Nous soutenons par principe ce type de textes car la coopération judiciaire est fondamentale à l'échelle internationale. Pour autant, en l'état actuel du projet de loi, nous voterons contre son adoption.
Je ne vous rejoins pas, Monsieur le rapporteur, quand vous dites que l'on peut séparer le politique du judiciaire. L'opposition sénégalaise est extrêmement inquiète des dérives du président Macky Sall, lesquelles risquent de s'aggraver puisque l'on sait qu'il envisage d'effectuer un troisième mandat ; elle nous supplie de ne pas approuver ces conventions en l'état. Cela ne signifie pas qu'il faille les rejeter en bloc, et l'opposition propose des amendements visant à mieux définir le terrorisme. Pour Macky Sall, tout opposant politique est un terroriste. J'entends ce que vous dites sur le fait que ce sera au juge français de décider mais, si la situation de départ est aussi confuse, il y a tout lieu de s'inquiéter de la manière dont s'opéreront les extraditions. Amnesty International nous alerte également sur l'extension de la définition du terrorisme au Sénégal. Monsieur Taché a rappelé les morts pendant les manifestations et l'interdiction systématique des rassemblements d'opposition. Ce texte intervient au mauvais moment et avec le mauvais interlocuteur.
Il y a un grand malentendu sur la question de la coopération entre la France et l'Afrique : l'immense majorité des peuples africains n'ont rien contre la France en général mais ils lui reprochent de soutenir des dirigeants qu'ils détestent. Au Sénégal, les vagues de violences antifrançaises, que je dénonce, sont alimentées par des gens comme Kémi Séba, mais elles se sont formées au moment où la France donnait, à tort ou à raison, l'impression de soutenir Macky Sall contre une opposition qui est, à mon avis, majoritaire dans le pays. Le déplacement de madame Le Pen ne changera rien à l'affaire car les populations ne reprochent pas à la France d'être en Afrique mais de soutenir certains régimes. Il s'est d'ailleurs passé la même chose au Tchad.
Ce texte intervient au plus mauvais moment et il n'est pas rédigé comme il faudrait. Voilà pourquoi nous avons demandé de sortir du cadre de la procédure d'examen simplifiée. Il importe d'avoir un vrai débat sur la coopération entre la France et les pays africains.