La séance est ouverte à neuf heures.
La commission examine la proposition de loi visant à faciliter la mobilité internationale des alternants pour un « Erasmus de l'apprentissage » (n° 576) (M. Sylvain Maillard, rapporteur).
Nous examinons la proposition de loi visant à faciliter la mobilité internationale des alternants pour un « Erasmus de l'apprentissage », dont je salue le rapporteur Sylvain Maillard. Elle est inscrite à l'ordre du jour de la séance publique du mardi 9 mai prochain.
Fruit d'une réflexion de plusieurs mois, réclamée par les acteurs du secteur, pragmatique, la proposition de loi que je défends au nom du groupe Renaissance est une pierre supplémentaire à l'édifice construit depuis plus de cinq ans pour que soit exaucé le vœu formulé en 2017 par le Président de la République et que la moitié d'une classe d'âge passe, avant ses 25 ans, au moins six mois dans un autre pays européen.
Depuis lors, la majorité présidentielle a fait de la recherche du plein emploi l'un des objectifs prioritaires de son action. Nous sommes conscients que la formation reste le meilleur bouclier contre le chômage de masse des publics les plus éloignés de l'emploi, comme le sont les jeunes.
Selon l'Agence européenne de promotion de l'alternance, « il existe un large consensus en Europe sur le fait que l'apprentissage peut être un moyen efficace pour aider les jeunes à effectuer une transition plus harmonieuse entre l'école et l'emploi et remédier aux déséquilibres du marché du travail ».
Outre une meilleure employabilité de nos jeunes, une expérience à l'étranger comme un stage en entreprise ou une formation présente de nombreux avantages. Selon l'étude de l'Observatoire Erasmus+ publiée en décembre 2022, elle permet d'améliorer le niveau de langue, de développer des compétences, un réseau à l'international mais également des capacités d'adaptation et d'autonomie en s'ouvrant à d'autres cultures.
Le 13 mars dernier, notre collègue Fanta Berete et moi avons échangé sur le campus d'Orly avec des élèves et leurs professeurs de baccalauréat professionnel « maintenance de véhicules ». Les élèves nous ont parlé de leur expérience inoubliable et très formatrice en Italie, à l'occasion d'un voyage qui les a transformés. Leurs yeux brillaient ! Ils ont fait part de techniques de réparation de véhicules, d'enseignements différents. À l'issue de nos échanges, ils ont confié être impatients de renouveler cette expérience pendant une période plus longue. Leurs professeurs ont même réfléchi à une évolution des techniques d'apprentissage.
En 2018, la mobilité́ internationale des apprentis, y compris à l'intérieur des frontières de l'Union européenne, était très peu développée puisque 25 000 seulement, parmi eux, avaient bénéficié́ d'une expérience professionnelle hors de France entre deux et trois semaines, contre plus de 600 000 étudiants français qui avaient pu se rendre à l'étranger depuis la création du programme Erasmus. Le rapport de Jean Arthuis remis à Muriel Pénicaud en 2018 pour lever les freins à la mobilité des apprentis en Europe pointait d'ailleurs la discrimination dont sont victimes les apprentis par rapport aux étudiants.
Le programme Leonardo da Vinci, auquel a succédé Erasmus+ en 2014, a permis de lever partiellement ce frein à la mobilité européenne pour les jeunes en formation professionnelle.
Dans un rapport publié en novembre 2017, l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) dénonçait déjà l'existence de freins importants au développement de la mobilité, tenant pour l'essentiel à l'obligation, pour les entreprises françaises, de rémunérer l'apprenti et de payer les cotisations pendant la période de mobilité à l'étranger, aux calendriers pédagogiques des centres de formation d'apprentis (CFA), aux difficultés de la certification des compétences et à la complexité des procédures administratives de mobilisation des crédits d'Erasmus+.
Dans un autre rapport sur le développement de la mobilité européenne des apprentis, publié en décembre 2022, l'Igas a formulé vingt et une recommandations afin d'augmenter significativement le nombre d'apprentis qui partent en mobilité́ européenne. Cette proposition de loi s'inscrit dans l'esprit de ce rapport.
Ainsi, même si la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel a posé un nouveau cadre juridique pour la mobilité des apprentis et des bénéficiaires de contrats de professionnalisation en créant deux types de mobilités – en fonction notamment de la durée de la période à l'étranger –, elle ne laisse pas la possibilité de maintenir la rémunération du jeune en cas de mobilité de plus de quatre semaines, ce qui contrevient au souhait de certaines entreprises et qui peut mettre en difficulté l'apprenti lorsqu'il ne perçoit aucune rémunération dans le pays d'accueil.
Il était donc important de rendre optionnelle la mise en veille de certaines clauses du contrat d'apprentissage. En effet, la disposition légale qui oblige à mettre en veille certaines clauses des contrats d'apprentissage et de professionnalisation pour les mobilités de plus de quatre semaines est de nature à freiner, voire empêcher, la mobilité internationale de certains apprentis dont les maîtres d'apprentissage entendent maintenir l'indemnisation, notamment dans l'enseignement supérieur.
Par ailleurs, cette mise en veille obligatoire du contrat de travail dissuade les jeunes qui perdent, de fait, leur salaire sans que les sommes qu'ils peuvent percevoir des opérateurs de compétences (Opco), variables d'un opérateur à l'autre, assurent une compensation suffisante. Certaines entreprises elles-mêmes ne sont pas demandeuses de la mise en veille du contrat de travail car, en embauchant l'apprenti, elles ont intégré qu'une partie de son temps en CFA s'effectuerait à l'étranger.
Il s'agit par conséquent d'autoriser le statut de « mise à disposition de l'alternant » pour tout type de mobilité, dès lors que maître d'apprentissage et apprenti en conviennent. La mise en veille resterait une autre solution praticable, au choix des parties prenantes. Tel est l'objet de l'article 1er de cette proposition de loi, qui répond aux souhaits des entreprises et des CFA. Le vote de ce dispositif substitue l'option à l'obligation.
L'article 2 facilite la conclusion de conventions pour les alternants effectuant une mobilité internationale dans un organisme de formation en supprimant l'obligation d'une convention individuelle de mobilité́ lorsqu'un partenariat existe déjà.
L'article 3 prévoit d'organiser une convergence des prises en charge financières par les opérateurs de compétences et de rendre obligatoire la compensation des coûts liés aux cotisations sociales.
Dans un contexte où le marché du travail est mondialisé, la mobilité des alternants à l'étranger constitue un levier pour favoriser l'insertion dans l'emploi. Malgré le contexte sanitaire peu propice à la mobilité de manière générale, les chiffres publiés par l'Observatoire Erasmus+ pour la période précédant la crise sanitaire sont encourageants puisqu'ils témoignent d'une progression significative depuis la réforme de 2018. En effet, 6 870 alternants ont effectué une mobilité en 2018-2019, soit une progression de 30 % par rapport à l'année scolaire précédente.
Nous devons maintenant accélérer cette dynamique. L'année 2022 a permis à notre politique de l'apprentissage de franchir un nouveau cap avec – c'est un record historique – 837 000 nouveaux contrats signés. Nous devons continuer à soutenir, à accompagner et à réguler la formation des parties prenantes de l'apprentissage.
Soutenir, en pérennisant l'aide de 6 000 euros à l'embauche des alternants pour tous jusqu'en 2027, comme annoncé par le Président de la République ; accompagner, en augmentant le nombre d'apprentis afin d'atteindre un million d'apprentis par an d'ici à la fin du quinquennat ; réguler, grâce à la certification de France Compétences pour améliorer la qualité des formations, mieux connecter l'offre et la demande.
Ce texte consensuel s'inscrit dans la continuité des politiques conduites en matière de formation et d'apprentissage. Il leur donne une dimension européenne et internationale. Vous en conviendrez : chaque jeune devrait avoir une expérience européenne. Devenir citoyen européen ne se décrète pas : cette relation doit se construire et se nourrir à travers de multiples rencontres au-delà des frontières de notre pays. Les étudiants et les apprentis ont tant à apprendre de nos homologues européens – et réciproquement car nous parlons bien d'échanges d'alternants !
Au nom du groupe Renaissance, je tiens à saluer Jean Arthuis, ancien ministre de l'économie, sénateur et député européen, président d'Euro App Mobility, qui depuis tant d'années a défendu avec force et conviction la cause de la mobilité des apprentis. Je remercie également les administrateurs de l'Assemblée nationale pour les auditions menées, indispensables pour anticiper et comprendre les enjeux liés à la mobilité internationale des apprentis.
Cette proposition de loi vise principalement à faciliter la mobilité des apprentis à l'étranger, soit leur départ mais aussi leur accueil. Le programme Erasmus est un succès, avec près de 600 000 étudiants qui partent à l'étranger chaque année, mais seuls 25 000 apprentis, en moyenne, en bénéficient. Si les lois du 29 mars et du 5 septembre 2018 ont permis d'augmenter leur nombre, celui-ci reste encore trop peu élevé en raison d'un certain nombre de freins.
Pourtant, la mobilité garantit la valorisation du parcours de formation des apprentis grâce à la connaissance d'une langue et au développement de compétences telles que l'ouverture à la nouveauté ou l'adaptabilité. Elle conforte également leur employabilité.
L'insertion des jeunes est l'une des priorités du Gouvernement. Ce texte comporte des mesures importantes, attendues des employeurs, des CFA et des associations comme Euro App Mobility mais aussi préconisées par le rapport de l'Igas de décembre 2022. Il propose une alternative à la mise en veille du contrat, jusqu'ici unique option offerte aux entreprises pour les mobilités de plus de quatre semaines. Les responsabilités de l'entreprise étaient alors levées, comme la rémunération et la couverture sociale. Dorénavant, la mise à disposition permettra aux employeurs qui le souhaitent de jouer pleinement leur rôle et de faire de l'apprentissage un des leviers de leur politique de ressources humaines. Quelle que soit l'option choisie, la proposition de loi sécurise également la protection sociale de l'apprenti, qui n'aura pas à débourser 1 euro pour disposer d'une couverture minimale. Je vous propose donc de soutenir ce texte.
Cette proposition de loi est l'occasion d'évoquer cette importante question que sont les programmes de mobilité pour les alternants, qui offrent une solution concrète pour renforcer la compétitivité de la France sur le marché international. Ces programmes permettent aux étudiants de travailler et d'apprendre dans des environnements variés, de développer leurs compétences linguistiques et professionnelles, de bâtir un réseau de contacts internationaux qui leur seront utiles pendant toute leur carrière.
S'il est évident que notre projet politique n'est pas en accord avec celui que défendent les auteurs de ce texte, la mondialisation et la concurrence internationale n'en sont pas moins des réalités auxquelles nous devons faire face. Notre pays se doit de rester compétitif pour prospérer et pour assurer l'emploi des travailleurs français.
Cette proposition de loi vise à faciliter l'utilisation de ces programmes en éliminant les obstacles administratifs, en fournissant un soutien financier et logistique aux étudiants et aux entreprises. Nous avons espoir que celles-ci assureront l'accessibilité de ces programmes à tous les étudiants français, indépendamment de leurs origines sociales ou géographiques.
Nous devons donc veiller à ce que les programmes de mobilité des alternants soient conçus de façon à protéger les intérêts de notre pays et de ses travailleurs, et à nous assurer que les étudiants qui y participent ne soient pas utilisés comme une main-d'œuvre bon marché par les entreprises étrangères. Nous devons également garantir que les entreprises françaises puissent accéder à des programmes similaires à l'étranger afin de renforcer la réciprocité et la protection de l'emploi en France, tout en faisant rayonner la francophonie.
Compte tenu de ces éléments, nous ne pouvons faire échec à ce texte, qui relève d'un certain bon sens. Nous le voterons donc.
Cette proposition de loi poursuit un objectif certes louable de simplification et de sécurisation de l'accès à la mobilité des alternants et apprentis. Cependant, elle prolonge la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel défendue en son temps par Muriel Pénicaud. Depuis 2019, la loi permet aux entreprises d'ouvrir leurs propres centres de formation et d'alternance, mettant ainsi en cause la voie professionnelle sous statut scolaire. Le nombre de CFA a triplé – ils sont au nombre de 3 000. Les universités et lycées professionnels publics sont fragilisés par cette concurrence. Les élèves bacheliers et étudiants qui n'ont pas pu accéder à la filière de leur choix à cause de Parcoursup et, à présent, de la plateforme Mon Master sont orientés directement ou indirectement vers des contrats d'apprentissage, dont le nombre a explosé dans le supérieur. Tout confondu, ils sont passés de 500 000 à près d'un million de 2019 à fin 2022.
Pour chaque contrat d'apprentissage signé, des milliers d'euros sont versés à l'entreprise afin de financer la formation et une partie de la rémunération de l'apprenti. En trois ans, comme l'a dénoncé la Cour des comptes, 35 milliards d'euros ont été versés en aides et subventions au titre de l'apprentissage. Muriel Pénicaud l'a d'ailleurs compris en intégrant le conseil d'administration de Galileo Global Education, devenu fleuron mondial de l'enseignement supérieur privé et implanté dans dix-huit pays.
Un obstacle, cependant, pour continuer de percevoir les financements : le contrat est mis en veille au-delà de quatre semaines de mobilité à l'étranger. Sous couvert de sécurisation, il s'agit en fait d'ouvrir et d'élargir le marché toujours plus juteux de la formation privée.
Nous proposons quant à nous une garantie d'autonomie pour les jeunes en formation de 18 à 25 ans, et dès 16 ans pour ceux qui sont en formation professionnelle, ainsi que le rétablissement d'un véritable service public de la formation continue, indispensable pour garantir l'égalité financière. C'est pourquoi nous ne soutiendrons pas cette proposition de loi.
Il est nécessaire de promouvoir et de faciliter la mobilité européenne des apprentis qui, aujourd'hui, demeure une exception. Erasmus ne doit pas être le privilège des étudiants, ni réservé à l'enseignement supérieur. De plus, les mobilités sont encore trop courtes. Tout ce qui peut être fait pour encourager la mobilité internationale des alternants doit l'être : c'est bénéfique pour eux, pour les entreprises et les économies nationales, qui peuvent être stimulées.
L'instauration d'une mobilité internationale dans le cadre d'un contrat d'apprentissage et selon les niveaux de diplôme demeure complexe en raison d'un manque d'autonomie de nombreux apprenants, qu'il conviendrait de mieux accompagner, et de problèmes linguistiques. L'insuffisance des bourses peut également être un frein financier. Enfin, les financements sont parfois trop illisibles ou inégalitaires.
Il conviendra également de réfléchir au positionnement et aux obligations des entreprises françaises. Des simplifications seraient de bonne politique, notamment s'agissant de la protection sociale des apprenants.
De ce point de vue, cette proposition de loi mérite d'être enrichie. Nous la voterons mais il conviendra de la renforcer lors des discussions en séance publique.
Nous voterons cette proposition de loi.
Jean Arthuis fut un infatigable militant européen qui sut combien, ensemble, nous pouvons être plus forts, sans perdre pour autant nos identités, en permettant à des jeunes de découvrir les pays voisins.
Ce texte rappelle la loi ambitieuse de 2018 déjà citée. J'ai longtemps entendu dire qu'il n'était pas possible d'aller au-delà de 300 000 apprentis. Nous en sommes à 800 000 et nous avons l'objectif du million. L'alternance est une possibilité extraordinaire pour ceux à qui une formation théorique ne convient pas. La suppression d'un certain nombre de freins, l'octroi de nouveaux moyens, l'amélioration de la couverture sociale et les facilités offertes aux entrepreneurs sont autant de chances pour les entreprises et les jeunes à qui nous offrons, en quelque sorte, un nouveau passeport pour la vie.
Je fais confiance à notre intelligence collective. Il est toujours possible de bouder, de considérer que ce texte ne va pas assez loin. Mais une telle opportunité pour la jeunesse doit nous réunir. Peut-être ferons-nous ainsi un peu rêver notre jeunesse, dans le contexte difficile que nous connaissons !
Depuis six ans, chaque année, en moyenne, 155 alternants partent plus d'un mois en Erasmus. En tout, ils sont 933, ce qui est trop peu. Il convient de remédier à une telle situation. Sur 100 000 mobilités financées par l'agence française, 7 000 alternants ont été concernés. Nous pouvons mieux faire, comme pour la durée des séjours, bien trop courte pour les alternants.
Les apports d'Erasmus sont indéniablement positifs et contribuent à la construction d'une identité européenne. Comme disait François Mitterrand, il faut faire en sorte que les jeunes d'Europe se connaissent davantage et la période des études ou de la formation, de ce point de vue, est propice. L'ancien Président de la République était frappé, en effet, que les jeunes préfèrent alors partir aux États-Unis plutôt que dans des pays européens.
Comment permettre aux classes les plus défavorisées de bénéficier de cette expérience à l'étranger ? Comment développer la possibilité, pour les alternants et les personnes en contrat professionnel, d'en profiter en plus grand nombre et plus longuement ? Ainsi, 12 % des personnes économiquement vulnérables ont pris part au programme Erasmus. Si cela ne signifie pas que seules les classes favorisées y ont participé, le diable se cache dans les détails puisque les séjours les plus longs, donc les plus coûteux, ne bénéficient pas aux classes populaires. Cette proposition de loi ne répond pas spécifiquement à cette question.
Il faut également s'interroger quant aux dispositifs d'incitation, d'acculturation, de bourse. En offrant un cadre juridique aux contrats d'apprentissage et de professionnalisation – tout en simplifiant leur signature – et en garantissant des droits, ce texte lève des freins. Mais nous regrettons que la loi ne garantisse pas les ambitions de son exposé des motifs et qu'elle s'en remette à un décret. Nous souhaitons accroître la démocratisation de cette belle expérience qu'est Erasmus.
Depuis sa création en 1987, le programme Erasmus a permis à plus de 3 500 000 jeunes européens d'améliorer leurs compétences linguistiques et de découvrir de nouvelles pratiques professionnelles et culturelles. Source d'une immense richesse pour notre jeunesse, la valeur de ce dispositif ne fait aucun doute. Nous constatons tous, néanmoins, une inégalité d'accès, les apprentis ne représentant qu'une part infime des bénéficiaires. Ce sont quelque 180 000 d'entre eux qui ont effectué une mobilité à l'étranger depuis 1995, date à laquelle le programme Erasmus leur a été ouvert.
Parallèlement, nous avons toujours eu à cœur de redonner ses lettres de noblesse à l'apprentissage, notamment à travers la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel. Cette réforme est un véritable succès puisque, depuis 2018, plus de 2 500 000 jeunes se sont engagés dans cette voie d'excellence. Cette tendance ne faiblit pas.
Avec des conditions sans doute trop strictes, cette loi a étendu les possibilités d'exécution du contrat d'apprentissage à l'étranger. Or, les conditions d'autorisation constituent des freins au développement de la mobilité internationale de nos apprentis.
Je tiens à saluer le travail du rapporteur Sylvain Maillard visant à perfectionner ce dispositif. Par l'autorisation donnée à l'employeur de mettre l'apprenti à disposition pour une mobilité de plus de quatre semaines tout en maintenant sa rémunération, par la clarification ou la simplification du cadre juridique des conventions individuelles de mobilité, par l'organisation d'une convergence des niveaux de financement de la mobilité par les opérateurs de compétences et la garantie d'une couverture sociale gratuite pour tous, ce texte lèvera les freins juridiques à la mobilité de nos apprentis. Cette proposition de loi est une excellente nouvelle pour les jeunes, en ce qui concerne tant leur employabilité dans un marché du travail mondialisé que leur ouverture au monde. Nous la voterons.
Cette proposition de loi répond à une inégalité dans l'accès à l'éducation et à la mobilité internationale. En effet, les mobilités Erasmus en formation professionnelle ne représentent que 22 % des demandes. Force est de constater que le droit du travail freine sérieusement les jeunes pour aller se former à l'étranger. En ce sens, ce texte est une première pierre à l'édifice afin que les mobilités Erasmus ne soient pas réservées aux seuls étudiants de l'enseignement supérieur. Toutefois, s'il s'agit de lever les obstacles juridiques à la mobilité des apprentis, la proposition de loi ne fait rien contre de nombreux autres freins.
Des freins administratifs tout d'abord : si la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel a ouvert la voie à la création de référents mobilité dans les CFA, ceux-ci sont trop peu nombreux et les informations trop éparses. Il convient de faire un état des lieux de la généralisation des référents mobilité et d'étudier la possibilité d'un portail unique de la mobilité en apprentissage.
Des freins géographiques, ensuite : les bénéfices de la mobilité internationale ne doivent pas être réservés aux seuls apprentis d'Europe. Nous aurions aimé que des programmes d'échanges favorisent également la mobilité des apprentis des territoires d'outre-mer au sein des pays voisins.
Des freins financiers, enfin : l'accès aux bourses de mobilité est insuffisant. Tous les étudiants devraient avoir l'opportunité de se former à l'étranger, quels que soient leurs milieux d'origine, leurs revenus et leurs études.
Nous soutenons cette proposition de loi. Mais nous appelons à aller au-delà des freins juridiques car si les voyages forment la jeunesse, ils doivent aussi former les apprentis.
Cette question est importante. Je crois à la pertinence des échanges avec l'étranger pour l'ensemble des étudiants. Il est regrettable que les apprentis, pourtant de plus en plus nombreux, ne puissent bénéficier des meilleures conditions pour s'emparer pleinement de ces possibilités.
Le Gouvernement encourage l'apprentissage avec l'objectif de parvenir à un million d'apprentis, l'apprentissage étant le garant d'une insertion progressive et réussie sur le marché du travail. La mise en veille automatique du contrat, en effet, est un frein. La mise à disposition doit être privilégiée pour la mobilité internationale. Nous soutenons quant à nous la prise en charge obligatoire par les Opco de leur protection sociale.
Les obstacles financiers doivent être également aplanis : nous proposons de majorer le contrat d'apprentissage lorsque celui-ci se déroule à l'étranger. D'autres freins doivent être levés, notamment outre-mer et singulièrement à La Réunion, où nous souhaitons développer les échanges avec les pays du bassin océanique. Nous souhaitons que la mobilité soit cohérente avec l'histoire et la culture des territoires où les apprentis auront vocation à exercer. Enfin, même si cela excède le cadre de cette proposition de loi, il est important de valoriser l'apprentissage des langues, bien en amont de l'apprentissage.
Nous attendons de connaître la teneur des débats et le sort réservé à nos amendements pour nous prononcer. Mais notre priorité demeure la protection des apprentis en termes de droits sociaux et de conditions de travail, ici comme à l'étranger.
Cette proposition est intéressante car elle vise à faciliter concrètement la mobilité des alternants, ce qui est bénéfique tant pour eux que pour les structures qui les accueillent. Elle en simplifie l'accès et sécurise les parcours. Cela étant, il faut clarifier le périmètre du dispositif. Les dimensions internationale et européenne ont été évoquées. Or, on sait qu'un des obstacles à la mobilité réside dans les différences en matière de droit applicable. On a vu quelles ont été les conséquences du Brexit pour les jeunes qui rêvaient d'aller au Royaume-Uni dans le cadre du programme Erasmus.
L'objectif de votre proposition est-il européen ou international ? Lorsque la mobilité a lieu en dehors de l'Union européenne, y a-t-il des obstacles à l'application des mesures prévues en ce qui concerne les conventions individuelles, les simplifications et la convergence des niveaux de financement ?
Cette proposition permet d'élargir davantage le bénéfice de l'excellent programme Erasmus en l'étendant aux apprentis, ce qui permet de réduire les inégalités. C'est une bonne nouvelle.
On parle assez peu du cadre européen dans cette proposition. Or, à l'occasion de la présidence française de l'Union européenne en 2022, il était prévu que la Commission européenne propose de nouvelles mesures pour lever les obstacles à la mobilité des apprentis et pour construire un réseau européen d'apprentissage. Comment votre proposition s'articule-t-elle avec le cadre réglementaire européen ? Y a-t-il une convergence entre les deux ?
Nous devons évidemment favoriser la mobilité internationale des apprentis. Des avancées ont vu le jour notamment en ce qui concerne les niveaux certificat d'aptitude professionnelle et baccalauréat professionnel, et l'on peut s'en féliciter. De nombreuses bourses et aides à la mobilité internationale sont proposées mais elles diffèrent énormément en fonction des Opco et des régions. Nous devons gommer ces inégalités.
Actuellement, la mise à disposition de l'alternant dans le pays d'accueil est possible uniquement pour les mobilités courtes n'excédant pas quatre semaines. L'article 1er de la proposition de loi prévoit que les mobilités pourront avoir lieu soit dans le cadre d'une mise en veille du contrat – la responsabilité de l'employeur en matière de santé et de sécurité est alors levée et il n'a pas à verser de rémunération –, soit dans le cadre de la mise à disposition de l'alternant, ce qui permet de maintenir la responsabilité de l'employeur vis-à-vis de son alternant et la rémunération de ce dernier. Je me réjouis de cette avancée.
Toutefois, il est fort probable que les entreprises ne comprennent pas l'intérêt réel de cette option, pour elles et les apprentis. Nombre d'entreprises m'ont fait part de leur inquiétude quant aux conséquences de cette nouvelle législation. Quelles garantie pouvez-vous leur apporter afin de les rassurer et de les convaincre des bienfaits de votre proposition ?
Je remercie Fanta Berete pour son soutien lors de l'élaboration de cette proposition de loi. Nous avons en effet vécu un moment fort à l'occasion de notre rencontre avec des jeunes travaillant dans un CFA spécialisé dans la réparation automobile à Orly. Un séjour de seulement deux semaines à l'étranger les avait profondément changés ; il avait également amené leurs enseignants à faire évoluer la formation. Ce CFA souhaite que les jeunes repartent à l'étranger. Mais il est confronté à la limite des quatre semaines. Le texte permettra de lever ce frein. Les jeunes ne partent pas à l'étranger principalement pour des raisons financières. Nous devons apporter une réponse pragmatique avec les Opco et les entreprises. C'est l'objet de cette proposition de loi.
Monsieur Catteau, il s'agit bien d'un programme d'échanges : un apprenti français peut aller à l'étranger quand un apprenti étranger est accueilli en France. Comme vous l'avez relevé, un séjour à l'étranger est bénéfique pour les jeunes. Je me réjouis que vous soyez favorable à ce texte. Peut-être votre projet politique va-t-il évoluer...
Monsieur Legrave, la proposition de loi s'inscrit bien dans le prolongement de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel votée en 2018. Notre majorité a toujours favorisé le développement de l'apprentissage car nous pensons qu'il est formateur pour les jeunes et qu'il permet d'obtenir plus facilement un emploi. Votre groupe y est plutôt opposé. Alors que Jean-Luc Mélenchon a été en quelque sorte le ministre des apprentis il y a trente ans, je reste bouche bée devant un tel revirement
M. Viry a dit nombre de choses avec lesquelles je suis d'accord. Il a mentionné le problème de la maîtrise des langues étrangères, qui a été relevé dans beaucoup de CFA. Mais nombre d'entre nous sont partis étudier à l'étranger avec un niveau de langue parfois moyen. La motivation vient du désir d'aller à l'étranger et le niveau progresse lors du séjour. Cher collègue, vous avez indiqué que vous souhaitiez muscler la proposition. J'étudierai les amendements que vous déposerez en séance publique avec bienveillance.
Je remercie M. Vigier pour son soutien continu au développement de l'apprentissage. Nous partageons la même filiation politique aux côtés de Jean Arthuis.
Vous avez raison, monsieur Delaporte : il n'y a pas assez de mobilités de plus de quatre semaines. Les chiffres que vous avez cités et qui figurent dans mon rapport ne sont pas satisfaisants. La proposition de loi vise précisément à lever les freins et à trouver des solutions pragmatiques pour accroître les échanges à l'étranger pendant plus de quatre semaines. Nous souhaitons aussi une prise en charge obligatoire par les Opco. Des engagements seront pris à cet égard par le Gouvernement en séance publique.
Je remercie M. Christophe pour son soutien sans faille.
Madame Garin, vous avez évoqué à juste titre la contrainte des frais administratifs. Il est hors de question que l'administration empêche le développement de l'apprentissage que nous organisons depuis 2018.
Comme M. Maillot, vous avez abordé la question de la mobilité des apprentis outre-mer. Un système d'échange y existe déjà grâce à des conventions signées avec les États voisins. Pour Mayotte et La Réunion, il s'agit des pays d'Afrique de l'Est. Pour la Guadeloupe, la Martinique et la Guyane, cela concerne l'Amérique du Nord et la façade atlantique de l'Amérique du Sud. Est-ce au niveau de ce que nous souhaitons ? Évidemment non, mais le cadre juridique existe. La possibilité d'aller au-delà de quatre semaines d'échange va renforcer ces mobilités. Le programme Erasmus vise l'Europe mais il repose sur l'idée que les jeunes puissent aussi partir découvrir le monde. Pour que le système fonctionne outre-mer, il est probablement plus efficace de l'organiser avec les pays proches.
Trente-trois pays participent au programme Erasmus+, monsieur Bazin. La proposition de loi vise à accroître les échanges au sein de l'Union européenne, mais la démarche est pragmatique. Pour des raisons de coût, mieux vaut prévoir les échanges outre-mer avec les pays voisins ; c'est aussi plus cohérent avec la zone économique où les jeunes seront amenés à travailler. Il s'agit également d'organiser des échanges avec des pays qui proposent une protection sociale équivalente à celle de la France – ce qui est plus facile avec des pays européens. La proposition de loi assure une telle protection aux apprentis et elle prévoit que celle-ci soit financée ou complétée par les entreprises ou les Opco, le cas échéant.
Monsieur Le Gac, l'action de l'Union européenne et les dispositions de ce texte convergent. La difficulté liée à la limite de quatre semaines relève du cadre juridique français. Cela réduit le nombre d'apprentis français à l'étranger, mais aussi d'apprentis étrangers en France. Il nous revient de lever les freins et c'est ce qui est prévu par cette proposition de loi.
Madame Valentin, il faut en effet une convergence de la prise en charge par les Opco. Les différences figurent dans le rapport et c'est simplement édifiant. Après en avoir discuté avec les représentants des différents Opco, nous proposons que l'un d'entre eux prenne le rôle de chef de file pour déterminer un mode opératoire de l'alternance à l'étranger, probablement en prévoyant des forfaits et des formations en fonction des pays. C'est l'Opco qui dispose du plus grand nombre d'apprentis qui a vocation à le faire. Les représentants des Opco ont dit être disposés à suivre cette voie, qui leur évite de tous faire le même travail coûteux. Ils souhaitent qu'on les laisse s'organiser entre eux, à charge pour nous de mettre en place un cadre juridique stable. C'est ce que nous faisons avec cette proposition de loi.
Article 1er : Assouplir les conditions de mise en œuvre de la mobilité internationale des alternants
La commission adopte les amendements rédactionnels AS15, AS16, AS17 et AS 18 du rapporteur.
Amendement AS26 du rapporteur.
Cet amendement apporte une réponse à une difficulté observée sur le terrain. À l'heure actuelle, certains partenaires étrangers refusent de signer la convention de mise en veille au motif qu'ils ne se considèrent pas liés par des stipulations qui n'intéressent selon eux que les contractants français. Cela constitue un obstacle préjudiciable au développement de la mobilité internationale des alternants.
Par dérogation au régime de droit commun, l'amendement permet que la convention de mise en veille soit conclue entre les seules parties françaises – c'est-à-dire l'apprenti ou le bénéficiaire du contrat de professionnalisation, le CFA ou l'organisme de formation et l'employeur établi en France. Cette possibilité ne sera toutefois ouverte que dans le cas où l'employeur de l'État d'accueil apportera un certain nombre de garanties à l'alternant, notamment en matière d'organisation de la mobilité et de conditions d'accueil, équivalentes à celles données dans le cadre de la convention de mise en veille de droit commun. Le contenu de celle-ci est largement standardisé – garanties relatives à la relation de travail, à la santé et la sécurité au travail, aux objectifs pédagogiques et à la responsabilité civile. La liste de ces garanties sera fixée par voie réglementaire.
Cette simplification administrative permet d'éviter que l'échange soit bloqué par le refus de signature d'une entreprise étrangère alors qu'elle offre en fait les mêmes garanties.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'amendement rédactionnel AS19 du rapporteur.
Amendement AS8 de M. Yannick Monnet.
Cet amendement ajoute aux missions des entreprises accueillant des apprentis l'information sur la mobilité nationale et internationale. Cet accompagnement doit se faire en lien avec les référents mobilité des CFA, dont le rôle doit être renforcé.
Vous souhaitez que l'obligation pour l'employeur d'informer l'apprenti sur la mobilité nationale et internationale soit inscrite dans la loi. Pour essentielle que soit la délivrance d'une bonne information sur ce point, il ne paraît pas indispensable d'en faire une obligation légale pesant sur l'employeur.
Certes, la loi prévoit que ce dernier s'engage à faire suivre à l'apprenti la formation dispensée par le CFA ou qu'il veille à l'inscription et à la participation de l'apprenti aux épreuves du diplôme. Mais il s'agit d'obligations légales pesant sur l'apprenti. Il n'est donc pas illogique que la loi implique l'employeur dans la mise en œuvre de ces actions.
Toutefois, l'organisation d'une mobilité ne répond pas à la même logique puisqu'elle ne constitue qu'une faculté pour l'apprenti. Imposer à l'employeur de délivrer une information sur cette question ne semble donc pas justifié. Du reste, la désignation d'un « tuteur mobilité » dans l'entreprise ne suppose pas que la loi le prévoie expressément.
Je rappelle que la loi confie aux CFA la mission d'encourager la mobilité nationale et internationale des apprentis en affectant un personnel à cette tâche. C'est avant tout sur ce point qu'il convient de travailler, en faisant progresser la diffusion de l'information dans les CFA et en veillant au bon déploiement des référents mobilité en leur sein.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte ensuite les amendements rédactionnels AS20 et AS21 du rapporteur.
Puis elle adopte l'article 1er modifié.
Article 2 : Simplifier la conclusion de conventions dans le cadre des mobilités dans un organisme de formation
La commission adopte l'amendement rédactionnel AS23 du rapporteur.
Amendement AS25 du rapporteur.
Cet amendement étend la dérogation introduite par l'article 2 aux CFA dont les enseignements sont dispensés par une autre structure, avec laquelle une convention a été conclue afin de délivrer tout ou partie des enseignements. Cette dérogation concerne les établissements d'enseignement ou organismes de formation ou entreprises qui assurent des enseignements normalement dispensés par le CFA, visés aux articles L. 6232-1 et L. 6233-1 du code du travail.
Cette disposition offrira une égalité de traitement entre apprentis quelle que soit la structure auprès de laquelle ils sont inscrits, le CFA demeurant responsable de la bonne mise en œuvre du dispositif et de la mise à disposition des pièces justificatives en cas de contrôle.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'amendement rédactionnel AS22 du rapporteur.
Amendement AS14 de M. Arthur Delaporte.
Cet amendement prévoit que, lorsque la convention qui organise la mobilité est conclue en France, elle est notifiée à l'organisme de formation d'accueil situé à l'étranger. Si l'objectif de faciliter la signature d'une convention peut s'entendre afin de ne pas restreindre les chances de mobilité, l'objet de la convention n'en n'est pas moins important car il conditionnera l'accompagnement – et donc la qualité de l'expérience de l'apprenti ou de l'alternant. Il est nécessaire de notifier la convention conclue à l'organisme d'accueil pour qu'il ait pleine connaissance des objectifs, des modalités de la mobilité et de l'accompagnement. Cela permettra de sécuriser les parties prenantes, notamment le jeune.
Cet amendement va dans le sens de cette proposition de loi en réaffirmant le caractère obligatoire de la conclusion de cette convention.
Votre amendement va à l'encontre de notre objectif de simplification. Par ailleurs, les accords de partenariat comporteront toutes les stipulations relatives aux engagements de l'organisme d'accueil vis-à-vis de l'alternant en mobilité. Il est également prévu qu'une liste nominative des alternants concernés soit annexée à ces accords. Toutes les garanties seront donc apportées pour que les alternants bénéficient d'une protection similaire à celle dont ils disposent actuellement.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte ensuite l'amendement rédactionnel AS24 du rapporteur.
Puis elle adopte l'article 2 modifié.
Article 3 : Favoriser l'harmonisation des prises en charge et garantir une couverture sociale minimale
La commission adopte l'article 3 non modifié.
Après l'article 3
Amendement AS11 de M. Sébastien Peytavie.
Il s'agit d'étudier la création d'un portail de la mobilité en apprentissage, décliné par région. La plateforme comprendrait une cartographie des dispositifs ainsi qu'un recensement des bourses et des aides qui favorisent la mobilité européenne des apprentis.
En demandant un rapport sur la création d'un portail unique consacré à la mobilité, vous soulevez un point crucial : l'information des apprentis sur les possibilités qui leur sont offertes en matière de mobilité. Selon l'Igas, celle-ci est abondante mais souvent éclatée, et de ce fait peu lisible.
Toutefois, il me semble préférable de laisser le soin à la concertation de préciser les contours de la future plateforme dont la création fait l'unanimité. En outre, je suis réservé sur les demandes de rapport d'autant plus lorsqu'elles émanent d'une proposition de loi. Il appartient aux parlementaires de suivre l'application des textes dont ils sont à l'initiative.
J'émets donc un avis défavorable.
Je soutiens l'amendement, qui a le mérite de pointer les inégalités d'accès à l'information sur la mobilité. On le sait, les premiers bénéficiaires d'Erasmus sont ceux qui sont déjà les mieux insérés. L'amendement a pour objet de rassembler les informations et de les rendre plus accessibles. Son adoption serait le signe d'une démocratisation des dispositifs de mobilité européenne. À défaut de créer lui-même le portail, le Parlement peut le suggérer.
Tout le monde s'accorde sur la nécessité de créer une plateforme. Si le rapport n'est pas la voie appropriée, comment nous assurer qu'elle verra bien le jour ?
Je soutiens également l'amendement.
Monsieur le rapporteur, votre réponse illustre l'erreur de méthodologie de la majorité dans cette législature. Vous devez changer de logiciel sinon vous allez au-devant de nouvelles déconvenues dans les mois à venir. Même si l'approbation d'une demande de rapport contrevient à vos principes, dès lors que vous reconnaissez le besoin de créer un portail, acceptez un amendement de l'opposition qui sert l'objectif que recherche la proposition de loi !
Oui, il faut un portail – le rapport de l'Igas le dit clairement – et tous les opérateurs en sont convaincus. C'est à eux de le mettre en place et à nous d'effectuer le suivi. Nous avons besoin du portail et non d'un rapport.
La commission pourrait adopter l'amendement afin de manifester son soutien à la création d'un portail, charge au Gouvernement de nous convaincre en séance publique de le retirer en présentant les étapes vers celui-ci.
La commission est souveraine. Mais je répète la ligne de conduite que j'ai adoptée depuis six ans : il appartient aux parlementaires de se saisir de l'application d'une proposition de loi. Nonobstant l'unanimité sur la création d'un portail, je maintiens donc mon avis défavorable. Mais je me plierai à la décision de la commission.
La commission rejette l'amendement.
Amendement AS12 de M. Sébastien Peytavie.
Seuls les CFA les plus volontaristes disposent aujourd'hui d'un référent mobilité. Afin de lutter contre les inégalités territoriales d'accès aux opportunités de mobilité, l'amendement demande au Gouvernement un rapport dressant un état des lieux de la présence des référents mobilité dans les CFA.
Pour les mêmes raisons que précédemment, je ne suis pas favorable aux demandes de rapport. En outre, le déploiement des référents mobilité a déjà fait l'objet d'une évaluation par l'Igas à l'issue de laquelle elle préconise notamment d'assurer le financement d'un poste à mi-temps de référent mobilité dans chaque CFA. Votre demande me semble donc satisfaite.
La commission rejette l'amendement.
Article 3 bis (nouveau) : Rapport au Parlement sur les bourses et aides financières destinées aux apprentis souhaitant effectuer une mobilité
Amendement AS13 de M. Sébastien Peytavie.
Si les bourses du programme Erasmus 3 ont augmenté, leur montant varie selon le pays de destination. Elles peuvent s'avérer insuffisantes, en particulier pour les étudiants les plus précaires. À défaut de pouvoir agir sur le montant des bourses ou les compléments de ressources, nous demandons un état des lieux des dispositifs de soutien financier ainsi qu'une étude des perspectives d'harmonisation et de hausse de ces aides. Notre ambition est de réduire les inégalités sociales et territoriales d'accès à la mobilité internationale des apprentis.
S'agissant de l'état des lieux, plusieurs études publiées apportent d'ores et déjà des éléments de réponse. Les données de l'observatoire Erasmus+ renseignent sur l'évolution du montant des bourses Erasmus. Ainsi, en 2018-2019, un apprenti percevait-il en moyenne une bourse Erasmus de 860 euros pour la totalité de son séjour à l'étranger, soit 46 euros par jour.
Quant à l'harmonisation et l'augmentation des aides financières, elles concernent l'article 3 que nous venons d'adopter. Nous aurons à nous assurer, dans le cadre du contrôle de la bonne application des lois, de la convergence des niveaux de financement que nous appelons de nos vœux. J'émets donc un avis défavorable.
Je soutiens l'amendement, qui met le doigt là où cela fait mal. Le Gouvernement doit présenter depuis des mois une réforme des bourses. Il n'alloue pas suffisamment de moyens pour permettre aux jeunes de faire leurs études dans de bonnes conditions. Le rapport de l'Igas le confirme : les inégalités sociales dans l'accès aux bourses sont criantes. Selon l'enquête Génération 2013 du Centre d'études et de recherches sur les qualifications publiée en 2016, qui porte sur les jeunes sortis du système éducatif en 2012-2013, les séjours longs à l'étranger s'adressent principalement aux plus favorisés – ils représentent 60 % des participants.
Le Parlement doit se saisir des inégalités d'accès. Sinon, les séjours Erasmus ne seront jamais l'outil d'ouverture non seulement professionnelle mais aussi sur l'Europe que nous espérons. Ces séjours participent à la construction du projet européen auquel les catégories populaires adhèrent moins, on le sait. Les inégalités d'accès renforcent l'impression que ceux-ci ne profitent qu'aux plus riches. Adopter l'amendement, c'est envoyer un signal.
L'amendement cherche, à juste titre, à remédier aux inégalités d'accès aux bourses Erasmus. Je suis favorable à son adoption parce que le rapport permettrait de tracer un chemin vers une harmonisation garante de la démocratisation de la mobilité internationale. Je déplore votre réserve sur un amendement qui vient enrichir votre proposition de loi.
Le groupe Horizons soutient cet amendement d'appel. La ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche a présenté un premier train de mesures visant à étendre et à revaloriser les bourses grâce à une enveloppe de 500 millions d'euros. L'adoption de l'amendement serait une incitation à aller plus loin et à compléter une réforme attendue.
Le Gouvernement vient d'annoncer un effort de 500 millions d'euros en faveur de la jeunesse. La ministre s'est engagée à présenter d'autres mesures d'ici au mois de septembre. En pleine semaine consacrée à l'évaluation, je ne comprends pas pourquoi les parlementaires préfèrent les demandes de rapport aux questions adressées directement au Gouvernement. Celles-ci me semblent plus utiles pour obtenir des réponses que la mobilisation de dizaines de personnes pour écrire un rapport que nous n'aurons pas le temps de lire.
Je suis issue d'une famille modeste et j'ai pu partir six mois à l'étranger car mon père avait économisé pour me donner 10 000 francs à l'époque. Le séjour à l'étranger est aussi un projet familial. L'État doit évidemment apporter son soutien – j'espère des mesures complémentaires en septembre – mais les familles prennent aussi leur part.
L'amendement recueille une approbation transpartisane qu'il convient de souligner. Il est pertinent en particulier dans les territoires d'outre-mer où la pauvreté est plus importante. Les jeunes les plus nantis peuvent y bénéficier des dispositifs de mobilité tandis que la grande majorité, issue de familles défavorisées, en est exclue. Je soutiens avec énergie et conviction l'amendement au nom des territoires d'outre-mer.
Nous sommes tous d'accord sur la nécessité de mieux accompagner les apprentis, en particulier sur le plan financier. Une harmonisation des montants des bourses est indispensable, et tous les acteurs s'y sont engagés.
Vous connaissez mon opposition de principe aux demandes de rapport. Il me semble de surcroît que votre choix n'est pas la meilleure stratégie pour obtenir l'engagement du Gouvernement que vous attendez. Il serait plus pertinent de retirer l'amendement et de lancer le débat dans l'hémicycle pour recevoir des réponses de la ministre.
La commission adopte l'amendement. L'article 3 bis est ainsi rédigé.
Après l'article 3
Amendement AS9 de M. Frédéric Maillot.
En tant que fervent défenseur de la préférence régionale, je souhaiterais favoriser les échanges pour les apprentis et les alternants dans les zones géographiquement proches. La Réunion profite d'un environnement océanique riche en diversité et en compétences vers lequel il serait bénéfique de se tourner, d'autant que nous entretenons des liens historiques avec les pays qui le composent.
L'amendement répond à un besoin : la promotion et le développement des échanges académiques dans leur bassin océanique pour les étudiants ultramarins. Les territoires ultramarins connaissent un chômage endémique. La seule réponse à ce fléau est aujourd'hui une mobilité européo-centrée qui, outre qu'elle nous rappelle des pages sombres de notre histoire, est souvent stérile. Chez nous, le Conservatoire national des arts et métiers se vante d'être le premier employeur de la jeunesse. L'amendement vise à y remédier en proposant une mobilité tournée vers des pays avec lesquels nous avons des liens culturels et historiques, gage de réussite universitaire et linguistique.
Les exemples de coopération régionale montrent à quel point les liens universitaires et professionnels avec des pays géographiquement proches sont bénéfiques sur le plan économique. Dans notre bassin, nous avons l'Inde qui forme les meilleurs informaticiens du monde, la Chine qui est la première puissance économique et industrielle mondiale, et l'Afrique du Sud qui dispose des meilleures universités du continent.
Vous demandez au Gouvernement la remise d'un rapport relatif à la mobilité des alternants au sein des territoires ultramarins, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi.
Le droit n'ignore pas la question de la mobilité des apprentis ultramarins. Des dispositions en ce sens ont récemment été adoptées. La loi relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, dite « 3DS », complétée par l'ordonnance du 22 décembre 2022 relative à l'apprentissage transfrontalier, a ouvert la possibilité pour les apprentis qui le souhaitent d'effectuer une partie de leur formation, pratique ou théorique, dans un territoire frontalier. Outre-mer, l'apprentissage transfrontalier peut se développer dans l'environnement géographique direct des collectivités, et ce même en l'absence de frontière physique. Dans le cas de La Réunion et de Mayotte, cela concerne, sous réserve d'accords de réciprocité évidemment, Madagascar et tous les pays de la façade orientale de l'Afrique. Pour la Guadeloupe et la Martinique, ce sont les pays d'Amérique du Nord ainsi que ceux de la façade atlantique de l'Amérique du Sud. Les difficultés juridiques étant levées, restent à surmonter les freins financiers et à obtenir la réciprocité.
Je vous propose d'attendre que ces dispositions soient mises en œuvre avant d'évaluer leur efficacité par le biais d'une mission de contrôle de la commission. Avis défavorable.
Votre réponse ne me semble pas en phase avec l'objet du rapport qui est de mettre en évidence les freins à la mobilité en outre-mer. Les dispositifs créés par la loi 3DS sont-ils opérants ? Que fait l'État pour les promouvoir ? Rien du tout. Ils restent donc virtuels à ce jour. L'amendement vise à obliger l'État à faire le constat de ses propres carences afin d'y remédier dans l'intérêt des jeunes.
Le décret d'application date du 22 décembre dernier – il y a donc moins de six mois. Les dispositifs sont en train de se mettre en place. Les CFA s'en saisissent en ce moment pour essayer d'organiser des échanges – cela prend du temps. Nous n'en sommes qu'au commencement de l'apprentissage transfrontalier. Je vous propose plutôt de créer une mission parlementaire pour aller sur place voir comment les choses se passent et corriger ce qui doit l'être au fur et à mesure.
Nous pourrions accéder à votre demande, monsieur le rapporteur, si la présidente s'engage à créer une telle mission de contrôle.
Pourquoi pas ? J'appelle néanmoins votre attention sur le grand nombre de demandes déjà formulées ainsi que sur le calendrier passablement chargé de la commission. Je ne pourrai pas vous répondre favorablement dans l'immédiat mais nous pourrons en discuter lors d'une prochaine réunion du bureau de la commission.
Les demandes de mission qui concernent les outre-mer ne sont pas si nombreuses. Ce serait un symbole fort de la part de la commission d'en accepter une.
Je me permets de rappeler l'existence de la délégation aux outre-mer à laquelle vous pourriez soumettre votre demande.
La commission rejette l'amendement.
Article 4 : Gage financier
La commission adopte l'article 4 non modifié.
Puis elle adopte l'ensemble de la proposition de loi modifiée.
Je vous remercie pour la qualité de nos échanges. Nous souhaitons tous développer l'apprentissage et donner à un plus grand nombre de jeunes la chance de partir à l'étranger. Je suis heureux que nous y contribuions dès la semaine prochaine dans l'hémicycle.
Ayant enseigné l'anglais vingt-quatre ans en CFA, je vous assure que l'immersion dans un pays étranger est la meilleure manière de faire des progrès en langue. Les jeunes que j'ai connus sont revenus métamorphosés de leur expérience.
La séance est levée à onze heures.
Présences en réunion
Présents. – M. Éric Alauzet, Mme Bénédicte Auzanot, M. Thibault Bazin, Mme Fanta Berete, Mme Anne Bergantz, M. Elie Califer, M. Victor Catteau, M. Paul Christophe, M. Hadrien Clouet, Mme Josiane Corneloup, Mme Laurence Cristol, M. Arthur Delaporte, Mme Nicole Dubré-Chirat, Mme Karen Erodi, M. Olivier Falorni, M. Marc Ferracci, M. Thierry Frappé, Mme Marie-Charlotte Garin, M. François Gernigon, Mme Justine Gruet, M. Jérôme Guedj, Mme Claire Guichard, Mme Servane Hugues, Mme Monique Iborra, M. Cyrille Isaac-Sibille, Mme Caroline Janvier, Mme Rachel Keke, Mme Fadila Khattabi, Mme Laure Lavalette, M. Didier Le Gac, Mme Christine Le Nabour, M. Jérôme Legavre, Mme Katiana Levavasseur, M. Sylvain Maillard, M. Frédéric Maillot, M. Matthieu Marchio, Mme Joëlle Mélin, M. Serge Muller, M. Yannick Neuder, M. Jean-Philippe Nilor, Mme Astrid Panosyan-Bouvet, Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, Mme Michèle Peyron, M. Jean-Hugues Ratenon, Mm Sandrine Rousseau, M. Jean-François Rousset, M. Freddy Sertin, M. Emmanuel Taché de la Pagerie, Mme Prisca Thevenot, M. Nicolas Turquois, Mme Isabelle Valentin, M. Frédéric Valletoux, Mme Annie Vidal, M. Philippe Vigier, M. Alexandre Vincendet, M. Stéphane Viry
Excusés. – Mme Sandrine Dogor-Such, Mme Caroline Fiat, M. Philippe Juvin, Mme Stéphanie Rist, M. Olivier Serva
Assistait également à la réunion. – M. Pierre Dharréville