La Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a auditionné M. Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports, sur la feuille de route de son ministère et le projet de loi de finances pour 2023.
Mes chers collègues, nous avons le plaisir d'accueillir cet après-midi M. Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports, afin qu'il nous présente sa feuille de route et le budget des transports prévu au projet de loi de finances (PLF) pour 2023.
Monsieur le ministre, je vous remercie d'avoir accepté notre invitation. Il s'agit pour notre commission d'une séquence importante, qui doit éclairer les principaux axes de votre action dans un secteur stratégique à de multiples égards : pour la vie quotidienne de nos concitoyens, mais aussi pour l'ensemble des acteurs économiques, et pour atteindre notre objectif de neutralité carbone dans le cadre de notre lutte contre le dérèglement climatique.
Le PLF affiche une hausse des moyens dévolus aux mobilités. Le mouvement initié sous la précédente législature se poursuit donc, dans la lignée de ce que notre Assemblée avait adopté en renforçant les moyens de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France), en votant la reprise de la dette de la SNCF, en soutenant le plan Vélo ou encore en créant le forfait mobilités durables.
Plusieurs champs de travail s'ouvrent à nous. Nous devons poursuivre l'effort de mise à niveau et de modernisation de nos infrastructures ; l'effort à consentir est important, et des choix devront être faits sous votre autorité avec l'éclairage du Conseil d'orientation des infrastructures.
Il conviendra également d'assurer la transition des transports, tous modes confondus, vers une mobilité décarbonée, qu'il s'agisse de transport de personnes ou de marchandises. Nous savons votre volonté d'avancer sur ces sujets. Nos engagements en faveur de la réduction des émissions de gaz à effet de serre mais aussi le contexte actuel de pression sur les tarifs énergétiques, rendent cet effort plus indispensable que jamais.
De multiples outils sont disponibles pour verdir le parc automobile. Nous avons commencé à en débattre hier dans notre commission, lors de l'examen pour avis de la première partie du PLF. Pouvez-vous préciser les principales mesures proposées par le Gouvernement en la matière ?
Cette commission est très attachée à la promotion des mobilités douces et actives, pour lesquelles le plan Vélo et le forfait mobilités durables vont jouer un rôle central. Les moyens consacrés au plan Vélo, qui s'élèvent à 250 millions d'euros, sont conséquents. Quelles autres voies envisagez-vous pour poursuivre cet effort ?
Se pose aussi la question du verdissement du transport de marchandises, qu'il s'agisse de l'électrification des poids lourds, du verdissement de la flotte de navires ou encore du développement du fret ferroviaire. C'est un chantier considérable qu'il nous faut traiter dans la concertation, pour parvenir à des solutions adaptées sur les plans environnemental, économique et social – et je n'oublie pas les efforts à consentir aussi dans le transport aérien, qu'il soit de marchandises ou de passagers.
Je suis très heureux d'être entendu pour la première fois en tant que ministre par votre commission et je suis à votre disposition pour vous aider à résoudre les difficultés qui se poseraient à vous ou pour éclairer l'action des services de l'État sur les projets de mobilité, qu'ils soient locaux ou d'échelle plus générale.
Je salue votre engagement depuis les élections de juin. À votre initiative et grâce au soutien d'une large partie d'entre vous, des mesures en faveur du pouvoir d'achat ou pour encourager l'utilisation des transports publics ont été prises depuis le début de l'été.
Au-delà des questions liées au PLF, je veux souligner quelques éléments d'orientation du secteur des transports et des mobilités. La particularité de ce dernier, qui fait également sa complexité, est de cumuler des préoccupations très quotidiennes, voire des difficultés, comme le montre la pénurie de conducteurs dans de nombreuses agglomérations, et la nécessité d'un engagement de long terme. C'est cette articulation permanente que nous devons soutenir, notamment dans la perspective de la transition écologique.
Nous voulons proposer des transports plus verts et plus accessibles. L'accessibilité n'est pas seulement un enjeu tarifaire : elle soulève la question de la qualité, de la sécurité et de la régularité de l'offre de transport, ferroviaire en particulier. L'accessibilité de nos transports est l'un des leviers fondamentaux du report modal et de la lutte contre le changement climatique. Le secteur des transports est parfois stigmatisé car il représente 30 % des émissions de gaz à effet de serre et 30 % de la consommation d'énergie totale de notre pays, comme dans la plupart des économies développées. Cela signifie donc aussi que ce secteur offre de nouveaux leviers pour réussir la transition écologique.
Pour les transports comme pour les autres secteurs, nous souhaitons également davantage de sobriété et moins de carbone. Cela ne sera pas synonyme d'une réduction des mobilités à l'avenir, au contraire. Nous devons continuer à soutenir le développement d'une offre de transports propre, verte et renforcée.
Notre action dans le secteur des mobilités devra reposer sur trois piliers dans les prochaines années. Il conviendra tout d'abord d'investir et d'innover pour décarboner le secteur. L'investissement dans les véhicules propres et les transports publics, en particulier le ferroviaire, permettra d'accroître les mobilités tout en émettant moins de carbone. C'est la meilleure solution pour assurer la transition écologique des transports. Ensuite, nous devrons encourager les changements d'usage, en activant des leviers incitatifs, réglementaires ou encore fiscaux. Si le report modal vers les transports décarbonés est au cœur de notre politique, il faut que tous les modes de transport contribuent à l'effort de décarbonation : ceux qui sont décarbonés par nature doivent se développer, tandis que l'aviation et la voiture doivent contribuer à l'effort de décarbonation. En effet, ce n'est pas la voiture qu'il nous faut cibler, mais l'usage individuel et les modèles polluants de certains véhicules. Tant pour le travail que pour les loisirs, 85 % des transports s'effectuent par la route. Nous ne nous priverons pas de ce mode de transport mais il devra devenir plus vertueux. Enfin, nous veillerons à ce que ces efforts soient justes et partagés et nous tiendrons compte des capacités de chacun à changer de mode de transport. C'est important en cette période d'économies d'énergie et de sobriété indispensable. En effet, un ménage à faibles ressources en zone rurale ne peut facilement passer à un mode de transport non polluant. Ainsi, en tant que pouvoirs publics, le rôle de l'État et des collectivités est de soutenir l'effort de passage aux véhicules électriques en accompagnant ceux qui en ont le plus besoin.
Le PLF a pour priorités la modernisation et la régénération du réseau, en particulier ferroviaire, la réaffirmation de l'importance des transports du quotidien en zone urbaine comme en zone rurale et enfin la décarbonation transversale des modes de transport, qui doit représenter le fil rouge de nos financements et de nos décisions.
La Première ministre a affirmé en hémicycle que le transport ferroviaire était la colonne vertébrale de la mobilité verte. J'ajouterai que la colonne vertébrale de cette colonne vertébrale, c'est le réseau. Le réseau ne se voit pas ; dans les décennies précédentes, il a été négligé, ou du moins insuffisamment soutenu. Ces dernières années, cette tendance a été inversée grâce à un effort considérable porté par l'État. En effet, l'investissement annuel dans le réseau ferroviaire est passé d'un peu plus de 2 milliards d'euros il y a cinq ans à 2,9 milliards d'euros dans le contrat de performance signé entre l'État et SNCF Réseau. Nous devons aller plus loin encore. Ce budget marque une première inflexion en complétant pour la première fois les crédits du contrat de performance par les crédits de l'Afit France pour les soutiens budgétaires au réseau ferroviaire. De plus, la question du réseau est cruciale dans le contexte du changement climatique. L'été caniculaire, et le grand froid qui pourrait survenir, mettent à mal le réseau et rendent indispensable notre effort d'investissement.
Tous les modes de transport doivent contribuer à l'effort de décarbonation, y compris ceux qui ont pu être considérés comme symboliques ou anecdotiques par le passé – je pense aux mobilités dites actives. La Première ministre a présenté le 20 septembre un nouveau plan Vélo, qui amplifie significativement l'effort porté par un premier plan décidé il y a quatre ans, en dégageant 250 millions d'euros pour ce secteur en 2023. Nous présenterons avec Mme Agnès Pannier-Runacher des propositions complémentaires sur le covoiturage dans les prochains jours. Nos outils doivent assumer une forme de différenciation dans les politiques de transport, qu'il s'agisse de la politique tarifaire – ce qui relève de la responsabilité des collectivités – ou de la priorité modale. Il est évident que les transports publics et le ferroviaire seront plus présents en zone dense qu'en zone rurale ou isolée. À ce titre, les dispositifs de soutien aux véhicules électriques doivent cibler prioritairement les ménages modestes et les zones rurales.
La politique des transports, dont la compétence est partagée entre l'État et plusieurs niveaux de collectivités locales, présente une autre particularité : l'effort budgétaire est réparti entre différentes échelles. Il est donc difficile de reconstituer l'effort de l'État en matière de transport. Au total, près de 12 milliards d'euros seront consacrés à la politique des transports par l'État en 2023, ce qui représente une hausse considérable. Une partie provient directement du budget de l'État, plus précisément du programme 203 « Infrastructures et services de transports », au sein de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » . Ce programme représente 4,1 milliards d'euros en 2023, dont plus des trois quarts sont consacrés au ferroviaire. S'y ajoute le budget de l'Afit France, qui sera voté en décembre, à hauteur de 3,8 milliards d'euros. Nous augmenterons par rapport à ce qui était prévu les moyens de l'Afit France de 150 millions d'euros en crédits de paiement, pour renforcer en priorité le réseau ferroviaire. Doivent également être comptées dans cet effort les ressources de la société du Grand Paris par taxes affectées, pour un total de plus de 800 millions d'euros l'année prochaine. S'y ajoute le budget de l'aviation civile, autofinancé par les redevances du secteur aérien, qui atteindra 800 millions d'euros en 2023. Le financement du projet Charles de Gaulle Express par un programme ad hoc s'élève à 400 millions d'euros en 2023. Le programme de verdissement des mobilités, qui englobe la prime à la conversion et le bonus écologique, représente un total de 1,3 milliard d'euros en 2023. Enfin, le soutien au budget aéronautique, rattaché budgétairement au ministère de la transition écologique, s'élève à 500 millions d'euros. Le budget de l'aviation civile est essentiel car il finance des actions de sécurité et de contrôle aériens qui nécessitent un réinvestissement et des recrutements supplémentaires. En effet, nous accusons un certain retard dans la modernisation du contrôle aérien. Les actions en matière de recherche aérienne – la France compte les champions mondiaux de ce domaine – permettent de financer la décarbonation du secteur aérien. Cette dernière n'est pas une fiction ni une opération de communication : elle sera au contraire une réalité d'ici 2050, à condition que nous engagions les moyens industriels et diplomatiques nécessaires. À ce titre, j'ai récemment représenté la France au sein de l'Organisation de l'aviation civile internationale.
Ce total de 12 milliards d'euros représente une croissance de 13 % par rapport à 2022, notamment grâce à l'augmentation des crédits dédiés au verdissement du parc automobile et à ceux, à hauteur de 5 %, du programme 203.
Le budget des transports ne se résume pas au PLF. Les travaux menés par le Conseil d'orientation des infrastructures (COI) sous la présidence de M. David Valence, attendus pour la fin de l'automne, permettront d'actualiser notre programmation et nos priorités en matière d'investissement. Ce rapport sera également l'occasion de préparer la signature des volets « mobilité » des contrats de plan État-région d'ici la fin du premier trimestre 2023, dans lesquels une priorité accrue sera donnée au transport ferroviaire et aux mobilités actives.
Votre ministère est celui du temps court comme du temps moyen ou long puisque vous devez répondre aussi bien aux entreprises de transport qui peinent à recruter des chauffeurs de cars ou à nos concitoyens dont les trains arrivent en retard, qu'à la nécessité de faire évoluer les comportements ou de moderniser les infrastructures. Plus encore, la question des transports a changé de perspective ces dernières années, passant d'une appréhension presque exclusive par l'aménagement du territoire à une approche totalement intégrée aux transitions. Le transport de personnes et de marchandises représente en effet l'une des principales sources d'émissions de gaz à effet de serre en France et dans le monde. Pour tenir les ambitions de notre pays en matière de transition écologique, l'effort est à rechercher dans la transition énergétique, le changement des comportements et un investissement accru dans nos infrastructures ferroviaires, fluviales et portuaires, sans négliger la justice territoriale.
Le quinquennat précédent a été un grand quinquennat pour les mobilités. Deux textes majeurs l'illustrent : le pacte ferroviaire de 2018 et la loi d'orientation des mobilités (LOM) en 2019. Grâce au plan de relance, la trajectoire d'investissement définie par la LOM à la suite des travaux du COI a été tenue. Elle représente, grâce au concours des collectivités territoriales, plus de 16 milliards d'euros d'investissement annuel. Pour la transition énergétique, des incitations fortes ont été déployées. Une stratégie industrielle de transition vers le véhicule électrique a été définie, de même qu'une ambition pour une filière française de l'hydrogène dans les transports. Enfin, la création d'un forfait mobilités durables, la dotation ambitieuse du plan Vélo, les aides à l'acquisition de véhicules propres, le lancement d'une stratégie nationale de développement du fret ferroviaire ont accompagné et accéléré les changements de comportement.
Monsieur le ministre, quelles priorités entendez-vous dégager en matière d'infrastructures de transport, sachant que celles mises en avant par la LOM, et notamment le réseau ferroviaire, ont été très fortement renforcées depuis 2019 ? Quelles trajectoires budgétaires et quelles méthodes le Gouvernement entend-il adopter pour investir dans les infrastructures de transport jusqu'en 2027 ?
Votre ministère est en lien direct avec le quotidien de nos compatriotes. Tous les jours, des millions de Français prennent voitures, bus, trains et avions pour se déplacer. Ces déplacements ont un impact direct sur le pouvoir d'achat des ménages. Le prix à la pompe a augmenté, malgré une ristourne momentanée pour mieux détourner le regard du ticket du plein d'essence, alors qu'il aurait été plus simple de baisser la TVA de 20 % à 5,5 % sur les carburants, comme l'ont fait l'Allemagne et l'Espagne. Le prix des péages augmentera de 7 % à 8 % en 2023, comme si les Français n'avaient pas déjà été suffisamment spoliés par les sociétés d'autoroute. Enfin, les billets de train de la SNCF ont connu des augmentations continues, qui devraient se poursuivre en 2023 à en croire les déclarations de son patron, selon lequel l'augmentation de la facture d'électricité de la SNCF devra être répercutée sur le prix des trajets.
Monsieur le ministre, gouverner, c'est prévoir. Nous attendons donc des précisions sur la feuille de route de votre ministère pour 2023 afin de réellement protéger le pouvoir d'achat des Français.
Votre audition a lieu alors même que les bleus budgétaires n'ont pas encore été publiés. Notre commission est la seule où des auditions de ministres ont lieu en l'absence de ces informations.
Avez-vous l'intention d'interdire ou de limiter l'usage des jets privés comme vous l'appeliez de vos vœux ?
Comptez-vous réduire comme en Allemagne ou en Espagne le prix des billets de train ?
Vous annoncez un effort supplémentaire pour le réseau ferroviaire. Selon SNCF Réseau, un minimum de 3,7 milliards d'euros serait nécessaire. Inscrirez-vous finalement ce montant dans le budget ?
Comme moi, lors de votre visite dans la métropole de Lyon, vous avez pu entendre les difficultés des travailleurs des transports urbains et périurbains. Il manque plus de 500 conducteurs dans la métropole de Lyon. Leurs conditions de travail se dégradent et les usagers en subissent les conséquences. Engagerez-vous un plan de soutien massif au développement des transports collectifs ? Comptez-vous mettre en place un statut des conducteurs pour rendre ce métier plus attractif ?
Enfin, le projet de plus de 300 kilomètres de tunnel entre Lyon et Turin est en contradiction avec la directive-cadre sur l'eau, l'article 5 de la charte de l'environnement et les lois sur l'eau. Pourriez-vous prendre l'engagement de ne pas financer ces projets tant qu'ils ne seront pas conformes aux lois de la République et au droit européen, ou pouvez-vous affirmer devant la représentation nationale que ce projet est conforme à ces textes ?
Pour Les Républicains, la question des transports est intimement liée avec la liberté fondamentale de se déplacer pour travailler, étudier, se nourrir et se soigner. Notre objectif commun est donc de ne pas entraver cette liberté de circulation, tout en préservant notre environnement.
Si nous sommes tous conscients de la nécessité de décarboner les voitures, cela ne peut se faire contre le pouvoir d'achat des Français qui travaillent. Dans ma circonscription, un habitant dépense en moyenne 1 000 euros par an pour aller travailler. Le Gouvernement a annoncé la fin de la remise sur le diesel d'ici à la fin de l'année. Quelles compensations proposerez-vous, notamment pour les personnes qui travaillent ? Comment rendre la voiture plus propre accessible à tous ?
En tant que membre de la mission « flash » sur les mesures d'accompagnement à la création des zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m) dont les corapporteurs sont MM. Bruno Millienne et Gérard Leseul, j'ai été confronté en septembre dernier à un gouffre, séparant d'un côté, les mesures prévues par la loi « climat résilience » de 2021 et de l'autre, le quotidien de nos concitoyens dont la majorité ne pourra plus se rendre dans les métropoles de France, car ils disposent d'un véhicule trop ancien ou diesel. Bien que la question des ZFE concerne le ministère de l'écologie, en tant que ministre des transports, vous devez avoir un avis sur cette question ou des solutions à proposer. Nous devons à la fois lutter contre la pollution de l'air et permettre à chaque citoyen de se déplacer dans tout le territoire. Ce sera l'objectif des conclusions qui seront communiquées mercredi prochain.
Enfin, dans mon territoire, le projet de ligne à grande vitesse (LGV) entre Paris et Lyon a été suspendu par la majorité du précédent quinquennat. Des compensations pour les petites lignes devaient être prévues. Pourtant, la ligne Paris-Clermont passant par Roanne est toujours dans un état catastrophique, sans parler des retards réguliers. Des initiatives se lancent comme le projet Railcoop entre Bordeaux et Lyon. Les soutiendrez-vous ? Qu'entendez-vous faire pour offrir à nos concitoyens des alternatives réelles et concrètes à la voiture ?
Je souhaite vous interroger sur les difficultés financières que rencontrent aujourd'hui de nombreuses autorités organisatrices de la mobilité (AOM), parmi lesquelles se trouve le Syndicat des mobilités du Pays Basque-Adour qui gère les transports du quotidien dans mon territoire. Après d'importantes pertes de recettes commerciales et la baisse des versements mobilité à la suite de la crise sanitaire, de nombreuses AOM se trouvent dans une situation particulièrement délicate en raison de l'explosion des formules de révision des prix prévues dans les contrats qui les liaient aux entreprises assurant le service de transport. Ce nouveau coup dur est la conséquence du conflit armé en Ukraine, à l'origine d'une flambée des prix des matières premières. Sans une aide de l'État, les capacités financières des AOM seront remises en cause. Certaines seront bientôt incapables de payer leur facture. Il devient urgent de trouver une solution pour assurer la continuité des transports du quotidien sur l'ensemble du territoire. Monsieur le ministre, quelles sont vos pistes de réflexion pour répondre rapidement aux inquiétudes légitimes des AOM qui craignent de se retrouver dans une impasse financière ?
Les normes en vigueur ne favorisent pas les véhicules légers, et ne pénalisent pas, en retour, les véhicules plus lourds. Pourtant, ceux-ci consomment plus de carburant, contribuent davantage à la pollution de l'air et sont inaccessibles pour les plus modestes de nos concitoyens. Le remboursement fiscal de l'indemnité kilométrique reste ainsi plus favorable aux véhicules les plus lourds. Allez-vous revoir ce système ? De plus, il se trouve que les critères ne prennent pas en compte le poids du véhicule, alors qu'il s'agit d'un enjeu de santé publique, de justice sociale et de sobriété. Envisagez-vous de revoir ces critères ?
Invité sur France info, vous avez récemment été interrogé sur le leasing social à 100 euros, et vous avez expliqué que la mesure était difficile à concrétiser. J'ajouterai qu'elle ne pourrait être acceptable qu'à condition que la première mensualité commune, comme les suivantes, soit inférieure à 100 euros. Pourquoi ne pas modifier la mesure en proposant par exemple de garantir aux plus modestes un reste à charge inférieur à 10 % pour l'achat d'un véhicule peu émetteur et léger, accompagné d'un prêt à taux zéro garanti par l'État ? Cela permettrait en outre de favoriser les véhicules électriques français.
J'aimerais aussi vous entendre sur une proposition d'incitation collective portée par mon groupe, à savoir le billet de train à tarif unique comme l'expérimente avec succès l'Allemagne, ces derniers mois.
Par ailleurs, vous avez expliqué souhaiter privilégier des investissements, mais la marche est encore haute et nous manquons de visibilité. Le coup par coup budgétaire montre ses limites et ne permet pas d'avoir une vision à long terme. Le contrat de performance signé en avril dernier a déçu l'ensemble des acteurs du ferroviaire et la signature de contrat de performance entre l'État et SNCF Réseau a fait couler beaucoup d'encre. L'Autorité de régulation des transports (ART) demande davantage, ainsi que le président de la SNCF, qui réclame 100 milliards d'euros.
L'urgence climatique impose d'aller plus loin et plus vite. Notre ambition écologique s'est vue confortée par la loi de programmation des finances publiques, qui fixe pour la première fois un objectif environnemental. Nos engagements doivent être respectés et nous nous réjouissons des 28 milliards d'euros de crédits octroyés à la mission « Écologie, développement et mobilités durables ». Nos différents dispositifs de financement sont confortés et satisfont aux exigences de notre groupe, tant dans leur ambition que dans leurs modalités de mise en œuvre.
Cependant, l'urgence écologique nous appelle avant tout à la cohérence et à des alternatives crédibles, viables, attractives et accessibles. En ce sens, le plan Vélo, renouvelé pour 250 millions d'euros, est un signal fort. Il est ce que nous voulons pour nos territoires et nos citoyens : plus écologique, meilleur pour la santé, et réellement capable de développer notre économie au travers d'une filière française. Mais la pratique du vélo révèle également une fracture territoriale majeure. S'il est une réussite de notre Gouvernement, il appelle à aller plus loin et plus vite. Dans mon territoire haut savoyard, le vélo ne représente pas encore une alternative viable, crédible et attractive, en raison des longues distances, des dénivelés importants et de la dangerosité des routes de montagne peu ou mal équipées. Le vélo devrait être mieux associé à d'autres formes de mobilités, notamment au ferroviaire. D'autres lignes doivent encore être ouvertes et beaucoup de connexions mieux assurées. Chaque jour, 12 000 véhicules traversent les communes de ma circonscription. Les infrastructures interfrontalières sont également essentielles. La ligne RER Sud-Léman permettrait ainsi de raccrocher les deux bouts manquants. Monsieur le ministre, je suis convaincue de la nécessité de développer toutes les mobilités dites douces en gardant en tête l'importance de l'intermodalité et de la cohérence territoriale.
« Faut-il réagir contre la paresse des voies ferrées entre deux passages de train ? », demandait poétiquement au début du siècle dernier Marcel Duchamp. C'est une question d'actualité, tant le droit à la paresse de nos voies ferrées semble scrupuleusement respecté dans nos contrées. Dans la Drôme, des contreforts du Vercors aux Baronnies provençales, sur ces voies ferrées passent encore deux trains de nuit, quand la ligne n'est pas en travaux ou qu'ils ne sont pas supprimés pour de longues périodes, voire menacés par manque de guichetiers. Cet automne, seuls trente trains de nuit circuleront dans le sens Briançon-Paris. Cinquante-quatre trains sont supprimés, dans une circonscription où les alternatives à la voiture individuelle manquent cruellement et où seuls 3 % des déplacements domicile-travail sont effectués en transports en commun. Pourtant, les mobilités, qui garantissent un droit des plus fondamentaux, sont aujourd'hui la première source d'émissions de gaz à effet de serre dans notre pays. En 2019, le secteur représentait 31 % des émissions françaises, un pourcentage en hausse. Plus de la moitié de ces émissions sont le fait des voitures individuelles. Il nous faut repenser notre modèle de mobilités. Des ingénieurs travaillent d'arrache-pied pour développer l'électrification du parc, le biocarburant, les véhicules à hydrogène, afin de maintenir comme seul horizon de mobilité le modèle du tout voiture. Pourtant, la solution est peut-être sous nos yeux, dans la somnolence de nos voies ferrées, plutôt que dans les milliards versés à l'extension routière. Le rapport TET (trains d'équilibre du territoire) du Gouvernement de mai 2021 montrait que le report modal vers le train de nuit permettait de diminuer de 95 % les émissions de gaz à effet de serre liées aux trajets qui sont le plus souvent effectués en voiture ou en avion. Le train de nuit permet, au-delà de gains écologiques majeurs, d'investir à moindre coût sur les lignes déjà existantes, de créer des dizaines de milliers d'emplois, de gagner du temps et de l'argent. Pourtant, après plusieurs décennies de sous-investissements, la plupart des trains de nuit ont été démantelés entre 2016 et 2017. Monsieur le ministre, vous êtes chargé de garantir le droit à la mobilité de nos concitoyens, dans le cadre des limites planétaires. Engagerez-vous donc 1,5 milliard d'euros pour commander les 600 voitures nécessaires au développement du train de nuit ?
Monsieur le ministre, vous avez raison : le ferroviaire, c'est le temps long. Comme l'a indiqué M. Gérard Leseul, le patron de la SNCF a affirmé qu'un investissement supplémentaire de 100 milliards d'euros pour quinze ans était nécessaire. Si ce chiffrage est approximatif, comme il l'a lui-même reconnu, il donne toutefois la mesure des enjeux. Doubler la part du ferroviaire à échéance 2030 revient nécessairement, et cela doit se traduire sur le plan financier, à accélérer la régénération du réseau. Selon M. Farandou, il faudrait pour cela 1 milliard d'euros supplémentaires chaque année. Pour réaliser les treize projets de RER métropolitains, à Rouen et dans d'autres métropoles, et moderniser la signalisation et la commande centralisée des aiguillages, 10 milliards d'euros supplémentaires seraient également nécessaires sur quinze ans, sans compter l'aménagement de nouvelles lignes. Pour le fret, une enveloppe de plus de dix milliards d'euros est attendue.
Dans ces conditions, n'est-il pas nécessaire de dégager de nouvelles ressources grâce à une fiscalité fléchée ? Ne conviendrait-il pas, ainsi, de créer de la valeur au niveau des gares et des connexions grâce à la taxe sur la construction de bureaux tertiaires, mais aussi d'alimenter plus avant votre budget au travers des taxes sur les sociétés d'autoroute et sur les billets d'avion ?
Plusieurs projets subissent un retard insoutenable. C'est le cas de la ligne à grande vitesse Paris-Normandie. Ne pensez-vous pas qu'il serait utile d'inscrire ces projets dans le cadre d'une loi de programmation ferroviaire sur quinze ans ?
Depuis plusieurs années, je ressens les mêmes inquiétudes au sujet du ferroviaire. Vous avez indiqué qu'il fallait aller plus loin que ce que prévoit le contrat de performance entre l'État et SNCF Réseau. Comme de nombreux experts, nous partageons votre avis. L'Autorité de régulation des transports (ART) avait elle-même dénoncé une occasion manquée qui allait priver nos voies de la maintenance nécessaire, notamment pour la sauvegarde des petites lignes. Le collectif « Oui au train de nuit ! » a déploré que rien ne soit prévu dans ce projet pour investir dans son développement, alors qu'aucune commande pour le matériel neuf de train de nuit n'est lancée. Qu'en est-il ?
Le fret ferroviaire suscite également de nombreuses inquiétudes depuis plusieurs années. Il pâtit considérablement de la hausse des prix de l'énergie. Comment prévoyez-vous de soutenir ce pilier majeur de notre transition écologique ?
Quels seront les grands axes de votre politique en matière de transport dans les outre-mer, très représentés dans mon groupe politique ?
Enfin, mon territoire, le Cambrésis, est intéressé par la réalisation de l'échangeur entre l'A2 et l'A26 qui ne sont pas connectées. L'ancienne base aérienne 103 accueille désormais de nombreuses entreprises, ce qui génère une circulation accrue de camions. L'échangeur permettra d'économiser des kilomètres et donc du CO2. Sa réalisation par la Sanef apparaît donc pertinente. Je suis intervenu à plusieurs reprises auprès de votre prédécesseur, M. Djebbari. La conseillère parlementaire, par mail du 13 janvier 2022, a confirmé que la réalisation par la Sanef était bien prévue dans le prochain contrat de plan. La direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM) envisage pour échéance la fin du premier trimestre 2022. Or, à ce jour, je n'ai plus de nouvelles concernant cette réalisation. Pouvez-vous m'en dire davantage, et pourrions-nous aller plus vite ?
Monsieur Valence, j'insisterai sur trois grandes priorités que nous souhaitons tenir sur le temps long. La première est le réseau. Contrairement à ce que l'on entend parfois, l'effort ferroviaire national n'est pas moindre que celui des grands pays européens. Le pourcentage du PIB français consacré aux infrastructures publiques reste supérieur à celui de l'Allemagne, de l'Italie ou de l'Espagne. Le réseau ferroviaire doit faire l'objet d'un réinvestissement. J'ai cité l'effort important mobilisé ces dernières années, qui atteignait entre 2 milliards et 2,5 milliards d'euros annuels lors du précédent quinquennat, pour finalement s'élever à 2,9 milliards d'euros. Cet engagement a été inscrit dans le contrat de performance entre l'État et SNCF Réseau pour une durée de dix ans. Comme certains d'entre vous l'ont souligné, ce contrat a fait l'objet de critiques. Il présente toutefois l'avantage de sa durée, puisque nous tiendrons l'engagement d'un montant de 2,9 milliards d'euros annuels. Jamais un tel montant n'a été investi dans le ferroviaire ces quatre dernières décennies. Il faut toutefois aller plus loin. Si le réseau ferroviaire n'est pas la priorité la plus spectaculaire dans le secteur des transports, il reste la colonne vertébrale de la mobilité verte qu'incarne le ferroviaire. Notre réseau est plus âgé que la moyenne de celui des autres pays européens et doit par conséquent faire l'objet d'une priorité d'investissement à l'avenir.
L'offre de transports du quotidien ne peut être la même dans tous les territoires. Les transports publics ne sont pas réservés aux métropoles et aux grandes villes mais l'usage de la voiture restera toujours plus important en zone rurale. Dans ces territoires, le soutien à la conversion aux véhicules électriques doit faire partie des mesures en faveur des transports quotidiens.
Dans de nombreuses agglomérations, l'accent doit être mis sur les RER métropolitains. Il nous faut imaginer des modes de financement encourageant les ressources affectées, comme la LOM l'a permis sur les lignes à grande vitesse. Malgré certaines difficultés, la société du Grand Paris en Île-de-France s'est appuyée sur un tel modèle avec succès.
L'ensemble de nos décisions et de nos financements doit être éclairé à la lumière de la décarbonation. Tous nos modes de transport peuvent et doivent y contribuer. L'avion et la voiture présentent un potentiel de décarbonation réel, que nous devons encourager par des financements, des taxations et des changements d'usage. Les travaux du COI éclaireront la question d'une programmation budgétaire dans ce domaine. À l'évidence, le Gouvernement devra actualiser sa programmation, issue de la LOM, puisque des engagements supplémentaires ont été pris dans le cadre du plan de relance, notamment pour le fret et le train de nuit. J'ignore quelle forme prendra cette programmation ; il appartiendra au Parlement d'en décider. Quant à son montant, notre rapport intermédiaire de mars conclut à un ordre de grandeur de 15 à 20 milliards d'euros d'autorisation d'engagement pour la période 2022-2027.
Madame Cousin, vous avez rappelé l'enjeu du pouvoir d'achat. Des mesures massives ont été votées par le Parlement cet été pour soutenir le pouvoir d'achat des automobilistes qui ont subi la flambée des prix du carburant. Ce soutien doit toutefois rester temporaire car nous ne devons pas perdre de vue l'horizon de la transition écologique. Ce soutien d'urgence s'est concrétisé par une mesure simple et massive, applicable jusqu'à la fin de l'année. Si d'autres pays ont baissé la TVA, aucun n'a apporté un soutien tel que celui de la France. En outre, ces mesures de baisse de la TVA sont rarement pérennes et justes dans le temps. Le dispositif est prévu jusqu'à la fin de l'année car les prix du carburant ne sont pas les mêmes que ceux que nous avons connus cet été. Nous devons rester cohérents avec notre objectif de sortie des énergies fossiles et de décarbonation. Cependant, si les prix étaient de nouveau soumis à des pics, le Gouvernement pourrait proposer des mesures ciblées et temporaires de soutien.
Concernant les péages autoroutiers, les hausses de 7 % ou 8 % évoquées sur la base d'hypothèses d'inflation n'auront pas lieu en février 2023. Le modèle des concessions permet en effet le financement dans le temps long. Les contrats qui existent mettent en parallèle les financements et les investissements. Je signe actuellement les engagements de verdissement avec chaque société d'autoroute pour permettre le déploiement de bornes autoroutières sur toutes les aires d'autoroute concédées d'ici le début de l'année 2023.
Comme chaque année, des pics tarifaires ont eu lieu durant l'été. La reprise très forte du trafic après deux années marquées par des restrictions de voyage liées à l'épidémie a suscité des hausses particulièrement élevées cette année. À la différence des étés antérieurs à la pandémie, la SNCF a déployé des offres tarifaires telles que des tarifs sociaux, qui seront refondés dans les prochains mois, des cartes de transport et des abonnements, afin d'éviter dans de nombreux cas des pics tarifaires importants. La SNCF mène sa propre politique commerciale, tandis que l'État donne de grandes orientations, et je veillerai à ce que ces offres tarifaires soient toujours proposées.
Les prix de l'énergie représentent un surcoût pour l'ensemble des acteurs, qu'il s'agisse des collectivités, de l'État ou des grandes entreprises comme la SNCF, qui totalise à elle seule 2 % de la consommation énergétique de notre pays. Cependant, les hausses des prix de l'énergie évoquées ne sont pas certaines. M. Farandou a fait l'hypothèse d'une augmentation de 1,6 milliard d'euros pour 2023. Nous n'en connaissons pas encore le montant exact. Nous verrons avec la SNCF le soutien que pourra apporter l'État, afin de protéger le pouvoir d'achat des usagers.
À l'exception des pics tarifaires de l'été, la France est le pays de la zone euro où le reste à charge pour l'usager du transport public et ferroviaire est le plus faible. Si le reste à charge dépend des politiques des collectivités, des agglomérations et des régions, il est le plus faible d'Europe pour les TER et les transports du quotidien. L'effort de la France dans ce secteur est donc réel.
Je me suis rendu en Allemagne pour échanger avec le président de la Deutsche Bahn. Le billet à 9 euros était une expérimentation menée par un pays qui a connu un effondrement du recours aux transports publics beaucoup plus important que la France durant la pandémie de covid. Ces trois mois d'expérimentation montrent d'abord que cette opération est coûteuse, puisqu'elle représente une somme de 1 milliard d'euros par mois. Certes, l'expérimentation s'est traduite par une augmentation de 30 % à 40 % du recours au train. Toutefois, il s'agissait très rarement d'un report modal de la voiture vers le train. Ainsi, cette opération était plutôt une mesure sociale visant à encourager les Allemands, et notamment les jeunes, à prendre davantage le train pour partir en vacances, qu'une mesure écologique. Le coût de la tonne de CO2 évitée, qui a été chiffré par des ONG, est très élevé, puisqu'il atteint 1 600 à 1 700 euros, alors que le prix de marché de la tonne de carbone est généralement chiffré à 100 euros. Ainsi, pour des moyens budgétaires identiques, nous pourrions sans doute faire mieux pour l'écologie et les transports publics, et l'ensemble des partis de la coalition au pouvoir en Allemagne vise précisément un nouveau dispositif qui sera mis en place avant la fin de l'année. Il s'agira probablement d'une mesure de soutien tarifaire, proposant des billets autour de 50 euros par mois, un prix similaire aux abonnements de transports publics dans les grandes agglomérations françaises. Je reste ouvert aux expérimentations menées chez nos voisins européens, notamment en Autriche pour les trains de nuit. La politique menée par l'Espagne pour soutenir les abonnements de transports publics me semble également une piste plus prometteuse. N'oublions pas, enfin, que l'Allemagne n'a pas généralisé le billet à 9 euros, puisque les lignes à grande vitesse n'étaient pas soumises à cette tarification.
Monsieur Amard, j'ai compris que vous n'étiez pas un franc partisan du projet Lyon-Turin. Cependant, je ne voudrais pas que l'on pense qu'il ne respecte pas les lois et décrets en vigueur dans notre pays. Des choix doivent encore être pris sur la suite de ce projet, et c'était l'objet de mon échange à Lyon avec les représentants des collectivités de toutes sensibilités politiques. Ce projet est bien avancé pour sa partie transfrontalière. 3 milliards d'euros de travaux ont été attribués depuis septembre 2021. Les travaux sur les tunnels supplémentaires commenceront au quatrième trimestre de cette année. Enfin, dix kilomètres de tunnels bitume ont été excavés et ce chantier mobilise 1 000 personnes sur place. En outre, ce projet a fait l'objet d'une procédure afin d'assurer sa conformité avec les règles et lois en vigueur au moment de son lancement. Il a été déclaré d'utilité publique par décret en Conseil d'État. Il a obtenu un arrêté d'autorisation au titre de la loi sur l'eau en 2007 et la déclaration d'utilité publique (DUP) a été prorogée en 2017. L'agence régionale de santé (ARS) n'existait pas à cette époque mais l'avis de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales (DDASS) avait été recueilli, et reçu, lors de la DUP de 2007. Le Conseil d'État a annulé un décret. Les autorisations administratives que j'ai citées étant antérieures à ce décret, elles ne sont pas remises en cause par la décision du Conseil d'État. Nous appliquerons naturellement les règles désormais en vigueur en matière de protection de l'eau et de suivi des captages, qui ont évolué ces dernières années. Il est toutefois inexact de dire que le Conseil d'État a annulé l'autorisation du projet ou déclaré le projet non conforme aux lois et règlements français en vigueur, hier comme aujourd'hui, en matière de préservation de l'eau.
Pour ce qui est de l'aviation privée, l'interdiction des jets privés a été suggérée par certains d'entre vous, mais cela n'a jamais été ma proposition. J'ai parlé pour ma part de régulation. Des débats sont ouverts, et le Parlement pourra compléter le PLF présenté par le Gouvernement. La taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (Ticpe) sur l'aviation de loisir a ainsi été augmentée dans le cadre d'une loi de finances précédente. L'aviation privée, qui n'est pas concernée par cette taxation, pourrait faire l'objet d'un tel débat. Par ailleurs, l'échelle européenne me semble plus pertinente pour débattre de cette régulation, afin de garantir son efficacité et son impact écologique. Sans cela, des contournements seraient à craindre. Je défends pour ma part la décarbonation de ce secteur. J'ai échangé avec de nombreux constructeurs, des ONG et des parlementaires européens à ce sujet. L'aviation privée pourrait plus facilement encore que le reste de l'aviation passer au carburant propre dans la décennie à venir. Ces réglementations doivent être soutenues, et la France les défend. Un texte sera sans doute adopté d'ici la fin de l'année, fixant un pourcentage obligatoire de carburant propre, dit SAF (carburants durables d'aviation) y compris pour l'aviation privée. La présidence tchèque a porté ce sujet, et à la demande de la France, un débat aura lieu les 20 et 21 octobre entre les ministres des transports européens. Ce sujet sera également à l'ordre du jour d'un conseil formel des ministres des transports en décembre. Je crois aux obligations de décarbonation, à une justice fiscale en la matière, mais pas en l'interdiction de l'aviation privée. Enfin, les textes réglementaires ne font pas tout : les changements de comportement et les prises de conscience doivent jouer leur rôle. À ce titre, les polémiques telles que celle qui a récemment mis en cause un club de football pour ses déplacements en avion prouvent que les esprits ont évolué.
S'agissant de la pénurie de conducteurs, j'ai réuni l'ensemble des professionnels autour de cette question dès mon entrée en fonctions, afin d'élaborer collectivement un plan d'action. Certaines mesures relèvent de l'État, comme la réduction des délais administratifs pour délivrer des documents. Des améliorations très concrètes permettront de réduire la pénurie et les difficultés d'accès à la profession dans les prochaines semaines. Des efforts ont été poursuivis par les régions et les autorités organisatrices, qui ont parfois lancé de nouveaux marchés offrant des conditions sociales et de cumul d'activités plus favorables aux conducteurs. Des mesures relèvent également du ministère de l'éducation nationale, comme une expérimentation de l'adaptation des horaires scolaires.
Ces difficultés sont liées à une reprise post-covid rapide de l'économie. J'ai pris l'engagement d'engager une réflexion, avec tous les acteurs concernés, sur l'attractivité de ce secteur. L'image de ce secteur doit changer et les formations doivent être renforcées. Dans cette optique, un groupe de travail relatif à l'attractivité des transports sera créé en novembre avec les professionnels, les syndicats et les collectivités concernés.
Les pénuries concernent également les conducteurs de bus et s'expliquent tant par la reprise de l'activité que par des circonstances plus particulières, comme c'est le cas à la RATP, où l'absentéisme représente un problème important. Le renforcement de notre effort de formation a fait l'objet d'un partenariat entre la SNCF et la RATP et des centres de formation des apprentis à la rentrée. Sur la recommandation du Gouvernement, la région Île-de-France a créé des primes incitant au recrutement. C'est un ensemble de mesures, et non une solution unique, qui permettra de faire face à cette situation, mais je veux également inscrire ce sujet dans le temps long en travaillant à l'attractivité de ce secteur.
Monsieur Vermorel-Marques, je crois en effet que la mobilité est une liberté essentielle. Nous devons conjuguer ce sujet à celui de la décarbonation, car la mobilité est un besoin humain fondamental qui doit être renforcé, et non limité.
Concernant les ZFE, l'État a renforcé certaines mesures pour accompagner leur déploiement par les collectivités. L'installation des ZFE a été fixée par la loi, que ce soit pour les agglomérations qui devaient prendre des mesures supplémentaires compte tenu des niveaux de pollution de l'air, ou pour celles de plus de 150 000 habitants et qui sont soumises à un calendrier plus souple. L'État a la responsabilité de faciliter ce passage. Nous avons majoré le bonus et la prime à la conversion des véhicules en ZFE. À la demande de plusieurs agglomérations, notamment la métropole du Grand Paris, nous expérimenterons un prêt à taux zéro à partir du 1er janvier prochain pour les véhicules et les camionnettes à faibles émissions afin de faciliter la transition vers les ZFE. Des appels à projets ont ainsi été lancés par l'Agence de transition écologique (Ademe) pour les transports collectifs – le quatrième est en cours. L'État doit accompagner toutes les mesures incitant au passage de véhicules individuels ou polluants à des véhicules autorisés en ZFE. Le calendrier devra s'adapter aux éventuelles difficultés. Je fais confiance aux collectivités concernées pour le faire.
Outre le soutien qu'il assure en la matière, l'État doit jouer un rôle de coordinateur. J'ai proposé à la profession du transport de marchandises et à l'association France urbaine de coordonner les règles d'accès aux ZFE dans l'ensemble du pays pour la logistique urbaine et les camions. Cela permettra de lever une partie des inquiétudes relatives aux ZFE. Je suis également prêt à réfléchir avec M. Gérald Darmanin à la manière dont l'État peut accompagner les collectivités dans la mise en œuvre de dispositifs de contrôle. Nous avons confié au préfet M. Thomas Degos une mission interministérielle pour recenser les difficultés dans ce domaine et nous ferons le point au début de l'année 2023 pour chacune des métropoles.
L'État a engagé un important effort à destination des trains d'équilibre du territoire, et notamment des lignes Paris-Clermont et POLT (Paris-Orléans-Limoges-Toulouse), qui sont très empruntées. Plus de 1 milliard d'euros ont été engagés pour rénover le réseau et renouveler l'intégralité des rames de ces deux lignes. Bien que certains de ces projets accusent un retard lié aux difficultés d'approvisionnement industriel, cet effort était nécessaire et nous tiendrons notre engagement. Il relève en effet du devoir de l'État de renforcer son investissement dans ces lignes.
Vous avez mentionné Railcoop pour illustrer la possibilité d'améliorer l'offre ferroviaire grâce à la mise en concurrence. Dans nombre de cas, si cette mise en concurrence est bien régulée par la puissance publique, elle peut être utile. J'ai relancé les appels, jusqu'ici infructueux, pour deux lignes de Nantes. Plusieurs acteurs peuvent, sur les grandes lignes, les lignes à grande vitesse ou les lignes des TER, apporter une offre utile qui, loin de la réduire, augmente l'offre ferroviaire globale.
Vous avez rappelé les difficultés rencontrées par les sociétés organisatrices en raison de l'explosion des coûts de l'énergie. Une seule mesure ne saurait répondre à l'intégralité de ces difficultés. La Première ministre a rappelé que les aides aux petites communes pourront cependant contribuer à faire face à l'augmentation des coûts de l'énergie en 2023. Nous pourrons également réfléchir à l'évolution du versement mobilité dans les semaines à venir.
Monsieur Leseul, des mesures concernant le poids des véhicules ont été prises et un malus à partir de 1 800 kilos a été introduit en 2022. Nous verrons si le débat parlementaire proposera des initiatives en ce sens. Dans la durée, le critère de poids devra être renforcé. Il faut aussi tenir compte de nos propres contraintes de production industrielle et du risque de défavoriser les industriels français par des règles qui seraient définies trop rapidement.
Une enveloppe de 1,3 milliard d'euros est destinée aux primes à la conversion, aux bonus et aux malus. Elle est en très forte augmentation par rapport à 2022. Nous définirons l'usage de ce paquet financier avec Mme Agnès Pannier-Runacher d'ici à la fin de l'année. Toutefois, des crédits à hauteur d'une trentaine de millions d'euros sont fléchés vers les premiers coûts de leasing social. Le dispositif devrait être défini dans les prochaines semaines. Son application sera ardue, car nous devons proposer une offre qui permette également de développer une filière industrielle française. Nous devons à la fois décarboner et réindustrialiser. Ce dispositif se déploiera progressivement dans les territoires et il me paraîtrait opportun de le soutenir d'abord les territoires ruraux.
Le recours au vélo se heurte encore à des blocages. En effet, les collectivités ne disposent pas toutes des mêmes moyens pour favoriser son usage. Dans les prochains appels à projets ou à manifestation d'intérêt, la Première ministre souhaite que nous ciblions davantage le financement de l'État vers les collectivités qui ont moins de moyens pour développer leurs infrastructures. Le vélo est en effet souvent utile dans un parcours modal. Il faut donc un soutien ciblé, notamment pour sécuriser le stationnement. Ainsi, 50 des 250 millions d'euros annoncés pour 2023 sont réservés à cette question, qui représente l'un des principaux blocages à l'usage du vélo. Il faut aussi associer le vélo au ferroviaire, en prévoyant des espaces pour vélo suffisants dans les trains.
Madame Pochon, j'ignore si les voies ferrées ont un « droit à la paresse ». Elles me paraissent plutôt attachées à la valeur du travail. Elles sont en tout cas très sollicitées. Il est vrai que nos lignes de trains de nuit doivent faire l'objet d'un réinvestissement. Le programme de trains de nuit avait été annoncé par M. Jean Castex. Il prévoit dix ouvertures et réouvertures de lignes. Nous définirons en 2023 le nombre de voitures commandées, avec l'objectif d'une commande industrielle française et européenne, et de centres de maintenance nécessaires. Le train de nuit n'est oublié ni dans sa dimension nationale, ni dans sa dimension européenne, puisque nous ouvrirons une ligne entre Paris et Berlin d'ici la fin de l'année 2023. J'ai rencontré le président des chemins de fer autrichiens, car l'Autriche est le pays européen qui a le plus développé le train de nuit. Il a évoqué des mesures destinées à en réduire le coût pour la puissance publique et l'usager, en permettant par exemple que les premiers et les derniers arrêts, tôt le matin et tard le soir, complètent les transports urbains.
Quant au financement, une programmation sera actualisée début 2023. Je partage l'idée du temps long. Paradoxalement, pour un ministère des infrastructures, nous peinons à trouver les outils du temps long et du financement stable, qui offre une visibilité conséquente à notre réseau routier ou ferroviaire. Ainsi, quels que soient les modèles et leurs équilibres, les systèmes de concessions ou de ressources affectées, comme la société de projets pour la LGV ou la société du Grand Paris, sont prometteurs, car ils permettent de garantir des financements dans la durée. Je suis ouvert à ce que, dans le sillage de la LOM, nous poursuivions le développement des sociétés de projet, avec des ressources affectées, négociées avec le monde économique local, comme le réclament certaines métropoles comme Lille.
J'ai librement parlé avec M. Farandou des 100 milliards d'euros sur quinze ans qu'il évoque pour la SNCF. Plutôt que de dresser de grandes additions sur de longues périodes, je préfère définir les sujets précis qui ont besoin d'investissements, même si je partage le message du président Farandou en faveur d'un effort de long terme et renforcé pour notre système ferroviaire.
Nous avons également consenti un effort très important pour renforcer le fret puisque le plan de relance prévoyait d'y accorder 170 millions d'euros par an en dédiant une part importante aux wagons isolés. Ces aides sont garanties jusqu'en 2024. Nous y avons ajouté plus de 250 millions d'euros pour le fret. L'effort sera poursuivi. J'ai récemment visité la gare de fret de Miramas dans laquelle nous réinvestissons massivement grâce aux crédits du plan de relance.
Je suis conscient de l'enjeu local signalé par M. Bricout. J'ai de bonnes nouvelles pour vous puisque certaines étapes ont été franchies. Le régulateur a rendu son avis et nous en sommes à l'étape du décret en Conseil d'État. Ce projet devrait aboutir d'ici 2027.
Merci, Monsieur le ministre, d'avoir répondu à toutes les questions posées. Nous en venons aux questions des députés.
Un complément d'aides au vélo a été annoncé mi-août. Or, ces aides pourraient manquer leur cible pour plusieurs raisons. Tout d'abord, alors qu'elles visent les ménages à revenus modestes voire très modestes, le reste à charge est trop élevé pour leur permettre d'envisager l'achat d'un vélo à assistance électrique ou d'un vélo cargo. D'autre part, ces aides ne visent pas les classes moyennes. Pourquoi priver ces dernières de la possibilité d'être aidées pour acheter un vélo, un vélo électrique ou un autre outil de mobilité décarbonée ? Enfin, rien n'est prévu pour les vélos d'occasion. Il aurait pourtant été intéressant que ces aides participent à l'évolution de la filière de la réparation des vélos.
Les ZFE-m (zones à faibles émissions mobilité) ont été créées par la loi d'orientation des mobilités de 2019 pour améliorer la qualité de l'air : en proposant de limiter progressivement la circulation des véhicules les plus polluants, elles sont un outil efficace pour réduire les émissions d'oxyde d'azote et de particules fines des véhicules à essence et diesel. Mais cet outil, qui a fait ses preuves dans d'autres pays européens, pourrait être remis en question, comme en témoigne la proposition de loi déposée par le groupe Rassemblement national. Celle-ci pourrait altérer la santé de nos compatriotes. Certes, le déploiement des ZFE-m pose des difficultés qu'il ne faut pas nier – calendriers de déploiement insuffisamment progressifs dans certaines agglomérations, difficultés de financement pour les citoyens qui souhaitent changer de véhicule, absence de système de contrôle automatique des plaques d'immatriculation. Que pensez-vous de ces trois sujets et quelles mesures d'amélioration proposez-vous ?
Je salue le budget historique alloué aux transitions écologique et énergétique puisque 9,7 milliards d'euros ont été consacrés aux mobilités. C'est un signal important à l'heure du nécessaire verdissement de nos mobilités. Le transport ferroviaire est très important pour les territoires ruraux, en particulier ceux de montagne. Le retour des trains de nuit en décembre 2021 était très attendu. Il a facilité les déplacements et la vie de nos concitoyens des massifs de montagne qui se sentent parfois isolés. Dans un rapport de mai 2021 relatif aux trains d'équilibre du territoire, le Gouvernement préconise de constituer un parc de 600 voitures de trains de nuit, pour un investissement de 1,5 milliard d'euros d'ici 2030. La ligne Paris-Briançon, qui a nécessité près de neuf mois de travaux et quelque 74 millions d'euros d'investissement, a rapidement répondu aux attentes et à l'engouement pour ce mode de transport. Mais l'accessibilité des territoires de montagne passe aussi par les trains express régionaux, ou TER. Des lignes comme Grenoble-Gap doivent encore être régénérées. Comment anticiper pour qu'elles ne soient pas à nouveau fermées pour cause de sécurité ?
Le train pourrait permettre à nombre de Français de ne pas utiliser la voiture, fort coûteuse compte tenu du prix des carburants. Encore faut-il que les trains soient à l'heure et que les voies soient en bon état. Hormis les lignes TGV, les lignes secondaires, si importantes pour faire vivre nos territoires, notamment ruraux, sont bien souvent délaissées ou en mauvais état et ne permettent pas à nos trains de rouler à la vitesse autorisée maximale. Dans l'Aisne, la ligne Paris-Laon est malade depuis des années. Que comptez-vous faire pour apporter à nos concitoyens les moyens de vos ambitions en matière ferroviaire, au niveau local et national ?
Je vous ai écrit le 16 août dernier pour vous signifier les problèmes rencontrés sur nos petites lignes ferroviaires comme Limoges-Angoulême ou Limoges-Brive, deux voies aujourd'hui coupées. Limoges-Poitiers est sinistrée et les trains ne peuvent plus y rouler à pleine vitesse, ce qui pénalise l'attractivité du ferroviaire. J'ose à peine évoquer la ligne POLT (Paris-Orléans-Limoges-Toulouse), dont la rénovation traîne en longueur. Ces multiples problèmes sont signalés par les syndicats et dénoncés par les usagers. Penser le report modal dans sa globalité doit être la ligne d'horizon de nos politiques publiques en matière de transport. Vous devez présenter des projets innovants comme le tram-train Limousin ou les vélos – les 250 millions d'euros que vous prévoyez dans le nouveau PLF sont nettement insuffisants –, mais aussi démocratiser les nouveaux véhicules intermédiaires comme le vélo-voiture ou la minivoiture. Le train doit être la colonne vertébrale de ce report modal nécessaire à la décarbonation des transports en France. Quand alignerez-vous le budget d'investissement pour nos petites lignes ferroviaires du quotidien sur les besoins ? Quand lancerez-vous et financerez-vous une véritable planification de décarbonation des transports adaptée à nos campagnes ?
Bon courage, monsieur le ministre, car vous héritez d'un portefeuille bien difficile ! La dégradation continue du transport en commun ces trente dernières années est source de colère pour les Français. Les usagers, notamment dans les territoires ruraux, se sentent bien souvent déclassés. La SNCF estime à 100 milliards d'euros son besoin d'investissement pour les quinze prochaines années. Où sont-ils ? Vous avez déclaré durant l'été que ce besoin d'investissement serait probablement comblé mais vous venez de promettre seulement 2,9 milliards d'euros par an : le compte n'y est pas. Comment comptez-vous trouver ces moyens et atteindre vos objectifs ? Dans nos territoires ruraux, les petites lignes ferment les unes après les autres, ce qui aggrave la dépendance aux voitures et aux énergies fossiles. Les enjeux ne sont pas uniquement budgétaires, ils sont aussi réglementaires. La ligne Abbeville-Le Tréport-Mers-les-Bains en est une parfaite illustration : fermée en 2018, elle a fait l'objet d'un accord de financement entre la région et votre prédécesseure, Mme Borne, pour rouvrir en 2026 après d'importants travaux. Mais, après plusieurs courriers, j'attends votre réponse au sujet des passages à niveaux. Accepterez-vous une dérogation pour que la suppression de ces derniers ne soit pas imposée à cette ligne ?
Élu francilien de bout de ligne, je reçois régulièrement des messages de mes administrés quant aux conditions catastrophiques de desserte de leur territoire, particulièrement la ligne J. Alors que le PLF 2023 prévoit d'augmenter les crédits dévolus aux transports publics, d'autres pistes sont évoquées pour accroître les ressources des transports en commun franciliens, comme la hausse du pass Navigo ou une évolution de la fiscalité. Qu'en pensez-vous ? Par ailleurs, la décarbonation du transport de marchandises et de voyageurs est un enjeu majeur, notamment du fait des ZFE-m dont l'instauration avait fait l'objet d'une task force créée par votre prédécesseur. Quelles suites ont été données à ces travaux ? Pouvez-vous élargir le prisme aux véhicules industriels et agricoles pour lesquels l'offre alternative est très limitée ?
Concernant les aides à l'acquisition d'un vélo, le décret qui a été pris avec le ministère de l'économie fixe des seuils objectivement bas. Nous discuterons de leur évolution, puisque les montants sont modestes, avec les ministres MM. Bruno Le Maire et Christophe Béchu. Un nouveau décret sera pris pour prolonger au-delà de 2023 les aides individuelles à l'acquisition d'un vélo – électrique, cargo et même mécanique, certes avec un moindre soutien financier de l'État. J'ai également souhaité supprimer la condition, qui existait jusqu'au 15 août dernier, de l'aide préalable d'une collectivité pour que l'État apporte son soutien. De fait, le soutien de l'État est le plus important et le plus utile là où, justement, les collectivités ne proposent pas d'aide ou n'ont pas les moyens de le faire.
Une réflexion sur les aides à l'acquisition d'un vélo électrique d'occasion est en cours. Deux millions de vélos électriques d'occasion ont été vendus au cours des trois dernières années. Le développement de ce marché est très récent, bien que massif. Nous sommes mûrs pour disposer d'un marché de l'occasion et, peut-être, proposer des aides pour soutenir l'acquisition d'un vélo électrique moins coûteux. Il s'agirait d'une mesure sociale à laquelle nous réfléchissons dans le cadre du comité interministériel du vélo que la Première ministre a annoncé. Il est important que l'ensemble des politiques publiques et des ministères contribuent à cet engagement pour le vélo, de la formation à la sécurisation des infrastructures. Ce comité interministériel se réunira d'ici la fin de l'année, sous la présidence de la Première ministre.
S'agissant des ZFE, les métropoles concernées décideront du calendrier de déploiement. Je suis prêt à faciliter un effort de coordination et de rapprochement des règles. Faciliter le changement de véhicule est la responsabilité de l'État. Nous le faisons au travers des mesures d'accompagnement que j'ai rappelées, afin que personne ne soit exclu.
Avec M. Gérald Darmanin, j'ai confié au préfet M. Degos une mission relative au contrôle automatique. Plusieurs présidents de métropole se sont inquiétés de ce système. Il appartient à chaque collectivité d'instaurer son système de contrôle, mais l'État peut proposer un soutien – technique, notamment. Les premiers tests d'équipements de contrôle se dérouleront de juillet 2023 à la fin du premier semestre 2024. Nous verrons comment l'État peut aider à centraliser les dispositifs ou collecter l'information sur les infractions. Ce sujet, plus régalien, est ouvert. Je tiendrai à votre disposition les résultats des travaux de la mission interministérielle.
Je connais les difficultés encore recensées concernant les trains de nuit, en particulier sur la ligne Paris-Briançon. Je peux détailler les mesures que nous avons prises et que j'ai souhaité renforcer en faveur d'une offre alternative en cas de travaux. Celles-ci ne valent d'ailleurs pas seulement pour les trains de nuit. Tous les travaux de modernisation et de régénération du réseau entraînent des difficultés temporaires. Comme ils se déroulent souvent la nuit, les trains de nuit en subissent les conséquences mais lors des week-ends ou des vacances scolaires, une offre d'autocars est disponible en ligne.
S'agissant des moyens dévolus au ferroviaire, l'addition globale n'est pas un tabou mais l'effort de l'État, auquel s'ajoute celui des régions, atteint plus de 6 milliards d'euros en 2023. Si vous faites l'addition sur quinze ans, le résultat n'est pas très éloigné de l'annonce d'un montant dépassant les 100 milliards d'euros. Cependant, même une telle somme ne nous permettra pas de finir le travail. Je préfère par conséquent que nous nous focalisions sur les priorités. Le réseau en fait partie, de même que les transports du quotidien. J'ignore quel montant total sera mobilisé dans les quinze prochaines années, mais il sera peut-être même supérieur aux annonces, si l'on tient compte du réseau et du matériel roulant. Nous devons consentir un effort pour le réseau des transports du quotidien, notamment les petites lignes. C'était un engagement très fort du Premier ministre M. Jean Castex et de mon prédécesseur aux transports, puisqu'un investissement total inédit de 7 milliards d'euros d'investissement sur dix ans pour les petites lignes avait été prévu. Ce dispositif est fondé sur des protocoles cosignés par l'État et les régions, à l'exception d'Auvergne-Rhône-Alpes. Les huit protocoles déjà signés représentent un total de financement de plus de 5 milliards d'euros. Outre cette réponse, j'ai évoqué les trains d'équilibre du territoire que nous devons renforcer, y compris pour les transports du quotidien.
Je ne reviens pas sur les lignes que j'ai déjà mentionnées, notamment POLT, ni sur l'intermodalité vélo-voiture. J'insiste, je fais du ferroviaire une grande priorité. Pour la ligne POLT en particulier, nous déployons un effort considérable afin de renouveler l'intégralité des rames. S'agissant de Paris-Clermont, la même commande de rames a été effectuée auprès de l'industriel CAF. Concernant Limoges-Poitiers, la première tranche est financée cette année. Le montant total, pour SNCF Réseau, s'élève à 1,6 milliard d'euros pour la régénération et 700 millions pour la modernisation et l'achat du matériel roulant. Je verrai, dans les prochains jours, le président-directeur général de CAF pour que les difficultés d'approvisionnement industriel soient traitées et pour que nous résorbions les possibles retards de livraison de matériel. Il est essentiel de tenir cet engagement qui a été pris avant moi. Les centaines d'usagers annuels de ces deux lignes en ont besoin. Par ailleurs, le financement de Limoges-Brive est assuré par la région dans le cadre d'un protocole signé avec l'État l'an dernier.
J'étudierai spécifiquement la question des passages à niveau. Je n'ai pas encore répondu à votre courrier, car il existe un cadre de dérogation précis issu d'une circulaire de mon prédécesseur M. Dominique Bussereau dont je ne voudrais pas dénaturer le travail – il avait également pris des mesures pour supprimer un maximum de passages à niveau. Je vérifierai si nous nous inscrivons ou non dans ce cadre, en tenant compte de l'impératif de sécurité.
S'agissant des transports franciliens, l'État a très fortement soutenu la région Île-de-France pendant la crise sanitaire. Aucune région n'a bénéficié d'un tel niveau de soutien puisque plus de 150 millions d'euros de subventions ont été versés en 2020 pour Île-de-France Mobilités et 2 milliards d'euros d'avances remboursables en 2020 et 2021. Cela mérite d'être souligné car ce sont les contribuables qui ont assuré ce soutien. La région et Île-de-France Mobilités n'ont pas souhaité renouveler la disposition d'une avance remboursable en 2022. Nous engagerons la négociation du prochain CPER (contrat de plan État-région). L'on cite souvent le montant de 10 milliards d'euros du prochain volet « mobilités » : il correspond précisément au CPER qui s'achève. L'effort direct de l'État et de la société du Grand Paris dépasse 4 milliards d'euros, soit 40 % de financement par l'État. C'est exceptionnel, mais les besoins franciliens sont considérables. L'Île-de-France draine une bonne partie du réseau ferroviaire national. Il n'est donc pas illégitime qu'elle bénéficie d'un soutien particulier.
Quant aux leviers qui seront activés par Île-de-France Mobilités pour son budget 2023, je ne les connais pas et ce n'est pas à l'État d'en décider. En tout état de cause, en 2023 comme par la suite dans le prochain contrat de plan, l'État sera au rendez-vous pour financer les infrastructures de transport en Île-de-France.
Concernant la task force sur les ZFE, lancée par mes prédécesseurs, un groupe de suivi qui intègre les élus doit se réunir prochainement avec M. Christophe Béchu qui a souhaité renouveler la méthode. Le dialogue régulier permettra de faire le point sur l'avancée des ZFE et un mécanisme de coordination des règles et d'accompagnement, y compris financier, de l'État sera prévu. Conformément au souhait de M. Christophe Béchu, le fonds de 1,5 milliard d'euros de soutien à la transition écologique pour les collectivités locales annoncé par la Première ministre à la fin du mois d'août permettra de financer des mesures destinées à changer les usages et acquérir des véhicules plus propres dans les ZFE.
La communauté de communes du Pithiverais dans le Loiret dispose d'un système de transports à la demande, afin de permettre aux séniors du territoire de se déplacer entre leur domicile et la ville-centre de Pithiviers. Cette initiative, appréciée des habitants, vient d'être élargie à toute la population et représente un coût important pour toute la communauté de communes et la région Centre-Val de Loire, partenaires dans ce projet de mobilité. Comment l'État pourrait-il aider ces dernières à se développer, dans la mesure où l'instauration de services de transports collectifs n'est pas pertinente dans la ruralité ?
Je vous remercie pour les engagements que vous prendrez dans le cadre du PLF. L'association Urgence ligne POLT tiendra son assemblée générale à Cahors le 15 octobre. Il est de coutume d'y dresser le bilan des activités. L'État a respecté son engagement de dédier 2,2 milliards à la rénovation de la ligne POLT, mais certaines des quatre régions traversées ont refusé de financer ces travaux tandis que d'autres y ont participé de façon insuffisante. Or, nous avons besoin de trains. Seront-ils livrés d'ici 2023, indépendamment de l'inflation et du coût des matières premières ? Le projet de rénovation de cette ligne pourra-t-il être finalisé en 2025 ?
Dans le PLF, les crédits alloués à la mission « Écologie, développement et mobilités durables » devraient s'élever à près de 25 milliards d'euros en 2023, contre 20,6 milliards en 2022. Les transports bénéficient à eux seuls d'un budget dédié de 16 %. Cet investissement répond à la volonté de renouveler les transports publics quotidiens dans leur ensemble, plus particulièrement dans le secteur ferroviaire. Cette ambition de régénération passera notamment par un relèvement du montant des taxes affecté au financement de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France. Comment cet investissement massif sera-t-il réparti entre le fret ferroviaire et le développement des lignes ferroviaires ?
Vous n'avez pas répondu aux questions sur la ligne Limoges-Angoulême. Avant de devenir ministre et alors qu'il était député de cette deuxième circonscription de Haute-Vienne, votre prédécesseur s'était engagé à la rouvrir. Pourtant, elle est toujours fermée et nous ne voyons pas arriver sa réouverture. Quelles sont vos perspectives pour cette ligne ? Je salue votre volonté d'aboutir aussi rapidement que possible à la signature des volets « mobilités » au sein des CPER. Les crédits seront-ils à la hauteur des enjeux ? Je souhaite aussi évoquer le sujet du fret fluvial… Mme Lisa Belluco (Écolo-NUPES). Les collectivités locales de tout niveau tirent la langue. Elles seront contraintes de choisir s'il faut chauffer les écoles ou les piscines cet hiver. Elles devront choisir quelle politique abandonner pour payer leur facture d'énergie et absorber la hausse du coût des matières premières. Dans le même temps, nous assistons à un effondrement de la biodiversité, dont la première cause est le fractionnement des habitats de la faune et de la flore, notamment du fait d'infrastructures terrestres linéaires empêchant leurs déplacements. Les déplacements individuels routiers et le fret routier devront se réduire drastiquement si nous voulons essayer de rester sous la barre du 1,5 degré de réchauffement climatique. Quelle décision avez-vous prise pour le projet d'autoroute entre Poitiers et Limoge – issu d'un autre temps, celui du « tout-voiture » ? Nous avons là l'occasion d'économiser de l'argent public, à hauteur d'un milliard d'euros réparti entre les différents financeurs, que nous pourrions utilement investir dans des alternatives comme le transport ferré du quotidien.
Envisagez-vous une refonte des modes de financement des petites et moyennes autorités organisatrices de transports ? L'inflation et la limite du versement mobilité ne permettent pas de chercher de nouvelles capacités d'investissement. Or, si l'État tente d'être au rendez-vous, il faudra que les territoires puissent eux aussi accompagner cette transition. Pourtant, dans nombre de territoires, l'offre kilométrique de transports en commun, notamment de bus, diminue en raison des difficultés auxquelles font face les autorités organisatrices.
Des travaux devaient débuter pour moderniser la ligne ferroviaire Clermont-Paris, qui connaît des incidents réguliers, mais l'Autorité environnementale a imposé de conduire une étude d'impact qui engendrera un retard de dix-huit mois. Malgré les demandes de nombreux élus, l'État et SNCF Réseau n'ont pas déposé de recours contre cette décision. SNCF Réseau a même retiré son recours. Pourquoi ne l'avez-vous pas encouragé à le maintenir ? Cette mauvaise nouvelle s'ajoute à celle que vous avez annoncée concernant le report du délai de livraison des rames à 2024 au lieu de 2023. Que comptez-vous faire ?
En France, un avion qui décolle sur dix est un jet privé. Ce secteur est en pleine croissance. Les aéroports de Paris-Le Bourget et Nice-Côte d'Azur concentrent 60 % des émissions générées par les jets privés, ce qui laisse douter de l'usage de ces mobilités pour les seules affaires. Vous parlez d'effort juste et partagé, et vous ne croyez pas aux interdictions. Je ne comprends pas ce que préconisez en matière de régulation. Votre Gouvernement pourrait soutenir nos amendements pour une hausse de la taxation des jets privés dans le cadre du PLF. Ou recommandez-vous sérieusement que nous nous en remettions à l'opprobre populaire pour réguler un mode de déplacement extrêmement émetteur et surutilisé par une part absolument infime de la population ?
Concernant les transports à la demande et les offres de transports en zone rurale, vous avez raison de dire qu'il est plus difficile d'offrir, dans des zones moins denses et plus dispersées, une offre de transports collectifs aussi bonne que dans les agglomérations. C'est un fait, mais cela ne veut pas dire qu'il n'existe pas de solution. Les transports à la demande et les innovations comme les navettes autonomes, qui ne doivent pas être réservées ou fléchées en priorité vers les agglomérations, peuvent être soutenues. Plusieurs expérimentations sont en cours sur le territoire national. Certaines sont financées par l'État, notamment par l'Ademe (Agence de la transition écologique). Je suis allé visiter dans l'Indre, dans la communauté de communes Cœur de Brenne, un véhicule autonome en zone rurale qui accueille quinze passagers par navette et fonctionne bien. Il nécessite un subventionnement. Je souhaite que nous puissions mener ces expérimentations, puis trouver des modes de financement pérennes État-collectivités. Je l'ai dit tout à l'heure et je l'assume : il faudra différencier les réponses, y compris entre deux zones rurales. Les transports à la demande et transports autonomes peuvent offrir des solutions complémentaires. J'ai également mentionné le recours à la voiture individuelle, qui persistera et peut, lui aussi, être décarboné et soutenu financièrement dans le passage à l'électrique par l'État et par le nouveau dispositif de leasing social. Cette gamme de solutions sera tout aussi efficace dans des zones moins denses que les grandes agglomérations.
Concernant POLT et la nécessité de se mettre d'accord avec quatre régions, nous n'obtiendrons pas le gain prévu de qualité, de fiabilité et de temps si nous ne modernisons pas l'ensemble du réseau. Les régions Auvergne-Rhône-Alpes et Bourgogne-Franche-Comté sont mobilisées. De mémoire, il reste à trouver un accord financier avec l'Île-de-France et le Centre-Val-de-Loire. Je mènerai cette discussion avec le président de cette région, M. François Bonneau, dans le cadre du CPER, afin que le dernier investissement soit financé – 26 millions d'euros au total, ce qui n'est pas insurmontable au regard des plus de 750 millions que j'évoquais. Il importe que l'État et les quatre régions concernées puissent mobiliser les crédits nécessaires dans les volets « mobilités » de leurs prochains contrats de plan.
Le budget de l'Afit France ne sera voté qu'à la fin de l'année, mais l'esquisse budgétaire tourne autour de 3 milliards d'euros. L'essentiel sera consacré aux projets ferroviaires. Outre la trajectoire qui était prévue, 150 millions d'euros de crédits de paiement seront ajoutés. Nous verrons quel montant d'autorisations d'engagement pourra être mobilisé. Il sera sans doute supérieur. La principale action de ces 150 millions d'euros supplémentaires consistera à soutenir davantage la régénération et la modernisation du réseau ferroviaire, au-delà même du contrat de performance. C'est un signal, pour montrer cette priorité. Il faudra que l'effort soit soutenu dans la durée. Je pourrai détailler les grands projets qui ont souffert d'un effet d'accordéon budgétaire – Lyon-Turin, canal Seine-Nord Europe, Roissy-Picardie, Marseille en grand, nouvelle route du littoral à La Réunion – qui seront soutenus à hauteur des besoins nécessaires dans le cadre du budget 2023 de l'Afit France. Nous avons trouvé cet accord avec le ministère des finances au terme des arbitrages budgétaires.
Concernant le projet Limoge-Angoulême, le calendrier des études préliminaires prévoit un rendu au premier trimestre 2023. Nous discuterons de la suite sur cette base.
Monsieur Delautrette, s'agissant du fret fluvial, je suis à votre disposition pour en parler, puisque nous avons une priorité à définir dans le cadre des prochains contrats de plan. Le Président de la République a annoncé, dans le cadre de Marseille en grand, une mission préfectorale dans les régions Provence-Alpes-Côte d'Azur et Auvergne-Rhône-Alpes pour l'axe Marseille-Lyon. Il s'agit notamment d'étudier les possibilités de développement du fret fluvial et d'infrastructures. Les crédits du PLF 2023, en très forte augmentation, respectent scrupuleusement le contrat d'objectifs et de performance de Voies navigables de France (VNF).
Concernant la ligne Poitiers-Limoge, une décision ministérielle signée par M. Jean-Baptiste Djebbari au printemps dernier visait à lancer une phase de consultation. Je l'ai publiée cette semaine. Elle confie mandat à la préfète pour engager cette concertation. Cela ne préjuge pas d'une décision de réalisation du projet. Je n'en dirai pas plus à ce stade. Je note votre position. Nous verrons ce qui ressortira de la concertation locale.
La réforme des modes de financement n'est prévue ni dans le budget, ni dans le PLF pour 2023. J'ai informé Régions de France que je suis ouvert à une discussion dédiée aux paramètres du versement mobilité au-delà de la question des coûts de l'énergie pour 2023, ce qui serait insuffisant. J'ai évoqué les sociétés de projet pour les RER métropolitains. Cela peut faire partie des ressources, dans un cadre qui ne peut pas être celui d'un alourdissement important de la pression fiscale sur le monde économique – ce serait paradoxal au regard de la politique que nous menons. Avec cette cohérence, je suis ouvert à ce que nous menions, au premier semestre 2023, une discussion consacrée au versement mobilité et à sa possible réforme.
Monsieur le député Nicolas Ray, vous m'avez interrogé sur un sujet qui me tient à cœur. Je me suis déplacé à Clermont-Ferrand à la mi-septembre. J'identifie deux facteurs de retards potentiels, au sens où nous devons encore les quantifier. Il y aura des retards. Je ne l'ai pas caché lors de la réunion avec les élus. Deux sujets doivent être distingués. Le premier, industriel, concerne le délai de livraison des nouvelles rames, donc du matériel roulant. Cela vaut, parce que le contrat est unique avec CAF, pour Paris-POLT et Paris-Clermont-Ferrand. Je ne me résous pas à ce que l'on dise que des difficultés temporaires d'approvisionnement industriel décalent massivement le calendrier de livraison – son début et sa fin. J'aurai une discussion à ce sujet, et je vous présenterai son résultat en toute transparence, car il faut partager les bonnes et les mauvaises nouvelles. En tout cas, les financements de l'État sont là et la commande de matériel roulant est engagée. Je souhaite que le projet avance le plus rapidement possible. S'il y avait des délais liés à la situation d'approvisionnement et de livraison des industriels en général et des industriels ferroviaires en particulier, je vous le dirais. J'ai pris l'engagement qu'un comité de pilotage se tienne début décembre, afin que nous partagions les dernières informations de manière complète. Je me suis également engagé à réunir un comité de suivi. Il commencera ses travaux début octobre et permettra des améliorations de service et un suivi des indicateurs de ponctualité et de régularité avant même le « grand soir » du nouveau matériel et du nouveau réseau. Nous le devons aux centaines de milliers d'utilisateurs annuels de cette ligne. Améliorer la qualité de service peut se faire sans attendre le réseau modernisé et les nouvelles rames.
Pour ce qui est de l'étude commandée par l'Autorité environnementale, nous ne savons pas dire quel sera son délai. J'aurais aimé que le retour gracieux aille au bout, mais il n'y avait qu'une chance très faible qu'il aboutisse. Il ne s'agit pas de savoir quelle action symbolique pourrait être menée, mais quelle action concrète permettra que cette procédure que nous subissons et qui était imprévue – et très imprévisible s'agissant d'un projet de cette nature – ralentisse le moins possible le projet. Je ne sais pas dire si le retard de dix-huit mois que vous évoquez peut être comprimé. Je ne le cacherai pas si c'est le cas. Pour le comité de pilotage de décembre, SCNF Réseau, SCNF Voyageurs et l'État partageront l'ensemble des informations, y compris relatives aux retards. Les engagements massifs de 1,6 milliard d'euros que nous avons pris pour les deux lignes ne sont pas remis en cause. Il y aura de nouvelles rames sur toute la ligne et un réseau rénové. Le projet a commencé. Je partagerai le calendrier précis en toute transparence. En attendant, le groupe de travail que je me suis engagé à réunir mettra l'accent sur la qualité de service.
L'aviation privée est un vrai sujet d'exemplarité et de sobriété. Par ailleurs, cette filière industrielle est importante. L'aéroport du Bourget est un fleuron de notre infrastructure aéroportuaire – c'est le premier aéroport d'affaires en Europe. En outre, l'appellation « jet privé » recouvre des réalités souvent très différentes. C'est la raison pour laquelle je mets délibérément un peu de complexité dans ce sujet. Il convient d'avoir une taxation juste. Vous aurez ce débat. L'effort de décarbonation et d'utilisation des SAF doit aussi être renforcé, et peut-être accéléré, concernant les petits avions. Une discussion européenne relative à l'aviation privée et l'aviation en général aboutira, d'ici à la fin de l'année, à des obligations d'incorporation de carburants propres. Nous sommes le premier espace au monde à définir ces obligations d'incorporation. Le Parlement européen et Mme Karima Delli sont très engagés dans ce domaine. Cette discussion a été commencée sous présidence française et s'achèvera en fin d'année. Elle donnera lieu au texte ReFuelEU Aviation, qui fixera des obligations – peut-être différenciées entre l'aviation privée et l'aviation générale – d'incorporation de carburants propres. Par ailqleurs, cela vaut pour toutes les aviations, nous défendons au niveau européen la suppression de l'exemption concernant le kérosène. C'est une innovation majeure jamais réalisée. Cela ne peut se faire qu'au niveau européen. Sinon, cela n'aurait pas de sens. Ce serait contraire aux conventions internationales de l'OACI (Organisation de l'aviation civile internationale). Nous portons ce débat au niveau européen, avec Mme Agnès Pannier-Runacher, dans le cadre de la révision de la directive « taxation de l'énergie pour l'aviation ». En outre, avec des obligations qui restent à définir et méritent peut-être une différenciation entre l'aviation et l'aviation privée, ce secteur entre dans le système ETS (pour Emissions Trading Schems, système communautaire d'échanges de quotas d'émission). C'est une proposition que la France a beaucoup portée lors de sa présidence de l'Union européenne. Ce panel de mesures, parfois spécifique à l'aviation privée, parfois complet pour le secteur de l'aviation, constitue une réforme très importante.
Je maintiens que je ne crois pas à l'interdiction, mais à la règle. Les éléments de réglementation – obligation de décarbonation, taxations potentielles – sont utiles, et n'empêchent pas d'avoir un discours public qui incite à l'exemplarité et à la responsabilité. On peut croire aux deux à la fois ! Je ne suis pas naïf. Je ne suis pas dans la croyance que seule la règle fonctionne. Je ne renvoie pas seulement à la pression populaire, mais à un engagement de responsabilité. Heureusement, nombre d'industries et d'entreprises n'ont pas toujours attendu des règles pour changer leurs comportements, leurs habitudes et leurs pratiques. Je veux saluer, sinon ce serait injuste, le fait que nos industriels sont souvent très en avance, y compris dans la transformation de nos avions, en matière de décarbonation. Je suis allé à Montréal – vous m'excuserez d'avoir pris une fois l'avion pour un déplacement transatlantique – rencontrer plus de quarante-cinq homologues pour défendre l'engagement obligatoire à l'international de décarbonation du secteur aérien d'ici à 2050. Ces « accords de Paris de l'avion » ne sont pas suffisants, mais il est nécessaire qu'ils constituent une avancée majeure.
Merci, monsieur le ministre, pour votre engagement pour les transports du quotidien et pour votre détermination à faire du transport ferroviaire la colonne vertébrale de la mobilité verte. C'est particulièrement important dans nos départements ruraux. Je vous ai déjà alerté quant au fait que lorsqu'elle fait des travaux dans les gares, il arrive que la SNCF suspende des lignes – provisoirement, mais parfois ce provisoire dure longtemps ! C'est le cas à Lons-le-Saunier, où la ligne Strasbourg-Marseille est suspendue. Or, cette ligne, nous y tenons fortement. C'est la seule ligne nationale. Elle est rentable, d'après un ancien directeur de la SNCF. Nous envisageons de faire appel à la concurrence, par exemple en nous tournant vers Trenitalia. Ce dispositif fonctionne-t-il, en France, et pouvons-nous compter sur lui ?
Quelle est la réglementation concernant les tuk-tuk électriques ? Une entreprise de ma circonscription, implantée à l'Île d'Yeu, m'a fait savoir que les services déconcentrés de l'État ne maîtrisent pas bien la réglementation – moi non plus ! On lui demande des certifications vraisemblablement à tort, dans la mesure où elle organise des excursions mais n'a pas d'activité de taxi. Pouvez-vous m'éclairer sur ce point ?
Que pensez-vous de la proposition du ministre de l'économie et des finances de limiter le bonus écologique aux véhicules fabriqués soit en France, soit en Europe ? Ne serait-il pas intéressant d'instaurer une trajectoire du montant de bonus écologique pour tout le quinquennat ? Cela permettrait de donner de la visibilité aux constructeurs automobiles. Je formule la même proposition pour la prime à la conversion de véhicule. Enfin, ne serait-il pas intéressant de limiter l'usage du bonus à une fois tous les trois ans – temps moyen de location d'un véhicule électrique avec option d'achat ou longue durée ?
Depuis janvier 2022 et jusqu'en 2026, les métropoles sont chargées d'instaurer les ZFE, dans l'objectif de remplacer les voitures thermiques par des voitures électriques. Or 60 % des trajets domicile-travail de moins de cinq kilomètres se font en voiture, tandis que dans la part modale, l'usage du vélo reste plafonné à 5 % pour la même tranche et ne dépasse pas 3 % au total – le plan Vélo vise 9 % en 2024 et 12 % en 2030. Avec le retard pris depuis quatre ans, l'Ademe estime que les 250 millions d'euros prévus dans le PLF 2023 sont insuffisants et préconise d'investir 2,5 milliards d'euros d'ici à 2027, soit 500 millions par an. Ce budget doit servir à financer les infrastructures de pistes cyclables, à soutenir une cohérence intercollectivités et à aider les associations d'utilisateurs. Pourquoi ne pas investir ces 2,5 milliards, qui permettraient un réel « plan Marshall du vélo », plutôt que financer de nouveaux projets routiers, de contournement urbain par exemple ?
Votre prédécesseur M. Jean-Baptiste Djebbari a porté le projet de réouverture d'une dizaine de liaisons assurées par des trains de nuit. L'an dernier, en déplacement dans le Cantal, le Premier ministre M. Jean Castex a annoncé devant les maires réunis en congrès la réouverture d'une liaison de nuit entre Aurillac et Paris « d'ici deux ans ». Cette décision attendue a été bien accueillie dans cette préfecture qui souffre d'une situation d'enclavement inédite puisqu'elle est distante de plus d'une heure de l'autoroute la plus proche et qu'il faut plus de sept heures pour rejoindre une gare parisienne. Je réaffirme mon attachement et celui des Cantaliens à ce projet de train de nuit. Pouvez-vous confirmer cet engagement du précédent gouvernement ?
Vous avez parlé de modernisation du réseau de fret ferroviaire, mais l'on n'entend plus parler des autoroutes ferroviaires. Quelle visibilité avez-vous du verdissement de ce domaine du fret ferroviaire ? Les projets d'autoroutes ferroviaires abandonnés en 2012-2013 par le gouvernement de François Hollande ne semblent pas renaître de leurs cendres.
Ma question porte sur le drand projet du Sud-Ouest (GPSO), la construction des lignes Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax. Ce projet qui devait coûter 14 milliards d'euros – répartis entre l'Union européenne, l'État et les collectivités – ne sera finalement pas financé par l'Union européenne au motif qu'il n'est pas transfrontalier. Sans financement européen, le plan de financement est caduc. Nous avons deux options : soit vous souhaitez que l'Europe finance et il faut que les lignes nouvelles dépassent Dax et traversent le Pays basque pour atteindre l'Espagne – mais les communautés basques y sont farouchement opposées ; soit vous considérez enfin l'option de rénovation des lignes existantes, moins chère et réalisable sans financement européen. C'est celle que les Écologistes soutiennent, d'autant qu'elle permettrait de préserver des milliers d'hectares d'espace naturel, avec des temps de trajet pratiquement équivalents et 8 milliards d'euros économisés. Quelle option retiendra votre ministère ?
Il y a deux ans, la présidente de la région Occitanie et le président de la SNCF ont annoncé un plan de restructuration des petites lignes, pour un montant de 1,6 milliard d'euros en dix ans. La région s'est engagée à en financer 50 % et la SNCF met à disposition ses ressources d'ingénierie et de travaux. Il reste donc 800 millions d'euros à financer. Dans le Gers, il existe un projet de modernisation de la ligne Auch-Toulouse et un projet de réouverture de la ligne Auch-Agen en lien avec la future gare LGV. Outre le fret gersois qui pourrait utiliser cette ligne, de nombreux Gersois attendent son ouverture pour les passagers. L'État devrait, en théorie, prendre en charge le financement des travaux sur les petites lignes d'aménagement du territoire. Quelle sera son action volontariste pour accompagner ce plan ?
Concernant le Lyon-Turin, vous avez exprimé votre préférence pour le scénario « grand gabarit », ajoutant qu'il faisait l'unanimité. Les citoyens haut-savoyards attendaient plutôt le scénario mixte, bénéficiant tant aux voyageurs qu'au fret. Les pouvoirs publics pourront-ils, dans le CPER, prévoir une compensation ou acter le doublement de la ligne pour l'axe Annecy-Aix-les-Bains ? J'espère que le rapport du COI aboutira à une meilleure solution et que le transport des voyageurs bénéficiera de toute l'attention qu'il mérite.
Concernant la liaison Strasbourg-Marseille et les opportunités offertes par l'ouverture à la concurrence, nous devons d'abord avoir une discussion avec la SNCF pour savoir s'il existe une perspective franche de réouverture de la ligne. Je suis également prêt à étudier avec vous ce que permettrait une ouverture à la concurrence.
De manière plus générale, lorsque la concurrence est organisée et régulée, elle peut représenter une opportunité – y compris pour augmenter la disponibilité de l'offre ferroviaire au service de la transition écologique et de la décarbonation des transports. L'ouverture à la concurrence comprend plusieurs segments. Le premier est celui des grandes lignes, avec l' open access (accès libre). Trenitalia bénéficie de cette ouverture encadrée depuis décembre 2021, et propose cinq allers-retours quotidiens sur la ligne Paris-Lyon. D'autres opérateurs ont manifesté leur intérêt pour de la grande vitesse. Et, de manière symétrique, cette ouverture à la concurrence représente une partie croissante du chiffre d'affaires de la SCNF comme, dans un autre domaine, de RATP Dev. Nous avons des opérateurs d'excellence en matière de conquête de marchés européens et internationaux. Contrairement à ce que d'aucuns avancent, l'ouverture à la concurrence en Espagne et en Italie ne détourne pas des ressources des groupes SNCF et RATP, mais peut être une source très bénéfique de revenus au bénéfice de notre système ferroviaire. Un calendrier d'ouverture à la concurrence concerne aussi le TET (train d'équilibre du territoire). J'ai acté la relance de la procédure pour les lignes Nantes-Bordeaux et Nantes-Lyon, avec une attribution prévisionnelle du lot en 2024. Le calendrier d'ouverture des TER est également engagé, de façon très encadrée, avec un cahier des charges et une offre régulée systématiques. La région PACA a été la première à se lancer ; d'autres ont suivi en engageant une procédure d'appel d'offres et d'attribution des lots.
En somme, l'ouverture à la concurrence est une solution. Pour autant, je ne veux pas faire de mauvaise ou de fausse promesse s'agissant de Strasbourg-Marseille, mais je suis prêt à l'étudier avec vous et à identifier quel opérateur serait susceptible de répondre à ce souhait, dans le cadre des règles en vigueur.
Je ne suis pas le spécialiste mondial des tuk-tuk, je le confesse ! J'ai découvert ce sujet et les enjeux qui se posent à Saint-Malo, où nombre d'opérateurs ne savaient pas que la réglementation du transport public particulier de personnes (T3P) s'applique en partie aux tuk-tuk, notamment l'obligation de réservation préalable. Il faut que l'information circule, avec peut-être une forme de tolérance progressive pour l'application des règles, et une transparence complète quant au cadre réglementaire. J'étudierai le cas précis de l'Île d'Yeu, mais ce sujet se développe dans beaucoup de villes, grandes ou moyennes également.
S'agissant du bonus écologique, je suis prêt à discuter de la trajectoire avec le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Vous avez également évoqué une proposition de réservation, dans le respect des règles européennes ou internationales du commerce – par définition, je suis d'accord avec M. Bruno Le Maire : c'est une piste à creuser. Reste à définir un cadre juridique robuste pour la rendre opérationnelle.
Concernant l'enveloppe de 1,3 milliard d'euros, dans le budget 2023, de l'ensemble des aides à l'acquisition de véhicules électriques ou non polluants, la répartition n'est pas encore fixée entre bonus écologique, prime à la conversion, leasing et nouvel appel à projets pour les poids lourds zéro émission et peu polluants qui entrent dans le cadre des ZFE. Cette répartition sera faite par voie réglementaire, en concertation avec vous, dans les prochaines semaines.
La trajectoire du plan Vélo est extrêmement ambitieuse, puisque nous avions une enveloppe de 350 millions pour sept ans. Certes, elle a été consommée et complétée par le plan de relance plus rapidement que prévu lors de son lancement en 2018. Mais l'enveloppe sera de 250 millions d'euros pour la seule année 2023, avec la pré-répartition suivante : 50 millions pour le stationnement sécurisé et 200 millions pour les infrastructures, avec un effet de rattrapage pour les collectivités qui ont moins de ressources. Nous adapterons cette répartition en fonction des projets. C'est un effort très significatif, qui ne constitue pas l'intégralité de l'effort pour le vélo. D'une part, les collectivités sont les premiers financeurs. D'autre part, l'État continue à verser des aides à l'acquisition de vélos électriques, cargo, etc. La part modale de 9 % en 2024 sera difficile à atteindre. Elle est également très difficile à mesurer. Un chantier sera ouvert dans ce domaine. Mais, plutôt que perdre du temps à quantifier l'objectif précis, je veux que nous accélérions le déploiement du dispositif. L'effet massif d'incitation est réel, puisque 2 millions de vélos électriques ont été achetés ces quatre dernières années, et un total de 10 millions depuis le lancement du plan Vélo. L'augmentation des ventes se poursuit. La tendance était lancée, mais elle s'est beaucoup accélérée.
Concernant les engagements de M. Jean Castex relatifs au train de nuit, le principe et la liste des lignes sont confirmés. Je me tiens à votre disposition pour plus de précisions quant à la ligne Aurillac-Paris. Nous pourrons en discuter dans les prochaines semaines. Je ne peux pas vous dire aujourd'hui quels seront les calendriers.
Pour ce qui est du fret et du slogan « autoroutes ferroviaires » – lesquelles ne se sont souvent pas concrétisées car il fallait déployer des emprises très importantes –, nous pouvons regarder les projets précis. Ma conviction, que je voudrais que l'on retrace dans les prochains CPER, est que notre fret ferroviaire accuse surtout du retard dans le domaine des hinterlands de nos ports, notamment d'Haropa, Dunkerque et Marseille. À Marseille-Fos, en particulier, la sortie du port est très congestionnée, tant par la route que par le train. Le système de fret ferroviaire mérite de se développer de façon générale, sans qu'il s'agisse nécessairement de camion sur du rail. Trois projets d'autoroutes ferroviaires sont pré-identifiés et peuvent faire l'objet d'études et, le cas échéant, d'un déploiement : Sète-Calais, Sète-Valenton et Cherbourg-Mouguerre (plutôt pour fin 2024). Je ne renonce pas à cette ambition, mais je crois plutôt qu'il faut déployer du fret ferroviaire là où il existe un potentiel important et pas exploité.
S'agissant de GPSO, il est inexact d'affirmer qu'il n'y a pas de financement européen – j'ai déjà eu cette discussion avec le président M. Rousset. La France n'en a pas reçu dans le premier appel à projets du mécanisme européen d'interconnexion, mais c'est en grande partie lié au calendrier du projet, plus tardif que d'autres qui ont été retenus. Cela ne veut pas dire qu'il n'y aura pas de financement ultérieur pour GPSO. J'ai débattu avec la Commissaire européenne début septembre et je poursuivrai ce débat avec le président M. Rousset, en toute transparence. La Commission européenne serait évidemment plus encline à apporter un financement si le barreau Bordeaux-Dax et la partie transfrontalière étaient intégrés dès le début du projet. Or nous savons que ces sections verront le jour plus tardivement que le barreau Bordeaux-Toulouse. Néanmoins, il existe des aménagements ferroviaires communs, comme les accès à Bordeaux. L'argument que je porte auprès de la Commission européenne est qu'il serait légitime d'avoir un financement européen dès la première phase. Ce débat se poursuit. Le président M. Rousset a raison de dire que la dimension transfrontalière faciliterait l'accès au financement européen, mais il n'est pas exact de considérer qu'il n'y en aurait pas, soit dans le projet global, soit dans un projet qui serait centré sur Bordeaux-Toulouse. Quant à savoir ce que je pense du projet lui-même, je considère qu'il faut qu'il avance. Nous proposerons dans le PLF ou par voie réglementaire la définition des ressources de la société de projet, à laquelle le président M. Rousset tient à juste titre beaucoup. Cette société a tenu sa réunion constitutive le jour où j'ai pris mes fonctions, le 4 juillet dernier. Il faut avoir un financement européen, bien sûr, mais il faut faire avancer le projet quoi qu'il arrive. La société de projet fonctionne. Sa ressource sera, je l'espère, votée par le Parlement dans la loi de finances pour 2023, après une discussion qui s'est tenue entre la présidente de la région Occitanie, le président de la région Nouvelle-Aquitaine, les maires des grandes villes et les présidents des départements concernés. Je n'ai aucun doute quant au fait que ce projet doit avancer et avancera.
Je parlerai des lignes occitanes avec Mme Carole Delga, en prévision du CPER. Je n'ai pas de nouvelle information concernant Auch-Agen, mais un rendez-vous de préparation du CPER sera fixé dans quelques semaines. Mon cabinet pourra vous fournir davantage d'informations à ce moment-là.
Concernant le projet Lyon-Turin, ni moi ni mon prédécesseur n'avons exprimé de préférence pour un scénario en matière d'accès. La méthode retenue a consisté à confier au préfet de région Rhône-Alpes-Auvergne l'organisation d'une consultation qui a duré plusieurs mois. Le dernier comité consultatif s'est tenu en fin d'année 2021. Il n'y a pas d'unanimité – il n'y en a jamais pour ces projets. Toutefois, l'avis général dominant a consisté à défendre le scénario dit « grand gabarit ». J'ai indiqué, le 15 septembre dernier à Lyon devant les collectivités potentiellement financeuses, qu'il fallait mettre une ambition budgétaire en face de l'ambition ferroviaire. Si la majorité des collectivités souhaite retenir le scénario « grand gabarit », je ne m'y opposerai pas et l'État sera au rendez-vous. Il faut le quantifier précisément. Nous savons que le montant tournerait autour de 10 milliards d'euros. Il faut aussi que tous ceux qui le souhaitent disent ce qu'ils sont prêts à financer. Je confierai dans les jours qui viennent un nouveau mandat au préfet de région Rhône-Alpes-Auvergne pour effectuer ce tour de table financier avant qu'une décision transparente et concertée soit prise. Je précise, en outre, que ce projet n'épuise par l'ensemble des projets ferroviaires de la région. J'ai notamment conscience de l'importance du projet de modernisation de la ligne Annecy-Aix-les-Bains et de son caractère prioritaire. Ce n'est pas parce que nous choisirions un scénario « grand gabarit » pour Lyon-Turin que l'on épuiserait l'ensemble des financements et des travaux de modernisation ferroviaire. Nous n'oublierons pas vos préoccupations en la matière. En tout état de cause, la décision n'est pas encore prise concernant les accès. Prendre une décision sans financement ne serait pas sérieux.
J'espère que nous poursuivrons ces échanges pour travailler au service de l'intérêt général. Je reviens sur votre réponse à ma question qui portait à la fois sur les tracés des accès et ceux des deux tubes de 57 kilomètres chacun, communément appelés tunnels transfrontaliers. Il est important que vos services juridiques partagent avec nous les bonnes informations. Les lois sur l'eau, notamment toutes celles qui ont précédé 2006 – dont la première date de 1964 – et la DUP (déclaration d'utilité publique) disent la même chose du point de vue du respect des périmètres de protection de l'eau à usage domestique. Il est interdit de creuser, de forer, d'excaver. etc.
Par équité, je n'épuiserai pas le sujet – avec vous comme avec tous eux qui ont été contraints par le temps de parole et s'y sont tenus. Je suis à disposition pour continuer les discussions. Je suis toujours à disposition, et mon cabinet aussi.
Je l'ai dit, l'avis de la DDASS a été reçu. Les règles qui étaient en vigueur au moment de la DUP ont été vérifiées, et cette dernière a été octroyée dans le respect des règles, notamment celles relatives à la protection de l'eau. Enfin, la décision du Conseil d'État annule un décret qui ne remet pas en cause la DUP de 2007 et les exigences qui ont été respectées.
Je confirme mes propos concernant l'avis de la DDASS. Nous pouvons le préciser et le confirmer. Je le répète, je suis à disposition pour tout sujet. Celui-ci est important, je ne le prends pas à la légère. Nous avons parlé, en réponse à Mme la députée Riotton, de la question des accès, des financements, du scénario qui serait retenu ou qui sera encore examiné sur le plan financier. Le projet Lyon-Turin est si important que je suis prêt à en discuter de longues heures. Mais je ne veux pas qu'on ne discute que de lui. Nous devons respecter les questions qui ont été soulevées par tous.
Je vous remercie d'avoir organisé cette audition. Je suis à votre disposition pour continuer les échanges. Le secteur des transports est sans doute l'un des trois ou quatre sujets qui préoccupent le plus nos concitoyens. Il est à la croisée de toutes les préoccupations – sociales, écologiques et de pouvoir d'achat. Il est très important que nous puissions creuser tous les sujets avec vous dans les semaines qui viennent.
Merci pour votre présence, et d'avoir pris le temps de répondre à toutes les questions point par point. Je remercie aussi vos services pour leur travail, qui a permis de répondre précisément à chaque collègue.
Membres présents ou excusés
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire
Réunion du mardi 4 octobre 2022 à 17 h 20
Présents. - M. Damien Adam, M. Henri Alfandari, M. Gabriel Amard, M. Antoine Armand, M. Christophe Barthès, Mme Nathalie Bassire, Mme Lisa Belluco, M. Emmanuel Blairy, M. Jean-Yves Bony, M. Jorys Bovet, Mme Pascale Boyer, M. Guy Bricout, M. Jean-Louis Bricout, M. Anthony Brosse, Mme Danielle Brulebois, M. Stéphane Buchou, M. Sylvain Carrière, M. Lionel Causse, M. Mickaël Cosson, Mme Annick Cousin, Mme Nathalie Da Conceicao Carvalho, M. Stéphane Delautrette, M. Vincent Descoeur, M. Nicolas Dragon, M. Jean-Luc Fugit, M. Philippe Guillemard, Mme Chantal Jourdan, Mme Florence Lasserre, M. Gérard Leseul, Mme Aude Luquet, Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, M. Emmanuel Maquet, Mme Alexandra Masson, Mme Manon Meunier, M. Pierre Meurin, M. Bruno Millienne, M. Hubert Ott, Mme Mathilde Paris, Mme Christelle Petex-Levet, Mme Marie Pochon, M. Nicolas Ray, M. Benjamin Saint-Huile, M. Emmanuel Taché de la Pagerie, M. Jean-Pierre Taite, M. David Taupiac, M. Vincent Thiébaut, M. Nicolas Thierry, Mme Huguette Tiegna, M. David Valence, M. Pierre Vatin, M. Antoine Vermorel-Marques, M. Antoine Villedieu, Mme Anne-Cécile Violland, M. Hubert Wulfranc, M. Jean-Marc Zulesi
Excusés. - Mme Sylvie Ferrer, Mme Clémence Guetté
Assistait également à la réunion. - Mme Véronique Riotton