Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du mercredi 28 septembre 2022 à 9h30

Résumé de la réunion

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La réunion

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La commission entend M. Pierre Moscovici, président du Haut Conseil des finances publiques sur l'avis du Haut Conseil relatif au projet de loi de finances pour 2023 et au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 et l'avis du Haut Conseil relatif au projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027.

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Nous recevons aujourd'hui en sa qualité de président du Haut Conseil des finances publiques M. Pierre Moscovici, afin qu'il nous présente deux avis qu'a rendus le Haut Conseil, l'un sur les projets de loi de finances et de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, l'autre sur le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027.

En ce qui concerne le projet de loi de programmation des finances publiques (PLPFP), le Haut Conseil est chargé d'émettre un avis sur les prévisions macroéconomiques et l'estimation de PIB potentiel, et d'apprécier la cohérence de la programmation envisagée au regard de l'objectif de moyen terme retenu et des engagements européens de la France.

Pour ce qui est du projet de loi de finances (PLF) pour 2023 et du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2023, l'avis du Haut Conseil porte sur les prévisions macroéconomiques qui les fondent, ainsi que sur la cohérence entre leur article liminaire et les orientations pluriannuelles de solde structurel fixées par la loi de programmation. Par ailleurs, et c'est une innovation de la loi organique du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques qu'il est important de mentionner, le Haut Conseil doit donner son avis sur le réalisme des prévisions de recettes et de dépenses du PLF et du PLFSS.

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Pierre Moscovici, président du Haut Conseil des finances publiques

Je vous remercie de m'avoir invité devant votre commission, en tant que président du Haut Conseil des finances publiques, et non comme Premier président de la Cour des comptes, afin de vous présenter les principales conclusions de ces deux avis.

Mes propos seront sans doute assez proches de ceux qu'a tenus hier le gouverneur de la Banque de France, ce qui n'est guère surprenant de la part de deux représentants d'institutions dont les fonctions sont certes différentes mais les analyses souvent convergentes.

Nous sommes à un moment charnière pour nos finances publiques. Avec la crise sanitaire, celles-ci ont subi une détérioration inédite, en raison à la fois du repli de l'activité économique et des mesures de soutien d'urgence adoptées pour y faire face. Ces mesures dites du « quoi qu'il en coûte », la Cour ne les a jamais jugées négativement : elle les a soutenues, parce qu'elles étaient nécessaires. Elles ont préservé la situation des ménages et des entreprises et permis de maintenir la cohésion sociale. Elles ont rendu possible un rebond économique rapide et puissant en 2021. Cependant, revers de la médaille, nos niveaux de déficit et de dette sont très élevés et constituent, à nos yeux, des freins pour l'avenir.

Je dis souvent que je ne suis pas un ayatollah de la dette ou une Cassandre de l'austérité. Je suis toutefois convaincu qu'un pays endetté se prive des capacités d'investissement et des marges de manœuvre nécessaires pour préparer l'avenir. Or, notre environnement économique et géopolitique est incertain et la réponse aux défis de demain – transition énergétique, santé, éducation – mettra nécessairement les finances publiques à contribution. Autrement dit, nous avons besoin de ressources publiques importantes pour investir, et la dette réduit notre capacité à les déployer.

Dans ce contexte, vous avez à examiner le projet de loi de programmation des finances publiques, dont la vocation est de constituer une ancre pour notre trajectoire budgétaire au cours des prochaines années. Elle est l'occasion de se projeter sur le long terme en fixant des objectifs étayés par des réformes documentées et de préserver notre crédibilité, notamment vis-à-vis de nos partenaires européens. Vous avez souligné que c'était une des missions du Haut Conseil des finances publiques.

Certes, la crise sanitaire a conduit la Commission européenne à déclencher la clause dérogatoire générale du pacte de stabilité et de croissance, qui autorise les membres de l'Union européenne à s'écarter, en raison de circonstances exceptionnelles, des exigences budgétaires normalement applicables – autrement dit, les règles sont suspendues. Mais n'oublions pas que cette clause devrait être désactivée en 2024 : nous ne sommes donc pas exonérés de bâtir une trajectoire de finances publiques soutenable et nous ne devons pas considérer que ces règles n'existent plus. Elles devront être réformées, et ce sera une excellente chose, mais nous avons besoin de règles ; ces traités continueront à s'appliquer.

Les deux avis du Haut Conseil s'inscrivent, pour la première fois, dans le cadre du nouveau mandat que le législateur a bien voulu lui confier lors de l'adoption de la loi organique du 28 décembre 2021, laquelle doit énormément aux travaux de votre commission. Désormais, non seulement le Haut Conseil est saisi des prévisions macroéconomiques, mais il doit apprécier le réalisme des prévisions de recettes et de dépenses des projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale. Je m'en réjouis car je suis convaincu que le Haut Conseil peut ainsi mieux jouer son rôle, au service du Parlement et des citoyens. Nous travaillons avec vous, pour vous et pour les citoyens. Un Haut Conseil dont le mandat est étendu contribue davantage à votre information.

Permettez-moi de vous présenter d'abord notre avis sur les PLF et PLFSS pour l'année 2023, en commençant par un rapide retour sur la situation économique internationale, qui se rapprochera sans doute des analyses de la Banque de France.

L'environnement économique international s'assombrit. L'économie mondiale subit de plein fouet les conséquences de la guerre en Ukraine, qui se sont notamment traduites par de très fortes tensions sur les marchés des matières premières. Alors que le prix de certaines d'entre elles recule à mesure que les craintes de récession augmentent – le baril de Brent a ainsi retrouvé son prix de février, proche de 90 dollars – ceux du gaz et de l'électricité se sont envolés, poussés à la hausse par le risque d'une rupture complète d'approvisionnement en gaz russe. Les chaînes d'approvisionnement restent perturbées, notamment en raison des mesures de confinement régulièrement imposées en Chine, même si, progressivement, ces difficultés sont en voie d'atténuation.

L'ensemble des contraintes sur l'offre alimentent la hausse des coûts de production et, dans son sillage, celle des prix à la consommation. L'inflation atteint des niveaux très élevés : 8,3 % sur un an aux États-Unis, 9,1 % en zone euro, en août, ce qui conduit les banques centrales à relever à marche forcée leurs taux d'intérêt. Aux États-Unis, la réserve fédérale (Fed) a ainsi relevé de 300 points de base la fourchette de ses taux directeurs. De manière plus tardive et plus graduelle, la Banque centrale européenne (BCE) a tout de même augmenté ses taux de base de 125 points depuis le mois de juillet et a procédé le mois dernier à une hausse importante de 75 points de base. La BCE tout comme la Fed ont clairement annoncé leur volonté de poursuivre le cycle de resserrement monétaire au cours des prochains mois, dans le but de lutter contre l'inflation, conformément à leur mandat.

Le cumul de chocs extérieurs, le maintien de l'inflation à des niveaux élevés sous l'effet de la diffusion progressive des hausses des coûts de production, le durcissement des politiques monétaires engagées par les banques centrales, tout cela devrait peser sur l'activité mondiale au cours des prochains trimestres.

Au-delà des risques sanitaires qui n'ont pas totalement disparu, des incertitudes entourent les approvisionnements énergétiques des pays de la zone euro et les risques financiers se sont accrus. Les réglages de politique monétaire face à un choc inflationniste sont un art délicat. D'expérience, le soft landing, l'atterrissage en douceur des économies visé par les banques centrales, retenu dans les organisations internationales comme dans les prévisions du Gouvernement, est assez difficile à réussir.

Ne nous le cachons pas, le resserrement monétaire en cours comporte un risque de récession économique. Pour ma part, je pense plutôt que nous allons vers une croissance faible, mais ce risque est évoqué par plusieurs organisations internationales et hier encore par la directrice générale de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Le président de la Fed a été clair sur ce sujet, même si la situation américaine n'est pas tout à fait comparable à la situation européenne.

Dans ce contexte, notre avis contient deux grands messages.

En premier lieu, concernant le scénario macroéconomique du Gouvernement, le Haut Conseil considère que le taux de croissance retenu pour 2023 est un peu élevé. En revanche, il estime que les prévisions d'inflation – 4,2 % – et de masse salariale dans les branches marchandes – 5 % – sont plausibles.

En second lieu, le Haut Conseil estime que, bien que fondé sur des hypothèses un peu optimistes, le redressement des finances publiques prévu par le Gouvernement pour 2023 s'annonce lent et incertain. Selon une hypothèse optimiste du Gouvernement, le déficit budgétaire serait stable, l'amélioration du solde structurel très limitée et le ratio de dette quasi stable.

Entrons dans les détails.

Selon le scénario du Gouvernement, la croissance du PIB s'établirait à 2,7 % en 2022 et 1 % en 2023. Le Haut Conseil considère que l'hypothèse de croissance du Gouvernement pour 2022 est plausible, d'autant que les résultats sont plus favorables que prévu initialement. En revanche, pour 2023, elle s'écarte assez sensiblement de celle du consensus des prévisionnistes. Les instituts auditionnés par le Haut Conseil prévoient une croissance pour 2023 comprise entre 0 et 0,6 %, ce qui traduirait un net ralentissement, voire une baisse de l'activité au cours de l'hiver prochain, suivie d'un rebond très modéré. La prévision des économistes publiée dans le traditionnel Consensus Forecast de septembre affiche une forte baisse, à 0,6 %. Les dernières prévisions relatives à l'économie allemande, comme celles de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) parues ce lundi, anticipent désormais une récession pour 2023 alors que le scénario international du Gouvernement prévoit une croissance de 0,8 % – or l'Allemagne est, de loin, notre principal partenaire.

Disons-le, la dégradation du contexte international risque de peser davantage sur les exportations françaises que ce qu'a prévu par le Gouvernement.

De plus, les hypothèses sur lesquelles sont construites les prévisions de consommation et d'investissement sont, à notre sens, fragiles, dans un contexte marqué par une inflation qui se maintiendrait à des niveaux élevés et des taux d'intérêt en forte hausse.

La prévision est aussi entourée d'aléas baissiers importants puisque le scénario du Gouvernement n'intègre pas de difficultés majeures en matière d'approvisionnement en gaz et en électricité, ni la perspective d'une récession qui pourrait résulter de tensions énergétiques ou d'un durcissement brutal des conditions financières.

Enfin, on ne peut pas totalement exclure des conditions sanitaires un peu moins favorables que prévu.

Par conséquent, le Haut Conseil considère que la prévision du Gouvernement à 1 % est pour le moins volontariste, voire un peu optimiste. Selon le Gouvernement, la moyenne annuelle de progression de l'indice des prix à la consommation serait de 5,3 % en 2022. Cette prévision proche du consensus des économistes est jugée crédible par le Haut Conseil. L'inflation attendue en 2023 est révisée en forte hausse, à 4,2 % de moyenne annuelle, contre 3,2 % dans le programme de stabilité que vous avez examiné il y a quelques mois.

Plusieurs facteurs continuent de jouer en sens contraire l'année prochaine. La hausse des prix devrait être soutenue par l'accélération des salaires, notamment dans les services, ainsi que par les hausses déjà décidées des prix du gaz et de l'électricité. À l'inverse, l'affaiblissement de la croissance mondiale pourrait conduire à un reflux rapide du cours des matières premières, et le tassement de la demande en France pourrait limiter la capacité des entreprises à répercuter des hausses de coûts dans les prix pratiqués.

Au total, en présence de facteurs à la hausse et à la baisse assez conséquents, nous estimons que cette prévision d'inflation est crédible. Le Haut Conseil considère également que la prévision de masse salariale et d'emploi pour 2022 et 2023 est plausible.

En résumé, nous considérons la prévision de croissance un peu élevée, la prévision d'inflation crédible, les prévisions d'emploi et de masse salariale plausibles.

J'en viens aux prévisions sur les finances publiques.

Le scénario du Gouvernement prévoit un solde public effectif de -5 points de PIB en 2022 et 2023, après -6,5 points en 2021.

En 2022, la prévision de recettes nous paraît un peu basse compte tenu des rentrées fiscales très positives observées et de l'évolution de la masse salariale. Autrement dit, la prévision de solde public à -5 points de PIB est un peu prudente et l'on pourrait avoir un déficit public légèrement inférieur.

Pour 2023, les prévisions sont très incertaines, comme l'est toujours la prévision du cadre macroéconomique. Les recettes pour 2023 pourraient pâtir de l'effet négatif d'une croissance moins forte que prévu mais bénéficier d'un effet de base des recettes pour 2022. Le niveau des dépenses publiques paraît très incertain, les risques étant plus orientés à la hausse qu'à la baisse, au regard de l'évolution de la crise énergétique mais aussi des potentialités de la situation sanitaire.

S'agissant des recettes, pour entrer dans le détail, le Gouvernement prévoit pour 2022 une très forte hausse des prélèvements obligatoires, de 7,8 %, qui les porterait à 1 194 milliards d'euros, montant qui pourrait même être dépassé au vu des rentrées fiscales disponibles jusqu'en juillet. En 2023, la prévision est de 1 234 milliards d'euros, soit 3,3 % de plus qu'en 2022. Cette prévision est inférieure de 4,6 % à la croissance du PIB en valeur, soit une élasticité inférieure à l'unité, due au net ralentissement de quelques grands impôts qu'attend le Gouvernement, ce qui nous paraît justifié. C'est le cas de l'impôt sur le revenu. La baisse du bénéfice fiscal des entreprises, prévue en 2022, se traduirait aussi en 2023 par une diminution significative des recettes de l'impôt sur les sociétés.

Bref, pour 2022 comme pour 2023, le Haut Conseil estime que les prévisions de prélèvements obligatoires sont cohérentes avec le scénario macroéconomique retenu. Les données sur les rentrées fiscales peuvent toutefois permettre d'envisager des recettes un peu plus élevées en 2022, tandis que pour 2023 les aléas sont plus équilibrés.

Pour ce qui est des dépenses, en 2022, les dépenses publiques hors crédits d'impôt devraient progresser de 4,2 % pour atteindre 57,6 points de PIB. Corrigées du déflateur du PIB, indice des prix pertinent pour l'analyse des finances publiques, elles progresseraient de 1,4 % en volume.

Cette croissance est très soutenue, en dépit du fort repli des dépenses de soutien face à la crise sanitaire – 15,9 milliards d'euros en 2022, après 61,6 milliards d'euros en 2021. Une fois neutralisées les dépenses liées à la crise sanitaire, les dépenses de relance et les mesures prises pour faire face à la hausse des prix de l'énergie, les dépenses publiques progresseraient de 3,5 %, déflatées par les prix du PIB.

En 2023, selon le Gouvernement, la dépense publique devrait progresser de 2,8 %, ce qui, avec une inflation élevée, devrait conduire à une baisse de la dépense publique en volume, de 0,8 % avec le déflateur du PIB. Ce recul s'explique toutefois essentiellement par le reflux des dépenses exceptionnelles liées à la crise sanitaire et à la relance. Une fois ces dépenses neutralisées, la dépense publique progresserait de 0,7 % en volume.

Les dépenses dans le champ de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) – 3,7% hors dépenses de la crise sanitaire – progresseraient plus rapidement qu'avant la crise sanitaire, tandis que, tirées par la hausse des crédits de plusieurs ministères – l'emploi, l'intérieur, la justice, la défense – les dépenses de l'État, sur le champ très large de la nouvelle norme qui en regroupe la très grande majorité, sont inscrites en hausse de 24 milliards d'euros. Les hypothèses de dépenses pour 2023 restent affectées par les incertitudes fortes relatives au coût des boucliers tarifaires pour l'électricité et le gaz, qui peuvent jouer à la hausse comme à la baisse.

Des risques de dépassement existent. En particulier, les dépenses dans le champ de l'ONDAM comprennent une provision de seulement un milliard d'euros pour les achats de vaccins et la campagne de tests au titre du covid-19. Cela suppose que les dépenses de tests soient divisées par vingt par rapport à 2021. D'après nous, cette provision risque de se révéler insuffisante. Espérons que le Gouvernement a raison, mais restons prudents.

Par ailleurs, le maintien d'une inflation élevée en 2023, pour la deuxième année consécutive, pourrait entraîner une hausse plus forte que prévu de certaines dépenses de fonctionnement, difficilement compressibles, ou d'investissement. La prévision suppose l'absence de revalorisation du point d'indice de la fonction publique.

Aussi le Haut Conseil considère-t-il, au final, que certaines dépenses sont peut-être sous-estimées. La prévision de déficit pour 2023, à 5 points de PIB, semble par conséquent l'être un peu aussi, même si elle reste marquée par une grande incertitude. On pourrait donc avoir un déficit un peu inférieur en 2022 et un peu supérieur en 2023.

Le Gouvernement prévoit une baisse du ratio de l'aide publique en 2022 et plus marginalement en 2023. Toutefois, grâce à des facteurs temporaires, il serait assez stable et s'élèverait à 111,2 points de PIB en 2023.

L'analyse de la situation des finances publiques résultant de l'examen du Haut Conseil est sans ambiguïté. Les hypothèses sont un peu optimistes. Le Gouvernement prévoit pour 2023 une stabilité du déficit public effectif, une amélioration limitée du solde structurel, une quasi-stabilité du ratio de dette. Le redressement des finances publiques s'annonce lent et incertain en 2023.

Le Haut Conseil a également examiné le projet de loi de programmation des finances publiques. En ce domaine, trois missions nous incombent : apprécier l'estimation du PIB potentiel proposée par le Gouvernement ; les prévisions macroéconomiques associées à ce projet ; la cohérence de la programmation au regard de l'objectif d'équilibre structurel à moyen terme retenu par les engagements européens.

Le Haut Conseil considère que les hypothèses d'écart de production et les croissances potentielles retenues dans le projet de loi de programmation sont toutes deux optimistes. La croissance potentielle de l'économie serait ainsi, selon le Gouvernement, de 1,35 % par an pour la période 2022-2027. Cette hypothèse est proche de celles du Fonds monétaire international (FMI) et de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), qui sont légèrement inférieures, mais elle est nettement supérieure à celles de la Commission européenne et de l'OCDE, qui se situent plutôt autour de 1 %, comme d'ailleurs les travaux menés en interne par le Haut Conseil. Bref, 1,35 % est vraiment le taux le plus haut de toutes les estimations.

Sa réalisation suppose notamment que le net ralentissement de la population active prévu par l'INSEE sera plus que compensé par l'effet des réformes annoncées : réforme du revenu de solidarité active, réforme de l'assurance chômage, réforme de l'apprentissage, réforme des retraites, sur lesquelles le Gouvernement a fourni peu d'informations au Haut Conseil – ni les modalités ni le calendrier. Pour parvenir à 1,35 % de croissance potentielle avec le ralentissement démographique, il faudrait que ces réformes, qui ne produiront leurs effets que progressivement, soient toutes mises en œuvre très rapidement.

Par ailleurs, le Gouvernement estime que l'écart de production s'établirait en 2022 à -1,1 point de PIB, supposant que l'économie se situe dans un creux conjoncturel et qu'il existe un fort potentiel de rebond, résultat d'importantes capacités de production inutilisées qui permettraient à la croissance d'excéder fortement la croissance potentielle.

Là encore, nous pensons que cette estimation est optimiste. Elle se situe dans le bas de la fourchette des organisations internationales – notamment -0,4 point pour la Commission européenne ou -0,7 point pour le FMI. Elle n'est pas confirmée par les données d'enquêtes de conjoncture auprès des entreprises. Elle semble notamment incompatible avec les difficultés de recrutement déclarées par les entreprises dans de nombreux secteurs de l'économie.

Avec ces estimations de croissance potentielle et d'écart de production, le scénario macroéconomique pour la période 2023-2027 est à nos yeux optimiste. J'ai déjà évoqué les prévisions pour 2023. Pour la période qui suit, de 2024 à 2027, le Gouvernement retient une croissance du PIB d'en moyenne 1,7 point par an. C'est possible. Cela suppose que plusieurs facteurs favorables soient réunis, dont une baisse rapide du taux d'épargne des ménages, qui n'est pas tout à fait garantie : les ménages peuvent puiser dans leur épargne pour maintenir leur consommation en dépit de l'inflation, mais ils peuvent aussi décider de maintenir durablement une épargne accrue – comportement malheureusement observé dans la période récente – dans un contexte géopolitique et sanitaire tendu.

La prévision du Gouvernement suppose également que, durant toute cette période, l'investissement des entreprises se maintienne à son niveau de 2020 à 2021, supérieur à celui atteint les vingt dernières années, alors même que les conditions de financement se durcissent du fait de la hausse des taux. C'est également possible.

En outre, dans le scénario du Gouvernement, le commerce extérieur contribuerait à la croissance grâce à des gains de parts de marché à l'exportation. C'est possible, mais cela suppose tout de même une rupture très forte avec la tendance des deux dernières décennies ; les derniers chiffres connus ne vont pas dans ce sens.

Enfin, le Gouvernement suppose que l'inflation se résorberait grâce à une remontée modérée des taux d'intérêt, alors même qu'il existe des incertitudes fortes sur ce point.

Au total, aucune des hypothèses prises isolément n'est totalement irréaliste. Toutes sont possibles, mais leur combinaison est le fait d'un cadrage d'ensemble optimiste. Disons qu'il n'est pas impossible que toutes les hypothèses favorables se réalisent en même temps.

Enfin, le Haut Conseil doit se prononcer sur la cohérence de la programmation au regard de l'objectif à moyen terme, d'une part, et vis-à-vis des engagements européens de la France d'autre part. Je rappelle que ces engagements résultent principalement du pacte de stabilité et de croissance et du Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) au sein de l'Union économique et monétaire signé en 2012.

Comme je l'ai dit, la clause dérogatoire générale du pacte de stabilité et de croissance a été déclenchée par la Commission européenne en mars 2020. Elle est applicable jusqu'à la fin de l'année 2023. Au-delà, le pacte de stabilité devrait retrouver son rôle. Or la trajectoire présentée s'écarte des engagements qui en découlent, à plusieurs égards.

Premièrement, le retour effectif du déficit sous les 3 % ne s'opère pas avant 2027.

Deuxièmement, la convergence vers l'objectif de moyen terme fixé à -0,4 point de PIB est lente et reportée après la période de programmation. En effet, le PLPFP estime le déficit structurel pour 2027 à 2,8 points, soit un écart de plus de 2 points.

Troisièmement, l'ajustement structurel prévu, c'est-à-dire l'amélioration du déficit structurel d'une année sur l'autre, est sensiblement inférieur à 0,5 point de PIB par an, ce qui n'est pas conforme aux règles actuellement applicables à la France.

Enfin, le ratio de dette publique s'infléchit seulement en fin de programmation, légèrement – à 110,9 points de PIB en 2027 – alors même que les hypothèses de croissance ne sont pas pessimistes et que l'évolution des taux d'intérêt est incertaine.

Cette trajectoire nous paraît peu ambitieuse : la plupart de nos partenaires vont plus vite s'agissant du retour sous les 3 % de déficit et de l'évolution du taux d'endettement, à en croire en tout cas les prévisions qu'ils affichent. Et pourtant, elle soulève des interrogations. Bien que l'ajustement structurel prévu soit très graduel, la trajectoire repose sur une quasi-stabilité en volume des dépenses publiques pour la période 2024-2027, soit une maîtrise nettement plus forte que pendant les deux dernières décennies et qui n'est pas, à ce stade, documentée. Les dépenses de l'État devraient reculer de 0,7 % en volume par an, en moyenne, ce qui suppose une forte baisse des crédits des ministères autres que ceux relevant de lois de programmation sectorielles – défense, sécurité intérieure, recherche – qui sont inscrits en forte hausse.

Les dépenses locales de fonctionnement devraient reculer de 0,5 point en volume par an, objectif plus ambitieux que celui retenu par la précédente loi de programmation. Le PLPFP suppose que les collectivités ne choisiront pas de tirer parti des marges financières qui en résulteront pour améliorer leurs dépenses d'investissement.

De plus, dans les prévisions du Gouvernement, la croissance de l'ONDAM serait moins rapide que celle du PIB, ce qui s'est très rarement produit par le passé et qui supposerait une action résolue pour freiner la dépense, dans le contexte haussier du vieillissement de la population et de progrès technique – action qui n'est pas non plus documentée dans les éléments transmis au Haut Conseil.

Enfin, du côté des recettes, la trajectoire suppose, entre autres, une réduction des niches fiscales et sociales, à laquelle la Cour des comptes appelle d'ailleurs très fortement, et une lutte efficace contre la fraude. Le total, qui doit dépasser 9 milliards d'euros, est crédible mais élevé au vu des résultats passés, et nécessitera une action très volontaire.

En définitive, le PLPFP encourt les mêmes réflexions que le Haut Conseil a formulées sur le programme de stabilité : c'est fragile, trop peu ambitieux et d'une crédibilité qui pourrait être plus forte.

Ni les projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2023 ni le projet de loi de programmation des finances publiques ne nous engagent donc dans la voie d'un redressement suffisant de nos finances publiques. Si nous avons à faire face à d'autres crises, il faut que nous nous y préparions. Avec une dette publique qui devrait dépasser 3 000 milliards d'euros d'ici à la fin de cette année, un contexte de taux d'intérêt différent, une charge pour le remboursement du service de la dette qui s'accroît fortement, nos marges de manœuvre et nos capacités d'action se réduisent déjà. Pourtant, nous avons besoin qu'elles s'accroissent face aux besoins considérables en investissements dont le pays peut légitimement réclamer la survenue.

De plus, ces résultats restent éloignés de nos engagements européens. La soutenabilité de nos finances publiques, mais aussi notre crédibilité et notre influence au sein de la zone euro, en sont affectées.

C'est pourquoi nous estimons qu'un programme d'économies plus solide et plus documenté, couplé à la recherche d'une plus grande qualité des dépenses, est tout à fait nécessaire.

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Commentant les éléments macroéconomiques que vous portez à notre connaissance, comme vous l'aviez déjà fait à l'occasion du débat sur le projet de loi de finances rectificative, vous dites, non sans un certain sens de la litote, que les prévisions du Gouvernement vous paraissent optimistes, avec les conséquences qu'on peut imaginer sur l'élaboration du budget. Je vous remercie pour ces observations. Vos prévisions de cet été, à l'instar de celles du FMI, étaient plus réalistes que celles du Gouvernement dans son programme de stabilité. Depuis, ce dernier a d'ailleurs revu, à la baisse, ses estimations de croissance et, à la hausse, ses prévisions d'inflation.

Cela dit, j'aimerais engager avec vous un débat politique. Vous êtes dans votre rôle en relevant que le PLF et le PLFSS ne conduisent pas au redressement des comptes publics, avec un déficit autour de 3 % en 2027, mais vous avez aussi évoqué la nécessité de dégager des moyens pour la transition écologique, la santé, l'éducation. J'ai tendance à penser que plus on retarde les investissements nécessaires dans ces domaines, plus les différentes crises et situations d'urgence coûteront cher à l'État et à la collectivité. Pourtant, le Gouvernement assume et revendique le maintien d'une politique d'offre et de compétitivité. Hors inflation, la croissance des dépenses publiques proposée par le Gouvernement sera de 0,7 %, soit un niveau bien inférieur à la croissance tendancielle des dépenses, qui est de 1,35 % d'après Bercy même, et surtout inférieur à ce qui se faisait depuis une dizaine d'années – cette augmentation était en moyenne de 2 % sous François Hollande, et de 1 %, hors crise sanitaire, sous le premier mandat d'Emmanuel Macron. Et malgré cette baisse, eu égard à la situation économique, on sera loin du compte.

Dès lors, ne doit-on pas changer de paradigme ? La Banque de France et d'autres organismes évoquent un risque de récession aux niveaux national et international. Je rappelle que s'il n'y a pas eu de récession en France entre 2008 et 2012, ce n'est pas grâce au marché privé, qui était en décroissance, mais aux dépenses publiques, lesquelles sont aussi des recettes. Ne doit-on pas considérer les dépenses publiques, qui sont un investissement, qui font fonctionner la machine économique, qui rapportent des cotisations, comme un apport à l'économie qui est de nature à contrarier la récession ?

Dans une interview donnée au Point, vous dites fort justement que nous ne pouvons pas compter sur une croissance forte pour rétablir les finances publiques. Je suis d'accord avec vous. On peut d'ailleurs se demander si la croissance pour la croissance est nécessaire. Quoi qu'il en soit, il y a des gens qui voient croître leur richesse : chaque année, les dividendes et les profits explosent. Cela ne pose-t-il pas la question du partage des richesses en faveur des revenus du travail, qui produisent des cotisations – vous avez vous-même remarqué que le déficit de la sécurité sociale a été moins important que prévu grâce à l'augmentation de la masse salariale – et qui génèrent des ressources pour l'État ?

Vous dites aussi que tout euro de plus affecté à la charge de la dette est un euro en moins pour la transition écologique, la transition énergétique, la transition numérique et l'éducation. J'observe pour ma part que la charge de la dette est à peu près équivalente à la baisse annuelle des impôts des cinq dernières années. Ne pourrait-on donc pas dire la même chose de tout euro de plus affecté à la baisse de la fiscalité, d'autant plus si elle profite aux entreprises, sans conditions, par exemple avec la réduction de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), ou aux plus riches de notre pays ? Cela n'entre pas en compte dans votre analyse. Que pensez-vous du fait que, en 2023, on continue à réduire le montant de la CVAE, à hauteur de 4 milliards d'euros, ce qui automatiquement pèsera sur le déficit ? Hier, le gouverneur de la Banque de France, s'il n'a certes pas acquiescé à toutes mes propositions économiques, s'est du moins clairement interrogé sur cette question des dépenses fiscales.

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Monsieur le président du Haut Conseil, vous nous présentez deux avis aux tonalités assez différentes. À court terme, le projet de budget pour 2023 vous semble construit sur des bases réalistes, même si vous soulignez un aléa sur le volume de certaines dépenses et sur la croissance. À long terme, s'agissant du projet de loi de programmation des finances publiques, vous considérez la trajectoire proposée par le Gouvernement à la fois optimiste et peu ambitieuse.

Vous considérez que la croissance potentielle pour la période 2023-2027 est surestimée par le Gouvernement, parce que les efforts de réforme sont peu documentés. Je constate quand même que, s'agissant des retraites, le Gouvernement proposera prochainement des éléments, devant aboutir dès l'été 2023 ; pour ce qui est de l'assurance chômage, nous en discuterons la semaine prochaine en séance publique ; la réforme de l'apprentissage est prévue dès l'année 2023 ; les moyens sont mis pour l'accompagnement des allocataires du RSA vers leur retour à l'emploi. Toutes ces réformes sont lancées et, je suis d'accord avec vous, doivent être mises en œuvre rapidement.

Quand on établit une programmation, toutes les pièces du Meccano ne sont pas fournies. Mais le mandat précédent parle pour nous. Nous avons été capables de faire baisser le chômage de manière significative. Nous sommes donc crédibles dans notre projection de plein emploi à la fin du quinquennat. C'est un engagement, l'expression raisonnée et étayée d'un volontarisme politique.

Monsieur le président Coquerel, si les cotisations sont mieux rentrées en 2022, ce n'est pas l'effet du hasard : c'est probablement parce que notre politique de l'offre s'est traduite par une croissance des investissements des entreprises.

De ce point de vue, chacun, dans le débat public, peut considérer la trajectoire proposée comme peu ou trop ambitieuse. Chacun a ses référentiels pour en juger. Les observations du Haut Conseil des finances publiques enrichissent le débat public de façon argumentée. Je constate que, jusqu'à 2019-2020 et la crise sanitaire, cette majorité a suivi le chemin qu'elle avait fixé. Et, depuis 2020, dans les tempêtes successives qui ont frappé nos finances publiques, les résultats finaux ont été régulièrement meilleurs qu'attendu.

Je suis d'avis qu'il vaut mieux suivre une boussole montrant un chemin praticable que fixer une trajectoire clinquante mais inatteignable. Pour assurer la maîtrise de nos finances publiques, il faut fixer un chemin, avoir une boussole, dès lors qu'il est proposé de désendetter le pays et de revenir à un déficit inférieur à 3 % du PIB.

Les prévisions de croissance pour 2023 sont en baisse. Le Gouvernement a même dû procéder à un ajustement de la prévision à 1 %. Cette tendance baissière n'a-t-elle pas en partie pour origine une certaine sobriété de nos entreprises, voire des ménages, face à la hausse des prix de l'énergie, ce qui pourrait être bienvenu à certains égards mais plomberait l'activité économique ?

Les incertitudes pour 2023 résident dans le volume de dépenses rattachées au bouclier tarifaire. En la matière, tout ne dépend pas de la volatilité des prix : avec le jeu des compensations aux fournisseurs, estimées pour 2023 entre 19 et 20 milliards d'euros, des décaissements significatifs seront dus au titre des années 2021 et 2022, tandis que nous recevrons des versements de la part des producteurs d'électricité d'origine renouvelable. Avez-vous retracé l'ensemble de ces éléments par année de décaissement et de rattachement pour fonder votre avis sur les estimations du Gouvernement en dépenses ?

Quelles seraient les conséquences du rejet du projet de loi de programmation qui nous est soumis, s'agissant de nos engagements européens, de nos prêteurs et aussi des instances que vous présidez ? En matière de pilotage, de transparence et de visibilité vis-à-vis de nos partenaires, n'est-il pas risqué de ne pas approuver cette trajectoire, même si on peut la contester sur un certain nombre de points ?

La loi organique du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques a étendu les missions du Haut Conseil des finances publiques. Quelles observations pouvez-vous formuler au terme d'un premier exercice de ce nouveau mandat ?

Enfin, pour 2023, vous faites état de 0,2 % d'augmentation des prélèvements obligatoires liés aux mesures nouvelles. Pourtant, les baisses de l'impôt sur le revenu et de la CVAE me paraissent plutôt être de nature à faire baisser les prélèvements obligatoires.

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On peut se demander si, depuis deux ans, sous l'effet du covid, la politique conduite était vraiment celle de l'offre…

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Pierre Moscovici, président du Haut Conseil des finances publiques

Monsieur le président, je n'irai pas sur le terrain politique où vous voulez m'entraîner. Non que je ne l'aie pas pratiqué, y compris dans cette salle, puisque j'y suis venu en tant que membre de cette commission, ministre des finances et Commissaire européen. Mais, et je le dis sans plaisanter, si je suis toujours le même homme, ma fonction est toute différente. Premier président de la Cour des comptes, je préside ès qualités le Haut Conseil des finances publiques. Or le Haut Conseil, ce n'est pas moi : c'est un collectif d'économistes, nommés par les autorités publiques compétentes de façon pluraliste, qui travaillent de manière objective. L'avis que je viens présenter ici retrace les réflexions de ce collectif. Comme tout travail humain, il est réfutable, discutable, questionnable, mais il faut le prendre ainsi, non comme un jugement de valeur. C'est ainsi que l'on peut travailler bien les uns avec les autres.

Monsieur le président Coquerel, les engagements européens sont ce qu'ils sont. Faisant partie de traités que la France a signés et ratifiés, qu'ils soient parfaits ou non, nous devons les appliquer – je considère moi-même qu'ils sont imparfaits. Le Haut Conseil comme la Cour des comptes estiment qu'il sera nécessaire de modifier nos règles, et la Commission européenne fera prochainement des propositions à ce sujet, mais que personne ne s'illusionne : il restera des règles. Il est plus que vraisemblable que la règle de 3 % demeurera, même si l'appréciation devra être nécessairement plus flexible. Par ailleurs, même une règle de dette modifiée impliquera des efforts plus importants pour ceux qui sont plus endettés que pour ceux qui le sont moins. Or dans la zone euro, nous faisons clairement partie des pays les plus endettés. Onze pays sont en dessous de 80 %, sept au-dessus de 100 %.

Attendez-vous donc à ce que ces règles réapparaissent, et à ce que la question de nos engagements européens revienne sur le tapis. C'est ce que fait déjà le Gouvernement, à raison, parce qu'il faut être crédibles vis-à-vis de nos partenaires au sein de la zone euro.

Je l'ai dit, je ne suis pas une Cassandre de la dette : toute dette n'est pas mauvaise. En revanche, j'insiste sur le fait que l'accroissement de la charge de la dette, qui est déjà en train de se produire en raison de l'indexation d'une partie de notre dette sur l'inflation et de la hausse des taux, est mauvais pour notre économie. C'est une situation que j'ai vécue comme ministre des finances et que je ne souhaite à aucun autre. Quand la charge de la dette atteint 50, puis 70 milliards d'euros, voire plus, elle devient le deuxième ou troisième poste de dépense de l'État. Ce sont autant d'euros immobilisés pour une dépense inutile, alors que nous avons besoin d'investissements pour l'avenir, nous avons besoin de dépenses publiques. Plus nous sommes endettés, moins nous avons de marge de manœuvre.

Monsieur le président, vous avez dit, dans un raccourci, que toute dépense publique est un investissement qui concourt à la croissance. Je ne peux pas vous suivre. Les dépenses publiques sont souvent des dépenses de fonctionnement et toutes ne concourent pas à la croissance. On n'observe nullement de lien direct entre la dépense publique et la croissance. Si c'était le cas, cela se saurait, dans notre histoire économique… Le Haut Conseil, comme la Cour des comptes dans un autre registre, souhaite qu'une analyse très rigoureuse de la qualité de la dépense publique soit effectuée. Il y a de bonnes dépenses publiques, il y a une bonne dette publique, et il y en a une mauvaise ; la distinction recoupe, en gros, celle entre investissement et fonctionnement. Soyons très attentifs à la sélection des dépenses.

Parmi les dépenses, il y a des niches sociales et fiscales qui représentent des montants considérables – respectivement 93 et 83 milliards d'euros. Il me semble que le gouverneur de la Banque de France a sur ce point la même position que la Cour des comptes : supprimer celles qui sont inutiles permet de retrouver des marges de manœuvre. Nous ne pouvons qu'encourager l'exécutif et le Parlement à aller dans ce sens.

Monsieur le rapporteur général, mon mandat m'interdit de vouloir faire preuve de volontarisme. Le Haut Conseil doit examiner le réalisme des prévisions de recettes et de dépenses, en se fondant sur une analyse économique. Le rôle du politique est d'être volontariste. Le rôle du Haut Conseil est d'étayer cette volonté par des données qu'il croit objectives, qu'il soumet à votre réflexion. C'est pourquoi notre jugement est fondé sur le réalisme et non sur le volontarisme.

Il est quelque chose dont je peux donner crédit au Gouvernement, y compris au regard de ce que nous avons dit cet été. Nous pensons que les prévisions de croissance du PLPFP sont un peu optimistes, mais nous sommes obligés de constater que la croissance pour 2022 est plus forte que nous ne l'avions anticipé. C'est peut-être un fruit du volontarisme, mais on ne peut pas toujours fonctionner sur ce mode. En essayant de nous montrer réalistes, nous avons relevé une série d'hypothèses dont nous ne disons pas qu'elles sont impossibles mais qu'elles sont un peu optimistes par rapport au consensus, et que leur réunion devient, pour le coup, une anticipation très favorable.

Concernant le dernier quinquennat, et sans me prononcer sur l'économie, car le « quoi qu'il en coûte » a été totalement validé par la Cour des comptes qui, en l'occurrence, n'a pas du tout tenu un langage d'austérité, la période 2017-2022 ne s'est pas caractérisée par un redressement des finances publiques. Le redressement a été interrompu dès la fin 2018 et le volontarisme, pour le coup, a causé une augmentation de notre dépense publique et de notre dette qui nous place dans le groupe des pays moins favorisés.

Concernant la documentation des réformes, j'entends ce que vous dites et j'en prends note sans aucune forme de jugement. Pour notre part, nous auditionnons des instituts de prévision, les administrations, la Banque de France, puis nous travaillons sur les bases qu'ils fournissent. Et dans les documents que nous avons reçus d'eux, nous n'avons pas appris, par exemple, quand, comment et pour quel âge se ferait la réforme des retraites. Pour ce qui nous concerne, nous ne pouvons pas dire que les réformes sont documentées : il faudrait que nous connaissions leur calendrier précis et leurs modalités pour pouvoir dire si elles tiennent la route et à quel montant elles se chiffrent. Pour que le scénario prévu fonctionne, il faudrait que ces réformes interviennent très vite et aient l'effet le plus rapide concrètement possible. Nous verrons si c'est le cas.

Pour ce qui est de la croissance potentielle, nous la jugeons surestimée non pas uniquement parce que les réformes ne sont pas documentées, mais aussi parce que le Gouvernement a revu à la hausse à la fois la contribution du facteur travail et celle du facteur capital. Or, sur ce dernier point, n'oublions pas que les conditions de financement se durcissent.

La hausse des prélèvements obligatoires en 2023 est due à l'augmentation des charges de service public de l'électricité, laquelle résulte elle-même des mesures prises par les producteurs d'énergie renouvelable, comptées en prélèvements obligatoires.

Sur les conséquences d'un rejet du projet de loi de programmation des finances publiques, les appréciations juridiques peuvent diverger. Le secrétariat général du Gouvernement a la sienne, nous avons la nôtre, vous pouvez avoir la vôtre… cela mérite une expertise approfondie. Je vais donc exprimer un sentiment global.

Pour le fonctionnement du Haut Conseil, un rejet serait assurément un handicap très lourd, parce que nous avons besoin de nous arrimer à des ancres. Sans loi de programmation, nous travaillons dans le vide. Dès lors, le Conseil constitutionnel et les institutions européennes pourraient estimer que, dès lors que le Haut Conseil ne dispose pas des informations nécessaires à la production de ses avis, une partie substantielle des projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale fait défaut. Avec la loi organique de 2012, que j'ai eu l'honneur de présenter à l'Assemblée comme ministre des finances, nous sommes une partie intégrante du processus d'adoption des lois de finances – ce tiers de confiance objectif qui rend des avis dont le Gouvernement et le Parlement peuvent se saisir.

Nous portons un regard positif sur les modifications du mandat du Haut Conseil, en particulier grâce au travail remarquable d'Éric Woerth et de Laurent Saint-Martin, puisque cela nous permet d'aller plus loin dans l'appréciation réaliste des prévisions de recettes et de dépenses – quitte à provoquer le débat entre nous ! J'estime qu'il y a un chaînon manquant dans l'analyse de la soutenabilité de la dette : j'aurais aimé pouvoir y travailler de façon encore plus approfondie. Je ne renonce pas à espérer, durant ce mandat, une nouvelle extension du mandat du Haut Conseil. Je ne le dis pas par narcissisme bureaucratique, mais parce que je constate que, même si notre mandat et même nos moyens ont été étendus, nous pourrions faire encore mieux à votre service.

Dernière question : la baisse des impôts. Nous avons dit, dans un autre cadre, que les marges de manœuvre pour y parvenir étaient étroites. Quand la croissance est faible – même 1,7 % entre 2024 et 2027, ce n'est pas de nature à susciter des recettes aussi massives que celles de ces dernières années – quand les taux d'intérêt augmentent et quand les dépenses restent soutenues – même si les prévisions montrent une volonté de maîtrise de la dépense – une baisse des impôts se traduit nécessairement par un accroissement du déficit. Elle ne pourrait se faire, à notre sens, qu'avec des hausses concomitantes ou une maîtrise de la dépense accrue.

Voilà une réponse qui n'est pas politique à votre question, monsieur le président. À vous d'apprécier.

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J'ai entendu un appel à augmenter les moyens du Haut Conseil. C'est un appel à plus de dépense publique ! Combien avez-vous d'emplois à temps plein ?

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Pierre Moscovici, président du Haut Conseil des finances publiques

Nous ne demandons pas grand-chose. Nous avons six emplois à temps plein. Au regard de la population, malgré les efforts qui ont été faits ces deux dernières années – nous en étions à trois ! – nous sommes encore les moins dotés de toute la zone euro. Nous travaillons toujours dans des conditions tendues, parce que nous sommes saisis très tard. Nous devons réaliser des études approfondies avec des équipes réduites et un mandat encore plus réduit.

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Merci, monsieur le président, d'avoir rappelé la nécessité de la loi de programmation. Même si ses orientations ne sont pas partagées, elle sert de cadre de référence, nonobstant les discussions politiques que nous aurons sur le projet de budget.

Le Gouvernement a retenu la même croissance potentielle que dans la précédente loi de programmation mais avec des facteurs un peu différents. Il dit que la productivité globale est moins importante, et la contribution du facteur travail davantage. Vous jugez la prévision à 1,35 % optimiste, alors qu'elle est proche de celle du FMI et de l'OCDE. Pensez-vous que la crise sanitaire a accéléré la destruction des facteurs de production ? Faut-il accélérer les réformes favorisant le facteur travail, notamment la réforme des retraites ?

S'agissant de l'endettement, le Gouvernement a retenu un scénario de taux prudent, à 2,5 % à dix ans fin 2022, et 2,6 % fin 2023. Jugez-vous ce scénario crédible, dans un contexte où toute hausse des taux d'intérêt pérenne produirait un choc important pour notre endettement ?

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Nous partageons votre analyse sur la fragilité et le manque d'ambition du projet de loi de finances, notamment en matière de redressement de la dette publique.

Ma question concerne les obligations assimilables du Trésor indexées sur l'inflation (OATi), qui constituent 12 % de la dette française. Le taux d'inflation étant supérieur à 9 % au niveau européen, ces OATi ne risquent-elles pas de faire obstacle au rétablissement des finances publiques ? Jusqu'à présent, la situation était à peu près maîtrisée mais, face au risque de récession, les prévisions d'inflation pour l'année prochaine restent très incertaines.

Comme vous, nous considérons qu'une prévision de croissance potentielle à 1,35 % est optimiste. La situation financière est volatile, instable, l'inflation menace. On mise sur un taux d'inflation de 2,5 %. Une agence de notation donnera son avis en fin de semaine sur la dette française. Une convergence de risques ne pourrait-elle remettre en question l'ensemble des variables du projet de loi de programmation des finances publiques ? Et si toutes les variables doivent bouger, cette loi de programmation vous paraît-elle utile et fiable ?

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En début de semaine, le Gouvernement nous a présenté ses prévisions budgétaires en contestant l'idée qu'il s'agirait d'un budget d'austérité. Or si l'on en croit le graphique que vous avez produit, il devrait s'agir du pire quinquennat d'austérité jamais observé depuis 2007. Cela pose le problème de la crédibilité économique des prédictions du Gouvernement et de leur acceptabilité sociale. Notre pays a-t-il déjà connu une telle cure d'austérité ?

Par ailleurs, vous avez relevé une contradiction dans les annonces du Gouvernement. Alors que l'inflation devrait s'établir autour de 4,2 %, un certain nombre de dépenses ne sont pas prévues dans le projet de budget, notamment la revalorisation du point d'indice de la fonction publique. Pouvez-vous nous confirmer que cette revalorisation n'apparaît pas dans les documents qui vous ont été transmis ?

En outre, dans votre avis rendu public au mois de juillet, vous avez relevé que les prélèvements assis sur les salaires pourraient être amoindris du fait d'un recours plus important que prévu de la part des entreprises à des instruments de rémunération exonérés de prélèvements, tels que la prime Macron. Pouvez-vous nous donner une estimation du manque à gagner pour 2022 ?

Enfin, sans vouloir vous entraîner sur le terrain politique, avez-vous un avis sur la taxation des superprofits en 2022 et 2023 ?

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Monsieur le président du Haut Conseil, j'ai beaucoup apprécié votre rappel de la nécessité de respecter les traités signés au niveau européen : c'est fondamental. Le retour du déficit public sous la barre des 3 %, au sens maastrichtien, me semble être de nature à garantir la crédibilité d'une nation.

Le solde public effectif est estimé à -5 points en 2022 et en 2023. Vous semblez considérer qu'il pourrait être un peu meilleur en 2022. Cela revient-il à dire que les choses se dégraderaient en 2023, puisque la prévision reste à -5 points ?

Peut-on parler de maîtrise de la dépense publique quand celle-ci augmente de 24 milliards d'euros ? Certes, elle progresse moins que l'inflation mais, au vu des prévisions de croissance du PIB et de l'inflation, la hausse demeure trop importante.

Dans les documents qui vous ont été transmis, les recettes tirées de la lutte contre la fraude sont évaluées à 9 milliards d'euros. S'agit-il d'une somme globale ou bien y a-t-il un distinguo entre la fraude sociale et la fraude fiscale ?

Enfin, la prévision de croissance du PIB a été fixée à 1 % en 2023. Celle du gouverneur de la Banque de France, que nous avons auditionné hier, est dans une fourchette entre -0,5 % et +0,8 %, ce qui est très large. La croissance ne risque-t-elle pas d'être affectée par l'arrêt partiel d'activité des entreprises électro-intensives ?

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Un train de mesures de soutien au pouvoir d'achat ainsi qu'un bouclier tarifaire ont été élaborés pour soutenir les ménages et l'économie. Je me réjouis que vous considériez que les prévisions pour 2022, à 2,7 % pour la croissance, 5,3 % pour l'inflation et 8 % pour la croissance de la masse salariale marchande, sont crédibles : cela atteste de l'utilité de ces mesures. Mais avez-vous pris en compte l'effet de levier qu'elles peuvent avoir dans vos analyses ?

Le projet de loi de finances pour 2023 est fondé sur des bases économiques plus stables. Le retour sous les 3 % du déficit public est projeté à l'horizon 2027. Quelles sont vos suggestions, dans le cadre des négociations européennes que la France devra mener avec ses partenaires, concernant les règles d'encadrement du déficit des États membres postérieures à la période de crise sanitaire ? Quels bons exemples avez-vous pu noter chez nos voisins européens ?

Enfin, en sortie de crise, il faut assurer sa capacité à faire face à une nouvelle période de difficultés. Alors que vous considérez que nous devrions être plus volontaristes dans la réduction de la dette publique et du déficit, existe-t-il ailleurs en Europe un mécanisme qui ait cet effet sans obérer la croissance et qu'il vous semblerait pertinent de transposer en droit français ?

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Monsieur le président du Haut Conseil, merci pour votre présentation, que l'on pourrait qualifier de réquisitoire courtois contre le manque de sincérité du budget présenté par le Gouvernement. Selon vous, la prévision de croissance du PIB s'appuie sur des hypothèses très avantageuses et les effets attendus des réformes sont surestimés. Plus grave encore, ni les modalités, ni les conséquences, ni les calendriers de ces réformes ne sont documentés. Diriez-vous que ce projet de loi de finances est insincère ?

Vous avez dit qu'il n'y a pas de lien entre dépense publique et croissance. On constate quand même que les politiques d'austérité budgétaire aggravent le déficit et font chuter la croissance. Alors que 50 milliards d'euros de baisses d'impôts ont été concédés aux entreprises ces dernières années, ne pensez-vous pas que la croissance très faible des dépenses publiques fait courir un risque récessif ?

Enfin, alors que le Gouvernement indique attendre un rendement de 9,2 milliards d'euros de la réduction des niches fiscales et sociales, il ne prévoit de supprimer que six dépenses fiscales, dont cinq n'ont plus d'incidence budgétaire depuis plusieurs années. Ce manque de volonté politique est aberrant quand on sait que les dépenses fiscales ont coûté plus de 80 milliards d'euros à l'État en 2022. Quel regard porte le Haut Conseil sur le manque d'ambition de ce projet de budget en la matière ?

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Vous jugez la prévision de croissance du Gouvernement pour 2023 un peu élevée mais les prévisions d'inflation et de progression de la masse salariale dans les branches marchandes plausibles. Toutefois, vous relevez une sous-estimation de certaines dépenses, notamment celles de l'ONDAM ainsi que celles liées à la crise sanitaire. Selon vous, d'autres dépenses sont-elles sous-estimées ? Quel serait le volume prudentiel de ces dépenses à inscrire dans le PLF et le PLFSS pour 2023 ?

Concernant le projet de loi de programmation, vous indiquez que la trajectoire des dépenses publiques s'inscrira dans un contexte de hausse attendue des taux d'intérêt, qui pèsera de fait sur les charges financières dans le budget de l'État. Quelles sont vos prévisions en la matière d'ici à 2027 ?

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Vous estimez que le solde public pourrait être plus dégradé que ne le prévoit le Gouvernement, notamment du fait de la grande incertitude qui entoure les prix de l'énergie, ce qui participe à l'incertitude autour du redressement des finances publiques en 2023. La soutenabilité à moyen terme des finances publiques ne nécessite-t-elle pas de grands investissements visant à réduire notre forte dépendance aux énergies fossiles ? Quelles articulations vous semblent envisageables pour concilier la nécessité d'investir massivement en faveur de la transition écologique et la maîtrise des dépenses publiques, nécessaire au redressement de nos finances publiques ?

Au vu de votre grande expérience européenne, que pensez-vous d'un mécanisme européen permettant d'exclure du calcul des déficits publics les sommes empruntées par les États membres pour financer la transition écologique ?

Enfin, ne pensez-vous pas qu'il serait temps de renoncer définitivement aux indicateurs du PIB pour mesurer la croissance et de leur préférer des indicateurs sociaux et environnementaux tels que ceux adoptés par la loi du 13 avril 2015 visant à la prise en compte des nouveaux indicateurs de richesse dans la définition des politiques publiques et qui ne sont pas appliqués, ni dans la loi de règlement, ni dans le PLFR, ni dans vos rapports, ni dans le PLF pour 2023 ?

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Concernant la transition écologique, ne pensez-vous pas que les règles européennes sont caduques et qu'il faudrait sortir des critères de Maastricht les investissements qui lui sont nécessaires ?

S'agissant de la politique monétaire restrictive de la BCE, l'inflation en Europe ne semble pas être de source monétaire. La hausse des taux d'intérêt ne fait-elle pas courir le risque de freiner la croissance économique de notre pays ?

Vous avez jugé que les prévisions de croissance de l'ONDAM et des dépenses des collectivités territoriales étaient un peu faibles. Pouvez-vous nous apporter des précisions ? Je pense que vous avez raison : je ne vois pas comment nous pourrions tenir avec une croissance aussi faible, alors que de grands besoins sociaux s'exprimeront dans les territoires.

Enfin, ne pensez-vous pas qu'en cette période extrêmement difficile, il serait nécessaire de prévoir une taxation exceptionnelle des superprofits, comme vous avez su le faire vous-même à une autre époque ?

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Il n'y a pas trente-six solutions pour piloter un budget dans une conjoncture aussi difficile, marquée par l'endettement, l'augmentation des taux, la dégradation de la parité euro-dollar, le déficit commercial et les incertitudes sur la croissance : il faut soit baisser les dépenses, soit augmenter les recettes. C'est plus facile à dire qu'à faire : quel domaine choisir ? Faut-il se tourner, et comment, vers l'évitement fiscal et les paradis fiscaux, y compris au sein de l'Union européenne ?

Quant au projet de loi de programmation des finances publiques, il semble pour le moins paradoxal d'établir une trajectoire pour 2027 quand nous ne sommes même pas certains des prévisions pour l'an prochain. Nous allons discuter d'un texte qui est déjà dépassé avant même d'avoir été voté. Je voudrais connaître votre sentiment sur ce sujet.

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Pierre Moscovici, président du Haut Conseil des finances publiques

Monsieur le député Philippe Brun, je ne suis pas un procureur : je ne fais pas de réquisitoire. Les jugements sur la sincérité sont toujours dangereux. Porter une accusation sur la sincérité, c'est vraiment caractériser des manquements très graves. En l'occurrence, il ne s'agit absolument pas de cela : nous soulignons que le contexte est incertain et que la trajectoire peut être plus ambitieuse, mais nous ne nous prononçons en rien sur la sincérité du budget. Qu'on ne s'y méprenne pas. Le Haut Conseil n'est ni un juge, ni un acteur politique.

S'agissant de la croissance potentielle, nous estimons qu'elle demeure au-dessus du consensus : la prévision nous semble donc plutôt optimiste. Il demeure que la croissance potentielle doit être musclée. Nous devons tout faire pour l'augmenter. C'est une raison essentielle de mon plaidoyer pour le désendettement : plus nous aurons de ressources à affecter à de l'investissement, donc à de la bonne dépense publique, plus nous pourrons renforcer la croissance potentielle et la cohésion sociale, les deux allant de pair. Il y a des efforts à faire dans ce pays en faveur de la transition écologique, de la transition numérique, de l'innovation, de la recherche, de la santé – et je ne suis pas exhaustif. Mais, pour pouvoir investir, nous devons nous libérer du carcan de la dette, qui peut nous étrangler.

Nous ne sommes pas non plus une agence de notation, et nous ne sommes pas en train de pousser je ne sais quel cri d'alarme : ce n'est pas notre rôle. Le jugement que nous portons sur la dette française est qu'elle est tout à fait soutenable, mais qu'elle n'en est pas moins trop élevée au regard des marges de manœuvre dont nous avons besoin pour investir. Plus la charge augmente, moins nous aurons de marges de manœuvre.

La hausse des taux d'intérêt de la BCE ainsi que l'inflation conduisent à une hausse de la charge de la dette de 12 milliards d'euros en 2022, qui passe ainsi de 35 à 47 milliards. L'essentiel des emprunts étant contractés à long terme, ce sont les taux à long terme qui constituent le principal risque ; or ils ont déjà augmenté et cela commence à se voir dans la charge de la dette. En 2023, l'impact sera limité mais, à long terme, sur dix ans, cela représentera une hausse de 70 milliards d'euros si les taux se maintiennent à leur niveau actuel, sans monter davantage. On voit là encore toutes les conséquences d'un niveau de dette élevé et la nécessité de le faire baisser.

Les prévisions sur les taux d'intérêt sont très incertaines. Le Gouvernement prévoit une remontée limitée, avec une inflation qui retrouverait la cible de la BCE dès 2026, soit une combinaison d'hypothèses quelque peu surprenante. Le service de la dette va probablement augmenter, et peut-être plus que ce que prévoit le Gouvernement, mais nous n'en sommes absolument pas aux 100 milliards d'euros dont parlent certains. Il faudrait pour cela que la dépense explose et que les taux atteignent des niveaux invraisemblables ; le contexte serait tout autre. Mais il convient tout de même de maîtriser la dette : tel est mon message.

J'en viens aux OATi. La part des recettes indexées est supérieure au poids des OATi. Par un mécanisme stabilisant, les dépenses d'OATi baissent lorsque les recettes diminuent également. La Cour a remis, en février dernier, un rapport sur la gestion de la dette publique et l'efficience du financement de l'État par l'Agence France Trésor qui portait une appréciation plutôt positive. Les obligations indexées sur l'inflation pèsent inévitablement sur la charge de la dette ; néanmoins nous avons mesuré ce poids et il est moins élevé que dans d'autres pays. Globalement, la dette publique est plutôt bien gérée dans notre pays par l'Agence France Trésor, même si des améliorations peuvent toujours être apportées.

Monsieur Mauvieux, les députés ne sont pas obligés de s'accorder sur le projet de loi de programmation des finances publiques. En revanche, l'absence d'une telle loi poserait problème. Elle est nécessaire au bon déroulement du processus d'adoption des lois de finances, à l'information des autorités européennes, à la crédibilité de notre pays. C'est une ancre dont nous avons besoin. Qu'il y ait débat, je le conçois mais je le répète avec force, l'absence de LPFP ne serait pas anodine – jusqu'à quel point, je ne peux pas le dire et ce n'est pas à moi de le faire.

Monsieur Bompard, vous avez évoqué un quinquennat d'austérité. Je vous rappelle tout de même que les dépenses publiques initiales représentent 57,6 % du PIB, soit le niveau le plus élevé de toute l'OCDE.

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Pierre Moscovici, président du Haut Conseil des finances publiques

Le CICE n'en est pas la cause principale.

L'extinction des mesures d'urgence et de relance, et probablement du bouclier tarifaire, fera baisser les dépenses publiques en milieu de quinquennat. Ensuite, de 2025 à 2027, une fois les effets de la baisse corrigés, la dépense publique déflatée par les prix du PIB – soit l'indicateur le plus pertinent en matière de finances publiques – augmenterait en moyenne de 0,6 point par an. Parler de quinquennat d'austérité ne me paraît donc pas justifié, si ces chiffres sont respectés. Ils sont au demeurant assez ambitieux en termes de maîtrise des dépenses : vous aurez à examiner dans les années qui viennent des budgets sans doute moins généreux que celui prévu pour 2023.

Pour aller plus loin, la dépense publique en elle-même n'est pas un facteur d'investissement ou de désinvestissement, ni de croissance ou de décroissance. Ce qui est essentiel, ce que nous devons tous garder à l'esprit, c'est la qualité de la dépense publique. La bonne dépense publique sert l'avenir, l'investissement, la croissance. Par exemple, il y a des besoins très importants en matière de transition écologique. En ce moment à Bruxelles, on débat de la possibilité d'exclure les dépenses qui y sont liées du calcul de la dette publique. Cette hypothèse me paraît plus plausible que celle de revenir sur la règle des 3 % de déficit. En tout état de cause, ce sont les dépenses de cette nature qu'il faudra privilégier. Mais pour ce faire, il faut maîtriser la dette, ce qui, à son tour, suppose de maîtriser d'autres dépenses.

Madame Dalloz, d'après le Haut Conseil, les déficits pour 2022 pourraient être légèrement inférieurs à 5 %, du fait de l'augmentation des recettes ; en revanche, ils pourraient être légèrement supérieurs en 2023 – dans les deux cas, de l'épaisseur du trait. En résumé, disons que nous prévoyons une stabilité, au mieux. La trajectoire de réduction pour ces deux années est donc modérée, ce qui reporte l'effort, plus accentué, sur les années suivantes.

Monsieur Mattei, les comparaisons sont utiles. L'objectif d'un déficit à 2,8 % en fin de période est peu ambitieux, sachant que la plupart de nos partenaires européens seront au-dessous de 3 % dès 2025. Il y a vraiment quelques efforts à faire.

S'agissant des dépenses fiscales, le projet de LPFP les établit à 9 milliards d'euros. Pourquoi pas ? Mais c'est optimiste et, si j'en crois les expériences passées, il faudra faire preuve de volontarisme. Les moyens envisagés pour y parvenir ne sont pas documentés.

Pour les collectivités locales, il est affiché une baisse en volume des dépenses de fonctionnement de 0,5 point. C'est possible, mais un peu ambitieux également. En outre, si l'objectif est atteint, à quoi seront affectées les marges de manœuvre dégagées ?

Pour l'ONDAM, il est prévu une croissance faible en volume – moins de 1 %. Des marges d'efficience existent, mais les mesures à prendre ne sont pas documentées. Par ailleurs, personne n'ignore les besoins à l'hôpital ou dans les EHPAD. Une fois encore, il faut raisonner à partir de la qualité de la dépense : la numérisation, l'organisation des soins de ville et des soins hospitaliers peuvent être source d'économies qui permettront de stabiliser les dépenses.

Quant à la taxe sur les superprofits, ce n'est pas le rôle du Haut Conseil que de porter un regard sur des décisions politiques qui appartiennent au Parlement et au Gouvernement. Notre mission consiste à apprécier le réalisme des recettes et des dépenses. En tout état de cause, les prélèvements doivent être évalués à l'aune de l'équilibre des finances publiques.

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Si j'étais un peu taquin avec Mme Dalloz, je lui rappellerais, s'agissant de l'importance de respecter les engagements budgétaires pris auprès de la Commission européenne, qu'une procédure de déficit excessif avait été engagée contre la France en 2009, époque à laquelle son parti était aux manettes.

On dit souvent que les fortes divergences entre États membres en matière de dette et de déficits publics ne sont pas soutenables à long terme pour la zone euro ; pourtant, la dernière crise a démontré sa robustesse. Qu'en pensez-vous ?

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S'agissant de la réforme des retraites, vous avez souligné le manque d'informations sur les pistes envisagées par le Gouvernement.

À vous entendre, si la réforme ne modifie pas l'âge de départ à la retraite, il faudra baisser les pensions ou augmenter les cotisations. Est-ce à dire qu'à vos yeux, le seul levier est l'âge de départ et non le nombre de trimestres ?

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On ne peut pas se voiler la face sur l'évolution actuelle des taux d'intérêt : ils sont passés de 0 à 2,5 %.

Vous avez souligné les incertitudes de la conjoncture de l'année dernière, en particulier pour les entreprises. La charge des intérêts deviendra quoi qu'il arrive le premier poste du budget de l'État. Avez-vous évalué les conséquences de cette évolution sur l'action publique ? À quelle échéance interviendra-t-elle si rien n'est fait pour l'enrayer ?

Le Haut Conseil a-t-il déjà essayé de chiffrer le coût des structures bureaucratiques et technocratiques que sont les agences, autorités, médiateurs et autres organismes parapublics ? A-t-il étudié des pistes d'économies ?

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Monsieur le président du Haut Conseil, M. Mauvieux n'a pas mis en doute l'utilité des lois de programmation en général, il a estimé que les incertitudes pesant sur les hypothèses rendaient caduque celle qui nous est soumise. Vous n'avez pas répondu non plus à sa question sur les bons du Trésor indexés sur l'inflation.

Comment expliquez-vous que l'énorme masse d'argent public qui est dépensée ait un effet de levier aussi faible sur la croissance du PIB ? N'est-ce pas le signe d'une fuite en avant dans des dépenses de fonctionnement stériles et non d'investissement ?

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Vous avez fait de la guerre en Ukraine la principale cause de l'inflation. Or les graphiques montrent que le phénomène est antérieur – probablement lié au covid. Si l'on en croit les derniers projets de lois de finances, le Gouvernement ne subit-il pas les crises plus qu'il n'imprime sa marque à l'économie de notre pays ?

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Nous avons compris en filigrane de vos propos que, comme nous, vous êtes inquiet, tant du niveau stratosphérique de la dette publique et de l'inflation que de la remontée des taux d'intérêt et des obligations d'État.

Devant le mur de la dette, la France accélère encore, en empruntant la somme colossale de 270 milliards d'euros sur les marchés à des taux proches de 2,5 %. On sait qu'une hausse de 1 point des taux d'intérêt se traduit par un surcoût de 39 milliards d'euros sur dix ans. Quelles sont les projections du Haut Conseil en matière d'évolution de la charge de la dette entre 2023 et 2027 ? Le point de départ en 2023 devrait être a minima de 17 milliards d'euros, soit déjà deux fois le budget du ministère de la justice.

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Vous avez fait part de votre avis sur l'austérité mais vous n'avez pas répondu complètement à la question posée par Manuel Bompard, qui s'appuyait sur le graphique montrant le taux de croissance en volume de la dépense publique pour les cinq années à venir : avez-vous connaissance d'une situation similaire par le passé ?

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Pierre Moscovici, président du Haut Conseil des finances publiques

Le service de la dette va probablement augmenter. Le Gouvernement prévoit dans le projet de loi de programmation une hausse de près de 20 milliards d'euros entre 2022 et 2027, pour atteindre environ 60 milliards, et peut-être même un peu plus si l'augmentation des taux d'intérêt s'avérait plus importante. La Cour des comptes a déjà alerté sur ce risque sans être totalement écoutée, je le crains. Cela rend d'autant plus important de faire baisser notre ratio de dette, je ne cesse de le répéter.

S'agissant du graphique, je ne dispose pas d'historique mais je vais faire appel à ma mémoire politique. Un taux de croissance de 0,6 point en volume s'est déjà vu mais cela reste ambitieux en effet. Il faut toujours faire des comparaisons, et considérer aussi le point de départ : nous sortons d'une situation exceptionnelle où, covid aidant, nous avons crevé tous les plafonds, ce qui justifie aujourd'hui un rattrapage. Oui, des efforts importants sont demandés mais la situation n'est pas inédite.

En ce qui concerne les divergences au sein de la zone euro, il n'y a pas, selon moi, de problème de soutenabilité de notre dette aujourd'hui. La zone euro a connu ces dernières années une situation très particulière – une crise mondiale, une pandémie et une réponse collective. Nous revenons progressivement, et c'est tant mieux, à une situation normale, dans laquelle la convergence est très importante et ne doit pas être négligée. La Commission et les marchés reprennent leurs réflexes : ce qu'ils observent, ce n'est pas le niveau, mais la pente de la dette. Dès lors, nous devons leur envoyer des signaux. Nous ne pouvons pas être soumis à un règlement de copropriété et agir chacun dans notre coin. Dans un régime normal, il faut s'efforcer de limiter les divergences. La France peut et doit faire un peu plus en la matière.

Madame Louwagie, je ne me prononce pas sur le choix entre trimestres de cotisations et âge : in fine, c'est tout de même l'âge de départ à la retraite qui recule. Il me semble que, objectivement, toutes les études s'accordent sur l'existence d'un problème de financement des retraites. Pour le résoudre, les leviers sont connus : la hausse des cotisations, la baisse des pensions ou la variation de l'âge. À mes yeux, la réforme est plus sociale qu'antisociale. En effet, ne rien faire tout de suite imposerait d'agir sur les autres paramètres : la hausse des cotisations, qui sont déjà très élevées, ou la baisse des pensions, qui serait dramatique alors que les injustices sont déjà criantes. Voilà mon raisonnement, mais c'est aux responsables politiques qu'il appartient de se prononcer.

L'évaluation des dépenses des agences n'est pas de la compétence du Haut Conseil ; la Cour des comptes le fait à l'occasion. Contrairement à votre impression, les dépenses diminuent depuis quelques années. En tout cas, ce n'est certainement pas la source des économies massives dont nous avons besoin, pas davantage que ne le serait la baisse des salaires de la haute fonction publique.

Monsieur Tanguy, je crois avoir répondu très sérieusement à la question de M. Mauvieux relative aux OATi. Votre collègue n'a d'ailleurs pas dit que la loi de programmation actuelle était caduque, pour une raison simple : elle n'a pas encore été votée ! Pour ma part, je répète qu'une loi de programmation des finances publiques est nécessaire pour la crédibilité de notre pays.

Monsieur Brun, vous avez évoqué mon « inquiétude ». Je ne veux pas tenir de propos exagérément émotionnels : je suis là pour parler d'un certain nombre de réalités, et c'est ensuite à vous, mesdames et messieurs les députés, dans votre diversité, de vous prononcer sur les projets que vous soumet le Gouvernement. Je réitère mon sentiment : nous avons besoin d'une loi de programmation, même si le projet qui vous est présenté pourrait être plus ambitieux, car c'est une ancre, un repère de travail indispensable à tous. Quant aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2023, nous avons également formulé nos avis : à vous de vous en saisir. J'ai noté la différence entre le volontarisme et le réalisme, mais on peut être d'autant plus volontaire qu'on se base sur des hypothèses réalistes.

Puis la commission examine la proposition de loi relative à la charge fiscale de la pension alimentaire (n° 209) (Mme Aude Luquet, rapporteure)

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Nous examinons la proposition de loi relative à la charge fiscale de la pension alimentaire, que le groupe Démocrate (MODEM et indépendants) a inscrite à l'ordre du jour de sa journée d'initiative réservée, le jeudi 6 octobre.

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Toutes les études le montrent, la séparation des deux parents entraîne un appauvrissement de celui qui a la garde des enfants du couple : perte d'un logement, sacrifice de la vie professionnelle, augmentation des frais de garde… D'après les chiffres les plus récents, la garde des enfants revient dans près de 70 % des cas à leur mère. Un rapport du Haut Conseil de la famille, de l'enfance et de l'âge (HCFEA) explique qu'une contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant est versée pour sept enfants sur dix, et que cette pension est payée par le père, qui a un revenu supérieur, dans 97 % des cas. Selon une récente étude de l'INSEE, la moitié des femmes isolées ayant la garde de leurs enfants connaissent, l'année de leur séparation, une baisse de leur niveau de vie d'au moins 24 % par rapport à l'année qui précède la rupture.

J'insiste sur le fait que ma proposition de loi n'a qu'un seul but : agir dans l'intérêt de l'enfant. Elle ne vise en aucun cas à résoudre les questions liées à la répartition, entre le père et la mère, de la garde de l'enfant, ou plus largement à la séparation du couple.

La contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant versée par le parent non gardien au parent gardien a normalement vocation à compenser la perte de niveau de vie pour l'enfant. Si de nombreux efforts ont été réalisés par notre majorité lors de la précédente législature, et aujourd'hui encore dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2023, pour faciliter et garantir le versement effectif de cette contribution ou rehausser l'allocation de soutien familial (ASF), nous conviendrons tous qu'une pension d'un montant moyen de 170 euros par mois ne permet pas de couvrir l'ensemble des besoins d'un enfant.

En outre, le traitement socio-fiscal des contributions à l'entretien et à l'éducation de l'enfant est incohérent et injuste, comme le montre une étude sur les ruptures de couples avec enfants mineurs réalisée par le HCFEA en 2019. En effet, les pensions versées sont aujourd'hui incluses dans le revenu imposable des parents qui en bénéficient, après un abattement de 10 %. Cela augmente leur quotient familial, avec des répercussions multiples : augmentation du montant de l'impôt, augmentation de la tarification des services proposés par les collectivités territoriales – crèches, cantines, activités périscolaires – et diminution de certaines prestations familiales et sociales comme les aides personnelles au logement (APL) et la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE). Cela paraît d'autant plus absurde que la plupart des parents gardiens concernés sont des femmes qui ont un niveau de vie inférieur à celui de leur ex-conjoint, puisque nous n'avons pas encore tout à fait résolu le problème de l'inégalité salariale entre les femmes et les hommes.

J'aimerais d'ailleurs insister sur ce point : ce qui est improprement appelé « pension alimentaire » est en réalité une contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant. Cette contribution ne constitue pas, pour le parent bénéficiaire, un revenu de remplacement mais correspond à un partage des charges d'entretien de l'enfant, qui prend parfois même la forme d'une aide directe en nature. Il s'agit en quelque sorte d'une péréquation, d'un rééquilibrage des dépenses en fonction des capacités contributives de chaque parent. Le Conseil d'État a précisé, dans un arrêt du 14 avril 2022, que la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant ne participait pas des ressources du parent qui en bénéficie. Fiscaliser cette contribution, c'est faire peser un impôt sur l'enfant en limitant le montant disponible qui lui est destiné ; par conséquent, c'est agir contre son intérêt. Cette contribution n'étant pas un revenu du parent gardien, il faudrait presque la concevoir, comme au Canada, comme un remboursement par le parent non gardien des frais engagés par le parent gardien. En ce sens, elle est bien différente de la prestation compensatoire, qu'on confond souvent sous le même terme de « pension alimentaire ».

Vous l'avez compris, le système actuel ne protège pas l'intérêt des enfants, et il est injuste envers les parents qui en assurent la garde. Aussi notre proposition de loi vise-t-elle à défiscaliser les contributions à l'entretien et à l'éducation d'un enfant mineur, dans la limite de 4 000 euros par an et par enfant et de 12 000 euros par an quel que soit le nombre d'enfants. Ces plafonds permettraient de concentrer l'effort sur les parents gardiens appartenant à la classe moyenne, qui sont imposables et qui bénéficient d'une contribution à l'entretien et à l'éducation inférieure à 340 euros par mois. Selon les informations transmises par la direction de la législation fiscale (DLF), cela représenterait un gain moyen de 497 euros par an pour quelque 150 000 foyers. Très concrètement, pour un parent seul avec un enfant mineur à charge, percevant des revenus de 2 000 euros par mois et une pension de 300 euros, l'adoption de notre proposition de loi permettrait d'économiser 513 euros d'impôt sur le revenu par an.

Si ce texte a vocation à toucher les familles monoparentales appartenant à la classe moyenne, il n'oublie pas les familles les plus modestes. En effet, le calcul et l'attribution d'un nombre important de prestations sociales et familiales dépendent des revenus imposables du contribuable : défiscaliser la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant revient donc aussi à augmenter le montant des APL que le parent perçoit.

En contrepartie de la défiscalisation de la contribution reçue par le parent ayant la garde de l'enfant, l'article 2 prévoit que le parent non gardien ne pourra plus déduire de son revenu imposable la pension alimentaire versée.

Toutefois, les éléments chiffrés transmis par la DLF montrent qu'une adoption de notre proposition de loi, en l'état, aurait des effets redistributifs puissants au détriment des débiteurs de la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, y compris ceux de la classe moyenne et de la classe moyenne inférieure. Je constate également, avec regret, qu'il n'y a pas aujourd'hui de consensus pour faire évoluer notre conception de cette contribution. Un compromis possible aurait été d'imposer un partage égalitaire, entre les deux parents, des frais engagés pour l'enfant, ce qui aurait nécessité un partage des parts fiscales entre les deux parents même en cas de garde exclusive par l'un des deux. Mais il semblerait que cette option soit peu avantageuse pour les parents gardiens, notamment quand les contributions versées sont d'un faible montant.

En conséquence, je vous proposerai plusieurs amendements de repli. Il s'agira de maintenir la possibilité, pour les débiteurs, de déduire les contributions versées de leur revenu imposable, et donc de maintenir aussi l'imposition des contributions reçues par les parents créanciers – ce qui est contraire à ce que propose notre texte initial – mais en permettant à ces derniers de déduire les contributions reçues de leur revenu fiscal de référence.

Cette solution peut paraître éloignée des principes fiscaux les plus classiques, mais le revenu fiscal de référence est aujourd'hui pris en compte pour l'attribution et le calcul d'un certain nombre de prestations, comme le chèque énergie, ainsi que pour la tarification de services locaux tels que les crèches, les activités périscolaires, les cantines ou les transports. Dans un contexte de forte inflation qui alourdit jour après jour la charge d'élever seul ses enfants, cette mesure constituerait un premier message envoyé à l'ensemble des familles monoparentales de classe moyenne et modeste.

Si cette proposition de compromis ne règle pas totalement la question du traitement fiscal des familles, notamment monoparentales, qui ont la charge des enfants après une séparation, elle permet de leur porter une plus grande attention. Je rappelle encore une fois que cette proposition de loi est motivée par l'intérêt des enfants et qu'elle vise à permettre aux parents gardiens de leur offrir des conditions de vie meilleures. Je serais étonnée que nous ne trouvions pas une majorité autour de cet intérêt.

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Cette proposition de loi part d'un constat sans appel : en cas de séparation, les femmes, auxquelles revient majoritairement la garde des enfants, voient leur niveau de vie diminuer davantage que celui des hommes.

Ces familles monoparentales, la majorité présidentielle les soutient. Aussi, je souhaite remercier la rapporteure Aude Luquet pour son investissement sur cette question qui préoccupe au quotidien des millions de Français et surtout de Françaises. Dès juillet, lors de la discussion du projet de loi de finances rectificative, notre présidente de groupe avait évoqué ce sujet. Oui, l'accompagnement des familles est une priorité pour le Gouvernement et la majorité présidentielle. Nous avons récemment annoncé une revalorisation de 50 % de l'ASF, qui passera de 123 à 184 euros par mois et par enfant, pour un coût total de 900 millions d'euros, ainsi qu'une extension du complément de libre choix du mode de garde (CMG), qui pourra désormais être perçu jusqu'aux 12 ans de l'enfant et non plus 6 ans.

Le groupe Renaissance partage le principal objectif de cette proposition de loi, qui est de mieux accompagner ceux qui perçoivent des pensions alimentaires, principalement des femmes dont le niveau de vie se trouve fortement diminué après la séparation. En l'état, ce texte présente néanmoins des limites : du côté des verseurs, la réforme fragiliserait des personnes se trouvant dans une situation déjà précaire, dans les premiers déciles de revenus, tandis que du côté des receveurs elle favoriserait les foyers aux revenus les plus élevés, ce qui ne correspond évidemment pas à l'objectif recherché.

Toutefois, des amendements proposent une solution qui semble plus juste. Afin que nous puissions évaluer leur impact réel, il serait souhaitable que le Gouvernement nous transmette des données chiffrées d'ici à l'examen du texte en séance la semaine prochaine. Dans cette attente, le groupe Renaissance ne prendra pas part au vote.

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Vous voulez améliorer la qualité de vie des enfants en défiscalisant la pension alimentaire pour les parents receveurs. Mais que faites-vous lorsque c'est le parent au revenu le plus élevé qui perçoit la pension ? Ce serait une double peine pour le parent verseur ! Lors de la campagne présidentielle, le Rassemblement national avait proposé que chaque foyer bénéficie d'une part fiscale entière supplémentaire dès le deuxième enfant : cela permettrait aux foyers recevant la pension alimentaire de voir diminuer leurs impôts de façon plus importante. Pour autant, nous sommes favorables à la défiscalisation de la pension pour les parents receveurs, même si nous nous montrons plus réservés quant à la prise en compte de son montant dans les revenus des parents verseurs.

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Vous l'avez dit vous-même, madame la rapporteure, la fiscalisation des pensions alimentaires est une double peine pour les femmes : en plus de voir leurs ressources diminuées par les impôts qu'elles paient sur la pension reçue, elles perdent le bénéfice de certaines aides et prestations sociales. De l'autre côté, les pères peuvent défiscaliser, c'est-à-dire déduire de leur revenu imposable la pension versée pour leurs enfants. Ces règles fiscales absolument sexistes traduisent une vision très archaïque du couple séparé : la pension est considérée comme un revenu pour la mère alors qu'elle relève en réalité de l'obligation, pour le père, de contribuer à l'entretien de ses enfants, même lorsqu'il est séparé de leur mère.

La présente proposition de loi vise à inverser la règle fiscale, c'est-à-dire à défiscaliser la pension reçue par les mères et à refiscaliser la pension payée par les pères. En cela, elle va dans le bon sens. Mais il faut aller plus loin : la majorité doit comprendre que les mères seules souffrent avant tout de la politique menée par le Gouvernement – la casse des droits sociaux, les salaires trop bas, la détérioration voire l'abandon des services publics, les coupes dans les aides, l'absence de lutte contre les violences subies par les mmes.

Nous voulions soutenir ce texte, mais nous nous interrogeons sur une disposition particulièrement étrange qui prévoit la refiscalisation des pensions versées par les pères mais dans la limite de 330 euros par mois. Cela signifie que les pères très riches, redevables d'une pension supérieure à ce montant, continueront à bénéficier de cet avantage fiscal tandis que les plus pauvres paieront des impôts sur la totalité de la pension. Ce n'est pas normal. Si les amendements qui nous seront soumis permettent de rectifier les choses, peut-être pourrons-nous voter la proposition de loi.

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En toile de fond de notre débat se pose le problème général de l'inflation et de la hausse des coûts de l'énergie, qui affecte indubitablement le niveau de vie des familles monoparentales, notamment lorsqu'elles comptent plusieurs enfants. Le levier fiscal est-il le bon outil pour y répondre ? Sans doute pas.

J'ajouterai à ce qu'ont déjà dit les orateurs précédents que ce texte peut entraîner, à moyen terme, deux effets pervers. D'une part, il est susceptible d'aggraver le phénomène de non-versement des pensions alimentaires, que nous ne devons pas négliger. D'autre part, une défiscalisation des pensions entraînera une majoration des revenus nets des parents receveurs ; petit à petit, le juge en tiendra compte dans la détermination du montant des pensions, qu'il sera peut-être amené à minorer. Cette logique de rééquilibrage économique ne peut être ignorée.

Le groupe Les Républicains considère que le problème des pensions alimentaires n'est pas d'ordre fiscal : une modification des règles fiscales n'est pas le bon instrument pour y répondre. Sur le principe, ce retournement de fiscalité, même partiel, ne nous paraît pas forcément justifié. Nous espérons qu'une prise de conscience amènera la majorité à rectifier les choses. À ce stade, nous ne souhaitons pas prendre part au vote.

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Merci, madame la rapporteure, pour la clarté et la simplicité de cette proposition de loi de trois articles qui ne fait que corriger une injustice historique, d'autant plus au regard de ce qui se fait dans les pays européens comparables.

Nous savons tous que la séparation d'un couple et ses conséquences dans l'organisation de la vie familiale créent une grande vulnérabilité, face à laquelle le versement d'une pension alimentaire est essentiel. La pension alimentaire concerne 1,5 million de personnes en France. Il est en notre pouvoir de l'améliorer afin qu'elle atteigne pleinement son but, qui est d'assurer une juste contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant par chacun de ses parents. La présente proposition de loi vise à garantir que la pension reçue puisse être entièrement dédiée à cette mission : si nous modifions la charge fiscale, le parent gardien ne subira plus l'imposition de la pension reçue ni l'effet de seuil tout à fait néfaste qui, du fait de l'augmentation de son revenu fiscal de référence, le rend inéligible à certaines aides sociales.

Cette proposition de loi constitue une avancée pour la situation économique des femmes, qui représentent 97 % des bénéficiaires de pension alimentaire. Elles sont aussi celles qui s'appauvrissent le plus après une séparation, à hauteur de 375 euros par mois, alors même que leur rémunération moyenne est malheureusement toujours inférieure de près de 30 % à celle des hommes.

Je sais, madame la rapporteure, que vous avez mené de nombreux travaux au cours des dernières semaines. Je vous félicite d'avoir trouvé ce point d'équilibre, qui permet d'éviter d'augmenter les impôts de certains en recentrant le dispositif pour mieux soutenir les parents gardiens de la classe moyenne. Votre proposition de loi offre un cadre protecteur aux parents célibataires – en grande majorité des femmes – et diminue la vulnérabilité économique des populations modestes dans le contexte économique tendu que nous connaissons.

Le groupe Démocrate votera naturellement cette proposition de loi. J'espère, mes chers collègues, vous avoir convaincus de faire de même.

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Je me réjouis que le groupe Démocrate ait décidé de consacrer sa première niche à ce débat fondamental pour les familles monoparentales. En France, 25 % des parents vivent seuls, 83 % de ces parents seuls sont des femmes, et 40 % d'entre eux vivent sous le seuil de pauvreté. Cette grande question sociale qu'est la situation des familles monoparentales est très peu discutée dans les médias, et absente des débats politiques. On en a pourtant beaucoup entendu parler lors du mouvement des gilets jaunes, quand de nombreuses femmes seules, mères célibataires, sont allées sur les ronds-points pour expliquer leur situation.

Cette proposition de loi a donc le mérite de poser la question de la fiscalisation de la pension alimentaire, reçue à 97 % par des femmes. J'ai organisé dans ma circonscription un atelier législatif citoyen sur les familles monoparentales : c'est la première revendication qui a été exprimée.

Le texte qui nous est soumis n'est hélas qu'une première version : on comprend que la majorité ou Bercy – ou probablement les deux – ne souhaitaient pas aller si loin. Le dispositif de repli qui nous est proposé est, sans offense, un peu modeste. Il consiste à exclure les pensions du revenu fiscal de référence, lequel sert à déterminer l'éligibilité et le montant d'un certain nombre de prestations. Les socialistes voient évidemment cette proposition de loi d'un œil très favorable, même s'ils regrettent ce recul. Nous la voterons probablement après la discussion, en redisant notre attachement aux familles monoparentales et aux mères célibataires de notre pays, qui ont besoin d'être fortement soutenues par les pouvoirs publics.

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Je remercie Mme la rapporteure de son initiative qui permet de mettre à notre ordre du jour un sujet d'une grande importance, celui de la situation financière souvent précaire du parent recevant la pension alimentaire versée pour l'entretien et l'éducation de l'enfant en cas de divorce ou de séparation.

Le groupe Horizons et apparentés se réjouit que la discussion sur ce sujet se tienne, mais le texte proposé, centré sur l'outil fiscal, ne lui semble pas le plus adapté pour répondre à l'enjeu. En effet, il crée un précédent important en permettant au parent bénéficiaire de la pension alimentaire de défiscaliser les sommes perçues, qui sont tout de même des recettes.

Il comporte également une limite importante en ce qu'il supprime, pour le parent payeur, la possibilité de défiscaliser les sommes versées. Ce faisant, il soumet à l'impôt sur le revenu des sommes qui ne constituent pas un revenu, mais bien une charge : cela reviendrait donc à alourdir l'impôt sur le revenu des nombreux contribuables qui versent ces pensions, allant à l'encontre de l'objectif fixé par le Président de la République de poursuivre les baisses d'impôts engagées durant le quinquennat précédent.

Le dispositif semble par ailleurs manquer sa cible initiale que sont les parents isolés en situation de précarité, puisque la majorité des parents bénéficiaires de pensions alimentaires ne sont pas, à l'heure actuelle, soumis à l'impôt sur le revenu.

Les modifications proposées par la rapporteure apportent des réponses à quelques-uns de nos points d'inquiétude. Néanmoins, en sortant les sommes perçues du revenu fiscal de référence, le texte créerait un précédent qui nous semble dangereux sans augmenter de manière significative le pouvoir d'achat des citoyens concernés.

Pour toutes ces raisons, le groupe Horizons et apparentés ne pourra pas se prononcer en faveur de ce texte.

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Les chiffres sont éloquents. Comme divers rapports le soulignent depuis plusieurs années, en cas de séparation, la garde des enfants revient à la mère dans près de 70 % des cas, et au père dans 20 % des cas. Selon l'INSEE, le revenu médian des femmes après une séparation se détériore de 31 %, celui des hommes de seulement 6 %. Notre législation fiscale ne fait qu'aggraver cet écart puisque, sauf situation particulière, les pensions alimentaires perçues sont soumises à l'impôt sur le revenu. Il y a donc bien une inégalité de genre que vient souligner ce texte.

Au regard de ces éléments, il est important de déconstruire certains discours présentant les pensions alimentaires comme des revenus de remplacement. Leur unique but est en réalité d'assurer un juste partage de l'entretien et de l'éducation des enfants subissant la séparation du couple. Dès lors que nous avons en tête les éléments précédemment cités, l'imposition de ces pensions pour le parent bénéficiaire apparaît injuste ; elle est à l'opposé de ce qui se pratique à l'étranger et de la vision de justice sociale défendue par le groupe écologiste.

C'est pourquoi nous saluons votre travail, madame la rapporteure. Cette proposition de loi, dont nous approuvons les principes généraux, est la bienvenue. Toutefois, permettez-moi de poser quelques questions relatives au calibrage du texte. Comme vous le savez, la défiscalisation des pensions alimentaires reçues pourrait entraîner des effets de seuil pour les bénéficiaires de certaines prestations sociales. Est-il envisagé d'exclure ces pensions des calculs visant à déterminer l'attribution et le montant de l'ensemble des allocations ? Par ailleurs, comment les plafonds annuels de 4 000 euros par enfant et de 12 000 euros au total ont-ils été choisis ? Enfin, comment le risque de défaut de paiement des pensions alimentaires a-t-il été évalué, étant donné que l'article 2 de la proposition de loi supprime, d'une certaine manière, l'incitation à payer ?

Ces interrogations rejoignent en grande partie celles de mes camarades de la NUPES. Je sais que vous avez déjà proposé un certain nombre de modifications. Quand vous en aurez précisé les contours, nous soutiendrons probablement votre proposition de loi.

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Je comprends votre volonté de soutenir les femmes ayant la garde exclusive d'un enfant. Cependant, nous avons un certain nombre de réserves sur ce texte. Nous considérons que le législateur doit faire preuve de prudence et engager une concertation avant de bouleverser les avantages fiscaux prévus par la loi.

Si le dispositif actuel comporte des faiblesses, il repose sur la volonté d'assurer un juste équilibre entre les parents. Actuellement, lorsqu'une pension est versée en cas de garde exclusive, chaque parent bénéficie d'un avantage fiscal. Pourquoi bouleverser cet équilibre ? N'est-il pas logique qu'un parent qui verse une pension, et qui transfère donc un revenu à l'autre parent, puisse déduire ce montant de son revenu imposable ? Le fait de priver l'un des parents d'un avantage fiscal légitime pour renforcer celui de l'autre parent nous paraît contestable. Cela risque d'ailleurs d'accroître les tensions au sein des couples séparés.

J'avais aussi quelques remarques à propos de l'article 2, qui sont sans objet puisque vous proposez de le supprimer.

Enfin, notre groupe s'interroge sur la constitutionnalité du dispositif. Le Conseil constitutionnel a déjà eu l'occasion de valider l'interdiction de cumuler le gain de quotient familial avec la déduction de la pension alimentaire en cas de garde alternée, cette règle visant avant tout à éviter le cumul d'avantages fiscaux ayant le même objet. Ne risque-t-il pas de censurer le cumul que vous proposez en cas de garde exclusive ?

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Certains collègues ont expliqué que la fiscalité ne permettrait pas de régler l'ensemble des problèmes auxquels sont confrontées les familles monoparentales. Mais elle en réglera quand même certains ! Cette proposition de loi me semble donc positive. Je remarque simplement que les amendements de repli, dont l'objectif est manifestement de rassembler davantage de groupes, ne suffiront peut-être pas. Je préférerais donc que nous en restions à la version initiale du texte.

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Effectivement, nous avons cherché un compromis car c'est notre rôle de députés que de trouver des solutions.

Aujourd'hui, 11 millions de foyers bénéficient d'aides telles que le CMG ou l'ASF, qui sont encore renforcées par la majorité. L'objet de notre proposition de loi est d'aider aussi les autres foyers, ceux qui n'en bénéficient pas.

Je rappelle que l'intérêt de l'enfant est de bénéficier de l'intégralité de la pension alimentaire prévue par la décision de justice ou la convention conclue entre ses parents, et que ce n'est pas le cas lorsque cette pension est fiscalisée.

Monsieur Di Filippo, vous avez affirmé que le levier fiscal n'était pas le bon. Pour avoir consulté toutes les propositions de loi déposées jusqu'à présent, je peux vous dire que ce sujet n'a encore jamais été abordé à l'Assemblée nationale. Cela fait des années que nous entendons parler de la fiscalisation ou de la déductibilité des contributions à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, mais nous n'en avons encore jamais débattu en tant que législateur. Il s'agit pourtant d'un sujet du quotidien, d'une réalité pour les parents qui élèvent seuls leurs enfants. On l'a dit, c'est souvent la mère qui obtient la garde exclusive et qui se retrouve avec des moyens insuffisants. On sait aussi que les montants des pensions alimentaires ne sont pas assez élevés pour couvrir l'intégralité des coûts d'entretien et d'éducation d'un enfant. Notre proposition de loi a pour objet de marquer notre intérêt et de faire en sorte que la pension due aux enfants leur profite entièrement et améliore leurs conditions de vie.

Je suis tout à fait ouverte à ce que l'on réfléchisse aux montants des plafonds. Ceux que nous avons retenus permettent de cibler tout particulièrement les classes moyennes, qui ne pourront pas bénéficier des avantages prévus dans le PLFSS et auxquelles le groupe Démocrate souhaite accorder une plus grande attention.

On peut effectivement regretter le recul de la portée du texte, mais l'adopter nous permettra de faire un pas en avant et nous donnera l'occasion, dans la suite de la législature, de remettre sur la table les enjeux d'égalité entre les femmes et les hommes et l'intérêt des enfants, qu'il nous appartient de protéger lorsque leurs parents se séparent et d'aider à se construire.

Amendement CF5 de Mme Aude Luquet.

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Il s'agit de la solution de repli que j'ai évoquée : la contribution pour l'éducation et l'entretien de l'enfant est toujours fiscalisée pour le parent qui la reçoit mais elle est sortie de son revenu fiscal de référence. Le Conseil d'État a cependant bien précisé que ces contributions ne peuvent pas être considérées comme des revenus. Elles ne devraient donc pas être fiscalisées dans l'idéal, d'autant que cela a pour effet de réduire les sommes consacrées à l'enfant.

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. Mme la rapporteure s'est manifestement rendu compte que, sur le sujet qui la préoccupe et qui nous préoccupe également, elle sera soutenue par la gauche de cette salle plutôt que par la droite. Compte tenu de la situation que vivent les femmes seules dans notre société, notamment celles qui ont des enfants, je trouve cela navrant.

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. La majorité sera toujours présente pour accompagner les familles monoparentales – pour l'essentiel, des femmes seules avec enfants. La majorité sera toujours présente pour travailler à l'égalité entre les femmes et les hommes.

Telle que vous souhaitez qu'elle soit adoptée dans sa formulation initiale, monsieur le président, la proposition de loi représente un gain de 440 millions d'euros pour le budget de l'État. Voulons-nous en faire une solution pour réduire le déficit public ? Elle induit une augmentation d'impôts de 311 euros pour les personnes du premier décile qui paient une pension alimentaire. Voulons-nous mettre en difficulté les plus fragiles ? Non.

Nous partageons l'objectif de la proposition de loi mais telle quelle, elle ne nous convient pas.

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Le sujet n'est pas le déficit public, mais la situation des familles concernées, qui sont très nombreuses dans ce pays. Toutes demandent la défiscalisation de la pension alimentaire.

Chers collègues de la majorité, vous faites une erreur magistrale, semblable à celle que vous avez commise pour la déconjugalisation de l'allocation aux adultes handicapés. Pendant des années, vous l'avez refusée, au motif que c'était trop complexe et techniquement infaisable. Puis vous avez fini par vous rendre à l'évidence : cette mesure de justice était réclamée par tous. La Première ministre l'a donc annoncée, et nous l'avons adoptée.

Nous, socialistes, ne voterons pas l'amendement, qui est un repli. Madame la rapporteure, chers collègues du groupe MODEM, vos alliés sont du côté gauche de la salle, et seront demain du côté gauche de l'hémicycle. La proposition de loi a plus de chances d'être adoptée avec nos voix qu'avec celles de vos alliés habituels.

Il faut conserver l'ambition première de la proposition de loi et accéder à la demande de l'écrasante majorité du corps social de défiscaliser la pension alimentaire.

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. J'aimerais apaiser le débat, que la convocation de la gauche et de la droite de cette assemblée tend à enflammer. Le sujet, me semble-t-il, est transpartisan et dépourvu de coloration politique.

Certains propos suggèrent que la situation se résume à « l'homme contre la femme ». Il faut sortir de cette approche sexiste selon laquelle les femmes ont toujours la garde des enfants. Pour ma part, j'ai la garde de mes enfants, j'ai un revenu supérieur à celui de mon ex-femme et c'est elle qui me verse une pension alimentaire. C'est un contre-exemple pour le texte.

Nous ne sommes d'ailleurs pas défavorables à la proposition de loi. Nous constatons simplement qu'elle alourdit les impôts du parent qui verse la pension alimentaire, qu'il s'agisse du père ou de la mère, ce qui ne nous semble pas judicieux. Il aurait été plus juste pour les enfants de prévoir une pleine part fiscale dès le deuxième enfant.

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Je soutiens l'amendement. Certes, il peut être considéré comme un recul par rapport à la disposition initiale, et il faudrait d'autres modifications pour équilibrer un peu cette mesure. Mais il est important de se fonder sur la notion de revenu fiscal de référence. Le code civil pose une obligation parentale de s'occuper des enfants, qui se transforme ensuite en obligation des enfants vis-à-vis des parents. Les sommes concernées ne peuvent pas être considérées comme des revenus, découlant de cette obligation légale. Il est donc pertinent d'agir au niveau du revenu fiscal de référence, ce qui permet d'éviter de perdre certaines aides sociales.

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Je conçois que l'on puisse estimer, comme nos collègues de gauche, que cet amendement de repli ne va pas assez loin. Toutefois, si nous voulons avancer aujourd'hui, il faut faire des propositions de cet ordre. Cela reste un progrès pour le parent ayant la garde de l'enfant.

Chers collègues de gauche, cette avancée manque peut-être d'ambition à vos yeux, mais je la défends car il est nécessaire d'apporter des solutions à des situations concrètes. Quels que soient les cas particuliers, ce sont plutôt les mères, statistiquement, qui ont la garde de l'enfant – soit dit sans stigmatiser les pères, ce qui n'est aucunement l'objet du texte.

Se fonder sur le revenu fiscal de référence est un moyen de remédier à la perte de prestations sociales et d'élargir les aides que nous apportons aux classes moyennes et modestes. Il s'agit d'une nécessité pour remplir notre seul objectif, celui de l'intérêt de l'enfant.

La commission adopte l'amendement et l'article 1er est ainsi rédigé.

Après l'article 1er :

Amendement CF1 de Mme Marianne Maximi.

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. Nous demandons au Gouvernement un rapport sur l'opportunité d'exclure les pensions alimentaires reçues du calcul des prestations sociales. Même défiscalisées, elles sont prises en compte dans le calcul des ressources déterminant le montant de certaines de ces prestations, notamment le RSA et la prime d'activité, ce qui pénalise clairement les ménages concernés.

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Demande de retrait. La détermination des conditions de ressource permettant d'attribuer et de calculer les prestations sociales ne dépendent pas du législateur. Par ailleurs, nous attendons, en vue de l'examen du texte en séance publique, la communication de données par la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES).

La commission rejette l'amendement.

Amendement CF2 de Mme Marianne Maximi.

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. Nous demandons un rapport étudiant l'effet redistributif de la défiscalisation partielle des pensions alimentaires reçues. Environ un tiers des familles monoparentales vivent sous le seuil de pauvreté et ne sont pas imposables.

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Demande de retrait. Nous disposons déjà d'études, menées notamment par le HCFEA. Par ailleurs, nous attendons des retours de la DREES sur les effets microéconomiques et macroéconomiques de la défiscalisation des pensions alimentaires.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CF6 de Mme Aude Luquet.

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Il s'agit de supprimer l'article 2, et donc de maintenir la possibilité, pour le débiteur, de déduire de son revenu imposable les contributions versées pour l'entretien et l'éducation de l'enfant.

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Cet article 2, relatif à la fiscalité, illustre ma précédente intervention. Si j'ai bien compris, la partie gauche de notre assemblée souhaite augmenter les impôts des personnes versant des pensions alimentaires, à hauteur de 516 millions en plus des impôts déjà perçus. En réalité, la proposition de loi fait huit perdants pour un gagnant !

Nous, au sein de la majorité présidentielle, nous sommes pour l'égalité et pour une juste imposition. Nous ne souhaitons pas surfiscaliser pour avoir plus d'argent dans les caisses de l'État. C'est le choix de la majorité présidentielle, qui n'est peut-être pas celui de l'opposition. Chacun est libre de son vote.

L'article, tel qu'il était initialement rédigé, évite à l'État une perte fiscale de 400 millions d'euros. Nous aurions voté contre. L'objectif que nous devons viser n'est pas le renflouement des caisses de l'État, mais l'accompagnement des personnes recevant une pension alimentaire, qui sont le plus souvent des femmes à la tête de familles monoparentales se trouvant dans une situation très difficile.

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Si je comprends bien ce qui vient de dire notre collègue Masséglia, les députés du groupe Démocrate font partie de l'opposition, et il faut donc fustiger les dispositions qu'ils proposent. C'est extraordinaire !

Le dispositif est équilibré. Si la somme est fiscalisée d'un côté, elle doit être défiscalisée de l'autre. Nous soutenons cet amendement : l'article 1er ayant été modifié, il est logique, par souci de coordination, de supprimer l'article 2.

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J'aimerais être certain que l'article 2 permet au parent qui verse la pension alimentaire de la défiscaliser.

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L'article 2 supprimait la défiscalisation. En le supprimant, on en revient à l'existant.

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À l'heure actuelle, le parent qui verse la pension alimentaire peut la déduire de son revenu imposable, et celui qui la reçoit est fiscalisé. Nous venons d'adopter une disposition selon laquelle cette somme, qui ne peut pas être considérée comme un revenu, n'entre pas dans le calcul du revenu fiscal de référence. Par conséquent, avec cet amendement, les équilibres financiers sont maintenus. J'ai donc du mal à comprendre certains des propos qui ont été tenus.

J'ai bien compris que certains veulent aller plus loin, ce qui a des conséquences financières. Dont acte. En excluant la pension alimentaire du revenu fiscal de référence, le dispositif est complet et va dans le bon sens.

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Mais revenir à la situation actuelle n'est pas satisfaisant. Les pères continueront à défiscaliser entièrement les pensions alimentaires, alors que l'exonération des femmes sera plafonnée à 330 euros par mois.

Cette fiscalité demeure sexiste, au détriment des femmes. Elle peut aussi être utilisée par les hommes les plus aisés, qui versent de grosses pensions alimentaires, comme une niche fiscale.

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Je conçois que l'on puisse regretter que le texte ne va pas assez loin. Il s'agit d'un premier pas, qui ne doit pas être le dernier. Nous devrons aussi travailler à l'échelon réglementaire pour faire évoluer les situations.

La commission adopte l'amendement. En conséquence, l'article 2 est supprimé.

Après l'article 2 :

Amendement CF3 de Mme Marianne Maximi.

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Il vise à interroger le Gouvernement sur le potentiel effet inégalitaire de la défiscalisation des pensions alimentaires versées au-dessus d'un certain seuil. Le barème mis à disposition par le ministère de la justice prévoit plusieurs seuils. Il faut s'assurer que le seuil retenu n'a pas d'effet régressif préjudiciable aux parents les plus pauvres.

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Demande de retrait. Plusieurs études ont déjà été réalisées, notamment par l'Union nationale des associations familiales et le HCFEA. Il faut des éléments chiffrés pour répondre à votre question, qui soulève un vrai problème sur lequel nous devrons revenir.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CF4 de Mme Marianne Maximi.

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Nous proposons que le Gouvernement remette au Parlement un rapport pour étudier les effets réels de la défiscalisation des pensions alimentaires sur les débiteurs à faibles revenus et énoncer des pistes de réflexion visant à garantir un juste calcul des prestations sociales auxquelles ils et elles peuvent prétendre.

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Demande de retrait. Il est exact que les débiteurs les plus touchés par la proposition de loi sont ceux qui sont assujettis à l'impôt sur le revenu. Nous attendons des éléments complémentaires sur ce sujet, que nous présenterons en séance publique le 6 octobre prochain.

La commission rejette l'amendement.

La commission adopte l'article 3 non modifié.

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En dépit des dispositions de repli adoptées, la proposition de loi comporte des avancées. L'article 1er modifié permet d'exclure les pensions alimentaires du calcul du bénéfice de certaines prestations sociales.

Nous allons donc voter pour cette proposition de loi en commission. Nous espérons qu'elle sera examinée dans l'hémicycle, ce qui dépend de la position dans laquelle vous la présenterez lors de votre journée de niche. Nous serons à vos côtés, madame la rapporteure, pour la voter, car elle représente un progrès social pour les femmes et les parents seuls de ce pays.

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Les membres du groupe Renaissance sont satisfaits qu'il n'y ait plus de hausse de la fiscalité sur les personnes les plus fragiles.

Nous ne disposons d'aucune simulation des impacts de la proposition de loi sur les personnes concernées. Nous espérons que les services de l'État nous fournirons, d'ici l'examen du texte en séance publique la semaine prochaine, des éléments complémentaires pour nous permettre de prendre une décision en toute connaissance de cause.

Pour l'heure, le groupe Renaissance ne prendra pas part au vote.

La commission adopte l'ensemble de la proposition de loi ainsi modifié.

Membres présents ou excusés

Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du mercredi 28 septembre 2022 à 9 heures 30

Présents. - M. Franck Allisio, Mme Christine Arrighi, M. Karim Ben Cheikh, M. Manuel Bompard, M. Mickaël Bouloux, M. Philippe Brun, M. Fabrice Brun, M. Michel Castellani, M. Thomas Cazenave, M. Jean-René Cazeneuve, M. Éric Coquerel, M. Charles de Courson, M. Dominique Da Silva, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Jocelyn Dessigny, M. Fabien Di Filippo, Mme Stella Dupont, Mme Marina Ferrari, Mme Félicie Gérard, M. Joël Giraud, Mme Perrine Goulet, M. Victor Habert-Dassault, M. Patrick Hetzel, M. François Jolivet, M. Daniel Labaronne, M. Emmanuel Lacresse, Mme Constance Le Grip, M. Pascal Lecamp, Mme Charlotte Leduc, M. Mathieu Lefèvre, Mme Patricia Lemoine, M. Philippe Lottiaux, Mme Véronique Louwagie, Mme Aude Luquet, Mme Lise Magnier, M. Louis Margueritte, M. Denis Masséglia, M. Jean-Paul Mattei, M. Damien Maudet, M. Kévin Mauvieux, Mme Marianne Maximi, M. Benoit Mournet, Mme Christine Pires Beaune, M. Christophe Plassard, M. Robin Reda, M. Charles Rodwell, M. Xavier Roseren, M. Michel Sala, M. Emeric Salmon, M. Nicolas Sansu, M. Charles Sitzenstuhl, M. Jean-Philippe Tanguy, M. Jean-Marc Tellier

Excusés. - M. David Amiel, M. Christian Baptiste, Mme Émilie Bonnivard, Mme Karine Lebon

Assistait également à la réunion. - M. Pierre Cordier