La commission procède à l'examen, ouvert à la presse, et au vote de deux projets de loi.
Présidence de M. Jean-Louis Bourlanges, président
La séance est ouverte à 9 h 00
Projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté d'Andorre concernant l'amélioration de la résilience climatique et de la viabilité des routes nationales 116, 20, 320 et 22 liées aux risques naturels entre Prades et la frontière franco-andorrane (n° 867)
(M. Alain David, rapporteur)
Mes chers collègues, notre ordre du jour appelle l'examen de deux projets de loi dont nous sommes saisis en vue de l'approbation d'accords passés par le Gouvernement avec les autorités de la Principauté d'Andorre.
Il s'agit de deux textes de portée assez technique, mais chacun d'entre nous connaît la force des liens institutionnels, économiques et culturels de la France avec ce petit État, dont le président de notre République est le coprince en vertu de la Constitution du 14 mars 1993. Cela nous oblige à une attention d'autant plus grande et bienveillante dans le suivi de nos relations bilatérales.
Le premier de ces deux textes est le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord concernant l'amélioration de la résilience climatique et de la viabilité des routes nationales 116, 20, 320 et 22 liées aux risques naturels entre Prades et la frontière franco andorrane.
À titre liminaire, je soulignerai que les échanges transfrontaliers sont d'une importance majeure pour le développement économique et touristique d'Andorre et des Pyrénées-Orientales.
Or les routes nationales qui permettent d'accéder à la principauté subissent fréquemment des coupures, particulièrement en période hivernale, du fait de glissements de terrain et de chutes de blocs ou de congères. La frontière est en effet délimitée par des sommets culminant à plus de 2 000 mètres.
L'accord du 20 avril 2022, dont il est question d'autoriser l'approbation, vise principalement à faciliter la réalisation d'aménagements préventifs sur les axes routiers qui desservent la Principauté. Il définit également le financement des études et travaux de prévention des risques naturels, avec la participation de chacune des parties, et précise les modalités de décision concernant le programme de travaux, la hiérarchisation des priorités et le calendrier de réalisation.
La commission des affaires étrangères est saisie d'un projet de loi visant à autoriser l'approbation de l'accord entre la France et l'Andorre, conclu le 20 avril 2022, concernant la viabilité des routes nationales 116, 20, 320 et 22 entre Prades, commune des Pyrénées-Orientales – dont Jean Castex a été le maire – et la frontière franco-andorrane.
La desserte de la Principauté d'Andorre est actuellement assurée par deux axes du réseau routier national français : la route nationale (RN) 20 dans l'Ariège, qui relie Pamiers à l'Andorre et se dédouble vers Perpignan avec la RN320 et, près d'Andorre, avec la RN22, d'une part ; la RN116, seule route bidirectionnelle de bon niveau de service permettant de relier Perpignan à l'Andorre, d'autre part.
Or, au-delà de la ville de Prades, l'environnement immédiat des routes nationales devient montagneux et les RN116, 20, 320 et 22 sont sujettes à d'importants risques naturels : avalanches, formation de congères, chutes de blocs rocheux et glissements de terrain récurrents. Les coupures de la circulation, principalement en hiver, sont ainsi fréquentes et les déviations sont rares ou empruntent des routes sinueuses ne permettant pas le passage des poids lourds.
Pour pallier ces difficultés, l'accord du 20 avril 2022 vise à améliorer et à sécuriser ces axes routiers. Il poursuit, plus précisément, trois objectifs.
Le premier est d'améliorer la résilience climatique et la viabilité de l'accès routier à la Principauté d'Andorre depuis Prades. Il s'agit, concrètement, de recourir à des aménagements préventifs en cours d'identification, tels que des dispositifs contre les chutes de blocs rocheux et des pare-congères, ainsi que la stabilisation de certains secteurs.
Le deuxième objectif consiste à définir l'enveloppe allouée au financement des études et travaux de prévention des risques naturels affectant ces axes routiers, ainsi que la répartition dans le temps de la contribution andorrane. Le budget consacré au maintien de la viabilité des routes concernées s'élève à 18 millions d'euros au total, dont 12 millions pour les aménagements des RN20, 320 et 22, et 6 millions pour ceux destinés à la RN116.
Bien que le projet porte sur des infrastructures entièrement situées sur notre territoire et dont l'État français restera propriétaire, Andorre a accepté de prendre à sa charge une part non négligeable de ce montant, selon un échéancier déjà arrêté, soit 40 % de l'enveloppe de 12 millions et 20 % de celle de 6 millions d'euros. Je tiens à souligner l'importance de cet effort financier pour faire aboutir le projet.
Le troisième et dernier objectif est la fixation des modalités de décision concernant le programme des travaux, la hiérarchisation des priorités et le calendrier de leur réalisation.
La spécificité de l'accord du 20 avril 2022 réside dans l'application de la décision du 4 janvier 2023, publiée au Journal officiel du 8 janvier 2023, déterminant la liste des autoroutes, routes et portions de voies qui sont transférées ou mises à disposition en application des articles 38 et 40 de la loi du 21 février 2022, dite « 3DS ». En effet, la RN116 sera transférée, à compter du 1er janvier 2024, au département des Pyrénées-Orientales, qui exercera notamment la maîtrise d'ouvrage des travaux d'aménagement à compter de cette date.
Les financements définis par l'accord franco-andorran au titre des aménagements de la RN116 seront versés dans leur ensemble, selon les modalités prévues, au département, l'État recueillant préalablement la participation andorrane.
Les RN20, 320 et 22 entrent dans le champ de la mise à disposition expérimentale prévue par l'article 40 de la loi 3DS : ces dernières pourront être mises à la disposition de la région Occitanie à condition qu'une convention entre l'État et la région soit conclue au plus tard le 4 septembre 2023. Le cas échéant, les voies concernées resteront dans le réseau routier national, la région étant uniquement compétente pour l'aménagement, l'entretien et l'exploitation des axes routiers durant toute la durée de l'expérimentation, qui court jusqu'au 20 février 2030. La direction interdépartementale des routes nationales du Sud-Ouest sera également mise à disposition de la région et assurera à ce titre la conduite opérationnelle de la maîtrise d'ouvrage des travaux.
Ces dispositions n'emportent cependant pas de difficultés juridiques particulières. Les deux collectivités concernées ont connaissance de l'accord franco-andorran du 20 avril 2022 et y sont très favorables.
Pour ce qui est de la gouvernance, les décisions seront prises par consensus au sein du comité de pilotage stratégique et du comité technique, auxquels seront associées les collectivités susmentionnées.
S'agissant des éventuelles conséquences environnementales des aménagements envisagés, des études préalables seront réalisées afin d'éviter, de réduire, voire de compenser l'impact du projet. Les projets d'aménagement seront notamment soumis à évaluation d'incidences sur les sites Natura 2000 et sur les espèces et habitats protégés par les directives européennes.
Vous le voyez, cet accord très pratique est bien encadré et ne présente pas de difficultés juridiques particulières. Il devrait permettre de réduire les risques pour la sécurité des usagers et de limiter les coûts de réparation et de dédommagement associés. En évitant les coupures des axes routiers entre la France et l'Andorre, il devrait également favoriser le commerce, l'attractivité et l'activité touristique de part et d'autre de la frontière, notamment pendant la période hivernale.
Enfin, cet accord s'inscrit dans une démarche plus générale de rapprochement entre nos deux pays engagée par la Principauté, qui cherche à rééquilibrer ses relations avec la France après un déclin certain, ces dernières années, au profit de l'Espagne. C'est à ce titre que nous sommes également saisis ce matin du projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre la France et l'Andorre relatif à l'exercice des activités professionnelles des membres de la famille du personnel diplomatique, consulaire, technique et administratif des missions officielles.
Pour toutes ces raisons, je vous invite à voter en faveur de l'approbation de cet accord.
Nous devons nous prononcer sur un projet d'accord qui vise à effectuer des travaux sur les routes reliant la France à l'Andorre. Or, hier, nous apprenions que la France avait réduit ses émissions de gaz à effet de serre de 2,5 % en 2022, un chiffre évidemment en trompe-l'œil. La communauté scientifique s'accorde à dire que cette réduction est très conjoncturelle. Comment aller plus loin dans la réponse à l'urgence climatique ? Il n'y a pas de solution magique. Il faut mesurer systématiquement l'impact des politiques publiques sur l'environnement et tenter de les réduire autant que possible.
À cet égard, le rapport et l'étude d'impact révèlent notre retard. Les routes dont il est question traversent les zones montagneuses, où nous savons que résident des espèces protégées. Or le rapport sur lequel nous devons nous prononcer se cantonne à une aimable pétition de principe selon laquelle il faudra « éviter, réduire et, le cas échéant, compenser l'impact du projet lors de sa mise en œuvre ». Rien ne nous est dit quant aux mesures compensatoires prévues. Plus préoccupant, l'étude d'impact reconnaît l'impossibilité de prévoir l'impact environnemental du projet.
Dès lors, pourquoi vouloir effectuer les travaux au plus vite ? Parce qu'il s'agit de favoriser la pratique des sports d'hiver dans la région ? Parce qu'il faut faciliter les trajets des personnalités qui y résident pour profiter des conditions fiscales avantageuses de la Principauté d'Andorre ? Parce que le maire de Prades, ancien premier ministre, met tout son poids dans la balance ?
Aucune urgence – si ce n'est l'exigence de rénovation de l'ensemble de nos infrastructures routières – ne justifie le vote d'un projet sans une étude d'impact éclairant notre réflexion. En l'absence d'éléments nous permettant de décider en conscience, notre groupe s'abstiendra.
Vous avez raison d'insister sur la prise en compte de l'urgence climatique et de la protection de l'environnement. Je précise qu'il s'agit de travaux ponctuels et d'une ampleur assez réduite, qui permettront de faire face aux risques d'avalanche et de remédier aux difficultés que rencontrent les usagers des routes, principalement en hiver et au printemps. Nous ferons part des remarques que vous avez formulées pour que l'environnement soit respecté.
Nous avons à nous prononcer sur l'approbation d'un accord dont la portée dépasse largement le bon état des routes nationales dans les Pyrénées. Ne nous y trompons pas : soutenir ce projet de coopération entre la France et l'Andorre, ce n'est pas seulement limiter la fermeture de routes enneigées ou éviter que des éboulis ne bloquent la circulation. Approuver cet accord, c'est, en premier lieu, renforcer la relation plus qu'étroite qu'entretiennent la Principauté d'Andorre et la République française depuis plus de quatre siècles. Dans le prolongement d'une tradition fondée par le Béarnais Henri IV, le président de la République française est systématiquement intronisé coprince d'Andorre lors de son élection. En notre qualité de parlementaires français, il est de notre devoir de poursuivre cette œuvre unique d'union institutionnelle et de coopération politique qui caractérise les relations franco-andorranes.
Loin d'être des vestiges du passé, les échanges entre l'Andorre et la France revêtent des enjeux économiques et touristiques majeurs, en particulier pendant la saison des sports d'hiver. Chaque année, près de 8 millions de passagers traversent la frontière, désenclavant les hautes vallées andorranes et assurant un développement commercial vital aux départements de l'Ariège et des Pyrénées-Orientales. En l'absence de gare ou d'aéroport, les réseaux routiers revêtent une importance toute particulière. Les routes nationales relient l'Andorre à la plaine du Roussillon, de Prades jusqu'à Perpignan et à la mer Méditerranée, et assurent une voie de circulation entre la principauté et le cœur de l'Occitanie : Foix, Pamiers et Toulouse.
Dès lors, l'interruption brutale des flux de personnes et de marchandises due à des glissements de terrain, à des chutes de pierres ou à l'apparition de congères s'avère hautement problématique. Sans avoir l'ambition de préserver les routes nationales 116, 22, 320 et 20 de tous les aléas climatiques, l'accord qu'il est question d'autoriser traduit la volonté de nos deux pays de coopérer pour préserver leurs échanges transfrontaliers. Allons de l'avant et accompagnons ces initiatives. Le groupe Démocrate votera en faveur de l'approbation de cet accord.
L'attractivité d'Andorre est due notamment à une différence de taxation, en particulier de taxe sur la valeur ajoutée (TVA). De nombreuses personnes vont y acheter, à des prix beaucoup plus avantageux, des alcools, des tabacs et des produits alimentaires. Cela étant, l'Union européenne est en train de faire pression sur la Principauté, bien qu'elle n'en soit pas un Etat membre, pour parvenir à une harmonisation de la taxation avec l'Espagne et la France.
Ce rapport soulève l'enjeu des relations entre la France et l'Andorre, à partir de la question des voies de communication. Nous savons qu'à Andorre il n'y a ni gare, ni aéroport. Seules les voies routières offrent un accès à ce petit pays. Chaque jour, 20 000 véhicules empruntent les RN116, 20, 320 et 22, ce qui soulève un enjeu de sécurité pour les usagers, d'autant plus que le réchauffement climatique a une incidence sur l'état de la voirie. Pour faire face aux risques d'éboulement, d'avalanche, de chute de pierres et de blocs, ainsi que de glissement de terrain, il faut agir, comme le propose ce protocole, auquel nous souscrivons. Lorsqu'on peut contribuer à assurer la sécurité de manière rapide et efficace, il ne faut pas hésiter.
Cela étant, j'entends les arguments très justes de Clémentine Autain. Nous devons évidemment mener ce projet en respectant les exigences environnementales de 2023. On ne construit pas des ouvrages de sécurité comme on le faisait il y a vingt ans. Je ne doute pas que notre rapporteur y soit très attentif : c'est aussi le sens de son travail.
Nous voterons en faveur de l'accord.
Il est en effet essentiel de prendre toutes les précautions nécessaires pour protéger la flore et la faune, qui sont d'ailleurs mises à mal par des phénomènes comme les avalanches et les glissements de terrain.
Nous nous réjouissons que le gouvernement andorran souhaite renforcer ses liens avec la France, et réciproquement. De multiples entretiens entre les deux chefs de gouvernement ont eu lieu depuis 2018, et ce jusqu'au 20 avril 2022, date à laquelle a été actée la volonté de rapprochement. La proximité géographique et institutionnelle a permis de nombreuses coopérations transfrontalières. Au-delà des accords douaniers et de la coopération en matière de sécurité civile, le dialogue est constant depuis 2017 entre l'Andorre, la France et l'Espagne.
Je veux souligner le rôle des régions Nouvelle-Aquitaine et Occitanie, qui participent, avec l'Andorre et l'Espagne, au projet Interreg Poctefa, qui promeut le développement durable des territoires frontaliers des trois pays.
L'accord qui nous est soumis nous paraît équilibré et pertinent. Il a pour objet d'encadrer les dépenses engagées par chaque partie et de permettre la réalisation des études routières nécessaires et des travaux de prévention, qui profiteront tant à la France qu'à l'Andorre.
Le groupe Horizons et apparentés votera en faveur de l'approbation de l'accord.
Je me réjouis, comme vous, que les représentants des trois pays se soient mis autour de la table et se rencontrent plus fréquemment.
Je partage l'avis des orateurs précédents, à commencer par celui de Clémentine Autain, qui aurait pu m'inciter à m'abstenir. Toutefois, comme mes autres collègues, je voterai en faveur de cet accord car il permet de sécuriser certains sites. J'aurais préféré que l'on nous propose de tirer une voie ferrée pour relier l'Andorre à notre pays plutôt que de s'efforcer de contrôler la nature dans des espaces où elle aura toujours le dernier mot, même si l'on bétonne et si l'on grillage – on n'empêchera ni les éboulements, ni leurs effets car la montagne bouge. Il y aura toujours des tremblements de terre dans les Pyrénées. Le tout est d'éviter qu'ils fassent des victimes. Protéger les usagers de la route est une bonne chose mais il faudra trouver des solutions de remplacement, même si elles supposent des investissements importants : de telles infrastructures sont une survivance du passé ; cela n'est plus tenable.
En ce qui concerne le commerce entre l'Andorre et la France, je me suis rendu une fois dans la principauté, comme tout le monde, à l'époque où je fumais… Maintenant, je n'ai plus de raison d'y aller. D'ailleurs, je paie les taxes en France et je suis un défenseur de l'impôt : il est important de soutenir financièrement notre pays. Je ne suis ni un adepte, ni un défenseur du tourisme commercial. La découverte de la biodiversité et de la culture d'un autre pays, c'est intéressant mais je n'en dirai pas autant d'une ville où il n'y a que des bijoutiers et des vendeurs de tabac et d'alcool.
Le groupe GDR-NUPES votera donc en faveur de l'accord. Nous remercions également Alain David de nous avoir présenté la question avec autant de précision et d'avoir réussi à la rendre intéressante. Il en va de même de vos interventions à tous, chers collègues.
Le type de tourisme qui s'est développé en Andorre peut en effet appeler certaines critiques, encore qu'il y ait des gens à qui cela plaît… La protection de la nature est également un enjeu fondamental ; il faudra trouver d'autres solutions que la route, même si ce n'est pas facile compte tenu des spécificités géographiques du secteur, notamment les dénivelés importants. Quoi qu'il en soit, pour le moment, il n'y a que les routes : il convient donc de s'en occuper.
Merci de m'accueillir pour quelques heures au sein de votre belle commission.
En tant que député des Français de la péninsule ibérique, y compris donc de ceux qui résident dans la Principauté d'Andorre, je suis heureux d'intervenir sur un texte qui permettra d'améliorer concrètement la vie quotidienne de nos concitoyens habitant de part et d'autre de la frontière franco-andorrane.
Nos échanges transfrontaliers avec la Principauté sont importants : la France est le deuxième partenaire commercial de l'Andorre et 8 millions de passagers transitent chaque année par cette frontière, exclusivement en voiture et en autobus. Les axes routiers sont donc essentiels pour le développement économique et touristique d'Andorre, ainsi que des Pyrénées-Orientales.
Puisque l'occasion de m'exprimer m'est offerte, j'en profiterai pour corriger certaines idées reçues, notamment à propos du tourisme andorran. Je vous conseille d'aller dans cette Principauté : on n'y trouve pas seulement des cigarettes et de l'alcool. Les Français et les Espagnols qui s'y rendent découvrent des stations de ski incroyables, les meilleures des Pyrénées, et, en été, le tourisme vert offre des possibilités extraordinaires, notamment dans des parcs naturels fantastiques. Le tourisme n'est donc pas uniquement lié au commerce, même si celui-ci est important, bien entendu, d'autant que de nombreux Français qui vivent et travaillent en Andorre animent ce secteur.
Les axes routiers sont un sujet du quotidien pour les travailleurs frontaliers venant d'Ariège ou des Pyrénées-Orientales, ainsi que pour les 4 000 Français résidant dans la Principauté. L'état de ces infrastructures a un impact sur la capacité de nos compatriotes à se déplacer pour des raisons professionnelles car, contrairement aux idées reçues, ce ne sont pas tous des évadés fiscaux : ils travaillent, emploient, entreprennent ; ils ont parfois besoin, également, de se rendre à des rendez-vous médicaux, notamment à Toulouse. Outre son impact sur le confort des voyageurs, le mauvais état des routes peut présenter des dangers.
La viabilité de certains commerces peut également être mise en cause, particulièrement au Pas-de-la-Case, où de nombreux commerces français vivent du flux de voitures quotidien en provenance de la France puis revenant de l'Andorre.
Avant de m'exprimer devant vous, j'ai réalisé un sondage auprès des Français d'Andorre. Au total, 100 personnes y ont répondu, soit 5 % de nos compatriotes qui y résident. Les résultats sont donc assez représentatifs. À la question : « À quelle fréquence empruntez-vous les liaisons routières qui relient l'Andorre à la France ? », 60 % ont répondu : « Une fois par mois », 20 % : « Une fois par semaine » et 10 % : « Encore plus souvent ». Cela montre l'importance de l'enjeu. Ma seconde question était la suivante : « Quelle route empruntez-vous le plus souvent ? » Sans surprise, près de 90 % empruntent la RN20, qui va vers Toulouse, plutôt que la RN116, qui part vers Prades et Perpignan. Or la situation de la frontière franco-andorrane rend les routes particulièrement sujettes à des coupures, notamment en hiver, du fait d'avalanches, de glissements de terrain, de chutes de blocs et de congères. Il y a quelques années, j'ai moi-même été victime d'un accident lié à des chutes de pierres, même si – je l'avoue – c'était du côté espagnol.
Cet accord constituera donc une amélioration indéniable, aussi bien en matière de sécurité des usagers que de développement économique, et permettra de rétablir une position d'équilibre avec l'Espagne, car de très nombreux Français consultés l'ont confirmé : l'accès du côté français est beaucoup plus souvent bloqué, empêché ou ralenti que du côté espagnol.
À l'évidence, nous nous prononcerons en faveur de l'accord.
Merci pour ces précisions qui reflètent l'expérience du terrain : vous nous avez fait part de la manière dont vivent ces personnes, ainsi que des contraintes auxquelles elles sont confrontées. L'hiver, en particulier, les conditions de circulation sont assez aléatoires.
Au-delà des stéréotypes, il s'agit en effet de gens normaux, ayant les mêmes problèmes que tout le monde. Vous avez eu raison de le rappeler.
En tant que député d'Occitanie et membre du groupe d'amitié France-Andorre, je précise qu'il est très injuste de réduire ce pays à une « Principauté supermarché ».
Le projet de loi est nécessaire car il répond à des problèmes de sécurité : comme le souligne l'exposé des motifs, les routes nationales reliant l'Andorre et la France subissent depuis plusieurs années une augmentation des risques naturels tels que les épisodes de gel puis de dégel, les glissements de blocs et les congères, qui causent des coupures régulières. Ainsi, en janvier, la circulation a été fortement perturbée sur la RN20, reliant l'Ariège à l'Andorre, à cause de conditions météorologiques difficiles. Des tirs préventifs ont été nécessaires en raison du risque d'avalanche et des coupures sont intervenues.
Celles-ci sont fréquentes, ce qui est pénalisant pour les flux de marchandises et les échanges touristiques, et certains épisodes ont été plus violents encore, portant atteinte à la sécurité des usagers. En l'espace de trente ans, une dizaine d'avalanches ont été recensées, dont quatre ont touché des véhicules et mis directement en danger les personnes. La sécurité et la prévention des accidents sont des éléments essentiels, qui démontrent le bien-fondé de l'accord : assurer la sécurité de tous nos concitoyens est une priorité.
L'accord s'inscrit également dans la logique de deux précédents accords conclus avec l'Andorre et ratifiés par le Parlement, visant à renforcer la coopération en matière de sécurité civile, d'une part, et en matière policière et douanière, d'autre part.
Toutefois, dans la mesure où la charge liée aux travaux est importante pour la France, vous nous permettrez d'émettre certaines réserves quant à la définition du programme. Compte tenu du niveau de notre dette publique, nous ne saurions accepter un manque de clarté en la matière. Dans la partie de l'étude d'impact intitulée « Objectifs de l'accord », on lit la phrase suivante : « Le programme d'amélioration de la résilience climatique et de la viabilité de l'accès à la Principauté d'Andorre n'est pas encore précisément défini ». Nous souhaitons nous assurer que le programme va dans le sens des intérêts français, ce qui n'est pas clair pour le moment. Il est important de connaître le détail des améliorations et stabilisations qui seront proposées. Le Rassemblement national déterminera sa position en fonction de la réponse que vous voudrez bien lui apporter.
J'ai exposé en détail le problème routier ; vous avez bien compris tout l'intérêt qu'il présentait. Pour le reste, des négociations sont en cours pour améliorer notre coopération avec l'Andorre. La France et l'Europe voudraient aller plus loin, en particulier en matière de liberté de circulation des personnes et des biens, car nous avons toujours une frontière douanière avec l'Andorre, ce qui n'est pas le cas avec l'Espagne. L'enjeu est donc de normaliser cette situation pour que les habitants soient traités de la même façon d'un côté et de l'autre de la frontière. C'est un travail de longue haleine.
Article unique (approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté d'Andorre concernant l'amélioration de la résilience climatique et de la viabilité des routes nationales 116, 20, 320 et 22 liées aux risques naturels entre Prades et la frontière franco-andorrane, signé à Paris le 20 avril 2022)
La commission adopte l' article unique non modifié.
L'ensemble du projet de loi est ainsi adopté.
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Projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté d'Andorre relatif à l'exercice des activités professionnelles des membres de la famille du personnel diplomatique, consulaire, technique et administratif des missions officielles (n° 872)
(M. Stéphane Vojetta, rapporteur)
À l'instar d'un accord similaire passé avec le Kosovo, dont nous avons récemment débattu, l'accord dont il est ici question d'autoriser l'approbation s'inscrit dans la stratégie, engagée en 2015 par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères, visant à permettre aux conjoints des agents affectés à l'étranger de travailler sur place sans préjudice de leur statut diplomatique ou consulaire ou de certaines immunités associées.
Au total, plusieurs centaines de familles d'agents publics pourraient bénéficier de ce dispositif, essentiellement des conjoints – ou partenaires de pacte civil de solidarité (PACS) – de fonctionnaires du ministère de l'Europe et des affaires étrangères. Dans le cas de l'Andorre, sa portée s'annonce très limitée, puisque l'ambassade de France en Andorre et son homologue andorrane à Paris comptent chacune quatre agents expatriés, deux agents andorrans étant de surcroît en poste à Strasbourg. Autant dire que nous faisons dans la dentelle…
Je me réjouis d'avoir l'occasion de parler de l'Andorre car ce n'est pas tous les jours que cela arrive : la principauté, si proche de nous à tant d'égards, est sans doute le moins connu de nos voisins – même le Luxembourg, représenté ici, en quelque sorte, par Philippe Guillemard, dont la circonscription est frontalière, l'est beaucoup plus…
Il m'appartient donc de vous présenter l'accord conclu par la France avec la Principauté d'Andorre concernant l'exercice des activités professionnelles des membres de la famille du personnel diplomatique, consulaire, technique et administratif des missions officielles. Cet accord, négocié à l'initiative de l'Andorre, a été signé le 4 mai 2021. Son approbation a déjà été autorisée par le Sénat ; il nous est demandé d'en faire de même.
L'Andorre est une « coprincipauté parlementaire » dont l'évêque d'Urgell – ville frontalière située du côté espagnol – et le président de la République française sont les coprinces. Elle a pour langue officielle le catalan et pour monnaie l'euro. Le pays n'appartient pas à l'espace Schengen, ce qui explique l'existence de postes-frontières, dont la traversée est problématique en cas de forte affluence. En dépit de sa taille modeste, l'Andorre est active dans les instances internationales. Elle est membre des Nations Unies et de l'Organisation internationale de la francophonie, et a déjà exercé la présidence du Comité des ministres du Conseil de l'Europe.
Nos liens avec l'Andorre sont étroits. Le système d'enseignement français y fait partie intégrante du service public, où il coexiste avec les systèmes andorran et espagnol ; 3 500 élèves environ y sont scolarisés. Pour mettre les choses en perspective, je précise que 75 000 personnes environ résident en Andorre, dont une majorité d'étrangers : Espagnols, Portugais et Français, principalement.
La France est le deuxième client et le deuxième fournisseur d'Andorre, très loin derrière l'Espagne – hélas ! –, mais devant l'Allemagne et la Chine. La vitalité de la relation bilatérale entre nos deux pays s'est traduite par la conclusion de plusieurs accords importants au cours des dernières années, notamment un traité tripartite de bon voisinage, d'amitié et de coopération incluant aussi l'Espagne, et deux accords signés en 2014, l'un de coopération et d'assistance mutuelle en matière de sécurité civile, et l'autre de coopération douanière et policière.
Un sujet compte encore plus pour les Andorrans : le soutien de la France au processus devant mener à un accord d'association avec l'Union européenne. Monaco, autre pays situé dans ma circonscription, est engagé dans le même processus, ainsi que Saint-Marin.
Pas seulement ! Les Français qui habitent à Monaco sont des contribuables français et restent résidents fiscaux français. Monaco est tout sauf un paradis fiscal pour eux.
Si nous restons un interlocuteur majeur pour l'Andorre, nous sommes néanmoins en perte de vitesse par rapport à notre voisin espagnol. En 2022, l'Espagne a fourni plus de 65 % des importations de biens de l'Andorre et a été destinataire de plus de 76 % de ses exportations de biens, loin devant nous. La Catalogne, en particulier, a réussi à devenir le partenaire quotidien de l'Andorre, en s'appuyant sur une proximité géographique, culturelle, démographique et linguistique. Les résidents espagnols sont sept fois plus nombreux que les résidents français et un grand nombre de ressortissants espagnols ont été nommés à des responsabilités clés dans la Principauté. En outre, des représentants de la diaspora andorrane font souvent carrière en Espagne, notamment à Barcelone, puis reviennent en Andorre pour y exercer des postes importants au sein du gouvernement à la suite de processus démocratiques, notamment des élections.
Les étudiants de l'Andorre, même lorsqu'ils sont issus de l'enseignement secondaire français, choisissent souvent, eux aussi, de poursuivre leur formation dans les universités espagnoles. La génération montante, formée pendant vingt ans en Espagne, a par conséquent moins d'attaches avec la France. Il y a là un point de vigilance pour nous et pour le Quai d'Orsay ; celui-ci en est d'ailleurs conscient.
Pour en venir plus précisément à l'accord, de nombreuses conventions similaires ont déjà été conclues par la France, et la commission des affaires étrangères n'a pas manqué d'en autoriser l'approbation. Leur objet ne peut qu'être salué, puisqu'il s'agit d'autoriser, sur une base de réciprocité, les membres de la famille du personnel diplomatique, consulaire, technique et administratif des missions officielles à occuper un emploi pendant la durée d'affectation des agents concernés. Ces accords contribuent ainsi à une meilleure conciliation entre la vie privée et la vie professionnelle de ces agents et de leurs familles.
Il faut en effet avoir à l'esprit que les conjoints et les autres membres de la famille du personnel des ambassades et des consulats sont régis par un statut spécial. Ils séjournent dans le pays d'accueil en vertu d'un titre dérogatoire au droit commun et bénéficient de certaines garanties juridiques, notamment des immunités pénales. Ce statut est fixé par les conventions de Vienne du 18 avril 1961 et du 24 avril 1963 relatives aux relations diplomatiques et consulaires. Les privilèges et immunités dont bénéficient ces personnes ont souvent pour effet de dissuader d'éventuels employeurs de les embaucher, privant ainsi les familles d'un complément de revenu parfois précieux.
L'accord dont il est question d'autoriser l'approbation, comme les précédents qui ont été conclus, facilite l'exercice d'un travail par le conjoint ou le membre de la famille. Celui-ci reçoit l'autorisation d'exercer une activité professionnelle tout en conservant le titre de séjour spécial que lui confère son statut de conjoint d'agent d'une mission officielle. Il garde donc les privilèges et immunités prévus par les conventions de Vienne. Toutefois, en ce qui concerne spécifiquement son emploi, il ne peut plus se prévaloir d'une immunité de juridiction civile ou administrative. S'il garde concernant son emploi une immunité de juridiction pénale, l'État d'accueil peut cependant, en cas de délit grave, demander la levée de cette immunité ; l'État d'envoi doit alors examiner sérieusement cette demande.
L'accord détaille la procédure à suivre pour se voir octroyer l'autorisation d'exercer un emploi. La demande doit émaner de l'État d'envoi et être adressée à l'État d'accueil. Elle peut être refusée dans les cas où, pour des raisons de sécurité, d'ordre public ou de sauvegarde des intérêts de l'État, seuls des ressortissants de l'État d'accueil peuvent être embauchés. Ainsi, en Andorre, il existe une certaine préférence nationale pour des emplois bien déterminés.
La personne concernée est soumise à la législation sociale et fiscale de l'État d'accueil. L'autorisation accordée ne la dispense pas de satisfaire aux obligations liées à l'activité en cause, par exemple en matière de diplômes ou de qualifications professionnelles. Le champ de l'accord inclut aussi bien les diplomates que le personnel technique et administratif des ambassades et des consulats. C'est d'ailleurs pour la famille du personnel de ces catégories que la question se pose réellement : il ne s'agit pas uniquement de permettre à l'épouse de l'ambassadeur d'exercer une profession susceptible d'occuper ses nombreuses heures perdues. Le personnel administratif peut être confronté à des difficultés de logement. En Andorre, par exemple, le logement est rare et cher, du fait des caractéristiques géographiques et sociologiques du pays. La possibilité pour un membre de la famille d'exercer une activité professionnelle aide à équilibrer le budget familial.
L'activité concernée peut être salariée ou non salariée ; l'accord inclut aussi les professions libérales. Quant aux « membres de la famille », ce peuvent être aussi bien les conjoints ou partenaires liés par un contrat d'union légale que les enfants célibataires âgés de moins de 21 ans, ou encore les enfants présentant un handicap physique ou mental et vivant à la charge de leurs parents.
En résumé, l'accord soumis à notre vote ne peut apparaître que bienvenu au regard des avantages qu'il est appelé à procurer aux personnes concernées et à leurs familles. Quand un agent part à l'étranger, son conjoint est souvent obligé d'interrompre sa carrière, avec les difficultés que cela implique pour la renouer ensuite. Le dilemme est alors soit pour l'un de renoncer à la décision d'expatriation, soit pour l'autre de sacrifier sa carrière. L'accord en question a pour but de répondre à ces difficultés. Il est de nature à contribuer à l'unité des familles et à la poursuite de l'objectif de parité entre les conjoints.
Certes, en l'espèce, la portée concrète de l'accord peut paraître modeste, dans la mesure où l'ambassade de France en Andorre ne compte que quatre agents, de même que l'ambassade de l'Andorre en France – auxquels s'ajoutent deux agents affectés auprès du Conseil de l'Europe, à Strasbourg ; mais l'approbation de l'accord du 4 mai 2021 permettra aux conjoints des intéressés, s'ils le souhaitent, d'exercer une activité professionnelle, ce qu'aucun d'entre eux, jusqu'à présent, n'avait pu faire. Pour nos compatriotes affectés en Andorre, cela peut être particulièrement intéressant car le coût de la vie y est élevé, alors que l'indemnité d'expatriation qui leur est versée est la plus faible accordée pour une mobilité en Europe, étant donné le faible éloignement.
Cet accord contribuera aussi à la poursuite de l'objectif d'égalité femmes-hommes, puisque la proportion de conjoints féminins accompagnant un agent à l'étranger est plus forte que celle de conjoints masculins dans la même situation. En cela, l'accord franco-andorran du 4 mai 2021 s'inscrit dans le cadre du plan d'action triennal 2021-2024 du ministère de l'Europe et des affaires étrangères en faveur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
Pour toutes ces raisons, son approbation me paraît particulièrement opportune. Je vous invite donc à adopter le projet de loi qui l'autorise.
Notre commission a effectivement ratifié un grand nombre d'accords bilatéraux de ce genre, qui sont techniques mais pas si simples à négocier, puisqu'ils créent des sujets juridiques un peu bizarres, qui dépendent du droit local dans certains cas et qui en sont protégés dans d'autres. Comme député des Français établis hors de France, je sais combien il importe de clarifier ces situations.
Vous l'avez dit, cet accord contribuera à la poursuite de l'objectif d'égalité entre les femmes et les hommes. Dans de nombreux pays, les accords de ce type, qui favorisent l'activité des conjoints ou conjointes de nos diplomates, ont pour effet de renforcer nos équipes ; et ils permettent aussi, en contrepartie, de mieux intégrer les conjoints des diplomates étrangers présents en France. Cette conception d'une diplomatie, d'un corps diplomatique et d'un personnel diplomatique plus imbriqués dans la société qui les accueille est très importante. Pour toutes ces raisons, et pour celles que nous avons souvent rappelées dans cette enceinte, le groupe Démocrate votera pour cet accord.
Je vous remercie de votre soutien. Il importe effectivement d'offrir au corps diplomatique et consulaire des perspectives de carrière qui intègrent leur famille, si l'on veut susciter des vocations parmi nos hauts fonctionnaires et nos diplomates et nous assurer que notre diplomatie d'influence continue d'attirer les meilleurs profils.
Cet accord s'inscrit dans la droite ligne de la stratégie engagée en 2015 par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères de modernisation de notre diplomatie. Il succède aux accords conclus avec les États-Unis, le Canada, le Brésil, l'Argentine, ou encore le Kosovo. Les députés du groupe Socialistes et apparentés se sont toujours prononcés en faveur de l'adoption de ces textes car ils permettent d'accroître l'attractivité des métiers de la diplomatie et des carrières diplomatiques et de faciliter la vie des conjoints et des conjointes de nos agents. Nous voterons donc aussi pour cet accord.
Signé le 4 mai 2021, l'accord qui nous est soumis vise à faciliter le quotidien de notre personnel diplomatique et de celui de l'Andorre, pays ami. Si la procédure d'approbation est en cours dans notre pays, cet accord n'a pas encore été approuvé par le Parlement andorran. Il affine les conventions de Vienne de 1961 et 1963, qui organisent notamment les relations diplomatiques. Si ces conventions protègent le personnel diplomatique, elles prohibent également l'exercice d'activités lucratives dans l'État de résidence ; et l'exercice d'un travail rémunéré peut neutraliser certaines immunités.
Dès 2015, le ministère de l'Europe et des affaires étrangères a souhaité moderniser le cadre d'expatriation de ses agents, en permettant aux membres de leur famille de poursuivre une carrière professionnelle dans le pays d'expatriation. Au-delà de l'espace économique européen, vingt-sept États ont, à ce jour, signé avec la France des accords similaires à celui que nous examinons. Permettre aux conjoints de nos agents diplomatiques d'exercer une activité professionnelle, c'est répondre à leur aspiration légitime à travailler ; c'est aussi leur permettre d'améliorer leurs conditions de vie matérielles, sachant qu'en Andorre, les diplomates français sont confrontés au coût élevé de l'immobilier. Le groupe Horizons et apparentés votera en faveur de l'approbation de cet accord.
Il est vrai que le coût de l'immobilier est très élevé en Andorre. Le marché de l'emploi y est également très dynamique : on ne va pas en Andorre seulement pour profiter d'un taux d'imposition très bas mais aussi pour y travailler. Le taux de chômage n'y est que de 2 %. Les activités principales sont l'hôtellerie, le tourisme, le commerce mais aussi l'administration. L'État andorran est solide et emploie de nombreux Français. Je vous l'ai dit, la population active andorrane est majoritairement composée de ressortissants étrangers, en premier lieu d'Espagnols mais aussi de Portugais. Or les Portugais de l'Andorre ne sont pas des expatriés fiscaux, pas plus que ceux du Luxembourg. Les Français font également partie de la population active en Andorre et j'espère que, grâce à ce projet, les conjoints de nos agents diplomatiques et consulaires pourront prendre part à cette économie dynamique.
Je me bornerai à indiquer que le groupe de la Gauche démocrate et républicaine-NUPES votera pour l'approbation de cet accord.
Je suis très heureux de m'exprimer au sujet de l'Andorre car c'est là que, pour la première fois de ma vie, j'ai vu la neige. Pour un ultramarin, c'est toujours un moment très marquant.
De multiples accords ont été signés entre nos deux pays, allant de la gestion commune de l'eau à la coopération douanière et policière, en passant par l'amélioration de la viabilité des routes. Celui que nous examinons ici vise à renforcer notre étroite collaboration avec l'Andorre en favorisant l'exercice des activités professionnelles des membres de la famille du personnel diplomatique, consulaire, technique et administratif des missions officielles.
Conformément aux priorités du programme de modernisation du ministère de l'Europe et des affaires étrangères en matière de gestion des ressources humaines, cet accord a pour objectif de faciliter l'exercice d'une activité professionnelle des membres de la famille du personnel diplomatique et consulaire, dans le respect des législations du droit du travail de l'État d'accueil. Il s'agit de favoriser l'expatriation des agents en poste à l'étranger en facilitant l'exercice d'une activité professionnelle par leur conjoint. Cette coopération au service des officiers diplomatiques ayant pour effet de consolider les relations bilatérales entre la France et l'Andorre, le groupe Renaissance votera pour l'approbation de cet accord.
Puisqu'on évoque les relations bilatérales, je veux vous dire à quel point l'équilibre institutionnel entre l'Andorre, la France et l'Espagne est fin et fait partie de la vie constitutionnelle andorrane. Le rôle des coprinces est prépondérant dans la vie publique andorrane, même si l'évêque d'Urgell et le président de la République française se déplacent rarement en Andorre.
Pas à ma connaissance. J'ai accompagné le président de la République en septembre 2019, lors de son déplacement en Andorre. La tradition veut que les coprinces, lorsqu'ils visitent l'Andorre, passent par ses sept paroisses ; je n'ai pas croisé l'évêque à cette occasion.
Puisqu'il est question des coprinces, je dois mentionner un point de désaccord entre eux. Vous savez sans doute que l'Andorre est l'un des derniers pays en Europe, et même dans le monde, à ne pas considérer l'avortement comme un droit. À l'évidence, cette position correspond davantage aux idées de l'un des coprinces mais le peuple andorran a la main sur cette question. En tant que puissance voisine, amie et respectueuse des institutions andorranes, nous devons respecter cette position, tout en attendant que le peuple andorran choisisse peut-être, un jour, dans l'expression de sa souveraineté démocratique, de mettre fin à cette exception.
C'est une remarque tout à fait importante et pertinente. La majorité, c'est la moitié des voix plus une. Lorsqu'on est deux, il est plus difficile de dégager une majorité…
L'accord que nous examinons est un peu particulier, puisqu'en vertu d'une survivance historique qui remonte à Charlemagne, le président de la République est à la fois le chef de l'État français et le coprince d'Andorre. En l'état, l'intérêt de cet accord est très limité, puisque l'ambassade d'Andorre en France ne compte que quatre agents, sans enfants ni conjoint enregistrés auprès du protocole du ministère de l'Europe et des affaires étrangères, et que, de l'autre côté de la frontière, l'ambassade de France en Andorre compte quatre agents expatriés, dont deux ont une conjointe.
À l'article 2, deux éléments dénotent par rapport aux accords précédemment conclus avec d'autres pays. Il est précisé que l'accord s'applique, en Andorre, à « tout membre de la famille déclaré sous tutelle ou curatelle par le biais d'une décision judiciaire qui présente un handicap physique ou mental et dispose également d'un titre de séjour spécial ». Étant donné que les deux paragraphes précédents concernent expressément les enfants, faut-il comprendre, avec cette mention des « membres de la famille », que les agents pourront amener leurs frères, voire leurs cousins, à l'étranger pour qu'ils puissent y travailler ? À l'article 2, toujours, il est spécifié que l'accord vise uniquement les activités professionnelles « impliquant l'obtention d'un bénéfice économique », c'est-à-dire un salaire. Cela signifie que les enfants du personnel diplomatique ne pourront pas faire de stage dans le pays d'accueil, puisqu'ils sont rarement rémunérés. Peut-être faudrait-il apporter une précision à ce sujet ?
Les articles 3, 4 et 5 exposent la procédure et le cadre juridique de l'emploi ; les articles 6 et 7 précisent les modalités d'extinction des immunités civiles, administratives et pénales dans le cadre de l'activité professionnelle. Il est surprenant de voir que la France restreint sa zone d'exercice professionnel. Pourquoi l'article 8 définit-il une clause territoriale pour l'emploi différente pour la France et l'Andorre ? Enfin, les articles 9 et 10 traitent du règlement des différends et de l'entrée en vigueur de l'accord.
Monsieur le rapporteur, nous voterons ce texte, mais pourriez-vous répondre à mes questions techniques ?
Je vous remercie pour votre travail de fond sur le texte : c'est vraiment de la dentelle, pour reprendre l'expression du président de la commission !
La disposition relative aux personnes sous tutelle ou curatelle s'applique, selon ma compréhension, à la famille directe : elle ne devrait donc concerner que les enfants, et non les cousins ou les oncles des agents détachés.
S'agissant de la clause territoriale, il va de soi qu'il ne serait pas très pratique, pour une personne résidant en Andorre, d'aller travailler quotidiennement en Guadeloupe, à la Martinique, à la Réunion, en Guyane ou à Mayotte.
Au sujet du stage, enfin, nous avons eu l'occasion dernièrement, avec ma collègue Nadège Abomangoli, de travailler à la définition de certains types d'activité professionnelle sur les réseaux. Le « bénéfice économique » ne se confond pas avec le salaire stricto sensu. Il est beaucoup plus large, si bien que certains aspects du stage pourraient être considérés comme un bénéfice économique, direct ou indirect. Les stages devraient donc entrer dans le cadre de cet accord, sans que cela pose de problème particulier.
Cet accord va permettre aux membres de la famille du personnel diplomatique et administratif de nos deux représentations officielles de travailler, en France et en Andorre. Il ne pose pas de difficulté particulière et nous en avons déjà examiné de semblables. Il facilitera le quotidien de nombreux agents dévoués, au service de la diplomatie française. C'est donc une forme de reconnaissance de leur travail et, surtout, une aide indispensable pour les familles qui sont amenées à les suivre. Dans votre rapport, vous notez que cet accord bénéficiera surtout aux femmes, puisque la proportion de conjoints féminins accompagnant un agent à l'étranger est plus forte que celle de conjoints masculins dans la même situation. C'est donc une bonne mesure pour l'égalité professionnelle.
Nous souhaitons toutefois vous alerter sur un point précis, directement lié à la question du droit des femmes. Vous avez rappelé que l'Andorre est, avec Malte et le Vatican, le seul pays européen à interdire totalement l'accès à l'avortement. « Tel prince, telle religion » : chaque État est souverain. On risque toutefois de se retrouver dans une situation ubuesque, puisque la France est sur le point d'inscrire le droit à l'interruption volontaire de grossesse (IVG) dans sa Constitution, alors que M. Macron est le coprince d'un pays où c'est illégal.
Tous les ans, plus de 120 femmes vivant en Andorre doivent faire le déplacement à leurs frais jusqu'en Espagne ou en France pour avorter. Il y a vingt jours, Amnesty International a tiré la sonnette d'alarme à propos du cas de Vanessa Mendoza Cortés, qui pourrait être jugée pour avoir dénoncé l'interdiction de l'IVG. Elle devrait échapper à la prison mais risque une amende qui pourrait atteindre 30 000 euros. La position de l'Andorre sur la question de l'IVG est préjudiciable à la condition des femmes. Nous espérons que, dans le cadre de la réactivation par la France de sa diplomatie féministe, la question de l'accès des femmes de l'Andorre à l'IVG sera à l'ordre du jour des échanges entre nos deux pays. Cela étant dit, nous voterons évidemment ce texte.
C'est effectivement une question importante. Alors que notre Parlement, au terme du parcours que l'on sait, vient de voter un texte transpartisan qui sanctuarise le droit des femmes à avorter, l'Andorre, pays voisin et ami, dans lequel la France joue un rôle institutionnel, reste l'un des très rares pays qui fait encore exception à une règle que l'on voudrait voir répandue universellement, celle du droit des femmes à disposer de leur corps.
Lors de sa dernière visite, en septembre 2019, Emmanuel Macron a été interpellé sur cette question par des jeunes gens, qui lui ont demandé de soutenir le processus d'autorisation de l'avortement en Andorre. Il n'a pu que répéter qu'en tant que coprince, il se devait d'être le garant du respect des institutions et, surtout, de la souveraineté andorranes. Des élections ont eu lieu en Andorre la semaine dernière, qui ont confirmé le gouvernement de centre droit de Xavier Espot. C'est au peuple andorran de se prononcer ; c'est aux partis politiques andorrans d'inscrire cette question importante à l'ordre du jour et de créer un consensus. La France, en pays ami et respectueux de ce voisin souverain, peut avoir une opinion, mais elle n'a pas à influer sur les affaires intérieures de l'Andorre. Cette question doit rester entre les mains du peuple andorran.
Il est vrai que la situation de l'Andorre est un peu paradoxale, compte tenu de la position de l'Espagne et de la France sur la question du droit à l'IVG. Mais je ne crois pas que la constitutionnalisation, en France, de la liberté de la femme de recourir à l'interruption volontaire de grossesse changera quoi que ce soit. De toute manière, cela ne concerne pas l'Andorre.
Ce qu'on peut se demander, c'est ce qui se passerait si les autorités démocratiques représentatives de l'Andorre exigeaient une modification de la loi. Le coprince français y serait évidemment favorable, mais sans doute pas l'évêque d'Urgell. Dans ce cas, je ne sais pas comment les choses se passeraient sur le plan institutionnel.
Je n'ai pas dit que le président de la République française devait avoir une forme de prééminence sur le droit andorran. Je soulignais seulement que la constitutionnalisation de l'IVG intervient en France alors que l'Andorre ne reconnaît pas ce droit. Je ne disais rien de plus et ne remettais certainement pas en cause la souveraineté de l'Andorre.
Si le coprince était le roi d'Espagne, et non l'évêque d'Urgell, la situation serait sans doute différente.
Les Andorrans sont contre l'IVG, mais sont-ils en faveur du mariage pour tous ? Cette question me paraît importante, dans la mesure où cet accord concerne les conjoints.
Le texte fait référence de façon très claire aux conjoints, que ce soit dans le cadre d'un mariage ou d'un PACS.
Article unique (approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté d'Andorre relatif à l'exercice des activités professionnelles des membres de la famille du personnel diplomatique, consulaire, technique et administratif des missions officielles, signé à Andorre-la-Vieille le 4 mai 2021)
La commission adopte l' article unique non modifié.
L'ensemble du projet de loi est ainsi adopté.
La séance est levée à 10 h 25
Membres présents ou excusés
Présents. - M. Damien Abad, Mme Nadège Abomangoli, Mme Clémentine Autain, Mme Véronique Besse, M. Carlos Martens Bilongo, M. Jean-Louis Bourlanges, M. Jérôme Buisson, M. Sébastien Chenu, Mme Mireille Clapot, M. Alain David, Mme Julie Delpech, M. Pierre-Henri Dumont, M. Nicolas Dupont-Aignan, M. Frédéric Falcon, M. Olivier Faure, M. Nicolas Forissier, M. Thibaut François, M. Guillaume Garot, Mme Maud Gatel, M. Hadrien Ghomi, Mme Olga Givernet, M. Philippe Guillemard, M. Michel Guiniot, Mme Marine Hamelet, M. Joris Hébrard, M. Alexis Jolly, Mme Brigitte Klinkert, Mme Stéphanie Kochert, Mme Amélia Lakrafi, M. Jean-Paul Lecoq, M. Sylvain Maillard, Mme Emmanuelle Ménard, M. Nicolas Metzdorf, Mme Nathalie Oziol, M. Frédéric Petit, M. Kévin Pfeffer, M. Jean-François Portarrieu, M. Adrien Quatennens, Mme Laurence Robert-Dehault, M. Vincent Seitlinger, Mme Ersilia Soudais, Mme Michèle Tabarot, M. Patrick Vignal, M. Stéphane Vojetta, M. Lionel Vuibert, M. Frédéric Zgainski
Excusés. - M. Louis Boyard, M. Moetai Brotherson, M. Bruno Fuchs, M. Hubert Julien-Laferrière, M. Tematai Le Gayic, Mme Marine Le Pen, M. Vincent Ledoux, M. Laurent Marcangeli, M. Bertrand Pancher, Mme Mathilde Panot, Mme Barbara Pompili, Mme Sabrina Sebaihi, M. Aurélien Taché, Mme Liliana Tanguy, Mme Laurence Vichnievsky, M. Éric Woerth, Mme Estelle Youssouffa