Concernant la liaison Strasbourg-Marseille et les opportunités offertes par l'ouverture à la concurrence, nous devons d'abord avoir une discussion avec la SNCF pour savoir s'il existe une perspective franche de réouverture de la ligne. Je suis également prêt à étudier avec vous ce que permettrait une ouverture à la concurrence.
De manière plus générale, lorsque la concurrence est organisée et régulée, elle peut représenter une opportunité – y compris pour augmenter la disponibilité de l'offre ferroviaire au service de la transition écologique et de la décarbonation des transports. L'ouverture à la concurrence comprend plusieurs segments. Le premier est celui des grandes lignes, avec l' open access (accès libre). Trenitalia bénéficie de cette ouverture encadrée depuis décembre 2021, et propose cinq allers-retours quotidiens sur la ligne Paris-Lyon. D'autres opérateurs ont manifesté leur intérêt pour de la grande vitesse. Et, de manière symétrique, cette ouverture à la concurrence représente une partie croissante du chiffre d'affaires de la SCNF comme, dans un autre domaine, de RATP Dev. Nous avons des opérateurs d'excellence en matière de conquête de marchés européens et internationaux. Contrairement à ce que d'aucuns avancent, l'ouverture à la concurrence en Espagne et en Italie ne détourne pas des ressources des groupes SNCF et RATP, mais peut être une source très bénéfique de revenus au bénéfice de notre système ferroviaire. Un calendrier d'ouverture à la concurrence concerne aussi le TET (train d'équilibre du territoire). J'ai acté la relance de la procédure pour les lignes Nantes-Bordeaux et Nantes-Lyon, avec une attribution prévisionnelle du lot en 2024. Le calendrier d'ouverture des TER est également engagé, de façon très encadrée, avec un cahier des charges et une offre régulée systématiques. La région PACA a été la première à se lancer ; d'autres ont suivi en engageant une procédure d'appel d'offres et d'attribution des lots.
En somme, l'ouverture à la concurrence est une solution. Pour autant, je ne veux pas faire de mauvaise ou de fausse promesse s'agissant de Strasbourg-Marseille, mais je suis prêt à l'étudier avec vous et à identifier quel opérateur serait susceptible de répondre à ce souhait, dans le cadre des règles en vigueur.
Je ne suis pas le spécialiste mondial des tuk-tuk, je le confesse ! J'ai découvert ce sujet et les enjeux qui se posent à Saint-Malo, où nombre d'opérateurs ne savaient pas que la réglementation du transport public particulier de personnes (T3P) s'applique en partie aux tuk-tuk, notamment l'obligation de réservation préalable. Il faut que l'information circule, avec peut-être une forme de tolérance progressive pour l'application des règles, et une transparence complète quant au cadre réglementaire. J'étudierai le cas précis de l'Île d'Yeu, mais ce sujet se développe dans beaucoup de villes, grandes ou moyennes également.
S'agissant du bonus écologique, je suis prêt à discuter de la trajectoire avec le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Vous avez également évoqué une proposition de réservation, dans le respect des règles européennes ou internationales du commerce – par définition, je suis d'accord avec M. Bruno Le Maire : c'est une piste à creuser. Reste à définir un cadre juridique robuste pour la rendre opérationnelle.
Concernant l'enveloppe de 1,3 milliard d'euros, dans le budget 2023, de l'ensemble des aides à l'acquisition de véhicules électriques ou non polluants, la répartition n'est pas encore fixée entre bonus écologique, prime à la conversion, leasing et nouvel appel à projets pour les poids lourds zéro émission et peu polluants qui entrent dans le cadre des ZFE. Cette répartition sera faite par voie réglementaire, en concertation avec vous, dans les prochaines semaines.
La trajectoire du plan Vélo est extrêmement ambitieuse, puisque nous avions une enveloppe de 350 millions pour sept ans. Certes, elle a été consommée et complétée par le plan de relance plus rapidement que prévu lors de son lancement en 2018. Mais l'enveloppe sera de 250 millions d'euros pour la seule année 2023, avec la pré-répartition suivante : 50 millions pour le stationnement sécurisé et 200 millions pour les infrastructures, avec un effet de rattrapage pour les collectivités qui ont moins de ressources. Nous adapterons cette répartition en fonction des projets. C'est un effort très significatif, qui ne constitue pas l'intégralité de l'effort pour le vélo. D'une part, les collectivités sont les premiers financeurs. D'autre part, l'État continue à verser des aides à l'acquisition de vélos électriques, cargo, etc. La part modale de 9 % en 2024 sera difficile à atteindre. Elle est également très difficile à mesurer. Un chantier sera ouvert dans ce domaine. Mais, plutôt que perdre du temps à quantifier l'objectif précis, je veux que nous accélérions le déploiement du dispositif. L'effet massif d'incitation est réel, puisque 2 millions de vélos électriques ont été achetés ces quatre dernières années, et un total de 10 millions depuis le lancement du plan Vélo. L'augmentation des ventes se poursuit. La tendance était lancée, mais elle s'est beaucoup accélérée.
Concernant les engagements de M. Jean Castex relatifs au train de nuit, le principe et la liste des lignes sont confirmés. Je me tiens à votre disposition pour plus de précisions quant à la ligne Aurillac-Paris. Nous pourrons en discuter dans les prochaines semaines. Je ne peux pas vous dire aujourd'hui quels seront les calendriers.
Pour ce qui est du fret et du slogan « autoroutes ferroviaires » – lesquelles ne se sont souvent pas concrétisées car il fallait déployer des emprises très importantes –, nous pouvons regarder les projets précis. Ma conviction, que je voudrais que l'on retrace dans les prochains CPER, est que notre fret ferroviaire accuse surtout du retard dans le domaine des hinterlands de nos ports, notamment d'Haropa, Dunkerque et Marseille. À Marseille-Fos, en particulier, la sortie du port est très congestionnée, tant par la route que par le train. Le système de fret ferroviaire mérite de se développer de façon générale, sans qu'il s'agisse nécessairement de camion sur du rail. Trois projets d'autoroutes ferroviaires sont pré-identifiés et peuvent faire l'objet d'études et, le cas échéant, d'un déploiement : Sète-Calais, Sète-Valenton et Cherbourg-Mouguerre (plutôt pour fin 2024). Je ne renonce pas à cette ambition, mais je crois plutôt qu'il faut déployer du fret ferroviaire là où il existe un potentiel important et pas exploité.
S'agissant de GPSO, il est inexact d'affirmer qu'il n'y a pas de financement européen – j'ai déjà eu cette discussion avec le président M. Rousset. La France n'en a pas reçu dans le premier appel à projets du mécanisme européen d'interconnexion, mais c'est en grande partie lié au calendrier du projet, plus tardif que d'autres qui ont été retenus. Cela ne veut pas dire qu'il n'y aura pas de financement ultérieur pour GPSO. J'ai débattu avec la Commissaire européenne début septembre et je poursuivrai ce débat avec le président M. Rousset, en toute transparence. La Commission européenne serait évidemment plus encline à apporter un financement si le barreau Bordeaux-Dax et la partie transfrontalière étaient intégrés dès le début du projet. Or nous savons que ces sections verront le jour plus tardivement que le barreau Bordeaux-Toulouse. Néanmoins, il existe des aménagements ferroviaires communs, comme les accès à Bordeaux. L'argument que je porte auprès de la Commission européenne est qu'il serait légitime d'avoir un financement européen dès la première phase. Ce débat se poursuit. Le président M. Rousset a raison de dire que la dimension transfrontalière faciliterait l'accès au financement européen, mais il n'est pas exact de considérer qu'il n'y en aurait pas, soit dans le projet global, soit dans un projet qui serait centré sur Bordeaux-Toulouse. Quant à savoir ce que je pense du projet lui-même, je considère qu'il faut qu'il avance. Nous proposerons dans le PLF ou par voie réglementaire la définition des ressources de la société de projet, à laquelle le président M. Rousset tient à juste titre beaucoup. Cette société a tenu sa réunion constitutive le jour où j'ai pris mes fonctions, le 4 juillet dernier. Il faut avoir un financement européen, bien sûr, mais il faut faire avancer le projet quoi qu'il arrive. La société de projet fonctionne. Sa ressource sera, je l'espère, votée par le Parlement dans la loi de finances pour 2023, après une discussion qui s'est tenue entre la présidente de la région Occitanie, le président de la région Nouvelle-Aquitaine, les maires des grandes villes et les présidents des départements concernés. Je n'ai aucun doute quant au fait que ce projet doit avancer et avancera.
Je parlerai des lignes occitanes avec Mme Carole Delga, en prévision du CPER. Je n'ai pas de nouvelle information concernant Auch-Agen, mais un rendez-vous de préparation du CPER sera fixé dans quelques semaines. Mon cabinet pourra vous fournir davantage d'informations à ce moment-là.
Concernant le projet Lyon-Turin, ni moi ni mon prédécesseur n'avons exprimé de préférence pour un scénario en matière d'accès. La méthode retenue a consisté à confier au préfet de région Rhône-Alpes-Auvergne l'organisation d'une consultation qui a duré plusieurs mois. Le dernier comité consultatif s'est tenu en fin d'année 2021. Il n'y a pas d'unanimité – il n'y en a jamais pour ces projets. Toutefois, l'avis général dominant a consisté à défendre le scénario dit « grand gabarit ». J'ai indiqué, le 15 septembre dernier à Lyon devant les collectivités potentiellement financeuses, qu'il fallait mettre une ambition budgétaire en face de l'ambition ferroviaire. Si la majorité des collectivités souhaite retenir le scénario « grand gabarit », je ne m'y opposerai pas et l'État sera au rendez-vous. Il faut le quantifier précisément. Nous savons que le montant tournerait autour de 10 milliards d'euros. Il faut aussi que tous ceux qui le souhaitent disent ce qu'ils sont prêts à financer. Je confierai dans les jours qui viennent un nouveau mandat au préfet de région Rhône-Alpes-Auvergne pour effectuer ce tour de table financier avant qu'une décision transparente et concertée soit prise. Je précise, en outre, que ce projet n'épuise par l'ensemble des projets ferroviaires de la région. J'ai notamment conscience de l'importance du projet de modernisation de la ligne Annecy-Aix-les-Bains et de son caractère prioritaire. Ce n'est pas parce que nous choisirions un scénario « grand gabarit » pour Lyon-Turin que l'on épuiserait l'ensemble des financements et des travaux de modernisation ferroviaire. Nous n'oublierons pas vos préoccupations en la matière. En tout état de cause, la décision n'est pas encore prise concernant les accès. Prendre une décision sans financement ne serait pas sérieux.