Concernant les transports à la demande et les offres de transports en zone rurale, vous avez raison de dire qu'il est plus difficile d'offrir, dans des zones moins denses et plus dispersées, une offre de transports collectifs aussi bonne que dans les agglomérations. C'est un fait, mais cela ne veut pas dire qu'il n'existe pas de solution. Les transports à la demande et les innovations comme les navettes autonomes, qui ne doivent pas être réservées ou fléchées en priorité vers les agglomérations, peuvent être soutenues. Plusieurs expérimentations sont en cours sur le territoire national. Certaines sont financées par l'État, notamment par l'Ademe (Agence de la transition écologique). Je suis allé visiter dans l'Indre, dans la communauté de communes Cœur de Brenne, un véhicule autonome en zone rurale qui accueille quinze passagers par navette et fonctionne bien. Il nécessite un subventionnement. Je souhaite que nous puissions mener ces expérimentations, puis trouver des modes de financement pérennes État-collectivités. Je l'ai dit tout à l'heure et je l'assume : il faudra différencier les réponses, y compris entre deux zones rurales. Les transports à la demande et transports autonomes peuvent offrir des solutions complémentaires. J'ai également mentionné le recours à la voiture individuelle, qui persistera et peut, lui aussi, être décarboné et soutenu financièrement dans le passage à l'électrique par l'État et par le nouveau dispositif de leasing social. Cette gamme de solutions sera tout aussi efficace dans des zones moins denses que les grandes agglomérations.
Concernant POLT et la nécessité de se mettre d'accord avec quatre régions, nous n'obtiendrons pas le gain prévu de qualité, de fiabilité et de temps si nous ne modernisons pas l'ensemble du réseau. Les régions Auvergne-Rhône-Alpes et Bourgogne-Franche-Comté sont mobilisées. De mémoire, il reste à trouver un accord financier avec l'Île-de-France et le Centre-Val-de-Loire. Je mènerai cette discussion avec le président de cette région, M. François Bonneau, dans le cadre du CPER, afin que le dernier investissement soit financé – 26 millions d'euros au total, ce qui n'est pas insurmontable au regard des plus de 750 millions que j'évoquais. Il importe que l'État et les quatre régions concernées puissent mobiliser les crédits nécessaires dans les volets « mobilités » de leurs prochains contrats de plan.
Le budget de l'Afit France ne sera voté qu'à la fin de l'année, mais l'esquisse budgétaire tourne autour de 3 milliards d'euros. L'essentiel sera consacré aux projets ferroviaires. Outre la trajectoire qui était prévue, 150 millions d'euros de crédits de paiement seront ajoutés. Nous verrons quel montant d'autorisations d'engagement pourra être mobilisé. Il sera sans doute supérieur. La principale action de ces 150 millions d'euros supplémentaires consistera à soutenir davantage la régénération et la modernisation du réseau ferroviaire, au-delà même du contrat de performance. C'est un signal, pour montrer cette priorité. Il faudra que l'effort soit soutenu dans la durée. Je pourrai détailler les grands projets qui ont souffert d'un effet d'accordéon budgétaire – Lyon-Turin, canal Seine-Nord Europe, Roissy-Picardie, Marseille en grand, nouvelle route du littoral à La Réunion – qui seront soutenus à hauteur des besoins nécessaires dans le cadre du budget 2023 de l'Afit France. Nous avons trouvé cet accord avec le ministère des finances au terme des arbitrages budgétaires.
Concernant le projet Limoge-Angoulême, le calendrier des études préliminaires prévoit un rendu au premier trimestre 2023. Nous discuterons de la suite sur cette base.
Monsieur Delautrette, s'agissant du fret fluvial, je suis à votre disposition pour en parler, puisque nous avons une priorité à définir dans le cadre des prochains contrats de plan. Le Président de la République a annoncé, dans le cadre de Marseille en grand, une mission préfectorale dans les régions Provence-Alpes-Côte d'Azur et Auvergne-Rhône-Alpes pour l'axe Marseille-Lyon. Il s'agit notamment d'étudier les possibilités de développement du fret fluvial et d'infrastructures. Les crédits du PLF 2023, en très forte augmentation, respectent scrupuleusement le contrat d'objectifs et de performance de Voies navigables de France (VNF).
Concernant la ligne Poitiers-Limoge, une décision ministérielle signée par M. Jean-Baptiste Djebbari au printemps dernier visait à lancer une phase de consultation. Je l'ai publiée cette semaine. Elle confie mandat à la préfète pour engager cette concertation. Cela ne préjuge pas d'une décision de réalisation du projet. Je n'en dirai pas plus à ce stade. Je note votre position. Nous verrons ce qui ressortira de la concertation locale.
La réforme des modes de financement n'est prévue ni dans le budget, ni dans le PLF pour 2023. J'ai informé Régions de France que je suis ouvert à une discussion dédiée aux paramètres du versement mobilité au-delà de la question des coûts de l'énergie pour 2023, ce qui serait insuffisant. J'ai évoqué les sociétés de projet pour les RER métropolitains. Cela peut faire partie des ressources, dans un cadre qui ne peut pas être celui d'un alourdissement important de la pression fiscale sur le monde économique – ce serait paradoxal au regard de la politique que nous menons. Avec cette cohérence, je suis ouvert à ce que nous menions, au premier semestre 2023, une discussion consacrée au versement mobilité et à sa possible réforme.
Monsieur le député Nicolas Ray, vous m'avez interrogé sur un sujet qui me tient à cœur. Je me suis déplacé à Clermont-Ferrand à la mi-septembre. J'identifie deux facteurs de retards potentiels, au sens où nous devons encore les quantifier. Il y aura des retards. Je ne l'ai pas caché lors de la réunion avec les élus. Deux sujets doivent être distingués. Le premier, industriel, concerne le délai de livraison des nouvelles rames, donc du matériel roulant. Cela vaut, parce que le contrat est unique avec CAF, pour Paris-POLT et Paris-Clermont-Ferrand. Je ne me résous pas à ce que l'on dise que des difficultés temporaires d'approvisionnement industriel décalent massivement le calendrier de livraison – son début et sa fin. J'aurai une discussion à ce sujet, et je vous présenterai son résultat en toute transparence, car il faut partager les bonnes et les mauvaises nouvelles. En tout cas, les financements de l'État sont là et la commande de matériel roulant est engagée. Je souhaite que le projet avance le plus rapidement possible. S'il y avait des délais liés à la situation d'approvisionnement et de livraison des industriels en général et des industriels ferroviaires en particulier, je vous le dirais. J'ai pris l'engagement qu'un comité de pilotage se tienne début décembre, afin que nous partagions les dernières informations de manière complète. Je me suis également engagé à réunir un comité de suivi. Il commencera ses travaux début octobre et permettra des améliorations de service et un suivi des indicateurs de ponctualité et de régularité avant même le « grand soir » du nouveau matériel et du nouveau réseau. Nous le devons aux centaines de milliers d'utilisateurs annuels de cette ligne. Améliorer la qualité de service peut se faire sans attendre le réseau modernisé et les nouvelles rames.
Pour ce qui est de l'étude commandée par l'Autorité environnementale, nous ne savons pas dire quel sera son délai. J'aurais aimé que le retour gracieux aille au bout, mais il n'y avait qu'une chance très faible qu'il aboutisse. Il ne s'agit pas de savoir quelle action symbolique pourrait être menée, mais quelle action concrète permettra que cette procédure que nous subissons et qui était imprévue – et très imprévisible s'agissant d'un projet de cette nature – ralentisse le moins possible le projet. Je ne sais pas dire si le retard de dix-huit mois que vous évoquez peut être comprimé. Je ne le cacherai pas si c'est le cas. Pour le comité de pilotage de décembre, SCNF Réseau, SCNF Voyageurs et l'État partageront l'ensemble des informations, y compris relatives aux retards. Les engagements massifs de 1,6 milliard d'euros que nous avons pris pour les deux lignes ne sont pas remis en cause. Il y aura de nouvelles rames sur toute la ligne et un réseau rénové. Le projet a commencé. Je partagerai le calendrier précis en toute transparence. En attendant, le groupe de travail que je me suis engagé à réunir mettra l'accent sur la qualité de service.
L'aviation privée est un vrai sujet d'exemplarité et de sobriété. Par ailleurs, cette filière industrielle est importante. L'aéroport du Bourget est un fleuron de notre infrastructure aéroportuaire – c'est le premier aéroport d'affaires en Europe. En outre, l'appellation « jet privé » recouvre des réalités souvent très différentes. C'est la raison pour laquelle je mets délibérément un peu de complexité dans ce sujet. Il convient d'avoir une taxation juste. Vous aurez ce débat. L'effort de décarbonation et d'utilisation des SAF doit aussi être renforcé, et peut-être accéléré, concernant les petits avions. Une discussion européenne relative à l'aviation privée et l'aviation en général aboutira, d'ici à la fin de l'année, à des obligations d'incorporation de carburants propres. Nous sommes le premier espace au monde à définir ces obligations d'incorporation. Le Parlement européen et Mme Karima Delli sont très engagés dans ce domaine. Cette discussion a été commencée sous présidence française et s'achèvera en fin d'année. Elle donnera lieu au texte ReFuelEU Aviation, qui fixera des obligations – peut-être différenciées entre l'aviation privée et l'aviation générale – d'incorporation de carburants propres. Par ailqleurs, cela vaut pour toutes les aviations, nous défendons au niveau européen la suppression de l'exemption concernant le kérosène. C'est une innovation majeure jamais réalisée. Cela ne peut se faire qu'au niveau européen. Sinon, cela n'aurait pas de sens. Ce serait contraire aux conventions internationales de l'OACI (Organisation de l'aviation civile internationale). Nous portons ce débat au niveau européen, avec Mme Agnès Pannier-Runacher, dans le cadre de la révision de la directive « taxation de l'énergie pour l'aviation ». En outre, avec des obligations qui restent à définir et méritent peut-être une différenciation entre l'aviation et l'aviation privée, ce secteur entre dans le système ETS (pour Emissions Trading Schems, système communautaire d'échanges de quotas d'émission). C'est une proposition que la France a beaucoup portée lors de sa présidence de l'Union européenne. Ce panel de mesures, parfois spécifique à l'aviation privée, parfois complet pour le secteur de l'aviation, constitue une réforme très importante.
Je maintiens que je ne crois pas à l'interdiction, mais à la règle. Les éléments de réglementation – obligation de décarbonation, taxations potentielles – sont utiles, et n'empêchent pas d'avoir un discours public qui incite à l'exemplarité et à la responsabilité. On peut croire aux deux à la fois ! Je ne suis pas naïf. Je ne suis pas dans la croyance que seule la règle fonctionne. Je ne renvoie pas seulement à la pression populaire, mais à un engagement de responsabilité. Heureusement, nombre d'industries et d'entreprises n'ont pas toujours attendu des règles pour changer leurs comportements, leurs habitudes et leurs pratiques. Je veux saluer, sinon ce serait injuste, le fait que nos industriels sont souvent très en avance, y compris dans la transformation de nos avions, en matière de décarbonation. Je suis allé à Montréal – vous m'excuserez d'avoir pris une fois l'avion pour un déplacement transatlantique – rencontrer plus de quarante-cinq homologues pour défendre l'engagement obligatoire à l'international de décarbonation du secteur aérien d'ici à 2050. Ces « accords de Paris de l'avion » ne sont pas suffisants, mais il est nécessaire qu'ils constituent une avancée majeure.