La commission entend M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances, et de la souveraineté industrielle et numérique, et M. Gabriel Attal, ministre délégué chargé des comptes publics, sur le programme de stabilité présenté aux institutions européennes ainsi que sur le projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2022 (n° 1095) et le projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2021 (n° 1094) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général).
Comme nous sommes en période de suspension des travaux de l'Assemblée, nous tenons une réunion hybride, à la fois dans la salle de la commission et en visioconférence, afin de permettre aux députés éloignés de Paris de participer à cette audition.
Je remercie Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, et Gabriel Attal, ministre délégué, chargé des comptes publics, d'avoir répondu à la traditionnelle invitation de notre commission à présenter le programme de stabilité, délibéré ce matin même en conseil des ministres et qui nous a été communiqué. Certains chiffres nous avaient déjà été transmis la semaine dernière, par Bruno Le Maire, ce qui fait que les membres de la commission avaient déjà eu des informations.
Je précise que, du fait de la réforme organique du 28 décembre 2021, le rapport sur les orientations des finances publiques n'est plus un document distinct : il est intégré au programme de stabilité.
Ont également été délibérés, dès le 13 avril, le projet de loi de règlement du budget pour 2022, ainsi qu'un nouveau projet de loi de règlement du budget pour 2021.
Après cette audition, la séquence relative aux orientations et à la programmation des finances publiques se poursuivra avec un débat en séance publique, le mercredi 10 mai, comme le permet l'article 1er K de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). Il nous semblait important d'évoquer ces sujets en commission des finances pour avoir le loisir d'interroger les ministres afin de préparer au mieux le débat du 10 mai.
Le programme de stabilité est l'occasion d'évoquer les objectifs et les hypothèses retenus par le Gouvernement pour élaborer une stratégie budgétaire. Le programme de stabilité que vous nous avez communiqué établit ainsi une trajectoire jusqu'en 2027.
Le solde des administrations publiques, qui s'est finalement établi à – 4,7 % en 2022, devrait être plus dégradé en 2023, puisqu'il serait porté à – 4,9 %. Néanmoins, la réduction ultérieure du déficit public, d'environ 0,5 point de PIB par an, permettrait d'atteindre un déficit inférieur à 3 % en 2027. De même, la dette publique se stabiliserait à un niveau inférieur à 109 % du PIB en 2027 et la dépense publique décroîtrait en part du PIB pour passer sous la barre des 54 % en 2027, alors qu'elle est de 56 % en 2023.
Il serait intéressant de comprendre comment une trajectoire qui semble assez mal partie pour 2023, du fait d'un creusement du déficit public par rapport à 2022, pourrait autant s'améliorer à partir de 2024.
Je suis très heureux de vous présenter, avec le ministre délégué chargé des comptes publics, Gabriel Attal, le programme de stabilité, tel que nous le transmettrons à nos partenaires européens. Il marque notre volonté d'accélérer le désendettement de la France. S'il y a une chose à en retenir, c'est en effet que le niveau de la dette publique sera inférieur de 4 points par rapport au précédent programme de stabilité, ce qui traduit notre détermination à accélérer la réduction des déficits et de la dette publique. Nous faisons ce choix d'accélérer le désendettement après avoir protégé massivement nos compatriotes.
Nous l'avons fait à deux reprises, d'abord pendant la crise du covid, avec le « quoi qu'il en coûte ». Nous avons alors dépensé 240 milliards d'euros, soit environ 10 % de notre richesse nationale. Ce choix du Président de la République a permis d'éviter des vagues de faillites et une explosion du chômage, et nous a permis de réussir, mieux que tous nos partenaires européens, la relance économique qui a suivi, à hauteur de 100 milliards d'euros. Nous sommes, je le rappelle, la première nation de la zone euro à avoir retrouvé son niveau d'activité d'avant-crise à la fin 2021.
La deuxième crise à laquelle nous avons répondu, c'est celle de l'inflation, avec le bouclier tarifaire. Ce bouclier, qui était la principale mesure destinée aux ménages, a permis à ces derniers d'économiser entre 180 et 200 euros par mois sur l'augmentation des factures de gaz et d'électricité. La politique que nous avons menée a eu un coût de 44 milliards d'euros, dont 24 milliards pour le bouclier tarifaire, qui a été en partie compensé par la taxation des surprofits des entreprises énergéticiennes.
La conséquence de ce choix de protection, c'est une forte augmentation des dépenses publiques : le déficit s'est établi à 6,5 % en 2021 et la dette a progressé de 16 points entre 2019 et 2021, passant de 97 % à 113 % du PIB. Contrairement à celle liée à la crise financière de 2008-2010, cette augmentation de la dette publique se situe dans la moyenne des autres pays européens. Au cours de la même période, de 2019 à 2021, la dette publique allemande a augmenté de 10 points, celle de l'Italie, de 16 points, et celle de l'Espagne, de 20 points. Le décrochage de la dette publique française par rapport à celle de nos voisins européens remonte à la crise financière de 2008-2010, et non à la crise du covid.
En 2022, nous avons commencé à rétablir les comptes : le déficit a alors été de 4,7 %, soit 0,3 point de moins que ce qui était prévu, et la dette a commencé à baisser, passant de 113 % à 111,6 % du PIB. En 2023, nous avons fait le choix d'accélérer ces réductions, en ciblant davantage les dépenses et en sortant définitivement du « quoi qu'il en coûte ». Nous avons notamment remplacé des mesures générales par des mesures ciblées, le meilleur exemple étant la remise sur les carburants, qui était de 30 centimes par litre pour tous nos compatriotes : elle est devenue une indemnité carburant de 100 euros, réservée aux personnes qui travaillent. Le coût du bouclier sur l'essence, en passant de 8 milliards en 2022 à moins de 1 milliard en 2023, a ainsi été divisé par huit.
Nous voulons maintenant accélérer la maîtrise des dépenses publiques et le désendettement de la France. Alors qu'en juillet 2022, nous avions comme objectif d'atteindre 2,9 % de déficit public en 2027, nous nous fixons désormais un objectif de 2,7 %. S'agissant de la dette, notre objectif pour 2027 passe de 112,5 % à 108,3 % du PIB, soit 4 points de moins. L'accélération du désendettement de la France vient d'être saluée par le Haut Conseil des finances publiques (HCFP).
Ces objectifs nouveaux et plus exigeants sont évidemment fixés sans toucher à nos prévisions de croissance. Nous ne jouons pas sur ce facteur pour modifier le ratio de dette publique. La croissance potentielle reste fixée à 1,35 %.
Pourquoi prenons-nous la décision d'accélérer le désendettement ? Nous le faisons pour trois raisons.
La première, c'est la nécessité de reconstituer nos marges de manœuvre dans l'hypothèse où nous devrions faire face, demain, à un nouveau choc et à une nouvelle crise conjoncturelle. Par ailleurs, après avoir demandé à nos compatriotes de faire un effort en matière de durée du travail pour rétablir les équilibres financiers, dans le cadre de la réforme des retraites, il me paraît juste de demander à l'État, aux collectivités locales et aux acteurs publics de faire également un effort pour rétablir les finances publiques.
En deuxième lieu, et c'est sans doute le point décisif, les conditions de financement de notre dette ont radicalement changé : nous sommes dans un nouvel univers monétaire. Notre responsabilité, étant dans la majorité, est de nous confronter à cette réalité monétaire plutôt que de la fuir ou de la nier. La nécessité de lutter contre l'inflation et de revenir à des taux moins pénalisants en la matière pour les Européens, pour nos compatriotes et en particulier pour les catégories les plus modestes, a mis fin à toute politique monétaire accommodante. Le resserrement de la politique monétaire, en Europe comme aux États-Unis, se traduit par une augmentation rapide des taux d'intérêt, à un rythme que l'on n'avait pas connu depuis plusieurs décennies. En douze mois, les taux d'intérêt ont ainsi augmenté de 200 points de base. Alors qu'ils étaient de l'ordre de 1 % à dix ans, ils sont passés à 2,9 ou 3 %.
Voilà la nouvelle réalité financière et monétaire de la France. Elle est évidemment commune à tous les pays de la zone euro et à tous les pays développés, mais elle nous amène à accentuer notre désendettement. La France est, en effet, le premier émetteur de dette de la zone euro, à hauteur de 270 milliards d'euros pour 2023. La charge de la dette est d'autant plus sensible à la variation des taux d'intérêt : 1 point de taux d'intérêt en plus, comme lors des derniers mois, représente 15 milliards d'euros de dépenses supplémentaires au titre de la charge de la dette à l'horizon 2027. C'est de l'argent jeté par les fenêtres ! Ces 15 milliards pourraient être mieux employés pour les hôpitaux, les écoles, les crèches, les universités, c'est-à-dire le service public. Réduire la dette, c'est donc retrouver de la liberté, de la souveraineté.
Enfin, dernière raison, nos partenaires européens se sont engagés dans la même politique. Il me semble, lorsqu'on fait partie d'une zone monétaire, d'un club monétaire qui vous a assuré sa protection pendant la crise du covid, par l'émission de dette en commun, qu'il est préférable de jouer le même jeu que vos partenaires européens. Ils se sont tous, sans exception, engagés dans un rétablissement rapide de leurs finances publiques.
Comment allons-nous mettre en œuvre cette politique ? Notre stratégie repose sur les mêmes piliers que ceux que nous avions utilisés en 2017 et 2018, avec succès, puisque nous avions rétabli les finances publiques. Nous étions revenus, à ce moment-là, sous les 3 % de déficit.
Le premier pilier est la croissance. Nous ne voulons pas d'austérité. Nous n'y croyons pas : lorsque la France a fait le choix de l'austérité, elle a tout perdu, en matière de croissance, de chômage et même, au bout du compte, de finances publiques. Nous voulons simplement ralentir la dépense publique, pour que son évolution ne soit pas supérieure au rythme de l'inflation, et augmenter la prospérité de la France par la croissance.
Pour avoir plus de croissance, nous voulons d'abord continuer à investir. Cela reste un des maîtres mots de notre politique économique : nous voulons continuer à investir dans l'innovation, dans les nouvelles technologies, dans l'industrie verte, dans la décarbonation de notre économie, dans l'intelligence artificielle, dans le calcul quantique, dans tout ce qui fera de la France une des grandes nations qui comptent au XXIe siècle. J'en fais une priorité absolue. Nous pouvons conjuguer rétablissement des finances publiques et maintien d'un haut niveau d'investissement dans l'innovation, et je crois même que l'un est la condition de l'autre. Nous avons donc décidé de sanctuariser les crédits de France 2030 – 54 milliards d'euros –, de maintenir le crédit d'impôt recherche et de développer, comme l'a proposé la Première ministre, un Fonds vert pour les collectivités locales, afin de les aider à investir dans la décarbonation.
La croissance, c'est l'investissement, mais aussi le travail. Nous continuons notre politique de développement du volume global de travail en France, qui reste un des plus faibles de tous les pays développés. La réforme de l'assurance chômage, la réforme des retraites et la création de France travail font partie des moyens d'augmenter le volume global de travail de la nation française pour qu'elle ait plus de prospérité. Il me semble qu'il est cohérent de dire que nous voulons garder un système de redistribution généreux et efficace et de le financer par un volume global de travail plus important.
Enfin, la croissance suppose que nous continuions à baisser des impôts. Nous maintiendrons, par conséquent, la politique que nous avons engagée, avec le Président de la République, depuis six ans. Nous avons supprimé la contribution à l'audiovisuel public, la taxe d'habitation sera définitivement supprimée d'ici à la fin 2023, et nous aurons également supprimé de façon définitive, fin 2024, la CVAE, la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, qui est un impôt de production pesant sur notre industrie.
Cette politique de baisse des impôts permettra de réduire de 1 point le taux des prélèvements obligatoires en France. Il passera de 45,3 % du PIB en 2022 à 44,4 % en 2027. Cette baisse de près de 1 point des prélèvements obligatoires laissera, malgré tout, la France dans le peloton de tête des pays développés pour ce qui est du niveau des taxes et impositions. C'est bien pour cela que nous ne voulons pas varier de ligne.
Le deuxième pilier de l'accélération du désendettement, au-delà de la croissance, est la sortie du bouclier énergétique dans les deux années à venir. Nous voulons sortir du bouclier sur le gaz et du bouclier sur l'électricité progressivement, mais totalement, d'ici début 2025.
Nous commencerons par le bouclier sur le gaz. Les prix en la matière sont revenus à ce qu'ils étaient avant la crise, à savoir 50 euros le mégawattheure. Il n'y a donc pas de raison de maintenir un bouclier sur les prix du gaz.
Nous sortirons progressivement du bouclier sur l'électricité : nous prendrons là plus de temps, car les prix de l'électricité restent encore élevés en France. Nous agirons progressivement d'ici au début de l'année 2025.
Le troisième pilier est le refroidissement de la dépense publique. La dépense publique, de l'État et des collectivités locales, augmentera moins vite que l'inflation.
Nous avons fait le choix de mettre l'accent sur la dépense de l'État. Une des modifications importantes par rapport au précédent programme de stabilité, c'est que le ralentissement des dépenses de l'État sera en moyenne, en volume par an, supérieur au ralentissement de la dépense des collectivités locales – il sera de 0,8 % pour l'État et de 0,5 % pour les collectivités locales. J'insiste sur ce point, parce que les collectivités locales s'étaient émues, à juste titre, que les exigences pour l'État étaient inférieures dans le précédent programme de stabilité, à 0,4 % pour l'État et 0,5 % pour les collectivités locales. Nous avons fait le choix, avec Gabriel Attal, de proposer un ralentissement plus marqué pour les dépenses de l'État.
Le refroidissement de la dépense s'accompagnera de deux éléments de méthode. La revue des dépenses publiques doit, tout d'abord, se conclure par des assises des finances publiques, qui auront lieu fin mai-début juin. Cela nous permettra d'identifier très clairement les dépenses inefficaces ou dont le rendement est insuffisant, afin d'économiser plusieurs milliards d'euros dans le projet de loi de finances pour 2024. Le deuxième élément de méthode est la lettre de cadrage signée par la Première ministre, qui demande à chaque membre du Gouvernement d'identifier 5 % de marge de manœuvre sur son budget.
Ce nouveau programme de stabilité, vous le voyez, marque notre détermination à accélérer le désendettement, qui est un choix politique, au sens le plus noble du terme, de liberté. En effet, il ne peut pas y avoir de liberté pour une grande nation lorsque sa dette est excessive. Le désendettement est une affirmation de notre souveraineté et de notre indépendance.
Vous me permettrez de compléter les propos de Bruno Le Maire au sujet du programme de stabilité et de dire un mot des projets de loi de règlement auxquels cette audition est, je crois, également consacrée.
Le programme de stabilité traduit notre volonté de maîtriser nos finances publiques dans un contexte macroéconomique qui, comme Bruno Le Maire l'a dit, n'a rien à voir avec celui qui nous avait permis de mener le « quoi qu'il en coûte ». Il y a un an, lorsque j'ai pris mes fonctions, la France empruntait encore à un taux d'intérêt d'environ 1 %. Elle emprunte aujourd'hui à plus de 3 %, autrement dit, nos taux d'intérêt ont triplé en deux ans. Aucun pays au monde pourrait ne rien changer quand tout change autour de lui, et il est urgent de reprendre le contrôle en s'engageant résolument sur une trajectoire de désendettement.
Il faut reprendre le contrôle, mais pas de n'importe quelle manière. Nous refusons un réflexe fiscal qui consisterait à augmenter les impôts. Depuis 2017, nous les avons baissés de 50 milliards d'euros : 25 milliards pour les ménages et 25 milliards pour les entreprises. C'est un motif de fierté, d'autant que nous collectons davantage avec des taux plus bas. Nous avons, par exemple, fait passer le taux de l'impôt sur les sociétés de 33 % à 25 %, mais nous collectons plus d'impôt sur les sociétés qu'à l'époque où le taux était de 33 %, parce que la baisse de la fiscalité libère l'activité économique, élargit l'assiette taxable et permet donc davantage de recettes pour l'État.
Nous assumons, par ailleurs, de faire des économies en 2024 et les années suivantes, sans renoncer aux priorités qui ont été fixées. La revue des dépenses que nous avons lancée permettra d'entrer dans le détail de ces économies, mais nous savons d'ores et déjà que nous pouvons mieux faire dans de nombreux domaines. Une lettre de cadrage adressée par la Première ministre à l'ensemble des ministres nous invite à identifier 5 % de marge de manœuvre dans les budgets des ministères. En clair, ce n'est pas de l'austérité, mais tout simplement de la responsabilité.
Bruno Le Maire l'a dit, nous rehaussons nos ambitions concernant le déficit pour 2027. Je crois profondément qu'il n'y a pas d'autre chemin que celui du sérieux budgétaire, car être sérieux, c'est ce qui permet d'être ambitieux pour nos services publics, pour notre école, notre police, notre justice et notre armée, pour lesquelles nous avons engagé un réarmement budgétaire inédit, et ambitieux aussi pour notre hôpital public et nos soignants, qui ont tant donné pendant la crise sanitaire et que nous devons continuer à soutenir.
Enfin, je pense qu'il faut prouver aux contribuables que leur argent est bien employé. Quand la dépense publique d'un pays représente un tel volume, les citoyens sont en droit d'attendre les meilleurs services publics d'Europe. Nous voulons diminuer le poids de la dépense publique par rapport à la richesse nationale : dans le programme de stabilité qui vous est présenté, il passera de 57,5 % du PIB en 2022 à 53,5 % en 2027, mais l'enjeu n'est pas tant de dépenser moins que de dépenser mieux. Beaucoup de Français, en réalité, ont le sentiment de payer beaucoup d'impôts mais de ne pas toujours voir à quoi ils servent.
C'est la raison pour laquelle j'ai lancé hier l'opération « En avoir pour mes impôts », qui permettra de faire une transparence totale et de dire clairement aux Français comment leurs impôts sont dépensés, au niveau national comme au niveau local. Les contribuables pourront retrouver, à l'échelle de leur département, la déclinaison de ce que leurs impôts financent. Ils pourront le savoir dans leur préfecture, dans leur centre des impôts, dans leur espace France service et, bien sûr, sur internet.
Cette opération permet également de lancer une grande consultation grâce à laquelle chaque Français pourra dire directement comment il pense que ses impôts doivent être dépensés, pour quelles priorités et pour quels services publics, mais aussi quelles économies peuvent être réalisées.
Je souhaite, au fond, avec Bruno Le Maire, placer la stratégie de réduction de notre déficit et de notre dette sous le signe de la confiance : la confiance que les Français doivent retrouver dans l'impôt, la confiance dans nos services publics, qui sont notre priorité et que nous voulons hisser de nouveau au premier rang en Europe, et la confiance dans l'État et en sa capacité à lutter contre toutes les fraudes aux finances publiques – c'est l'objet du grand plan que je présenterai prochainement. La première traduction concrète en est le projet de loi de modernisation des pouvoirs de nos douaniers, dont l'examen commencera au Sénat à la fin du mois de mai et devrait débuter ici à la mi-juin.
J'en viens, rapidement, à la question de l'exécution budgétaire. Cette année, la situation est originale, puisque nous présentons pour la première fois deux projets de loi de règlement. Nous devons, en effet, présenter à nouveau le projet de loi de règlement pour 2021 parce que, chacun s'en souvient, il a été rejeté à l'Assemblée nationale en lecture définitive, le 3 août dernier, alors qu'il y avait été adopté lors des deux précédentes lectures. Par ailleurs, nous présentons la loi de règlement pour l'exercice 2022.
Chacun vote évidemment comme il l'entend, mais je veux faire part de la circonspection qui est la mienne face au rejet d'un texte d'exécution budgétaire. Il s'agit, certes, d'un texte financier, et il est naturel que nous ayons des désaccords sur la politique à mener – sinon nous appartiendrions tous à la même famille politique –, c'est-à-dire des désaccords sur l'avenir, mais pas sur la constatation de ce qui s'est produit dans le passé. Je suis conseiller municipal, d'opposition, depuis près de dix ans, et je n'ai pas le souvenir d'avoir voté contre un compte administratif présenté au printemps par la majorité de ma commune, car c'est tout simplement l'état des comptes de l'année précédente. On peut changer l'avenir, mais difficilement le passé.
Quels enseignements pouvons-nous tirer de la photographie de 2022 ? Le premier est l'efficacité de notre politique économique. En nous attaquant au prix de l'énergie, nous avons préservé la croissance économique et donc contribué au dynamisme des recettes, principal facteur de l'amélioration de notre déficit public. Les recettes ont, en effet, progressé de 7,3 % en 2022, après avoir augmenté de 8,4 % en 2021. Cette évolution repose principalement sur la progression de l'impôt sur les sociétés, qui a augmenté de 15,8 milliards d'euros. Cela nous a permis d'atteindre un record : 62,1 milliards ont été prélevés à ce titre l'année dernière, ce qui a fortement contribué à la baisse de notre déficit public, qui est passé de 6,5 % à 4,7 %. La réalité, c'est que nos choix économiques se sont révélés vertueux sur le plan budgétaire. Comme pendant la crise du covid, nous avons fait le choix de la protection des Français face à la vie chère, tout en poursuivant le redressement de nos finances publiques.
Néanmoins, et c'est le deuxième enseignement du projet de loi de règlement pour 2022, le solde des administrations publiques demeure très dégradé, précisément parce que nous avons déployé des moyens considérables pour casser la spirale inflationniste. Au total, pour les années 2021 et 2022, nous avons mis 34,5 milliards sur la table pour lutter contre l'inflation grâce au bouclier énergétique.
Dernier point, nous devons impérativement tenir nos objectifs en matière de finances publiques à l'horizon 2027. Il faudra engager des efforts importants en ce qui concerne la dépense publique. C'est le travail que nous avons lancé, avec Bruno Le Maire, dans le cadre de la préparation du projet de loi de finances (PLF) pour 2024. Nous ne proposons pas, je le rappelle très clairement, l'austérité ; nous défendons seulement la responsabilité.
Les prochaines marches vers les 3 %, à l'horizon 2027, seront plus difficiles à franchir, parce que l'environnement économique n'est plus le même. En 2022, nous avons été portés par une croissance de 2,6 % ; elle s'établira autour de 1 % cette année, dans un contexte de ralentissement mondial, même si la France continue à mieux s'en sortir que la plupart de ses voisins et des autres pays.
Votre volonté, vous l'avez dit, est de désendetter la France et de réduire les déficits. Vous niez le terme de politique d'austérité, mais je maintiens que vous menez une politique d'offre, ce que vous ne contestez pas, et une politique d'austérité. Quand on compare les évolutions que vous proposez pour les dépenses de l'État et des collectivités, c'est-à-dire – 0,8 % pour l'État et – 0,5 % pour les collectivités, et la croissance tendancielle qu'il faudrait pour répondre aux besoins de la population dans les années à venir, notamment compte tenu de la démographie, à savoir 1,2 % selon le Gouvernement et 1,7 % selon l'Institut Montaigne, on voit bien qu'il y aura une cure d'austérité, la plus forte que la Ve République ait connue. Par ailleurs, une baisse de 5 points de PIB d'ici à 2027, en dehors des dépenses liées à la charge de la dette, représenterait 135 milliards d'euros d'économies.
Encore cela ne tient-il pas compte des effets de la loi de programmation militaire. Nous avons auditionné, le 5 avril, Pierre Moscovici, en sa qualité de président du HCFP : il nous a dit que pour tenir les objectifs de la loi de programmation militaire, il faudrait en réalité une baisse de 1,4 % de toutes les autres dépenses de l'État. Je maintiens qu'une telle politique mérite le nom d'austérité. Tout cela dépend, en outre, d'une prévision de croissance, de 1,7 % en 2025-2027, que le HCFP vient de considérer, dans son avis, comme optimiste et de chiffres très certainement sous-estimés en matière d'inflation, puisque vous évaluez celle-ci à 2,6 % en 2024.
Vu la situation, que personne ne nie, c'est-à-dire les différentes urgences auxquelles nous avons affaire, qu'il s'agisse de la transition écologique, de la refondation de l'hôpital public, évoquée par le chef de l'État il y a plus de huit jours, notamment la nécessité de faire en sorte que plus un service d'urgence ne soit engorgé – même si ce n'est pas tant la question de l'engorgement qui se pose, mais plutôt celle de la fermeture de certains services d'urgence, faute de moyens –, ou qu'il s'agisse de l'éducation nationale et de la défense, je crois qu'un programme de stabilité ne devrait pas partir de la question impérieuse de la réduction des déficits. Je ne dis pas qu'il ne faut pas les réduire, mais que ce n'est pas ce qui devrait être fixé en priorité ; c'est de la réponse à apporter aux besoins qu'il faut partir. Je continue à considérer qu'après une année 2022 qui a été la plus chaude en mer et sur terre, et au cours de laquelle nous avons atteint un record de fonte des glaciers, notamment en France, la question de la dette écologique que nous laisserons à nos enfants est bien plus importante que celle de la dette financière.
S'agissant du déficit, vous justifiez le fait de redescendre à 2,7 % du PIB par l'augmentation des taux d'intérêt, mais je vous ferai remarquer qu'ils augmentent moins que l'inflation ; les taux d'intérêt réels restent donc encore négatifs. Vous pouvez également dire qu'il faut absolument, afin de rassurer les marchés, faire en sorte que la dette n'augmente pas de manière inconsidérée, mais je vous ferai également observer que la demande pour nos titres est largement supérieure aux montants offerts. Nous ne sommes donc pas dans une situation de risque telle que cela devrait être la priorité absolue.
Quant à l'idée selon laquelle il serait juste qu'après avoir imposé un effort à nos concitoyens, l'État s'en impose un à lui-même, je rappelle que l'État et les services publics sont au service des citoyens, de telle sorte que ce sont, en dernière instance, nos concitoyens qui en paieraient le prix parce qu'ils bénéficieraient de moins de services publics et de mécanismes de solidarité nationale.
Pour ce qui concerne les dépenses publiques, nous pourrions éventuellement nous entendre sur les moyens de réduire la dette si nous estimions que c'était la priorité. Mais, dès lors que vous excluez de remettre en question les dépenses fiscales, qui ont considérablement augmenté – elles représentent 50 milliards d'euros par an depuis 2017 et devraient atteindre 60 milliards par an pour les cinq prochaines années – et qui, comme le montrent toutes les études, servent davantage à nos concitoyens les plus aisés, notamment aux détenteurs du capital, ce sont évidemment les dépenses publiques qui en pâtissent. À cela s'ajoutent les aides aux entreprises, qui ont atteint environ 200 milliards par an, soit une augmentation de 80 milliards par an en cinq ans, sans contrepartie. Je précise à cet égard que, pour nous, les aides aux entreprises, si elles sont légitimes, doivent néanmoins être ciblées, avec des critères et des contreparties, afin d'éviter qu'elles soient, par exemple, utilisées pour distribuer des dividendes. Il existe là d'autres réserves possibles avant de toucher aux dépenses publiques.
Je rappelle, enfin, que les dépenses publiques sont des recettes. Si la France n'a pas connu de récession après la crise des subprimes, c'est parce que le feu de l'activité économique n'était pas entretenu par le marché privé, mais par les dépenses, car celles-ci, en vertu d'un coefficient multiplicateur, rejaillissent dans toute l'économie en termes d'emplois ou de marchés, par exemple pour le BTP via la construction de logements sociaux. La réduction de ces dépenses induit donc un risque récessionniste dans une période économique à venir que je continue à juger inquiétante.
J'en viens à mes questions. Pour réduire le déficit public de l'ordre de 0,5 point de PIB par an et retrouver en 2027 un déficit inférieur à 3 %, il est nécessaire de maîtriser fortement l'évolution annuelle de la dépense publique. Lors du précédent programme de stabilité, cette maîtrise devait s'appliquer dans les mêmes proportions aux dépenses de l'État et à celles des collectivités territoriales. Avec le nouveau programme de stabilité que vous présentez, cette stratégie de maîtrise du rythme de progression de la dépense publique est révisée de manière différenciée pour l'État et pour les collectivités territoriales, qui ne connaîtraient plus la même progression. L'effort portant sur la part des dépenses revenant à l'État est, de fait, accru. Alors que les engagements des lois de programmation déjà votées ou en cours de discussion sont ambitieux et prévoient une croissance forte de certaines dépenses budgétaires, n'est-il pas illusoire de prévoir une aussi faible croissance de l'ensemble de la dépense publique ?
Vous indiquez, en page 56 du programme de stabilité, que les collectivités locales seront « associées à l'effort de modération de la dépense publique selon des modalités qui seront déterminées en concertation avec les différents acteurs, sans rétablissement du mécanisme de sanction de la précédente loi de programmation ». Pouvez-vous nous en dire plus sur ces modalités de modération de la dépense publique locale ?
Dans vos prévisions d'évolution des recettes publiques, vous relevez qu'il est difficile de chiffrer les recettes qui résulteront de la mise en œuvre de l'imposition minimale des grandes entreprises, soit la réforme du pilier 2 de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), dont vous dites, en page 57 du programme de stabilité, qu'elle ne serait attendue qu'à compter de 2026. La réforme ne devrait-elle pas entrer en vigueur dès 2024 et produire des effets en recettes dès 2025 ?
Vous indiquez par ailleurs, en page 27 du programme de stabilité, que la trajectoire de ce dernier « provisionne la sortie des boucliers tarifaires et la réduction de certaines dépenses fiscales et sociales inefficaces. » Pourriez-vous préciser le chiffrage du surcroît de recettes qui devrait ainsi provenir chaque année de la suppression ou de la diminution de certaines niches fiscales ?
Enfin, s'agissant du projet de loi de règlement, dans son rapport sur l'exécution du budget de l'État pour l'année 2022, la Cour des comptes a relevé l'importance des reports de crédits non consommés en 2022 sur l'exercice 2023 pour quarante programmes et un montant total de 18,7 milliards, et a souligné que ces reports ne pouvaient pas se justifier, comme en 2020 et 2021, par l'incertitude découlant de la crise sanitaire. Cela pose donc un problème au regard des principes d'annualité et de spécialité budgétaires. Comment ajuster de façon plus satisfaisante, lors du prochain collectif budgétaire de fin d'année, à un moment où l'exécution est déjà bien avancée, les crédits des missions budgétaires pour éviter dans le futur des reports de crédits d'une telle ampleur ?
J'observe tout d'abord que les dépenses du budget général augmentent de 4,4 % en 2022, alors même que les dépenses exceptionnelles liées à la crise sanitaire reculent de 47 milliards d'euros, et que les dépenses publiques dans leur ensemble connaîtront, selon dans le programme de stabilité une augmentation en volume de 0,6 %, ce qui signifie que les dépenses publiques augmenteront plus rapidement que l'inflation. Il convient donc de n'employer qu'avec prudence le terme d'« austérité ».
En 2022, les résultats constatés sont à la fois meilleurs qu'en 2021 et meilleurs qu'anticipé. Alors qu'il était de 6,5 % du PIB en 2021, le déficit public s'est établi à 4,7 % en 2022, soit moins que les 5 % prévus. La dette publique est, quant à elle, passée de 112,9 % à 111,6 % du PIB, soit légèrement en dessous des prévisions. Nous devons ces résultats à une économie résiliente, rendue plus robuste, solideet agile par les réformes économiques, sociales et fiscales menées avec constance depuis 2017 et dont le ministre vient de parler longuement. L'augmentation des emplois qui en résulte se traduit par moins de chômage, plus de salaires, plus de bénéfices et d'investissements, ainsi que par un dynamisme accru des rentrées fiscales et sociales, ce qui améliore la situation relative de nos finances publiques. Je voudrais, à cet égard, rappeler que l'impôt sur les sociétés rapportera 15 milliards d'euros de plus que prévu en 2022. Je remercie tous les acteurs économiques qui, au-delà de notre politique de l'offre, font le succès de nos entreprises.
Certains répètent depuis des années qu'il n'est pas important d'avoir une dette, qu'il ne faut pas la rembourser et qu'il s'agit d'une dette perpétuelle. Les chiffres, hélas, nous ramènent à la triste réalité : les intérêts de la dette nous coûtent 50 milliards d'euros en 2022, soit environ 12 milliards de plus qu'en 2021, et la projection de cette valeur pour la fin de la période, en 2027, s'élève à 71 milliards d'euros. En d'autres termes, si nous n'étions pas endettés, nous aurions 71 milliards de recettes supplémentaires pour investir dans les hôpitaux, dans la transition écologique et dans nos politiques publiques. Donc, de grâce, n'affirmons pas qu'il n'est pas important de désendetter notre pays !
Pour ce qui est du projet de loi de règlement pour 2021, je ferai écho aux propos du ministre. On nous dit depuis le mois de juin dernier que notre majorité n'aurait pas tiré toutes les leçons du fait qu'elle est une majorité relative. Mais nos oppositions ont-elles conscience de ce que, prises dans une alliance des contraires, elles bloquent un texte qui n'est qu'une photographie comptable de ce que nous avons fait les années précédentes ? C'est une chose que de voter un projet de loi de finances ou un projet de loi de programmation des finances publiques, qui comporte évidemment des choix politiques sur lesquels nous pouvons diverger, et c'en est une autre que de ne pas accepter ce qui a eu lieu – c'est, en fait, assez incompréhensible.
S'agissant du projet de loi de règlement pour 2022, on ne peut que se féliciter que le solde structurel soit en amélioration d'un point.
Il n'en est pas moins nécessaire de trouver comment avoir des finances publiques saines dans la durée, et il faut absolument associer à cet effort les collectivités territoriales. En effet, si les dépenses de l'État s'élèvent à 450 milliards d'euros, celles des collectivités territoriales représentent 300 milliards : on voit bien qu'on ne peut pas réussir globalement sans faire conjointement cet effort et il est bon que l'État montre l'exemple en la matière.
Par ailleurs, le fait que notre pays vive au-dessus de ses moyens est assurément justifié par les crises exceptionnelles que nous avons traversées et qui nous ont obligés à mobiliser des sommes colossales, mais il est maintenant nécessaire que la revue des dépenses publiques porte ses fruits et que l'efficacité de nos politiques publiques soit passée au crible pour retrouver des sources d'économies. J'approuve donc les principes qui sous-tendent la programmation actualisée des finances publiques que nous propose le Gouvernement, qui vise des objectifs plus ambitieux, avec un solde public désormais fixé à – 2,7 % en 2027 et un désendettement constant sur la période, alors qu'il ne commençait qu'en 2026 dans le projet de loi de programmation des finances publiques. Ces éléments ont vocation à s'inscrire dans une loi de programmation des finances publiques actualisée par rapport au projet déposé par le Gouvernement en septembre dernier. La Première ministre a annoncé que nous examinerions à nouveau ce projet de loi au mois de juillet. Je rappelle que l'adoption de ce texte revêt une grande importance pour que la Commission européenne verse à la France les fonds issus du plan de relance européen. L'enjeu pour 2023 est de 11 milliards d'euros d'aides européennes.
Je soutiens donc l'action résolue prévue en matière de dépenses, dont témoigne, sur la période, une trajectoire ambitieuse du ratio des dépenses publiques dans le PIB et la stabilité du taux de prélèvements obligatoires. Nous nous donnons les moyens d'y parvenir, notamment en ayant réformé l'assurance chômage et les retraites. Il est en outre demandé aux ministères de déterminer un quantum de 5 % de crédits, hors ressources humaines, à identifier pour faire des choix de verdissement ou d'économie. La méthode est nouvelle et intéressante, et la majorité veillera à ce qu'elle donne des résultats.
J'en viens à mes trois questions. Tout d'abord, quelles sont les raisons qui vous amènent à saisir à nouveau le Parlement du projet de loi de règlement pour 2021 ? N'aurait-il pas suffi de le faire pour 2022 ?
La gestion 2022 a été marquée par une succession d'ouvertures et d'annulations de crédits qui ont profondément modifié l'autorisation parlementaire initiale. Le décret d'avance et les deux lois de finances rectificatives ont permis de répondre à l'accentuation de la hausse des prix de l'énergie observée à compter du début de la guerre en Ukraine. Comme l'a également relevé le Haut Conseil des finances publiques, la gestion 2022 a été marquée par un volume massif de reports de crédits sur 2023, de l'ordre de 18 milliards d'euros, et par un reste à payer colossal de 215 milliards d'euros. Une succession de crises a certes donné lieu à l'instauration de dispositifs exceptionnels, mais ces montants sont probablement trop élevés. Quels moyens envisagez-vous pour revenir à des volumes plus raisonnables ?
Pour ce qui est, enfin, du bouclier tarifaire, pour lequel la Cour des comptes notait une sous-exécution en 2022, je ne retrouve pas les chiffres correspondants dans le tableau qui figure aux pages 25 et 26 du programme de stabilité. Je ne retrouve pas non plus dans les recettes de 2022 l'imposition des superprofits des énergéticiens que nous avons votée. Pouvez-vous nous apporter des précisions sur ces deux points et nous indiquer quel rendement vous prévoyez pour cet impôt- en 2023 ?
Je vous confirme que nous avons quelques divergences, qui sont toutefois naturelles dans cette commission, et même bienvenues pour le dynamisme de notre vie démocratique.
Oui, nous assumons une politique d'offre ; non, nous n'instaurons pas une politique d'austérité. La dépense publique baissera en volume annuel, avec les chiffres que j'ai indiqués pour les collectivités locales et pour l'État, mais les chiffres bruts font apparaître que la dépense publique augmentera de 219 milliards d'euros entre 2022 et 2027. C'est moins que si nous avions appliqué le taux de l'inflation, et cela permet de réduire la dépense publique par rapport à l'augmentation de la richesse nationale. Nous voulons que la dépense croisse moins vite que la richesse nationale. Ce principe ne signifie pas, cependant, que la dépense ne continue pas à augmenter : pour les seules collectivités locales, ce seront ainsi 35 milliards de plus entre 2022 et 2027.
Une politique d'austérité se définit par le fait d'assumer une réduction de la dépense supérieure à l'augmentation la richesse nationale, c'est-à-dire de tailler dans les dépenses plus qu'on ne crée de richesse. Je ne crois pas à cette politique et ce n'est pas celle que nous appliquons.
Je rappelle, en outre, que la dépense publique, même si elle baisse de quatre points grâce à notre action résolue, représentera 53,5 % du PIB en 2027, ce qui place encore la France parmi les pays où elle est la plus élevée des pays développés.
Enfin, nous maintenons cette politique de l'offre pour la simple raison qu'elle produit des effets qu'aucune autre politique n'a produits dans les décennies passées, avec 1,3 million d'emplois créés, un niveau de chômage au plus bas depuis quarante ans, des usines qui rouvrent et des embauches d'ouvriers et d'ingénieurs.
Pour ce qui est de la priorité à la dette écologique, je pense comme vous, monsieur le président, qu'il faut investir massivement dans la décarbonation de l'économie. En revanche, une dette financière excessive empêche de réduire la dette écologique, car la charge de ses intérêts nous prive de milliards d'euros qui auraient pu être utilisés beaucoup plus efficacement pour la décarbonation de l'économie, le déploiement des éoliennes ou le soutien aux batteries électriques ou à l'hydrogène vert. Réduire la dette financière, c'est dégager des marges de manœuvre pour payer notre dette écologique. Les deux sont, pour moi, intimement liés.
Je vous confirme que la demande de nos titres est stable et que le financement de la dette de la France n'est pas une préoccupation. Il faut cependant tenir compte aussi du fait que tous les autres États européens ont également pris la décision d'accélérer leur désendettement. L'Italie, par exemple, a décidé d'avancer de 2026 à 2025 le passage de son déficit sous le seuil de 3 %. Si nous voulons que notre dette reste attractive, nous devons prendre aussi des décisions d'accélération de notre désendettement.
Quant aux taux d'intérêt, nous avons envisagé qu'ils seraient de 3,4 % à l'horizon de 2024. La prévision d'inflation est, à cette date, de 2,6 %, et ce chiffre baissera progressivement à 1,75 %, de telle sorte que les taux d'intérêt réels seront bien positifs à compter de 2024, ce qu'ils ne sont en effet pas aujourd'hui.
Pour ce qui est, enfin, du coefficient multiplicateur, j'estime que si son efficacité était prouvée, nous aurions, compte tenu de notre niveau de dépense publique, la croissance la plus élevée de tous les pays de l'OCDE, ce qui n'est malheureusement pas le cas. Le véritable coefficient multiplicateur réside dans l'investissement et l'innovation beaucoup plus que dans la pure dépense publique.
L'imposition minimale sur les entreprises, combat que nous avons mené depuis maintenant plus de cinq ans, entrera en vigueur à partir du 1er janvier 2024 et devrait générer une recette de l'ordre de 2 milliards d'euros qui sera disponible à partir de 2026, les revenus de l'exercice 2024 étant déclarés en 2025 pour un paiement effectif à partir du 1er janvier 2026.
Je souhaite, moi aussi – car nous avons, malgré tout, des points de convergence –, réduire les niches fiscales brunes. Ce n'est pas simple, car ces exonérations de fiscalité touchent par exemple le gazole non routier, mais il nous faut, pour réussir notre transition écologique, basculer d'une fiscalité favorable aux énergies fossiles à une fiscalité favorable aux énergies décarbonées. En termes de méthode, je suggère que, lorsque nous réduisons l'avantage fiscal accordé aux énergies fossiles, nous conservions une partie de l'économie réalisée pour aider le secteur concerné à investir dans la décarbonation. Il s'agirait que ces sommes ne soient pas toutes consacrées au désendettement, mais par exemple qu'une partie de l'effort demandé au secteur du transport routier soit utilisée pour permettre aux transporteurs routiers d'investir dans des camions équipés de batteries électriques ou de moteurs à hydrogène.
Monsieur le président, les collectivités locales sont déjà associées au processus. Dans le cadre de la revue de dépenses et en prévision des assises des finances publiques, Bruno Le Maire et moi-même avons reçu les associations d'élus, qui travaillent aussi, au niveau technique, avec nos équipes. Une nouvelle réunion importante se tiendra d'ailleurs demain pour nous permettre de cheminer ensemble vers une maîtrise de la progression des dépenses de fonctionnement pour les cinq années à venir, même si les dispositifs que nous avions proposés dans le cadre de la précédente loi de programmation des finances publiques et que vous avez rappelés n'ont pas été retenus à la suite de l'annonce faite par la Première ministre au congrès des maires, voilà quelque mois.
Le niveau des reports de crédits non consommés est certes encore élevé, mais il baisse par rapport aux années précédentes, où il était très important, du fait notamment de la crise du covid-19 et du plan de relance, qui sont désormais derrière nous. Cependant, une crise succédant à une autre, nous connaissons maintenant celle de l'inflation, qui a conduit à engager l'année dernière d'autres dépenses massives, dont certaines ont été reportées en 2023. Ainsi, pour les différents chèques adoptés par le Parlement pour le fioul ou le bois, par exemple, les crédits n'ont pas été consommés dans leur intégralité en 2022 et sont reportés en 2023 ; de même, le guichet d'aide aux entreprises en difficulté à cause du prix de l'énergie fait l'objet d'un report très important sur 2023.
Parmi les dépenses hors crise, les reports sont importants notamment pour le plan d'investissement dans les compétences et son volet régional, qui accusent une assez forte sous-consommation avec 1,8 milliard d'euros non consommés en 2022 – dont, par exemple, 762 millions pour la région Île-de-France. Les régions où les crédits sont les plus fortement consommés sont celles où le plan d'investissement dans les compétences est opéré par Pôle emploi, faute de conventionnement avec les conseils régionaux concernés – je pense notamment à la région Auvergne Rhône-Alpes. Il y a donc, globalement, une diminution du volume des reports, passé de 36,7 milliards d'euros en 2020 à 23,3 milliards en 2021 et 18,8 milliards en 2022. C'est encore trop, évidemment, car, en rythme de croisière normal, ce montant est de l'ordre de 3 milliards d'euros. Notre objectif est donc de revenir à un volume normal de reports mais, comme je l'ai dit, la crise de l'inflation explique l'essentiel de ces derniers.
Enfin, nous ajoutons l'amortissement de la dette covid, soit 165 milliards d'euros d'autorisations d'engagement en 2022, ce qui gonfle très fortement les restes à payer.
Pour répondre au rapporteur général sur les boucliers et la sous-exécution des crédits, tout cela est dû à la variation des prix de l'électricité et du gaz, difficile à anticiper. Nous avons été agréablement surpris par la chute du prix du gaz, revenu à 50 euros le mégawattheure, ce qui a une incidence sur la contribution sur la rente inframarginale (Crim) et sur la contribution au service public de l'électricité (CSPE). Pour 2022, nous avons perçu 11,5 milliards d'euros de recettes liées à la taxation des superprofits. Pour 2023, nous anticipions 35,8 milliards de recettes, avec notamment une CSPE de 23,8 milliards et une Crim de 11 milliards. Nous prévoyons désormais des chiffres beaucoup plus faibles en raison de la baisse des prix : 9,5 milliards pour la CSPE et 4,3 milliards pour la Crim, soit un total de recettes de 14,5 milliards.
Parler d'austérité dans un pays qui a près de 3 000 milliards d'euros de dette publique et dont la dépense publique est supérieure à 50 % du PIB est, à tout le moins, hors de propos. Les ministres ont bien démontré à quel point l'État a été protecteur ces trois dernières années – aucun autre pays n'a d'ailleurs fait autant pour ses citoyens et son tissu économique –, ce qui nous a permis d'éviter les faillites, le chômage et l'érosion du pouvoir d'achat des Français. Cette politique a évidemment eu des conséquences sur notre endettement et notre niveau de dépenses publiques, et ceux qui en critiquent l'augmentation sont les premiers à proposer des solutions bien plus onéreuses et bien moins efficaces pour les Français, comme la baisse de la TVA ou le blocage des prix.
À l'issue de cette période exceptionnelle, il était temps de retrouver le chemin de l'équilibre de nos comptes, non par idéologie néolibérale ni par une cure d'austérité, mais en misant sur le travail, la croissance et le sérieux budgétaire. Nous l'avons fait dès 2022, en ramenant le déficit à 4,7 % du PIB, soit 0,3 point de moins que prévu, et la dette de 113 à 111,6 % du PIB. C'est donc dès l'an dernier que nous avons engagé le redressement de nos finances publiques. Pour le groupe Renaissance, ce redressement doit être poursuivi, tant pour reconstituer une marge de manœuvre en cas de crise systémique, que pour investir dans la transition écologique et refuser la fatalité de l'endettement, qui fait les impôts de demain.
Nous saluons donc l'accélération du désendettement que traduit ce programme de stabilité par le recours à un déficit public de 2,7 % en 2027 et un abaissement de la dette publique à 108,3 % du PIB cette même année, soit quatre points de moins que ce qui avait été envisagé voilà un an.
Comment sortir du « quoi qu'il en coûte » tout en continuant à protéger les ménages et les entreprises ? Comment financer ces mesures de protection sans matraquage fiscal ? Combien de recettes anticipez-vous de la contribution sur les rentes énergéticiennes, non seulement pour l'an prochain, mais également pour les prochaines années ? Quelles recettes supplémentaires escomptez-vous de la lutte contre la fraude, notamment des trois mesures de lutte contre la fraude sociale annoncées par Gabriel Attal ?
Enfin, vous avez évoqué, monsieur Attal, un « plan Marshall » pour la classe moyenne et avez lancé hier l'opération « En avoir pour mes impôts », qui vise à faire la transparence sur l'utilisation de l'argent public et interroger les Français sur leurs priorités et leur rapport à l'impôt. Pouvez-vous nous rappeler l'impact des dispositions prises en faveur de la classe moyenne et la suite que vous envisagez donner à ces opérations ?
Il y a bien un lien, monsieur Attal, entre le passé et le futur pour ce qui est du vote des textes budgétaires et du soutien qu'ils reçoivent : c'est que les oppositions, et en tout cas le Rassemblement national, n'ont plus confiance en vous. Vous utilisez des textes que vous présentez comme techniques pour faire systématiquement de la communication, alors que ce n'est pas le lieu, et vous accusez ensuite les oppositions de ne pas vouloir les voter. Si vous voulez que nous votions vos textes, commencez par en ôter toute la propagande et faites-en, avec une attitude républicaine, des textes purement techniques, voire purement comptables, pour que nous puissions avancer.
Comment voulez-vous que nous ayons confiance lorsque vous présentez un programme de stabilité qui n'en est pas un et qui se résume, la plupart du temps, à des effets comptables ? Vous êtes dans un Gouvernement « radeau », sans rame, sans voile ni moteur, ballotté par la tempête de la guerre économique, de l'inflation et des marchés financiers. Vous essayez de faire croire qu'il vous reste un gouvernail mais vous mélangez tout. Par exemple, vous êtes capables de dire que vous avez baissé les impôts alors que nous avons battu, l'année dernière, le record des prélèvements obligatoires. Comment voulez-vous que nous prenions au sérieux de tels textes ? Je ne donne qu'un exemple parce qu'il est difficile, pour le principal parti d'opposition, d'analyser l'intégralité de votre politique économique et financière en seulement deux minutes.
Vous vous heurtez aux taux d'intérêt, dépense structurelle contre laquelle rien n'a été fait malgré toutes les critiques formulées à l'endroit de la politique monétaire. Dix ans après la crise de l'euro, cette politique n'a pas été repensée alors qu'elle ne compense plus rien en matière d'inflation et de dette publique. Faute d'une réflexion de fond sur ce que les Français doivent amortir et ce qui ne relève pas de leur responsabilité – la désindustrialisation, la crise financière et la crise du covid – nous ne nous en sortirons pas. Ce n'est pas aux Français de financer ces politiques par leurs impôts !
Vous avez reconnu qu'un plan Marshall en faveur des classes moyennes était nécessaire. Reconnaissez-vous qu'après dix ans de votre politique, elles sont ruinées et doivent être reconstruites ?
Je ne sais pas trop quoi vous dire…
Vous venez nous voir pour nous dire que vous voulez faire des économies, ce qui impliquera une politique d'austérité. Vous nous dites que vous voulez faire encore plus d'économies que vous ne l'aviez annoncé lors de votre dernière venue, ce qui supposera un sous-financement des services publics, des communes et de notre système de santé, et ressemble à tout sauf à un pacte de stabilité. Choisir de baisser les dépenses alors que les Français ne parviennent plus à vivre de leur travail et que l'hôpital continue de s'effondrer, cela s'apparente plutôt à un pacte d'instabilité.
Vous affirmez qu'après les citoyens, l'État doit prendre sa part, mais qu'est-ce que cela signifie sinon des économies sur les écoles, sur les soutiens aux ménages, sur les communes, l'hôpital, les pompiers, les transports ? Vous proposez de faire des économies alors que les artisans ont de plus en plus besoin d'être aidés, que des classes ferment et continueront de fermer, que des communes tirent la langue, qu'un tiers des ménages les plus pauvres est obligé de supprimer un repas ! Et vous leur proposez maintenant de sauter le petit-déjeuner !
S'agissant de l'hôpital, la sécurité sociale devra faire des économies, ce qui aura donc des incidences sur la santé des Français mais, aussi, sur les soignants. Je vous rappelle qu'un patient est mort sur un brancard, la semaine dernière, à Grenoble, après avoir attendu trois jours pour être pris en charge et que cet hiver, des enfants ont été intubés dans les couloirs des services d'urgence ! Et vous voulez faire des économies ?
Deux choix étaient possibles : faire payer les plus riches et en finir avec les cadeaux que vous avez faits aux entreprises ou faire payer tous les Français et détruire leurs services publics. Vous avez choisi la deuxième option. Vous profitez des fractures nées de la crise des retraites pour faire passer vos pires mesures. Pensez-vous donc que les Français vont suffisamment bien pour leur demander plus d'efforts, plus d'économies et moins de services publics ?
Votre programme de stabilité témoigne d'une prise de conscience nouvelle quant à l'impératif de réduction du déficit et de la dette, dont la charge est bien plus élevée qu'annoncé. Hélas, cette bonne volonté est bien tardive et, au-delà des bonnes intentions, nous jugerons sur les actes, car, ces derniers temps, le Gouvernement a surtout promis des hausses de dépenses.
Nous avons proposé de les réduire à hauteur de 20 milliards à l'horizon de 2025, puis, de 10 milliards à l'horizon de 2027, grâce à une politique de débureaucratisation. Selon le Gouvernement, une telle réduction n'est pas documentée mais les baisses de dépenses qu'il prévoit ne le sont nullement. Comment allez-vous procéder ? Quels secteurs seront concernés ?
À l'initiative de notre groupe, une mission d'information sur la rationalisation de notre administration comme source d'économies budgétaire a été créée, rapportée par Véronique Louwagie et Robin Reda, dont nous espérons que le Gouvernement suivra les conclusions. Comment comptez-vous travailler avec les rapporteurs et faire en sorte que le Parlement, au lieu d'être réduit à une variable d'ajustement, soit écouté ?
Notre groupe salue l'orientation principale consistant à accélérer le désendettement par rapport à la trajectoire précisée en 2022.
Votre plan prévoit une nette augmentation du coût de financement de la dette publique, ce qui est logique compte tenu de l'épisode inflationniste que nous connaissons et du durcissement induit des politiques monétaires. Nous risquons donc d'entrer dans le cercle vicieux de la hausse des taux d'intérêt, du coût de financement de la dette, du déficit, donc de la dette. Comment l'Agence France Trésor s'adapte-t-elle à cette nouvelle donne ? Les obligations assimilables du Trésor indexées sur l'inflation (OATI) sont-elles toujours utilisées ?
La hausse du coût de la dette montre combien les politiques publiques doivent être plus efficaces afin d'en réduire la charge, tant pour l'État que pour les autres administrations publiques. Quelles mesures peuvent être envisagées afin d'encourager les collectivités territoriales et les administrations de sécurité sociale à atteindre une baisse des dépenses de 0,5 % ou de 0,8 % ?
Le programme de stabilité s'inscrit dans le Semestre européen issu de la réforme de 2011. Quand le nouveau cadre de gouvernance européenne sera-t-il validé ? Le ministre allemand des finances, Christian Lindner, a publié une tribune très critique sur les propositions de la Commission européenne visant seulement à réformer le cadre existant à la marge. Comment abordez-vous les discussions, alors qu'il aura politiquement besoin d'obtenir quelque chose ? Dans ce futur cadre, quelle place les investissements, notamment pour le climat, doivent-ils prendre ?
Enfin, le programme de stabilité se fonde intégralement sur les dépenses, or, à l'heure où l'on demande à tous la sobriété, les députés de mon groupe sont attachés à une fiscalité privilégiant l'investissement plutôt que la distribution de dividendes exceptionnels.
Nous avons eu raison de ne pas voter votre projet de loi de programmation des finances publiques : à peine l'Assemblée nationale l'a-t-elle rejeté que vous lui êtes infidèles en proposant une programmation encore plus « austéritaire ». Avec une baisse de 4 points de la dépense publique en cinq ans, vous proposez en effet une véritable cure d'austérité, qui ne s'accompagne d'ailleurs d'aucune réforme structurelle et se traduira par un coup de rabot d'environ 5 % par ministère, ce qui nous semble difficilement crédible.
En effet, comme l'a rappelé le Haut Conseil des finances publiques, vos précisions d'inflation semblent sous-estimées et vos prévisions de croissance, particulièrement optimistes, votre scénario étant plus favorable que celui de la Commission européenne et de la Banque de France, laquelle prévoit une croissance de seulement 0,6 % en 2023.
Vous justifiez cette aggravation de la réduction des dépenses en raison du niveau de la dette, mais pourquoi persistez-vous à recourir aux OATI ? La dernière adjudication a eu lieu le 20 avril, alors que celles de l'année dernière nous ont coûté quasiment 16 milliards en charge de la dette. Si nous recourions moins à ce type d'instrument financier, nous éviterions de telles dépenses supplémentaires.
Quid du bouclier tarifaire, qui coûte 50 milliards chaque année ? Nous avons besoin d'une réforme ambitieuse du marché européen de l'énergie en mettant fin à la ridicule indexation du prix de l'électricité sur celui du gaz.
Enfin, allez-vous mettre un terme à votre politique de désarmement fiscal qui, là encore, nous prive de recettes utiles et indispensables ? Si votre politique de l'offre était efficace, notre balance commerciale n'aurait pas été pas déficitaire à hauteur de 164 milliards en 2022.
Notre économie a particulièrement bien résisté en 2021 et en 2022, avec des taux de croissance importants et des résultats inédits sur le front de l'emploi. Sa résilience doit être mise au crédit des travailleurs et des chefs d'entreprise, qui créent de la valeur et permettent de traverser les crises que nous connaissons.
Une telle résilience prouve également que la politique conduite par les gouvernements et la majorité a porté ses fruits. Les puissants dispositifs d'aide déployés pendant la crise sanitaire, puis, pour faire face au choc inflationniste, ont permis d'amortir les effets délétères pour nos concitoyens. Le déploiement des plans France relance et France 2030 permet de redonner du souffle à notre économie et de l'orienter vers les secteurs d'avenir.
Une telle politique, cependant, a un coût élevé pour nos finances publiques et si le déficit se résorbe peu à peu, il reste supérieur à celui de la majorité de nos voisins européens et alimente une dette trop importante. Nous partageons donc la volonté des ministres de réduire notre endettement en maîtrisant les dépenses et en sanctuarisant les recettes. Comment comptez-vous parvenir à réduire la dépense publique à 53,5 % du PIB en 2027, le Haut Conseil des finances publiques jugeant votre prévision de croissance plutôt optimiste ?
Dans le cadre du plan national de relance et de résilience, les financements européens s'élèveraient à 40,3 milliards. Pouvez-vous faire un point des versements intervenus et à venir ?
Enfin, le projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2022 pointe une difficulté de recrutement dans la fonction publique, notamment dans l'éducation nationale et les armées. Comment abordez-vous ce problème ? Quelles sont les projections en matière de ressources humaines ?
Que pensez-vous du sondage Elabe du 24 avril 2023 selon lequel 43 % des Français ne sont pas du tout satisfaits de la gestion des dépenses publiques et 34 % pas vraiment satisfaits ? Cela fait 77 %, dont 36 % d'électeurs de la minorité présidentielle.
Comment pouvez-vous retenir un taux de croissance potentielle de 1,35 % par an avec une réduction de l'écart de production proche de zéro en 2027, alors que le taux constaté ces dernières années est de l'ordre de 1 % ?
Les dépenses publiques, de 2017 à 2023, sont passées de 56,5 % du PIB à 56 %, soit une baisse d'un demi-point de PIB, de 12 milliards au total et de 2 milliards chaque année – autant dire presque rien. Selon vos prévisions, de 2023 à 2027, elles passeraient de 56 % à 53,5 %, ce qui représenterait en 2027 un effort de 65 milliards. D'où viendraient de telles économies, hors celles réalisées sur les retraites, que vous avez d'abord évaluées à 13 milliards lors du non-vote de votre projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale et que vous estimez maintenant à 8 milliards ? De l'assurance chômage ? Quelles sont les économies structurelles qui nous permettraient de réaliser 16 milliards d'économie par an ?
Dans votre grande bienveillance, vous expliquez que les dépenses des collectivités locales pourront augmenter de 0,8 % en volume contre 0,5 % pour celles de l'État. Or, ces deux dernières années, l'écart entre la croissance des dépenses publiques de l'État et celles des collectivités locales n'a pas été de 0,3 point mais de 1,4 et 1,1 points. Les contrats de Cahors seront-ils réactivés ? Allez-vous appliquer les dispositifs rejetés par l'Assemblée nationale à deux reprises ? Prévoyez-vous de nouveaux mécanismes ?
Enfin, entre 2017 et 2022, le taux des prélèvements obligatoires est passé de 45,1 % à 45,3 %. Vous avez annoncé des baisses massives qui ont été en fait compensées par des hausses. De 2023 à 2027, la situation serait à peu près stable, puisque les taux seraient respectivement de 44,3 % et de 44,5 %, mais vous avez déclaré lors de votre conférence de presse qu'il convenait de maintenir une politique de diminution des impôts. Comment expliquez-vous une telle contradiction ?
Je vous confirme que nous sommes sortis du « quoi qu'il en coûte » et que nous voulons progressivement mettre un terme aux boucliers tarifaires sur le gaz et l'énergie – ce sera le cas au début de 2025 – puisque le prix du gaz est revenu à son niveau d'avant la crise. Un tel retrait des dispositifs de protection est légitime, sauf à vouloir subventionner une énergie fossile. S'agissant de l'électricité, la baisse sera plus progressive. Nous réaliserons ainsi 30 milliards d'économie nets, ce qui permettra de contribuer au rétablissement des finances publiques après une dégradation des comptes qu'explique la protection contre l'inflation.
Je ne partage évidemment pas l'avis de M. Tanguy sur la manière dont nous avons tenu le cap lors de la tempête du covid. Les entrepreneurs, les chefs d'entreprise, les industriels que nous avons sauvés et que je rencontre très fréquemment savent que nous avons évité l'effondrement de notre économie et une explosion du chômage parce que nous avons pris les bonnes décisions au bon moment.
L'augmentation du taux des prélèvements obligatoires s'explique par le dynamisme de la masse salariale, donc une augmentation des recettes, notamment celles de l'impôt sur les sociétés (IS), même si nous en avons baissé le niveau. Lorsque tel est le cas, la prospérité et le rendement des entreprises augmentent, donc la recette fiscale. Pendant le quinquennat, les impôts baisseront de 1 point.
Je n'ai jamais dit que nous réduirions les dépenses en faveur de l'hôpital. Au contraire, nous les avons massivement augmentées et nous devons continuer à revaloriser les salaires des aides-soignants, des infirmiers, des personnels hospitaliers. Le Ségur de la santé a été l'occasion de la plus forte augmentation des rémunérations des personnels soignants depuis plusieurs années, ce qui n'est d'ailleurs que justice compte tenu du travail qu'ils ont accompli durant la crise du covid et qu'ils continuent d'accomplir chaque jour. L'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) ne résume pas la politique hospitalière. Nous faisons des économies sur d'autres dépenses de santé, par exemple, sur les laboratoires, mais nous investissons et nous continuerons d'investir en faveur de l'hôpital public, qui a été le parent pauvre des politiques de santé lors des dernières décennies – ce qui fut à mes yeux une erreur.
J'invite Patrick Hetzel et la mission d'information à participer aux travaux sur la réduction des dépenses publiques et sur la documentation des économies à réaliser. Le programme de stabilité n'a pas vocation à présenter les économies possibles poste par poste, ministère par ministère, dépense publique par dépense publique. Cela relève du projet de loi de finances. Je suis convaincu que seul un dialogue résolu, le plus large possible, avec les oppositions permettra de trouver des points d'accord.
Le livret d'épargne populaire (LEP) protège totalement les épargnants de l'inflation. Grâce à un taux de rémunération supérieur à l'inflation, il constitue le placement le plus intéressant. Or des millions de compatriotes éligibles n'y ont pas souscrit. Je les invite à le faire. Les dépôts des livrets A sont liés à l'inflation et les émissions d'OATI que nous avons poursuivies permettent de protéger les économies des épargnants.
Depuis plusieurs mois, nous travaillons avec mes homologues de la zone euro sur le pacte de stabilité. Nous nous réunirons à nouveau à Stockholm vendredi et samedi. Nous souhaitons que la réforme puisse aboutir d'ici à la fin de l'année, c'est-à-dire avant que la clause d'exception générale soit levée, le 1er janvier 2024. Nous souhaitons également trouver un bon équilibre entre le rétablissement des finances publiques et les investissements indispensables à la transition climatique. Nous estimons que les propositions de la Commission européenne constituent une base solide. Elles reposent sur trois piliers : d'abord, la différenciation entre les États – tous n'ont pas le même niveau de dette publique puisqu'elle s'élève, pour certains d'entre eux, à 55 % du PIB et pour d'autres, à 185 % ; ensuite, l'appropriation nationale : il appartient aux États souverains de s'approprier les modalités de réduction de leur dette et de leur déficit – c'est un principe auquel nous tenons, je le dis ici, devant les représentants du peuple souverain ; enfin, la préservation des investissements et la prise en compte des réformes structurelles accomplies par les États – je pense, en l'occurrence, à notre réforme de l'assurance chômage et des retraites.
En revanche, nous sommes fermement opposés à toute règle automatique et uniforme pour réduire la dette et les déficits publics. Le passé a montré combien ces règles aveugles aboutissent à de mauvais résultats, peuvent tuer la croissance et, ainsi, nous priver des investissements nécessaires à la transition climatique. J'aurai l'occasion de rappeler la position française à Stockholm, lors du Conseil pour les affaires économiques et financières (Ecofin).
La réforme du marché européen de l'énergie est fondamentale. Avec le Président de la République et Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition énergétique, nous nous sommes battus et nous avons obtenu gain de cause : la réforme s'appliquera au 1er janvier 2025 et elle permettra à nos compatriotes de bénéficier du coût de production de l'énergie nucléaire. Ainsi, le prix de l'électricité ne sera plus indexé sur le coût d'ouverture de la dernière centrale à gaz en Europe.
Soyons cependant lucides, si nous voulons que cette réforme soit efficace, la France doit produire plus. Un prix de consommation indexé sur le coût de production suppose que nous retrouvions des capacités de production nucléaire suffisantes, faute de quoi le prix restera élevé.
Je ne parlerai pas de « désarmement fiscal » mais nous voulons, il est vrai, mettre un terme à la course aux armements fiscaux : la multiplication des taxes et des impôts a été une grande singularité française parce que nous n'avons pas eu le courage d'opérer les transformations économiques nécessaires.
La politique de l'offre n'est en rien inefficace. Le déficit commercial a en effet fortement augmenté mais, principalement, parce que la note énergétique a flambé. Une politique de l'offre favorisant l'ouverture de nouvelles usines et le développement de capacités de production électrique dans notre pays permettra de le réduire. Cela passe par une plus grande production d'énergie, à un coût raisonnable, et une augmentation de la production industrielle et d'offre de services, comme nous le faisons et comme nous continuerons à le faire avec le projet de loi sur l'industrie verte.
Les prévisions de croissance sont conformes à celles du Fonds monétaire international et me paraissent donc crédibles.
Je ne suis pas là pour commenter les sondages, monsieur de Courson. Notre politique ne se fonde pas sur eux mais sur nos engagements de campagne, le sens de l'intérêt général et notre détermination à rétablir les finances publiques. Peut-être est-ce la raison de nos divergences à propos des retraites.
Dans les prochaines semaines, j'aurai l'occasion de présenter le plan de lutte contre toutes les fraudes, fiscales et sociales. Il comprend un volet social fixant des objectifs ambitieux en matière de lutte contre la fraude aux cotisations sociales. Les Urssaf font un travail remarquable mais je souhaite qu'on aille plus loin en recouvrant 5 milliards supplémentaires pendant le quinquennat.
Je souhaite également que l'on vise les plateformes où les travailleurs ne cotisent pas pour leur retraite, ce qui représente un manque à gagner pour notre modèle social et en termes de droits.
Je souhaite aussi que l'on avance sur le phénomène des sociétés éphémères, qui prend de l'ampleur. Des sociétés accumulent un certain nombre de dettes sociales, notamment en matière de cotisation, pour un montant qui, l'année dernière, a été de 100 millions.
Je souhaite encore que l'on aille plus loin en matière de prestations sociales. Nous avons d'ores et déjà adopté un certain nombre de mesures puisqu'à partir du 1er juillet prochain, il ne sera plus possible de verser des allocations sociales sur des comptes bancaires étrangers. Je souhaite que la condition de résidence pour bénéficier des allocations sociales soit rehaussée. Aujourd'hui, il est nécessaire de vivre six mois de l'année en France pour bénéficier des allocations familiales ou du minimum vieillesse, huit mois pour bénéficier de l'aide personnalisée au logement (APL) et neuf mois pour bénéficier du RSA et de la prime d'activité. Je souhaite qu'une période globale de neuf mois soit retenue.
J'ai évoqué avec mon collègue ministre du travail la question des allocations chômage, dont le bénéfice suppose de vivre six mois de l'année en France. L'évolution de la situation dépendra avant tout des partenaires sociaux mais, à titre personnel, je ne trouve pas normal que l'on puisse vivre six mois de l'année hors de France tout en percevant ces allocations. Il me semble qu'un alignement sur les autres allocations sociales devrait être possible, même si l'allocation chômage, j'en suis conscient, est une prestation contributive.
Je rappelle que la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) évalue à 2,8 milliards la fraude et les indus chaque année. Le plan permettra, là encore, d'avancer.
Nous n'avons pas de leçon à recevoir de la part du Rassemblement national sur les classes moyennes. Ce parti est le pire ennemi des classes moyennes.
Le plan Marshall pour les classes moyennes a été engagé dès 2017 en supprimant la taxe d'habitation et la redevance audiovisuelle, en abaissant de 5 milliards d'euros l'impôt sur le revenu pour les premières tranches, en défiscalisant les heures supplémentaires, en autorisant la monétisation des RTT, en revalorisant de manière inédite le barème de l'indemnité kilométrique et, plus récemment, en rehaussant le plafond du crédit d'impôt pour la garde d'enfants. Ce sont autant de mesures en faveur des classes moyennes que le Rassemblement national n'a pas soutenues.
Ensuite, pour la préoccupation majeure des classes moyennes – l'emploi –, le Rassemblement national et les mesures qu'il propose représentent une menace. J'ai en tête un amendement lors du débat sur les retraites, qui m'avait amené à qualifier ses députés de patriotes de pacotille : sous couvert de taxer les superprofits, il touchait des fleurons industriels français – Fleury Michon, les chantiers de l'Atlantique, la Compagnie laitière européenne – et risquait de causer des drames en matière d'emplois. Enfin, le Rassemblement national ne défend pas les classes moyennes lorsqu'il refuse de voter la courageuse réforme de l'assurance chômage dont l'objet est d'inciter à la reprise d'emploi.
Nous sommes les mieux à même d'accompagner les classes moyennes. Oui, monsieur Lefèvre, nous entendons prolonger le plan Marshall en leur faveur, notamment en poursuivant la baisse des prélèvements obligatoires.
Quant au désarmement fiscal que déplore Philippe Brun, je prends comme un compliment les critiques de certaines personnes ou institutions, au demeurant respectables, sur la diminution excessive des impôts, moi qui ai toujours entendu reprocher aux gouvernements d'augmenter les impôts depuis que je suis en âge de m'intéresser à l'actualité. Rares sont les gouvernements ayant réussi à baisser les impôts, je suis fier d'en faire partie. Ce succès sert nos objectifs qui restent de libérer les énergies, de développer l'activité économique et d'améliorer le pouvoir d'achat des classes moyennes qui travaillent.
Monsieur Hetzel, j'ai été auditionné par la mission d'information conduite par Véronique Louwagie et Robin Reda sur la rationalisation de notre administration comme source d'économies budgétaires. Nous attendons beaucoup de leurs propositions pour alimenter notre future stratégie d'économies.
J'ai l'intention de réitérer les dialogues de Bercy dans un format enrichi. Je souhaite qu'ils soient plus précoces et plus nourris et je proposerai prochainement une méthode dans cette optique.
Monsieur Plassard, la sous-consommation d'emplois publics concerne essentiellement les ministères de l'éducation nationale, des armées et des outre-mer. Pour les armées, l'effet générationnel joue fortement. Le projet de loi de programmation militaire prévoit des plafonds de recrutement très importants pour pallier les très nombreux départs à la retraite. En ce qui concerne l'éducation nationale, le métier d'enseignant souffre d'un manque d'attractivité. C'est la raison pour laquelle le Président de la République a annoncé des revalorisations de salaires inédites depuis 1990. Il est à noter que la sous-consommation est à peu près équivalente dans l'enseignement public et dans le privé. Celle-ci est aussi la conséquence de la réforme du concours. Les candidats doivent désormais être titulaires d'un master et inscrits en deuxième année, et non plus en première année ; c'était donc le même vivier pour les concours deux années de suite, ce qui a restreint les possibilités de recrutement.
Enfin, monsieur de Courson, nous n'avons pas besoin de sondages pour savoir que les Français aimeraient que les services publics fonctionnent mieux compte tenu de ce qu'ils coûtent. La consultation « En avoir pour mes impôts » que j'ai lancée permettra d'échanger avec eux. Des réunions publiques se tiendront dans les trésoreries de chaque département d'ici à l'été. Stanislas Guerini et moi avons participé hier à la première du genre, dans l'Hérault.
Quant à la réforme des retraites, les 13 milliards d'euros d'économies ont toujours été annoncés pour 2030. Leur montant net sera autour de 8 milliards en 2027 auquel il faut ajouter les recettes liées à la réforme qui sont estimées à 9 milliards hors cotisations vieillesse, signe que celle-ci est aussi importante sur le plan budgétaire.
Le programme de stabilité indique une hausse de 3,5 % par rapport à 2022 des dépenses des organismes divers d'administration centrale. Cette augmentation est notamment imputable à France Compétences au titre de l'apprentissage. Je soutiens ces dépenses vertueuses, qui contribuent à l'objectif du plein emploi et à la baisse durable du chômage. Six mois après l'obtention du diplôme, 65 % des apprentis sont en emploi.
La subvention de 1,68 milliard d'euros prévue en loi de finances pour soutenir la trésorerie de l'opérateur sera-t-elle suffisante ? Une réflexion est-elle engagée sur la définition d'une trajectoire financière pluriannuelle, que la Cour des comptes appelle de ses vœux pour rétablir sa situation financière et répondre aux choix stratégiques ?
L'investissement stimule l'économie et soutient la croissance potentielle. Le programme de stabilité comporte des développements sur les possibilités de réforme de la gouvernance économique européenne afin que les investissements publics soient considérés comme des réformes structurelles destinées à soutenir notre niveau de croissance potentielle.
Comment le programme de stabilité traduit-il les axes prioritaires du Gouvernement que la Première ministre vient de rappeler – le développement du ferroviaire, la rénovation thermique des bâtiments et l'accélération de la décarbonation de notre économie – ainsi que les programmes d'investissement européens dans l'industrie et l'armement ?
Je partage votre volonté de réduire l'endettement de l'État sans augmenter la pression des prélèvements obligatoires.
Comment réduire les coûts administratifs sans rationalisation des effectifs du secteur public et sans limitation des dépenses non essentielles ? Quelles sont les réformes structurelles envisagées pour améliorer l'efficacité du secteur public, notamment en matière de santé et d'éducation ? Ces réformes peuvent-elles aider à réduire les coûts à long terme et à améliorer la soutenabilité des finances publiques ? Quelles mesures sont prévues pour lutter contre les fraudes fiscale et sociale ainsi que contre l'évasion fiscale ? Où trouver des nouvelles ressources sans augmenter les prélèvements obligatoires ? Disposez-vous de marges de manœuvre pour renégocier les conditions d'endettement ?
Le Haut Conseil des finances publiques avait qualifié le programme de stabilité présenté en juillet 2022 de peu ambitieux en matière de redressement des finances publiques. La nouvelle version prévoit une baisse du déficit plus rapide – je m'en réjouis. Comment cela nous place-t-il par rapport à nos voisins ?
Le taux de croissance potentielle est maintenu à 1,35 %. Compte tenu des réformes engagées qui ont permis de créer 1,7 million d'emplois depuis 2017, ne serait-il pas judicieux de relever ce taux ?
Dans la loi de finances pour 2023, nous avons fait un choix fort en indexant le barème de l'impôt sur le revenu sur l'inflation. Sans cette mesure, nombre de foyers auraient connu un taux d'imposition plus élevé en passant à une tranche supérieure. Cette orientation fiscale qui s'adresse aux classes moyennes sera-t-elle conservée ?
Monsieur Le Maire, vous avez déclaré à vos partenaires européens en janvier dernier : « nous refusons que le prix de l'électricité soit dicté par le prix du gaz ». Avez-vous abandonné la réforme du marché européen de l'électricité ou avez-vous cédé à l'Allemagne sur ce point ?
Nous sommes favorables au bouclier tarifaire pour l'électricité. Alors que la France produisait l'électricité la moins chère depuis toujours, grâce à vous, elle a désormais les prix les plus élevés. Serons-nous bientôt saisis d'un nouveau projet de loi de finances rectificative qui tienne compte de cette donnée et de l'inflation ?
Monsieur Attal, le Rassemblement national n'a pas de leçon à recevoir de votre gouvernement. Vous avez très bien appris votre argumentaire. Vous nous accusez de tous les maux, comme d'habitude. Mais, je vous le rappelle, c'est bien vous que la Cour des comptes a épinglé une fois encore pour le niveau inégalé des prélèvements obligatoires, ce dont la TVA est largement responsable.
Vous n'avez pas répondu à la question de Philippe Brun sur les OATI.
Monsieur le ministre, j'ai bien entendu votre appel aux classes populaires à ouvrir des livrets d'épargne populaire – j'y suis favorable. Que pensez-vous d'un relèvement du plafond de ces livrets, qui n'est que de 7 700 euros contre plus de 22 000 euros pour le livret A ?
Dans le projet de loi de règlement, 36,5 milliards d'euros de crédits ont été ouverts dans la mission Plan de relance. Or seulement 11 milliards ont été consommés par cette mission. Où sont allés les 25 milliards restants ? Prenez-vous l'engagement de mettre fin à ces transferts de crédits qui tiennent à l'écart le Parlement ?
S'agissant de la consultation « En avoir pour ses impôts », après un rapide examen – je suis allé voir le site internet –, le questionnaire me paraît, très orienté. Vous interrogez les Français sur une liste d'impôts que vous avez supprimés – taxe d'habitation, cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), contribution à l'audiovisuel public – en oubliant, comme par hasard, l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF).
Monsieur Le Maire, le 8 juin 2022, vous avez déclaré : « nous sommes au pic de l'inflation ». Dix mois plus tard, vous nous présentez des documents budgétaires fondés sur une hypothèse d'inflation à 4,9 % cette année et à 2,6 % l'année suivante. Qu'est-ce qui vous fait croire que l'inflation va brutalement diminuer en 2024 alors que le Haut Conseil des finances publiques juge vos prévisions d'inflation trop optimistes ?
En ce moment, des salariés sont mobilisés pour obtenir des hausses de salaire qui sont le seul moyen de faire face à une inflation durable. Tout le monde est en train de se rapprocher du SMIC alors même que le SMIC ne permet plus de vivre dignement.
Monsieur Attal, vous avez lancé un site internet qui nous permet de calculer combien coûte un accouchement, un pompier, un parc, etc. Mais, cela doit être un oubli, rien sur les 150 milliards d'euros d'aides directes et indirectes aux entreprises qui coûtent aux contribuables – les documents budgétaires en attestent – puisque vous ponctionnez notamment les recettes de TVA pour les financer.
S'agissant des hypothèses sur lesquelles vous avez travaillé pour bâtir le programme de stabilité, avez-vous envisagé des transferts de compétences aujourd'hui détenues par l'État ? Si oui, lesquelles ?
Gabriel Attal connaît mon attachement à la gestion immobilière de l'État, qui représente le deuxième poste de dépense du budget de l'État hors dépenses de personnel. Comptez-vous vous attaquer à une gestion préhistorique ? Le refus de la Cour des comptes de certifier les actifs de l'État est un signe des dysfonctionnements. Quels sont les gisements d'économies dans ce domaine ? La France est le dernier pays d'Europe à ne pas avoir fait un exercice de rationalisation.
Le groupe Les Républicains se réjouit qu'enfin le Gouvernement se préoccupe de la réduction des dépenses publiques. Pour autant, la baisse du déficit en 2022 à 4,7 points du PIB est exclusivement due à une évolution très importante des recettes, donc à une hausse des prélèvements obligatoires, mais aucunement à une réduction des dépenses publiques.
La hausse des dépenses, hors dépenses d'urgence sanitaire et dépenses de relance, s'élève à 66,3 milliards d'euros en 2022, ce qui vient s'ajouter à l'augmentation de 37,1 milliards d'euros en 2021 et de 50 milliards en 2020. Or nous n'avons aucune information sur la manière selon laquelle vous comptez réduire les dépenses publiques. Pourriez-vous nous donner plus de précisions ?
Monsieur Attal, je partage vos propos sur les travailleurs de plateformes. Pourquoi ne pas transcrire dans le droit français la directive relative à l'amélioration des conditions de travail dans le cadre du travail via une plateforme dans sa version adoptée le 2 février par le Parlement européen, aux termes de laquelle est instituée une présomption de salariat pour les travailleurs des plateformes ? Cette solution me semble moins pénalisante pour eux que la requalification a posteriori.
Vous prétendez que les bons chiffres – on pourrait discuter de cette appréciation – de l'emploi en France sont dus à la politique de l'offre. Il me semble pourtant que pendant les deux ans de la pandémie de covid, à moins de considérer que le fait pour l'État de payer les salaires de millions de nos concitoyens en relève, cette politique a été largement mise entre parenthèses, ce qui nous a permis de passer un cap difficile.
Monsieur le président, je confirme que le « quoi qu'il en coûte » était exceptionnel. La protection conférée par le dispositif d'activité partielle – en vertu duquel les salaires étaient financés par l'argent public – était exceptionnelle. C'était une bonne décision. Nous avons ainsi évité de perdre des compétences et des sites industriels que nous n'aurions jamais retrouvés. Néanmoins, l'exceptionnel a vocation à rester exceptionnel.
Monsieur Da Silva, nous maintiendrons, à la demande du Président de la République et de la Première ministre, les financements nécessaires pour l'apprentissage. Le développement de l'apprentissage est l'un des grands succès de la politique économique que nous menons depuis plus de six ans – 980 000 apprentis supplémentaires. C'est aussi un succès éducatif et social. De parent pauvre des politiques de l'emploi pendant des décennies, l'apprentissage est devenu la voie royale d'accès à l'emploi en France. Tant mieux.
Monsieur Lacresse, le développement ferroviaire, la rénovation énergétique des bâtiments et la décarbonation seront bien au cœur de nos politiques environnementales dans les années à venir.
Monsieur Laqhila, le meilleur exemple de la capacité de l'administration à réduire ses effectifs tout en conservant son efficacité a été donné par le ministère des finances avec la mise en place du prélèvement à la source. Aucun ministère n'a davantage réduit ses effectifs que le ministère des finances et pourtant la qualité du service a augmenté.
Dans les enquêtes d'opinion, le premier service public cité par les usagers, ce sont les impôts. Je pense au site impots.gouv.fr que nombre de nos concitoyens utilisent en cette période de déclaration fiscale. Il est simple, commode, ouvert. Il montre que, grâce à de nouveaux instruments, on peut réduire la voilure en matière d'emplois publics et augmenter – pas seulement maintenir – la qualité du service public rendu aux usagers.
Monsieur Labaronne, faut-il relever notre prévision de croissance potentielle ? Le taux de 1,35 % me semble raisonnable. Nous n'avons pas voulu le modifier. L'Allemagne a une croissance potentielle à 1 % alors que l'OCDE l'évalue à 0,8 % et à 1,1 % pour la France. En choisissant 1,35 %, nous sommes dans les marges d'écart que pratiquent les autres États européens. Notre croissance potentielle est désormais supérieure à celle de l'Allemagne. C'est là une autre illustration de l'efficacité de la politique de l'offre.
Monsieur Dessigny, l'objectif est de sortir progressivement du bouclier tarifaire sur l'électricité au fur et à mesure de l'application de la réforme du marché européen de l'énergie qui doit commencer au 1er janvier 2025. L'objectif est d'aligner le prix payé par le consommateur sur le coût de production de l'énergie en France, en particulier de l'énergie nucléaire. Je précise, par souci d'honnêteté et de lucidité, que cette convergence n'a de sens que si la France arrête d'importer de l'électricité – l'électricité importée est indexée sur le prix du gaz. Cela suppose d'augmenter le volume de production d'électricité nucléaire en France. C'est un point capital pour l'indépendance et pour la compétitivité industrielle de notre pays. Nous avons obtenu la réforme mais elle n'a d'intérêt que si le volume de production est suffisant pour assurer un prix bas.
Madame Pires Beaune, les coûts de l'indexation de la charge de la dette ont augmenté jusqu'en 2022 à cause de la hausse de l'inflation ; ils baissent entre 2022 et 2023 parce que l'inflation se réduit, donc la charge de la dette diminue de 46 à 41 milliards d'euros ; ensuite, ils augmentent de nouveau à cause de l'impact de la hausse des taux d'intérêt.
Je note votre proposition de relèvement du plafond du LEP. C'est vrai qu'il est plus faible que celui du livret A alors même que le LEP est, de toute évidence, le placement le plus attractif aujourd'hui pour les ménages populaires en France. Cela mérite réflexion. Quant au taux du livret A, j'attends les propositions que me fera le gouverneur de la Banque de France à l'été prochain. Je n'ai pas plus de commentaire à faire pour le moment.
S'agissant du niveau d'inflation, je le répète, nous attendons une baisse à compter de l'été prochain. Nous avons parfaitement conscience que ce qui pèse, aujourd'hui, le plus sur la vie quotidienne des ménages, ce sont les prix alimentaires, d'où mon appel à rouvrir les négociations commerciales entre les grands industriels et les distributeurs pour que soit répercutée sur les prix dans les rayons des supermarchés la baisse des prix de gros que l'on observe aujourd'hui.
Quant au Smic, nous sommes un des seuls pays développés au monde où il est indexé non seulement sur l'inflation mais aussi sur l'augmentation moyenne des salaires, ce qui protège les personnes qui sont au Smic contre l'augmentation de l'inflation. Le Smic a augmenté de 125 euros depuis le début de l'année,
Enfin, madame Louwagie, je vous redis que vous êtes la bienvenue pour participer à la définition des économies de dépenses publiques que nous pourrions réaliser dès le projet de loi de finances pour 2024.
Pour répondre au président Coquerel, il faut distinguer deux sujets. D'une part, il faut vérifier le statut des travailleurs. À chaque fois que l'inspection du travail, les Urssaf ou d'autres services constatent du travail dissimulé et un lien hiérarchique, des procédures sont engagées pour requalifier des travailleurs indépendants en salariés. Certaines plateformes ont été sanctionnées sur ce motif. D'autre part, il faut s'assurer que les indépendants ayant recours aux plateformes sans être salariés acquièrent bien des droits sociaux correspondant au travail qu'ils fournissent. Sur ce sujet, la France a plutôt été motrice en Europe puisque nous avons poussé pour obliger les plateformes de l'économie collaborative à déclarer les opérations réalisées par leur intermédiaire. Cette obligation a été étendue à l'ensemble des pays de l'Union européenne par la directive DAC7. Les données sont ensuite collectées et affichées sur le parcours en ligne de la déclaration d'impôt sur le revenu des personnes physiques et utilisées par les Urssaf.
Deux approches sont possibles : la première consiste à considérer tous les travailleurs qui utilisent les plateformes comme des salariés. Mais certains d'entre eux sont attachés à leur statut de micro-entrepreneur ou d'indépendant. La seconde approche, qui a notre faveur, consiste à aider les travailleurs à acquérir des droits sociaux. Un récent rapport du Haut Conseil du financement pour la protection sociale (HCFPS) estime à 150 millions d'euros le montant des droits sociaux qui ne sont pas attribués aux travailleurs des plateformes. Je refuse de pénaliser les travailleurs et de diminuer leur pouvoir d'achat. Plusieurs pistes parmi lesquelles la retenue à la source sur les plateformes sont à l'étude – certaines sont avancées dans le rapport précité. Aucune décision n'a été prise pour l'instant mais nous devons avancer.
Madame Pires Beaune, pour connaître les crédits issus de la mission Plan de relance transférés à d'autres missions, il faut se référer aux rapports annuels de performance de chaque mission. L'exemple le plus important en volume concerne les primes d'apprentissage : les crédits du plan de relance ont été fléchés vers le ministère du travail.
Monsieur Jolivet, dans sa note, la Cour des comptes estime que l'analyse de l'exécution budgétaire en 2022 du compte d'affectation spéciale (CAS) Gestion du patrimoine immobilier de l'État ne s'est pas écartée des principes et des règles du droit budgétaire. En revanche, la Cour des comptes interroge la pérennité de notre modèle. En effet, nous serons prochainement confrontés à une raréfaction des biens attractifs, donc à un amenuisement des produits de cession. Les difficultés du CAS sont bien connues. La direction de l'immobilier de l'État qui est rattachée au ministère de l'économie et des finances cherche depuis plusieurs exercices à diversifier ses recettes et à trouver des ressources récurrentes et adaptées aux besoins de financement actuels. Je tiens à votre disposition un intéressant rapport de l'Inspection générale des finances sur le sujet. Le chemin vers une réforme de la politique immobilière de l'État est encore long mais nous pouvons nous entendre sur les priorités politiques : mieux financer la transition énergétique, améliorer l'isolation thermique de nos bâtiments, mobiliser tous les leviers d'optimisation et de mutualisation des surfaces. Avec l'essor du télétravail, nombre de grandes entreprises privées se sont engagées dans cette voie. Il faut évidemment que les bâtiments publics s'adaptent aussi au profond changement dans le rapport au travail et à la surface de travail. Sur ces sujets, je sais que nous pourrons avancer ensemble.
En ce qui concerne la consultation « En avoir pour ses impôts », il s'agit d'une démarche tout à tout à fait inédite. Je vous remercie de vous y intéresser. De très nombreux Français ont déjà répondu au questionnaire. Je vous invite à organiser des réunions publiques dans vos circonscriptions et je viendrai, si vous le souhaitez. Je compte m'impliquer personnellement comme je l'ai fait hier. Le questionnaire peut évoluer, je suis à l'écoute de vos suggestions. S'agissant de la liste des impôts que vous avez mentionnée, c'est le volume financier qu'ils représentent qui explique leur présence dans le questionnaire – c'est le cas de la taxe d'habitation et de la CVAE. La suppression que vous évoquez est bien plus médiatisée que les autres. Je suis prêt à faire évoluer le questionnaire mais si vous citez la suppression de l'ISF, vous devez aussi rappeler celle de la taxe d'habitation et de la redevance audiovisuelle ainsi que tout ce que nous faisons pour le pouvoir d'achat des Français.
Monsieur Guiraud, je suis prêt à enrichir le questionnaire. Les 150 milliards d'euros que vous qualifiez d'aides aux entreprises sont, dans leur grande majorité, des allégements de cotisations sociales qui bénéficient directement à l'emploi dans notre pays. On en revient au débat lors de la réforme des retraites dans lequel vous proposiez d'augmenter de 700 euros les charges patronales payées par un patron de PME, un artisan, un commerçant pour un salarié au SMIC. Je suis totalement disposé à faire de la pédagogie sur les aides aux entreprises parce que ce sont bien souvent des aides aux salariés.
Membres présents ou excusés
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire
Réunion du mercredi 26 avril 2023 à 15 heures
Présents. - Mme Christine Arrighi, M. Mickaël Bouloux, M. Philippe Brun, M. Michel Castellani, M. Thomas Cazenave, M. Jean-René Cazeneuve, M. Éric Coquerel, M. Charles de Courson, M. Dominique Da Silva, M. Jocelyn Dessigny, Mme Sophie Errante, Mme Perrine Goulet, M. David Guiraud, M. Patrick Hetzel, M. Alexandre Holroyd, M. François Jolivet, M. Daniel Labaronne, M. Emmanuel Lacresse, M. Mohamed Laqhila, M. Michel Lauzzana, M. Marc Le Fur, M. Pascal Lecamp, Mme Charlotte Leduc, M. Mathieu Lefèvre, Mme Véronique Louwagie, M. Jean-Paul Mattei, M. Damien Maudet, Mme Christine Pires Beaune, M. Christophe Plassard, M. Robin Reda, M. Emeric Salmon, M. Jean-Philippe Tanguy
Excusés. - M. Christian Baptiste, M. Manuel Bompard, M. Fabrice Brun, M. Frédéric Cabrolier, M. Florian Chauche, M. Joël Giraud, Mme Constance Le Grip, Mme Karine Lebon, M. Louis Margueritte, M. Alexandre Sabatou, Mme Eva Sas, M. Charles Sitzenstuhl
Assistait également à la réunion. - M. Jean-Luc Warsmann