La commission procède à l'examen, ouvert à la presse, et au vote de deux projets de loi.
Présidence de M. Jean-Louis Bourlanges, président
La séance est ouverte à 11 h 20
Projet de loi autorisant l'approbation de la convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal, et de la convention d'extradition entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal (n° 213)
(M. Sylvain Maillard, rapporteur)
Je laisse à notre rapporteur le soin de nous présenter son analyse sur le projet de loi autorisant l'approbation de la convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal, et de la convention d'extradition entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal, dont notre commission est saisie.
Il m'appartient de vous présenter les conventions d'extradition et d'entraide judiciaire en matière pénale conclues avec le Sénégal et dont il vous est demandé d'autoriser l'approbation. Ces conventions, négociées à la demande du Sénégal, ont été signées à Paris en 2021.
La France est actuellement liée au Sénégal par un accord de coopération judiciaire signé en 1974. Toutefois, depuis cette époque, des évolutions notables sont intervenues. La criminalité organisée s'est internationalisée et complexifiée, avec des réseaux de trafics d'êtres humains, de stupéfiants, d'armes, de cybercriminalité, qui exercent leurs activités dans la bande sahélo-saharienne et ont des ramifications en Europe. La visite du ministre de l'intérieur Gérald Darmanin à Dakar en décembre 2022 a été l'occasion, pour les autorités de nos deux pays, de faire le point sur les réseaux d'immigration ainsi que sur le trafic international de crack, dont nous connaissons les répercussions dans certains quartiers de Paris.
Les pays de la région font face, depuis plusieurs années et dans des proportions inédites, à une menace terroriste qui continue malheureusement à faire de nombreuses victimes. Le Sénégal a été pour l'instant épargné par les attentats, et l'islamisme radical ne semble pas s'y être implanté sérieusement. On le doit peut-être à la forte présence des confréries religieuses, d'inspiration soufie, qui promeuvent certes un islam aux principes plutôt conservateurs, mais tolérant et sans lien avec la violence de type djihadiste. Tel n'est pas le cas, en revanche, de pays voisins comme le Mali, le Burkina Faso ou le Niger. Comme l'a rappelé le 19 janvier le général Babacar Gaye, ancien chef d'état-major général des armées du Sénégal ayant exercé des responsabilités militaires dans le cadre de l'Organisation des Nations Unies (ONU) : « Il y a bien une crise sécuritaire dans le Sahel qui ébranle tous les ordres établis, tous les équilibres ». Dans ce contexte, la porosité de la frontière sénégalo-malienne, de près de 500 kilomètres, est de nature à fragiliser l'Est du Sénégal, région déjà pauvre et relativement délaissée.
La criminalité organisée et le terrorisme ont tendance à s'entremêler. Les autorités françaises peuvent avoir à connaître de ce type d'affaires, soit que des ressortissants français figurent parmi les victimes, soit qu'au contraire ils soient mis en cause, soit encore que les dossiers concernés soient susceptibles d'avoir des répercussions pour la sécurité de notre pays. En sens inverse, les autorités sénégalaises peuvent avoir besoin de la coopération des juridictions françaises dans certains dossiers d'envergure.
L'accord bilatéral de 1974 n'apparaît plus adapté, dans bien des domaines, aux nouveaux défis posés par la criminalité organisée et par le terrorisme. L'exécution des demandes françaises d'entraide et d'extradition se révèle ainsi particulièrement lente. Les présentes conventions visent donc à rénover un cadre juridique devenu obsolète, en vue notamment de favoriser une exécution plus rapide et plus efficace des demandes. Elles visent aussi à prendre en compte les bouleversements techniques et technologiques intervenus depuis 1974, en particulier la généralisation du numérique et de la dématérialisation.
Ces conventions organisent de manière claire les modalités de communication et de transmission des demandes d'entraide et d'extradition, notamment dans les cas les plus urgents. Elles posent expressément une obligation de célérité. Je rappelle à toutes fins utiles – et pour éviter toute ambiguïté – que l'extradition n'a rien à voir avec l'expulsion, ni avec le droit des étrangers. Elle est une procédure à caractère judiciaire visant à remettre l'auteur d'un délit ou d'un crime à un autre État pour qu'il puisse y être jugé ou y exécuter sa peine. Elle a pour objet d'empêcher que l'auteur d'une infraction d'une certaine gravité aille chercher refuge dans un autre État pour ne pas avoir à répondre de ses actes.
La convention d'entraide judiciaire, en particulier, permet de recourir aux techniques modernes d'enquête telles que les auditions par vidéoconférence, les demandes d'informations en matière bancaire, les saisies et confiscations d'avoirs criminels, les interceptions de télécommunications, les livraisons surveillées et les opérations d'infiltration, autant de domaines qui n'étaient pas couverts par l'accord de 1974 et qui constituent aujourd'hui des outils essentiels dans la lutte contre la criminalité et le terrorisme.
Ces conventions prévoient – et c'est essentiel – les garanties indispensables qui doivent entourer ce type de procédures. L'entraide peut ainsi être refusée si la demande se rapporte à des infractions politiques. Les témoins, experts ou personnes poursuivies, qui sont appelés à comparaître devant les autorités judiciaires du pays demandeur, bénéficient d'immunités précisément définies.
De même, l'extradition ne saurait être accordée lorsque les infractions reprochées sont de nature militaire ou politique, ou s'il existe des raisons sérieuses de croire que l'extradition a été demandée en vue de poursuivre ou de punir une personne pour des considérations de race, de genre, de religion, de nationalité ou d'opinions politiques. Par ailleurs, en vertu du principe dit de spécialité, une personne ne pourra être poursuivie pour un fait autre que celui ayant motivé son extradition.
Une clause excluant l'extradition lorsque l'infraction concernée fait encourir la peine de mort figure aussi dans la convention, bien que le Sénégal ait aboli la peine capitale en 2004 et que la dernière exécution y remonte à 1967, dix ans avant la France.
Les deux conventions comportent également des garanties pour la protection des données personnelles.
Ces textes ont fait l'objet d'une élaboration attentive, largement inspirée des mécanismes de coopération de l'Union européenne et du Conseil de l'Europe. Ils sont très proches des conventions signées avec le Burkina Faso et le Niger en 2018, dont l'Assemblée nationale avait autorisé l'approbation et qui sont déjà entrées en vigueur.
Il me paraît important que cette modernisation du cadre juridique s'accompagne d'une disponibilité de notre pays à aider le Sénégal à s'approprier les nouveaux outils. La France a commencé à le faire par l'intermédiaire de son magistrat de liaison en poste à Dakar. Par ailleurs, un projet, mis en œuvre par Expertise France depuis un an, tend à développer au Sénégal un bureau de l'entraide pénale internationale (BEPI), sur le modèle du bureau français. La France a aussi contribué à la création de l'École nationale de cybersécurité à vocation régionale de Dakar. Elle déploie en outre des programmes de formation des magistrats étrangers, notamment africains.
La coopération judiciaire entre la France et le Sénégal peut s'appuyer sur une culture juridique et administrative en grande partie commune. Nos organisations judiciaires sont en effet largement similaires, elles comportent un double degré de juridiction, une cour suprême connaissant des recours en cassation, un conseil constitutionnel, une cour des comptes et un conseil supérieur de la magistrature, pour ne citer que ces exemples. Les principes classiques du droit pénal français, tels que la légalité des délits et des peines, ont également été repris dans le code pénal sénégalais de 1965, complété depuis par de nouvelles incriminations.
Cette coopération, au-delà même du cadre juridique qui nous rapproche, peut s'appuyer sur des liens d'amitié particulièrement anciens et solides. Rappelons que la langue officielle du Sénégal est le français, ou encore que les deux tiers des étudiants sénégalais à l'étranger se trouvent en France, où ils constituent le premier contingent d'étudiants étrangers francophones. Autre fait significatif, le Sénégal est le seul pays d'Afrique subsaharienne avec lequel la France organise un séminaire intergouvernemental, alternativement à Dakar et à Paris, dont la cinquième édition s'est tenue le 8 décembre 2022. Les visites bilatérales des autorités sont nombreuses et peuvent être, si nécessaire, l'occasion de se dire les choses lorsque nos vues ne concordent pas, comme en 2020, lorsque le Sénégal a signé la déclaration de consensus de Genève. La France sera également attentive, dans le respect bien entendu de la souveraineté du Sénégal, aux conditions de déroulement de l'élection présidentielle de 2024.
En résumé, compte tenu des enjeux de la lutte contre la criminalité organisée et le terrorisme et des liens forts qui nous unissent au Sénégal, l'approbation de ces conventions me paraît particulièrement opportune et bienvenue. C'est pourquoi je vous invite à adopter le projet de loi qui l'autorise.
Le Sénégal entretient depuis l'accord de coopération judiciaire de 1974 des relations de coopération significatives avec la France. Les traités internationaux conclus dans le cadre de l'ONU que le Sénégal a ratifiés et qui l'engagent dans le cadre de la coopération judiciaire avec notre pays sont nombreux : la convention unique sur les stupéfiants, la convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, la convention contre le trafic illicite de stupéfiants ou de substances psychotropes, la convention contre la criminalité transnationale organisée, adoptée par la résolution 55/25 de l'Assemblée générale des Nations Unies, et la convention contre la corruption.
La France est le principal demandeur en matière de coopération judiciaire ; ainsi, depuis 2011, notre pays a formulé 108 demandes d'entraide judiciaire, dont 40 sont toujours en cours d'exécution, et 14 dénonciations officielles Les délais restent parfois longs et l'on peut former le souhait que ces textes accélèrent les procédures et facilitent les démarches.
En tout état de cause, le groupe Socialistes et apparentés votera le projet de loi autorisant l'approbation de ces conventions, qui ne sont pas seulement techniques et qui constituent un indéniable progrès.
Nous sommes sur la même longueur d'onde et je reste à votre disposition dans l'éventualité où votre groupe aurait des questions plus précises.
La France, engagée depuis dix ans au Sahel, se doit de disposer d'outils juridiques appropriés avec ses partenaires de la région pour lutter efficacement contre le terrorisme. La demande de modernisation du cadre fixé par la convention de 1974, qui émanait du Sénégal, représente une opportunité d'adapter notre coopération en matière pénale aux nouveaux enjeux. Ces deux conventions incluent en effet des stipulations spécifiques visant à favoriser les auditions par visioconférence et à octroyer des moyens d'action plus importants dans le cadre des missions d'infiltration des réseaux criminels.
La convention d'entraide judiciaire en matière pénale et celle d'extradition sont parfaitement cohérentes avec nos engagements internationaux. Elles sont relativement similaires aux conventions existantes au sein de l'Espace économique européen (EEE) et entre les pays du Conseil de l'Europe. Elles préservent de même notre souveraineté en offrant suffisamment de garanties pour refuser une entraide ou une extradition pour des raisons d'ordre politique ou touchant à la sécurité nationale. Le groupe Horizons et apparentés votera donc en faveur de ce projet de loi.
Vous revenez brièvement dans votre rapport sur le regain de conservatisme dans la société civile sénégalaise ; vous faites notamment référence à la signature par le Sénégal de la déclaration de consensus de Genève, texte ouvertement hostile à l'avortement. Cette recrudescence du conservatisme pourrait-elle avoir un impact sur les conventions que nous examinons aujourd'hui et sur leur application future ?
Nous devons porter un regard extrêmement attentif à ces prises de position. La situation politique est actuellement complexe au Sénégal mais il y aura une étanchéité entre l'application de ces conventions et d'éventuelles évolutions de l'action gouvernementale. L'idée est de normaliser les relations et de protéger le cadre régissant l'entraide judiciaire et les extraditions contre des modifications politiques, par le gouvernement actuel ou les suivants, de la doctrine suivie. La déclaration de consensus de Genève, que j'ai citée dans ma présentation du projet de loi, constitue à nos yeux une dérive, mais elle ne doit pas entacher les bonnes relations que nous avons traditionnellement avec le Sénégal.
Il faut rappeler tout d'abord la relation spécifique qui unit le Sénégal à la France ; elle est complexe car le Sénégal était notre plus ancienne colonie africaine. Plus de soixante ans après l'indépendance de ce pays, nous assistons à la montée d'un sentiment antifrançais dans toute une frange de la population. Il convient donc de traiter ce dossier avec la hauteur de vue nécessaire, en considérant notre histoire commune et en faisant preuve d'humilité et de respect.
Les termes de la première convention relative à l'entraide judiciaire ne semblent pas poser de problème particulier. Elle permettra de lutter plus efficacement contre le trafic de drogue et le terrorisme. Il existe en effet de nombreux accords identiques, comme vous l'avez rappelé, Monsieur le rapporteur. Si la convention peut permettre de faciliter des enquêtes judiciaires, nous ne pouvons que nous en réjouir.
Il convient en revanche de regarder de plus près le second texte. Qu'il s'agisse de l'exécution d'une peine ou de poursuites pénales, la convention stipule que si les infractions reprochées sont de nature militaire ou politique, le refus de l'extradition est obligatoire. Quel est cependant le périmètre exact d'une infraction politique dans un pays où le pouvoir exerce un contrôle de plus en plus autoritaire sur ses citoyens ? Le président de la République Macky Sall semble peu enclin à laisser son siège à l'occasion de l'élection présidentielle de 2024, alors que la Constitution sénégalaise limite le nombre de mandats consécutifs à deux. La stabilité de ce pays, souvent présenté à l'extérieur comme un modèle de démocratie dans la région, est ainsi mise à l'épreuve. Alors qu'une opposition se forme, les responsables de celle-ci ont presque tous eu affaire à la justice au cours des dernières années. Le gouvernement n'a pas hésité à utiliser des blindés contre la foule et le ministre de l'intérieur a traité les manifestants de terroristes avant de suspendre deux chaînes de télévision qui avaient diffusé des images des manifestations et de couper internet à plusieurs reprises. Enfin, la dizaine de morts et les centaines d'arrestations témoignent de la violence de la répression. Certains leaders politiques ont d'ailleurs été arrêtés durant la manifestation du 17 juin 2022 à Dakar : c'est le cas de Diarra Fam et de Déthié Fall, députés, et d'Ahmed Aïdara, maire. Ce dernier attend le verdict de son procès pour participation à un attroupement non armé : il a été requis à son encontre une peine d'un mois de prison avec sursis et une amende de 50 000 francs CFA.
Ces dérives m'inquiètent profondément pour la suite. La voix de la France n'est pas neutre car notre pays est le premier partenaire commercial du Sénégal et l'Agence française de développement (AFD) est l'un des premiers bailleurs du pays, son engagement total s'élevant à 1,4 milliard d'euros. Notre rôle n'est certes pas de nous mêler des affaires de politique intérieure du pays mais la France doit rester garante des principes démocratiques qui construisent notre image à l'international. En ce sens, sommes-nous absolument certains, malgré les garde-fous du texte, que la convention d'extradition ne pourra pas être utilisée d'une manière ou d'une autre par le gouvernement actuel comme un élément d'une stratégie de conservation du pouvoir ?
Alors que notre image en Afrique de l'Ouest est au plus mal, il faut éviter à tout prix de l'abîmer davantage en laissant prospérer l'idée que nous pourrions entraver d'une quelconque manière l'autodétermination des peuples. Pour toutes ces raisons, le groupe Écologiste-NUPES s'abstiendra lors du vote sur le projet de loi.
Dans le cadre d'une entraide judiciaire, c'est le juge français qui décidera de l'application de la convention. Du côté français, les garanties sont apportées par l'impartialité de notre justice. Je m'associe en revanche complètement au regard que vous portez sur la situation politique au Sénégal.
Monsieur le rapporteur, je vous remercie pour votre intervention qui nous permet de resituer les enjeux de ces deux conventions. Vous l'avez rappelé, le Sénégal est un partenaire essentiel de la France en Afrique de l'Ouest : la relation est dense dans le domaine des échanges culturels et éducatifs mais également du point de vue humain, grâce à la nombreuse communauté française sur place et à la diaspora sénégalaise implantée en France de longue date. Notre pays est le premier partenaire commercial et investisseur étranger au Sénégal. Sur le plan politique, vous l'avez également rappelé, un séminaire intergouvernemental et un cadre légal et conventionnel portant sur différentes matières structurent nos relations.
Il en est ainsi de la convention de coopération en matière judiciaire, qui date de 1974. L'environnement dans lequel se trouve le Sénégal, proche de la zone d'instabilité de la bande sahélo-saharienne mais aussi de flux importants du trafic de stupéfiants, nécessite l'élaboration de nouveaux outils nous permettant d'affronter les nouvelles menaces en matière de terrorisme, de trafic de drogue et de cybercriminalité. Par ailleurs, les moyens techniques ont également évolué et ont modifié les pratiques en matière de coopération judiciaire.
Ces deux conventions d'entraide judiciaire et d'extradition fournissent de nouveaux outils pour nous adapter au contexte et aux pratiques actuels. Je salue par ailleurs l'appui que la France apporte à la création d'un bureau de l'entraide pénale à Dakar par le biais d'Expertise France.
Le rapport évoque la criminalité reposant sur les arnaques en ligne, parfois l'œuvre de ressortissants sénégalais, qui est médiatisée notamment à la télévision française, où elle a fait l'objet de plusieurs reportages ces dernières années. Des dispositifs spécifiques de lutte contre cette cybercriminalité sont-ils déployés au Sénégal et font-ils l'objet d'une coopération policière dédiée ?
Le groupe Renaissance votera bien entendu en faveur de ce projet de loi.
La cybercriminalité ne faisait évidemment pas partie du champ de la convention de 1974. Elle s'est largement développée, sous des formes multiples, et cet accord nous permettra de poursuivre plus facilement ceux qui s'y adonnent, qu'ils soient français ou sénégalais. Il est essentiel de disposer d'outils adéquats pour ne pas laisser la cybercriminalité s'organiser et pour empêcher un Sénégalais opérant en France, par exemple, de passer entre les mailles du filet judiciaire.
Ce texte technique sur l'entraide judiciaire en matière pénale entre la France et le Sénégal va dans le bon sens, celui d'une lutte commune contre la criminalité et du développement des relations franco-africaines. Il serait d'ailleurs souhaitable que le Gouvernement négocie des conventions d'entraide et d'extradition similaires avec tous les pays africains pour la bonne exécution des obligations de quitter le territoire français (OQTF), lesquelles surgissent tant de fois dans l'actualité souvent malheureuse de notre pays.
Ces conventions ne sont qu'une étape dans la construction et le développement de nos relations. Le Gouvernement actuel et ceux qui l'ont précédé ont délaissé les amitiés franco-africaines, et nous en payons actuellement le prix, comme le montrent nos déboires maliens et l'actualité au Burkina Faso, exemple extrême de notre perte d'influence et, pire, de notre perte de considération. Cependant, il existe encore une envie de France en Afrique et le Rassemblement national souhaite amplifier nos relations avec ce continent. Il soutient ainsi la francophonie – nous en avons parlé la semaine dernière avec Mme Chrysoula Zacharopoulou – pour en faire un véritable outil de développement industriel et de coopération économique. Le Sénégal pourrait être un acteur majeur de l'approfondissement des relations que nous appelons de nos vœux.
Nous portons une attention toute particulière à ce pays, que notre présidente, Marine Le Pen, a visité la semaine passée. Elle a pu réaffirmer au président Macky Sall notre vision d'une relation franco-sénégalaise plus riche, plus amicale et plus étroite. Nous proposons depuis longtemps, pour améliorer la stabilité du monde, de cesser de dénier à l'Afrique la place légitime qui doit lui revenir dans l'organisation de la communauté internationale. Ce continent devrait bénéficier d'un siège de membre permanent au Conseil de sécurité des Nations Unies : le Sénégal, État de droit respectueux des alternances politiques, pays uni autour de ses cultures séculaires et doté d'une diplomatie rayonnante, pourrait assumer cette charge.
J'ai volontairement élargi mon propos pour insister sur le fait que nous nous félicitons que des mesures soient prises pour améliorer les relations entre la France et le Sénégal. Le groupe Rassemblement national votera donc en faveur du projet de loi.
Je suis certain que le président Macky Sall a été très intéressé par la vision stratégique de Marine Le Pen.
Les OQTF n'ont rien à voir avec cette convention.
Nous avons signé le même type d'accords avec le Burkina Faso, le Mali et le Niger : deux d'entre eux s'appliquent déjà depuis 2018.
Nous soutenons par principe ce type de textes car la coopération judiciaire est fondamentale à l'échelle internationale. Pour autant, en l'état actuel du projet de loi, nous voterons contre son adoption.
Je ne vous rejoins pas, Monsieur le rapporteur, quand vous dites que l'on peut séparer le politique du judiciaire. L'opposition sénégalaise est extrêmement inquiète des dérives du président Macky Sall, lesquelles risquent de s'aggraver puisque l'on sait qu'il envisage d'effectuer un troisième mandat ; elle nous supplie de ne pas approuver ces conventions en l'état. Cela ne signifie pas qu'il faille les rejeter en bloc, et l'opposition propose des amendements visant à mieux définir le terrorisme. Pour Macky Sall, tout opposant politique est un terroriste. J'entends ce que vous dites sur le fait que ce sera au juge français de décider mais, si la situation de départ est aussi confuse, il y a tout lieu de s'inquiéter de la manière dont s'opéreront les extraditions. Amnesty International nous alerte également sur l'extension de la définition du terrorisme au Sénégal. Monsieur Taché a rappelé les morts pendant les manifestations et l'interdiction systématique des rassemblements d'opposition. Ce texte intervient au mauvais moment et avec le mauvais interlocuteur.
Il y a un grand malentendu sur la question de la coopération entre la France et l'Afrique : l'immense majorité des peuples africains n'ont rien contre la France en général mais ils lui reprochent de soutenir des dirigeants qu'ils détestent. Au Sénégal, les vagues de violences antifrançaises, que je dénonce, sont alimentées par des gens comme Kémi Séba, mais elles se sont formées au moment où la France donnait, à tort ou à raison, l'impression de soutenir Macky Sall contre une opposition qui est, à mon avis, majoritaire dans le pays. Le déplacement de madame Le Pen ne changera rien à l'affaire car les populations ne reprochent pas à la France d'être en Afrique mais de soutenir certains régimes. Il s'est d'ailleurs passé la même chose au Tchad.
Ce texte intervient au plus mauvais moment et il n'est pas rédigé comme il faudrait. Voilà pourquoi nous avons demandé de sortir du cadre de la procédure d'examen simplifiée. Il importe d'avoir un vrai débat sur la coopération entre la France et les pays africains.
J'entends votre propos politique et nous pourrions discuter des causes du sentiment antifrançais ; nous n'aurions peut-être pas la même approche car il me semble être le produit de nombreux facteurs. À nos yeux, il est important de rénover la convention actuelle, même si le processus a été enclenché à la demande du Sénégal, mais il se peut que j'apporte de l'eau à votre moulin avec cette précision. Madame Lakrafi a évoqué des délits comme la cybercriminalité, qui rendent utile l'actualisation de notre coopération. Le sujet n'est pas uniquement politique : il convient de lutter contre la criminalité ou le trafic de drogue en renforçant notre coopération et nos liens.
Il faut se montrer extrêmement vigilant sur les points que vous avez soulevés et rappeler qu'il y aura toujours le regard du juge français, ce qui nous permet d'avoir confiance dans le dispositif, d'autant que ces conventions sont rédigées sur le fondement de modèles de l'Union européenne et du Conseil de l'Europe. Toutes les garanties existent donc mais nous pourrons continuer d'échanger sur le sujet si vous le souhaitez.
Je ne crois pas que les sentiments antifrançais qui se sont exprimés assez fortement à l'occasion de divers troubles aient un quelconque lien avec une complaisance particulière de la France envers Macky Sall. Il s'agit plutôt d'un levier facilement exploitable par les opposants, quels qu'ils soient. Au cours de l'entretien d'une heure qu'il m'avait accordé en mars dernier, le président Macky Sall n'avait pas ménagé ses critiques envers notre pays ; cela s'était d'ailleurs traduit par l'abstention du Sénégal sur la résolution relative à l'Ukraine, ce qui avait été une petite surprise. Il avait notamment dénoncé la responsabilité de la France dans l'opération en Libye, qui fut selon lui l'une des causes du développement du mouvement terroriste depuis la Libye jusqu'au golfe de Guinée. Je pense qu'il s'agit de deux variables indépendantes.
J'espère que mon expérience de juge apportera un autre éclairage.
L'objet de ces accords est de moderniser la convention de 1974 relative à la coopération judiciaire, laquelle comprenait déjà l'extradition dans son champ d'application. Quand on voit ce qui se passe à la porte de la Chapelle, quand on pense à l'immigration clandestine et à la menace terroriste dans la bande sahélo-saharienne, on ne peut qu'être favorable à un renforcement de la coopération judiciaire. La France et le Sénégal disposent de systèmes juridiques assez proches, d'une organisation judiciaire et de codes similaires ; il y aura un magistrat de liaison, ce qui est assez novateur ; un bureau d'entraide est en train de se créer : je ne comprends pas comment on peut ne pas être favorable à ces accords.
J'appartiens à une génération qui apprenait les poésies de Léopold Sédar Senghor, qui fut le premier président de la République du Sénégal après avoir été ministre en France. Certes, les relations entre les deux pays ont évolué mais, si la situation politique au Sénégal est problématique, il faut aussi faire confiance au juge. Le politique n'est pas le juge, et inversement. Connaissant bien la procédure d'extradition, je crois que nous n'avons pas à nourrir de crainte excessive en la matière.
Monsieur le rapporteur, pensez-vous que le renforcement de cette coopération puisse avoir une incidence sur les critiques dont l'action de la France dans la région du Sahel fait l'objet ?
L'histoire nous le dira, mais je ne le pense pas. Ce qui est certain, c'est qu'il faut moderniser la convention existante, afin qu'elle réponde aux enjeux de notre siècle. Le sentiment antifrançais, qui – comme le président vient de le rappeler – est largement instrumentalisé, ne se fondera pas uniquement sur cette modernisation. Les accords que nous examinons sont très importants pour les mois et les années à venir.
Je voudrais appeler l'attention de la commission sur la contradiction que ma collègue Laurence Vichnievsky a relevée. Je suis rapporteur pour avis du programme 185 de la mission budgétaire Action extérieure de l'État. Cela fait cinq ans que nous nous battons pour que le Gouvernement remette en question le fonctionnement en silos qui empêche la France d'agir de manière globale. La modernisation de la convention existante non seulement est nécessaire, mais elle accompagne la modernisation de notre administration et de notre diplomatie d'influence, qui a été engagée depuis trois ou quatre ans par l'intermédiaire de Justice Coopération Internationale (JCI) et d'Expertise France et qui permet le maintien d'une coopération. Je suis surpris que la solution proposée par certains soit de solder les comptes, de s'en aller et de recommencer le match. La France est encore présente et elle dispose d'un outil adapté et modernisé. Je ne comprends pas qu'on puisse voter contre ce projet de loi autorisant l'approbation de ces deux conventions.
La menace terroriste ne doit pas servir de prétexte pour couvrir les velléités de maintien hégémonique d'un pouvoir qui se meurt. Nous ne pouvons ignorer les dérives du gouvernement sénégalais et la criminalisation des opposants politiques. En mars 2021, Amnesty International dénonçait une vague d'arrestations arbitraires d'opposants et d'activistes, la mort de Cheikh Coly, victime de la répression, et la suspension de deux chaînes de télévision durant soixante-douze heures. Et que dire de la récente arrestation du journaliste Pape Alé Niang pour des motifs qui étaient, selon la coordination des associations de presse du Sénégal, fantaisistes et politiques ? Dans ce contexte, comment garantir que les oppositions politiques ne seront pas davantage muselées et que l'on n'assistera pas à une recrudescence des emprisonnements politiques, sous couvert de lutte antiterroriste mais dans l'objectif de préserver le système autocratique ? Approuver ces conventions en l'état ne contribuera-t-il pas à nourrir le sentiment antifrançais, qui traduit le rejet d'un système perçu comme oppresseur ?
Il est vrai que la situation au Sénégal est difficile. Les autorités françaises seront très attentives à ce qui va se passer dans les mois et les années à venir, notamment à l'approche de l'élection présidentielle. Macky Sall va-t-il tordre le bras à la Constitution pour pouvoir se représenter une troisième fois ?
Les deux textes qui nous sont soumis n'ont toutefois rien à voir avec la situation politique au Sénégal. Au contraire, ils garantissent une meilleure entraide entre nos deux pays. Ils actualisent la convention en vigueur et toutes les garanties ont été prises pour qu'ils ne soient instrumentalisés ni dans un sens, ni dans l'autre. Le juge français, en lequel nous avons toute confiance, conserve un droit de regard plein et entier. C'est pourquoi je vous invite à prendre position en leur faveur.
Article 1er (ratification de la convention d'entraide judiciaire en matière pénale du 7 septembre 2021 entre le Gouvernement de la République du Sénégal et le Gouvernement de la république française)
La commission adopte l' article 1er non modifié.
Article 2 (ratification de la convention d'extradition du 7 septembre 2021 entre le Gouvernement de la République du Sénégal et le Gouvernement de la république française)
La commission adopte l' article 2 non modifié.
Elle adopte ensuite l'ensemble du projet de loi sans modification.
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Projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'accord pour la mise en place d'un mécanisme d'échange et de partage de l'information maritime dans l'océan Indien occidental et de l'accord régional sur la coordination des opérations en mer dans l'océan Indien occidental (n° 385)
(Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure)
Nous en venons à présent à l'examen par notre commission du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'accord pour la mise en place d'un mécanisme d'échange et de partage de l'information maritime dans l'océan indien occidental et de l'accord régional sur la coordination des opérations en mer dans l'océan indien occidental, pour lequel je donne la parole à notre rapporteure.
Les deux accords que je vous présente ce matin visent à améliorer la réponse apportée à l'insécurité maritime dans la partie occidentale de l'océan indien.
La France, pays riverain, compte 1 million de ressortissants dans cette région ; elle y détient un quart de sa zone économique exclusive (ZEE) et possède deux bases militaires, à Djibouti et à La Réunion ; une part importante de nos approvisionnements y transite. Nous nous efforçons donc de nous y intégrer grâce à des actions de coopération ou par l'intermédiaire d'organisations régionales.
Tous les pays de la région sont confrontés à un défi commun : l'insécurité maritime. Si l'on pense spontanément à la piraterie au large de la corne de l'Afrique ou au terrorisme dans le canal du Mozambique, les menaces sont en réalités multiples : contrebande, trafic de drogue, d'armes ou de personnes, pêche illicite…
Depuis des années, l'Union européenne est l'un des principaux pourvoyeurs de sécurité maritime dans l'océan indien occidental. Elle améliore la connaissance du domaine maritime et contribue à lutter contre les pirates grâce à l'opération Atalante.
Dans le cadre de sa récente stratégie indo-pacifique, l'Union a installé une présence militaire coordonnée, qui vise à optimiser le déploiement des marines européennes dans la zone, sur le modèle de ce qui existe dans le golfe de Guinée.
On note néanmoins ces dernières années une volonté croissante des pays riverains d'assurer eux-mêmes une part plus importante de la sécurisation maritime de la région. Ces efforts ont convergé dans le programme pour la promotion de la sécurité maritime (MASE), qui peut être considéré comme le socle de l'architecture de la sécurité maritime dans la partie occidentale de l'océan indien.
Ce programme dispose de deux caractéristiques qui le distinguent de l'action conduite par l'Union européenne : il ne dépend pas d'une impulsion extérieure à la région et il traite tout le spectre de l'insécurité maritime, et pas seulement la piraterie et le terrorisme.
Les deux accords que nous examinons aujourd'hui s'inscrivent dans le cadre de ce programme, qu'ils ont vocation à renforcer. Le premier vise à développer le partage de l'information maritime afin d'améliorer le suivi des activités des bateaux dans la zone ; il prévoit que les États parties établissent un cadre pour échanger des informations tout en veillant à l'intégrité et à la confidentialité de celles-ci. Le second tend à renforcer la coordination des opérations en mer. Par exemple, grâce à cet accord, un navire français ayant à son bord des agents de sécurité français et malgaches et guidé depuis les Seychelles pourra réaliser une mission de sauvetage en mer ou arraisonner une embarcation soupçonnée de trafic de stupéfiants.
Ces deux accords disposeront d'une assise institutionnelle puisqu'ils prévoient la création de deux centres régionaux : le premier, responsable de la fusion de l'information maritime, à Madagascar ; le second, chargé de la planification des opérations en mer, aux Seychelles.
L'élan en faveur de la coopération régionale est toutefois tempéré par la volonté de préserver la souveraineté des États parties.
D'abord, tout échange d'information maritime restera à la discrétion des États. En d'autres termes, il n'y a aucune obligation.
Ensuite, des réserves sont autorisées. La France prévoit ainsi d'en faire usage pour exclure toute information classifiée du champ des informations pouvant être communiquées dans le cadre de ces accords.
Enfin, les formes de coopération les plus poussées, comme celles permettant d'embarquer des forces de sécurité d'un État sur le navire d'un autre État, nécessiteront la conclusion d'accords complémentaires.
Si ce nouveau cadre normatif est satisfaisant, il ne s'agit que d'une première étape. Sa mise en œuvre nécessitera une réelle volonté politique de la part tant de la France, qui devra consentir les moyens administratifs et budgétaires nécessaires pour jouer son rôle dans la coopération régionale, que des autres États riverains, dont les ressources sont plus limitées que les nôtres.
Je voudrais, pour finir, appeler l'attention de la commission sur la nécessité de renforcer la lutte contre ce fléau qu'est la surpêche. Il ne s'agit pas là de relativiser les autres menaces, comme la piraterie. Cependant, si celle-ci a fortement diminué au cours des dernières années, ce n'est le cas ni de la surpêche ni de la pêche illégale.
Or l'océan indien est une zone particulièrement sensible de ce point de vue car beaucoup de populations des pays côtiers dépendent de la pêche pour leur subsistance. Les études montrent aussi qu'il s'agit d'une des régions du monde les plus exposées aux conséquences du changement climatique.
La France étant l'un des principaux acteurs de la pêche industrielle dans ce secteur et ses bateaux utilisant des méthodes destructrices pour l'environnement, elle a une responsabilité particulière en la matière. La surpêche a pour effet non seulement de dégrader l'environnement mais aussi de renforcer l'insécurité maritime. En privant les populations locales de moyens de subsistance, elle contribue à l'insécurité alimentaire et à l'instabilité politique. En ne donnant pas aux pêcheurs locaux les moyens de nourrir leur famille, elle alimente la piraterie et le trafic de drogue.
S'il est vrai que ces accords incluent la lutte contre les atteintes à l'environnement marin dans leur champ d'application, encore faut-il qu'ils soient mis en œuvre. Et s'ils prévoient de s'attaquer à la pêche illégale, ils n'abordent pas la question de la surpêche, dont une grande part reste légale.
C'est pourquoi, si je vous invite à voter en faveur du projet de loi, j'émets aussi des réserves et appelle à l'adoption de normes internationales, régionales et françaises plus contraignantes, au renforcement de la transparence en matière de pêche industrielle et à l'interdiction des méthodes de pêche les plus nocives pour l'environnement.
L'océan indien, espace stratégique traversé par la plus importante route commerciale du monde, se trouve au cœur de rivalités entre États. Cet espace maritime doit être sûr pour permettre la libre circulation des marchandises et préserver le fonctionnement de l'économie mondiale. Cette sécurité garantit à nos départements et régions d'outre-mer – Mayotte et La Réunion – la possibilité de s'approvisionner et de commercer sans entraves.
Nous devons donc soutenir le programme de sécurité maritime MASE et les accords de coopération qui en découlent. La France pourra ainsi participer aux actions du centre régional de fusion d'informations maritimes à Madagascar et du centre régional de coordination des opérations aux Seychelles, qui sont déjà opérationnels. Elle jouera ainsi un rôle de premier plan dans la coopération et la coordination des États côtiers et dans la surveillance maritime de l'océan indien occidental.
La France ayant émis des réserves suffisantes pour que soit prise en compte sa législation en matière d'information, de matériel classifié, de pouvoir de police, de compétence juridictionnelle et de coopération judiciaire, le groupe Horizons et apparentés votera en faveur du projet de loi.
Madame la rapporteure, pensez-vous qu'un accord relatif à la sécurité maritime soit l'outil le plus approprié pour engager une coopération en matière de lutte contre la surpêche et contre les effets de la pêche industrielle ? Ne devrait-on pas plutôt privilégier des accords spécifiquement dédiés aux questions environnementales ?
C'est une question intéressante que l'on pourrait reformuler ainsi : pour faire avancer une cause, doit-on se jeter sur tout ce qui est à notre portée ou respecter la spécificité des instruments ?
La sécurité maritime et la lutte contre la surpêche ne me semblent pas exclusives l'une de l'autre. Je pense que, pour mettre fin à ce fléau, il faut utiliser tous les leviers et outils disponibles : en l'occurrence, l'échange d'informations, voire l'intervention directe. Dès lors qu'on a identifié des bateaux qui se rendent coupables de surpêche ou qui utilisent des méthodes susceptibles d'être interdites, je pense qu'on doit transmettre l'information et intervenir rapidement. Cela ne nous empêche pas d'élaborer d'autres stratégies et de conclure d'autres partenariats, éventuellement bilatéraux, sur cette question spécifique.
Je tiens à remercier la rapporteure pour son travail sur la zone de l'océan indien depuis le début de la législature.
Du fait des problèmes de sécurité, de commerce et d'exploitation des fonds marins auxquels elle est confrontée, cette zone trop souvent oubliée par un État français très centré sur l'Hexagone nécessite toute notre attention. La Commission de l'océan indien (COI), dont nous avons discuté il y a quinze jours, est la principale organisation de coopération dans la région. J'en profite donc pour remercier le président Bourlanges pour le courrier qu'il a adressé à la ministre de l'Europe et des affaires étrangères et dans lequel il était fermement rappelé qu'il fallait que Mayotte soit pleinement intégrée à la COI.
Il n'est pas évident, au premier abord, que les deux accords qui nous sont soumis prennent en considération cette question. En effet, ils traitent des deux derniers volets du programme MASE, visant à fournir les ressources nécessaires au renforcement de la sécurité maritime ; or ce programme est lui-même placé sous la responsabilité administrative de la COI. Toutefois, MASE est doté d'une autorité décisionnelle indépendante et son périmètre d'action inclut bien La Réunion et Mayotte. Il convient néanmoins de rester vigilant sur cette question, à laquelle le groupe Écologiste est très attaché.
Je voudrais revenir sur la question de la surpêche. Disposant de ressources halieutiques importantes, Mayotte est soumise, en matière de pêche, à une politique tiraillée entre plusieurs paramètres et exposée à de nombreuses tensions. En parallèle, l'océan indien est une zone particulièrement exposée aux effets de la surpêche. Les pêcheurs mahorais peinent à se constituer en filière et à s'adapter à une réglementation française souvent complexe. Depuis début 2021, chaque bateau doit ainsi avoir à son bord un capitaine de nationalité française. En outre, la pêche locale a lieu dans les mêmes eaux que la pêche industrielle, ce qui pose problème. Les industriels thoniers présents dans la région épuisent les stocks d'albacore déjà surexploités. Un accord entre l'Union européenne et les Seychelles a autorisé huit navires à pêcher dans les eaux de Mayotte. Les conséquences environnementales de ces véritables aspirateurs de l'océan sont désastreuses et les compensations financières sont utilisées par la France hexagonale, et non par le département.
Si nous les soutenons, les accords que nous examinons sont insuffisants pour répondre au problème de la surpêche dans cette partie du monde. Il est nécessaire que la pêche soit réglementée de manière bien plus stricte. Laissons aux petits pêcheurs la capacité d'exister. Nous devons nous saisir à bras-le-corps de ce problème, qui a des répercussions sur une partie de la France abandonnée depuis trop longtemps.
S'agissant de la question de Mayotte, l'étude d'impact du projet de loi comporte une ambiguïté puisqu'il y est écrit que la France participe au programme MASE au titre de La Réunion mais que le périmètre d'application de l'accord inclut Mayotte. Ce dernier point m'a été confirmé par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères. Même si le secrétariat des programmes est confié à la COI, on peut donc estimer, a priori, que Mayotte y est pleinement intégrée.
Il faudrait avancer rapidement et de manière coordonnée dans la lutte contre la surpêche. Les techniques actuelles de pêche, telles que le dispositif de concentration de poissons, utilisé y compris dans les aires marines protégées, assèchent complètement les ressources des territoires environnants et posent un problème non seulement environnemental mais aussi économique. J'espère que nous aurons l'occasion de revenir sur la question.
Merci, Madame la rapporteure, pour votre travail et pour l'engagement du groupe Écologiste en faveur de Mayotte. L'application du programme MASE à Mayotte et l'exploitation des réserves halieutiques dans la région sont des sujets extrêmement importants, et je ne peux qu'aller dans votre sens. Les réponses du Quai d'Orsay sont très ambiguës et à l'image de son comportement quant à l'intégration de Mayotte dans son environnement régional. Par ailleurs, il est précisé dans les accords que ces derniers ne supposent aucune acceptation d'une revendication territoriale, or les Comores revendiquent Mayotte. Ce garde-fou paraît étonnant dans des accords de coopération.
Nous avons des réserves au sujet de ces accords. Comme l'a souligné Aurélien Taché, la surpêche dans la région conduit à une diminution des réserves halieutiques pour les pêcheurs de Mayotte et l'alimentation de la population, qui dépendait principalement du poisson, repose désormais sur de la viande importée, ce qui a aussi un impact sur le pouvoir d'achat. Il faut travailler ensemble sur ces questions et demander au Quai d'Orsay de nous apporter des précisions écrites sur l'application du programme MASE à Mayotte, de manière explicite, en ne se contentant pas de faire référence à une zone géographique.
Vous connaissez mon attachement à une pleine intégration de Mayotte dans les accords portant sur cette zone.
Il est effectivement écrit, noir sur blanc, que ces deux accords n'impliquent aucune acceptation de revendications territoriales : c'est un garde-fou important.
Selon le Quai d'Orsay, le périmètre d'application inclut Mayotte mais je m'engage à demander, d'ici à l'examen du projet de loi en séance, une confirmation écrite de la pleine intégration de Mayotte, afin que nous puissions nous prononcer d'une manière totalement claire et transparente. Il y a, en effet, une certaine ambiguïté dans l'étude d'impact, qui n'évoque d'abord que La Réunion avant de citer également Mayotte.
Nous n'allons peut-être pas écrire toutes les semaines au Quai d'Orsay. Vous avez un autre moyen, très simple, à votre disposition : pour le moment, ce projet de loi doit faire l'objet de la procédure d'examen simplifiée en séance, mais votre groupe peut demander que cela ne soit pas le cas et vous pourrez alors poser la question au Gouvernement. Cela me paraît la meilleure manière de procéder.
S'agissant de l'accord relatif à la COI, qui devait être examiné cet après-midi, nous avions demandé qu'il y ait un débat en séance publique afin de pouvoir parler de l'intégration de Mayotte mais ce débat n'aura finalement pas lieu. En demandant une clarification écrite, nous éviterions une telle manœuvre d'évitement.
On ne peut pas dire que notre commission n'a pas été entendue au sujet de l'accord relatif à la COI. Nous avions demandé qu'il ne soit pas approuvé sans de plus amples échanges, à l'Assemblée et avec les parties prenantes à la COI. Je me réjouis que le Gouvernement nous ait entendus cinq sur cinq, si je puis dire. Nous pourrons aborder toutes ces questions lorsque le texte sera inscrit à l'ordre du jour.
Une demande de clarification écrite ne recevrait pas nécessairement de réponse. En revanche, nous informerons le Quai d'Orsay que la question sera soulevée en séance et qu'il serait bon de préparer la réponse du Gouvernement.
Tous les accords permettant de renforcer notre présence dans l'océan indien et dans la zone pacifique méritent d'être soutenus, et mon groupe salue le travail du Gouvernement en la matière. Comme il y a quinze jours, la question politique qui se pose concerne l'intégration de Mayotte au sein des dispositifs. La réponse du Quai d'Orsay est claire : Mayotte est intégrée dans les accords que nous examinons. L'article 1er de chacun d'eux précise que l'espace concerné est « l'ensemble des zones maritimes et de l'espace aérien surjacent relevant de la juridiction exclusive ou de la souveraineté ou des droits souverains des États Parties conformément à leurs législations nationales respectives, ainsi que les espaces de haute mer et l'espace aérien surjacent englobés dans la zone d'intérêt générale […] définie par les limites suivantes : a) Longitudes 20° Est et 76,5° Est. b) Latitudes 26° Nord et 37° Sud ». Après vérification, cela intègre Mayotte et je pense que le Gouvernement confirmera mes dires. Nous n'aurons donc pas de difficultés à voter ce texte.
Grâce au département de La Réunion, à celui de Mayotte et aux Terres australes et antarctiques françaises, qui comptent près de 1 million de compatriotes et plus de 1 million de kilomètres carrés de zone économique exclusive, la France est l'une des puissances majeures de l'océan indien, où nous avons des intérêts stratégiques, tout particulièrement dans la partie occidentale, qui va du détroit d'Ormuz au cap de Bonne-Espérance. Les pays côtiers, continentaux comme insulaires, subissent d'énormes difficultés, allant des problèmes de construction étatique et de développement à la piraterie, en Somalie, à la guerre, au Yémen, en passant par l'immigration clandestine en provenance des Comores, ainsi que l'instabilité politique chronique. La Réunion et Mayotte, bien que mises de côté par les gouvernements successifs, qui se désintéressent de nos compatriotes ultramarins, sont des îlots de stabilité dans un océan indien en proie à des crises politiques, sociales, économiques et sécuritaires.
La France, par égard pour ses citoyens réunionnais et mahorais, mais aussi en vertu de son statut de grande puissance, a le devoir de participer à la stabilisation d'une zone maritime importante pour ses ressortissants, pour ses intérêts et pour l'activité économique mondiale. Les problèmes sécuritaires majeurs de cette zone ont conduit de nombreuses puissances, dont la France, à se joindre à des opérations multinationales thématiques, telles que l'opération Atalante de l'Union européenne. Le programme MASE créé sous le patronage de la Commission de l'océan indien, vise à suppléer ces opérations multinationales et, à terme, à créer une architecture de sécurité maritime régionale.
Les accords que nous examinons ont trait, pour l'un au partage d'informations, pour l'autre à la coordination des opérations en mer. Le Rassemblement national souscrit pleinement à leur philosophie et à leur contenu, ainsi qu'aux réserves légitimes qui ont été émises par la partie française, afin de veiller au respect de notre législation. Nous voterons pour le projet de loi mais nous souhaitons exprimer de nouveau nos inquiétudes quant à l'exclusion de Mayotte de la COI. Nous nous réjouissons du retrait du projet de loi relatif à cette structure de coopération et nous appelons le Gouvernement à faire preuve de fermeté face aux revendications comoriennes, en vue d'aboutir à un nouvel accord incluant bel et bien Mayotte. Nous ne pouvons transiger sur le statut de nos compatriotes mahorais.
La zone couverte par ces accords, l'ouest de l'océan indien, est une zone de transit incontournable, qui compte aussi des ressources halieutiques importantes et est confrontée à des enjeux sécuritaires. Ces derniers concernent directement la France, puisque nous disposons, dans cette région, de 1 million de kilomètres carrés de zone économique exclusive. Les accords que nous examinons répondent donc à une nécessité et s'inscrivent dans la continuité d'efforts de coopération enclenchés il y a une quinzaine d'années, ce dont nous nous réjouissons. Cependant, comme vous l'avez souligné, Madame la rapporteure, des problèmes subsistent, notamment celui de la surpêche. À ce stade, compte tenu du flou relatif à Mayotte, notre groupe s'abstiendra.
Madame la rapporteure, le recours à la COI dans le cadre du programme MASE a-t-il une incidence particulière sur l'application de celui-ci dans les eaux territoriales situées autour de Mayotte ?
La stratégie de la France dans l'Indo-Pacifique repose sur quatre piliers : la sécurité et la défense, l'économie et la connectivité, le multilatéralisme et l'État de droit et, enfin, le changement climatique, la biodiversité et la gestion durable des océans, sujets auxquels nous savons que vous êtes sensible. Comment le premier pilier, la sécurité et la défense peut-il s'articuler avec le quatrième, c'est-à-dire les enjeux écologiques ?
Lorsque j'ai constaté que le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord relatif à la COI avait été retiré de l'ordre du jour de l'Assemblée nationale, je me suis demandé quelle incidence cela aurait sur les deux accords qui nous sont soumis aujourd'hui. Ce projet de loi visait une évolution de la COI ; l'existence de cette organisation n'est pas remise en cause par son retrait. Ainsi, le retrait du premier texte n'aura pas d'impact sur celui que nous examinons aujourd'hui. Le seul sujet de préoccupation est l'intégration de Mayotte. L'étude d'impact comporte – je l'ai dit – une ambiguïté sur ce point, et c'est pourquoi nous avons besoin de plus de précisions.
S'agissant de votre seconde question, nous devons travailler sur tous les axes dans cette zone car on ne peut pas les isoler. Tout est lié : la surpêche assèche complètement les filières, ce qui entraîne de la pauvreté, de l'instabilité politique, puis conduit à la violence et à des trafics. Il faut agir sur les causes de l'instabilité et de la violence, tout en apportant des réponses en matière de défense et de sécurité. Ces accords – je l'ai dit – ne constituent qu'une première étape : beaucoup de travail devra encore être réalisé pour qu'ils soient effectifs. Les États parties devront faire preuve de volonté politique, et il faudra parvenir à instaurer de la confiance entre eux pour échanger des informations sensibles.
En renforçant la coopération maritime avec ses partenaires de l'océan indien, la France renforce également ses positions et son influence dans un des endroits les plus stratégiques du monde. L'évolution proposée dans le cadre de ces accords semble donc aller dans le bon sens. Si la menace des pirates, notamment ceux venant de Somalie, est moins importante que dans les années 2000, grâce à la coopération internationale, ce phénomène n'a pas totalement disparu. Les causes subsistent, en particulier le délitement de l'État somalien, la très grande pauvreté d'une partie de la Corne de l'Afrique et l'importance du trafic maritime dans l'océan indien occidental La menace islamiste reste aussi très forte dans cette région, ce qui a notamment conduit TotalEnergies à ajourner, en 2021, un projet au Nord du Mozambique. La partie occidentale de l'océan indien est sujette à de multiples risques. L'intérêt de ces accords de coopération est qu'ils permettront d'anticiper des menaces potentielles.
J'abonde dans le sens de madame la rapporteure pour ce qui est de la dimension environnementale. Même si ce n'est pas l'objectif premier de ces accords, il est évident qu'une coopération maritime moderne doit s'intéresser à la surpêche et à la pollution des mers. Les conséquences de la pêche surintensive doivent ainsi nous conduire à ne pas nous limiter à la pêche illégale. Il faudra veiller à ce que les prochaines évolutions de la coopération dans l'océan indien intègrent l'ensemble de ces enjeux environnementaux. C'est désormais la base de toute discussion.
En dernier lieu, je souhaite vous interroger sur les réserves émises par la France au sujet de l'échange et du partage d'informations maritimes, ainsi que sur l'emploi de la force ou de la contrainte par nos partenaires dans les eaux françaises.
Je ne peux qu'être d'accord avec vous en ce qui concerne l'enjeu environnemental et climatique, en particulier la surpêche dans cette partie du monde.
La France a effectivement émis une réserve concernant l'échange d'informations : elle ne s'engage pas à transmettre des éléments classifiés. Nous sommes au début d'un processus. Avant d'aller plus loin, il faudra un temps de travail en commun et la confiance devra se développer.
S'agissant du second point, un bateau pourra embarquer des officiers d'un autre État mais il faudra des conventions particulières pour mettre en œuvre cet aspect. Cela viendra aussi dans un second temps.
Avec La Réunion, Mayotte et les Terres australes et antarctiques françaises, notre pays possède plus de 1 million de kilomètres carrés de zone économique exclusive dans l'océan indien. La France y est aussi présente militairement, par l'intermédiaire de ses bases à La Réunion et à Djibouti, ainsi que par les nombreux accords de défense qui nous lient avec les États insulaires de cette partie du monde.
Le programme MASE est le seul programme régional qui couvre l'ensemble des aspects de la sûreté et de la sécurité maritimes ; il en existe d'autres plus spécialisés. Ce programme a bénéficié de 42 millions d'euros dans le cadre du Fonds européen de développement pour les années 2013-2022. La particularité de ce programme est d'assurer la sécurité maritime par l'échange d'informations et la coordination d'opérations en mer mais aussi et surtout de chercher à rendre les États parties autonomes, à terme, par rapport aux capacités et aux moyens européens, afin qu'ils puissent prendre en mains leur propre sécurité.
Les deux accords que nous examinons ne sont qu'une des composantes du programme MASE, lequel repose en outre sur la participation d'autres pays, notamment d'Afrique continentale.
L'accord relatif à l'échange d'informations a pour objectif d'assurer une meilleure connaissance de la situation du trafic maritime et une lutte plus efficace contre les différents types de menaces, en s'appuyant sur le Centre régional de fusion d'informations maritimes, situé à Madagascar, qui a pour but de fusionner toutes les informations et données de géolocalisation des navires au sein d'une même interface.
L'accord relatif à la coordination des opérations vise à lutter contre la piraterie maritime et les trafics d'armes et de stupéfiants mais aussi à mener des opérations de recherche et de sauvetage en mer ainsi que de protection de l'environnement marin. Des agents des services répressifs pourront embarquer à bord des navires d'autres États et la mise en œuvre de l'accord fera également appel à un Centre régional de coordination des opérations, basé aux Seychelles.
Les députés du groupe Socialistes et apparentés voteront, comme nos collègues du Sénat, en faveur du projet de loi.
Je remercie tous nos collègues qui ont indiqué qu'ils voteraient pour l'approbation de ces deux accords et qui portent une attention particulière à Mayotte, ainsi qu'aux questions environnementales. J'espère que nos bateaux dans cette région seront exemplaires et que nous pourrons engager un travail transpartisan sur la question de la surpêche, afin de limiter les catastrophes en cours dans cette filière.
Article 1er (approbation de l'accord pour la mise en place d'un mécanisme d'échange et de partage de l'information maritime dans l'océan Indien occidental du 29 avril 2018)
La commission adopte l' article 1er non modifié.
Article 2 (approbation de l'accord régional sur la coordination des opérations en mer dans l'océan Indien occidental du 29 avril 2018)
La commission adopte l' article 2 non modifié.
Elle adopte ensuite l'ensemble du projet de loi sans modification.
La séance est levée à 12 h 45
Membres présents ou excusés
Présents. - M. Damien Abad, Mme Nadège Abomangoli, Mme Chantal Bouloux, M. Jean-Louis Bourlanges, M. Jérôme Buisson, M. Alain David, Mme Julie Delpech, M. Pierre-Henri Dumont, M. Frédéric Falcon, M. Nicolas Forissier, M. Bruno Fuchs, M. Guillaume Garot, Mme Maud Gatel, Mme Olga Givernet, M. Philippe Guillemard, M. Michel Guiniot, Mme Marine Hamelet, M. Joris Hébrard, M. Michel Herbillon, M. Hubert Julien-Laferrière, Mme Brigitte Klinkert, Mme Stéphanie Kochert, Mme Amélia Lakrafi, M. Arnaud Le Gall, Mme Marine Le Pen, M. Sylvain Maillard, Mme Emmanuelle Ménard, M. Nicolas Metzdorf, Mme Nathalie Oziol, M. Bertrand Pancher, M. Frédéric Petit, M. Kévin Pfeffer, M. Jean-François Portarrieu, M. Adrien Quatennens, Mme Laurence Robert-Dehault, Mme Laetitia Saint-Paul, Mme Sabrina Sebaihi, M. Vincent Seitlinger, Mme Ersilia Soudais, Mme Michèle Tabarot, M. Aurélien Taché, Mme Laurence Vichnievsky, M. Patrick Vignal, M. Lionel Vuibert, M. Christopher Weissberg, M. Éric Woerth, Mme Caroline Yadan, Mme Estelle Youssouffa, M. Frédéric Zgainski
Excusés. - M. Louis Boyard, M. Moetai Brotherson, M. Sébastien Chenu, M. Nicolas Dupont-Aignan, M. Olivier Faure, M. Meyer Habib, M. Tematai Le Gayic, M. Jean-Paul Lecoq, M. Vincent Ledoux, M. Laurent Marcangeli, Mme Mathilde Panot, Mme Liliana Tanguy