La commission des affaires économiques a auditionné, en application de l'article 13 de la Constitution, M. Luc Rémont, dont la nomination en qualité de président-directeur général d'Électricité de France (EDF) est envisagée (Mme Anne-Laure Blin, rapporteure).
L'audition d'aujourd'hui répond à une exigence de l'article 13 de la Constitution disposant que, pour certains emplois ou fonctions, en raison de leur importance pour la garantie des droits et libertés, ou de la vie économique et sociale de la nation, le pouvoir de nomination du Président de la République s'exerce après avis public de la commission permanente compétente de chaque assemblée. La commission des affaires économiques doit rendre un avis préalable à la nomination envisagée par le Président de la République de M. Luc Rémont aux fonctions de président-directeur général d'Électricité de France (EDF).
Les textes prévoient que le président-directeur général d'EDF est nommé par décret en conseil des ministres, sur proposition du conseil d'administration. La procédure que nous mettons en œuvre s'applique donc sous réserve des compétences détenues par celui-ci.
La proposition de nomination de M. Rémont couvre bien la présidence et la direction générale d'EDF. S'il était un jour envisagé de dissocier les deux fonctions, il appartiendrait à notre commission de se prononcer sur les deux nominations, conformément aux dispositions de la loi organique.
La durée de ce mandat est de cinq ans renouvelables. L'actuel PDG d'EDF, M. Jean-Bernard Lévy, avait ainsi été auditionné par notre commission une première fois pour sa nomination, puis une seconde pour le renouvellement de son mandat. Je le remercie pour le travail qu'il a effectué à la tête d'EDF depuis huit ans, et pour la grande disponibilité dont il a su faire preuve envers le Parlement.
Conformément à la réforme de notre Règlement de 2019, selon laquelle, pour les nominations au titre de l'article 13 de la Constitution, la commission compétente nomme un rapporteur parmi ses membres appartenant à un groupe d'opposition ou à un groupe minoritaire, la commission des affaires économiques a désigné comme rapporteure Mme Anne-Laure Blin, membre du groupe Les Républicains, pour la présente nomination.
Chaque fois que notre commission met en œuvre la procédure de l'article 13, et bien que certains journalistes aient cru y voir une nouveauté, notre rapporteur établit un questionnaire. M. Rémont a bien voulu lui apporter des réponses détaillées. Ce document, ainsi que le CV de M. Rémont, a été transmis à l'ensemble des commissaires vendredi 21 octobre. Il sera mis en ligne à l'issue de la proclamation des résultats du scrutin.
Celui-ci doit se dérouler hors la présence du candidat pressenti. Le dépouillement du scrutin doit avoir lieu simultanément à l'Assemblée nationale et au Sénat. Le Sénat ayant auditionné M. Rémont en début de matinée, le dépouillement sera effectué dans les deux chambres, à l'issue du vote de notre commission.
Le Président de la République ne peut pas procéder à une nomination lorsque l'addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions. Je communiquerai le résultat du vote à la présidence de l'Assemblée nationale, avant de vous en informer.
Depuis sa création, en 1946, EDF est un des champions industriels de notre pays. Il s'agit, avec ses filiales, de l'opérateur central de notre système électrique, qui assure production, transport et distribution d'électricité. La crise actuelle, qui concerne la France et l'Europe, met au grand jour son rôle stratégique pour préserver notre souveraineté énergétique. Les Français sont attachés à cette grande entreprise nationale, et ils attendent d'elle, ainsi que des responsables politiques, qu'elle assure durablement cette souveraineté et assure l'approvisionnement de l'économie et de l'ensemble des foyers. Le contexte, particulièrement complexe et fortement contraint par nos voisins européens, nécessite que tous les acteurs s'investissent dans une politique ambitieuse de sauvegarde de nos intérêts, mêlant à la fois investissements massifs et défense de notre spécificité française.
Votre audition n'est pas seulement institutionnelle, elle est stratégique. Nous attendons de vous que vous nous détailliez votre parcours et expliquiez l'état d'esprit dans lequel vous entendez mener cette nouvelle mission qui pourrait vous être confiée.
EDF est confrontée à des difficultés majeures. Les unes sont d'ordre capacitaire, avec la baisse de ses capacités de production hydroélectriques et la mise à l'arrêt de plusieurs de ses réacteurs nucléaires. Les autres, financières, résultent de choix politiques de sous-production, mais également de la régulation de l'accès à l'électricité, avec le fameux Arenh (accès régulé à l'électricité nucléaire historique). Ce dispositif impose à EDF de céder à ses concurrents une partie de sa production à un prix qui ne lui permet pas de reconstituer les ressources nécessaires à ses futurs investissements. En conséquence, la dette du groupe pourrait atteindre 60 milliards d'euros à la fin de l'année 2022.
Vous avez bien voulu répondre au questionnaire que je vous ai transmis. Si vos réponses sont détaillées, elles manquent étonnamment de précision quant à plusieurs enjeux majeurs pour le groupe. Je souhaite donc vous poser quelques questions supplémentaires.
Selon la presse, vous avez sollicité des salariés d'EDF pour préparer cette audition. Est-ce le cas ? Si oui, leur avez-vous garanti, comme nous avons pu le lire, qu'ils conserveraient leur poste ?
Il y a deux ans, au Sénat, M. Lévy avait indiqué travailler à la réorganisation des actifs d'EDF. Est-ce la feuille de route qui vous a été confiée par le Gouvernement et par le Président de la République ?
Quelle est votre réaction au projet de note d'information sur l'offre publique d'achat simplifiée de l'intégralité du capital d'EDF ?
En 2016, l'ancien directeur financier d'EDF, M. Thomas Piquemal, avait indiqué avoir démissionné « par désespoir » en raison d'un désaccord sur la soutenabilité d'un projet pour l'entreprise. Êtes-vous prêt à vous livrer aux bras de fer nécessaires à la survie de cette entreprise vitale pour la France ?
Si je ne doute pas de vos qualités professionnelles, je suis perplexe pour ce qui est des projets que vous envisagez pour l'entreprise, qui ne me sont pas apparus clairement. Ils devraient pourtant ne tendre qu'à garantir l'avenir industriel du groupe et à le protéger de tout démantèlement pour raisons financières. Vos projets sont flous et, c'est bien connu, « quand c'est flou, c'est qu'il y a un loup ». Je suis, par conséquent, contrainte d'émettre un avis défavorable sur la proposition du Président de la République de votre nomination à la tête d'EDF.
Par l'importance de sa mission et grâce aux succès qui ont émaillé son histoire, EDF est une fierté nationale, dont nos concitoyens attendent légitimement beaucoup. Des générations de femmes et d'hommes ont façonné cette entreprise et peuvent être fières de leur contribution au développement de notre pays depuis 1946. C'est convaincu du rôle essentiel et stratégique qu'EDF aura à jouer dans les prochaines décennies, mais aussi de l'ampleur de la responsabilité de diriger cette entreprise unique, que je me présente devant vous.
Puisque votre commission va devoir se prononcer quant à ma capacité à assurer les fonctions de président-directeur général d'EDF, je dois surmonter ma réticence naturelle à parler de moi pour vous faire part de mes motivations. La première est que je vois moins ce rôle comme une fonction que comme une mission. La transition énergétique, le prix de l'électricité, le nucléaire, les énergies renouvelables (ENR), les réseaux, l'avenir même d'EDF, tout requiert, dans les temps de crise que nous traversons, la mobilisation de tout le monde. Et la mienne, évidemment. Je suis certain, en cela, d'être aligné avec l'esprit de mobilisation du personnel de l'entreprise.
La deuxième est plus personnelle : si je suis prêt à m'engager dans cette mission difficile, c'est parce que j'y trouve l'occasion de mener à leur aboutissement des idéaux qui m'habitent depuis ma jeunesse. Ils m'ont conduit, je crois, à servir l'intérêt général dans tous les postes que j'ai occupés, y compris dans le secteur privé. Ces idéaux me font considérer EDF comme une sorte de mission parmi les missions. C'est peut-être même celle d'une vie pour un homme qui a voulu devenir ingénieur et qui, pour servir l'industrie française, a suivi des études et passé des concours républicains. Un homme pour qui vient le moment de rendre au pays, en tout cas d'essayer de le faire, tout ce que le pays a pu lui donner, en tant que jeune Français parmi d'autres, élevé dans les valeurs du mérite et du travail.
Je suis donc ingénieur de formation. Je n'ai jamais cessé d'apprendre, tout au long d'une vie de travail de bientôt trente années, qui m'a conduit pour moitié au service de l'État, pour moitié au service d'entreprises. Deux passions sous-tendent mon expérience professionnelle : le développement de l'industrie française et le monde de l'énergie.
Au cours de mes années au service de l'État, j'ai participé au développement d'une filière technologique complexe appliquée au monde spatial, au sein de la direction générale de l'armement (DGA). Au Trésor, j'ai pris part aux grands projets d'infrastructure avec les banques de développement. J'ai participé aux négociations du protocole de Kyoto sur le changement climatique, ainsi qu'à la mise en sûreté des centrales nucléaires de l'ancien bloc de l'Est, au milieu et à la fin des années 1990.
Au début des années 2000, au sein du ministère des finances, j'ai soutenu le développement et la transformation des entreprises dont l'État était actionnaire, alors que le cadre européen évoluait très vite, notamment pour les entreprises de service public. C'est au cours de cette période que j'ai vécu nombre de négociations communautaires et que je me suis intéressé dans le détail au secteur de l'énergie, alors qu'il vivait une de ses premières mutations à l'échelle européenne. Il en a connu bien d'autres depuis.
J'ai souhaité, par la suite, apprendre davantage en exerçant une activité professionnelle dans le monde de l'entreprise. J'ai commencé dans le secteur financier, au moment de la crise de 2008. J'y ai appris la conduite d'une activité en crise, alors que le monde de la finance s'écroulait, et l'importance de rester proche de ses clients en toute circonstance. J'ai continué d'enrichir ma connaissance de l'industrie française et internationale, en accompagnant le développement stratégique et le financement de nombreux groupes.
Enfin, depuis bientôt neuf ans, c'est avec beaucoup de bonheur que je sers le groupe Schneider Electric, un autre fleuron de notre industrie. Ce leader technologique mondial est engagé dans la décarbonation de la planète, grâce à l'électrification de nos usages et à l'utilisation des technologies numériques, pour améliorer l'efficacité énergétique et opérationnelle de tout type d'infrastructure.
Je dirige, depuis bientôt six ans, l'activité du groupe dans une soixantaine de pays, principalement émergents, qui représentent environ un quart de son chiffre d'affaires, grâce à une présence opérationnelle industrielle et humaine forte. Mon activité m'amène à diriger des équipes pluridisciplinaires, de cultures très différentes, et à développer leurs compétences au service de nos clients, de notre technologie et de notre capacité industrielle. Elle m'a conduit à travailler avec la plupart des opérateurs d'électricité locaux, pour leur modernisation technique et leur numérisation, et à faire avec l'évolution de marchés de l'électricité très différents.
Enfin, au cours de cette période, j'ai également été membre, pendant cinq ans, du conseil d'administration de Naval Group, à la demande de l'État. J'ai pu suivre de près, en tant que président du comité d'audit de cette entreprise, la construction des sous-marins d'attaque Barracuda, seul programme français actuel de fabrication en série de chaufferies nucléaires.
C'est nourri de toutes ces expériences diversifiées, et conscient qu'il me faut encore beaucoup apprendre, que j'aborde cette nouvelle phase de ma vie professionnelle. Au-delà des compétences que j'ai accumulées, j'ai conscience que la réussite de la mission suppose d'abord de mobiliser toute l'entreprise et l'ensemble de ses parties prenantes autour d'un projet d'avenir pour l'électricité dans lequel EDF jouera pleinement son rôle. J'y trouve une très grande motivation et je voudrais partager avec vous quelques idées, qui ne sont à ce stade que celles d'un observateur extérieur à l'entreprise, sur la façon dont je perçois les priorités stratégiques d'EDF.
Nous nous trouvons dans un contexte critique à court terme, qui rappelle le rôle essentiel joué par l'énergie, en particulier par l'électricité, dans nos sociétés. Alors que l'Europe a bénéficié d'une très grande sécurité énergétique pendant plusieurs décennies, l'énergie est devenue une arme, dont use la Russie pour affaiblir nos sociétés et tenter de diviser l'Union européenne. Avant même de parler de prix de l'énergie, c'est de notre capacité à disposer de suffisamment d'énergie pour répondre à nos besoins dont il est question, avec l'arrêt de l'approvisionnement de l'Europe en gaz russe.
Malheureusement, EDF traverse elle-même une crise sérieuse, d'ordre technique et industriel, qui accentue la tension sur l'offre d'énergie. Ainsi, le phénomène inattendu de corrosion sous contrainte, sur certains réacteurs, est venu aggraver la baisse de production nucléaire observée depuis plusieurs années, sous l'effet de l'âge du parc et des nécessités de maintenance.
Je n'ai pas une connaissance suffisante du phénomène pour vous livrer un diagnostic ; je constate que l'entreprise, en liaison avec l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), a appliqué d'emblée des mesures mettant la sûreté au premier plan, ce qui est une condition essentielle de la confiance entre EDF et la Nation. Je n'ai aucun doute quant à la mobilisation totale de l'entreprise pour mettre en œuvre les solutions adaptées dans les meilleurs délais, et pour permettre la reprise de production en toute sûreté.
J'ai été confronté plusieurs fois à des difficultés de production, soit au sein de Schneider Electric, soit chez nos clients, chez qui nous opérons des dispositifs de conduite de processus industriels ou de sûreté. Je me consacrerai dès les premières heures de mon mandat, avec les équipes d'EDF et avec les partenaires de la filière concernés, à tenir les engagements de l'entreprise pour reprendre la production des réacteurs aujourd'hui à l'arrêt.
Au-delà de la production électrique nucléaire, la tension énergétique liée au gaz et à l'hydroélectricité dans toute l'Europe – où l'été a été particulièrement sec – nous impose de préparer collectivement l'hiver, en réduisant notre consommation. La sobriété et l'efficacité énergétique sont nécessaires et je soutiens totalement les initiatives permettant à chacun d'agir en citoyen. Cet effort collectif est indispensable pour alléger la demande et diminuer les risques de délestage, cet hiver et les suivants.
Le prix de l'électricité est la résultante de toutes ces tensions sur le gaz, le nucléaire et l'hydraulique, à l'échelle européenne. À court terme, les clients français bénéficient d'une meilleure protection que leurs voisins européens : le prix de l'électricité en Europe est en moyenne deux fois plus élevé qu'en France. Il existe cependant des situations difficiles et je n'en suis pas satisfait. Je travaillerai avec les clients d'EDF et avec le Gouvernement pour trouver des solutions adaptées, chaque fois que c'est possible.
Comme vous l'avez souligné, madame la rapporteure, la situation financière d'EDF se tend sous l'effet conjugué de la baisse de la production et des mesures de régulation destinées à limiter les hausses de prix de l'électricité. C'est une situation qui nécessite vigilance et action à court terme, pour ne pas devoir réduire les investissements et compromettre l'avenir. Elle devrait s'améliorer sous l'effet de la reprise de l'activité du parc nucléaire. Elle nécessite cependant de trouver impérativement un équilibre et une visibilité de long terme de la régulation, qui permette de nous engager dans un nouveau cycle d'investissement, devenu indispensable. Voilà pour les exigences de court terme.
S'agissant des perspectives à moyen et long terme, tous les experts internationaux confirment le rôle grandissant de l'électricité décarbonée, dont tous les types de production – nucléaire, hydraulique, éolien, solaire thermique –, de stockage et de distribution (smartgrid) devront être mobilisés. J'ai pu constater, dans le cadre de mes fonctions actuelles, que c'est un mouvement mondial qui nécessite une intelligence de système, de la production au client, en passant par les réseaux.
Je suis convaincu que nous sommes au début d'une nouvelle révolution industrielle, fondée sur l'électricité et le numérique, et que l'électricité est essentielle pour que la France puisse satisfaire son ambition de neutralité carbone en 2050.
EDF a vécu une mue profonde au cours des dernières années. Hier, grand service public de l'électricité gérant la production, les réseaux et la commercialisation à tarif unique, le groupe s'est transformé, en deux décennies, en un acteur de marché européen concurrentiel, producteur d'électricité nucléaire et renouvelable, qui développe et construit des installations de production d'électricité décarbonée, en France et dans le monde. Son offre commerciale s'est considérablement diversifiée pour satisfaire aux attentes du marché. Ses réseaux se sont adaptés à la décentralisation et à la numérisation. EDF est devenu un grand énergéticien mondial, bien placé pour jouer un rôle de premier plan dans le nouveau monde électrique.
De ce que j'ai pu observer chez de nombreux opérateurs électriques, le succès repose sur leur capacité à développer de façon optimale trois piliers d'activité, qui participent à un système d'ensemble : des solutions permettant aux clients d'optimiser leur consommation d'énergie ; une production compétitive et résiliente de diverses sources d'électricité ; des réseaux capables d'assurer la fourniture et l'équilibre, partout et à tout moment.
Sans le premier de ces piliers, que l'on peut résumer aux clients, aucune entreprise n'existerait. C'est particulièrement vrai pour EDF, dont le rôle est primordial dans la satisfaction des besoins collectifs. Les difficultés de court terme relatives au prix de l'électricité doivent conduire à accélérer les solutions qui permettent à ses clients – entreprises, particuliers et collectivités – de mieux gérer leur consommation d'énergie. On observe une accélération massive des raccordements d'autoconsommation en France, qui rattrape ainsi son retard par rapport à d'autres pays.
EDF doit continuer d'accompagner la transition énergétique de ses clients. Les entreprises et les collectivités, pour leurs installations industrielles et tertiaires ou pour développer des outils intelligents qui les aident à piloter leur consommation. Les particuliers également, qui souhaitent réduire leur consommation, électrifier leur véhicule, installer une pompe à chaleur ou devenir autoconsommateurs. Ces évolutions, ainsi que le développement de capacités de stockage, introduiront davantage de flexibilité dans le système électrique, qui en a grandement besoin. Elles permettront aussi d'accompagner l'électrification des usages, en limitant les volumes d'investissement en moyens de production centralisés. Apporter ces solutions innovantes à tous ses clients doit être la priorité d'EDF.
S'agissant de la production électrique, nous sommes à la croisée des chemins. Les scénarios de production et d'investissement d'ici à 2050 publiés par Réseau de transport d'électricité (RTE), offrent une perspective très éclairante sur l'avenir. Sans entrer dans le détail de ces analyses, j'en retire qu'il convient d'engager sans attendre un plan d'investissement élevé, qui couvre l'ensemble des domaines de production.
Le nucléaire, d'abord, car il n'y a pas de stratégie bas-carbone possible sans production nucléaire. Cette conviction, qui est celle de la France depuis de nombreuses années, est aujourd'hui partagée par de plus en plus de pays, qui arrivent à la conclusion que le nucléaire est la seule technologie fournissant de l'électricité de base non carbonée. Nous avons la chance que nos anciens aient réussi, en moins de vingt ans, à la fois à développer une filière industrielle et à déployer cinquante-huit réacteurs. Cette prouesse inouïe nous permet de bénéficier depuis d'une électricité compétitive, abondante et décarbonée. Entretenir ce parc et prolonger sa durée de vie est la priorité d'investissement d'EDF, avec le programme du grand carénage.
Mais il nous faut également penser au-delà de la prolongation des centrales actuelles, lorsque nous aurons besoin de les remplacer. C'est la raison pour laquelle le nouveau programme nucléaire français doit être rapidement lancé, pour que nous puissions demain disposer d'une électricité de base suffisante. C'est le cap qu'a fixé le Président de la République dans son discours de Belfort.
Réaliser ce programme est d'abord un défi humain. Je suis convaincu que disposer des compétences les plus pointues dans l'ensemble de la filière nucléaire est crucial, que ce soit pour relever le niveau de la production ou pour sécuriser le grand programme industriel qui s'annonce, avec la construction de nouveaux réacteurs nucléaires en France.
J'ai, bien sûr, conscience du rôle singulier d'EDF à la tête de la filière nucléaire, qu'elle recompose activement avec l'intégration de Framatome en 2018 et, demain sans doute, avec celle des activités nucléaires de General Electric. Il nous faudra structurer et amplifier le travail mené depuis quelques années pour attirer les talents. J'aurai à cœur de garantir un accès durable aux compétences nécessaires pour relever le grand défi qui se présente à la filière nucléaire.
EDF, c'est aussi l'énergie l'hydraulique. Nous devrons trouver un chemin pour développer cette énergie renouvelable. L'eau est avant tout vitale, mais c'est aussi une ressource aux usages multiples – énergie, agriculture, tourisme –, dont nous devons exploiter tout le potentiel. Le rôle d'EDF, notamment auprès des collectivités, est de conjuguer la production hydroélectrique durable et les autres usages, tout en préservant la biodiversité. Si les projets d'investissement d'EDF dans l'hydraulique ne se réalisent pas, c'est parce qu'il n'existe pas de cadre de long terme pour cette activité. Des discussions sont en cours pour fournir un tel cadre à EDF et je m'attacherai à ce qu'elles aboutissent, pour permettre de relancer ce secteur.
Les ENR sont une autre composante essentielle d'une production diversifiée d'électricité. EDF s'est largement engagée dans leur développement avec des partenaires financiers, ce qui lui permet de partager les besoins d'investissement. En France, cela lui a permis d'être leader de l'éolien terrestre, leader de l'éolien maritime et de figurer sur le podium pour ce qui est du solaire. Il faut néanmoins accélérer, car EDF ne restera performante en France que si elle reste un grand acteur mondial. C'est la condition sine qua non pour avoir la taille critique et bénéficier des effets d'échelle, pour partager la charge des investissements avec des investisseurs financiers et limiter ainsi le recours aux ressources de l'entreprise.
Enfin, le réseau est un élément essentiel du service public d'EDF. Sa filiale Enedis est l'acteur de terrain le plus proche de toutes les collectivités. Les réseaux de transport et de distribution sont eux-mêmes en pleine mutation pour faciliter la transition énergétique, alors que l'importance grandissante de l'électricité dans notre quotidien suscite une très grande exigence de qualité.
Le métier de la distribution électrique accompagne aussi les changements profonds associés à la production décentralisée. La flexibilité accrue de l'offre et de la demande d'électricité locale change profondément la nature du métier de gestionnaire de réseau et nécessite des investissements importants, en raccordement et en systèmes numériques. D'unidirectionnel, avec un seul producteur apportant l'électricité aux consommateurs, le réseau devient de plus en plus bidirectionnel ; il doit mailler le territoire et permettre la flexibilité et l'échange d'électricité entre producteurs multiples et consommateurs. C'est un grand défi technique, qui exige des investissements importants. Cette dimension essentielle du service public est une priorité pour EDF, qui entend soutenir ces transformations, dans le respect de la gouvernance spécifique au réseau et dans un cadre de régulation adapté.
Répondre à tous ces enjeux stratégiques ne sera possible que si nous réformons profondément nos règles de marché, en France et dans l'Union européenne (UE). La crise énergétique actuelle met en lumière un certain nombre de faiblesses de ces règles. Les gouvernements des pays membres de l'UE ont adopté des mesures d'urgence pour faire face aux défis les plus immédiats et pour protéger les consommateurs des hausses exorbitantes du prix de gros. Ils ont agi, par exemple, sur le gaz électrogène et sur les prix de production d'électricité.
Au-delà de ces mesures, il est nécessaire de réfléchir et d'agir sur le cadre de marché européen, pour compenser les défaillances et les faiblesses révélées par cette crise. Ainsi, si ce cadre est propice à la flexibilité à court terme, mais il ne permet pas d'anticiper les évolutions à long terme. De même, il faut revoir le mécanisme, lourd de conséquences, qui fait dépendre le prix de l'électricité de celui du gaz. Enfin, nous prenons insuffisamment en compte les besoins de flexibilité du marché, notamment au travers de contrats de long terme ou de capacité de pilotage de la demande. Les autorités européennes ont d'ailleurs récemment engagé un travail de réflexion pour revoir ce cadre de marché.
Si EDF doit pouvoir nourrir cette réflexion en apportant ses propres idées et expertises, elle doit aussi gérer les problèmes qui lui sont propres, l'Arenh en particulier. Ce mécanisme a été conçu à l'origine, en 2010, pour protéger les clients de prix de marché trop élevés, protection qui continue d'opérer en 2022. Mais il avait aussi pour objectif de permettre l'émergence de la concurrence, en favorisant l'investissement. Or l'Arenh n'a déclenché aucun investissement, tout en affaiblissant les capacités financières d'EDF. Son échéance étant fixée à 2025, je m'attacherai à sécuriser l'indispensable trajectoire d'investissement d'EDF en France auprès de l'État et de la Commission européenne.
Pour ce qui est de la préparation de l'avenir, je suis convaincu, en tant qu'ingénieur, que l'évolution technologique va continuer de nous apporter des solutions nouvelles. C'est naturellement le rôle de la recherche et développement d'EDF d'être à la pointe sur ces sujets. C'est aussi la raison d'une présence forte à l'international, qui permet à l'entreprise d'évoluer dans des environnements différents.
Sur tous ces aspects stratégiques, j'engagerai un travail en profondeur, avec les équipes d'EDF, dès les premiers mois, afin de proposer une feuille de route d'ici au printemps 2023.
Je voudrais, enfin, partager avec vous quelques convictions fortes, qui guident mon action en tant que dirigeant d'entreprise.
Je crois que la satisfaction des clients est le premier objectif d'une entreprise. Je crois que la réussite de l'entreprise n'est possible que par l'engagement et le développement des compétences et des talents des personnes qui la composent ; que la diversité des origines des savoirs et la mixité sont indispensables à la réussite d'une équipe ; que le dialogue entre les parties prenantes de l'entreprise et le dialogue social créent la confiance nécessaire au progrès. Je crois que la concurrence et la compétition sont bénéfiques à l'entreprise, en la poussant à faire mieux sans cesse ; que la culture de l'engagement et de la performance est indispensable à la réussite du projet d'entreprise ; que la responsabilité sociale d'entreprise est un engagement, pas une contrainte. Je crois qu'il est possible de concilier la préservation de la planète, le développement et le bien-être et que l'électricité décarbonée est un atout majeur de progrès et d'industrialisation.
EDF n'est pas une entreprise comme les autres. Elle est dépositaire du modèle du service public et est animée par l'intérêt général. L'entreprise doit relever en même temps de nombreux défis. Au-delà de ceux du moment, je pense qu'elle est en mesure de renouer avec l'exemplarité et l'excellence industrielle et de jouer un rôle majeur dans « l'avenir électrique ».
L'actionnariat d'EDF est appelé à évoluer dans le cadre du projet de l'État de détenir 100 % du capital, en tant qu'actionnaire de long terme. En plein accord avec l'État actionnaire, EDF restera gérée comme une entreprise industrielle, avec son intérêt social et sa personnalité morale propre.
Je souhaite aborder cette mission en bâtissant une vision d'avenir et une relation confiante avec les pouvoirs publics, pour réussir à relever les défis d'ampleur nationale qui sont devant nous. EDF ne peut réussir à servir le pays qu'avec cette relation de confiance. Je m'attacherai à ce qu'elle soit nourrie de contacts réguliers avec votre commission et avec l'ensemble des élus dans les territoires.
Je conclus en redisant à Mme la rapporteure ma vision de l'organisation d'EDF. Elle est celle du projet industriel d'EDF, qui repose sur les trois piliers auxquels j'ai fait référence : production diversifiée, solutions pour les clients et réseaux, de proximité notamment.
Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.
Je rappelle les règles auxquelles nous nous tenons depuis le début de la législature : chaque orateur dispose de quatre minutes, réponse de M. Rémont incluse, celle-ci devant pouvoir être donnée en une minute minimum – autrement dit, au bout de trois minutes, je couperai la parole à l'orateur.
Vous êtes candidat pour prendre la tête du groupe EDF à un moment particulièrement critique. EDF se retrouve en difficulté pour des raisons conjoncturelles, avec la nécessaire réparation de nos centrales et la crise énergétique qui affecte nos ménages et nos entreprises, mais surtout structurelles.
Ce sont vingt ans d'abandon, d'abord par la droite qui, depuis 2002, s'est détournée de toute stratégie pérenne pour l'énergie nucléaire, et surtout par la gauche, ensuite, qui depuis 2012 a sacrifié notre filière nucléaire et notre indépendance énergétique sur l'autel d'un accord électoral. Ce sont aussi vingt ans d'incohérence coupable de la part des autres, Marine Le Pen en tête, aujourd'hui défenseure passionnée du nucléaire, mais qui, en 2014, parlait d'une énergie « énormément dangereuse », dont il fallait absolument baisser la production.
Depuis cinq ans, notre majorité a mené une vraie politique industrielle de l'énergie, qui s'est déclinée en deux temps. D'abord, l'état des lieux. Nous avons défini nos besoins énergétiques pour les quarante prochaines années : pour l'électricité, c'est près de 1 000 térawattheures en 2050, selon RTE. Ensuite, une stratégie volontariste pour atteindre cet objectif, au cœur de laquelle s'inscrit EDF.
Notre stratégie repose sur deux piliers. D'une part, le nucléaire, avec la relance de notre filière par la construction de six réacteurs de nouvelle génération à horizon 2035. D'autre part, les énergies renouvelables, massivement développées pour diversifier nos sources d'électricité. C'est l'objet du prochain projet de loi qui sera présenté dans notre commission.
La nationalisation d'EDF et le choix de son prochain président-directeur général sont déterminants pour permettre au groupe de s'inscrire dans notre stratégie et de s'affirmer comme un partenaire efficace, fiable et pérenne de l'État en matière énergétique.
Votre parcours, votre expérience et votre maîtrise des grands projets industriels justifient que le groupe Renaissance et la majorité votent pour votre nomination à la tête d'EDF.
Je termine avec deux questions. À court terme, comment appréhendez-vous les possibles mouvements de grève sur les chantiers de nos centrales, qui pourraient retarder la mise en route de nos réacteurs pendant l'hiver et affecteraient les Français ?
Avec la nationalisation d'EDF, la direction a annoncé vouloir redéfinir les priorités du groupe. Quel est l'avenir des activités internationales et à l'export du groupe ?
Les industries électriques et gazières (IEG) ont démontré récemment leur capacité à mener un dialogue social constructif. Un accord au sein d'EDF a ainsi réuni l'ensemble des parties prenantes et a permis de reprendre l'activité sur l'ensemble des sites. Les équipes travaillent donc à nouveau pour atteindre les objectifs de production auxquels l'entreprise s'est engagée. Je crois au dialogue social et je crois à cette méthode grâce à laquelle l'entreprise peut tenir ses engagements.
Le groupe RN s'opposera totalement à votre nomination. Comme l'a rappelé Mme la rapporteure, vous avez, selon la presse, bénéficié des services d'EDF, notamment ceux de la communication. Vous avez également rencontré des dirigeants importants qui vous ont peut-être fourni des informations qui vous seront inutiles et auxquelles vous n'auriez jamais dû avoir accès si votre candidature n'est pas soutenue par le Parlement.
Le magazine Marianne a révélé une rencontre organisée au Sénat par M. Patrick Stefanini et d'autres sénateurs, rencontre à laquelle M. Jérôme Pécresse n'aurait pas été étranger. Cette rencontre a-t-elle eu lieu et quel rôle y a joué M. Pécresse ? Cette question est importante puisque M. Pécresse a travaillé – côté Alstom – à l'intégration des activités énergétiques d'Alstom à General Electric (GE), en 2014, et que vous avez, vous-même, travaillé sur ce dossier pour le compte de Bank of America Merrill Lynch.
Vous avez indiqué, dans le questionnaire transmis à notre commission, que ce rachat vous semblait la seule solution industrielle possible. Comment pouvez-vous penser cela d'une solution qui a conduit à la destruction de 5 000 emplois en France et au transfert de brevets extrêmement importants pour les activités nucléaire, hydroélectrique et gazière ? Dans votre propos liminaire, vous avez dit être au service de l'intérêt général. En quoi travailler pour Bank of America Merrill Lynch sert l'intérêt général et les intérêts de la France ?
À ce sujet, pouvez-vous nous donner les rémunérations que vous avez perçues en tant que représentant de Bank of America Merrill Lynch en France et nous dire si vous avez été rémunéré pour votre contribution au deal conclu entre Alstom et General Electric ? Pouvez-vous également nous préciser les termes de la lettre de mission qu'Alstom vous a donnée pour œuvrer à ce rachat ?
Le calendrier que vous avez donné ne correspond pas vraiment à celui que l'on connaît grâce à la commission d'enquête sur les décisions de l'État en matière de politique industrielle, notamment dans les cas d'Alstom, d'Alcatel et de STX, présidée par Olivier Marleix ou grâce à la presse. Pouvez-vous le repréciser ? Oui ou non, avez-vous travaillé jusqu'à la fin du deal, et notamment jusqu'au premier accord signé entre M. Montebourg, Alstom et General Electric ?
Enfin, vous aurez à travailler sur le rachat des activités nucléaires de GE par EDF, et notamment celui des turbines Arabelle, vendues par Alstom. Comment pouvons-nous vous faire confiance pour reconstruire une filière alors que vous avez pris part à son démantèlement ? De même, vous aurez à faire sortir EDF de la Bourse après avoir contribué à son introduction. En quoi votre expérience passée…
Pour tout sujet industriel, il faut prendre du recul. En l'occurrence, l'activité de production d'électricité du groupe Alstom reposait pour l'essentiel sur les turbines à gaz rachetées au groupe ABB, en 2000, qui ont failli provoquer la faillite du groupe français quelques années plus tard. Alstom n'a dû sa survie qu'à l'État et à la décision de Francis Mer, ministre et grand industriel auquel je rends hommage. Tout le groupe Alstom a ainsi été sauvé de la faillite, sans pour autant régler les problèmes de son activité de production électrique.
Permettez-moi de prendre quelques instants pour répondre à une interpellation venant des rangs du RN. Je rappelle le principe que vous connaissez tous et qui vaut pour tout le monde : quatre minutes de temps de parole, réponse incluse. Si vous souhaitez des réponses, posez des questions courtes. Trois minutes de questions, ne laissent qu'une minute de réponse. La règle n'est pas nouvelle, elle est actée par tous les groupes politiques en bureau et ce n'est pas la première fois qu'on l'expérimente.
Monsieur le « président proposé », vous avez eu trente minutes pour préciser votre vision ; je vais tâcher, en trois minutes, d'être plus direct. Vous êtes proposé pour diriger EDF – et ses milliers de salariés –, sans doute l'une de nos plus belles entreprises, fidèle à notre pays depuis 1946 et la reconstruction. Une entreprise dont nous avons le plus grand besoin pour notre indépendance, pour l'innovation et la transition énergétique, même si, de ce point de vue, elle pourrait beaucoup mieux faire.
C'est la première fois depuis notre élection que nous avons l'occasion de nous prononcer sur la feuille de route énergétique pour le pays. Nous regrettons d'ailleurs que votre audition soit l'occasion d'en débattre, alors que la prochaine programmation pluriannuelle de l'énergie n'est toujours pas discutée et que nous allons enchaîner l'étude de textes sans savoir précisément où nous allons, sans avoir voté sur des objectifs.
Nous, les députés insoumis, dénonçons l'impasse du tout-marché dans laquelle, fort logiquement, vos réponses s'inscrivent. Nous ne sommes pas d'accord avec la dépendance au nucléaire, qui nous met dans la situation de fragilité dans laquelle nous sommes, alors qu'il aurait fallu faire beaucoup plus sur la sobriété et les énergies renouvelables. Vous faites du nucléaire votre priorité avec les EPR (réacteurs pressurisés européens) et les SMR (petits réacteurs modulaires) , dont nous doutons de la pertinence technique même. Nous craignons que cela finisse par nous exploser à la figure.
Nous regrettons qu'aucun scénario 100 % énergies renouvelables ne figure dans vos réponses, comme si c'était un impensé. Nous ne cautionnons pas cette nationalisation qui n'en est pas une, car nous croyons que le retour à un statut d'établissement public à caractère industriel et commercial (Epic) serait beaucoup plus pertinent que celui de société anonyme à capitaux 100 % publics. Enfin, vous avez beaucoup parlé de clients ; nous déplorons que les mots « usagers » et « service public » aient disparu du vocabulaire alors que, pour nous, ils sont consubstantiels à EDF, depuis sa création.
Vous êtes incontestablement en adéquation avec la feuille de route que nous contestons. Nous reconnaissons vos qualités professionnelles, mais votre profil nous inquiète. On parle de renationalisation et vous êtes, en quelque sorte, un serial -privatiseur, puisque vous avez travaillé, en 2005 et 2006, à la privatisation d'ADP et de GDF, et à l'entrée en Bourse d'EDF.
Nous sommes des partisans de l'indépendance nationale et vous avez contribué à la vente de la branche énergie d'Alstom, qui pour nous est une trahison des intérêts de notre pays. Voilà pourquoi nous voterons contre votre nomination.
Pour conclure…
Je termine, monsieur le président. M. Rémont pourra répondre par oui ou par non : existe-t-il un accord pour augmenter la rémunération du PDG d'EDF après votre nomination ?
Ne feignez pas de découvrir la règle aujourd'hui ; elle est la même pour tous. Vous avez décidé, et c'est votre choix le plus libre, de faire une intervention de deux minutes cinquante et de réserver vos questions pour les dix dernières secondes.
Vous aviez donné quinze minutes pour intervenir à M. Rémont, et il en a utilisé trente ! Ce n'est pas correct !
La durée d'intervention de nos invités est toujours indicative. Je comprends votre frustration.
En me présentant comme potentiel PDG d'une entreprise de service public, j'accepte le principe d'une réduction très significative de ma rémunération. Je ne connais pas, à ce jour, ma rémunération au titre de PDG d'EDF.
Ça alors ! Vous seriez bien le seul salarié qui accepte un emploi sans connaître sa paie !
Chacun le constate, la trajectoire défavorable à l'atome, décidée il y a dix ans par François Hollande et assumée par Emmanuel Macron ces cinq dernières années, nous a menés dans l'impasse.
Depuis la dernière campagne présidentielle, après une valse-hésitation, M. Macron a changé d'avis. En quelques semaines, il a franchi la frontière qui sépare le nucléaire honteux du nouveau nucléaire, synonyme de réindustrialisation, de souveraineté et d'électricité abondante et bon marché. Mieux vaut tard que jamais ! Malheureusement, ce tournant intervient au moment où les acteurs de la filière sont affaiblis. Qui plus est, nous n'en sommes encore qu'au stade des déclarations ; la loi n'a toujours pas été modifiée et la fermeture de douze réacteurs nucléaires est toujours d'actualité.
Le Président de la République tente de faire oublier le désastre de la vente de la branche énergie d'Alstom à General Electric, à laquelle vous avez contribué dans le cadre de vos missions pour Bank of America Merrill Lynch. Le groupe LR considère que vous portez une lourde responsabilité à cet égard. Comble du cynisme, si votre nomination est confirmée, il vous faudra superviser le rachat par EDF de ces activités d'Alstom, annoncé par le Président de la République.
Vous devrez relever un double défi : faire en sorte qu'EDF renoue avec son excellence industrielle et relancer le nucléaire. Le prérequis pour cela est de disposer de bras qualifiés et en nombre. Or c'est ce qui manque cruellement à EDF, comme l'a récemment déploré M. Lévy. La politique d'Emmanuel Macron a en effet mis à mal l'ensemble de la filière et grevé de façon catastrophique les capacités d'investissement de l'entreprise, notamment en puisant dans sa trésorerie quand il en avait besoin, pour financer le bouclier tarifaire par exemple.
Vous êtes rompu aux questions financières et coutumier des rouages de la sphère étatique. Toutefois, le groupe LR s'interroge sur votre connaissance du système électrique et sur votre véritable engagement à l'égard du nucléaire. Vous vous apprêtez à prendre les rênes d'une entreprise qui a une âme très forte. Le chantier qui vous attend s'annonce pour le moins dense et compliqué, pour un non-initié.
Vous êtes l'homme de l'Élysée qui doit redonner à EDF et au nucléaire français leurs lettres de noblesse, alors même que l'entreprise a été menacée de démantèlement par le projet Hercule et que la filière de l'atome a été mise à mal par celui qui veut vous nommer. Vous devrez relever le défi de la dette colossale d'EDF, qui pourrait culminer à 60 milliards d'euros d'ici à la fin de l'année, bien que le recours à la dette soit la marque de fabrique de votre promoteur.
Enfin, sachez que dans les sociétés dont plus de la moitié du capital est détenue directement par l'État, les dirigeants mandataires sociaux sont normalement nommés parmi les membres du conseil d'administration, lorsque le président assure la direction générale. Il est pourtant incontestable que, le 29 septembre 2022, la proposition de nomination du Président de la République n'avait pas été précédée d'une proposition du conseil d'administration, qui d'ailleurs ne pouvait pas légalement proposer votre nom.
Pour toutes ces raisons, le groupe LR votera contre votre nomination à la tête d'EDF.
Je n'ai pas entendu de question dans vos propos. Je ne suis l'homme de personne, je veux être l'homme d'une mission, celle que le Président de la République préconise de me confier, si le conseil d'administration le propose et si naturellement le Parlement l'approuve. Cette mission sera guidée par une vision industrielle au service du pays, et absolument rien d'autre.
Pour sa part, le groupe Démocrate trouve que vos propos introductifs démontrent que vous disposez des compétences pour prendre en main l'avenir d'EDF. Ils traduisent également votre perception de l'envergure d'une entreprise à laquelle nos compatriotes sont attachés, et qui fait partie du patrimoine national. EDF, c'est l'électrification de la France après la seconde guerre mondiale ; c'est le fournisseur d'électricité de nombreux Français ; c'est un leader industriel de l'énergie au rayonnement international ; ce sont environ 165 000 hommes et femmes, qui travaillent chaque jour pour satisfaire les besoins en électricité de la France.
EDF est au cœur des défis contemporains, qu'il s'agisse de la lutte contre la dérive climatique, des réponses à la crise énergétique européenne ou encore de la résilience et de la souveraineté énergétique de la France. Relever ces défis nécessite d'importants investissements, pour lesquels deux logiques s'affrontent : celle de la maîtrise des coûts, pour garantir des prix d'électricité supportables par les ménages, les associations et les entreprises ; celle des investissements nécessaires pour conjuguer transition énergétique et production électronucléaire. Quelles sont, selon vous, les conditions à réunir pour sortir de ce dilemme ? Les investissements inévitables sur le territoire national seront-ils de nature à remettre en cause ceux prévus par EDF à l'international ?
Enfin, plusieurs témoignages évoquent des lenteurs d'EDF Obligation d'achat (EDF OA), dues à un double traitement – papier, puis numérique – des dossiers, qui freine le développement du photovoltaïque. Une dématérialisation complète serait de nature à permettre l'accélération de projets indispensables à la diversification du mix énergétique.
Les députés du groupe Démocrate voteront pour votre nomination à la tête d'EDF.
Merci de votre confiance. S'agissant des investissements, vous avez soulevé un point essentiel : une entreprise doit avant tout créer sa propre capacité d'investissement, ce qui passe d'abord par sa capacité de production – d'où la priorité de remettre le plus grand nombre possible de centrales en production.
EDF est une entreprise de service public, ce qui implique qu'un certain nombre de régulations s'imposent à elle. Or, en l'absence de révision des conditions de marché à l'échelle européenne et du contexte de régulation français, la capacité d'investissement d'EDF est limitée. L'Arenh pèse en effet sur ses finances dans des proportions qui obèrent cette capacité d'investissement. Agir sur les deux leviers est indispensable. D'un côté, l'entreprise doit générer plus de térawattheures, parce que c'est ce qui va créer de la capacité d'investissement. De l'autre, il faut travailler avec les pouvoirs publics, français et européens, pour créer un cadre qui permette de préserver le moyen terme.
À court terme, l'Arenh est évidemment utile pour protéger les clients français de l'explosion des prix du marché, mais on ne peut pas s'en contenter pour l'avenir. Cela ne ferait que repousser le problème et, dans quelques années, l'insuffisance de la production d'électricité serait bien plus importante que ce qu'elle est aujourd'hui. Il faut donc traiter le court terme, mais aussi travailler sur le moyen et le long terme.
Pour ce qui est du problème de lenteur que vous mentionnez, j'y prêterai la plus grande attention. Je suis convaincu de la nécessité de numériser les échanges avec les clients, notamment les procédures administratives, tout en préservant les relations humaines là où elles apportent une vraie valeur ajoutée.
En même temps que vous avez accepté de présider EDF, vous avez accepté une feuille de route. Quelle est-elle pour ce qui est de l'avenir de l'entreprise et du projet de sa réorganisation ? S'agit-il de mettre en œuvre un « Hercule bis » ? Votre parcours pourrait le laisser penser.
Pour vous, la vocation de l'entreprise est-elle de devenir « Nucléaire de France » ou de demeurer un électricien présent sur l'ensemble de la chaîne de valeur de l'électricité, donc rester Électricité de France ? Qu'entendez-vous par « groupe intégré » et quelle vision avez-vous de cette intégration ? Êtes-vous favorable à l'inclusion des valeurs de service public, qui sont depuis toujours la raison d'être d'EDF ? Êtes-vous opposé au statut d'entreprise à mission ?
Quelle est la feuille de route concernant la mise en concurrence des concessions hydroélectriques, qui plus que jamais doivent rester dans le giron public ? Je n'ai pas été convaincue par vos propos à ce sujet.
Enfin, quel projet managérial comptez-vous déployer pour créer la dynamique nécessaire à la mobilisation des salariés, dont le sens du service public est depuis toujours attaché aux enjeux de l'entreprise ?
La feuille de route d'EDF, c'est à EDF de la définir et d'obtenir ensuite l'adhésion de ses parties prenantes, en commençant par son actionnaire.
Les principes du projet industriel que j'entends conduire reposent sur les trois piliers que je vous ai décrits tout à l'heure : une production diversifiée – qui élimine donc l'option « Nucléaire de France » –, pour servir les besoins français et internationaux ; une relation avec la clientèle elle aussi diversifiée, pour accompagner la démarche énergétique de chacun avec des solutions qui ne se limitent pas à la seule fourniture d'électrons ; les réseaux, dimension essentielle du service public qui requiert une gouvernance particulière. Enedis est un élément clé du groupe EDF, encore plus à l'heure de la transition énergétique, parce que son activité est la plus proche du terrain. C'est Enedis qui met en relation les besoins de production et de consommation, grâce à son maillage fin du territoire.
Toutes ces dimensions doivent se développer ensemble, au sein du groupe EDF. Voilà le projet industriel, ou la feuille de route si vous préférez, que je compte déployer.
Si je comprends bien, la différence entre le projet Hercule et celui que vous défendez, c'est qu'Enedis sera intégré à EDF Bleu. Pour en revenir à l'hydroélectricité, un sujet important pour moi, vos propos ne m'ont pas du tout convaincue.
Je n'ai aucune idée préconçue et je refuse d'en avoir. Je suis à l'extérieur de l'entreprise et je ne prends pas pour acquis des choses qui ont été discutées avec d'autres, avant ma candidature. Et je souhaite que l'hydroélectricité reste une activité d'EDF.
Vous avez déjà répondu à une partie de mes questions.
Vous avez évoqué les moyens de faire évoluer la production, mais la consommation évolue, elle aussi. Je souhaiterais avoir votre avis quant à l'adéquation des capacités de production d'EDF à la consommation croissante d'électricité.
Votre présentation de votre vision à court, à moyen et à long terme pour EDF nous a convaincus. Le groupe Horizons votera pour votre nomination.
Gérer l'adéquation entre les moyens de production et la demande va être un travail essentiel à moyen terme. EDF gère en ce moment une crise de court terme, qui est née de l'indisponibilité d'une partie du parc de production. J'espère qu'on reviendra très vite à des niveaux de production habituels pour le pays, après avoir réglé le problème de la corrosion sous contrainte.
À moyen terme, l'électrification grandissante des usages va accroître la demande, tandis que des capacités nouvelles de production devront être créées. Il s'agit pour EDF d'un défi financier, technique et humain. Quel que soit le scénario étudié par RTE, de six ou quatorze EPR, de tel ou tel pourcentage d'énergies renouvelables, le facteur déterminant est la capacité industrielle d'EDF à créer ces nouveaux moyens de production. C'est sur cette capacité industrielle de tous les métiers qu'il convient de se focaliser et c'est ce que je compte faire.
Au-delà de la production centralisée, et si j'en juge par l'expérience que j'ai d'autres marchés, la production réellement décentralisée, l'autoconsommation, est sous-exploitée en France et en Europe. Or cette autoconsommation peut apporter des capacités de production supplémentaires, même si elle s'accompagne de contraintes sur le réseau, de régulation et d'équilibre notamment. C'est une façon de créer du parc de production rapidement, alors que le temps est notre plus grand ennemi, et d'apporter un peu de flexibilité. À la complexité de la tâche qui attend EDF s'ajoute la complexité administrative, qui je crois occupe le Parlement en ce moment.
C'est la combinaison de tous les éléments évoqués – moyens financiers adéquats, autofinancement, régulation et structurations des filières industrielles – qui permettra de bâtir les futures capacités de production d'EDF.
Les défis qui attendent le futur PDG d'EDF sont nombreux et complexes. Le premier est la poursuite de la réorganisation du groupe, dans un contexte social tendu, et le rachat en Bourse de l'ensemble des capitaux de l'entreprise.
Depuis la mise en place du dispositif Arenh et les surcoûts colossaux liés au fiasco de l'EPR de Flamanville, EDF est en grande difficulté financière. Ses capacités d'investissement, humain et financier, réduites rendent son avenir inquiétant, sans parler du projet de vente à la découpe et de privatisation du groupe, dit Hercule puis Grand EDF qui avait suscité de fortes tensions sociales. Il a certes été remisé, mais pour combien de temps ? Votre éventuelle nomination est perçue par certains comme une manœuvre visant à engager un Hercule bis, ce qui ravive les inquiétudes au sein des organisations professionnelles du groupe.
Pouvez-vous clarifier vos intentions et vos ambitions pour l'avenir d'EDF ? Quelle est votre position concernant ce projet Hercule ? La réorganisation du groupe en filiales, ouvertes aux investisseurs, est-elle toujours sur la table ? Ou, au contraire, pouvez-vous assurer à celles et à ceux qui sont inquiets qu'EDF conservera ses missions de production et de distribution publiques d'électricité ?
Si vous êtes nommé à la tête d'EDF, une de vos priorités sera de tenir le calendrier de remise en route de l'ensemble du parc nucléaire, fixé par le Gouvernement. Nombre d'experts jugent ce calendrier beaucoup trop optimiste, considérant les problèmes de maintenance, de corrosion ou de recharge en combustible qui s'accumulent et qui risquent très certainement de se multiplier à l'avenir, à mesure du vieillissement des centrales et de l'évolution du climat. Vous avez évoqué un été particulièrement sec ; il me semble que l'on va en subir à foison.
Comment anticiperez-vous les investissements nécessaires, et possiblement imprévus, au prolongement et à l'adaptation du parc nucléaire existant ? Comment comptez-vous mobiliser parallèlement 50 à 60 milliards d'euros pour construire de nouvelles centrales, voire davantage si l'on prend le chantier de Flamanville comme référence ? Pensez-vous pouvoir satisfaire l'inconsciente volonté présidentielle de construire six nouveaux EPR ?
Enfin, pour ce qui est des ENR, comment imaginez-vous combler le retard pris par EDF sur ses grands concurrents ? Déploierez-vous une stratégie de décentralisation de la production qui réponde aux attentes des collectivités et des citoyens ?
Si je souhaite diriger EDF, ce n'est pas pour mettre en œuvre un projet d'organisation préétabli. Je ne sais pas si je peux être plus clair. Ma volonté est de développer et de mettre en œuvre un projet industriel avec toutes les parties prenantes d'EDF, et de trouver les voies et les moyens, y compris organisationnels, qui serviront ce projet industriel – celui-ci reposant sur les trois piliers que j'ai décrits.
S'agissant des futurs projets nucléaires, je répète qu'il sera nécessaire de structurer la filière pour la faire grandir, en compétences et en capacités. Quant à la décentralisation des ENR, c'est une des pistes qui peuvent permettre d'accroître rapidement le parc de production, et de lui donner plus de flexibilité. Donc je travaillerai à son développement.
Député normand, député de Penly, formé par un résistant déporté qui était aux côtés de Marcel Paul à Buchenwald, c'est dire si j'entretiens un rapport exigeant avec EDF. Monsieur Rémont, soit vous avez une feuille de route et vous nous la donnez, soit vous n'avez pas de feuille de route, et on a besoin de votre vision. Mais ce midi, on n'a ni la feuille de route, ni la vision.
Votre parcours vous a conduit à faire à peu près l'inverse de ce qu'il nous semble nécessaire de faire pour EDF. Il nous semble nécessaire de recouvrer la souveraineté industrielle et de tirer les enseignements de la libéralisation du marché, qui a si fait mal à l'entreprise, et de ce qui a saigné financièrement EDF. Vous héritez de 60 milliards d'euros de déficit, de besoins colossaux d'investissement, notamment 100 milliards dans le nucléaire et à peu près autant dans les ENR. Et je ne parle même pas de l'efficacité énergétique. Sur tout cela, on n'a pas de vision.
J'ai des questions très simples, très claires. Pour retrouver du fric, allez-vous vendre à l'encan Enedis, Dalkia ou RTE ? Pour retrouver du cash, pour recapitaliser EDF autrement que par une OPA sur les petits porteurs, allez-vous revenir avec un Hercule 2.0 ? Nous n'en voulons pas et nous ne pouvons pas signer un chèque en blanc.
On nous dit qu'il faut sauver les barrages hydroélectriques de la privatisation, mais comment les financer ? Quel est l'avenir de la filière nucléaire ? Allez-vous mettre les ENR sur le marché ? Quelle est votre vision sur le mécanisme financier européen, sur l'Arenh ? Quels sont vos projets ? Quelle est votre feuille de route ?
Vous seriez surpris du nombre de valeurs sur lesquelles nous nous retrouvons, par exemple l'outil de travail et l'intérêt du pays.
Pardon de me répéter, mais je viens avec comme seule feuille de route de faire réussir EDF, en bâtissant un projet industriel et en créant avec les parties prenantes, notamment sur la régulation, le contexte favorable à cette réussite, dans l'intérêt du pays et celui des usagers ou des clients, selon le nom que vous voulez leur donner. Voilà ma feuille de route.
Comporte-t-elle un alinéa stipulant que je doive faire Hercule 1, 2, 3 ou 4, ou que je doive démanteler telle ou telle activité ? La réponse est non. C'est à moi de la définir, avec l'ensemble de l'entreprise.
Quant à ma vision, elle est celle que je vous ai présentée et qui consiste à développer les trois piliers d'EDF, dont l'hydroélectricité, bien sûr.
Vous dites que votre feuille de route n'est pas de démanteler EDF. Quelle est votre vision ?
J'ai essayé de vous l'expliquer, mais je crains de ne pas avoir été assez clair. Ma vision est que, pour le bien des usagers et clients d'EDF, il faut développer de conserve ses trois métiers piliers : la production, qui doit être diversifiée et inclure l'hydroélectricité, les autres ENR et le nucléaire ; la relation avec les clients, pour les accompagner dans la transition énergétique, afin qu'ils soient plus efficaces dans leur gestion des énergies ; les réseaux qui, à l'avenir, doivent être plus décentralisés.
J'ai connu un temps où EDF ne jurait que par le nucléaire qui, au passage, est une énergie ni renouvelable, ni décarbonée, et chère de surcroît – le coût de l'EPR de Flamanville avoisine désormais les 20 milliards d'euros. On ne sait toujours pas comment démanteler nos réacteurs, et nous allons être obligés de les entretenir pendant des centaines d'années.
Les choix énergétiques devraient, à mon avis, faire l'objet d'un grand débat national, qui ne soit pas préempté par l'exécutif ou par un comité Théodule.
J'ai bien compris que vous avez un peu de mal à vous prononcer sur le projet Hercule. Vous avez l'air de vous en détacher, tant mieux.
Peut-être vous sera-t-il plus facile de répondre aux questions suivantes. Qu'est-ce qui justifiait l'introduction en Bourse d'EDF il y a dix-sept ans ? Que changera la reprise de 100 % du capital par l'État ? Est-ce que cela vous aidera pour mener à bien votre projet industriel ?
Les entreprises connaissent des cycles qui sont fonction de l'évolution de leur clientèle, de leurs marchés ou de leurs investissements. La situation d'EDF et celle du secteur de l'électricité, il y a dix-sept ou vingt ans, n'étaient pas comparables à celles d'aujourd'hui.
Il y a vingt ans, le marché européen s'ouvrait. Pour la première fois, celui de l'électricité commençait à se structurer, avec les défauts qu'on lui connaît aujourd'hui. L'objectif stratégique de l'entreprise EDF de l'époque était d'accéder à ce marché et d'y acquérir une taille qui lui permettait de défendre sa stratégie, y compris sur le territoire national. Un capital diversifié était un outil pour investir dans différentes régions. C'est la raison qui a conduit à l'introduction d'EDF en Bourse, elle n'était pas du tout financière. Je rappelle que l'ouverture du capital s'est faite assez largement par augmentation de capital du groupe, si ma mémoire est bonne.
Le cycle de l'entreprise est aujourd'hui différent. Nous sommes au pied d'une montagne d'investissements, rendus indispensables par l'électrification des usages et le renouvellement du parc productif. Ces investissements impliquent un horizon temporel beaucoup plus long que celui qui est naturellement accordé par les marchés financiers. Dans un tel contexte, avoir un seul actionnaire, de long terme qui plus est, est plutôt une chance. C'est en tout cas dans ce contexte que je m'inscris et que je travaillerai avec l'État actionnaire.
S'il appartenait au président-directeur général d'EDF de fixer les règles de l'Arenh, la vie serait plus facile ! Je ferai des propositions aux pouvoirs publics pour trouver des dispositions qui continuent de protéger les usagers français contre les fortes hausses de prix, tout en offrant une perspective de long terme à EDF, pour éviter que le dispositif actuel, qui pénalise lourdement l'entreprise, soit pérennisé.
Quand M. Lévy a pris ses fonctions en 2014, il a lancé « Objectif 420 ». À l'époque, il était encore permis de rêver à 420 térawattheures de productible annuel. On va terminer l'année 2022 à moins de 300 térawattheures. Quels sont vos plans à moyen et à long terme pour arriver à retrouver un niveau de productible suffisant ?
Pour réussir à développer le nouveau nucléaire, pour finaliser les projets de Hinkley Point et de Sizewell au Royaume-Uni, pour finaliser ce qui a été entamé en Pologne et en République tchèque, EDF aura besoin de nombreuses compétences. Vous paraît-il pertinent de continuer à investir à l'international, par exemple pour des projets en Inde ou des prospects en Arabie saoudite ?
Le Président de la République a impulsé une politique énergétique cohérente, a dit notre collègue du groupe Renaissance. Quelle cohérence ! Après avoir décidé un abandon progressif du nucléaire, voilà que M. Macron opère un de ces revirements à 180 degrés auxquels il nous a habitués. Le ministre de l'économie Bruno Le Maire a d'ores et déjà fixé la feuille de route du futur PDG d'EDF à court terme : redresser la production du parc nucléaire de l'entreprise. Selon lui, de la capacité d'EDF à remettre en route ses réacteurs dépendra la sérénité de l'hiver prochain.
Le Gouvernement vient donc de valider ce que nous disons depuis longtemps : imposer la fermeture des centrales nucléaires était une erreur, qui met en danger la continuité énergétique de notre pays. M. Lévy s'était d'ailleurs opposé à ces fermetures.
Quel regard portez-vous sur la fermeture de la centrale de Fessenheim ? Bien que vous ne soyez manifestement pas hostile aux énergies intermittentes et non pilotables, vous engagez-vous à donner la priorité au nucléaire ?
M. Jean-Bernard Lévy avait dit qu'EDF n'avait pas d'équipes assez formées, propos qui lui ont valu d'être viré. Vous qui avez une certaine expertise en matière de licenciements et de destruction d'emplois, comment comptez-vous agir pour recruter et pour former le personnel d'EDF ?
En quoi pensez-vous être mieux armé pour réussir là où M. Lévy a échoué, alors que celui-ci a l'expertise, l'expérience et la connaissance d'EDF ?
Serez-vous capable de faire preuve de suffisamment d'indépendance pour préserver les intérêts d'EDF et de ses salariés, et pour tenir tête à Emmanuel Macron, quand il le faudra ?
En tant que PDG d'EDF, il vous reviendrait de mener à bien le plan d'investissement énergétique dont notre pays a besoin pour faire face aux enjeux des prochaines décennies et, surtout, pour retrouver sa souveraineté énergétique. Il vous faudrait, avant toute chose, répondre à l'urgence actuelle, notamment en augmentant la capacité de production du parc nucléaire.
EDF devra aussi jouer son rôle d'aménageur du territoire, en particulier dans nos régions rurales, qu'il ne faut pas oublier. Quelles orientations comptez-vous prendre afin qu'EDF ait les moyens techniques, financiers et humains pour continuer à être présente dans les territoires ruraux, auprès des collectivités locales et des habitants ?
Une polémique a débuté cet été après que le Gouvernement a évoqué la possibilité de lever le plafond de 450 000 euros de rémunération pour les dirigeants d'entreprises publiques, afin de recruter le futur capitaine d'industrie et dirigeant d'EDF. Avec Boris Vallaud, nous avons d'ailleurs réagi avec vigueur à cette annonce dans une tribune publiée dans Libération.
Pouvez-vous nous rassurer quant au fait que cela n'a pas été un élément décisif pour votre recrutement et que vous renoncez à bénéficier d'un tel déplafonnement, auquel nous nous opposerons férocement ?
De 2009 à 2014, vous avez dirigé la banque de financement et d'investissement de Bank of America Merrill Lynch en France ainsi que la filiale du Benelux. Cette banque a supervisé la scandaleuse vente d'Alstom à GE.
Quel a été votre calendrier de travail sur la vente d'Alstom en tant que représentant de Bank of America Merrill Lynch ? Quelle a été votre rémunération au sein de cette entreprise et, surtout, avez-vous touché une rémunération spéciale pour la vente d'Alstom ?
Selon quelle éthique peut-on prétendre défendre l'intérêt national quand on a travaillé pour une banque qui s'est illustrée dans la défense des intérêts américains contre les intérêts français ?
L'hydroélectricité est un métier à développer, avez-vous dit. Que pouvez-vous nous dire du schéma juridique qui va être établi au niveau communautaire ? J'ai cru comprendre qu'il s'agirait d'une filialisation de cette activité. Sortir de cet imbroglio serait une bonne nouvelle.
Quels seraient les calendrier et investissement idéaux pour relancer la production d'hydroélectricité en France ?
En Savoie, EDF gère cinquante et une chutes hydroélectriques, douze grands barrages et une production de 6 800 gigawatts, soit l'équivalent de la consommation annuelle d'une ville de 2,8 millions d'habitants. L'hydroélectricité y est donc extrêmement importante.
Vous avez évoqué une solution qui serait compatible avec le droit européen et qui permettrait le maintien de l'unité de gestion des concessions hydroélectriques. Nous tenons à ce que ces concessions restent dans le patrimoine national. Que pouvez-vous nous dire à ce sujet ?
L'entreprise dont il est question de vous confier la présidence est aussi constructrice de réacteurs nucléaires, en France et à l'étranger, à travers Framatome.
Or on peut s'interroger sur la capacité de Framatome à se démarquer positivement de la concurrence pour conquérir de nouveaux marchés dans les prochaines années. La Pologne, qui est très dépendante du charbon pour sa production d'électricité, désire, par exemple, se doter d'un parc nucléaire. Si EDF s'est rapidement positionnée sur ce marché en proposant de fournir quatre à six EPR, l'issue de l'appel d'offres reste très incertaine face à la concurrence de l'opérateur américain Westinghouse et du Sud-Coréen KHNP.
Un rapport du ministère polonais des actifs de l'État a évalué les coûts respectifs des trois offres : à puissance équivalente, l'offre d'EDF serait 70 % plus élevée que celle du Sud-Coréen et 27 % plus haute que celle de l'Américain. Il est clair qu'EDF ne part pas gagnante.
Si vous êtes demain à la tête d'EDF, quel sera votre plan pour renforcer la société à l'international ? Étant donné vos prises de position passées, comment comptez-vous défendre les intérêts nationaux ?
Pour assurer la maintenance de notre parc nucléaire, EDF a besoin d'ingénieurs, de soudeurs et de tuyauteurs, dont la France manque cruellement. Nous devons tous être attentifs à la main-d'œuvre qualifiée disponible si l'on souhaite faire fonctionner notre parc nucléaire de manière régulière et durable, et assurer notre indépendance énergétique. Plusieurs acteurs de la filière estiment qu'il serait indispensable de recruter environ 30 000 personnes dans les années à venir.
Des initiatives émergent : un campus des métiers des énergies décarbonées devrait voir le jour au lycée André-Malraux de Montereau, en Seine-et-Marne ; dans le cadre d'un appel à projets du plan France relance, le projet Nexif d'EDF a obtenu 1,9 million d'euros, en soutien au développement des formations dans le domaine du nucléaire.
Si vous êtes nommé à la tête d'EDF, comment pensez-vous favoriser l'attractivité de la filière nucléaire en France ?
Vous l'avez rappelé, nous devons traverser deux crises majeures : celle de l'énergie et celle du climat. Nous devons donc organiser une planification énergétique et écologique. Selon vous, que doit faire EDF pour remédier à ces crises ?
Avez-vous prévu d'organiser une planification précise et, si oui, avec quel mode de production et selon quel calendrier ? Quels en seraient les objectifs, les indicateurs ?
Sous votre gouvernance, EDF travaillera-t-elle sur un scénario 100 % énergies renouvelables ?
En 2018, le président Macron a demandé au PDG d'EDF de réfléchir à la réorganisation du groupe. De cette demande est né le projet Hercule, consistant à scinder le groupe en fonction de ses activités ; EDF Bleu pour l'entreprise publique et le nucléaire ; EDF Vert, ouverte au marché ; EDF Azur pour les barrages hydroélectriques.
Ce projet est-il définitivement enterré ou seulement repoussé ? Envisagez-vous de le déterrer malgré l'hostilité des syndicats et les lourdes incidences sur la géopolitique du nucléaire ?
Concernant la centrale de Fessenheim et en considérant la situation énergétique actuelle, partagez-vous l'avis de l'ASN selon lequel l'installation était satisfaisante et sa fermeture une erreur ?
Alors que leur contrat d'électricité arrivait à échéance, de nombreuses TPE et PME ont découvert avec stupéfaction une multiplication par deux, parfois par cinq, des tarifs pour 2023. Cette augmentation risque d'entraîner une hausse des dépôts de bilan. Dans ma circonscription des Côtes-d'Armor, 72 % des entreprises indiquent être affectées à court terme ou très court terme par la hausse des prix. Ainsi la CMTP, une entreprise de thermolaquage qui emploie onze salariés, prévoit que les coûts de l'énergie représenteront 17 % de son chiffre d'affaires en 2023, contre 5 % en 2021, avec une flambée des prix de l'électricité de plus 600 %. Je peux aussi vous parler d'un cinéma de quartier qui a vu sa facture d'énergie multipliée par cinq.
Lors d'une audition au Sénat le 4 octobre 2022, Olivia Grégoire, la ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, a fait savoir qu'elle attendait des prix de l'énergie raisonnables et raisonnés et qu'elle souhaitait aussi de meilleurs échéanciers pour étaler les paiements de factures. De quoi redonner un peu d'air à nos TPE-PME.
Dans l'hypothèse de votre nomination à la direction d'EDF, pourriez-vous nous détailler vos intentions pour accompagner au mieux nos petites entreprises ? Êtes-vous, par exemple, favorable à un élargissement des tarifs réglementés au-delà du seuil des 36 kilovoltampères ?
Concernant les barrages hydroélectriques, vous évoquez dans votre réponse écrite une solution compatible avec le droit européen. Vous précisez même que vous êtes plutôt favorable à cette solution. Peut-on avoir l'honneur de la connaître ?
Vous n'avez pas répondu à ma collègue concernant l'adaptation du parc nucléaire aux problématiques de réchauffement climatique. Je vis dans une région où le nucléaire est très présent et, chaque année, la Loire frôle les débits minimums requis pour le refroidissement des centrales. Des dérogations sont accordées et cela risque d'être un problème majeur à l'avenir.
Autre sujet, pour lequel nous avons besoin de transparence, quelle est votre opinion sur le stockage et l'entreposage des déchets nucléaires ?
Les consommateurs français profitent tous les ans du mécanisme de l'Arenh, qui permet de céder aux ménages, aux PME, aux ETI et aux entreprises grandes consommatrices une part de cette rente énergie que nous avons et qui joue un rôle d'amortisseur alors que les prix de l'énergie s'envolent.
L'industrie française souffre et les alertes ne manquent pas quant aux risques d'arrêts de production, de fermetures d'usines ou de délocalisations. Pour donner des perspectives aux salariés et aux investisseurs des entreprises grandes consommatrices d'électricité, la sécurisation du prix de l'électricité grâce à des contrats de long terme, sur dix ou quinze ans, est la clé. EDF a déjà signé de tels contrats avec les industriels électrointensifs du consortium Exeltium. La crise de l'énergie nous impose de développer sans attendre ce modèle largement plébiscité.
Prévoyez-vous de déployer rapidement davantage de contrats de long terme pour que l'industrie française bénéficie de la compétitivité du parc nucléaire national ? Et comment comptez-vous vous y prendre au cours des premiers mois de votre mandat ?
Je reviens sur deux questions qui vous ont déjà été posées par mon collègue Jean-Philippe Tanguy et auxquelles vous n'avez pas répondu. Pourquoi M. Stefanini vous a-t-il aidé ? Avez-vous de quelconques liens avec Jérôme Pécresse ?
Avec Hynamics, EDF dispose d'une filiale, créée en 2019, qui a pour vocation de produire de l'hydrogène 100 % bas-carbone. Cette filiale est membre de l'association France hydrogène, qui promeut la filière française de l'hydrogène dans le cadre de la transition énergétique et le développement d'outils industriels de production d'hydrogène.
EDF pourrait-elle implanter ses unités de production d'hydrogène sur des sites nucléaires en exploitation, qui disposent du foncier suffisant et qui n'accueilleront pas les EPR 2 ou les SMR ? Cette proximité des lieux de production d'électricité éviterait de créer un ou des nouveaux sites industriels pour produire de l'hydrogène et permettrait d'élaborer de nouveaux couloirs de lignes électriques pour alimenter ces sites industriels de production d'hydrogène. Le site de Flamanville, dont je suis le député, ne pourrait-il pas accueillir une installation de ce type ?
Vous avez parlé à plusieurs reprises de la capacité d'investissement d'EDF et vous avez insisté sur la volonté de développer le nucléaire. Est-ce bien raisonnable quand on voit que l'EPR de Flamanville n'est toujours pas terminé et qu'il a déjà coûté cinq à six fois plus cher que prévu ? Va-t-il rester de l'argent pour le développement des ENR si on s'entête dans le nucléaire ?
Pour ce qui est du statut, le fait qu'EDF soit un Epic ou une SA (société anonyme) n'est pas anodin, puisqu'un Epic a une capacité supérieure à lever des fonds et à s'endetter.
Vous avez parlé d'une solution européenne au sujet de l'Arenh, mais il me semble que l'Arenh est une solution française à un problème européen, posé par la mise en concurrence des opérateurs.
Enfin, le président Macron vient d'annoncer le retrait de la France du traité de la charte de l'énergie (TCE). Cela ouvre-t-il la possibilité d'une sortie du marché à l'échelle européenne ?
Vous êtes statutairement l'homme du Président de la République puisque votre désignation doit être soumise à l'approbation ou au rejet du Parlement. Avez-vous, oui ou non, rencontré le président du groupe LR ainsi que la présidente de la commission des affaires économiques avant votre audition au Sénat ?
En ma qualité de député du Calvados, j'ai pu interroger récemment M. Lévy quant à l'état d'avancement de la construction de l'EPR de Flamanville. Commencée en 2007, elle devait initialement s'achever en 2012. On nous a alors fourni les raisons d'un tel retard. La crise que nous traversons nous rappelle l'importance d'entretenir et de développer nos parcs nucléaires. Pouvez-vous nous confirmer la date de mise en place des combustibles sur cet EPR, qui, d'après M. Lévy, devait avoir lieu courant 2023 ? Quelles solutions envisagez-vous pour que nous n'ayons plus à subir de tels retards et pour que notre pays soit le plus efficace et le plus performant possible ?
Vous voudriez qu'on vous fasse confiance pour diriger EDF, un fleuron national, alors même que vous avez participé au saccage d'Alstom, un autre de nos fleurons. Que comptez-vous dire aux 5 000 salariés d'Alstom qui ont perdu leur emploi ?
Nous ne pouvons pas vous signer un chèque en blanc. Vous avez été interrogé plusieurs fois sur l'avenir d'EDF comme entreprise intégrée et vos réponses n'ont pas été claires. Oui ou non, le gestionnaire de réseau Enedis restera-t-il filiale à 100 % du groupe EDF ? Oui ou non, le groupe gardera-t-il sa participation actuelle – ou l'augmentera-t-il – dans RTE ? Oui ou non, les énergies renouvelables demeureront-elles dans le même ensemble que les autres activités de production d'EDF ? Oui ou non, y aura-t-il un nouveau projet Hercule ?
Dernièrement, quatre salariés de RTE, filiale d'EDF, ont été convoqués à la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), à la suite de faits de grève. Est-ce là la même conception du dialogue social que vous prétendez appliquer dans ces entreprises ?
Le directeur de projet de l'EPR de Flamanville a annoncé la mise en service, malgré des questions de sécurité sur la cuve, en mode dégradé. Assumerez-vous la responsabilité d'un accident ?
Si vous êtes nommé, vous allez devoir relever nombre de défis colossaux, tant financiers qu'industriels, alors que la France fait face à sa pire crise énergétique depuis des décennies.
Il vous faudra relancer une production d'électricité en berne, en raison de l'arrêt de nombreux réacteurs nucléaires pour maintenance ou pour régler des problèmes de corrosion, et de la sécheresse, qui a fragilisé la production hydroélectrique. Tout l'enjeu sera de redémarrer suffisamment de réacteurs pour faire face aux pics de consommation à venir, en particulier si l'hiver est très froid.
De plus, la situation financière du groupe est plombée par une dette qui pourrait culminer à 60 milliards d'euros à la fin de l'année 2022.
Il y a donc fort à faire pour rassurer salariés et syndicats, qui redoutent une vente à la découpe des différentes activités d'EDF et la fin du modèle intégré de l'entreprise.
Dans l'hypothèse où vous seriez nommé, comment pensez-vous calmer les inquiétudes des salariés ? Pouvez-vous nous assurer de la remise en route des réacteurs nucléaires ?
Vous n'avez pas évoqué les territoires ultramarins. Je viens de La Réunion, où la production énergétique est fortement carbonée. Nous dépendons à 87 % de l'extérieur pour nos approvisionnements énergétiques. C'est une aberration pour une île.
Nous venons de signer notre programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) et nous avons fixé un objectif de 52 % d'énergies propres dans notre mix énergétique. Quelle place, quel rôle pourrait y tenir EDF ?
La hausse du coût de l'énergie est terrible pour l'économie de La Réunion, pour les fermiers, pour les familles. La responsabilité d'EDF est grande sur un territoire comme le nôtre, où 37 % de la population vit en dessous du seuil de pauvreté. En avez-vous conscience et comment voyez-vous les choses ?
La SNCF est le premier consommateur industriel d'électricité en France. La société se tourne vers les régions pour le trafic TER et vers les entreprises ferroviaires et les chargeurs pour le fret, afin de répercuter la hausse des coûts de l'énergie qu'elle subit. S'ajoute à cela une trajectoire de facturation des péages très dynamique. Ce bond des prix de l'électricité risque in fine d'avoir un effet malthusien sur le volume des circulations ferroviaires, avec un effet de report modal inversé.
Quel dialogue envisagez-vous de nouer avec la SNCF au sujet des tarifs de l'électricité pour éviter d'affaiblir le transport ferroviaire de voyageurs et de fret en France ?
Je prends la parole à mon tour pour revenir sur la question de la vente d'Alstom, qui a été évoquée à de multiples reprises.
Une commission d'enquête a été demandée en 2017 par Olivier Marleix. Il en était le président, j'en étais le rapporteur.
Au cours de la présente audition, le nom de M. Luc Rémont a été très souvent cité comme étant en lien avec Alstom. J'ai fait quelques vérifications : sur les 50 auditions que la commission d'enquête avait réalisées pendant les six mois qu'ont duré ses travaux, dans les 292 pages du tome I, dans les 700 pages du tome II et dans la totalité des retranscriptions des auditions, pas une seule fois le nom de Luc Rémont n'est apparu dans la discussion. Jamais !
La conclusion du rapport, qui a été validée, est bien qu'Alstom n'avait ni la taille critique, ni les ressources financières nécessaires pour faire face seule, à terme, au bouleversement du marché de l'énergie, et qu'il fallait qu'Alstom s'adosse à un partenaire d'envergure mondiale.
Je vous invite à relire les conclusions du rapport afin d'avoir l'information la plus factuelle et la plus précise possible.
Madame Bregeon, l'objectif est évidemment de remonter le productible le plus vite possible, en tenant compte des contraintes techniques nombreuses. Il faut commencer par atteindre les objectifs de cette année, grâce au redémarrage des centrales le plus vite possible, pour repasser au-dessus des 300 térawattheures l'année prochaine. Quant à la gestion des compétences, il s'agit d'un enjeu majeur.
Hinkley Point et Sizewell sont au Royaume-Uni, le deuxième marché d'EDF. Il s'agit de deux projets très importants, d'une part, pour asseoir davantage encore la présence d'EDF sur ce marché ; d'autre part, pour équilibrer ce qui se fait d'un côté et de l'autre de la Manche. Hinkley Point est en cours de construction et, comme tous les projets complexes, il a ses hauts et ses bas. Nous ferons en sorte de le gérer le mieux possible.
L'international fait partie des missions d'EDF et doit mobiliser des ressources en capital et en moyens humains qui dépendent des objectifs que l'on poursuit. Selon qu'il s'agit d'énergies renouvelables, de nucléaire, de conseil ou de développement de projets, les ressources engagées ne sont pas les mêmes et sont adaptées à chacun des sujets.
Monsieur Tivoli, je ne pense pas qu'il puisse y avoir de stratégie bas-carbone sans stratégie nucléaire claire. Mon engagement est donc de faire réussir la filière nucléaire.
Madame Chikirou, la formation du personnel me tient particulièrement à cœur. Je pense vraiment que c'est une dimension essentielle de la réussite de l'entreprise. J'ai déjà appliqué ce principe chez Schneider Electric en formant les salariés, au sein de l'entreprise et en dehors. Il est aussi difficile pour Schneider Electric de trouver des électriciens que de trouver des soudeurs pour les entreprises de la filière nucléaire. Il faut donc en former, puis les faire grandir. Cela fait partie des choses auxquelles je crois fermement.
Quant à savoir quelle est mon indépendance, elle est en relation avec la mission qui m'est confiée. Je suis un dirigeant d'entreprise qui exécute ses missions avec l'esprit d'indépendance qui est associé à sa mission.
Monsieur Vigier, l'aménagement du territoire est une dimension essentielle de la mission du groupe. La présence d'EDF sur le territoire commence avec son réseau. Enedis est, je pense, un des services publics les plus proches, les plus maillés du territoire. Cette dimension est appelée à se renforcer grâce à la décentralisation de la production d'électricité. Il s'agit d'une direction stratégique forte, qui doit être accompagnée par la régulation, une partie des moyens financiers d'Enedis étant déterminés par cette régulation. Pour ce qui est des autres activités du groupe, EDF se doit d'être proche de ses clients, qui sont partout sur le territoire. J'aurais, bien sûr, le souci de m'en assurer.
Monsieur Potier, je vous réponds comme j'ai répondu à M. Tavel : je ne connais pas ma rémunération future à ce jour. J'ai simplement accepté le principe d'une diminution significative de ma rémunération actuelle.
Monsieur de Fournas, j'ai répondu aux questions que vous me posez par écrit et cette réponse est précise. Par ailleurs, vous avez entendu les commentaires du président. J'ajoute que tout sujet industriel mérite une mise en perspective ; c'est la situation de l'entreprise qui a conduit au deal entre Alstom et GE. Par ailleurs, je vous ai dit que j'avais quitté Merrill Lynch après le premier contact entre les deux entreprises.
Monsieur Descrozaille, je le répète, l'hydroélectricité est un pilier essentiel de l'activité d'EDF, qu'il convient de pérenniser. Je n'ai pas, à ce stade, de plan détaillé, car je ne suis pas dans l'entreprise. En revanche, je vais me mettre au travail sur le sujet et j'aurai l'occasion de revenir au Parlement, avec un schéma juridique stabilisé, établi avec le Gouvernement et la Commission européenne, et avec un plan d'investissement qui corresponde aux ambitions qu'il faut avoir pour l'hydroélectricité. Il faudra notamment tenir compte de l'évolution climatique ainsi que du potentiel de stockage de l'hydroélectricité, qui peut être exploité davantage.
Monsieur Rolland, je ne vais pas répéter ce qui vient d'être dit à l'instant sur l'hydroélectricité. Il est certain que les barrages de Savoie, que je connais bien, sont essentiels à l'activité économique et à l'aménagement du territoire.
Madame Laporte, avec Framatome, EDF est un promoteur de projets nucléaires, qui ne sont pas toujours financés et réalisés par EDF et qui peuvent l'être pour d'autres clients, notamment à l'étranger. Le groupe EDF va continuer à être présent sur ces projets à l'export, qui sont indispensables pour faire grandir la filière nucléaire française. Cela n'entre pas en concurrence avec les projets développés en France, mais contribue à faire émerger des compétences qui viennent nourrir les compétences françaises. Je travaillerai donc dans cet esprit pour faire gagner Framatome à l'international.
Madame Maquet, la question des recrutements dans les différents métiers me tient à cœur, comme je l'ai déjà indiqué. C'est notamment le cas pour un certain nombre de métiers techniques, qu'il est indispensable de relancer dans notre pays.
En tant qu'industriel, je vis au quotidien le désenchantement pour les métiers techniques. C'est une responsabilité collective que de relancer l'attractivité de ces métiers, et cela commence au collège. Il est crucial d'attirer à nouveau des jeunes de talent vers ces métiers, pour que nous ayons ensuite des filières qui se tiennent bien. Vous pouvez compter sur moi, sur France Relance et sur un certain nombre d'initiatives d'EDF pour aller dans ce sens, parce que c'est indispensable au succès de l'entreprise et de la filière.
Monsieur Alexandre, je ne suis pas en mesure de répondre à votre question concernant le calendrier des actions à venir, car il me manque des données – j'espère pouvoir le faire rapidement.
Quant à un projet 100 % ENR, il n'y en aura pas. Nous avons besoin d'un équilibre entre différentes sources d'énergie. Autant il serait dangereux de penser que la France peut être tout-nucléaire, autant il le serait de penser que les énergies renouvelables, à la fois intermittentes et sujettes à de très grandes variations entre les saisons, puissent seules satisfaire les besoins énergétiques du pays. Il faut un équilibre entre différentes sources d'énergie et c'est ce schéma que je veux travailler, au sein d'un cadre validé par les pouvoirs publics.
Madame Duby-Muller, je n'ai aucun attachement particulier pour les noms de code, y compris pour Hercule 2. Comme je l'ai déjà expliqué, je me présente devant vous avec une feuille de route industrielle, qui repose sur les trois piliers que j'ai décrits, et avec pour seul objectif la réussite d'EDF.
Monsieur Bothorel, le prix de l'électricité pour les PME est un sujet très sensible et j'en suis conscient. L'Arenh ne fait pas que pénaliser EDF, il présente également quelques aspects positifs, notamment celui de protéger une grande partie des entreprises françaises. Je sais cependant que des entreprises sont dans des situations difficiles. Le Gouvernement le sait aussi et a d'ailleurs annoncé des mesures destinées à les protéger, notamment les PME. Je travaillerai avec le Gouvernement pour faire en sorte que ces mesures soient efficaces.
Monsieur Martinet, quelle est la solution pour l'hydroélectricité ? Je crois avoir donné un principe, qui est que cette activité doit rester conduite par EDF, dans un cadre juridique à définir. Je ne le connais pas encore en détail et j'ai besoin de travailler dessus. Je reviendrai vers vous avec des éléments plus détaillés, quand je serai en situation de le faire.
Monsieur Fournier, l'adaptation du nucléaire au changement climatique, notamment ses conséquences sur l'hydrographie, et le traitement des déchets sont des sujets de première importance. Ils doivent être intégrés au futur nucléaire, afin notamment que la filière aval soit parfaitement compatible avec celui-ci.
Madame Le Meur, les industriels souffrent effectivement des prix élevés de l'énergie. Certains dispositifs existent aujourd'hui, tels que la « boîte à outils », qui permet de travailler sur l'interruptibilité, sur l'abattement du tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité (Turpe) et sur d'autres éléments de ce type.
Je connais bien Exeltium, pour y avoir contribué dans une autre vie. La notion de contrat à long terme doit être intégrée à la reformation des règles de marché. Cette notion ne doit pas se limiter à la fourniture d'électricité à un certain prix, pendant une certaine durée. Il faut qu'elle soit également un partenariat entre l'entreprise qui fournit l'électricité et celle qui la consomme. Ce partenariat doit laisser de la place à la flexibilité, à l'efficacité énergétique et à des éléments qui permettent aux deux parties d'être gagnantes. Dans ces conditions, nous pourrions travailler à des contrats de long terme qui feraient partie intégrante des nouvelles règles de marché.
Monsieur Meizonnet, j'ai rencontré des gens qui souhaitaient me rencontrer. Voilà ! M.Pécresse est un industriel reconnu et je l'apprécie comme tel.
Monsieur Travert, la filière hydrogène est moins mature que d'autres, mais des travaux de R&D sont en cours et les premiers projets d'application commencent à émerger. La proximité avec d'autres sources de chaleur et d'énergie est intéressante à explorer, mais il faut que je travaille cette question pour être capable de vous en dire plus.
Monsieur Laisney, plus que le statut juridique d'une entreprise – Epic ou SA –, ce qui compte vraiment, c'est l'environnement de régulation, qui doit pouvoir donner des perspectives à moyen terme. C'est ce qui manque aujourd'hui et c'est ce sur quoi je dois travailler.
Monsieur de Lépinau, j'ai répondu à votre question, il y a quelques minutes, en disant que j'avais rencontré des personnes qui souhaitaient me rencontrer.
Monsieur Bouyx, je ne connais pas précisément le calendrier de chargement des combustibles de l'EPR de Flamanville. Je ne suis donc pas en mesure de vous répondre.
Madame Menache, je ne commenterai pas vos propos quant au prétendu saccage d'Alstom. Il faut rester serein sur les questions industrielles et les juger à long terme. Je pourrais vous en parler de façon beaucoup plus détaillée si vous le souhaitez.
Monsieur Tavel, je renouvelle la réponse que je vous ai faite tout à l'heure : le groupe EDF repose sur trois piliers, qu'il doit pouvoir faire travailler en synergie.
Madame Grangier, les circonstances du moment font qu'il est en effet nécessaire de rassurer les salariés. Il est primordial que toutes les composantes de l'entreprise travaillent ensemble pour remonter la pente et pour créer les conditions du développement et de l'investissement. Ce sera ma priorité et, évidemment, cela ne se fera pas sans les salariés.
Monsieur Naillet, j'opère moi-même dans beaucoup de territoires insulaires et je connais l'équation énergétique spécifique et difficile de ces territoires. J'aurai à cœur de travailler avec vous pour trouver le meilleur chemin possible vers la décarbonation, d'une part, et vers l'efficacité énergétique, d'autre part.
Enfin, Monsieur Valence, vous appelez mon attention sur la SNCF, premier client d'EDF. C'est une entreprise que je connais un peu aussi, pour l'avoir fréquentée pendant de nombreuses années. J'aurai à cœur de travailler avec son président pour faire en sorte que le service public ferroviaire fonctionne aussi bien que possible.
Monsieur Rémont, nous vous remercions. Nous allons maintenant procéder au scrutin hors votre présence.
Réunie à huis clos, la commission se prononce par un vote au scrutin secret, dans les conditions prévues à l'article 29-1 du Règlement, sur la nomination envisagée de M. Luc Rémont aux fonctions de président-directeur général d'Électricité de France.
Les résultats du vote sont les suivants :
Nombre de votants
Bulletins blancs ou nuls
Abstention
Suffrages exprimés
Pour
Contre
Informations relatives à la commission
La commission des affaires économiques a désigné M. Guillaume Kasbarian (Renaissance) comme rapporteur de la proposition de loi visant à protéger les logements contre l'occupation illicite (n° 360).
La commission des affaires économiques a désigné :
– M. Patrice Perrot (Renaissance) et Bénédicte Taurine (LFI-Nupes) comme co-rapporteurs de la mission d'information sur la gestion de l'eau pour les activités économiques (agriculture, industrie, énergie, tourisme) ;
– MM. Charles Fournier (Ecolo-Nupes) et Philippe Bolo (MoDem) comme co-rapporteurs de la mission d'information sur la grippe aviaire et son impact sur les élevages ;
– Mme Annaïg Le Meur (Renaissance) et M. Vincent Rolland (LR) comme co-rapporteurs de la mission d'information sur les moyens de faire baisser les prix du logement en zones tendues (hors Île-de-France) ;
– Mmes Maud Gatel (MoDem) et Anaïs Sabatini (RN) comme co-rapporteures de la mission d'information sur le Quick commerce.
La commission des affaires économiques a désigné :
– M. Jimmy Pahun (MoDEM) et M. Jean-Luc Bourgeaux (LR) comme rapporteurs de la mission d'évaluation de la loi n° 2019-469 du 20 mai 2019 pour la protection foncière des activités agricoles et des cultures marines en zone littorale ;
– Mme Marie-Noëlle Battistel (Socialistes-NUPES) et M. Pascal Lavergne (Renaissance) comme rapporteurs de la mission d'évaluation de la loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat.
Membres présents ou excusés
Commission des affaires économiques
Réunion du mercredi 26 octobre 2022 à 11 heures
Présents. – M. Laurent Alexandre, Mme Anne-Laure Babault, Mme Delphine Batho, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Thierry Benoit, Mme Anne-Laure Blin, M. Philippe Bolo, M. Éric Bothorel, M. Jean-Luc Bourgeaux, Mme Soumya Bourouaha, M. Bertrand Bouyx, Mme Maud Bregeon, Mme Françoise Buffet, Mme Sophia Chikirou, M. Dino Cinieri, Mme Christine Decodts, M. Frédéric Descrozaille, M. Julien Dive, Mme Virginie Duby-Muller, Mme Christine Engrand, M. Grégoire de Fournas, M. Charles Fournier, Mme Maud Gatel, M. François Gernigon, M. Éric Girardin, Mme Géraldine Grangier, M. Johnny Hajjar, M. Alexis Izard, M. Sébastien Jumel, M. Guillaume Kasbarian, Mme Julie Laernoes, M. Maxime Laisney, M. Luc Lamirault, Mme Hélène Laporte, M. Pascal Lavergne, Mme Annaïg Le Meur, Mme Nicole Le Peih, M. Hervé de Lépinau, M. Aurélien Lopez-Liguori, Mme Jacqueline Maquet, M. Bastien Marchive, Mme Sandra Marsaud, M. Éric Martineau, M. William Martinet, M. Nicolas Meizonnet, Mme Yaël Menache, M. Paul Midy, M. Paul Molac, Mme Louise Morel, M. Philippe Naillet, M. Nicolas Pacquot, M. Jimmy Pahun, M. Patrice Perrot, Mme Anne-Laurence Petel, M. Dominique Potier, M. Charles Rodwell, M. Vincent Rolland, Mme Anaïs Sabatini, Mme Danielle Simonnet, Mme Bénédicte Taurine, M. Matthias Tavel, M. Lionel Tivoli, M. Stéphane Travert, Mme Aurélie Trouvé, M. David Valence, M. Jean-Pierre Vigier, M. André Villiers
Excusés. – M. Perceval Gaillard, Mme Florence Goulet, Mme Mathilde Hignet, M. Max Mathiasin, M. Jérôme Nury, M. Jiovanny William
Assistait également à la réunion. – M. Jean-Philippe Tanguy