Commission de la défense nationale et des forces armées

Réunion du jeudi 4 mai 2023 à 9h00

Résumé de la réunion

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  • CGT
  • LPM
  • civil
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La réunion

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La séance est ouverte à neuf heures.

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Depuis hier, nous travaillons spécifiquement sur les enjeux des ressources humaines. Aujourd'hui, c'est avec plaisir que nous recevons les représentants du monde syndical.

Nous accueillons, pour la CFDT, MM. Albert Corbel et Didier Junker ; pour la Fédération Force Ouvrière Défense, M. Gilles Goulm et M. Erwann Larzul ; pour l'UNSA Défense, M. Laurent Tintignac et Mme Nathalie Delaugère ; pour la FNTE-CGT, MM. Didier Brunes et Bruno Le Nezet ; pour l'alliance CGC-CFTC, M. Vincent Hacquin et M. Patrick Pradier.

Les personnels civils au sein du ministère des armées représentent 65 000 agents, soit 23 % des effectifs. Leur rôle, indispensable dans le fonctionnement de ce ministère, a été particulièrement visible dans la gestion de la crise sanitaire, notamment dans le cadre de l'opération Résilience. Au-delà de cet évènement particulier, les personnels civils œuvrent chaque jour au soutien des forces. Aussi, il revient aux organisations syndicales et à la représentation nationale de veiller attentivement à ce que leurs conditions de travail soient en tout temps optimales.

Pour y parvenir, le maintien d'un dialogue social ambitieux est primordial. Votre présence dans notre commission, à l'occasion du cycle d'auditions relatives au projet de loi de programmation militaire (LPM) pour les années 2024 à 2030, nous est précieuse. En effet, votre regard et votre appréciation générale du texte nous seront utiles pour nourrir nos réflexions. Nous serions ainsi intéressés de connaître les points positifs et négatifs que vous identifiez à la lecture du projet de LPM, y compris dans sa partie normative.

Plus particulièrement, nous souhaiterions connaître votre position sur la question des soutiens, cœur du métier des personnels civils de défense. Sur ce point, plusieurs éléments semblent se dégager et ils ont dû retenir votre attention :

- les crédits programmés pour les services de soutien qui emploient de nombreux personnels civils ;

- le plan de transformation de Service de santé aux Armées (SSA), et notamment de son modèle rénové et de la cartographie territoriale repensée ;

- l'enjeu des infrastructures de vie (plans hébergement et logement) et des infrastructures opérationnelles ;

- la mise en place du Plan Familles 2 ;

- la numérisation des services réalisés par le service de commissariat aux armées (SCA).

Sur l'ensemble de ces sujets et sur tous ceux que vous souhaiteriez aborder, nous serions ravis d'avoir votre analyse et de connaître vos principaux points de vigilance.

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Albert Corbel, représentant de la CFDT-FEAE Défense

Je vous remercie, au nom de la CFDT Défense, pour cette invitation à nous exprimer devant vous sur le projet de LPM 2024-2030. Cette audition intervient une semaine après celle à laquelle nous avait convié le rapporteur du projet de loi, le député Jean-Michel Jacques, que je remercie aujourd'hui également.

Pour ne pas trop empiéter sur les questions que vous allez bien vouloir nous poser, nous nous contenterons d'une déclaration liminaire plutôt brève. Je rappelle que nous intervenons ici en tant que représentants du personnel civil exerçant dans les armées, directions et services du ministère des armées, ainsi que dans la plupart des établissements publics sous tutelle de ce ministère, y compris l'institution de gestion sociale des armées (IGESA), qui en est l'opérateur social, et dans les deux industries privées de défense que sont Nexter et Naval Group.

Nous ne venons pas débattre des orientations politiques de renforcement de nos capacités de défense, mais il est nécessaire de préciser que la CFDT adhère totalement à la nécessité initiale de réparation puis aujourd'hui de transformation des armées. Il s'agit d'en adapter le format à la forme et à l'intensité de la menace ou des menaces, puisque celles-ci sont multiples et réintègrent concrètement la réalité des conflits symétriques entre puissances équivalentes.

La position de la CFDT concernant la paix dans le monde s'exprime dans deux articles consécutifs de notre résolution générale votée au congrès de 2022. Sur le plan de la paix, le premier article indique ainsi qu'il faut aujourd'hui tirer les leçons du passé et instaurer une entente durable entre les peuples pour éviter la guerre. Cette entente passe par la coopération, la solidarité, mais aussi, et avant tout, par la compréhension et l'amitié. La CFDT appelle les États, comme l'ensemble des organisations des travailleurs, à développer entre eux des programmes d'échanges culturels de grande envergure dans le cadre d'une stratégie globale de paix durable.

Le deuxième article précise quant à lui que la paix ne se fait pas en un jour : la crise aux confins de l'Europe renforce la nécessité de ne pas baisser la garde et d'intensifier la coopération stratégique et industrielle en matière de défense. La CFDT revendique une intensification du concept de l'Europe de la défense, pour une large coopération stratégique et industrielle entre les nations qui constituent l'Union européenne et en faire ainsi Le Havre de paix espéré par sa population.

Notre organisation se range sans hésitation du côté de ceux qui, pour avoir la paix, préparent la guerre. Cependant notre préoccupation porte sur l'impact de l'intensification de l'activité militaire sur le travail et l'emploi des agents, agentes et salariées concernées. Ils sont les travailleurs et travailleuses des services de soutien, des services opérationnels, et bien sûr des entreprises du secteur de la défense que j'ai citées plus haut.

Nous voulons que le sort du personnel civil soit pris en compte, que l'impact de l'intensification de l'activité militaire proprement dite sur les activités non opérationnelles, principal terrain d'action des civils, soit perçu et géré, que ce soit au ministère, à l'IGESA ou chez les industriels de défense.

Les enjeux sont clairs et passent d'abord par l'emploi et le travail, dont les leviers sont l'attractivité, la fidélisation et le maintien en compétences. Plus globalement, sur le terrain de l'emploi, nous favorisons la souveraineté, qu'elle soit nationale ou européenne et, pour le bien de nos industries de défense, la coopération plutôt que la libre concurrence.

Ce dernier aspect est à associer au concept d'économie de guerre, qui ne doit pas se limiter à des exigences de réactivité et de performance de la part de l'État. Il implique de sortir des ornières de la sacro-sainte économie de marché, pour favoriser des solutions industrielles sans doute plus chères, mais qui garantiront la robustesse et la fiabilité de la BITD, ainsi que notre souveraineté dans le développement des solutions et surtout leur efficacité opérationnelle tout au long de la vie. Nous vous avons, hélas, déjà fait part de choix peu judicieux en la matière. Ils ne doivent plus se reproduire.

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Vous avez évoqué Nexter et Naval Group. N'êtes-vous pas représentés dans les autres entreprises de la BITD ?

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Albert Corbel, représentant de la CFDT-FEAE Défense

Les deux seules entreprises industrielles de la défense qui sont dans le champ de la CFDT Défense sont effectivement Nexter et Naval Group, du fait de leur appartenance historique au périmètre de la défense. Les autres entreprises sont gérées par une autre fédération, celle de la métallurgie.

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Gilles Goulm, secrétaire général FO Défense

Nous vous remercions de nous inviter à nous exprimer devant vous à propos de la future loi de programmation militaire, exercice d'autant plus difficile que nous n'avons eu à ce jour aucune communication de la part du ministre ou de ses services sur cette LPM. Nous avons donc été amenés à chercher des informations et le texte du projet de loi sur internet. Il est vrai que la période actuelle, globalement depuis le 19 janvier, ne se prête guère à un dialogue social apaisé et constructif.

Ce n'est bien sûr pas l'objet de la LPM ni même de l'audition d'aujourd'hui d'aborder cette question, mais nous devons revenir sur l'actualité et la réforme des retraites, pas tant sur la réforme en elle-même que nous rejetons et que nous continuerons de combattre, mais aussi et surtout sur les questions qu'elle pose en matière de conception de notre démocratie sociale, de la place que l'on entend donner au dialogue social et du rôle que l'on veut faire jouer aux corps dits intermédiaires que sont les organisations syndicales.

Nous ne nous trompons pas de cible, vous ne représentez pas l'exécutif, mais votre rôle en tant que députés consiste à rappeler parfois le gouvernement à la raison et notre présence aujourd'hui démontre notre attachement à la représentation nationale et aux institutions. Nous auditionner doit consister aussi à nous entendre et à considérer parfois que nous avons raison.

Nous ne pouvons que vous engager à relire nos interventions lors des auditions précédentes, pour que vous vous aperceviez de la justesse de certaines de nos analyses. Si ne serait-ce qu'un dixième de ce que nous avions dénoncé lors de la mise en œuvre de la révision générale des politiques publiques (RGPP) dans notre ministère avait été pris en compte, nous aurions évité un nombre conséquent de gabegies que nous payons encore. Bien entendu, les responsables de ce désastre ne rendront jamais de comptes. Refonder notre démocratie, comme certains s'y étaient engagés, passe aussi par un minimum de respect envers les interlocuteurs que nous sommes. Malheureusement, les évènements et le mépris qui nous est témoigné disqualifient le gouvernement, qui ne nous considère pas comme des partenaires sociaux.

Cela fait maintenant plusieurs années que nous subissons cette manière de faire. À quel moment a-t-on trouvé judicieux et pertinent, à travers la loi de transformation de la fonction publique, fomentée par le même ministre qui a porté la réforme des retraites, de nous éjecter de tout droit de regard sur le déroulement de carrière des agents à travers les commissions administratives paritaires et de supprimer les CHSCT ? Quel était le but recherché si ce n'est celui de réduire l'audience des organisations syndicales et le nombre de leurs mandants ?

Puisque nous ne sommes pas des partenaires, nous agirons en conséquence. Sans l'écoute et la manière dont nos revendications seront traitées, les mêmes causes produiront les mêmes effets et le dialogue social se refermera aussi vite qu'il s'est rouvert. Lors de notre audition le 20 avril dernier, M. le rapporteur de la LPM nous disait qu'il était temps de retrouver le chemin du courage et de la responsabilité. Nous le prenons au mot, et proposons de mettre un terme à la main mise de la fonction publique et de la direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP) sur les ministères, pour redonner de la marge de manœuvre à la négociation au sein des administrations.

Cette vision de la DRH de l'État, instaurée sous la présidence de Nicolas Sarkozy, n'a fait que brider le dialogue social en considérant les administrations irresponsables. Puisque nous sommes contraints par la masse salariale, redonnons aux ministères la marge nécessaire pour recruter et améliorer les parcours professionnels. On ne pourra pas afficher une LPM à 413 milliards d'euros et, dans le même temps, restreindre les recrutements de personnels civils, les mesures catégorielles ou les taux d'avancement pour la seule raison que la DGAFP l'interdit.

Fidèle à ses principes d'indépendance et rejetant toute idée de cogestion, Force Ouvrière ne s'exprimera pas sur la politique de défense du pays, ni sur les aspects opérationnels des choix opérés par la LPM. Notre rôle consiste à vous alerter sur les conséquences de ces choix pour les personnels civils, tant du ministère que des industries d'armement telles que Naval Group, Nexter ou Eurenco.

Dans ce cadre, la question des effectifs est primordiale, a fortiori avec une LPM à cette hauteur, nonobstant les effets de l'inflation et des coûts de l'énergie sur les budgets. Il serait là aussi difficilement compréhensible d'afficher de telles ambitions sans apporter une attention particulière sur les fonctions de soutien dans lesquelles sont positionnés les personnels civils. Or force est de constater que les personnels civils ne sont abordés ni dans l'exposé des motifs, ni dans l'étude d'impact, ni dans le projet de loi en lui-même, ce qui en dit long sur l'intérêt que nous portent les rédacteurs de la LPM. Parviendrons-nous un jour à ce que ce ministère intègre la place des personnels civils qui contribuent à l'accomplissement des missions et que l'on cesse de croire qu'il n'appartient qu'aux seuls militaires ?

Nos besoins en matière d'effectifs ne portent pas uniquement sur les fonctions de la cybersécurité et du renseignement, même si nous ne minimisons pas la nécessité de renforcer nos capacités en la matière. Nous devons donc dès maintenant anticiper sur les futurs recrutements, en réfléchissant très concrètement aux problématiques d'attractivité et de fidélisation. Notre ministère, après des années de suppression de milliers de postes, compte nombre de métiers en tension, notamment dans les ressources humaines, la restauration et l'infrastructure.

La future LPM doit apporter des réponses à cette question, sous peine de mettre nos capacités de soutien aux forces en danger. Le fantasme qui anime certains états-majors à vouloir détruire l'existant pour réinternaliser les fonctions de soutien au sein des armées n'est pas de nature à répondre aux difficultés. Il y a une propension chez certains à expliquer que quand les choses ne leur appartiennent pas, elles ne fonctionnent pas. Cette vision relève plus de l'instinct grégaire que d'une réelle volonté d'améliorer le soutien aux forces.

Le SCA, la direction interarmées des réseaux d'infrastructure et des systèmes d'information (DIRISI), le service d'infrastructure de la défense (SID) ou encore le SSA fonctionnent et remplissent parfaitement les missions qui leur sont confiées, dès lors qu'on leur en donne les moyens, notamment humains.

Encore une fois, pour remplir cette mission, il nous faut des hommes et des femmes. On ne peut pas d'un côté déplorer le nombre de postes vacants dans la fonction publique et, de l'autre, ne pas mettre en œuvre les moyens, notamment en termes de rémunération, pour régler cette situation. Les campagnes de communication n'y suffiront pas. Si pour Force Ouvrière, le premier axe d'effort pour juguler les effets de l'inflation et améliorer le pouvoir d'achat des agents de l'État reste l'augmentation du point d'indice, il nous paraît nécessaire d'avoir à travers cette LPM une lisibilité des mesures catégorielles affectées aux personnels civils.

Le deuxième élément crucial à nos yeux dans la préparation de cette LPM consiste à assurer un plan de charge nous permettant de maintenir un haut niveau de souveraineté et d'indépendance et de conserver les compétences et le savoir-faire, notamment en matière de maintien en condition opérationnelle (MCO). Réaliser un plan de charge avec ces objectifs nécessite d'avoir recours à des personnels sous statut, entre autres les ouvriers de l'État, avec les mêmes impératifs d'attractivité et de fidélisation, afin de limiter le recours à l'externalisation.

Le ministre a annoncé ses objectifs d'augmenter de façon significative le nombre de réservistes pour atteindre un effectif d'un réserviste pour deux militaires d'active. L'intention est louable et peut permettre aux armées de compter sur une force d'appoint importante et, de plus, constituer un vecteur non négligeable de promotion du lien armées-nation. Néanmoins, nous alertons sur la nécessité d'une bonne utilisation de la réserve opérationnelle qui ne doit en aucun cas pallier les manques d'effectifs sur des fonctions de soutien normalement dévolues aux personnels civils, comme nous le constatons trop souvent dans les établissements. La ministre Florence Parly avait en son temps décidé une mission conjointe entre le contrôle général des armées et l'inspection générale de l'administration sur l'utilisation de la réserve opérationnelle, mais elle n'a jamais été mise en œuvre.

Enfin, j'aborderais la question du plan Famille 2 pour rappeler là aussi que le ministère des armées ne compte pas uniquement des personnels militaires, même si nous avons conscience des risques encourus par nos camarades militaires en OPEX et des conséquences pour leur famille et la nécessité pour la nation d'en tenir compte. Or, rien ne justifie aujourd'hui que les personnels civils ne soient jamais cités sur la plaquette ministérielle du plan Famille de quatre pages.

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Laurent Tintignac, secrétaire général adjoint de l'UNSA Défense

Nous vous remercions de nous recevoir pour cet exercice, annuel pour ce qui concerne le projet de budget des armées, et septennal pour le projet de LPM. Ayez bien conscience que c'est avec un arrière-goût amer que nous sommes ici aujourd'hui. Et même si nous savons bien que cette commission n'est pas exactement le lieu, l'UNSA tient à vous dire que l'exercice du projet de réforme des retraites, auquel l'exécutif a soumis les organisations syndicales depuis bientôt six mois, laissera des traces durables et sans doute indélébiles, le dialogue social a été méprisé.

Les fondements de cette démocratie sociale que nous avons toutes et tous ici chevillée au corps ont été et resteront durablement ébranlés. Comme une ultime gifle à cette réalité, le Président de la République, qui disait pourtant il y a tout juste un an « Ce vote m'oblige », promulgue une loi rejetée par 92 % des salariés et 75 % de l'opinion, en pleine nuit, le jour même de l'avis rendu par le Conseil constitutionnel. Ce n'est pas faute aux organisations syndicales d'avoir fait montre de sérieux, de contre-propositions cohérentes et finançables dans le temps, en évitant de recourir sans cesse aux seules mesures paramétriques de l'âge et de la durée de cotisation.

Il y a peu, il fallait applaudir les salariés des métiers essentiels, les premières lignes. Aujourd'hui ils sont les premiers pénalisés par les conséquences de cette loi, en termes de pénibilité, d'inégalité femmes-hommes, d'entrée jeune sur le marché du travail. Cet épisode laissera des traces, évidemment. Cette loi brutale, injuste et injustifiée, porte en elle les germes de bien des inégalités manifestes qui se révéleront dans le temps.

Avouons aussi que rajouter une crise sociale d'une telle ampleur, au lendemain d'une crise sanitaire inédite qui, elle aussi, a révélé des inégalités sociales majeures, à une crise climatique aujourd'hui irréversible et une crise économique détruisant les plus précaires de nos concitoyens, ne constitue pas un modèle de stratégie. Les séquelles seront durables, en raison à la fois de cette loi injuste, mais aussi de la manière irrespectueuse et arrogante avec laquelle les représentants des salariés ont été traités.

Cela pourrait prêter à sourire, et pourtant notre démocratie, notre modèle de sixième puissance économique au monde, en est rendue à publier des arrêtés préfectoraux interdisant l'achat de casseroles dans les lieux où se rend le Président de la République. On marche sur la tête. Demain, en cas de risque potentiel à l'œuf, faudra-t-il un inspecteur derrière chaque poule pour s'assurer qu'aucune ne ponde dans un délai de 48 heures précédant la visite d'un représentant de l'exécutif ?

De 295 milliards d'euros pour la période 2019-2023, le budget des armées s'établit pour la période 2024-2030 à 413 milliards, même si sa sincérité semble ne pas être totalement acquise. Nous connaissons le contexte international bien sûr, notamment la guerre en Ukraine et le drame terrible que vit le peuple ukrainien, ces femmes et enfants jetés à la rue au son des sirènes d'une attaque imminente. Nous sommes également conscients de l'instabilité et des risques pour nos ressortissants dans nombre de pays.

Le projet de LPM intègre cette réalité dans ses choix budgétaires. L'UNSA, fidèle à ses principes, ne vient pas ici pour juger des choix stratégiques du Président de la République en matière de défense de l'intégrité du territoire, de choix opérationnels ou d'engagements sur différents théâtres d'opérations. Nous sommes ici pour représenter cette communauté des personnels civils, soit 65 000 agents, qui semblent totalement transparents dans les mots et dans la reconnaissance de l'exécutif comme dans la considération de l'institution.

Le terme de « personnels civils » n'apparaît qu'une seule fois dans les 376 pages du projet de loi, tout comme dans les 119 pages du rapport annexé. Cette invisibilité chronique est humiliante. Ce projet de LPM est inédit par l'ampleur de son budget et la prise en compte de nouvelles modalités de défense (cyber, quantique, espace, fonds marin). Mais l'inflation durable des prix des carburants sans impact sur le budget initial ; l'éventualité d'un budget OPEX abondé en interministériel en cas d'engagement extérieur en cours d'exercice et non programmable de fait ab initio et la restitution au seul ministère des armées des rentes des cessions des emprises immobilières des armées, sont autant de révélateurs qui démontrent l'impérieuse nécessité de sanctuariser notre modèle.

Par ailleurs, le projet de LPM modifie également en profondeur nombre d'articles du code de la défense. L'UNSA relève l'immense défi de l'attractivité des métiers et de la fidélisation des compétences. Un ensemble de mesures est pris pour préparer ce défi, mais elles sont toutes colorées en kaki. Pourtant, que serait l'opérationnel de nos armées, sans ce bataillon des 65 000 personnels civils qui chaque jour, œuvrent à assurer le soutien commun ou opérationnel de ces 210 000 militaires, afin de leur garantir des conditions de vie, d'exercice de leur métier, de sécurité et de fiabilité optimales des matériels ?

Ces personnels civils ont une conscience permanente de la militarité de notre institution et des soutiens sans faille qu'ils doivent apporter aux femmes et aux hommes qui s'engagent en notre nom à tous, jusqu'à leur vie parfois, comme aux matériels qu'ils utilisent. Aussi, l'ensemble de l'exercice lié à l'attractivité et à cette fidélisation est à transposer aux compétences civiles. Doit-on ici vous convaincre des métiers, des compétences, des expertises, des essais, du maintien en conditions opérationnelles des matériels, de la fiabilité des ressources humaines et de la paie, des études amont, des achats, des systèmes d'information, de la sécurité, de la logistique, du ravitaillement, des munitions, de la santé ?

Après une LPM « À hauteur d'homme », le ministre des armées lui-même évoque un budget « d'économie de guerre ». Cette économie de guerre n'a pas attendu la présentation de ce projet de LPM : elle est déjà, hélas, une réalité entre industriels de la défense et secteur étatique. Si cette économie de guerre consiste simplement à constater impuissants, le dépouillement des compétences étatiques au profit des industriels du secteur, eux aussi en peine d'attractivité mais capables d'offrir des conditions salariales sans commune mesure avec celle du secteur public, la feuille de route sera difficile, voire impossible.

Le nombre de démissions est en augmentation permanente. Déployer autant d'efforts pour rendre attractifs les postes et les métiers du ministère des armées, mais ensuite refaire le chemin à l'envers quelques mois après seulement est non seulement chronophage mais décourageant pour les RH. L'attrition de candidats au recrutement est par ailleurs une réalité visible. Aux armées comme ailleurs au sein de la sphère publique, si rien n'est fait pour l'amélioration des rémunérations, une société différente nous attend. Qui demain acceptera un engagement public dans des conditions salariales indignes, pour des fonctions que l'on jette en pâture à la première occasion ?

Mesdames et Messieurs les députés, vous nous recevez aujourd'hui en qualité de membres de cette commission de la défense. L'UNSA vous interpelle et vous demande de porter l'impérieuse revalorisation des salaires publics. Au ministère des armées plus qu'ailleurs, les compétences techniques sont indispensables aux soutiens opérationnels, car la moindre des défaillances peut engendrer des conséquences dramatiques.

En conséquence, l'UNSA le répète : on ne fera pas une armée du troisième millénaire avec des rémunérations civiles indignes. Pour preuve, il y a trois jours, face à l'inflation que nous connaissons tous, le SMIC augmentait de 2,19 %. Le minimum garanti de la fonction publique a quant à lui été augmenté de huit points, passant de l'indice 353 à 361, soit 38 euros supplémentaires par mois. Plus de 400 000 agents sont concernés, titulaires comme contractuels. En l'absence de révision de l'ensemble des grilles de la fonction publique, la conséquence est inévitable : le nouveau tassement des grilles indiciaires affaiblira d'autant le principe d'évolution de carrière.

Quel salarié accepterait une stagnation de sa rémunération pendant dix ans, malgré l'acquisition de nouvelles compétences et une expérience croissante ? Savez-vous quels sont les pieds de grille des agents publics en 2023 ? Ils sont de 1 747 euros bruts pour un agent de catégorie C et B, 1 891 euros bruts pour un agent de catégorie A, 1 894 euros pour un ingénieur contractuel et 1 750 euros bruts pour un technicien contractuel. Pensez-vous sérieusement relever le défi de l'attractivité et de la fidélisation avec des rémunérations à ce point repoussantes à bien des égards ?

Pensez-vous encore écoper les démissions prévisibles face à des industriels ayant les mêmes besoins de compétences que nous, mais disposant d'outils de guerre économique sans commune mesure avec ceux de la fonction publique ? L'UNSA, comme l'ensemble des organisations syndicales, tire depuis longtemps la sonnette d'alarme et tel un tsunami, il y a des signes précurseurs annonciateurs d'une catastrophe imminente. Personne ne pourra dire qu'il ou qu'elle ne savait pas.

L'UNSA relève dans ce projet de LPM l'effort, le développement et la surveillance de notre base industrielle et technologique de défense (BITD). Elle est indispensable au fonctionnement comme au futur de nos armées. Pour ne citer que ce cas, l'entreprise Latécoère, après un investissement de 47 millions d'euros soutenus par l'argent public en 2017, annonce la délocalisation des activités de son site de Montredon vers la Tunisie, dont celles liées à la fabrication des pièces de l'avion de transport tactique sur lequel s'appuieront les armées à hauteur de 75 % en 2030, avec la disponibilité de 35 appareils A400M. Où sont les engagements de maintien des entreprises de souveraineté sur le territoire national ? Où sont les promesses de relocalisation industrielle sur le territoire post Covid ?

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Didier Brunes, membre de la direction fédérale de la FNTE-CGT

Pour la CGT, ce projet de LPM fait encore la part belle au concept dispendieux d'une défense des intérêts de l'État et de ses citoyens au travers de la dissuasion nucléaire. Ce concept a été dessiné dans les années 1960, puis remis à jour dans les années 1990. Dire que ce modèle ne répond plus depuis longtemps aux enjeux des théâtres d'opérations n'est pas faire offense aux centaines de personnels civils et militaires qui œuvrent chaque jour pour en assurer le maintien opérationnel. Il s'agit là de regarder, en responsabilité, les choses en face et d'assumer que les menaces d'antan ne sont plus les enjeux de demain.

La CGT milite depuis plusieurs années pour une ratification par la France, du traité d'interdiction des armes nucléaires comme l'ont déjà fait cinquante pays. Cette ratification associée à un calendrier, conduirait à l'élimination vérifiée et irréversible de son programme d'armements nucléaires. Veuillez noter qu'il ne s'agit pas pour la CGT de s'attaquer à la filière nucléaire, mais uniquement à l'arme nucléaire en tant qu'arme de destruction massive mettant en danger tant nos voisins que toute la planète.

Dans le même registre d'une défense au service de la paix, nous considérons que l'appartenance à l'OTAN n'est pas un bouclier, mais l'illustration d'un carcan piloté par le capitalisme au profit de l'économie de guerre. Nous en voulons pour preuve l'obligation d'établir un budget de dépenses proportionnel au PIB égal au moins à 2 %, au lieu de l'établir en fonction du juste besoin. En conséquence, la CGT soutient la sortie de la France de l'OTAN.

À propos du financement de cette LPM, après la décision prise à l'Assemblée nationale en conférence des présidents, de suspendre l'examen du projet de LPM et de porter l'affaire devant le Conseil constitutionnel pour cause de non-sincérité de l'étude d'impact, nous lisons dans la presse l'impérieuse nécessité de requérir un nouveau mode de financement pour permettre de ne pas décaler le lancement du programme concernant le porte-avions nouvelle génération.

Nous nous adressons à vous, représentants du peuple et garants de la bonne utilisation des finances publiques, pour connaître vos positions sur ces spéculations capitalistes dangereuses, qui représentent 20 % du montant initial, soit un milliard d'euros. Pour la CGT, il n'est pas acceptable que l'équilibre budgétaire de la LPM soit assuré par la vente d'armes à l'export, ces mêmes armes qui immanquablement tueront un jour nos ressortissants à travers le monde. En outre, que dire d'un budget consacré au stock de munitions qui augmente de 45 % par rapport à la précédente LPM, elle-même en augmentation, portant l'effort à 16 milliards sur la période ?

Pour la CGT, les armes ne sont pas des marchandises. À ce titre, elles ne peuvent être une variable dimensionnant notre capacité à défendre nos citoyens. Voir et présenter les choses autrement, c'est concevoir la LPM dans un esprit de « va-t-en-guerre ». Cela revient à considérer que tout conflit est bon pour faire de l'argent, y compris en l'alimentant si nécessaire en stocks d'armes. La CGT ne partage pas cette vision capitaliste où le financier et le profit priment sur tout le reste. En effet, nous considérons qu'il n'est pas antinomique de travailler dans l'industrie de défense et de défendre la paix et le désarmement.

Dans le même ordre d'idées, la CGT a bien noté le changement de nom et de portage de la Revue nationale stratégique. Autrefois appelée Revue stratégique de défense et de sécurité portée par le ministre, la nouvelle Revue nationale stratégique est portée exclusivement par le Président, chef des armées. Il s'agit là d'une manière d'ancrer encore plus l'idée que nous sommes passés du ministère de la défense, qui était un ministère d'objectif, au ministère des armées, qui est un ministère de moyens. Cette modification n'est pas anodine et dépasse le simple changement linguistique. Il conforte l'objectif de guerre plutôt que la défense de la paix.

Pour la CGT, il ne s'agit pas dans cet exercice de juger de l'opportunité capacitaire pour les forces armées. Cependant, il serait irresponsable de ne pas regarder les impacts sur les diminutions drastiques de fournitures d'armements et de systèmes d'armes, ou encore sur les glissements de programmes d'ores et déjà annoncés. Le risque d'une fragilisation de la BITD est plus que certain et déjà l'on voit des entreprises, comme Arquus à Limoges ou Naval Group à Lorient, s'interroger sur leurs capacités à maintenir leurs personnels au niveau actuel.

De plus, ces glissements de programmes vont inévitablement engendrer des surcoûts en MCO (déjà en hausse de 40 % par rapport à la précédente LPM) et en valeur d'achat (30 milliards d'euros dévolus à l'anticipation de l'inflation). S'il est raisonnable de planifier en fonction des besoins et de la réalité des capacités de production, il est inquiétant de voir que l'ensemble des données socioéconomiques n'aient pas été considérées. De plus, que dire des impacts collatéraux sur le maintien des moyens, des procédures d'évaluation, d'expertise et d'essai ou encore des compétences qui de fait seront mis à mal ?

À propos de la condition des personnels civils, la CGT regrette que la LPM ne mentionne pas les moyens pour assurer l'attractivité et la fidélisation des personnels, de l'ouvrier à l'ingénieur. La CGT affirme que cela passe par des revalorisations salariales à la hauteur du marché concurrentiel des industries de défense mais aussi par l'amélioration des conditions et de l'organisation du travail. Un certain nombre de mesures doivent être mises en œuvre au plus vite :

- la semaine de 32 heures ;

- l'augmentation des possibilités de télétravail ;

- la protection sociale complémentaire à la hauteur des enjeux économiques ;

- l'application du treizième mois ;

- la revalorisation immédiate des salaires ;

- la suppression des abattements de zones ;

- une grille de salaire unique de l'ouvrier à l'ingénieur ;

- l'indexation du point d'indice, et donc des salaires au sens large, sur l'inflation ;

- l'abrogation du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (RIFSEEP) et de tous les soi-disant systèmes méritocratiques.

Mais les conditions de travail concernent également les locaux. Il ne suffit pas de dépenser une importante somme d'argent (16 milliards d'euros, contre 12 milliards sur la période précédente) pour résoudre tous les problèmes. En outre, si la somme peut paraître conséquente, elle doit être mise en perspective avec un service de SID qui se paupérise en compétences à la lueur des restructurations successives et d'autres projets destructeurs qui semblent s'annoncer.

En matière de lutte contre les harcèlements, les discriminations et les violences sexistes et sexuelles, la CGT a déjà fait savoir que la cellule Thémis, le moyen dont le ministère s'est doté il y a neuf ans, n'est pas suffisante. Par exemple, elle ne dispose pas de pouvoir d'injonction. Cela ressemble trop à une case cochée sur une liste des « choses à faire », plutôt qu'à une véritable politique de lutte contre ces atrocités vécues par certains personnels, qu'ils soient civils ou militaires.

Ensuite, après l'hémorragie organisée par le plan SSA 2030, la CGT s'interroge sur les leviers qui seront utilisés pour mettre en œuvre les nouvelles antennes spécialisées voulues par le ministre, dont la feuille de route de redéploiement n'est pas connue de nous à ce jour. En outre, qu'en est-il du plan Famille pour les personnels civils ? Je rappelle en effet que celui qui est présenté au titre de cette LPM ne concerne que les personnels militaires. La CGT n'oppose pas ces catégories de personnels mais regrette cependant que rien ne soit évoqué ni dimensionné pour les personnels civils.

En conclusion, la véritable question qui se pose est de savoir de quelle armée nous avons besoin pour défendre notre territoire. Est-il nécessaire comme le prétend le Président de la République que la France soit au pivot du monde ? La précédente LPM visait à réparer les armées, à sortir de la logique de pénurie et à leur redonner le souffle, les leviers d'action ainsi que les moyens dont elles ont besoin. La nouvelle loi de programmation militaire se présente comme la poursuite de cette réparation et de cette transformation, mais elle néglige encore une fois la place des personnels civils au sein du ministère.

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Patrick Pradier, conseiller de la Fédération des agents de l'État, Fédération CFTC Défense

Je vous remercie de nous recevoir aujourd'hui dans votre commission, dont nous étions absents depuis quatre années. Aussi, nous souhaitons remercier tous les personnels du ministère des armées, qui, par leurs votes, ont permis à Défense CGC et CFTC Défense de revenir au sein des organisations syndicales représentatives et donc d'être parmi vous aujourd'hui.

En décidant d'une forte hausse du budget alloué au ministère des armées, la représentation nationale a exprimé son indéniable volonté de doter le pays d'un outil de défense à la hauteur des enjeux imposés par une situation géopolitique complexe, dangereuse et mouvante, marquée par de nombreuses tensions à l'échelle mondiale.

En cohérence avec le projet de LPM 2024-2030, le budget 2023 de notre ministère est augmenté de plus de 3 milliards, pour s'établir à 44 milliards d'euros. Cette anticipation permettra dès maintenant de pourvoir nos armées des matériels qui nous font cruellement défaut. Toutefois, de la bataille de Crécy à la ligne Maginot, notre histoire a montré à de nombreuses reprises que la seule excellence matérielle ne peut suffire, et que la véritable force d'une armée réside dans les qualités de sa composante humaine, militaire mais également civile. Ces qualités ne peuvent s'épanouir qu'au soleil de la motivation.

Or, désormais, pour les personnels civils, c'est hélas la nuit de la démotivation qui éteint les enthousiasmes et ronge le terrain dans l'ombre d'une démission silencieuse qui gagne tous les rangs. Mesdames et Messieurs les députés, il est de notre devoir d'exprimer ici les sentiments de déception, de frustration et parfois même de légitime colère, qui animent la grande majorité de nos collègues.

Le budget consacré aux mesures catégorielles des personnels civils est seulement de 23 millions d'euros. Il représente pour les 65 000 personnels civils 0,05 % du budget global. Cette politique salariale calamiteuse (30 euros en moyenne par agent), et malheureusement récurrente depuis des années, est d'autant plus alarmante qu'elle rend les perspectives d'évolution de carrière inexistantes. Ne nous étonnons plus alors des démissions record et des recrutements de plus en plus difficiles. Mesdames et Messieurs les députés, il devient urgent de réagir par des mesures de rattrapage fortes, assorties d'une mise en œuvre rapide, indispensables pour endiguer ces vagues de démission et de démobilisation.

C'est pourquoi Défense CGC et CFTC Défense demandent que le projet de LPM améliore de façon forte et pérenne la situation des 65 000 personnels civils indispensables au fonctionnement du ministère. En effet, nous rappelons que la composante civile du ministère porte l'expertise technique indispensable à la poursuite des objectifs de la LPM en parfaite complémentarité avec nos collègues militaires et nous nous interrogeons. Qui assure principalement les missions cyber ? Qui prend en charge la spécification de nos futurs équipements, synonyme de performance, en adéquation avec le besoin de nos forces et de maîtrise des coûts ? Qui s'assure que les équipements répondent aux spécifications ? Qui s'occupe de la maintenance de nos matériels, synonyme d'indépendance et aussi de maîtrise des coûts ?

Aussi, à la lumière de ce constat, il devient évident que le défi majeur et impérieux consiste à améliorer l'attractivité et la fidélisation des agents. Nous devons ensemble mettre le cap vers cet objectif phare qui seul pourra éclairer durablement l'avenir de l'ensemble des personnels civils, qu'ils soient ouvriers, contractuels ou fonctionnaires. Certes, Mesdames et Messieurs les députés, cet arbitrage budgétaire exige de l'audace, mais vous n'en manquez assurément pas. En amendant en ce sens le projet de LPM, vous avez la possibilité de garantir que l'effort budgétaire demandé à la nation soit non seulement pertinent, mais également efficace.

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Ces échanges complètent ceux que nous avons eus lors de mon audition il y a une semaine. Ils furent riches et respectueux et je les ai bien pris en compte dans mon travail de rapporteur ; je saurai en faire bon usage.

Les personnels civils représentent 23 % de la communauté de défense au sein du ministère des armées. Ma première question concerne la fidélisation des personnels, qui est parfois difficile, compte tenu des tensions sur le marché du travail. Pouvez-vous évoquer ce sujet ?

Ensuite, je suis également attaché à la formation interne au sein du ministère. Les cycles technologiques sont de plus en plus courts et le MCO dépend bien souvent du personnel civil. Comment voyez-vous la formation en interne, ou au sein du ministère des armées ou de notre BITD ? Des rapprochements pourraient peut-être voir le jour avec les collectivités territoriales et l'État. Il serait sans doute pertinent de remettre les structures d'apprentissage au goût du jour.

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Au cours des auditions que nous avons menées, les personnels civils ont été très largement évoqués. Notre groupe politique leur est reconnaissant : nous savons combien ils contribuent à l'effort de défense et à quel point ils sont précieux. Vous avez souligné qu'ils étaient peut-être insuffisamment mentionnés dans le texte de la LPM, mais je peux vous assurer que les militaires et représentants de la BITD que nous avons reçus les ont longuement évoqués. Si tel n'avait pas été le cas, je m'en serais fait l'écho. En outre, au cours des auditions, je n'ai pas entendu d'inquiétudes exprimées par la BITD sur le maintien de centres de production. Les inquiétudes ont plus porté sur le vivier de talents et de compétences qu'il faut trouver et nourrir.

Ensuite, je vous souhaite vous interroger sur les personnels féminins. Comment voyez-vous l'équilibre entre les présences masculines et féminines ? Comment pouvons-nous attirer des personnels féminins dans les secteurs que vous représentez ? Qu'attendent-elles, au-delà de la rémunération, notamment en matière de conditions de travail ?

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Au nom du groupe Rassemblement national, je vous remercie pour votre présence parmi nous aujourd'hui. Dans le domaine des retraites, notre positionnement est très clair. Il est inutile de le rappeler.

À la différence des personnels militaires, les 63 000 personnels civils de la défense disposent d'une liberté de parole et d'engagement ; ils peuvent se syndiquer librement. Ces personnels représentent 25 % des effectifs du ministère des armées. Ils sont membres à part entière de la communauté de défense et leur engagement est particulièrement reconnu. Les organisations syndicales constituent de véritables porte-voix et permettent de faire remonter des problèmes parfois indicibles de la part des militaires tenus à un devoir de stricte réserve.

Les sujets sont nombreux : accidents du travail, attractivité de la fonction publique, congés, mobilités, rémunération, entre autres. La participation des organisations syndicales des personnels civils de la défense permet de mettre à la table des négociations divers sujets visant à améliorer les conditions de vie, de travail et d'exercice pour tous au ministère des armées. Ma question concerne le vaste domaine des ressources humaines et fait appel à votre liberté de parole. Quels sont selon vous les priorités en termes de ressources humaines pour les armées, les directions et les services ? Pensez-vous que la LPM 2024-2030 réponde mieux à ces priorités que la précédente ? Quels points d'amélioration défendez-vous ?

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Mon intervention concerne la reconnaissance, sous deux axes. Tout d'abord, je souhaite évoquer le recrutement et la fidélisation des personnels civils, des thématiques qui figuraient déjà dans le rapport de 2021 de mes collègues Jean-Charles Larsonneur et Alexis Corbière. Lors de son intervention, la CGT a formulé des propositions pour mieux fidéliser les personnels au-delà des aspects salariaux, comme la semaine à 32 heures ou le treizième mois. L'ensemble des syndicats sont-ils d'accord avec les propositions listées par la CGT ? Au-delà, de quelle manière les personnels civils pourraient-ils être mieux reconnus pour être mieux fidélisés ?

Ensuite, l'un d'entre vous a souligné que les groupes de travail « Territoire national » auxquels vous avez participez se sont déroulés dans une atmosphère de dialogue apaisée et constructive. Il est vrai que nous avons bien travaillé tous ensemble. Parmi vos propositions en matière de création de réserves, lesquelles ne figurent pas dans la LPM ? De quelle manière cette réserve pourrait-être mieux reconnue ? Que faudrait-il faire de plus ? Certes, il n'existe pas de réserve des personnels civils, mais rien n'empêche ces derniers d'être réservistes. J'ai identifié un point de blocage dans ce domaine. Je pense par exemple à un fonctionnaire de catégorie B dans le civil mais officier ou sous-officier dans la réserve, ce qui implique des écarts de statut et de salaire. Comment serait-il possible d'inciter les personnels à s'engager dans la réserve et reconnaître l'efficacité de tout le monde ?

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Je vous remercie pour vos présentations. Votre participation à la préparation de cette LPM est particulièrement importante, tant le concours des civils de la défense est essentiel pour nos armées. Pour ma part, il y a quelques années, j'ai été civil de la défense au centre d'instruction naval de Brest, pendant trois ans.

Je tiens aussi à indiquer au représentant de Force Ouvrière que dans un Parlement recomposé, nous ne représentons pas tous l'exécutif, mais aussi et surtout la voix des citoyens des territoires qui nous ont portés à l'Assemblée nationale, dont les attentes sont très fortes dans le contexte social que nous traversons.

Cers dernières années, la sous-réalisation du schéma d'emploi du ministère des armées a affecté les personnels civils et militaires. Quel est votre regard au sujet du développement de la voie contractuelle et plus largement sur l'attractivité des carrières, compte tenu des objectifs très ambitieux du ministère des armées pour la nouvelle LPM. Par ailleurs, vous avez évoqué le sort des personnels civils dans le plan Famille. Pouvez-vous préciser votre point de vue à ce sujet ? Un rapport préparé en 2021, notamment par notre collègue Jean-Charles Larsonneur, mettait en lumière le problème du logement des personnels en situation de célibat géographique. Quel regard portez-vous en 2023 sur la persistance des problèmes de logement et sur le déploiement concret des plans Famille ?

Enfin, la promulgation de la réforme des retraites affecte de plein fouet les militaires et civils. Ce contexte laisse un arrière-goût amer à un certain nombre de députés. Nous serons particulièrement vigilants sur la politique indiciaire concernant les personnels de catégorie C que vous avez cité, tant l'urgence est grande.

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Ayant servi notre pays sous l'uniforme de la police nationale, je connais l'importance des syndicats pour pointer les éventuels dysfonctionnements et les réalités du terrain. Bien qu'astreints également à un devoir de réserve, les policiers ont le droit de se syndiquer, à la différence des militaires, Ainsi, nous le savons, il n'est pas rare que ce soit, dans nos armées, les syndicats des personnels civils de la défense qui jouent ce rôle de porte-voix de leurs collègues militaires.

De fait, votre présence ici est précieuse et me permet de vous interroger sur une problématique importante, celle de l'externalisation. En effet, mon interrogation sera simple : comment jugez-vous le recours par nos armées à des personnels extérieurs ? Constatez-vous parfois des difficultés de coordination, ou un éventuel manque d'efficacité ? Ce recours à l'externalisation est-il toujours nécessaire, ou certaines tâches devraient-elles être au contraire internalisées ?

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Albert Corbel, représentant de la CFDT-FEAE Défense

Je retiens de vos questions quelques grands thèmes comme ceux de l'attractivité, de la fidélisation, des crédits programmés et de la féminisation.

Les soucis d'attractivité existent au sein du ministère, quels que soient les statuts des personnels. Une des solutions passe par la revalorisation des rémunérations, et notamment celle du point d'indice, mais les conditions de travail importent également. Vous nous avez notamment demandé si les crédits de soutien, étaient suffisants à nos yeux.

L'augmentation phénoménale du budget de la défense est en cours depuis quelques années, mais en euros constants, le budget est identique à celui des années 1990, où la situation internationale était également instable. Il est donc inutile de crier victoire. L'augmentation de l'intensité opérationnelle entraîne de fait l'augmentation de l'activité pour le soutien et affectera les conditions de travail, si cette situation n'est pas prise en compte en augmentant les effectifs, leur pouvoir d'achat et en améliorant leur formation.

La formation interne doit ainsi être prise en compte. Autrefois, des centres de formation des armées formaient les personnels civils, pour le personnel d'exécution dit ouvrier, mais aussi pour l'encadrement. Aujourd'hui, le ministère exerce sa tutelle sur un certain nombre d'écoles d'ingénieurs et il devrait s'en servir pour former des ingénieurs civils du ministère, notamment le corps des ingénieurs civils de la défense, comme il fait pour les ingénieurs militaires.

La CFDT n'est pas opposée aux contractuels, mais il existe malgré tout une différence entre un contractuel et un agent public de type fonctionnaire. Le fonctionnaire témoigne ainsi d'un engagement que l'on ne retrouve pas forcément chez un contractuel. Je pense notamment à la direction générale de l'armement, dont la volonté de recruter des contractuels à la place de fonctionnaires est manifeste pour des raisons probablement valables, notamment en termes de compétences. Si le ministère utilisait ses écoles d'ingénieurs pour former des ingénieurs civils de la défense dont les compétences sont attendues par la DGA, on résoudrait peut-être le problème d'attractivité et de fidélisation.

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Didier Junker, représentant de la CFDT-FEAE Défense

Mes propos porteront sur la féminisation des effectifs. Le ministère des armées exige de grandes compétences techniques et on ne peut que déplorer le faible nombre de femmes dans les métiers d'ingénieurs, quand elles sont plus souvent orientées vers les filières médicosociales.

Par ailleurs, nous avons mené une enquête auprès de 600 personnes, dont les conclusions montrent qu'un climat sexiste est toujours présent au sein du ministère des armées, même s'il se réduit. Ce climat, qui a un impact sur les déroulements de carrière, explique peut-être également le fait que les femmes souhaitent moins rejoindre le ministère. Cependant, la quasi-totalité des employeurs du ministère fournissent des efforts en la matière et se sont fixés des objectifs ambitieux.

En conclusion, je tiens à vous faire part d'une inquiétude sur le futur index égalité professionnelle de la fonction publique, car il s'inspirera de son équivalent dans le secteur privé, lequel a montré de nombreuses faiblesses.

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Gilles Goulm, secrétaire général FO Défense

M. Le rapporteur a évoqué le sujet essentiel de la formation. Tout d'abord, on ne peut que regretter que des écoles d'apprentissage aient été fermées à une époque. Force Ouvrière est particulièrement attachée à l'apprentissage, en adéquation avec les besoins des employeurs. Il importe donc de recruter un plus grand nombre d'apprentis et nous considérons que le diplôme obtenu à la fin de la période d'apprentissage vaut concours et essai d'embauche. Il y a quelques années, il existait un accord-cadre avec des objectifs chiffrés sur la formation professionnelle continue mais il a été supprimé. Les besoins demeurent mais l'efficacité a diminué.

Ensuite, des efforts considérables doivent être effectués en matière de féminisation. Certains corps et secteurs de notre ministère sont plus féminisés que d'autres. J'ajoute que l'objectif de féminisation est intimement lié aux modes de recrutement. Les femmes subissent encore plus les difficultés relatives aux postes que les personnels masculins. Je pense notamment aux postes attribués par concours qui sont très éloignés des lieux de vie des candidats et candidates reçus. Nous demandons donc une meilleure lisibilité géographique sur les postes ouverts par les concours.

Par ailleurs la RH de proximité a été détruite par les conséquences de la RGPP, ce qui induit une mauvaise gestion des personnels. Des réponses doivent donc être apportées pour reconstruire une RH de proximité, au plus près des employeurs, des établissements et des agents.

Il existe un véritable besoin de contrôle de l'emploi de la réserve opérationnelle. Dans ce domaine, il faut être particulièrement vigilant pour mettre en cohérence les discours et les actes. Par exemple, l'ensemble des organisations syndicales ont validé le passage de cinq à dix du nombre minimal de jours de convocation pouvant être effectués pendant le temps de travail sans accord de l'employeur. En revanche, le patronat s'est contenté d'en prendre acte. Pourtant, lors des groupes de travail sur la réserve, le Medef ne manquait jamais une occasion de se féliciter de l'emploi de réserves. En conclusion, tout le monde doit apporter sa pierre à l'édifice.

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Laurent Tintignac, secrétaire général adjoint de l'UNSA Défense

Nous partageons les mêmes inquiétudes en matière d'attractivité et de fidélisation. Aujourd'hui, certains employeurs envisagent de remettre en place des écoles de formation technique, les EFT, pour disposer des bonnes compétences. Il y a quelques années, lorsque l'on ouvrait un poste sur une compétence particulière en qualité d'ouvrier d'État, plusieurs dizaines ou centaines de candidats se présentaient. Désormais, nous n'arrivons même pas à remplir le nombre de postes ouverts dans des métiers très techniques. D'autres expérimentations sont menées avec les lycées professionnels où certaines classes peuvent être ouvertes moyennant le financement du ministère. Ce lien doit sans doute être creusé.

Le ministère comporte environ 60 % de personnels masculins et 40 % de personnels féminins. De même, les postes à responsabilité ne sont occupés que par des hommes aujourd'hui. Nous sommes très sensibles à la situation des femmes au ministère, dont les parcours professionnels sont largement pénalisés. En effet, les femmes sont plutôt affectées à des postes RH, où les progressions de carrière sont plus compliquées que dans certains métiers techniques.

Ensuite, comme l'a dit mon collègue, nous sommes également confrontés à une réalité de harcèlement moral et de violences sexistes au travail. En tant qu'organisation syndicale, nous sommes particulièrement sensibilisés sur ces sujets, que nous traitons au cas par cas. Par ailleurs, le développement du recours aux agents contractuels est une réalité depuis des décennies, puisque le ministère compte environ 10 000 agents contractuels. Il faut constater que cette catégorie est la seule où le ministère dispose d'un peu de souplesse pour adapter la rémunération à la réalité du marché, alors que les grilles de concours sont figées.

Aujourd'hui, l'impact de l'évolution du SMIC conduit à une stagnation des rémunérations, principalement celles des agents de catégorie C, c'est-à-dire les agents techniques ou les adjoints administratifs qui pendant dix ans, voient leur évolution salariale stagner bien qu'ils acquièrent des compétences. Ceci est proprement scandaleux.

Le sujet de l'externalisation nous préoccupe beaucoup, surtout dans les métiers de soutien opérationnel aéronautique ou terrestre. Nous sommes attentifs à cette situation, d'abord parce que certains industriels sont en situation de monopole sur les commandes. Nous sommes également attentifs au fait que des missions seraient largement « réinternalisables » aujourd'hui.

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Bruno Le Nezet, représentant de la FNTE-CGT

Je rappelle que la CGT revendique depuis longtemps la création d'un pôle public national de la défense qui réunirait toutes les entreprises du secteur et qui offrirait un statut de haut niveau, pourquoi pas calqué sur celui des ouvriers de l'État. Il existe des tensions sur l'emploi dans le secteur, notamment en raison de besoins spécifiques en matière de compétences techniques. Nous avons du mal à trouver des gens compétents.

La CGT défend les écoles de formation techniques qui ont été fermées. De même, l'apprentissage a été dénigré pendant des années, quand bien même nous savons que les métiers manuels sont nécessaires. Il serait à ce titre judicieux de nouer des partenariats entre l'éducation nationale, les employeurs et le ministère des armées, qui est le ministère de tutelle de Naval Group où je travaille, mais aussi de Nexter ou d'Eurenco. Airbus a par exemple rouvert ses écoles de formation technique, ce qui permet ensuite de fidéliser les personnels.

De son côté, l'enjeu de la fidélisation passe aussi par un véritable déroulement de carrière, mais aussi d'autres mesures comme un treizième mois dans les entreprises dites privées du secteur. Enfin, les différences de salaires entre le public et le privé sont considérables. Mon syndicat couvre par exemple la base de Lann Bihoué et l'arsenal de Lorient. À l'heure actuelle, Dassault attend que les personnels soient formés pour ensuite les recruter en leur offrant jusqu'à 500 euros bruts de salaire mensuel en plus. Le Président de la République a indiqué que la colère sur la réforme des retraites portait également sur le niveau des salaires. Dans ce cas, il peut tout à fait modifier le point d'indice.

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Vous travaillez donc chez Naval Group, mais votre organisation défend aussi les personnels civils du ministère, qui ne vous concernent pas directement.

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Bruno Le Nezet, représentant de la FNTE-CGT

Nous défendons les deux. Dans le privé, les problèmes portent sur les statuts et dans le public sur les salaires, qui sont trop faibles à l'entrée. Avant, mon syndicat regroupait les ouvriers d'État et les fonctionnaires. Nous prônons le retour à ce système, qui fonctionnait très bien.

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Didier Brunes, membre de la direction fédérale de la FNTE-CGT

Je souhaite répondre au député Blanchet qui évoquait les propositions de la CGT. Il s'agit notamment de la semaine de 32 heures, mais aussi de l'augmentation des possibilités de télétravail. Il faudrait également disposer d'une protection sociale à la hauteur des enjeux économiques et appliquer le treizième mois au ministère des armées. Nous sommes en outre favorables à la revalorisation immédiate des salaires, avec une indexation sur l'inflation.

Une grille de salaire unique de l'ouvrier à l'ingénieur permettrait d'offrir une meilleure visibilité et un déroulement de carrière associé à une rémunération. Nous prônons l'abrogation du RIFSEEP et de tous les soi-disant systèmes méritocratiques. On doit favoriser la reconnaissance plutôt que la récompense, ce qui est fondamentalement différent.

Enfin, j'ai participé au groupe de travail sur la réserve, qui était particulièrement intéressant. La CGT revendique pour sa part que les personnels en réserve n'aillent pas au contact du feu. Nos deux inquiétudes étaient de deux ordres : d'une part que la filière serve à compenser des difficultés d'embauche ; et d'autre part sur les moyens qui devront être mis en œuvre pour recruter un tel nombre de réservistes alors que l'armée de Terre se plaint déjà de ne pouvoir remplacer ses effectifs sortants.

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Patrick Pradier, conseiller de la Fédération des agents de l'État, Fédération CFTC Défense

En matière d'attractivité et de fidélisation, la rémunération n'est naturellement pas à la hauteur des attentes des personnels. Par ailleurs, pour pouvoir attirer des personnels civils, il importe de mettre l'accent sur la communication : nombre de nos concitoyens ignorent encore que le ministère des armées n'est pas exclusivement composé de militaires. Par conséquent, si l'on ne communique pas pour indiquer qu'il existe des personnels civils au sein du ministère des armées, il sera très difficile d'en attirer de nouveaux.

Ensuite, la fidélisation nécessite d'assurer une meilleure stabilité dans les organisations. Malheureusement, les restructurations, désormais appelées transformations, se succèdent depuis 1993. Je pense par exemple à un service qui a été transféré de Dijon à Mérignac. De plus, les lignes directrices de gestion qui ont été mises en place après la loi de transformation de la fonction publique, concernent essentiellement la gestion administrative, alors que les personnels attendaient une visibilité des parcours professionnels pour pouvoir se positionner.

Par ailleurs, nous demandons un équilibre entre les contractuels et les personnels statutaires. Actuellement, nous recrutons de nombreux contractuels par facilité de gestion. Mais ils ne restent pas forcément : de nombreuses démissions sont à déplorer.

Il existait auparavant une formation interne et un dialogue social. Mais ce dernier a disparu avec la mise en place des comités sociaux d'administration. Désormais, l'utilisation du budget nous est présentée, mais c'est à peu près tout.

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Vincent Hacquin, représentant de l'alliance CGC-CFTC

Je partage l'ensemble des propos qui ont été tenus précédemment. Je tiens à évoquer pour ma part les personnels civils qui soignent nos blessés. Je pense aux infirmiers et aux aides-soignants, dont certains sont placés en catégorie active. Or je viens d'apprendre que ceux de la catégorie active ne sera pas complétée par les douze trimestres auxquels ils ont pourtant le droit.

Je souhaite donc pousser un cri de colère à ce sujet. Il faut regarder d'un peu plus près de l'institution nationale des Invalides (INI), qui a payé un tribut à la Covid puisque trois personnes n'ayant pu partir à 57 ans sont décédées. Une quarantaine de personnes sont concernées mais personne au SSA ne sait faire la comptabilité de la catégorie active. Pour y remédier, nous allons communiquer dans les médias à ce propos. Je rappelle que l'INI est un établissement public administratif, qui s'autogère. Cependant il est sous tutelle du ministère des armées. En conclusion, je vous demande de penser aux personnels soignants des armées, qui ont joué et jouent encore un rôle essentiel pour la nation.

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Je vous remercie pour vos témoignages qui nous permettent de mieux appréhender les enjeux de la LPM pour les civils de la défense. Nous nous reverrons au plus tard au mois d'octobre, dans le cadre des auditions liées au projet de loi de finances 2024.

La séance est levée à dix-heures vingt-cinq.

Membres présents ou excusés

Présents. - M. Xavier Batut, M. Christophe Blanchet, Mme Stéphanie Galzy, M. Thomas Gassilloud, Mme Anne Genetet, M. Christian Girard, M. José Gonzalez, M. Jean-Michel Jacques, M. Loïc Kervran, Mme Josy Poueyto, M. Michaël Taverne, Mme Mélanie Thomin

Excusés. - Mme Yaël Braun-Pivet, M. Steve Chailloux, Mme Cyrielle Chatelain, M. Yannick Favennec-Bécot, M. Olivier Marleix, Mme Pascale Martin, Mme Michèle Martinez, Mme Lysiane Métayer, M. Pierre Morel-À-L'Huissier, Mme Valérie Rabault, M. Fabien Roussel, Mme Isabelle Santiago, M. Mikaele Seo, Mme Nathalie Serre