La réunion

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La séance est ouverte à onze heures cinq.

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Messieurs, mes chers collègues, je voudrais tout d'abord vous demander de bien vouloir excuser l'absence de Thomas Gassilloud en déplacement à Londres, ce qui me vaut l'honneur et le plaisir de présider cette audition.

Vous l'aurez compris lors de l'audition des représentants du CEA la semaine dernière, la dissuasion est une formidable aventure scientifique, mais aussi un immense défi industriel et technologique. Et je ne pense pas beaucoup m'avancer - mais nos invités auront certainement un avis sur le sujet - que la force de notre modèle de base industrielle et technologique de défense (BITD) repose en partie sur la dissuasion. Car à travers l'exigence portée par la dissuasion en termes de technologie, de savoir-faire, de compétences, en un mot d'excellence, c'est bien l'ensemble de la BITD qui est tirée vers le haut.

Nous avons donc le plaisir d'accueillir des représentants des principaux acteurs industriels de la dissuasion nucléaire.

Je souhaite donc la bienvenue à :

- M. Pierre Éric Pommellet, président-directeur général de Naval Group, entreprise qui est notamment impliquée dans le développement des sous-marins nucléaires lanceurs d'engins (SNLE) ;

- M. André-Hubert Roussel, président exécutif d'ArianeGroup, société qui intervient notamment dans les programmes du missile M.51 de la force océanique stratégique ;

- l'amiral (2S) Hervé de Bonnaventure, conseiller défense du président-directeur général de MBDA, entreprise qui fabrique notamment les missiles de la composante aéroportée (ASMP-A puis demain ASN4G) ;

- Enfin, M. Antoine Bouvier, directeur de la stratégie et des affaires publiques d'Airbus, maison mère aux côtés de Safran, d'ArianeGroup et actionnaire de MBDA ;

Messieurs, vous reviendriez certainement sur les défis industriels et technologiques que représentant pour vos entreprises les grands programmes de dissuasion nucléaire dans lesquelles elles sont impliquées.

Dans un contexte économique marqué par la hausse des coûts des facteurs, des difficultés d'approvisionnement stratégiques, mais aussi parfois des difficultés de recrutement pour certaines compétences critiques, nous serions également intéressés par connaître vos éventuels points de vigilance dans l'exécution des grands programmes de modernisation en cours qui engagent l'avenir de notre dissuasion.

Sans plus tarder, Messieurs, je vous cède la parole.

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Pierre Éric Pommellet, président-directeur général de Naval Group

Lors de ses vœux aux armées, le 20 janvier, le Président de la République a souligné le rôle crucial de la dissuasion, en rappelant qu'elle est « un élément qui fait de la France un pays différent en Europe » et « qu'elle mérite les efforts considérables que nous lui consacrons ». Cette déclaration souligne la permanence des fondamentaux de la dissuasion, qui repose notamment sur ses composantes aéroportée, océanique, notamment la force océanique stratégique (FOS) et ses programmes de sous-marins nucléaires d'engins (SNLE) et notamment du SNLE de troisième génération (SNLE 3G).

L'excellence de la filière navale française s'est appuyée sur une volonté politique forte et ininterrompue depuis la décision de construire le premier SNLE en 1963. Soixante ans d'efforts et d'investissements continus ont structuré autant la marine nationale que Naval Group. Des générations d'ingénieurs, d'ouvriers, de techniciens et de marins concourent à une activité à très forte valeur ajoutée technologique. Le Président a aussi déclaré qu'il fallait « renforcer notre dissuasion en nous donnant tous les moyens d'assurer sa robustesse, sa fiabilité, sa modernisation dans des conditions particulières et évolutives du monde d'aujourd'hui ».

Si la France a réduit son investissement dans la dissuasion en passant de six à quatre SNLE au début des années 1990, depuis 2017, les crédits de paiement qui lui sont consacrés ont augmenté de 40 %, atteignant 4,6 milliards d'euros en 2023. Au-delà du prix de notre souveraineté, ce budget représente un investissement qui profite à toute l'industrie de défense mais aussi à l'industrie civile, et dont les retombées sont positives pour l'économie et l'emploi en France.

En tant que maître d'œuvre, Naval Group est un industriel majeur de la dissuasion. Commencée il y a quatre cents ans avec la construction des arsenaux de la marine, l'histoire de Naval Group est depuis soixante ans structurée par l'activité de dissuasion et les SNLE.

Nos activités concernent le maintien en condition opérationnelle (MCO) des SNLE en service ainsi que la conception et la réalisation, avec TechnicAtome et ArianeGroup, de quatre SNLE 3G, qui remplaceront la génération actuelle à partir de 2035 à raison d'un sous-marin tous les cinq ans.

Naval Group est également chargé du MCO du porte-avions Charles de Gaulle, qui participe à la dissuasion au travers de la force aéronavale nucléaire (Fanu), ainsi que de la conception et de la réalisation du porte-avions nouvelle génération avec les Chantiers de l'Atlantique et TechnicAtome.

Enfin, Naval Group travaille à la conception, la réalisation et l'entretien de nombreux moyens qui concourent à la dissuasion comme les sous-marins nucléaires d'attaque (SNA), les frégates anti-sous-marines – notamment les frégates multimissions (Fremm) et, demain, les frégates de défense et d'intervention (FDI) – ou encore les chasseurs de mines.

Les SNLE sont les systèmes industriels les plus sophistiqués réalisés par l'homme. Les technologies dont ils sont équipés nécessitent une expertise dans de nombreux domaines de points, tels que l'hydrodynamique, la discrétion acoustique, la détection sous-marine, la métallurgie des aciers spéciaux, la mise en œuvre des missiles balistiques, armes sous-marines et contre-mesures, la propulsion nucléaire, ou encore la sécurité générale, la sécurité pyrotechnique et la sûreté nucléaire. Le SNLE est à la fois un sous-marin – objet complexe par nature –, mais aussi une centrale nucléaire, qui fonctionne à proximité de l'équipage, et une base de lancement de fusées, équipée de seize missiles.

La construction d'un SNLE nécessite 20 millions d'heures de production et 1 million de composants assemblés que la France a réussi à faire il y a soixante ans.

Pour mener à bien son activité au profit de la dissuasion, Naval Group pilote une chaîne de partenaires et de sous-traitants de près de 6 000 fournisseurs, composée d'industriels des secteurs mécanique, électrique et électronique ou encore du développement logiciel, parmi lesquels figurent notamment TechnicAtome, Thalès, ArianeGroup, Safran, CNIM, Aubert & Duval, Creusot Forge, GE Thermodyn, ou encore Jeumont, mais aussi plusieurs centaines de PME pour qui la dissuasion est un véritable levier de développement, et qui couvrent l'intégralité du territoire national.

Le développement de la composante océanique de la dissuasion bénéficie également aux forces conventionnelles. Elle contribue aux autres programmes nationaux ainsi qu'à l'exportation, en tirant le niveau de performance de Naval Group et de l'ensemble de la BITD vers le haut. On peut citer plusieurs domaines comme ceux de l'architecture d'ensemble, la signature acoustique, la métallurgie des coques, l'informatique des systèmes de combat ou encore la propulsion qui bénéficie aux sous-marins classiques et aux navires de surface. La dissuasion, que nous ne pouvons bien entendu pas exporter, garantit à nos clients internationaux la pérennité de notre entreprise.

Enfin, la dissuasion a de nombreuses retombées sur l'industrie de défense en général et pour un certain nombre de réalisations civiles. Les exemples sont nombreux : supercalculateurs, métallurgie, acoustique, matériaux amortissants, système de réfrigération…

Tous les sites de Naval Group participent à cette réussite collective. Les bureaux d'études d'ingénierie sur les bâtiments de surface et sous-marins sont installés sur le site de Lorient. Cherbourg est le site de conception, de construction, d'assemblage, et d'intégration des SNLE, ainsi que de leur démantèlement. Témoignage de la continuité industrielle qui fait la force de notre pays, Cherbourg accueille simultanément les SNLE conçus dans les années 1960 en cours de démantèlement, les Barracuda en phase de construction, et les études et développements des SNLE 3G dont les premiers éléments de coque commenceront à être produits dès 2023. Toulon-Ollioules, Saint-Tropez, Ruelle pour les systèmes de direction de combat et certains équipements, Nantes Indret pour la propulsion et les éléments essentiels de la chaufferie nucléaire ou pour les centres d'expertise et la R&D, Toulon pour le MCO du porte-avions et enfin, Brest qui regroupe 3 000 collaborateurs de Naval Group engagés dans la maintenance des SNLE, qui en assurent l'exceptionnelle disponibilité : en effet, depuis le début de la force de dissuasion, un bateau au moins se trouve en permanence à la mer. S'agissant de l'activité de MCO, nous sommes capables de répondre à la demande : en mars 2022, quelques semaines après le début de la guerre en Ukraine, lorsque la France a affirmé sa posture de dissuasion, nous avons été sollicités pour contribuer rapidement au renforcement de la posture. Ce fut une aventure humaine exceptionnelle, nous avons dû refuser des volontaires tant l'engagement est fort au sein du groupe.

La réalisation du programme SNLE 3G a été lancée en 2021. Les études d'avant-projet avaient démarré en 2007, afin de répondre au double défi technologique-industriel et budgétaire. Le premier SNLE 3G doit être livré en 2035. Il repose sur une architecture générale héritée de la génération précédente actuellement en service et bénéficie de synergie avec le programme de sous-marins nucléaires d'attaque Barracuda. Ses performances tiendront compte de l'évolution des menaces notamment par l'amélioration dans le domaine de la discrétion et de la détection sous-marine.

L'activité dissuasion océanique, si l'on élargit le périmètre à l'ensemble des capacités navales requises en complément du déploiement des SNLE, et au porte-avions Charles de Gaulle, représente pour Naval Group jusqu'à un tiers de l'activité. L'impact économique pour Naval Group et la filière industrielle associée qui augmentera dans la phase de développement du SNLE 3G, s'apprécie par les emplois générés, 6 000 à 10 000 emplois directs et indirects par an, la valeur ajoutée créée en France (90 %), l'impact territorial (plus de 80 départements impliqués) ainsi que par la contribution de la dissuasion aux exportations et à l'innovation

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André-Hubert ROUSSEL, président exécutif d'ArianeGroup

La dissuasion représente l'un des deux piliers de notre activité industrielle. Dans la filière des lanceurs spatiaux et des lanceurs mer-sol balistiques stratégiques (MSBS), l'héritage technologique, laissé par le général de Gaulle, a été transmis à ArianeGroup à sa création en 2016 par l'apport de l'ensemble des activités de lanceurs civils et militaires de ses deux actionnaires, Airbus et Safran. ArianeGroup est en effet le maître d'œuvre des lanceurs européens Ariane 5 et Ariane 6 dont elle assure la conception, le développement et la production, ainsi que la commercialisation et la réalisation de services de lancement à travers sa filiale Arianespace. ArianeGroup assure enfin la maîtrise d'œuvre du système de missile M51, déployé sur les sous-marins de la force de dissuasion océanique française.

ArianeGroup génère environ 3 milliards d'euros de chiffre d'affaires et emploie près de 6 000 personnes en France, auxquelles s'ajoute environ un millier d'employés en Allemagne. Notre entreprise s'appuie sur une chaîne industrielle de plus de 1 000 fournisseurs directs et indirects en France. Nos principaux sites français d'ingénierie et de production se situent dans le Bassin parisien – Les Mureaux et Vernon –, dans le Sud-Ouest – autour de la métropole bordelaise et à Toulouse –, et sur les lieux d'intégration des lanceurs – près de l'île longue dans le Finistère, et près du pas de tir au centre spatial guyanais à Kourou.

La dissuasion nucléaire française repose sur ses composantes océaniques et aéroportées. Elles doivent être adaptées au contexte stratégique, aux objectifs politiques et aux défenses prévisibles à l'horizon de leur déploiement et pendant toute leur durée de vie. La première mission d'ArianeGroup au sein de la composante océanique est d'assurer une veille de l'évolution des défenses adverses, lesquelles se renforcent partout dans le monde, en particulier au sein des grandes puissances dotées de l'arme nucléaire, dans un contexte international très volatil caractérisé par le risque accru de prolifération dans certains États. L'année 2022 a marqué un record puisque 376 tirs balistiques militaires ont été recensés, contre 186 tirs de lanceurs civils l'an dernier.

Dans ce contexte et dans sa logique de stricte suffisance, la dissuasion française est fondamentalement liée à la performance de ses systèmes d'armes. ArianeGroup est l'industriel de référence de la direction générale de l'armement (DGA) et du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) dans la filière MSBS. La performance du missile balistique français M51 doit être continuellement adaptée en fonction du développement des défenses antimissiles. Elle se mesure à travers une série d'indicateurs, que nous appelons les « 3P » : tout d'abord, la portée, qui permet de définir à la fois les objectifs accessibles et les zones de patrouille des sous-marins associés ; la pénétration, qui contribue à l'efficacité du système d'armes en tenant compte des systèmes de défense ; enfin, la précision, associée à la puissance de la charge.

Pour anticiper l'évolution des menaces, répondre aux objectifs politiques et opérationnels, donc contribuer en permanence à la crédibilité de la dissuasion, il a été décidé dans les années 2000 de procéder au développement incrémental du M51. Ainsi, chaque évolution technologique du système d'armes est dotée de performances qui anticipent l'évolution des défenses à horizon de vingt ou trente ans. Aujourd'hui, les SNLE sont dotés des systèmes M51.1 et M51.2, mis en service respectivement en 2010 et en 2016. Nous développons actuellement l'incrément M51.3 pour une première mise en service à bord d'un SNLE prévue pour 2025.

Le prochain développement, que la loi de programmation militaire (LPM) 2025-2030 devra confirmer, constitue pour ArianeGroup un enjeu stratégique mais également industriel essentiel : il sera indispensable de programmer un nouveau développement à partir de 2025 pour maintenir dans la durée des compétences et un outil industriel exceptionnels, capables de concevoir, de produire et de maintenir de tels systèmes en condition opérationnelle. En effet, il faut ajouter aux « 3P » que j'évoquais un quatrième P : celui de people ou de personnel. Les ressources humaines d'ArianeGroup sont l'actif le plus précieux de l'entreprise dans la conception et dans les opérations. Avec les équipes de Naval Group, nos ingénieurs et nos techniciens sont aux côtés des marins à l'île Longue, à bord du sous-marin, au départ et au retour des patrouilles. En effet, ArianeGroup assure également le MCO du système dont la disponibilité dûment évaluée affiche un niveau remarquable depuis 2010. Nos équipiers savent aussi se montrer entièrement résilients et participent à la continuité de la posture, comme en a témoigné le tir d'acceptation au sortir du confinement en juin 2020 ou encore le renforcement de la posture avec la sortie des trois sous-marins au début de la crise ukrainienne.

Enfin, la dualité reste au cœur du mode de gestion technique, industrielle, commerciale et des ressources humaines d'ArianeGroup. La rotation des équipes au gré des calendriers, des projets et des programmes contribue à l'attractivité des bassins d'emploi français et à la conservation des talents de notre base de défense. La dualité rend également possible la mutualisation des processus ainsi que d'outils techniques, de conception, de modélisation de phénomènes physiques ou encore d'environnement et de validation du modèle de simulation par des vols. Elle consolide la résilience de l'appareil industriel et de toute la chaîne industrielle en agrégeant des volumes de production et en optimisant les coûts de développement et de production de nos programmes actuels et futurs. Elle permet également d'atteindre une certaine taille critique, autorisant des investissements plus importants. L'organisation d'ArianeGroup en fait un modèle à part, reflet d'une politique d'investissements raisonnés et de synergies continues qui ont permis à la France de se doter et de conserver une industrie de premier rang au service de la dissuasion océanique française et du transport spatial européen.

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Amiral (2S) Hervé de Bonnaventure, conseiller défense du président-directeur général de MBDA

Après la description de la composante océanique, il est intéressant de vous présenter la composante aéroportée. MBDA France est le maitre d'œuvre industriel du vecteur de la composante nucléaire aéroportée (et non de la charge nucléaire qui dépend du CEA) : l'ASMPA et, dans l'avenir, son successeur l'ASN4G. J'ai passé quarante années dans les armées, dont une quinzaine comme officier et pilote d'un Super Étendard embarqué sur les porte-avions Foch et Clemenceau, porteurs du missile air-sol moyenne portée (ASMP). J'ai également été directeur d'un tir d'entraînement des forces de l'ASMP, et j'ai commandé la force de l'Aéronautique navale, chargée de la préparation de la Fanu. Je suis maintenant heureux d'accompagner la production de ce vecteur du côté industriel.

Je vous propose dans un premier temps de vous faire une rapide présentation de l'historique de la capacité technique de MBDA dans le domaine de la dissuasion. Cette capacité vient de la branche « missile tactique » d'Aérospatiale dont nous sommes un des héritiers. Les études lancées par la DGA avec les ancêtres de MBDA sur le missile sol-sol Pluton, déployé par l'armée de terre, ont commencé dès les années 1960 et ont permis à ces derniers de maîtriser l'environnement d'un missile porteur d'une tête nucléaire. A suivi le missile Hadès, développé à partir de 1984 et prolongé au-delà des années 1990, dont la portée était encore plus importante. Les avancées technologiques acquises par les ancêtres de MBDA - Nord et Sud-Aviation puis Aérospatiale Missiles - pendant le développement du missile Pluton, plus la technologie du statoréacteur, véritable rupture technologique, ont permis de lancer le développement de la famille ASMP.

Il existe plusieurs missiles ASMP. Le premier, opérationnel dès 1986, était emporté sur le Mirage IV, puis sur son successeur, le Mirage 2000N, ainsi que sur le Super Étendard de la marine nationale. Il a été suivi par l'ASMP amélioré (ASMPA), actuellement en service sur les Rafale de l'armée de l'air et de l'espace et de la marine nationale. Nous préparons désormais l'ASMPA rénové (ASMPA-R), qui sera également accroché sur des Rafale.

L'atout technologique de la famille ASMP ? Sa propulsion à des vitesses supersoniques grâce à son statoréacteur. Le statoréacteur, qui permet la propulsion du missile pendant tout le vol, représentait à l'époque une rupture technologique majeure. Le précédent délégué général pour l'armement déclarait à son sujet en 2020 : « le statoréacteur permet, par rapport à un mode de propulsion fusée, de réduire considérablement l'encombrement et la masse du missile pour une portée et une charge utile données. Il permet au missile de couvrir un vaste domaine de vol à des vitesses très largement supersoniques. »

Le porteur – un sous-marin ou un avion –, le vecteur et le mode de pénétration des deux composantes de la dissuasion sont différents. L'ASMP peut suivre une trajectoire de basse, moyenne ou haute altitude et bénéficie d'une haute capacité à manœuvrer, puisque son moteur continue à fonctionner dans la phase terminale de pénétration. Il peut donc supporter des facteurs de charge très importants sans voir sa vitesse se dégrader. Il faut également souligner sa grande précision au but. Enfin, on peut également préciser ici que l'ASMPA étant emporté par un avion pouvant apponter sur un porte-avions, il doit donc faire face à des conditions d'emploi dans des environnements sévères. Des matériaux particuliers lui permettent de supporter de très hautes températures et d'importants facteurs de charge.

La fiabilité de l'ASMP est exceptionnelle. Le général Maigret, qui commandait la force aérienne stratégique (FAS), rappelait devant votre commission en 2019, que le taux de succès rencontré par les vingt-et-un tirs de missiles de la famille ASMP était de 100 %. La fiabilité demeure : le premier tir de l'ASMPA-R a eu lieu en décembre 2020, et le second, en mars 2022, respectant ainsi parfaitement le calendrier qui avait été défini en 2016 et se soldant par des succès.

J'en viens maintenant à notre capacité future : le missile air-sol nucléaire de quatrième génération (ASN4G). Dès les années 90, en parallèle de la préparation de l'ASMPA, les travaux technologiques sur son successeur ont été lancés et se sont clairement orientés vers le domaine des très hautes vitesses. Depuis, nous avons des moyens nous permettant de tester le missile et de simuler le vol de l'ASN4G en hypervélocité.

Les performances de l'ASN4G sont encore meilleures que celles de l'ASMPA-R. L'ASN4G devrait être opérationnel à horizon 2035 et devra le rester au-delà des années 2050 : il est donc nécessaire d'anticiper les défenses sol/air de l'adversaire à cet horizon. Le bureau d'études de MBDA rassemble une dizaine de collaborateurs qui opèrent une veille continue sur la défense adverse. Il apparaît que la très haute performance en vitesse et en manœuvre est la meilleure méthode pour parvenir à être détecté le plus tardivement possible, et compliquer la tâche de suivi d'un radar, voire, d'accrochage, et, enfin, à désorganiser une attaque d'un missile antimissile. Nous reproduisons ce concept, déjà présent dans l'ASMPA, sur l'ASN4G en augmentant ses performances. Nous entrons dans le domaine de l'hypersonique. Le facteur de charge sera, lui aussi, multiplié en phase terminale pour leurrer les défenses adverses. Enfin, l'ASN4G, grâce à son encombrement et son poids limités, sera compatible avec le Rafale et catapultable par un porte-avions, conformément aux objectifs définis par le Président de la République. C'est une réussite technique unique au monde.

Dans les années 2000-2010, au cours des programmes PROMETHEE 1, 2 et 3, nous avons mené, en cotraitance avec l'ONERA, des études sur l'hypersonique. Elles nous ont permis de valider un certain nombre de grands principes de l'ASN4G.

Enfin, j'aimerais souligner la synergie entre les compétences mises en œuvre pour la composante nucléaire aéroportée (CNA) et celles des missiles tactiques, faisant de MBDA un acteur logique de la CNA. En effet, les technologies mises en œuvre dans le cadre de la composante nucléaire aéroportée font appel à un haut niveau de compétences dans les domaines de l'ingénierie et des matériaux, notamment issus du domaine des systèmes de missiles tactiques comme les technologies liées à la propulsion, au guidage, à la navigation, à la pénétration ou encore à la furtivité.

Ces compétences irriguent les programmes conventionnels et de dissuasion. La polyvalence des moyens et des hommes permet de mettre en commun des compétences, des savoir-faire et des moyens d'entraînement et de maintenance. Il existe un équilibrage dans le domaine RH entre les différents programmes. Au sein de la direction des missiles longue portée de MBDA France, entre le MDCN, l'Exocet, les travaux sur le Scalp et ses versions futures, nous disposons de la taille critique nécessaire au maintien de l'activité nucléaire aéroportée à un coût maitrisé. Cela nous permet de conduire des programmes à la fois dans le domaine conventionnel et pour la dissuasion et d'être présents sur l'ensemble du spectre des missions du combat terrestre à la supériorité aérienne en passant par la projection de puissance et l'attaque dans la profondeur. Cette locomotive technologique nous permet de garder un coup d'avance sur les technologies de haut de spectre nécessaires aux missiles de croisière, aux missiles conventionnels, à la défense anti-missile et aux armes de supériorité aérienne.

C'est, par exemple, grâce à ces acquis en termes d'hypervélocité ou de défense anti-missile, que MBDA a pu proposer le projet de nouvel intercepteur endo-atmosphérique Aquila capable de traiter un large éventail de menaces : des missiles balistiques manœuvrant de portée intermédiaire, aux missiles de croisière hypersoniques ou haut-supersoniques, en passant par les planeurs hypersoniques, les missiles antinavires, ou encore les avions de combat de nouvelle génération.

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Antoine Bouvier, directeur de la stratégie et des affaires publiques d'Airbus

La nécessité de « relégitimer la dissuasion à travers la représentation nationale », selon l'expression de l'ancienne présidente de la commission, Madame Patricia Adam, me paraît toujours d'actualité.

Je voudrais tout d'abord souligner une double cohérence. La première concerne les moyens opérationnels. Nous avons évoqué les vecteurs aéroportés et océaniques, les porteurs que sont les Rafale et le sous-marin, ainsi que les moyens opérationnels qui constituent l'environnement nécessaire pour que les deux premiers opèrent dans les meilleures conditions de performance et de sécurité. Airbus, par le biais de ses filiales et de ses activités propres, est un acteur majeur qu'il s'agisse des moyens de ravitaillement, de renseignement, de résistance cyber ou encore de communication. Cette cohérence est essentielle pour garantir la pérennité et la crédibilité de la dissuasion.

La cohérence vaut aussi pour les acteurs : la représentation nationale qui définit les grandes orientations ainsi que les politiques et vote les budgets, mais également l'État, l'administration, les ministères des armées et des affaires étrangères, la DGA, le CEA et sa direction des applications militaires (DAM), l'Office national d'études et de recherches aérospatiales (Onera), les forces armées et les industriels – outre ceux que nous représentons, citons également Dassault, Thales et Safran et l'ensemble des industriels français qui œuvrent dans ce domaine. Depuis la première mission d'alerte opérationnelle du Mirage IV, en 1964, l'ensemble des acteurs étatiques et industriels se mobilisent pour former l'un des plus beaux exemples de cohérence de politique publique et industrielle et d'action concertée sur des sujets particulièrement sensibles – qui ne font pas toujours l'objet d'un consensus démocratique. Nous autres industriels avons notre part de responsabilité dans le maintien de cette cohérence pour les décennies à venir.

Les objectifs d'excellence très particuliers tirent l'ensemble de nos activités vers le haut, en matière de technologie mais aussi s'agissant de notre responsabilité envers les forces armées et l'État. Certains industriels sont purement français ; d'autres, européens, comme MBDA ou Airbus. Divers accords garantissent notre pérennité sur les plans technologique et opérationnel, mais aussi en matière d'actionnariat et du droit de l'État face à un risque éventuel d'une prise de contrôle étrangère ou d'une réduction ou d'une délocalisation de l'activité. L'ensemble de ces risques sont couverts par le contrat liant Airbus à l'État. Ainsi, quelles que soient les évolutions de ces entreprises, le cœur de l'activité nucléaire reste sous contrôle des autorités françaises.

À travers ses deux filiales ArianeGroup et MBDA, Airbus se trouve au cœur de la dissuasion. En tant qu'actionnaire, notre objectif est de garantir la continuité de notre engagement et de faciliter les projets en coopération entre ArianeGroup et MBDA, sous l'égide de la DGA.

Je souhaite évoquer une question qui appelle notre vigilance. Les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) sont promus à la fois par des organisations non gouvernementales, opposées au concept même de dissuasion, et par des acteurs financiers – agences de notation, investisseurs, fonds de pension – qui, pour d'autres raisons, mais avec des objectifs convergents, les imposent progressivement de sorte que les investissements dans nos entreprises commencent à être freinés. En tant qu'entreprise cotée et visible, dont l'activité très large place la décarbonation au premier rang de ses préoccupations, Airbus est en première ligne dans ce débat. Il est important que la représentation nationale s'en saisisse.

En effet, il s'agit d'un débat à la fois de légalité et de légitimité : certains armements, comme les mines antipersonnel, les armes chimiques, le phosphore blanc, ou les armes à sous-munitions, sont interdits par des traités internationaux. Ces armes sont prohibées, et aucun acteur occidental responsable ne les développe, ne les produit ni ne les stocke. Cependant, ces acteurs financiers et ces ONG entretiennent la confusion entre ces armes prohibées, au sens légal, par les traités, et des armes dites controversées, ce qui relève d'un jugement subjectif. Cette confusion soulève d'importantes difficultés dans la communication vis-à-vis des ONG et de très nombreux investisseurs, qui sont loin d'être minoritaires.

La France, en tant que puissance nucléaire, s'inscrit dans le cadre du traité de non-prolifération. Celui-ci prévoit que seuls les cinq États dotés ont légalement la possibilité de développer, de produire et de déployer des armes nucléaires. De même, le traité d'interdiction des armes nucléaires entré en vigueur en 2021 ne change en rien les droits et obligations des États dotés – et donc de la France – en la matière.

La question nous est régulièrement posée par les ONG, les investisseurs et certaines administrations à Bruxelles. Il serait donc utile que notre analyse juridique soit formellement confirmée par les autorités françaises et la représentation nationale. Nous pourrions ainsi confirmer à nos interlocuteurs que le traité d'interdiction ne met pas la France hors-la-loi dans la poursuite de ces activités. Il s'agit là de réaffirmer la légalité – au sens du droit international – pour la France de disposer d'une force de dissuasion.

Toutefois, la légalité ne suffit pas : il nous faut entrer dans le domaine plus complexe de la légitimité, en développant, comme nos interlocuteurs, un véritable plaidoyer, détaillant les raisons pour lesquelles la France est légitime à détenir une capacité nucléaire. La première est que l'Otan est une alliance nucléaire, caractéristique clairement réaffirmée lors du sommet de Madrid en juin 2022, à laquelle participent les trente pays membres. Cinq de ses membres, en dehors des trois États dotés, font partie du partage nucléaire de l'Otan, dont l'Allemagne, qui concourt ainsi au déploiement des armements nucléaires. Cette légitimité n'isole pas la France, qui fait partie d'un ensemble de puissances nucléaires. Par ailleurs, les actions menées par la France, sa politique de stricte suffisance et les décisions, prises de manière unilatérale et proactive, sur l'interdiction des essais et l'arrêt du travail sur les matériaux fissiles, contribuent à cette légitimité.

Il est important que la défense de la légalité et de la légitimité de la dissuasion française assurée par les industriels soit relayée par vos propres travaux.

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J'ai bien noté votre souhait de voir la représentation nationale s'emparer de ce sujet. J'invite maintenant les représentants de groupe à prendre la parole.

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Nous assistons depuis plusieurs années à une évolution des champs opérationnels de la guerre : à l'origine, sur terre, puis en mer, et enfin dans les airs, les domaines de conflictualité se sont étendus et les champs de bataille se sont déplacés vers l'espace et le cyberespace. Ces nouveaux champs, liés l'un à l'autre, sont complémentaires des terrains opérationnels traditionnels. Le conflit en Ukraine en est un exemple concret : peu avant l'assaut du 24 février, une cyberattaque russe avait visé un réseau de satellites de l'opérateur américain ViaSat afin de mettre hors d'usage les consoles de communication mobiles de l'armée ukrainienne. Coordonnées avec d'autres offensives, ces attaques dans le domaine cyber peuvent donner un avantage sérieux à ses auteurs.

Parallèlement à la multiplication des cyberattaques, nous assistons à une militarisation et une arsenalisation de l'espace : attaques contre des satellites de renseignement, d'observation, de télécommunication ; augmentation du nombre de satellites militaires ; développement des techniques de défense antimissile et de missiles antisatellites ; brouillage de satellites et de systèmes de communication, ou encore piratage informatique.

Le domaine spatial et le cyberespace ouvrent un vaste champ de possibles, lourd de menaces pour la dissuasion nucléaire. En effet, l'efficacité de la stratégie de défense française, qui repose sur notre force de dissuasion, pourrait être remise en cause par l'arsenalisation de ces derniers.

Le chef l'état-major de l'armée de l'air et de l'espace est formel sur le rôle essentiel du domaine spatial : dans la présentation de sa vision stratégique parue début 2022, il déclarait « si nous perdons la guerre dans les airs et l'espace, nous perdrons la guerre et nous la perdrons rapidement. »

Selon vous, le phénomène que j'ai décrit présente-t-il davantage d'opportunités ou de menaces ? Quel est l'effet de l'arsenalisation sur la composante nucléaire aéroportée ? Comment prenez-vous en considération ces éventuelles menaces dans vos activités ?

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Pour le groupe Rassemblement national, la dissuasion nucléaire est le fondement ultime de l'indépendance française. Elle est d'autant plus indispensable dans un monde en proie à de fortes tensions géopolitiques susceptibles de menacer nos intérêts. Nous sommes donc convaincus qu'il est vital de moderniser notre force de frappe nucléaire, tant dans sa composante océanique qu'aérienne, mais également de soutenir avec vigueur notre BITD afin de conserver notre souveraineté dans ce domaine.

La semaine dernière, Emmanuel Macron a annoncé son souhait de renforcer la dissuasion nucléaire dans le cadre de la future LPM. Nous serons très attentifs au budget qui y sera consacré ainsi qu'au développement des différents programmes qui y sont liés, notamment le SNL3G et les nouvelles générations du missile M51 et du système air-sol.

Pourriez-vous préciser l'avancement de ces projets d'ampleur ? Êtes-vous confrontés à des difficultés particulières dans leur réalisation ? Quels seront les grands enjeux technologiques de la dissuasion nucléaire de demain ?

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Je souhaite réagir aux propos de M. Bouvier. Notre réussite industrielle est notamment mise à l'épreuve par la transformation de notre écosystème économique, marquée par de nombreuses privatisations ces vingt dernières années. Vous soulignez finalement les risques que présentait cette transformation. Il n'est pas possible d'imaginer que cette privatisation vous prémunisse du risque réputationnel, contre lequel, en réalité, le pouvoir politique ne peut rien. En revanche, l'État peut vous garantir, comme il le fait, une forme de sécurité juridique.

Par ailleurs, vous évoquez les raisons de la légitimité de la dissuasion nucléaire. Si je suis entièrement d'accord sur la deuxième partie de votre argumentation, selon laquelle la légitimité de la dissuasion se fonde sur l'attitude exemplaire de la France au regard du droit international, je ne crois pas que l'Otan puisse fonder à elle seule la légitimité de la France à posséder des armes nucléaires.

Je suis rapporteur d'une mission sur la maîtrise des fonds marins. La vision de Naval Group dans ce domaine repose sur l'idée que les fonds marins seront bientôt particulièrement fréquentés. Quels risques pouvez-vous envisager du point de vue de la sécurité de la dissuasion ?

Monsieur Roussel, l'essai Direct Ascent Anti-SATellite (DA-ASAT) russe de 2021 a démontré les moyens d'interception particulièrement importants que possède la Russie contre les moyens nucléaires, voire a dessiné les premières lignes d'une stratégie que nous pourrions qualifier de dissuasion spatiale. Partagez-vous cette analyse ?

La réduction des délais de réaction qu'implique l'hypervélocité représente-t-elle une menace de voir l'intelligence artificielle supplanter la décision humaine ?

Enfin, quels gains et menaces représentera selon vous le quantique ?

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En tant que puissance nucléaire autonome, nous devons nous réjouir que la volonté d'indépendance de la France, au travers de sa dissuasion, permette à des entreprises telles que les vôtres de développer des technologies essentielles pour l'ensemble de nos armées, mais pas seulement. Le Président de la République ne s'est donc pas trompé vendredi dernier, lors de ses vœux, en insistant sur la nécessité de renforcer notre dissuasion en lui donnant « tous les moyens d'assurer sa robustesse, sa fiabilité et sa modernisation ».

Si nous recevons vos quatre entreprises aujourd'hui, nous ne devons pas oublier les centaines de sous-traitants et partenaires qui constituent le tissu industriel complet de notre dissuasion et nous permettent de maîtriser l'ensemble de la chaîne de production. Je m'interroge justement sur la santé de ce tissu : l'ambition que nous poserons dans la prochaine LPM nécessite certainement des investissements et des recrutements. Existe-t-il des métiers ou des secteurs dans lesquels nous pourrions connaître des difficultés ? Les formations actuelles sont-elles adaptées à une dissuasion renforcée ?

Enfin, ArianeGroup exerce également des activités civiles. Je pense ici au lanceur Ariane 6, dont la construction a été délocalisée en Allemagne, alors que la technologie développée sur le lanceur doit servir à notre volet militaire. Ce déménagement est-il préjudiciable à notre souveraineté stratégique ?

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À l'occasion de la présentation des grands axes de la future LPM, le Président de la République a fait du renforcement et de la modernisation de notre outil de dissuasion nucléaire un axe majeur. Dans le cadre de la revue nationale stratégique, déjà, il précisait que l'indépendance de la dissuasion française doit être « pérennisée grâce à un suivi renforcé des équipes de recherche fondamentale et appliquée, et une consolidation des savoir-faire techniques, industriels et opérationnels lui étant indispensables ».

Tandis que l'État consent à un crédit de 5,6 milliards d'euros en 2023 sur la question, comment qualifieriez-vous aujourd'hui l'attractivité des industriels de défense vis-à-vis de chercheurs intéressés par le nucléaire militaire ? Sommes-nous face à un défi qui n'est pas uniquement lié à la distribution de moyens économiques, mais plus concrètement, à un défi lié à l'attractivité de la recherche dans le nucléaire ?

Par ailleurs, il est parfois difficile de bien voir si la modernisation de notre outil de dissuasion nucléaire est un moteur ou un frein à l'innovation des moyens militaires classiques. Dans quelle mesure l'exigence de modernisation de notre outil de dissuasion peut-elle s'accompagner de celle de nos outils plus classiques ?

En outre, dans le cadre de l'économie de guerre, mise en avant par le ministre des armées, celui-ci appelait récemment les industriels à prendre des risques et à produire plus et plus vite. Nous connaissons les limites que ces mêmes industriels rencontrent pour répondre aux demandes gouvernementales, notamment pour recruter des moyens humains, s'approvisionner en matières premières et faire face aux fragilités rencontrées par les prestataires. S'agissant de la modernisation de notre dissuasion nucléaire, êtes-vous susceptible de rencontrer des problèmes similaires ? Quels freins pourriez-vous rencontrer ?

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J'invite maintenant les autres députés à prendre la parole.

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M. Bouvier a évoqué plusieurs éléments qui m'ont rappelé le discours du président Mitterrand au Bundestag le 20 janvier 1982 : « Le pacifisme est à l'Ouest et les euromissiles sont à l'Est ».

Nous préparons la future LPM, qui traite, notamment, de la FANu comme d'une force de circonstance, et non permanente. Est-ce lié au fait que nous ne disposons que d'une seule plateforme pour catapulter les Rafale ? La LPM contient une ligne directrice sur le futur porte-avions qui remplacera le Charles de Gaulle. Serait-il possible de rendre la posture nucléaire de la version navale permanente en disposant de deux porte-avions pour assurer une quasi-permanence ? Quelles en seraient les conditions ?

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Ils sont 150 irradiés à avoir travaillé sur la base militaire de l'île Longue et qui se battent pour faire reconnaître leur maladie chronique comme maladie professionnelle. Monsieur Pommellet, alors qu'ils témoignent avoir travaillé sur les têtes nucléaires sans protection entre les années 1970 et 1996, un tiers est décédé avant 2019, pour une moyenne d'âge de 62 ans, tandis que les survivants subissent des conséquences médicales lourdes et continuent de se battre pour que l'État français assume ses responsabilités.

Ces travailleurs ne sont pas seuls en France, et révèlent une problématique plus grave. En effet, notre tableau de maladies professionnelles ne dénombre que trois variantes de cancers, quand vingt-trois sont reconnus comme conséquences de l'exposition aux essais nucléaires et vingt-neuf aux États-Unis. Un pays comme la France ne peut pas laisser mourir celles et ceux qui travaillent pour elle sans relâche et qui y laissent leur santé, voire leur vie.

Vous êtes garant des conditions de travail de vos employés. Quelles sont les dispositions de sécurité mises en place concernant les radiations ? Les sous-traitants amenés à travailler dans vos bâtiments sont-ils soumis à un suivi médical régulier ?

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Vous avez rappelé l'importance de la mobilisation des industriels français. Je tenais à vous rappeler l'importance du lien tissé avec les territoires que nous représentons.

Vous avez évoqué la disponibilité pleine et entière de vos collaborateurs et équipiers et leurs efforts continus pour contribuer à la construction, à l'entretien et à la maintenance de nos SNLE. Afin de recruter des personnels et de leur offrir des perspectives de carrière au sein de vos équipes, comment travaillez-vous avec l'éducation nationale pour attirer la nouvelle génération vers votre secteur ? Une bonne continuité est-elle assurée entre les formations professionnelles et technologiques de l'enseignement public et privé et vos besoins de spécialisation ? La formation et le maintien de techniciens et ouvriers qualifiés est un enjeu fort pour notre industrie et pour les territoires dont vous contribuez à faire la réputation.

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À l'occasion du soixantième anniversaire du traité de l'Élysée, la France et l'Allemagne ont déclaré conjointement soutenir, dans le cadre de la coopération structurée permanente, « le développement du dispositif Twister pour qu'il devienne la réponse européenne face aux menaces de couche supérieure, notamment les moyens hypersoniques ». Pourtant, la France n'est pas représentée dans le consortium retenu, alors qu'elle est le seul pays de l'Union européenne à développer des programmes hypersoniques, comme l'ASN4G ou le planeur hypersonique V-MAX, confié à ArianeGroup. Cette mise à l'écart française du projet européen d'intercepteurs de missiles hypersoniques n'est-elle pas inquiétante dans la perspective de garantir la crédibilité de la dissuasion nucléaire française à court, moyen et long terme ? La participation, par exemple, de MBDA n'aurait-elle pas pu offrir une synergie intéressante avec le développement de l'ASN4G ?

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Pierre Éric Pommellet, président-directeur général de Naval Group

Le principal risque de nos domaines industriels concerne en effet la ressource humaine. L'attractivité de l'industrie – et, plus encore, de défense nucléaire – est devenue un véritable défi, alors même qu'elle offre des perspectives de carrière dans des métiers exceptionnels, avec d'excellentes conditions économiques et salariales. Pourtant, de nombreux postes sont vacants. Par ailleurs, l'industrie est fortement implantée dans des territoires, dont certains ont perdu de leur attractivité.

Nous menons diverses actions pour y remédier. Dans le domaine naval, l'initiative du campus des industries navales (CINav) est menée conjointement par des industriels, des régions partenaires, l'éducation nationale ou encore le ministère des armées. Elle vise à identifier la centaine de métiers en tension, qui concernent à la fois les chaudronniers, les soudeurs, les mécaniciens, mais aussi les ingénieurs en cybersécurité, et à travailler avec l'éducation nationale et les centres de formation pour « navaliser » des formations. Nous avons défini des modules académiques d'une dizaine d'heures afin de donner envie aux jeunes de s'orienter vers l'industrie navale. En outre, l'école de soudage de Cherbourg rassemble plusieurs industriels – Orano, EDF et Naval Group – qui offrent aux jeunes, au terme de leur formation, l'opportunité de travailler sur les chantiers de SNLE ou dans le domaine du nucléaire.

Certes, l'industrie navale a l'avantage d'être profondément liée à la mer, qui continue à attirer des vocations, et nos actions portent leurs fruits, mais nous devons poursuivre nos efforts.

La difficulté à attirer des femmes dans nos métiers est une réalité et c'est un axe de développement. Naval Group compte environ 20 % de femmes et 15 % de femmes techniciennes. L'an dernier, seulement 5 % de femmes ouvrières ont été recrutées. Il s'agit à mon sens d'un problème sociétal. Or nous ne pouvons pas nous priver de la moitié de la ressource humaine du pays.

Outre la diversité, nous cherchons à travailler sur la pénibilité des métiers en démontrant que tous sont accessibles. Nous souhaitons améliorer l'environnement, la qualité de vie au travail, la sécurité et le suivi médical. À ce titre, Naval Group est engagé dans un programme vers le « zéro accident ».

L'industrie de défense peine davantage encore à recruter. Si la guerre en Ukraine a rappelé l'importance de ce secteur, ce dernier doit susciter des vocations. En outre, la défense contribue au développement durable des territoires. Ces messages doivent être répétés à nos jeunes générations, qui voient malheureusement la défense comme un secteur dont nous devrions nous affranchir. Or, il existe une forte synergie entre la propulsion nucléaire et le nucléaire civil, à la fois pour les compétences, les matériaux et les industries. Nous nous appuyons en effet sur les mêmes industriels.

La dissuasion est un démultiplicateur de notre activité industrielle. En effet, si Naval Group est considéré comme l'un des meilleurs acteurs de son secteur, c'est notamment grâce aux compétences et à la compétitivité que nous avons acquises par la dissuasion nucléaire.

S'agissant de l'état d'avancement de nos programmes, vous pouvez consulter en ligne leurs objectifs calendaires et contractuels. La dissuasion impose un rythme cadencé : l'économie de guerre nous appelle à respecter les contraintes budgétaires. Naval Group est toujours au rendez-vous, qu'il s'agisse de la maintenance des sous-marins, du démantèlement des précédentes générations et du programme SNLE 3G, qui entrera en phase de réalisation en 2025. Les premiers éléments de la chaufferie du bateau sont actuellement usinés à Nantes-Indret, et les premières tôles de coque seront bientôt fabriquées à Cherbourg.

Monsieur Saintoul, la discrétion est l'une des exigences de la dissuasion. Le SNLE, qui gagnera encore en discrétion acoustique dans sa troisième génération, est un objet quasiment indétectable. En revanche, il doit pouvoir se diluer malgré la densité de l'activité à proximité de nos côtes. Il faut donc développer autour du SNLE les compétences lui permettant de se diluer en toute sécurité. Il s'agit par exemple de la guerre des mines, projet de la future LPM, sur laquelle Naval Group a engagé un programme avec la Belgique et les Pays-Bas, que le ministère des armées souhaite rejoindre. La lutte anti-sous-marine, en outre, s'appuie sur les frégates de lutte anti-sous-marine et les avions de patrouille maritime, qui détectent toute menace aux abords de nos côtes. La mer est en effet un espace commun. Un projet sur la patrouille maritime du futur a récemment été annoncé par le ministère des armées. Enfin, nous devons nous doter de systèmes de défense contre les drones. Le ministre des armées a déclaré que la France avait raté le virage des drones : la LPM doit permettre d'y remédier. Par ailleurs, la France peut encore affirmer sa compétitivité dans le domaine des drones de surface et sous-marins.

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André-Hubert ROUSSEL, président exécutif d'ArianeGroup

Le continuum entre la bataille balistique et la bataille spatiale est de plus en plus marqué : il faut utiliser les compétences et les technologies acquises pour croiser les regards et garder un temps d'avance. Pour le compte du ministère de la défense, ArianeGroup suit le développement des défenses et des avancées balistiques à travers le monde afin d'anticiper le niveau de pénétration que nécessiteront les forces de dissuasion – pour maintenir au même niveau le glaive et le bouclier.

ArianeGroup a également développé depuis plus dix ans des technologies et des systèmes de surveillance de l'espace. Nous sommes désormais liés par un contrat pluriannuel avec le commandement de l'espace.

Pour assurer ce continuum de défense et de découragement, ArianeGroup participe également aux actions menées dans le cadre du fonds européen de défense, comme le projet de surveillance spatiale Sauron.

Vous avez aussi évoqué les armes hypersoniques. En plus des missiles balistiques et des missiles de la composante aéroportée développés par MBDA. il existe désormais des planeurs hypersoniques. Lancés par des missiles balistiques, ils ne sont pas dotés de propulsion, mais ils peuvent être manœuvrés. La Chine et la Russie, notamment, se sont dotées de ce type d'armements. Et en réponse, les États-Unis développent des armes hypersoniques du même type. La France a lancé le démonstrateur V-MAX, que vous avez mentionné, et l'a confié à ArianeGroup pour permettre d'acquérir des technologies pour ses planeurs hypersoniques. Le premier vol est programmé et un deuxième démonstrateur, V-MAX 2 en sera le prolongement. En parallèle, la DGA nous a confiés plusieurs études amont sur les futurs systèmes d'armes qui s'appuieraient sur ces technologies hypersoniques.

Pour répondre à Mme Poueyto, je tiens à préciser qu'ArianeGroup n'a pas délocalisé d'activité en Allemagne. Ariane est un programme européen sous l'égide de l'Agence spatiale européenne (ESA), développé en collaboration avec treize États européens. En respect des règles du retour géographique de l'ESA, les programmes sont déployés dans les pays à hauteur de leur contribution au financement du développement de ces technologies. ArianeGroup SAS est le premier contributeur de ce programme, à hauteur de 50 %, et est maître d'œuvre de l'ensemble du lanceur, tandis que d'autres industriels français y participent à plus petite part. Le second contributeur est l'Allemagne, à hauteur de 20 %, au travers d'ArianeGroup en Allemagne et de MT Aerospace, filiale de OHB. Enfin, la part de l'Italie s'élève à 10 % environ, au travers d'Avio, maître d'œuvre du deuxième lanceur européen, Vega.

S'agissant de la propulsion liquide qui équipe Ariane, trois différents moteurs sont conçus en France sur le site de Vernon : le Vulcain, moteur d'étage principal, le Vinci, moteur d'étage supérieur qui équipera Ariane 6, et le Prometheus, moteur futur pour les lanceurs réutilisables. Le développement de ces moteurs reste localisé en France. Mais dans le cadre de ce programme en coopération plusieurs éléments, tels que les chambres de combustion de ces trois moteurs, sont développés chez ArianeGroup en Allemagne. C'est dans ce cadre et pour faire face à la compétition internationale également qu'il a été décidé d'enclencher le transfert de l'intégration et des tests du Vinci sur le site Lampoldshausen en Allemagne dans un souci d'optimisation industrielle globale à l'échelle du programme Ariane 6. Ce transfert n'engendre pas de perte de savoir-faire en France.

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Amiral (2S) Hervé de Bonnaventure, conseiller défense du président-directeur général de MBDA

Madame Poueyto, la CNA chez MBDA associe environ 600 entreprises en direct. Certains grands partenaires comme Thalès, Safran, ArianeGroup ou Roxel en font partie, ainsi que des petites et moyennes entreprises (PME) et d'entreprises de taille intermédiaire (ETI) – par exemple Akira, Pyromeral, Gattefin, LGM, Daher, Bertin, Aresia, Atermes ou UGV. On estime qu'environ 40 % des financements de la CNA bénéficient aux PME et ETI.

S'agissant de la formation, nous sommes liés par un partenariat avec la région Centre concernant les lycées professionnels. Chez MBDA, nous accueillons environ 140 apprentis ou stagiaires chaque année, 224 personnes ont été recrutées en région centre en 2022 et nous avons un objectif de 240 recrutements en 2023. Grâce au soutien de la région Centre, nous avons développé une plateforme collaborative « Printing de Bourges ». Cette initiative, portée par MBDA, le CETIM Centre Val de Loire et Nexter, permettra de créer dans le Cher les conditions de l'émergence d'un écosystème industriel compétitif et innovant autour des technologies d'impression 3D. Nous sommes très attachés au développement de l'écosystème industriel de la région.

Madame Pic, la CNA nous permet de stimuler nos efforts de recherche et de développement et nous permet d'attirer les meilleurs ingénieurs du marché et d'investir dans des moyens exceptionnels tels que notre super-calculateur du Plessis-Robinson.

L'initiative Skyshield, menée par l'Allemagne avec les partenaires européens, consiste à lancer des boucliers d'interception sol/air pour protéger l'Europe. L'Élysée devra décider si nous rejoignons cette initiative. Toutefois, MBDA, avec ses partenaires italiens et britanniques, a une grande capacité dans le domaine de la défense sol/air, sur l'ensemble du spectre. Il est regrettable que cette initiative ne participe pas à la souveraineté de la BITD européenne.

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Antoine Bouvier, directeur de la stratégie et des affaires publiques d'Airbus

Monsieur Saintoul, il me semble pertinent de parler, comme vous l'avez fait, de sécurité juridique. Cette expression s'applique à tous les acteurs de la dissuasion, aux forces, aux autorités de l'État, aux fonctionnaires qui prendront des décisions ou aux chercheurs qui travailleront sur ces sujets. Dans un contexte où les contentieux se multiplient, chacun, dans nos entreprises, s'expose à un risque dès lors qu'il existe un point d'entrée sur une activité de nature pénale ou à supporter un objectif qui n'est pas juridiquement établi dans le droit international. Si la dissuasion n'est pas remise dans son contexte, la sécurité juridique de tous les acteurs est menacée. Ainsi, une approbation de l'analyse juridique des États contribuerait à cette sécurité.

Par ailleurs, les questions d'ESG ne se limitent pas aux actionnaires. Si j'ai mentionné l'accord de 2012 sur la protection du noyau dur d'actionnaires et du groupe Airbus, c'est que ce risque avait été identifié et traité. Cependant, les questions d'ESG concernent aussi les financements bancaires, les assureurs, les fournisseurs, les transporteurs, et, plus généralement, l'attractivité et l'acceptabilité de ces activités par les personnes que nous souhaitons recruter. Ce débat, me semble-t-il, ne doit pas être occulté.

Nos infrastructures spatiales sont de plus en plus vitales pour la société mais par nature vulnérables. Leur protection restera toujours très lacunaire. Ainsi, le concept de dissuasion devrait s'appliquer à nos infrastructures spatiales : il faut pouvoir identifier et caractériser l'agresseur, et que ce dernier soit conscient que nous avons également des moyens de rétorsion. Ces termes correspondent à ceux de la grammaire de la dissuasion nucléaire. Ce formidable multiplicateur de puissance qu'est le spatial représente également un facteur de vulnérabilité, que nous devons traiter par la protection – dont le niveau restera nécessairement limité – et par des technologies d'action dans l'espace.

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Pierre Éric Pommellet, président-directeur général de Naval Group

Le dimensionnement de la force aéronavale est un sujet non pas industriel, mais capacitaire et budgétaire. Le 8 décembre 2020, au Creusot, le Président de la République a annoncé que le futur porte-avions serait à propulsion nucléaire, ce qu'il a confirmé lors de ses vœux aux Armées, en indiquant que la LPM proposerait un porte-avions nucléaire pour une mise en service à horizon 2038. Pour être capables de réaliser cet objet, les industriels doivent assurer la continuité des compétences. Certains de ceux qui ont réalisé le porte-avions Charles de Gaulle comptent toujours parmi nos équipes. Le développement d'une nouvelle chaufferie nucléaire par TechnicAtome était donc nécessaire pour pérenniser les compétences de R&D et les bureaux d'études du groupe.

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Des freins industriels empêcheraient-ils de proposer dans le calendrier la construction du porte-avions et celle du deuxième qui suivrait ?

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Pierre Éric Pommellet, président-directeur général de Naval Group

La LPM impose une trajectoire pour le porte-avions nucléaire. L'industrie répond aux sollicitations. Les questions de calendrier ne sont pas un sujet industriel. Il serait plus complexe de construire deux porte-avions en même temps que de les séquencer. Nous sommes chargés de construire le socle industriel qui permet aux militaires et aux politiques de prendre les bonnes décisions. Ces dernières, en retour, nous évitent un effondrement des compétences qui rendrait impossible tout redémarrage. C'est la continuité, notamment celle des compétences, qui fait la force de la dissuasion.

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Je tiens à vous remercier pour la qualité de vos exposés. Je vous invite à conclure en formulant vos éventuels vœux pour la France et ses industries de défense.

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Antoine Bouvier, directeur de la stratégie et des affaires publiques d'Airbus

Je souhaite à la France que son économie de guerre lui permette de protéger les performances et les technologies qui seront les garants de la supériorité opérationnelle de nos forces sur le long terme. J'espère que l'ensemble des acteurs saura travailler de concert à cet égard. Par ailleurs, un débat constructif doit se poursuivre entre ces acteurs et la représentation nationale. Enfin, les meilleurs équipements et les meilleures doctrines ne remplaceront jamais l'esprit de défense, qui naît d'un consensus aussi large que possible, et que la représentation nationale a la responsabilité et la vocation de construire.

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Amiral (2S) Hervé de Bonnaventure, conseiller défense du président-directeur général de MBDA

MBDA a été au rendez-vous depuis quarante ans dans ce domaine de la dissuasion. Vous pouvez compter sur l'engagement des femmes et des hommes de MBDA pour apporter à la France le vecteur futur de la composante aéroportée de la dissuasion nucléaire au niveau des exigences de performance souhaité.

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Pierre Éric Pommellet, président-directeur général de Naval Group

Nous sommes conscients de l'effort consenti par la nation pour son outil de défense. Il nous engage à être les meilleurs pour défendre notre pays.

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André-Hubert ROUSSEL, président exécutif d'ArianeGroup

C'est une grande force de la France d'avoir réussi à construire une telle base industrielle, qui attire nos talents. Nous devons poursuivre nos efforts en ce sens.

La séance est levée à treize heures dix.

Membres présents ou excusés

Présents. - M. Jean-Philippe Ardouin, M. Pierrick Berteloot, M. Christophe Blanchet, M. Frédéric Boccaletti, M. Benoît Bordat, M. Hubert Brigand, M. Yannick Chenevard, M. Jean-Pierre Cubertafon, Mme Christelle D'Intorni, Mme Martine Etienne, M. Yannick Favennec-Bécot, M. Jean-Marie Fiévet, Mme Anne Genetet, M. Frank Giletti, M. Christian Girard, Mme Charlotte Goetschy-Bolognese, M. José Gonzalez, M. David Habib, M. Jean-Michel Jacques, M. Loïc Kervran, M. Bastien Lachaud, M. Fabien Lainé, Mme Anne Le Hénanff, Mme Delphine Lingemann, Mme Brigitte Liso, Mme Alexandra Martin, Mme Pascale Martin, M. Pierre Morel-À-L'Huissier, M. Christophe Naegelen, M. Laurent Panifous, Mme Anna Pic, M. François Piquemal, Mme Josy Poueyto, M. Fabien Roussel, M. Lionel Royer-Perreaut, M. Aurélien Saintoul, Mme Isabelle Santiago, M. Philippe Sorez, M. Michaël Taverne, Mme Sabine Thillaye, Mme Mélanie Thomin, Mme Corinne Vignon

Excusés. - M. Julien Bayou, Mme Valérie Bazin-Malgras, M. Christophe Bex, Mme Yaël Braun-Pivet, M. Steve Chailloux, Mme Cyrielle Chatelain, M. Emmanuel Fernandes, M. Thomas Gassilloud, Mme Michèle Martinez, Mme Valérie Rabault, M. Mikaele Seo