Depuis sa création, en 1946, EDF est un des champions industriels de notre pays. Il s'agit, avec ses filiales, de l'opérateur central de notre système électrique, qui assure production, transport et distribution d'électricité. La crise actuelle, qui concerne la France et l'Europe, met au grand jour son rôle stratégique pour préserver notre souveraineté énergétique. Les Français sont attachés à cette grande entreprise nationale, et ils attendent d'elle, ainsi que des responsables politiques, qu'elle assure durablement cette souveraineté et assure l'approvisionnement de l'économie et de l'ensemble des foyers. Le contexte, particulièrement complexe et fortement contraint par nos voisins européens, nécessite que tous les acteurs s'investissent dans une politique ambitieuse de sauvegarde de nos intérêts, mêlant à la fois investissements massifs et défense de notre spécificité française.
Votre audition n'est pas seulement institutionnelle, elle est stratégique. Nous attendons de vous que vous nous détailliez votre parcours et expliquiez l'état d'esprit dans lequel vous entendez mener cette nouvelle mission qui pourrait vous être confiée.
EDF est confrontée à des difficultés majeures. Les unes sont d'ordre capacitaire, avec la baisse de ses capacités de production hydroélectriques et la mise à l'arrêt de plusieurs de ses réacteurs nucléaires. Les autres, financières, résultent de choix politiques de sous-production, mais également de la régulation de l'accès à l'électricité, avec le fameux Arenh (accès régulé à l'électricité nucléaire historique). Ce dispositif impose à EDF de céder à ses concurrents une partie de sa production à un prix qui ne lui permet pas de reconstituer les ressources nécessaires à ses futurs investissements. En conséquence, la dette du groupe pourrait atteindre 60 milliards d'euros à la fin de l'année 2022.
Vous avez bien voulu répondre au questionnaire que je vous ai transmis. Si vos réponses sont détaillées, elles manquent étonnamment de précision quant à plusieurs enjeux majeurs pour le groupe. Je souhaite donc vous poser quelques questions supplémentaires.
Selon la presse, vous avez sollicité des salariés d'EDF pour préparer cette audition. Est-ce le cas ? Si oui, leur avez-vous garanti, comme nous avons pu le lire, qu'ils conserveraient leur poste ?
Il y a deux ans, au Sénat, M. Lévy avait indiqué travailler à la réorganisation des actifs d'EDF. Est-ce la feuille de route qui vous a été confiée par le Gouvernement et par le Président de la République ?
Quelle est votre réaction au projet de note d'information sur l'offre publique d'achat simplifiée de l'intégralité du capital d'EDF ?
En 2016, l'ancien directeur financier d'EDF, M. Thomas Piquemal, avait indiqué avoir démissionné « par désespoir » en raison d'un désaccord sur la soutenabilité d'un projet pour l'entreprise. Êtes-vous prêt à vous livrer aux bras de fer nécessaires à la survie de cette entreprise vitale pour la France ?
Si je ne doute pas de vos qualités professionnelles, je suis perplexe pour ce qui est des projets que vous envisagez pour l'entreprise, qui ne me sont pas apparus clairement. Ils devraient pourtant ne tendre qu'à garantir l'avenir industriel du groupe et à le protéger de tout démantèlement pour raisons financières. Vos projets sont flous et, c'est bien connu, « quand c'est flou, c'est qu'il y a un loup ». Je suis, par conséquent, contrainte d'émettre un avis défavorable sur la proposition du Président de la République de votre nomination à la tête d'EDF.