteur de deux tiers du financement du matériel roulant vert, comme le train à hydrogène, contre un tiers seulement pour les régions allemandes. De plus, le système de financement du ferroviaire incite peu à la proposition de trains plus nombreux pour nos concitoyens. En effet, plus le nombre de trains en circulation est élevé, plus les péages à régler sont importants. Selon une approche strictement budgétaire, les présidents de région n'ont aucun intérêt à proposer une offre ferroviaire plus large. Dès lors, nous demandons que le système du financement du ferroviaire soit entièrement révisé.
Pour sa part, Île-de-France Mobilités s'est vu accorder un complément du versement mobilité. Cette possibilité offerte au territoire francilien doit être étendue à l'ensemble des territoires de la République.
Il est également à noter que certaines concessions autoroutières parviendront à leur terme en 2028. Il convient dès lors d'examiner les questions de financement qui en découlent. De même se pose la question des montages juridiques du système ferroviaire, dont les sociétés de financement mises en place pour les lignes à grande vitesse (LGV) Marseille-Nice, Toulouse-Bordeaux, Bordeaux-Dax et Montpellier-Perpignan. Peut-être est-il nécessaire de s'inspirer des sociétés des grands projets, comme l'ancienne Société du Grand Paris.
Selon les présidents de région, le système ferroviaire français doit être entièrement remodelé en vue d'une régénération significative de nos infrastructures de transport, de la réouverture de lignes dans certaines régions et d'un investissement dans le matériel roulant permettant d'augmenter les capacités de transport.
Je signale également le retard important que le système ferroviaire français accuse en matière de signalisation et la nécessité absolue d'équiper ce système en matériel ERTMS ( European Rail Traffic Management System ), à l'instar d'autres pays.
Il convient également de mener une réflexion sur la question tarifaire. Un groupe de travail avait été constitué pour étudier le pass inspiré du modèle allemand, à 49 euros par mois. Les travaux de ce groupe sont suspendus depuis un mois. Dans certaines régions comme l'Occitanie, un pass à 45 euros est déjà proposé aux salariés, déduction faite de la participation de l'employeur. En tout état de cause, il est absolument nécessaire de travailler sur une tarification incitative et sur le dispositif du billet unique. À cet égard, la France est particulièrement pénalisée par la division de la chaîne des transports. Cette division ne favorise ni les mobilités douces ni les transports collectifs.
Nous vous remercions de la présentation des propositions de Régions de France.
Ma première question renvoie à l'actualité et aux inondations dévastatrices que les Hauts-de-France connaissent. Selon vous, quels sont les moyens dont les régions disposent pour lutter contre les effets dramatiques du changement climatique ? Ces moyens sont-ils suffisants ? Est-il nécessaire de renforcer votre rôle dans ce domaine ? De mon point de vue, la transition écologique exige de prévoir les ressources utiles aux réparations. Comment appréhendez-vous ce sujet ?
Par ailleurs, une part du produit de la fiscalité transférée aux régions, à savoir la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) et la taxe sur les certificats d'immatriculation, est amenée à diminuer dans les prochaines années. Pensez-vous qu'il est nécessaire de modifier le panier de ressources des régions ? Le cas échéant, quelles ressources convient-il de substituer à cette fiscalité peu dynamique, qui, de surcroît, reste assise sur des activités polluantes ?
Le troisième thème est celui de la question ferroviaire. Vous avez rappelé les annonces de l'ex-Première Ministre. Se pose la question du financement du montant de 100 milliards d'euros évoqué précédemment. Vous avez listé un certain nombre de problèmes, dont la question du péage ferroviaire. Estimez-vous que la participation de l'État doive être plus importante, notamment en lien avec les nouveaux contrats de plan État-région (CPER) ? Quelles sources de financement supplémentaires vous semblent-elles nécessaires ?
En outre, à la différence des autres collectivités territoriales, les régions n'ont pas bénéficié d'une compensation de l'État au titre du coût d'inflation qu'elles ont supporté. Quelle est votre estimation du surcoût pour les régions ? Ce surcoût a-t-il eu une incidence sur le niveau d'investissement des régions ?
Madame la Présidente, permettez-moi de vous souhaiter une bonne année 2024. Je suis très heureux de vous recevoir, et ce, à double titre puisque nous sommes dans la même région.
Je vous remercie également de la manière constructive dont vous présentez le travail réalisé par les régions avec l'État. Effectivement, les destins des régions et de l'État sont liés pour ce qui concerne des sujets comme le transport, la transition écologique et le niveau d'investissement. Comme vous, je n'oppose pas l'État et les collectivités territoriales face aux défis que vous avez rappelés. Nous trouverons ensemble les bonnes solutions.
Cependant, je ne partage pas entièrement votre diagnostic concernant les finances des régions. En 2017, la dotation globale de fonctionnement des régions a été remplacée par une fraction de TVA. L'ensemble des collectivités territoriales s'est retrouvé avec une dotation qui était alors figée. Certes, cette dotation a augmenté depuis deux ans. En tout état de cause, l'équivalent de la dotation globale de fonctionnement des régions est passé de 4,1 milliards d'euros en 2017 à 5 milliards d'euros en 2022, soit une augmentation de 900 millions d'euros.
Un autre exemple réside dans la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), c'est-à-dire le soutien apporté par l'État aux régions pendant la crise du Covid. À la demande des régions, la CVAE a été remplacée par une fraction de TVA en 2022. En effet, devant la crise du Covid, chacun anticipait une baisse très significative de la CVAE sur deux ans. Si celle-ci n'avait pas été remplacée par la TVA, elle se serait réduite d'environ 500 millions d'euros. En pratique, son remplacement par la TVA a permis à cette ressource de s'accroître. L'écart entre ces deux systèmes est de 1,2 à 1,3 milliard d'euros. Il s'agit donc d'une illustration claire du soutien de l'État aux régions.
Au total sur la période 2017-2022, les recettes d'investissement et de fonctionnement des régions ont augmenté de 16 %, c'est-à-dire à un rythme plus élevé que leurs dépenses. Pour sa part, la capacité d'autofinancement brute des régions s'est accrue de 17 % sur la période. Vous avez raison de souligner que l'année 2023 risque de se solder par de moins bons résultats. Cependant, la dynamique des recettes des régions a été supérieure à celle de l'État.
À l'été 2020, un accord a été passé entre les régions et Jean Castex, alors Premier Ministre. L'État s'est également engagé à mettre en place un filet de sécurité pour l'outremer, ainsi que sur un montant de 600 millions d'euros d'investissements supplémentaires. De même, l'État s'était engagé à substituer la CVAE par de la TVA. Ces engagements ont été tenus.
Pour leur part, les régions devaient mettre en place un « serpent budgétaire » de manière à augmenter la résilience de leurs finances. Ce dispositif est-il effectif ? Par ailleurs, les régions devaient créer un système de péréquation devant progressivement passer de 1 à 2 %. Ce dispositif est particulièrement important pour les régions les plus défavorisées, dont celles d'outremer. À ce jour, la péréquation s'établit autour de 0,8 %. Avez-vous prévu d'augmenter son poids ?
En outre, 20 milliards d'euros d'investissements étaient prévus entre 2021 et 2027 dans le cadre des CPER. Pouvez-vous nous apporter de la visibilité en la matière ?
Enfin, je salue votre ouverture concernant la question du financement des collectivités territoriales, dont le niveau départemental et le niveau régional. Les régions sont-elles disposées à recevoir une dotation annuelle votée par le Parlement, à l'instar du modèle allemand, ou sont-elles satisfaites de leur panier actuel de recettes ?
S'agissant des catastrophes climatiques, comme les inondations connues actuellement par la région des Hauts-de-France ou les phénomènes de sécheresse passés, il paraît indispensable pour les régions de mettre en œuvre des politiques d'anticipation plus fortes. À cet égard, j'ai notamment cité le développement des transports en commun, la rénovation énergétique et les mesures de prévention.
Selon les présidents de région, le premier frein réside dans la multiplicité des acteurs qui interviennent dans ces domaines et la « cacophonie » qui en découle. J'ai pu l'observer lors des inondations de l'Aude qui datent de quelques années. J'avais alors pris la décision de confier le fonds d'intervention de la région Occitanie au département de l'Aude.
Nous avons besoin de simplicité pour mener les actions de prévention, comme le curage des cours d'eau et des canaux. Nous devons également nous poser la question de la désignation d'un « chef de file » chargé d'organiser les travaux. Ces derniers peuvent concerner une échelle très locale. Dans ce cas, l'intercommunalité peut être actrice. D'autres travaux doivent être réalisés à l'échelle du bassin versant. Dès lors, il est préférable qu'ils soient menés par des collectivités bénéficiant d'une assise financière plus large.
Les régions sont également confrontées à de fortes contraintes d'autorisations réglementaires lorsqu'elles souhaitent réaliser des travaux. Les délais administratifs s'avèrent particulièrement longs. Au regard des catastrophes climatiques qui deviennent récurrentes, ces délais gagneraient à être raccourcis.
Par ailleurs, notre panier de ressources lié à l'automobile semble dépassé. Il est d'ailleurs en diminution. Nous confirmons la nécessité de cette diminution pour ce qui concerne les questions de pollution. Néanmoins, il doit être remplacé par une autre part d'impôt. En la matière, les présidents de région sont globalement favorables à un impôt lié à la dynamique économique. En effet, les actions et la fiscalité perçue par les collectivités locales doivent être reliées.
En outre, les présidents de région se déclarent favorables à une autonomie financière. En Allemagne, il existe une garantie constitutionnelle en la matière. Grâce à celle-ci, la baisse de dotation qui a fait l'objet de débats dans le cadre de la loi de finances pour 2018, n'aurait pas pu se produire en Allemagne. En pratique, la garantie constitutionnelle d'outre-Rhin permet aux Länder allemands de bénéficier d'une dotation ne pouvant pas varier dans les mêmes proportions affichées par les dotations des régions en 2018.
Pour ce qui concerne l'autonomie fiscale, les présidents de région n'ont pas de position unanime. Pour ma part, je suis favorable à une autonomie fiscale. En effet, un exécutif local a besoin d'endosser la responsabilité de sa politique fiscale.
Concernant l'investissement ferroviaire, les présidents de région ont demandé une enveloppe de 100 milliards d'euros au titre des dix prochaines années. Le plan présenté par Madame Élisabeth Borne, quant à lui, prévoyait 100 milliards d'euros pour les dix-sept prochaines années.
En outre se pose la question des services express métropolitains, c'est-à-dire les réseaux express régionaux (RER) métropolitains, et leur inscription dans les volets de la mobilité des CPER. À ce jour, environ un tiers de ces volets sont finalisés et signés. Les deux tiers restants s'expliquent par un désaccord entre les régions et le ministère des transports quant à l'enveloppe financière, les réseaux express métropolitains et les lignes d'aménagement du territoire.
Par ailleurs, nous n'avons jamais contesté l'existence d'un différentiel entre la dynamique de nos recettes de fonctionnement et celle de nos dépenses. Pour 2023, ce différentiel se chiffrera à 1 milliard d'euros. Les régions sont bien gérées et ne s'approchent pas des neuf ans de capacité de désendettement. Elles présentent en moyenne cinq années de capacité de désendettement. Toutefois, l'exécution des budgets 2024 aura des conséquences. En effet, les régions ne peuvent pas supporter un tel différentiel pendant deux années consécutives.
Pour rappel, toute baisse d'investissement des régions affecte les investissements dans l'emploi, les mobilités et les énergies renouvelables. Nous sommes parvenus à accroître notre capacité d'investissement dans la contractualisation réalisée avec le gouvernement, en lien avec la crise sanitaire, notamment grâce aux économies de dépenses de fonctionnement dégagées par les régions fusionnées dans de nombreux services, dont les fonctions support.
La baisse de dotation que j'ai mentionnée précédemment renvoie au fait que la dynamique de TVA a été anticipée dès l'année 2017. À cet égard, dans le cadre de la négociation sur le transfert des compétences économiques, les régions avaient accepté une compensation de 600 millions d'euros en lieu et place des 1,6 milliard d'euros. La dynamique de TVA ne peut donc pas être invoquée chaque année.
Par ailleurs, la structuration des dotations et la dynamique fiscale des départements et des régions sont désormais semblables. Certains de mes collègues présidents de département me font part de la baisse de la DMTO. Je m'autorise alors à leur rappeler l'explosion de leurs recettes et leur capacité à constituer des réserves.
S'agissant de la question de la contractualisation des différents plans de relance de 2020, les régions ont parfaitement honoré leurs engagements. À titre d'exemple, dans le cadre du dispositif « territoire d'industrie », de nombreuses régions ont même investi davantage que l'État. Tel est le cas de l'Occitanie. En tout état de cause, nous pourrons vous transmettre les chiffres de nos réalisations.
Je rappelle également que les baisses de dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP) et de compensation des frais de gestion ont été significatives. Selon une mécanique instaurée lors de la réforme de la taxe professionnelle, les deux régions les plus impactées par la diminution de la DCRTP sont les deux régions les plus pauvres de France, à savoir les Hauts-de-France et l'Occitanie. A contrario, l'Ile-de-France n'est nullement impactée. Cette situation semble injuste.
En outre, nous avons mis en place un dispositif de péréquation avec l'ex-Premier Ministre, M. Jean Castex. Ce dispositif se poursuivra jusqu'à 2027. Nous avons consenti un effort supérieur de péréquation de 0,8 % à l'égard des territoires d'outre-mer et de la Corse. À ce titre, l'ensemble des présidents de région demande l'augmentation des dotations de ces territoires, dont le fonctionnement diffère de celui des régions métropolitaines.
Je vous remercie d'avoir rappelé que toutes les politiques publiques relèvent de partenariats entre l'État et les collectivités, lesquels ne doivent pas être opposés. Les investissements portés par les régions ces dernières années attestent du soutien non négligeable de l'État en matière de dynamique de TVA. Cependant, je ne mésestime pas l'inflation, notamment sur les prix de l'énergie.
Je note en outre une certaine inadéquation des recettes des régions par rapport à certains objectifs. Une grande partie de recettes est liée à la consommation de pétrole, avec la TICPE et les cartes grises. Par définition, les recettes de TVA sont nationales. Les régions dont la démographie progresse, comme l'Occitanie, accusent peut-être un défaut de compensation. L'association des Régions de France a-t-elle une proposition à soumettre pour atteindre un nouvel équilibre tout en respectant la trajectoire de redressement des finances publiques ?
Le deuxième élément réside dans le bilan de la loi NOTRe de 2015 et de la structuration des grandes régions. Quelles sont les économies d'échelle effectuées à travers la fusion des régions ? Subsiste-t-il des marges d'économies ? Pour ce qui concerne les dépenses de formation professionnelle, disposez-vous d'un bilan comparatif entre les régions ayant opté pour un pacte régional d'investissement dans les compétences (PRIC) porté exclusivement par le conseil régional, celles ayant choisi un PRIC porté par Pôle Emploi et celles disposant d'un modèle hybride ?
Concernant le volet du transport. Vous avez évoqué la proposition de loi de M. Jean-Marc Zulesi. Pensez-vous pouvoir déployer cette loi en dehors des métropoles ? Je pense en particulier au territoire d'industrie Lacq-Pau-Tarbes, qui mériterait sans doute un RER métropolitain.
Un rapport de la Cour des comptes de 2020 indique que la fusion des régions a vu les dépenses globales augmenter d'environ 200 millions d'euros à périmètre constant, soit un montant très éloigné des 10 milliards d'euros d'économies envisagés lors de la réforme. Au cours de la période 2015-2019, les dépenses de fonctionnement se sont accrues plus fortement dans les régions ayant fusionné, avec une moyenne de 20 % d'augmentation.
Cet accroissement touche particulièrement les dépenses de personnel, qui ont augmenté de 10 % en moyenne. En Occitanie, ce taux atteint même 20 %, ce qui représente 60 millions d'euros. Comme les autres présidents de région, madame la présidente, vous avez harmonisé par le haut les régimes indemnitaires des deux régions d'origine.
Pour leur part, les recettes de fonctionnement ont augmenté plus lentement, malgré la perte du pouvoir de taux sur la TICPE et sur les tarifs des cartes grises. Vous avez également procédé à une harmonisation par le haut. Le tarif était de 34 euros par cheval fiscal dans l'ex-région Midi-Pyrénées et de 44 euros dans l'ex-région Languedoc-Roussillon. Vous avez retenu le second tarif.
L'épargne brute a peu progressé entre 2015 et 2019 ; tandis que les dépenses d'investissement ont augmenté en moyenne de 20 %, essentiellement en raison du transfert de la compétence de transport ferroviaire. En conséquence, la dette s'est également accrue. En 2015, l'encours de dette de l'ensemble des régions s'élevait à 24 milliards d'euros, soit le décuple de l'encours de 1986. Pendant la période 2015-2019, seulement trois régions sur treize ont réduit leur endettement.
Quel bilan dressez-vous de la fusion des régions ?
Selon la définition portée par M. Jean-René Cazeneuve, l'autonomie fiscale des régions se limite au pouvoir sur les taux et n'atteint que 9 %. En d'autres termes, les régions n'ont pas la maîtrise de l'impôt, de la taxe sur le carburant et de la TVA.
Par ailleurs, vous plaidez pour un pouvoir réglementaire accru confié aux régions, ce qui constituerait selon moi une dérive de notre modèle républicain vers un système de Länder allemands. Il existe une contradiction importante dans le fait de confier davantage d'autonomie réglementaire aux régions, alors que les élus régionaux ne sont pas responsables de la levée de l'impôt, soit l'un des éléments fondateurs de la responsabilité politique devant les électeurs.
En outre, les deux premiers postes budgétaires de la région sont l'éducation et les transports. Nous avons voté le déploiement des services express régionaux métropolitains, qui doivent connecter les territoires ruraux aux villes, notamment au moyen de trains. Estimez-vous que ces projets puissent être financés à la hauteur des besoins ?
Enfin, seule la région Occitanie a fait le choix de lignes à très grande vitesse, alors que les lignes à grande vitesse permettent déjà de gagner du temps et de réaliser quelques milliards d'économies, en longeant l'autoroute A9 plutôt qu'en construisant un viaduc, par exemple. N'est-il pas préférable de redimensionner certains grands projets afin d'investir dans les déplacements du quotidien ? Dans ma circonscription, les citoyens jugent que la ville de Montpellier est de plus en plus inaccessible pour reprendre l'expression de Gilles Savary. Ils préféreraient attendre huit minutes dans un TGV et gagner trente minutes de déplacement pour rejoindre la gare.
Madame la présidente, vous avez évoqué la question du retour à l'emploi. Or, si la région est le chef de file en matière d'économie, toutes les autres composantes du retour à l'emploi, hormis la formation qui demeure dans votre champ de compétences, relèvent soit de la politique régalienne de l'État, soit des départements, notamment à travers le revenu de solidarité active (RSA). Mais cet aspect a un impact sérieux sur le budget de fonctionnement de toutes les régions de France.
En outre, seulement un tiers des CPER est d'ores et déjà signé, ce que je déplore. En région Bourgogne–Franche-Comté, les CPER ne sont ni finalisés ni signés, ce qui représente un véritable gâchis d'argent public. Une demande d'argent public d'une région ne peut pas être crédible si, parallèlement, celle-ci n'est pas en mesure de mettre en œuvre des actions dans le cadre du CPER.
Par ailleurs, je souhaite connaître le décompte définitif des demandes des régions, qui relèvent de différents volets, sachant que ce décompte représente une dette future.
Dans le cadre du projet de loi de finances, vous évoquez la possibilité de substituer les recettes assises sur la fiscalité automobile, soit une proposition du président de la Cour des comptes. Quel montant est-il nécessaire ? Quelle forme de substitution est-elle envisagée ?
La loi de finances pour 2024 instaure l'obligation pour les collectivités et les groupements de plus de 3 500 habitants de se doter d'un budget vert annexé au compte administratif et au compte financier unique à compter de 2024.
Au Sénat, de nombreux parlementaires ont émis des réticences au sujet du caractère obligatoire de cette mesure. Pour sa part, le groupe Démocrate estime que le verdissement des finances publiques locales passe en premier lieu par l'utilisation de référentiels comptables partagés.
Conformément à l'article 191 de la loi de finances, des concertations entre le gouvernement et les élus doivent permettre d'établir le décret d'application de cette mesure, ainsi que l'arrêté fixant le modèle de l'état annexé. Disposez-vous d'éléments à nous communiquer pour garantir l'utilité, la pertinence et l'efficacité de cette budgétisation verte ?
Comme vous le savez, M. Éric Woerth a été chargé d'une mission portant sur la décentralisation en novembre. Quelles sont les propositions des régions par rapport à sa lettre de mission ?
Par ailleurs, nous observons une dégradation des services publics certaine, que ce soit dans le domaine de la santé ou dans celui des transports. À titre d'exemple, le trajet entre Clermont-Ferrand et Paris prenait deux heures et quarante-cinq minutes voici vingt ans. Ce trajet dure aujourd'hui trois heures trente. Cette dégradation est sensible et rapide.
Le gouvernement ne prévoit pas de prélèvement supplémentaire et donc de ressources publiques supplémentaires. Il reste dès lors la ressource des économies. Quels domaines partagés par l'État et par les régions pourraient-ils faire l'objet d'une simplification et d'une compétence exclusive des régions et ainsi générer des économies ?
J'attire votre attention sur l'onde de choc à venir de la crise immobilière et notamment sur le ralentissement de la production de logements neufs dans notre pays. Les régions portent la compétence du développement économique. Elles sont alertées par des entreprises de leur territoire qui s'inquiètent de leur devenir. Comment appréhendez-vous les conséquences de cette crise sur le plan économique et en matière d'emploi ?
En outre, dans le cadre de la transition énergétique, les régions accompagnent la formation en matière de réhabilitation des logements. Le personnel qui produit les logements neufs n'est pas le même que celui qui les réhabilite. Comment avez-vous défini vos priorités en la matière ?
Enfin, il est question de mettre en place des tenues scolaires identiques dans les écoles élémentaires et les collèges. Pour votre région, avez-vous analysé le coût de cette mesure à supporter par élève ?
L'efficacité des régions comme actrices de leur propre développement dépend de leurs moyens et de leur autonomie d'action, dont elles sont grandement privées, comme beaucoup de collectivités locales. Bien entendu, les élus écologistes s'opposent à cette dérive.
En France, une grande ville ou une métropole et ses établissements disposent parfois de moyens et de budgets supérieurs à ceux d'une région, ce qui paraît anormal. La différence entre les régions françaises et les régions des principaux pays européens s'avère flagrante. Les régions françaises ont un poids financier très faible par rapport à celui des régions européennes comparables comme la Flandre, la Lombardie et la Catalogne. De plus, le champ de compétences des régions françaises est plus étroit que celui de leurs homologues européennes. Dans les États fédérés, les régions disposent également d'une forte légitimité politique.
Le sujet de l'évolution institutionnelle des régions, notamment dans le cadre de la mission qui a été confiée à Éric Woerth, est-il débattu au sein de Régions de France ? Cette évolution institutionnelle pourrait renforcer le fédéralisme et donner aux régions des moyens d'action pour répondre aux défis climatiques et sociaux, notamment dans les domaines des transports et de l'eau.
Plus précisément, que pensez-vous de la conception française de la répartition entre les compétences générales et les compétences spéciales ?
Au cours des trois derniers mois, de nombreuses régions ont signé leurs protocoles d'accord du contrat de plan État-région mobilité 2023-2027. Malgré les 40 milliards d'euros mis sur la table conjointement par l'État et les régions, soit 25 % de plus que dans la génération précédente de contrats, certaines régions ont retardé la conclusion des CPER.
Les négociations relatives au volet des mobilités ont été particulièrement difficiles, car il était attendu de l'État une participation nettement plus forte, c'est-à-dire une participation susceptible de produire un choc d'offre en faveur du train et des mobilités décarbonées. Ainsi, la hausse des moyens à hauteur de 40 milliards d'euros mise en avant ne tient pas compte de l'inflation dans ce secteur.
Or, selon le rapport du conseil d'orientation des infrastructures (COI), la hausse des prix s'élèvera à 27 %. Sur cette base, les régions évaluent à environ 28,9 milliards d'euros l'effort que devrait fournir l'État. S'agissant des objectifs de transition climatique, la faiblesse des moyens alloués par l'État a été soulignée.
Quand un outil relatif à l'évaluation environnementale des CPER verra-t-il le jour ? Qu'en est-il de la mise en cohérence de cette génération de CPER avec les objectifs climatiques nationaux et régionaux ?
La « question Corse » pose le problème de la structure centralisée de l'État. L'État-nation présente de nombreuses qualités, dont le traitement égalitaire de chacun devant la loi. Cependant, il a le défaut de ne pas tenir compte de la grande diversité territoriale de la France. En Corse, nous observons quotidiennement les limites de ce modèle.
Considérez-vous que le fait de modifier le rapport de compétences entre l'État central et les territoires revient à défaire ou affaiblir la France ou, au contraire, à favoriser une politique plus efficace, plus adaptée aux conditions géographiques, économiques, sociales et culturelles des régions qui composent et enrichissent d'ailleurs la France ? Les Corses pensent que cette modification de rapport permettrait de valoriser ce qui fait la richesse et la diversité de notre pays.
Le bilan des nouvelles régions démontre clairement que la plus grande taille des nouvelles régions leur permet de mieux structurer les filières économiques, d'aboutir à un meilleur maillage territorial et de développer de nouvelles filières, notamment dans le domaine des énergies renouvelables et de l'hydrogène vert.
La création d'une nouvelle filière doit s'étendre de la production à la distribution en passant par les usages. La taille accrue des régions se traduit par une dynamique économique plus importante, un travail mieux organisé avec les branches professionnelles.
Le bilan des grandes régions est donc positif sur le plan économique. Il démontre également que l'investissement dans les mobilités a progressé. En pratique, les économies réalisées sur les dépenses de fonctionnement ont été affectées prioritairement à l'investissement dans les mobilités. Ces économies sont évaluées à 2 milliards d'euros.
Concernant la formation, une seule région n'a pas mis en place de Pacte Régional d'Investissement dans les Compétences (PRIC), à savoir la région Auvergne-Rhône-Alpes. La région Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA) a déployé un dispositif dérogatoire qui s'inspire du PRIC. En pratique, les PRIC ont évolué au regard des changements de structuration du chômage au cours des huit années passées. Le taux de chômage élevé nécessitait de développer prioritairement le nombre de places de formation. Aujourd'hui, le besoin concerne des formations plus longues visant prioritairement les chômeurs de longue durée.
À cet égard, Régions de France se déclare relativement déçue des nouvelles dispositions opérationnelles de France Travail, car leur manque de souplesse ne permet pas d'adapter nos politiques de formation aux divers bassins d'emploi.
Pour rappel, la région intervient sur la formation initiale au niveau des lycées, de l'enseignement supérieur et des demandeurs d'emploi. De manière croissante, elle intervient également sur la formation des salariés. Parmi les propositions formulées par Régions de France en vue de l'élection présidentielle de 2022, nous avions suggéré la mise en place d'outils communs, notamment en matière de plateaux techniques, pour la formation initiale, la formation des demandeurs d'emploi et la formation continue.
Une évolution sociétale majeure à laquelle nous devons répondre réside dans le fait que certains salariés souhaitent exercer plusieurs métiers au cours de leur carrière. Or le système actuel sépare la formation initiale, la formation des demandeurs d'emploi et la formation des salariés. Il ne répond pas au besoin de se former tout au long de sa carrière.
Les réorientations professionnelles requièrent des formations lourdes que les grandes entreprises ont les moyens de financer. En revanche, dans les petites et moyennes entreprises (PME) et les très petites entreprises (TPE), la rupture conventionnelle est fréquemment utilisée pour financer ces formations de réorientation professionnelle à travers les crédits de demandeurs d'emploi.
Bien entendu, l'État joue un rôle important dans la formation. Le rôle des régions est également important. Pour mémoire, les formations collectives des demandeurs d'emploi sont financées à l'aide des crédits des régions. En tout état de cause, nous devons songer à un nouveau paradigme au regard du souhait des salariés de pratiquer plusieurs métiers différents au cours de leur vie et du besoin de mutualiser les plateaux techniques.
Par ailleurs, près du tiers des PRIC est finalisé à ce stade. Un accord a été trouvé avec le ministère du travail sur le contenu des PRIC. S'agissant de leur financement, cet accord couvre environ un tiers des régions.
Pour ce qui concerne les mobilités dans les territoires urbains, nous observons l'existence d'une multiplicité d'acteurs ce qui particulièrement défavorable à l'enchaînement des mobilités collectives, c'est-à-dire à la proposition d'un parcours simplifié de mobilité de porte à porte.
Dans un territoire urbain, c'est-à-dire dans le bassin de vie d'une métropole, les acteurs du financement du ferroviaire sont la SNCF, les régions et l'État. Le tram, le métro et le bus, quant à eux, relèvent des compétences métropolitaines, lesquelles ne s'appliquent pas à l'échelle du bassin de vie. Ce dernier est dès lors exclu de ces transports collectifs.
De plus, les cars de moyenne et longue distance intègrent le périmètre de responsabilité des régions. Cependant, celles-ci ne sont pas responsables de la voirie. En cas d'augmentation de la desserte par car d'une zone où le rail est absent, il convient de solliciter les propriétaires des routes, qui peuvent être l'État, les sociétés d'autoroutes, les départements ou les métropoles.
Au regard de cette multiplicité d'acteurs, les présidents de région ont proposé la création d'agences des mobilités à l'échelle des aires urbaines afin d'assurer la cohérence des actions de mobilité. Cette proposition ne revient pas à recréer Île-de-France Mobilités à l'échelle des territoires urbains de province. Ces agences des mobilités n'auraient pas pour mission de définir les arrêts de bus, par exemple. Elles seraient néanmoins chargées de mettre en cohérence les investissements, notamment pour ce qui concerne les voies réservées aux cars et au covoiturage dans le réseau routier.
Ainsi, l'agence des mobilités assurerait un service renforcé au niveau des mobilités collectives, sachant que le rail n'est pas présent dans tous les territoires et que nous devons donner la priorité à celles et ceux qui empruntent les transports collectifs. À cet égard, je vous transmettrai, monsieur le président, le livre blanc des propositions des régions concernant les mobilités.
Les régions plaident également en faveur de la mise en place d'un titre unique de transport permettant de simplifier le parcours des usagers et d'accroître la fluidité des parcours interdépartementaux, voire interrégionaux. À titre personnel, je plaide en outre pour un tarif bas de ce titre unique de transport.
En outre, je rappelle que la région PACA est concernée par un projet de ligne à grande vitesse (LGV), à savoir la LGV Marseille-Nice. Ce projet s'ajoute aux LGV Bordeaux-Toulouse, Bordeaux-Dax et Montpellier-Perpignan. L'accroissement du transport du quotidien nécessite de nouvelles voies. Or l'axe Montpelier-Narbonne est le territoire ferroviaire le plus saturé de France. Il a donc besoin d'une deuxième ligne pour assurer le transport quotidien. L'aire urbaine toulousaine connaît une situation similaire.
Les présidents de région défendent des transports d'aires urbaines portant sur des distances de cinquante à soixante kilomètres, d'où la nécessité de créer de deuxièmes lignes ferroviaires mixtes. En effet, nous sommes également confrontés à la problématique de la saturation des autoroutes en poids lourds dans le corridor méditerranéen et dans le corridor atlantique. Il s'agit donc de construire de nouvelles lignes offrant de véritables solutions pour le fret ferroviaire. Nous avons besoin de nouvelles LGV pour favoriser ces mobilités.
Sur le pourtour méditerranéen se pose également la question de la submersion régulière de la ligne ferroviaire actuelle et donc des ruptures de la desserte ferroviaire qui adviennent à plusieurs reprises chaque année dans les territoires du bassin méditerranéen. J'évoque ici le trajet Marseille-Nice et le trajet Montpellier-Perpignan. La mise en place d'une autre ligne est indispensable dans ces territoires.
En outre, je ne souhaite pas opposer les LGV aux trains du quotidien. Nous avons besoin de ces deux modes de transport. La grande vitesse ferroviaire nécessite de faibles rayons de courbure, d'où le projet de viaduc mentionné précédemment pour Pyrénées-Orientales. Dans ce département situé à plus de cinq heures trente de Paris en train, le billet d'avion s'élève à plus de 500 euros. Or il s'agit d'un des départements les plus pauvres de France. Nous devons savoir concilier les enjeux écologiques et sociaux afin de protéger les valeurs républicaines.
L'idée de la création d'un RER des Pyrénées a également été évoquée. Pour rappel, un RER métropolitain s'inscrit dans un bassin de population et doit répondre à un besoin de cadencement. Je n'ignore pas la nécessité de rouvrir certaines lignes ferroviaires telle que la ligne Montréjeau-Luchon. En revanche, un RER des Pyrénées ne me semble ni réaliste ni raisonnable au regard des données de fréquentation et d'extrapolation.
Par ailleurs, l'Occitanie se portera candidate pour la création d'un RER métropolitain dans l'aire urbaine toulousaine et dans l'aire montpelliéraine. Une réflexion porte également sur l'aire urbaine nîmoise. Elle doit être conduite en relation avec la région PACA.
S'agissant du bâtiment, les régions sont également très préoccupées par l'effondrement de la construction individuelle. Il est indispensable que les régions maintiennent un haut niveau d'investissement pour la réhabilitation énergétique des lycées, ainsi que l'accessibilité et la sécurisation de leurs bâtiments. Plusieurs présidents de région ont entamé une réflexion sur le bâtiment durable et sur le soutien de la production de logements en dehors des métropoles, et ce, afin de favoriser le rééquilibrage territorial.
Plusieurs présidents de région songent également au soutien de techniques constructives durables recourant à de nouvelles techniques moins consommatrices en énergie et à des matériaux biosourcés. Nous travaillons aussi avec la Fédération française du bâtiment (FFB) et la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (CAPEB) sur la formation adaptée aux bassins d'emploi. Le premier plan « bâtiment durable » de la région Occitanie couvre le sujet de la formation.
Ce plan comprend également un volet visant à concilier l'esthétique urbaine et l'efficacité énergétique de l'habitat. Il s'agit par ailleurs de mener une réflexion sur le vivre ensemble à travers l'urbanisme, à l'instar des démarches conduites en Espagne et dans différents pays sud-américains.
En outre, je précise qu'un tiers des régions a signé le volet mobilités des CPER à travers un accord financier. Tous les autres CPER ont été signés. Néanmoins, les deux tiers des régions n'ont pas encore conclu d'accord financier.
Par ailleurs, la mise en place de la tenue unique n'a été expérimentée que par la région Auvergne-Rhône-Alpes au niveau d'une dizaine de lycées. Pour ma part, j'ai indiqué au ministère de l'éducation nationale que l'Occitanie préfère orienter son budget vers la rénovation énergétique, l'accessibilité et la sécurisation. En cas de marges de manœuvre budgétaires liées à une baisse de l'inflation, par exemple, l'Occitanie favorisera le financement des cantines scolaires pour les familles modestes et moyennes.
En outre, trois régions, dont l'Occitanie, avaient mis en place des budgets verts jusqu'à 2023. Courant 2023, trois nouvelles régions ont développé ce type de budget. Nous attendons la circulaire en la matière et souhaitons qu'elle s'inspire des budgets verts existants afin d'éviter la création de nouvelles nomenclatures chronophages pour nos fonctionnaires.
S'agissant de la substitution de la fiscalité automobile, les régions plaident en faveur d'une fiscalité mieux reliée à la dynamique économique. Nous défendons en effet l'autonomie réglementaire, tout particulièrement pour la Corse et les territoires d'outre-mer. Son couplage avec l'autonomie fiscale correspond à une position que certains présidents de région, dont je fais partie, appellent de leurs vœux.
En revanche, aucun des présidents de région ne souhaite s'orienter vers le modèle du fédéralisme. Nous sommes très attachés à la République une et indivisible et demandons simplement le renforcement de l'autonomie des régions, comme il s'observe dans d'autres pays. À cet égard, je dois rencontrer M. Éric Woerth lors d'une réunion de travail d'ici à deux ou trois jours afin d'examiner les propositions de Régions de France.
Il est à noter que d'autres propositions portent sur les sujets de l'orientation scolaire, les dispositifs d'information des élèves et la possibilité d'ouvrir le collège et le lycée à la découverte de l'ensemble des métiers. En outre, certaines régions ont lancé des initiatives en matière de formations publiques de préparation aux études considérées comme difficiles, comme les études de médecine.
Les régions sont également très préoccupées par l'inégalité entre les lycées et par la question des options. En effet, les lycées des centres-villes de grandes métropoles peuvent proposer un choix plus large d'options que les lycées des territoires ruraux.
Par ailleurs, nous sommes globalement favorables à la désignation d'un « chef de file » dans le cadre des compétences partagées que sont le tourisme, la culture et le sport. Néanmoins, nous souhaitons éviter toute spécialisation sur ces trois compétences, car toutes les collectivités locales interviennent dans la mise en œuvre de ces trois compétences.
En tant que présidente de Régions de France, vous mettez en avant votre gestion financière, qui s'inscrit dans un cadre d'austérité imposée par l'État. Vous veillez particulièrement à la limitation de la dette des régions. Celles-ci doivent donc opérer des choix. Or vos choix politiques m'interrogent.
Certaines régions suppriment des dotations destinées aux universités, tandis que d'autres s'entêtent à financer des projets inutiles et écocides, allant à rebours de la bifurcation écologique. J'évoque ici le projet d'autoroute A69, dont vous êtes une fervente défenseure, et le coût du péage de cette autoroute.
Ainsi, le coût d'un aller-retour s'élèverait à plus de 19 euros. La région s'engagera-t-elle à participer financièrement à la baisse du coût de ce péage ? Le cas échéant, il s'agirait d'un tour de passe-passe astucieux. En effet, le concessionnaire avait prétendu pouvoir se passer de 90 % des subventions initiales.
Cette autoroute n'est pas rentable, comme vous le savez. Pourquoi défendez-vous ce projet en tout prix ? Personne ne veut de cette autoroute, qu'il s'agisse de la majorité des citoyens, des entreprises, des scientifiques ou des élus. L'A69 va à l'encontre des enjeux climatiques et de la formation des ingénieurs en travaux publics.
Madame Delga, vous avez démontré la nécessité d'une ligne à grande vitesse Bordeaux-Toulouse, qui me concerne en tant qu'élu d'Agen. Cette ligne est nécessaire pour le département du Lot-et-Garonne, qui demeure rural et relativement pauvre, mais également pour les départements voisins, dont le Gers.
Certaines collectivités refusent de financer cette ligne à grande vitesse. D'autres ont fait le choix de ne financer que des infrastructures locales. Quelle est votre position concernant ce financement ?
En outre, un groupe de travail sur la formation en santé est constitué à l'Assemblée nationale. La formation en santé constitue un enjeu majeur du combat contre la désertification. À Agen, la région ne finance pas les écoles d'infirmière, de puéricultures et d'ambulanciers. Quelle est votre doctrine concernant cet outil fort utile pour lutter contre la désertification ?
Je rappelle que Carole Delga est auditionnée aujourd'hui en sa qualité de présidente de Régions de France.
Vous avez évoqué la nécessité de renforcer l'autonomie des collectivités. Il s'agit d'un sujet majeur pour notre majorité, qui a engagé des travaux d'ampleur en vue d'une nouvelle vague de décentralisation.
Vous plaidez pour le renforcement des pouvoirs économiques des régions. Quelles sont les compétences précises à renforcer ? Au regard des industries de taille internationale, comme l'aéronautique et le domaine spatial, comment assurer le renforcement du pouvoir local de notre territoire afin qu'il s'articule avec les ambitions portées aux niveaux national, européen ou mondial ?
Dans le cadre de notre discussion budgétaire, M. le rapporteur général a souligné que les régions seraient favorisées sur le plan financier avec des recettes relativement dynamiques et la nécessité qu'elles contribuent au désendettement de l'État. Quelle est la position de Régions de France concernant ce sujet et sur le fait que, bientôt, les régions seront mises à contribution soit par le biais de ponctions financières, soit par le biais de l'attribution de nouvelles compétences ?
Désormais, les fonds européens de la politique générale ne sont plus distribués uniquement par l'État. Pouvez-vous faire le point sur les modalités de mise en œuvre de cette distribution au titre des dernières années et sur le taux d'exécution ?
Par ailleurs, vous avez précisé l'agenda et les modalités de mise en œuvre des CPER en cours. Pouvez-vous faire le point sur la sous-exécution éventuelle ou le taux d'exécution des précédents CPER ?
Le rapport de la Cour des comptes de 2023 portant sur les 40 ans de la décentralisation pointe les avancées et les nombreuses lacunes de la décentralisation à la française. Dans ce rapport, la Cour des comptes dresse un bilan mitigé de la création des grandes régions voulue par François Hollande. Elle y évoque « de grandes régions plus éloignées des citoyens ». Cet aspect soulève de nombreuses questions dans notre pays qui traverse une crise démocratique.
« Les grandes régions n'ont pas conduit à des gains d'efficience attendus ». En outre, la Cour des comptes reconnaît que les grandes régions manquent d'un ancrage historique et politique, cet ancrage constituant pourtant un élément essentiel de leur légitimité dans les pays qui disposent de régions plus puissantes.
La création des nouvelles grandes régions, comme la Normandie, s'est avérée pertinente. Dans d'autres territoires comme l'Alsace, de nombreuses questions se posent encore à ce jour. En Alsace, nous souhaitons retrouver notre région.
Concernant la question de la désertification médicale, les régions conduisent des politiques différentes. Trois régions ont décidé de recruter elles-mêmes des médecins. La région Centre-Val de Loire a entamé cette démarche dès 2019, dont l'Occitanie s'est inspirée. La région Auvergne-Rhône-Alpes a également entamé ses recrutements de médecins en 2023, afin de les mettre à disposition des centres de santé.
Qu'ils soient jeunes ou qu'ils atteignent la fin de leur carrière, les médecins souhaitent appartenir à un cadre collectif et être salariés d'une collectivité locale qui leur assure une rémunération pérenne. En région Centre-Val de Loire, les intercommunalités étaient fréquemment chargées des recrutements auparavant, ce qui faisait émerger des inégalités entre les intercommunalités riches, qui pouvaient proposer des primes élevées, et les territoires en difficulté, moins attractifs en matière de rémunération.
Dès lors, le fait d'opérer des recrutements à l'échelle d'une grande région assure une meilleure égalité d'accès à la santé, sujet que nos concitoyens mentionnent régulièrement. Les trois présidents de région ayant mis en œuvre ce dispositif ont adopté cette approche, faute d'action de l'État. Pour ma part, je pense qu'il revient à ce dernier de conduire cette mission de recrutement.
Par ailleurs, le financement des écoles d'infirmiers et d'infirmières renvoie à une obligation pour les régions. Les présidents de région sont très attachés à la création de petites unités de formation dans les bassins de vie afin d'éviter les longs trajets. En effet, ces derniers ne peuvent pas être financés par les personnes en difficulté et présentent un impact environnemental important.
Cependant, le dispositif de Parcoursup a déstructuré la dynamique de ces centres de formation de proximité. Avant la mise en place de ce dispositif, les recrutements dans les écoles d'aides-soignantes ou d'infirmières s'effectuaient sur la base de concours. Avec Parcoursup, nous observons une déconnexion complète entre l'origine territoriale des apprenants et ces écoles de formation.
De plus, les métiers de soins à la personne correspondent à des vocations. Or un algorithme ne peut juger une vocation, ce que j'ai fait observer à madame la ministre de l'enseignement supérieur. En conséquence, le taux d'abandon est très significatif dans les écoles des métiers de la santé. En termes budgétaires, nous dimensionnons nos classes et nos équipements en fonction d'un certain effectif. Or le tiers de cet effectif a quitté la formation au mois de juin, car les métiers de soins à la personne requièrent une véritable vocation. La confrontation avec la maladie, notamment dans les maisons de retraite, s'avère parfois très difficile pour les candidats et les candidates, faute de préparation.
Ce biais de Parcoursup est significatif et entrave la politique que les présidents de région ont mené visant à développer des centres de formation de proximité qui permettaient d'apporter une réponse aux établissements de santé en milieu rural. Cette politique permettait également de lutter contre le déterminisme social.
À titre d'exemple, aucun candidat n'était recensé à l'école d'infirmière de Cahors pendant de nombreuses années. Dès lors que nous avons créé une école d'infirmière à Figeac, nous avons rempli l'intégralité de la classe dès la deuxième année.
En tout état de cause, Parcoursup apporte un biais, y compris en termes budgétaires. La problématique de l'abandon de la formation est significative. Je me permets donc d'attirer votre attention sur celle-ci en tant que représentante de la nation.
S'agissant de la compétence en économie et de la meilleure intervention des régions, comme je l'indique souvent à M. Bruno Le Maire, le nombre d'appels à projets lancés par Bercy en direction des entreprises n'est pas réaliste et ne favorise que les grandes entreprises. En effet, les PME et les TPE ne possèdent pas les services nécessaires pour effectuer le suivi de l'ensemble des dispositifs.
Malgré leur grande compétence, mes collaborateurs eux-mêmes se perdent dans le « maquis » des appels à projets. Nous devons bénéficier d'un État plus délocalisé et plus décentralisé. Concernant la partie économique, les procédures sont complexes et bénéficient toujours aux entreprises très structurées. Elles ne garantissent donc pas l'irrigation des territoires.
En outre, nous pensons que l'État doit se focaliser sur les entreprises en difficulté et sur les exonérations et les temporisations fiscales qui peuvent être proposées à ces dernières. L'État ne doit pas intervenir ensuite sur les aspects d'accompagnement économique, qu'il s'agisse de l'investissement ou des outils financiers. Pour rappel, les régions détiennent l'expertise en matière d'ingénierie financière au sein de leurs agences de développement économique.
Pour ce qui concerne la participation des collectivités locales au déficit de l'État, les présidents de la région restent attachés au principe de non-tutelle. Tout dispositif inspiré du contrat de Cahors ne retient pas notre attention ni notre agrément.
S'agissant des CPER, nous pourrons vous communiquer ultérieurement les taux d'exécution des crédits régionaux. Ces derniers sont exécutés de façon satisfaisante. Néanmoins, nous constatons un certain retard d'exécution des crédits de l'État pour ce qui concerne le volet routier.
Concernant les crédits européens, les dispositifs agricoles sont en cours de réorganisation, ce qui risque de déboucher sur de nouveaux problèmes. Plusieurs manifestations du monde agricole ont eu lieu ces derniers jours. J'attire votre attention sur la grande précarité que connaissent nos agriculteurs.
Cette précarité est liée à l'augmentation des matières premières et des intrants. Je vous alerte également sur les difficultés très importantes que traverse la filière bio. Dans les territoires de montagne, les difficultés renvoient au retard des versements de la politique agricole commune (PAC) en lien avec l'indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN), dont les conditions ont été modifiées. Quoi qu'il en soit, nous pourrons également vous communiquer les taux d'exécution des crédits européens. Pour sa part, le taux d'exécution du programme opérationnel 2014-2020 est de 96 %.
Par ailleurs, le fait de relier les citoyens et d'éviter toute forme d'assignation sociale ou territoriale constitue un enjeu prioritaire dans notre société. Nous plaidons dès lors en faveur de budgets de mobilités significativement augmentés de la part de l'État et de l'Europe. Nous souhaitons également un « new deal ferroviaire » au niveau européen.
S'agissant des clés de répartition de la LGV Toulouse-Bordeaux, elle est pour 40 % à la charge des collectivités. Pour la première fois en France, les collectivités sont obligées de se porter à un niveau de financement aussi élevé. Pour rappel, la dernière LGV n'avait mobilisé les collectivités locales qu'à hauteur de 30 %. Je regrette cet effort demandé aux collectivités locales, car il est contraire au principe de solidarité nationale. Néanmoins, il est nécessaire de réaliser l'infrastructure de la LGV Toulouse-Bordeaux.
Pour ce qui concerne l'autoroute Toulouse-Castres, je me tiens bien entendu à votre disposition, madame Erodi. Je me tiens toujours à la disposition des opposants pour leur présenter les arguments favorables au projet d'autoroute Toulouse-Castres.
En outre, je souligne que les régions soutiennent l'investissement routier dans certains territoires dépourvus d'alternative, comme le sud du Tarn. Ce territoire comporte des lignes ferroviaires non électrifiées, comme il en existe de nombreuses en France. Les locomotives fonctionnent alors au diesel à un rendement de cent litres pour cent kilomètres.
De plus, les lignes ferroviaires à voie unique rendent tout cadencement impossible. Dans le sud du Tarn comme dans d'autres territoires, ces voies uniques s'étendent parfois sur cent kilomètres. La solution réside alors dans un aménagement routier. Pour mémoire, c'est le gouvernement de Nicolas Sarkozy qui a décidé de construire une autoroute dans ce territoire du Tarn. En tout état de cause, il s'agit de l'unique solution.
Enfin, comme vous le savez, j'ai demandé à M. le ministre des transports la constitution de deux groupes de travail sur la question de la tarification de cette autoroute et sur la question des compensations environnementales. Je ne manquerai pas de renouveler cette demande, car je suis attachée à la mise en place de tarifications plus faibles pour le covoiturage et les cars de la région Occitanie, dont le tarif est actuellement de 2 euros.
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire
Réunion du mardi 16 janvier 2024 à 16 heures 30
Présents. - Mme Christine Arrighi, M. Christian Baptiste, M. Philippe Brun, M. Frédéric Cabrolier, M. Michel Castellani, M. Jean-René Cazeneuve, M. Éric Coquerel, Mme Marie-Christine Dalloz, Mme Christine Decodts, M. Fabien Di Filippo, Mme Stella Dupont, M. Luc Geismar, M. Victor Habert-Dassault, M. François Jolivet, M. Mohamed Laqhila, M. Michel Lauzzana, Mme Véronique Louwagie, M. Denis Masséglia, M. Jean-Paul Mattei, M. Benoit Mournet, M. Nicolas Pacquot, Mme Mathilde Paris, Mme Christine Pires Beaune, M. Sébastien Rome, M. Jean-Marc Tellier
Excusés. - M. David Amiel, M. Karim Ben Cheikh, M. Manuel Bompard, Mme Marina Ferrari, M. Joël Giraud, M. David Guiraud, M. Tematai Le Gayic, Mme Constance Le Grip
Assistaient également à la réunion. - Mme Karen Erodi, M. Laurent Esquenet-Goxes