Délégation aux droits des enfants

Réunion du mardi 21 novembre 2023 à 13h30

Résumé de la réunion

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  • enfance
  • mineurs
  • sexuelle

La réunion

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La séance est ouverte à 13 heures 30

Présidence de Mme Perrine Goulet, Présidente de la délégation

La Délégation aux droits des enfants auditionne Mme Charlotte Caubel, secrétaire d'État auprès de la Première ministre chargée de l'Enfance.

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Hier était la journée internationale des droits de l'enfant et ce matin notre délégation a rencontré une trentaine d'enfants, avec la présidente de l'Assemblée nationale et vous-même, madame la secrétaire d'État chargée de l'enfance. Je me félicite du lien constructif que nous avons noué avec vous. C'est en effet la troisième fois que nous avons le plaisir de vous auditionner.

Je me félicite également de la publication du jaune budgétaire sur les politiques de l'enfance, qui permettra de mieux identifier l'effort consenti par l'État. Il apparaît en outre pertinent que ce document mentionne le concours apporté par les départements, qui s'occupent de la protection de l'enfance au quotidien.

L'expérimentation dans dix départements des comités départementaux pour la protection de l'enfance (CDPE) est une avancée, tout comme les CPPE, les contrats départementaux de prévention et de protection de l'enfance, signés par le préfet, le président du conseil départemental et le directeur de l'ARS (agence régionale de santé). Je vous renouvelle mon souhait de renforcer les moyens à disposition des administrations déconcentrées. Nous avons obtenu dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2024 :10 ETP à destination de ces dix départements, mais il faudra aller plus loin. Selon quel calendrier seront-ils déployés ?

Par ailleurs, comment mieux accompagner les jeunes majeurs ? C'est un enjeu important, quand on sait que 61 % des adolescents de 15 ans placés en établissement sont inscrits dans un niveau relevant du premier cycle, voire du niveau élémentaire. Que contient votre pacte ?

Lors du dernier comité interministériel à l'enfance (CIE), la Première ministre a annoncé un nouveau plan de lutte contre les violences faites aux enfants pour la période 2023-2027. Quels en sont les contours ? Quelles sont les missions de l'Office mineurs (Ofmin) ?

La loi du 7 février 2022 relative à la protection des enfants entre progressivement en application, puisque 60 % de ses décrets ont été pris, soit un taux au-dessus de la moyenne de 52 % relevée par le Sénat en 2022. Qu'en est-il des 40 % restants, notamment pour ce qui concerne l'encadrement de l'hébergement hôtelier ? Aurélien Taquet nous avait expliqué qu'un délai de deux ans était nécessaire à la bonne organisation des départements. Quand ce décret sera-t-il pris et entrera-t-il bien en vigueur en janvier 2024 ?

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Charlotte Caubel, secrétaire d'État auprès de la Première ministre, chargée de l'enfance

Madame la présidente, je vous remercie sincèrement pour l'organisation de cette troisième audition, au lendemain d'une journée qui nous oblige tous à garder comme boussole les droits des enfants tels qu'ils ont été recensés, à l'initiative de la France, dans la Convention internationale des droits de l'enfant (CIDE). C'est pour moi l'occasion de vous présenter l'action du Gouvernement et de mettre en perspective ce que nous souhaitons faire à la suite du troisième comité interministériel à l'enfance que nous avons tenu hier. Mais c'est aussi l'occasion de saluer tout le travail fait par votre délégation depuis sa création, il y a un peu plus d'un an. Merci pour la visibilité que vous donnez aux droits des enfants !

Permettez-moi de revenir sur le troisième comité interministériel à l'enfance – beaucoup de mes collègues m'envient d'en tenir autant ! – qui a réuni onze ministres, moi-même et la Première ministre sur les sujets relatifs à l'enfance. Nous y avons redit nos priorités, tout en dressant le bilan de ce qui avait été fait. Il a permis de prendre, pour la première fois, la mesure des chiffres précis sur l'engagement de l'État et des départements en faveur de l'enfance, grâce à un jaune budgétaire dont vous aviez voté le principe il y a un an. Il a aussi été l'occasion de lancer, pour la période 2023-2027, un nouveau plan de lutte contre les violences faites aux enfants, dont la Première ministre s'est saisie personnellement. Elle en a fait un combat. Comme je l'avais souhaité, nous avons présenté nos actions en direction des enfants les plus vulnérables, au premier rang desquels les enfants protégés par l'aide sociale à l'enfance (ASE) mais aussi ceux en situation de handicap.

S'agissant du jaune budgétaire, j'avais demandé, à l'occasion du précédent PLF, que nous puissions obtenir des chiffres précis sur l'ensemble des financements dédiés à l'enfance. Nous savons désormais que les politiques publiques consacrées à l'enfance représentent 158 milliards d'euros, soit 10 % des dépenses publiques – État, sécurité sociale et collectivités territoriales confondus. Sans surprise, l'éducation et les branches solidarité que sont la sécurité sociale, la famille et la CNSA (Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie) représentent une très large part de ces dépenses, avec 140 milliards d'euros. La justice des mineurs et le logement des enfants vulnérables représentent 2 milliards, ce qui n'est pas une somme anodine.

J'ai souhaité qu'apparaissent aussi les dépenses dédiées aux enfants les plus vulnérables qui représentent 26 milliards d'euros, dont les quelque 9 milliards que les départements consacrent à l'aide sociale à l'enfance, les 8 milliards de l'éducation nationale pour les plus fragiles, dont l'école inclusive, et les 7 milliards dédiés aux enfants en situation de handicap. Grâce à vous, grâce à nous, l'État est financièrement engagé sur les sujets de l'enfance. Les éléments budgétaires le prouvent, mais l'action au quotidien du Gouvernement aussi, je l'espère.

Concernant la lutte contre les violences faites aux enfants, certains regretteront un nouveau plan. Mais je crains que pour inverser la tendance nous ne soyons obligés d'en faire plusieurs. Celui-ci s'inscrit évidemment dans la continuité de ce que nous faisons depuis 2019 et a toujours le même objectif : protéger les enfants contre toutes les formes de violence, qui sont, comme nous le savons, polymorphes. Nous avons renforcé les moyens.

Nous avons inauguré, avec le ministre de l'intérieur et la Première ministre, l'office dédié aux violences faites sur les mineurs. Composé jusqu'alors de trente-cinq policiers, il en comptera quatre-vingt-cinq dans les jours qui viennent, du fait du regroupement de plusieurs services et de son renforcement. Il conduira les enquêtes les plus complexes, notamment sur les réseaux pédocriminels qui œuvrent en France et dans le monde ; il sera le point de contact en matière de coopération avec les acteurs internationaux, notamment les plateformes luttant contre la pédocriminalité en ligne ; il sera aussi le point de contact des acteurs de l'enfance, qui ont annoncé vouloir travailler davantage avec les associations et les acteurs publics, au premier rang desquels les départements ; il aura un rôle de coordination et d'impulsion voire de soutien dans les enquêtes pour l'ensemble des services de gendarmerie et de police chargées de la lutte contre les violences faites aux enfants, que ce soit les services de premier niveau ou les services spécialisés comme les brigades des mineurs ou les maisons de protection des familles. Son rôle sera très important pour rendre nos enquêtes plus efficaces, les prioriser, définir leur stratégie, ainsi que pour diffuser l'information et la doctrine de la Ciivise (commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants), selon le vœu de celle-ci.

Nous avons aussi renforcé les moyens de la justice et de la police, dans la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur, lequel est fortement en tension compte tenu de l'explosion des faits, des révélations et de la sensibilité générale aux violences faites aux enfants. Au titre de la prévention, nous avons décidé de renforcer les moyens mis dans les campagnes de communication. Celle sur l'inceste, conçue avec les associations, a eu un fort impact. Elle a permis une prise de conscience générale des chiffres inacceptables en matière de violences sexuelles. Grâce à vous, j'ai obtenu les crédits qui permettront de la poursuivre en mode sécurité routière. Ainsi, vous verrez encore au cinéma des campagnes permettant de mesurer, hélas, l'ampleur du problème.

Le ministre de l'éducation nationale a saisi le Conseil supérieur des programmes (CSP) pour toutes les questions d'éducation – à la vie affective pour les plus petits, sexuelle pour les plus grands. La protection des enfants face à toutes les formes de violences doit innerver ce parcours que nous souhaitons faire commencer très petit. Il ne s'agit pas de faire de l'éducation sexuelle dès le premier âge mais de la prévention aux agressions sexuelles, qui démarrent extrêmement tôt.

Nous avons renforcé les dispositifs de prévention et d'écoute : 36 ETP supplémentaires pour renforcer le dispositif Signal-Sports qui est très important, un enfant sur sept étant victime d'agression dans le monde sportif ; douze écoutants supplémentaires pour le 119 d'ici à la fin de 2024 ; quatorze pour le 3018 – des plateformes qui sont maintenant bien identifiées pour recueillir la parole de l'enfant.

Un vaste plan de formation interministériel est en cours dans les ministères les plus concernés – éducation, sport, justice, intérieur, culture. De futurs référents « formation aux violences sur les enfants » sont eux-mêmes formés pour être les interlocuteurs privilégiés dans chaque ministère. Nous souhaitons qu'un socle de formation soit partagé par tous les professionnels, comprenant le bloc Ciivise, mais aussi des informations sur d'autres formes de violences.

La Première ministre a acté l'extension des UAPED (unités d'accueil pédiatrique enfance en danger) dans tous les départements, en complément des salles Mélanie et des maisons des familles des gendarmes, afin d'être au plus près des victimes. Nous voulons renforcer les centres spécialisés dans la prise en charge du psychotraumatisme. On a pu mesurer, grâce aux travaux de la Ciivise, l'effet destructeur des violences subies par les enfants et l'importance de ces centres. Nous souhaitons également conserver la ligne d'écoute dédiée aux victimes adultes qui ont subi des traumas dans leur enfance.

L'autre volet important du CIE, c'est le renforcement de notre action en faveur des enfants vulnérables et protégés, grâce à quatre axes forts. Le premier, c'est la création de Scolarité protégée. Nous savons que, dès le début de la scolarisation des enfants confiés à des établissements ou à des familles d'accueil, nous ne faisons pas ce que nous devrions : il faut renforcer la présence de l'école aux côtés de ces enfants. À cette fin, le ministre de l'éducation nationale et moi-même avons annoncé un budget de 15 millions d'euros que nous prenons symboliquement sur celui du plan d'investissement. Le deuxième axe, c'est la généralisation de Santé protégée, et nous développerons Santé psy protégée, qui nous semble essentielle.

Le troisième axe concerne le champ du handicap, avec le renforcement de la contractualisation entre la protection de l'enfance, État, département et ARS et un doublement de l'enveloppe dédiée aux enfants protégés en situation de handicap, pour 50 millions d'euros. Le quatrième axe, c'est la création du pacte « jeune majeur », avec la constitution d'un pack d'informations pratiques, numériques et sur papier, sur leurs droits, qui leur sera remis dans leur dix-septième année, pour qu'ils sachent concrètement à qui s'adresser et comment construire leur post-majorité.

Au-delà du rappel des démarches à effectuer et du recensement des dispositifs existants, nous avons annoncé un soutien financier « coup de pouce » de 1 500 euros pour les jeunes majeurs sortant de l'ASE afin de faciliter leur accès à l'autonomie. Vous savez que les conditions d'attribution du pécule prévues par la loi de 2016 sont injustes : les enfants qui n'ont pas de famille n'ont pas de pécule, dans la mesure où celui-ci dépend de l'allocation de rentrée scolaire. Orphelins et pupilles de l'État n'en reçoivent pas. Pour d'autres raisons, les enfants des familles qui n'ont pas d'allocation n'ont pas de pécule non plus. Alors que 700 euros étaient versés, en moyenne, à ces enfants, nous passons à 1 500 euros, en veillant à ne priver personne des droits acquis.

Les annonces que nous avons faites au CIE sont des annonces sur lesquelles nous avons travaillé. Nous n'avons pas voulu préempter le temps politique que la Première ministre a annoncé il y a quelques jours devant les départements de France, qui aura lieu avant les vacances de fin d'année. Nous réunirons les ministres les plus engagés – santé, éducation nationale, intérieur et justice – et les départements pour un temps politique fort, de sorte qu'État et départements s'alignent sur les priorités et les moyens à définir pour sortir de la crise de la protection de l'enfance. Ce qui s'est dit hier n'est pas une réponse à la crise que nous traversons, ce sont des points apportés par l'État aux départements. Nous aurons un engagement politique beaucoup plus fort au mois de décembre.

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Nous passons aux questions des orateurs de groupe.

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Parmi les mesures prévues, je souhaiterais revenir sur la mobilisation de l'État en faveur des enfants protégés et vulnérables. Ma première question porte sur la création du dispositif Scolarité protégée, dont la feuille de route est partagée entre l'école et les acteurs de la protection de l'enfance pour soutenir la réussite et l'ambition scolaire des enfants protégés. Pourriez-vous revenir plus amplement dessus ?

D'autres actions visant à accompagner ces enfants dans la citoyenneté et l'insertion sont également développées. Il est notamment question de mentorat, de parrainage et d'éveil républicain. L'école peine à accomplir sa mission essentielle de formation de citoyens républicains. Ce constat est d'autant plus fort pour les enfants protégés et vulnérables. Quelles sont les orientations prévues en la matière ?

Enfin, une enveloppe significative de plus de 230 millions d'euros a été mobilisée pour aider les départements à financer leurs dépenses de protection de l'enfance et d'aides à l'autonomie. Quelles sont les relations entre l'État et les départements en matière de protection de l'enfance ?

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La sextorsion, le pédopiégeage ou grooming, les contenus pédopornographiques sont autant de nouveaux pièges numériques utilisés par des prédateurs en ligne qui menacent nos enfants. Bien souvent, les parents sont insuffisamment informés et armés face à ces nouveaux dangers. Des enfants, parfois âgés de moins de 13 ans, accèdent aux services proposés par les entreprises du numérique et y livrent des données sensibles sur eux-mêmes, des images, des vidéos ou des informations sur leur identité. Ils peuvent alors être approchés par des prédateurs sexuels qui obtiennent des contenus intimes puis menacent de les diffuser ou de les exploiter ou qui les contactent pour obtenir leur confiance et, à terme, des faveurs sexuelles.

Le 7 novembre dernier, de nombreuses entreprises du numérique – Meta, Google, Twitch, Discord, Roblox – ont lancé un programme commun visant à lutter contre l'exploitation sexuelle des mineurs, le projet Lantern permettant d'informer les différentes sociétés membres lorsqu'un utilisateur sera identifié comme malveillant afin de procéder à un filtrage. Que pensez-vous de cette coalition ? Quel lien votre ministère, et plus largement le Gouvernement, compte-t-il entretenir avec ce programme ? Et, même s'il y a lieu de se féliciter d'une telle initiative, quels garde-fous la France mettra-t-elle en place pour éviter toute dérive de la part de ces entreprises privées ? Une telle innovation ne traduit-elle pas l'incapacité des États à lutter efficacement contre la pédopornographie en ligne ?

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Madame la ministre, je vais vous dire ma déception et ma colère, à la suite de ce troisième comité interministériel à l'enfance. Les annonces ne sont absolument pas à la hauteur ! Rien sur le fait que des enfants dorment dans la rue, partout dans notre pays. Rien sur le fait que des enfants sont privés de scolarité faute d'AESH (accompagnant d'élève en situation de handicap). Il faudrait attendre décembre pour avoir des annonces politiques sur la protection de l'enfance. Ce secteur s'est littéralement effondré, parce que les professionnels partent, parce qu'il n'y a plus de places, parce que les enfants ne sont plus protégés – les mesures ne sont plus exécutées et des milliers d'enfants attendent à leur domicile d'être accompagnés.

Face à cet effondrement, que nous répondez-vous ? Création de postes dans le 119. Mais il y a déjà des postes qui ne sont pas pourvus ! Le problème, c'est l'attractivité. À quel moment allez-vous annoncer des hausses de salaire et un supplément de considération pour les professionnels de la protection de l'enfance ? Vous nous annoncez 1 500 euros pour la majorité de ces enfants. Mais les départements ne respectent même pas la loi Taquet de février 2022 sur la protection de l'enfance et n'accompagnent pas les jeunes jusqu'à leurs 21 ans grâce au contrat jeune majeur ! Vous nous annoncez une cérémonie pour la majorité, juste avant de les mettre à la rue. On attend des annonces sur les salaires des professionnels ; on attend du recrutement d'assistantes familiales ; on attend des places ; on attend que les départements fassent leur travail de protection ou, à défaut, que l'État le fasse à leur place.

Le délai d'accueil dans une pouponnière, dans le Puy-de-Dôme, se situe entre dix-huit et vingt-quatre mois. Les capacités d'accueil sont dépassées, la rotation des personnels est quotidienne et les enfants développent des syndromes d'hospitalisme. La situation est déplorable. Vos annonces me mettent excessivement en colère, ainsi que toutes les associations que je consulte depuis hier. Décembre, c'est trop tard, c'est maintenant qu'il faut agir. J'attends des annonces claires, des moyens, des recrutements, un discours politique à la hauteur ! Les enfants sont en danger et l'État est un très mauvais parent.

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La prostitution des mineurs est un phénomène en expansion qui nécessite une attention particulière. Les chiffres, inquiétants, sont bien en-deçà de la réalité. Chaque année, 7 000 à 10 000 mineurs seraient touchés.

En novembre 2021, un premier plan national voyait le jour, suivi, en août 2022, par une grande campagne de sensibilisation. Pourtant, la situation continue de se dégrader.

Dans les Alpes-Maritimes, l'association Agir pour le lien social et la citoyenneté a recensé, en quatre mois à peine, vingt-sept mineurs azuréens – vingt-quatre filles, trois garçons – en situation de prostitution soupçonnée ou avérée. Ils étaient âgés de 14 à 17 ans, mais on sait que l'entrée dans la prostitution est souvent antérieure. L'une des rares constantes dégagées par l'étude est que ces adolescents ont subi un traumatisme dans leur enfance, parfois plusieurs, de la violence intrafamiliale à de premiers rapports sexuels dans un contexte d'agression. De plus, même si les jeunes issus de milieux défavorisés sont surreprésentés, aucune origine sociale ne semble épargnée.

Que comptez-vous faire pour endiguer enfin ces phénomènes inquiétants ?

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En cette semaine particulièrement importante pour les droits des enfants, notre délégation est très fière et heureuse de vous recevoir, madame la secrétaire d'État. Le plan 2023-2027 de lutte contre les violences faites aux enfants est une pierre supplémentaire à l'édifice que nous bâtissons ensemble pour protéger et promouvoir les droits de l'enfant. Je salue le travail fourni depuis votre nomination. Votre écoute est précieuse, je la crois sincère et l'engagement de l'ensemble du Gouvernement au service de ce plan représente un signal fort et attendu par la société.

Concernant les violences éducatives ordinaires, nous avions évoqué ensemble la nécessité, également soulignée par les associations, d'une campagne d'information pour accompagner la loi du 10 juillet 2019. Cet objectif se concrétise ; c'est une avancée notable pour l'information aux parents. Comment cette campagne se déroulera-t-elle ?

Le plan encourage à juste titre l'activité physique et sportive chez les enfants. La prévention en santé, essentielle, passe par le mouvement et s'apprend dès le premier âge. Pourriez-vous détailler les mesures phares dans ce domaine ?

Enfin, la Ciivise recommande l'imprescriptibilité des violences sexuelles faites aux enfants. Je soutiens cette idée depuis mon premier mandat. Notre collègue sénateur Xavier Iacovelli a déposé une proposition de loi en ce sens. Avez-vous reconsidéré la question ?

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Charlotte Caubel, secrétaire d'État

Madame la présidente, s'agissant de la gouvernance et de la coordination, j'ai installé vendredi à Marseille le neuvième comité départemental pour la protection de l'enfance. Nous avons décidé d'affecter les 10 ETP à la création de postes de délégués départementaux à la protection de l'enfance qui seront recrutés dès que possible, tout début janvier. La fiche de poste est prête. Il s'agira de cadres experts placés auprès des préfets pour assurer la coordination avec les départements, les préparatifs de la contractualisation et appliquer localement le plan de lutte contre les violences et les plans de lutte contre la prostitution. Ce sont des acteurs très importants pour nous.

Si j'ai voulu concentrer les moyens sur ces dix CDPE, c'est parce qu'il existe dans ce domaine une coresponsabilité et que les choses se jouent sur le terrain, avec les différents acteurs : les départements pilotes de la protection de l'enfance ; l'État, doté de sa responsabilité régalienne, qui inclut la sécurité, la justice, l'éducation nationale et la santé, sans compter la politique de la ville, essentielle pour les enfants ; enfin, le secteur associatif, très présent et actif.

J'aurai une première réunion avec l'ensemble des représentants des préfets pour avoir des témoignages sur les premiers CDPE, installés plus rapidement – il faut toujours des dialogues politiques pour arriver à nos fins.

En ce qui concerne les décrets d'application de la loi du 7 février 2022 sur la protection de l'enfance, depuis ma nomination, je travaille l'ensemble des projets de décret avec Départements de France ; c'est constructif, mais cela peut prendre un peu de temps, parfois trop. Au cours des derniers mois, marqués par des tensions, beaucoup de décrets étaient en attente d'une confirmation par Départements de France. C'est pourquoi nous avons pris un peu de retard, outre la technicité de certains décrets.

Parmi les décrets qui ont suscité beaucoup d'échanges sans beaucoup de résultats figure celui sur les hôtels. L'obligation étant fixée au 1er janvier 2024, le décret provisoire que nous avions prévu de prendre pour la période 2022-2024 nous a paru désormais sans objet : nous publierons le décret définitif avant le 1er janvier. Il ressort de l'expérience des dix départements CDPE qu'aucun ou presque ne met plus à l'hôtel de mineurs de moins de 16 ans présentant une fragilité. Restent ceux de 16 à 18 ans, souvent des mineurs non accompagnés issus de l'immigration – ils font l'objet d'un travail que nous sommes en train de finaliser avec les départements –, et les personnes se prétendant mineurs non accompagnés, un sujet qui demeure devant nous.

Tous les décrets auront paru avant le 1er janvier, à l'exception, comme toujours, de ceux sur les fichiers, qui font l'objet de longs échanges avec la Cnil (Commission nationale de l'informatique et des libertés).

En ce qui concerne le dispositif Scolarité protégée, cher Éric Poulliat, notre objectif est de garantir un dialogue entre école et département, par l'intermédiaire d'un référent à l'ASE et d'un autre à l'éducation nationale. Le but est de simplifier le quotidien : il n'est plus possible qu'un gamin loupe une sortie scolaire parce qu'il n'a pas la signature de son père ou de sa mère, qui, de toute façon, ne viendra que quinze jours plus tard. Il s'agit aussi d'accélérer les procédures d'inscription et de réinscription, notamment quand les enfants subissent des ruptures dans leur placement, donc dans leur affectation scolaire : on ne peut pas les laisser pendant des semaines sans école – c'est de moins en moins le cas dans certains territoires, mais pas dans tous. Les référents ASE et éducation nationale contribueront à construire des formations communes sur la protection de l'enfance, mais aussi sur les enjeux spécifiques de chaque territoire – par exemple, certains sont davantage touchés par la prostitution, même si plus aucun n'est épargné par le phénomène.

Plus important encore : les 15 millions – contre 400 000 euros auparavant – consacrés aux appels à projets sur la scolarité. L'idée est de renforcer l'aide aux devoirs et les temps d'évaluation de chaque enfant, sous la forme de rendez-vous réguliers au cours de leur scolarité pour faire le point sur leurs progrès, sur leurs difficultés et sur leurs souhaits d'orientation.

Certains enfants ne pouvant plus aller à l'école, le Cned (Centre national d'enseignement à distance) va monter un dispositif pour leur permettre d'assister à certains modules et d'en être récompensés, même si cela ne fait pas partie de leur parcours scolaire. Le Cned développera aussi un accompagnement pour les éducateurs et pour les personnels des structures de foyers.

Il était essentiel de poser cette première brique avec le ministre de l'éducation nationale pour y ajouter ensuite celle de l'enseignement supérieur. Il y a quelques jours encore, on a gentiment conseillé de faire un BTS à une jeune fille qui se destinait à une grande école. À ces enfants, déjà moins présents que les autres dans l'enseignement secondaire, on préconise de faire des études supérieures courtes pour être très vite autonomes ; ce n'est plus acceptable. La Première ministre y est particulièrement sensible.

Concernant les relations entre État et départements, la Première ministre a consacré à la protection de l'enfance un quart de son discours devant Départements de France. Elle a annoncé que l'aide à la prise en charge des personnes se prétendant mineurs non accompagnés serait portée à 100 millions. Il s'agit aussi de formaliser une méthode de travail.

On peut trouver le temps trop long, madame Marianne Maximi ; il me pèse autant qu'à vous : dans ce domaine, on n'agit jamais assez vite. Je suis sur le terrain, moi aussi, je vois la situation des éducateurs et des enfants. Je me suis déjà rendue dans quarante-deux départements – pas encore dans le Puy-de-Dôme, mais j'irai bientôt.

L'idée de cette méthode de travail est la suivante. Nous avons des compétences et des responsabilités partagées. Les départements – qui ne veulent pas de la recentralisation – ne sont pas seuls responsables, non plus que l'État. Il nous faut un accord, au-delà des constats. J'ai refusé la tenue d'états généraux, car les constats sont unanimes ; c'est du concret qu'il faut, maintenant. Cela suppose de s'accorder sur les chiffres. Que l'on avance, au lieu de se regarder en chiens de faïence.

L'attractivité des métiers est un enjeu central. C'est aussi la mission des CDPE que de s'occuper des professionnels sur le terrain. Les questions de handicap, également essentielles, bénéficient d'une enveloppe de 50 millions.

Que les départements ne nous demandent pas de reprendre les délinquants, les enfants en situation psychologique difficile, les étrangers et de leur laisser les enfants qui iraient bien – de toute façon, par définition, ils ne vont pas bien.

Je compte sur ces échanges, et j'aurai à mes côtés – la Première ministre s'y est engagée – les ministres les plus concernés : ceux de la santé, de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur, du travail, de la justice et de l'intérieur. Parmi les sujets essentiels, il y aura les mineurs non accompagnés, un problème qui nous frappe à nouveau de plein fouet ; à Marseille, on a atteint un point de bascule. Il faut s'y atteler au lieu de se renvoyer la responsabilité.

Madame Caroline Parmentier, le combat à livrer dans le champ du numérique est en effet très important. À l'occasion du Paris Peace Forum, nous avons fait, avec Jean-Noël Barrot, ministre chargé de la transition numérique, le bilan de la première année du Laboratoire pour la protection de l'enfance en ligne, une priorité fixée par le Président de la République lui-même lors de notre prise de fonctions. Le but est de responsabiliser les plateformes et de faire évoluer la législation. Les textes importants qui ont été défendus par Jean-Noël Barrot et par les députés Erwan Balanant, Bruno Studer et Laurent Marcangeli constituent désormais un corpus ; en la matière, la France est un pays précurseur en Europe. Dialogue, responsabilité, absence de naïveté, voilà l'esprit de nos relations avec les plateformes. Et quand je les interpelle à propos d'un contenu qui me paraît délirant, comme ce jeu stupide qui consiste à se pincer la joue pour marquer sa peau, elles réagissent. Elles ont conscience du fait qu'un élément fondamental est entre leurs mains.

En ce qui concerne la santé mentale et les écrans, nous travaillons à des propositions que le Président de la République se réserve d'annoncer. En tout cas, nous devons tous mener ce combat. Le ministre de l'éducation nationale va généraliser la plateforme Pix à partir du CM2 ; je lui ai même dit qu'il pouvait attaquer dès le CM1 – la plupart des enfants de 9 ans ont déjà un smartphone.

Il est un peu plus difficile de toucher les parents, selon leur niveau social et leurs capacités linguistiques. Tous ont conscience du problème – des mamans en pied de tour me parlent de leur gamin qui reste sur le canapé au lieu d'aller jouer au foot –, mais il faut encore réussir à leur apporter les bonnes informations. Le ministre de l'éducation nationale et Jean-Noël Barrot travaillent à un Pix pour les parents, mais ne risque-t-il pas de ne toucher que les CSP+ ?

Quant au programme Lantern, compte tenu de la stratégie du Président – dialoguer sans naïveté –, on ne peut pas ne pas prendre en considération la démarche que viennent de faire les plateformes. On sait ce qui les stimule – quarante États américains ont assigné Meta en justice pour avoir nui à la santé mentale des enfants. En tout cas, le dialogue existe : nous avons des relations nourries avec les responsables des relations publiques des plateformes. Toutes sont représentées au sein du Laboratoire pour la protection de l'enfance en ligne. Le PDG de TikTok a eu une rencontre bilatérale avec le Président de la République et je crois qu'il a compris le message. Cette diplomatie à la fois internationale et technologique a permis d'avancer en matière de terrorisme et de haine en ligne, et son bilan n'est pas négatif concernant la protection de l'enfance.

Madame Marianne Maximi, beaucoup a été fait pour les enfants en situation de handicap, même si, bien sûr, certains éléments sont insuffisants. Le ministère de l'éducation nationale a travaillé sur le statut de l'AESH, dont la formation et la revalorisation sont une réalité ; le problème est que l'on aura bientôt plus d'AESH – ils sont 30 000 – que de professeurs des écoles ! Dans certaines classes, il y en a deux ou trois. L'enjeu – nous en avons conscience, le ministre de l'éducation nationale, Fadila Khattabi, chargée des personnes handicapées et moi-même – est d'apporter le médico-social dans les écoles, mais pas nécessairement dans les classes, et d'offrir aux enfants des parcours en classe ordinaire et dans la classe spécialisée au même endroit.

Dans le cadre de la Conférence nationale du handicap, 50 000 nouvelles solutions médico-sociales ont été annoncées, dont une partie est destinée aux enfants et une partie à ceux de l'ASE. Ce sont des centaines de millions d'euros pour les enfants en situation de handicap, en plus du budget consacré à l'école inclusive depuis le début du quinquennat. Tout le monde s'est saisi du problème, car on repère de plus en plus d'enfants porteurs de troubles du neurodéveloppement ou de troubles du comportement pouvant être liés à des troubles de l'apprentissage ou à des violences dans les familles. Nous rattrapons un énorme retard, car rien n'avait démarré avant 2017.

En ce qui concerne les violences éducatives ordinaires, nous avons décidé que la référence à la loi et les numéros utiles figureraient expressément dans le carnet de grossesse et dans le carnet de santé. Nous maintenons la contractualisation dans les entretiens pré- et postnataux. Dans ces différents cadres, nous aborderons aussi le numérique : en ce qui concerne les bébés et le téléphone, la situation est catastrophique – après les perches à selfie, on voit maintenant des perches devant les poussettes !

S'agissant des campagnes, je n'ai pas encore tout à fait arbitré, mais la prochaine concernera sans doute le sport, ce qui permettra de parler des violences sexuelles, ainsi que des violences psychologiques et ordinaires et du rapport à la compétition. Comme pour la campagne 2023, nous allons mettre tous les acteurs autour de la table, réfléchir au sens du message que l'on veut faire passer et discuter avec les associations concernées.

Concernant le logement d'urgence, nous n'avons jamais eu autant de places. Le problème est qu'il n'y a pas assez de personnes qui sortent du dispositif. Le flux migratoire reprend, de sorte que des mineurs non accompagnés, ou des personnes qui prétendent l'être, et des familles arrivent en continu ; il nous faut les héberger. Nous avons décidé d'attribuer à chacun des vingt départements qui assurent 90 % de l'hébergement d'urgence 4 ETP correspondant à des postes de travailleurs sociaux et deux coordinateurs expressément voués à s'occuper des familles accueillies à l'hôtel. Cela permettra de renforcer notre action pour le retour ou l'accueil à l'école. L'année dernière, nous avions ainsi récupéré 3 000 enfants non scolarisés. Il s'agit aussi de repérer les problèmes de santé associés au mal-logement. Il n'est pas acceptable que des enfants dorment dans la rue, mais ce ne sont pas les mêmes qui y restent : la plupart du temps, ils sont issus de l'immigration très récente, et le problème est le flux et le passage au logement pérenne pour des personnes qui ne sont pas toujours en situation régulière. Le respect des obligations relatives au logement social dans nos villes est un autre enjeu.

Concernant l'imprescriptibilité des violences sexuelles contre les enfants, je ne peux pas m'autoriser à avoir un point de vue ferme et déterminé. Il y a la douleur des victimes qui n'ont pas pu parler et qui parlent trop tard, à laquelle s'ajoute le problème de l'amnésie traumatique ; il y a aussi les criminels sériels dont on identifie les méfaits à un moment donné et dont les anciennes victimes ne peuvent pas être considérées comme des victimes par la justice. Vous avez beaucoup fait en matière de prescription : pour les faits les plus graves, les criminels peuvent être poursuivis trente ans après la majorité de la victime.

Les violences sexuelles doivent-elles rejoindre les crimes contre l'humanité au rang des faits imprescriptibles dans notre pays ? C'est un débat sociétal, qui relève du Parlement. C'est un choix qui ne peut pas m'appartenir. Les personnes concernées sont détruites, elles s'appellent elles-mêmes les survivantes.

Il y a un deuxième sujet sur lequel je m'interroge. Pardonnez-moi de faire appel à mes compétences d'ancienne magistrate, mais ne risquons-nous pas de créer de la frustration chez certaines personnes qui se verraient à nouveau déboutées par la justice pour la simple raison que plus les années passent, moins on a de témoins et plus il est difficile d'établir des faits ? Le problème se pose déjà aujourd'hui avec une prescription de trente ans. Les faits auront beau être imprescriptibles, que faire si les témoins et les lieux n'existent plus ? La justice établit la culpabilité des individus en fonction des éléments dont elle dispose à la date à laquelle elle est saisie. Je n'apporte pas de réponses, je pose des questions qui pourront être soulevées et faire l'objet d'un travail plus approfondi lors de l'examen de la proposition de loi de M. Xavier Iacovelli, dont je soutiens l'engagement.

Ce n'est pas seulement une question de moyens, même si l'on peut évidemment se demander comment prioriser toutes les enquêtes supplémentaires susceptibles d'être ouvertes. L'Ofmin reçoit chaque semaine 500 signalements de pédocriminalité en ligne, de vidéos où des petits enfants de moins de 2 ans se font violer. On ne peut donc pas avoir de réponse sûre. En choisissant de rendre certains crimes imprescriptibles, on enverra un message aux victimes, mais gardons-nous de créer de la frustration. Du reste, l'approche du délai de prescription pousse parfois certaines personnes à parler. Encourageons surtout les gens à parler plus vite, plus tôt, pour que leur vie entière ne soit pas détruite ! Je voudrais que les femmes et les hommes de notre pays puissent parler et obtenir réparation avant l'âge de 90 ans ! Comprenez bien que de nombreux éléments de niveaux différents doivent être pris en compte dans ce débat, que je ne peux pas trancher. Ce faisant, je ne me défausse pas de mes responsabilités : je dis juste que la question me dépasse.

J'en viens au sujet de la prostitution des mineurs, qui n'a pas été approfondi par la Ciivise. Ce phénomène, qui explose, en dit long sur le rapport des enfants à leur corps et à leur sexualité, sur la vulnérabilité de ces mineurs et sur le rapport des adultes aux enfants. Effectivement, on est loin du cas de la jeune fille de 17 ans qui en fait 24 parce qu'elle s'habille comme si elle était plus âgée ! Je ne cesse de demander aux procureurs de renvoyer aux assises, conformément à la loi, les affaires impliquant un majeur et une fille ou un garçon de moins de 15 ans. Ce n'est pas parce qu'une relation est tarifée qu'elle échappe à la loi, qui veut qu'il n'y ait pas de consentement avant l'âge de 15 ans.

Sur certains aspects, cette question rejoint les sujets migratoires, mais elle ne s'y réduit pas – on sait qu'elle touche aussi nos campagnes et les jeunes filles de tout niveau social. Elle fera l'objet d'une stratégie gouvernementale puisque nous sommes en train d'élaborer, notamment avec la mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains (Miprof), un plan de lutte contre la prostitution, des majeurs comme des mineurs, et que nous allons y consacrer des moyens. N'en faisons pas un combat seulement féminin. Peut-être faudrait-il approfondir ce sujet dans un cadre plus large – en créant une « Ciivise 2 » ?

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Nous en venons aux questions des autres députés.

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Pouvez-vous revenir sur un aspect abordé hier à la fin des annonces que vous avez faites avec la Première ministre, celui de l'attention particulière que nous devons accorder aux enfants des outre-mer ? Philippe Vigier, ministre des outre-mer, y reviendra, mais vous êtes aussi concernée au premier chef au titre de la protection de l'enfance. Mme Perrine Goulet et moi-même nous sommes rendues fin juillet à Mayotte, où la situation est très préoccupante.

Je ne développerai pas la deuxième question que j'avais prévu de poser au sujet de la formation des équipes de l'ASE.

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J'aimerais rebondir sur la question de Mme Caroline Parmentier sur la pornographie, les réseaux sociaux et les publicités au contenu hypersexualisé. Je reviens à la charge contre le site www.onsexprime.fr, destiné aux jeunes de 11 à 18 ans et conçu sous l'égide de Santé publique France, un établissement public placé sous la tutelle du ministère de la santé et de la prévention. Plusieurs de ses contenus risquent de produire l'inverse de l'effet escompté.

Je suis assez choquée que ce site, dont la première page comporte les mots « Pratiques sexuelles, positions : comment on fait ? », soit accessible à des jeunes de 11 ans. Certes, la mention « déconseillé aux moins de 12 ans » apparaît sur la vidéo de présentation, mais il n'y a pas une très grande différence entre 11 et 12 ans.

« À quel âge peut-on commencer à faire l'amour ? » Le site répond qu'il n'y a pas d'âge, que le bon âge est celui où l'on se sent prêt. Cela peut être très angoissant pour un enfant de 11, 12 ou 13 ans – sans doute les concepteurs du site n'en ont-ils pas vu depuis longtemps. Il me semble compliqué d'entamer sa vie sexuelle de la sorte.

À mon avis, le public auquel le site s'adresse n'est pas le bon. De nombreux concepts incompréhensibles pour les jeunes risquent de susciter quelques questions délétères. Néanmoins, les responsables du site ont fait quelques efforts : ils ont retiré les petits cartons colorés relatifs à la brouette chinoise et au bateau ivre. Les enfants de 11 ans ne peuvent donc plus voir ces représentations du Kamasutra.

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Ma question est en même temps une alerte. Des responsables de maternités de Seine-Saint-Denis m'ont décrit des cas gravissimes de femmes enceintes et de nourrissons en situation de sans-abrisme. J'ai appris à cette occasion que les services de l'État dans ce département avaient décidé de diminuer de 2 000 le nombre de nuitées hôtelières dont dispose le 115 pour mettre des personnes à l'abri. Dès lors, et bien que la priorité soit donnée aux cas les plus graves – le 115 n'acceptait déjà que les femmes enceintes de plus de sept mois ou avec un enfant de moins de trois mois –, plus personne ne peut plus être pris en charge, car lorsqu'un individu quitte un hébergement d'urgence, la place est fermée et il n'est plus possible d'y faire entrer quiconque. Une alerte est donc lancée par les maternités, qui essaient de garder les personnes aussi longtemps que possible mais se trouvent contraintes de remettre à la rue des femmes avec des nourrissons. Approuvez-vous cette diminution des places disponibles ? Par ailleurs, ne pensez-vous pas que l'augmentation de la mortalité infantile est liée à ce genre de décision ?

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Même si nous avons progressé en matière de formation des forces de gendarmerie et de police s'agissant du traitement des violences faites aux femmes, de nombreuses personnes restent à former en matière de repérage et de signalement. En effet, c'est souvent le signalement qui pose problème, y compris pour les professionnels de santé soumis au secret professionnel.

J'aimerais aussi revenir sur les trois séances annuelles d'éducation à la sexualité, une obligation qui n'est généralement pas respectée. Le contenu de cet enseignement n'est pas mauvais, même s'il doit être amélioré. Peut-être faudrait-il le confier à des intervenants extérieurs aux établissements, plus à l'aise avec les enfants.

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Depuis quelques mois, plusieurs départements sont débordés par l'afflux important de mineurs non accompagnés. On parle beaucoup des Alpes-Maritimes, mais tel est aussi le cas du Territoire de Belfort, contraint de refuser d'accueillir des jeunes. De même, les départements des Hautes-Alpes, de la Savoie et de la Haute-Savoie, ainsi que les villes de Lyon et de Paris, sont aujourd'hui sous tension. La prise en charge de ces mineurs présente pour les départements un coût très élevé, qui dépasse largement le montant estimé lors du vote des lois de décentralisation. Il y a quelques semaines, face à ce constat, vous vous étiez déclarée prête à envisager la recentralisation de la protection de l'enfance. Où en sont aujourd'hui vos réflexions ?

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Articulée autour de six objectifs, la feuille de route du nouveau plan de lutte contre les violences faites aux enfants présenté hier prévoit de « développer les données et les connaissances pour améliorer la prévention des violences et la protection des enfants ». Il s'agit notamment de réaliser enquêtes et travaux sur les violences faites aux enfants, d'améliorer les transmissions d'informations et de disposer de données permettant de prévenir les infanticides – la recherche de données sur les infanticides va en effet de pair avec leur éradication.

Dans le champ du handicap aussi, des infanticides sont commis, même si le contexte est bien différent. Ils impliquent des parents à bout, en détresse totale, pour qui la seule issue est de mettre fin aux jours de leur enfant, puis, souvent, aux leurs. Mes propos n'excusent en rien cet acte effroyable ; cependant, nous devons absolument prendre conscience du fait que leur situation se distingue d'autres cas de violences. Le Gouvernement entend-il se pencher sur le sujet spécifique des infanticides commis sur des enfants en situation de handicap et adapter en ce sens les enquêtes prévues pour recueillir des données ?

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Depuis trois à quatre semaines, quand nous faisons des maraudes à Limoges, le vendredi soir, nous tombons sur cinq à dix enfants de 5, 6 ou 7 ans qui dorment dans la rue. Or, quand nous appelons l'association qui gère l'hébergement d'urgence, elle nous explique que ces jeunes ne remplissent pas les critères, puisqu'ils ne sont pas « en bas âge » – une expression qui ne concernerait que les enfants de moins de 1 an. Hier, ces enfants ont dormi dans une cave. La journée, ils vont à l'école ; la nuit, s'ils ne trouvent pas d'abri dans une cave, ils dorment dans une voiture ou, quand ils ont de la chance, chez des amis – parfois, ils sont aussi à la rue.

J'y retourne vendredi. Que dois-je dire à ces familles ? Avec d'autres, je donne de l'argent à des associations pour que ces enfants puissent, peut-être, dormir à l'hôtel dans les prochains jours. Il me semble pourtant que c'est le rôle des pouvoirs publics que de s'en occuper. Franchement, nous sommes désespérés !

Ces enfants, on les trouve dans les rues de Limoges, mais aussi dans de nombreuses autres villes. À Tours, par exemple, un député héberge des enfants dans sa permanence. À Lyon, une autre députée soutient le squat d'une école. Est-ce vraiment une solution pérenne ?

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Je partage la colère de Mme Marianne Maximi. Pour ma part, je vous parlerai de ce que j'ai fait hier, dans ma circonscription, à l'occasion de la Journée internationale des droits de l'enfant.

Le matin, je suis allée soutenir la mobilisation des salariés de la protection de l'enfance, qui se poursuit depuis l'été dernier à la suite du décès d'un enfant de 3 ans dont la mesure de placement n'avait pas été mise en œuvre. Dans la Sarthe, 400 mineurs attendent de bénéficier d'une action éducative en milieu ouvert (AEMO), soixante-quinze sont en attente de placement, un foyer se trouve dans un état de très grand délabrement et deux mineurs sont décédés en deux ans.

À la fin de l'après-midi, j'ai participé à un goûter solidaire dans une école dont trois élèves sont à la rue le soir, alors qu'Olivier Klein, à cette époque ministre chargé de la ville et du logement s'était engagé l'hiver dernier à ce qu'il n'y ait plus aucun enfant dans cette situation. Je ne parle même pas des arguments du préfet – chez nous, dans la Sarthe, c'est à partir de l'âge de 3 ans que l'on n'est plus considéré comme vulnérable. Des femmes seules dorment également dehors. Trente écoles sont aujourd'hui occupées par un réseau de solidarité citoyen, mais c'est à l'État de prendre des mesures.

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Charlotte Caubel, secrétaire d'État

Madame Laure Lavalette, j'ai moi-même saisi le ministre de la santé et de la prévention concernant ce site qui me paraît totalement inadapté. Je suis un peu gênée par la présence du logo du Gouvernement à côté de tels contenus. Je n'en dirai pas plus.

Les flux migratoires qui reprennent nous amènent un certain nombre de familles et de jeunes filles enceintes pour des raisons parfois indépendantes de leur volonté. Il ne peut pas y avoir de solution pérenne car le flux est continu. Il faut sans cesse augmenter le nombre de solutions d'hébergement, ce qui est très difficile. Jamais autant de places d'urgence et de structures mère-enfant n'ont été créées, mais au moins un quart des bénéficiaires ne peuvent pas en sortir car, étant en séjour irrégulier, ils n'ont pas la possibilité d'accéder à un logement. La situation n'est satisfaisante pour personne.

Les arguments qui vous sont opposés concernant l'âge des enfants ne correspondent pas du tout aux consignes données il y a un an et rappelées il y a quelques semaines en matière d'hébergement d'urgence des familles. Sur le fondement de ce que vous m'avez dit, je reprendrai chaque dossier sarthois et je rappellerai les préfets concernés.

On sait très bien que les familles passent plus facilement les frontières et qu'il est plus compliqué de les prendre en charge. Il est certes absolument inacceptable qu'un enfant soit dans la rue mais, je le répète, il ne s'y trouve pas nécessairement depuis huit mois. Ces enfants arrivent et sont pris en charge au fur et à mesure, en fonction des moyens disponibles, qui ne sont pas suffisants. On peut toujours faire mieux, il faut faire mieux mais, je vous en prie, ayez conscience que nous faisons face à un flux continu et que cela suppose le développement continu de solutions.

S'agissant des mineurs non accompagnés, c'est le même problème qui se pose. Après une diminution du nombre d'enfants pris en charge liée à la crise sanitaire et au fait qu'un certain nombre d'entre eux, arrivés à l'âge de la majorité, sont parvenus à s'insérer, il s'avère que les flux reprennent massivement. Toutes les places disponibles étant occupées, les départements courent après la création de places.

On constate une explosion concomitante de quatre types de placement : celui des tout-petits, du fait de l'hospitalisme, de l'efficacité de la politique des 1 000 premiers jours et d'une meilleure détection des violences ; celui des enfants de tout âge victimes de violences ; celui des adolescents à la santé mentale dégradée, ce qui renvoie à la politique du handicap ; celui des mineurs migrants, parfois arrivés avec leur famille. Sur tous ces sujets, nous devons travailler avec le ministère de la justice.

Je l'ai dit, les départements courent après les places alors qu'ils n'en ont jamais construit autant. À Marseille, deux pouponnières sont en construction. Jamais il n'y a eu, en France, autant d'enfants protégés : plus de 300 000 enfants sont suivis et près de 200 000 sont placés. Nous poursuivons toujours la même logique, celle du placement à tout prix ; or on ne peut pas continuer de construire autant d'hébergements d'urgence et de structures de placement pour les enfants en danger. Il faut travailler autrement : j'aimerais donc favoriser la prévention et l'accompagnement des familles installées dans notre pays depuis plus longtemps.

J'en arrive à la question de la formation des professionnels. Nous avons diffusé la formation de la Ciivise, en lien avec Agnès Firmin Le Bodo, ministre chargé des professions de santé, Prisca Thévenot pour les structures dites périscolaires et Gabriel Attal pour l'éducation nationale – cette formation est déjà sur Éduscol. Des référents seront institués dans chaque ministère afin de structurer encore mieux la politique menée en la matière, au-delà de la lutte contre les violences sexuelles. Surtout, nous avons déjà mis en œuvre une préconisation de la Ciivise : la création du 119 pro, un numéro à la disposition de tous les professionnels, y compris des professionnels de santé que certaines situations mettent effectivement en difficulté. Enfin, nous attendons l'adoption de la proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir en France, qui prévoit, en matière de responsabilité et de protection des médecins, un alignement des dispositions relatives à la dénonciation de violences sur enfant ou sur personne âgée sur celles relatives à la dénonciation de violences conjugales. Nous avons en effet besoin du monde médical pour mieux repérer et signaler les violences. Il n'empêche que l'éducation nationale reste le premier pourvoyeur de signalements. Une dynamique existe, entretenue par le renforcement des cellules départementales de recueil, de traitement et d'évaluation des informations préoccupantes (Crip) voulu par mon prédécesseur et que nous prolongeons.

Les enjeux relatifs à l'enfance et à sa protection sont sans doute plus forts dans les outre-mer qu'en Hexagone. Je pense notamment aux effets de la distance, à la création de dispositifs spécifiques, au nécessaire soutien des professionnels, à l'accueil du petit enfant. Le renforcement de la politique des 1 000 premiers jours y est très important. Je m'attarderai sur les situations spécifiques de deux territoires.

Vous avez évoqué les problèmes auxquels est confrontée Mayotte, qui sont exponentiels. Nous envisageons une reprise de compétences en matière de gestion des enfants migrants, voire plus si affinités. Une mission est menée conjointement par l'Inspection générale des affaires sociales (Igas), l'Inspection générale de l'administration (IGA) et l'Inspection générale de la justice (IGJ) afin de déterminer ce que nous devons faire des enfants dits errants – c'est à dessein que je n'emploie pas l'expression « mineurs non accompagnés », qui n'a pas grand sens à Mayotte. Il est aussi essentiel de renforcer la prévention et d'aider les maternités. Je dois rencontrer le ministre délégué chargé des outre-mer pour en parler. En tout cas, une enveloppe spécifique est dédiée à ce sujet au sein de mon budget.

La situation est plus compliquée en Guyane, qui connaît un certain nombre de problèmes similaires mais est aussi peuplée par des populations dont l'implantation sur le territoire est plus ancienne. Des gamins assez bien insérés rencontrent des difficultés de régularisation à leur majorité. Les questions de l'accompagnement et de l'accueil du petit enfant sont aussi prégnantes. De nombreuses crèches doivent être construites. Une planification est entreprise par le ministre délégué chargé des outre-mer. Un prochain comité interministériel des outre-mer permettra d'y adapter les mesures de notre plan de lutte contre les violences faites aux enfants.

Dans l'ensemble des outre-mer, 10 000 nouvelles solutions d'accueil des petits enfants seront offertes d'ici à 2030 ; 4 000 places de crèches seront créées d'ici à 2027 ; cinquante centres sociaux supplémentaires ouvriront.

Le ministère de la justice a mis en place un processus de retour d'expérience pour tous les infanticides. À la suite de chacun de ces drames, l'ensemble des acteurs se réunissent, de la justice aux services sociaux en passant par l'école. J'évoquerai avec le Garde des sceaux la nécessité de repérer et de conduire ces retours d'expérience de manière un peu spécifique lorsque les enfants concernés sont porteurs d'un handicap. Il ne faut pas minimiser ces faits : la vie de ces enfants a autant de valeur que celle des autres enfants et que celle des adultes. J'ai parfois le sentiment que le meurtre d'un enfant paraît moins important que celui d'un adulte. Certaines violences, que je n'ose qualifier de gratuites, sont commises dans le cadre de séparations qui se passent mal. Je suis outrée quand j'entends raconter à la radio, comme une fleur, qu'une personne a tué ses deux enfants plutôt que de les remettre à leur autre parent. De tels faits me révulsent ! Ces crimes tout à fait tragiques montrent que l'adulte se sent possesseur de l'enfant ; ils illustrent l'épuisement dont nous avons souvent parlé.

Je termine en évoquant le sujet de l'éducation affective, et sexuelle dans un deuxième temps. Le ministre de l'éducation nationale a confirmé le mandat donné par son prédécesseur au Conseil supérieur des programmes, chargé de définir, en cette matière, un véritable programme. Qui dit programme dit contenus ; qui dit contenus dit professeurs ou équipes pédagogiques responsables de les dispenser.

Il nous paraît indispensable de stabiliser le contenu par âge et de commencer l'éducation affective assez tôt. Cela ne concerne pas, je le répète, l'éducation sexuelle, qui ne doit pas démarrer avant le primaire et devrait même plutôt être dispensée à partir du secondaire, bien qu'il faille aussi tenir compte du fait qu'un gamin sur trois arrivant en sixième a déjà visionné du porno en ligne. La Ciivise n'a pas du tout approfondi la question des violences sexuelles entre pairs, un problème lié à celui de l'inceste.

Le Conseil supérieur des programmes, composé d'un certain nombre de personnalités, a entendu beaucoup de monde, y compris moi-même. L'objectif est d'adopter des contenus consensuels, travaillés avec toutes les familles. Avec le ministre de l'éducation nationale, nous sommes convenus d'aller à l'essentiel sans nous perdre dans des considérations plus larges par lesquelles nous voudrions répondre aux demandes et régler les problèmes de tout le monde. L'essentiel, c'est que les enfants soient capables de se protéger en étant conscients, dès le plus jeune âge, que personne n'a le droit de toucher à leur intimité : comptez sur moi pour que cela soit une priorité !

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Merci, madame la secrétaire d'État. Vous êtes évidemment toujours la bienvenue à la Délégation aux droits de l'enfant pour évoquer tous ces sujets.

La séance est levée à 14 heures 45

Membres présents ou excusés

Présents. – Mme Nicole Dubré-Chirat, Mme Charlotte Goetschy-Bolognese, Mme Perrine Goulet, Mme Servane Hugues, Mme Laure Lavalette, Mme Alexandra Martin, Mme Marianne Maximi, Mme Caroline Parmentier, Mme Maud Petit, Mme Michèle Peyron, M. Alexandre Portier, M. Éric Poulliat, Mme Angélique Ranc

Assistaient également à la réunion. – Mme Virginie Lanlo, Mme Élise Leboucher, M. William Martinet, M. Damien Maudet