Commission des affaires européennes

Réunion du mercredi 6 mars 2024 à 15h00

Résumé de la réunion

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  • PME
  • paiement
  • retard
  • trésorerie

La réunion

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COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

Mercredi 6 mars 2024

Présidence de M. Pieyre-Alexandre Anglade, Président de la Commission

La séance est ouverte à 15 heures 04.

I. Abandonner la proposition de règlement du Parlement européen réduisant strictement les délais de paiement pour les commerçants : examen de la proposition de résolution européenne de M. Fabien DI FILIPPO et plusieurs de ses collègues (M. Fabien DI FILIPPO, rapporteur) (n°°1904)

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Avec son projet de règlement sur les délais de paiement, la Commission européenne semble avoir fait sienne la maxime populaire selon laquelle l'enfer est pavé de bonnes intentions.

La proposition législative présentée en septembre dernier par le commissaire Thierry Breton se dit favorable aux petites et moyennes entreprises. Selon les mots du commissaire, le projet de règlement vise à « simplifier la vie des entreprises ». Il est permis d'en douter fortement.

Le délai de paiement s'entend comme le délai dans lequel il est possible de régler une marchandise ou une prestation de services. En la matière, la France n'a pas attendu l'Union européenne pour se doter d'un cadre légal structuré et adapté aux différentes situations existantes. Depuis la loi de modernisation de l'économie, le législateur français a uniformisé le cadre légal en gravant dans le marbre un délai légal de base de 60 jours. La possibilité d'un délai dit fin de mois permet, de plus, aux entreprises d'éviter la désorganisation du règlement des fournisseurs chaque jour en consacrant certains jours dans le mois au paiement. Par ailleurs, de multiples dérogations existent dans des filières très spécifiques comme la joaillerie, les articles de sport ou encore le commerce du jouet. Ces filières connaissent des cycles économiques marqués par la saisonnalité. Les dérogations octroyées leur ont permis de poursuivre leur activité. Plus encore, elles ont permis aux commerçants de résister aux secousses de la conjoncture économique et à la concurrence internationale.

Cette architecture française en matière de contrôle de délais de paiement a été efficace sur les retards de paiement. Notre pays se classe 4ème au niveau européen, donc parmi les pays les mieux-disants, avec moins de douze jours de retard. La loi de modernisation de l'économie n'y est pas pour rien. Elle a permis à l'ensemble des acteurs de modifier leurs pratiques et a contraint les mauvais payeurs à s'amender. En effet, la France dispose d'un puissant dispositif de contrôle des délais de paiements.

La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), dépendante du ministère de l'économie, effectue un travail de vigilance qui s'est accru ces quinze dernières années. Enquêtes, sanctions, amendes administratives et désormais publications dans des publications dédiées, les entreprises responsables de retards de paiement ne peuvent plus agir impunément. Et c'est heureux puisque 75 % des PME règlent leurs factures à temps. Il est normal qu'il en soit de même pour les autres. Les grandes entreprises mises à l'index sont contraintes à un changement de mentalité. D'ailleurs la Banque de France procède désormais à une notation tenant compte des délais de paiement.

La proposition de règlement européen ne vient certes pas de nulle part. Les avancées du marché unique ont poussé les instances européennes à s'interroger sur les différences entre économies européennes en matière de règlement de fournisseurs, notamment dans le cadre du commerce transfrontalier. Longtemps, l'Union européenne a prôné une approche soucieuse des spécificités nationales et des équilibres locaux, c'était la démarche à l'origine des deux précédentes directives sur le sujet en 2000 et 2011.

Le texte sur lequel porte la proposition de résolution européenne que je vous présente a totalement changé de paradigme. De la préconisation nous sommes passés à l'injonction. Le délai de paiement est désormais fixé à 30 jours sans aucune exception possible. Alerté par un commerçant de ma circonscription sur les effets potentiellement cataclysmiques d'un tel texte, j'ai souhaité m'emparer de ce sujet pour éviter que ce projet de règlement technocratique et draconien n'aboutisse. Il témoigne d'une vision totalement détachée des réalités économiques. La preuve en est que l'étude d'impact qui vient en appui du texte ne contient aucun chiffre précis sur les répercussions que le règlement aurait une fois mis en pratique. La Commission européenne évoque des retards de paiement pour justifier son projet de texte mais elle n'a en réalité clairement pas saisi les enjeux. Elle agglomère délai de paiement, retard de paiement et long retard de paiement. Le délai de paiement a une justification économique. Il permet de s'assurer de la réalité de la livraison des produits ou de l'exécution d'un service. Vouloir gommer cette réalité en abaissant le délai de paiement n'a aucun sens. Les entreprises ne seront pas payées plus en temps et en heure par leurs fournisseurs parce que le délai aura été réduit. Tant qu'aux retards importants ils ne représentent que 8 % de tous les retards. Ils sont un vrai problème mais la proposition de la Commission pêche en pensant résoudre tous les problèmes avec un seul outil. Le remède ici proposé est pire que le mal.

Les multiples auditions que j'ai menées dans le cadre de cette proposition de résolution ont fait ressortir un constat unanime : pas un seul acteur économique n'est demandeur d'un changement de législation et le projet de règlement est une aberration économique. Que nous parlions des petites, des moyennes ou des grandes entreprises, toutes ont dit durant les auditions qu'elles n'avaient rien à gagner avec ce nouveau délai. J'ai rencontré des représentants du commerce, et de l'industrie, des représentants des PME comme des très grandes entreprises et le message était identique sans un son de cloche dissonant. L'ensemble des acteurs est très inquiet des retombées économiques qu'un tel texte pourrait entraîner.

Pour le commerce, cela représenterait un surcoût de trésorerie de 30 milliards d'euros à l'échelle nationale. Au niveau européen, la facture monterait à 135 milliards d'euros. En effet, toute réduction des délais nécessitera de payer les fournisseurs plus rapidement et donc de disposer des liquidités suffisantes. Avec une croissance française d'à peine 1 %, une inflation encore considérable et une vague de faillites très inquiétante, nous courons le risque d'alourdir la dette des entreprises et de leur rendre l'accès au crédit plus difficile encore. Les banques ne sont déjà pas enclines à prêter au regard de la conjoncture. Elles le seront d'autant moins à des entreprises qu'elles jugent fragilisées.

Une autre lacune majeure de ce texte est d'ignorer le phénomène de distorsion de concurrence internationale. Vouloir légiférer au niveau européen peut être utile. Mais cela ne lie aucunement nos partenaires internationaux qui continueront d'appliquer leur propre réglementation. Avec ce nouveau délai de paiement, nous nous lierons les mains pour rien. C'est une vertu dont les seules conséquences seront de favoriser d'autres pays et de délocaliser des pans entiers de l'économie. Nous nous retrouverons à importer toujours plus, et donc à creuser notre déficit commercial déjà élevé.

Enfin, n'oublions pas cette spécificité française qu'est le secteur du livre. Il bénéficie d'une exonération totale en matière de délai de paiement. Cette dérogation a permis à ce secteur de demeurer vivant. Face aux grandes enseignes et aux ventes en ligne, les librairies indépendantes auraient disparu depuis bien longtemps. Notre pays dispose d'ores et déjà des outils nécessaires pour réduire les retards de paiement et contrôler le respect des délais. Ce n'est d'ailleurs pas pour rien que la Commission européenne a prétendu s'inspirer de certaines de nos bonnes pratiques. Il en va ainsi de l'observatoire des délais de paiements dont elle souhaite créer une version européenne.

Voilà pourquoi, chers collègues, je vous invite à voter en faveur de la proposition de résolution européenne. Elle envoie un signe clair aux autorités européennes sur l'inopportunité de ce texte. Elle permet aussi de mobiliser le gouvernement sur un sujet qui concerne l'ensemble de notre économie. Je vous remercie.

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Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

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Cette proposition de résolution européenne est très importante car elle a vocation à accompagner les petites entreprises et les entreprises de taille intermédiaire sur leurs difficultés de trésorerie qui représentent un coût de 12 milliards par an. Ce sont donc des sommes importantes pour des structures qui ont parfois des rentabilités relativement faibles. Nous savons par ailleurs que les délais de paiement représentent souvent une des raisons des faillites des entreprises. Nous ne souhaitons pas une suppression complète de la proposition. Nous souhaitons seulement revenir sur l'article 3 qui nous paraît être celui qui pose le plus de difficultés, comme Madame la ministre Olivia Grégoire le proposait. Nous avons deux propositions d'amendements qui s'appuient sur le bon travail présenté par M. di Filippo en apportant la touche du parti Renaissance pour nuancer certains points.

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En tant que législateur, il nous faut offrir un cadre sécurisant pour les entreprises, sans toutefois porter atteinte à leur liberté contractuelle de manière disproportionnée. La France s'est dotée de plusieurs dispositifs dans ce domaine, notamment depuis la loi de modernisation de l'économie (LME) du 4 août 2008. Le modèle français autorise un délai de paiement allant jusqu'à 60 jours et se fonde sur une forte liberté contractuelle entre les parties. De plus, les rôles respectifs de la DGCCRF et de la Banque de France ont donné à la France un appareil qui se singularise au niveau européen par son efficacité. Ainsi, Bercy réalise près de milles contrôles par an, pour 30 % d'anomalies. En effet, 75 % des PME s'acquittent de leurs factures en respectant les délais.

La proposition européenne présentée par Thierry Breton, commissaire européen du marché intérieur, entend limiter les délais de paiement à 30 jours maximum, ce qui correspond à une division par deux du délai, et ce sans dérogation possible. La Commission européenne appuie sa proposition sur un rapport d'analyse d'impact de six pages, ce qui témoigne du mépris de l'Union européenne pour la souveraineté des États. La Commission européenne propose un instrument inadapté qui porte atteinte à la liberté contractuelle des entreprises, notamment pour les PME qui nécessitent une adaptabilité et flexibilité particulière. La France, qui figure en bon élève dans ce domaine, n'a pas à se soumettre à cette réglementation inopérante et contre-productive. Je vous remercie.

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Je tiens tout d'abord à souligner l'excellent travail de notre collègue Fabien Di Filippo. De façon plus générale, il est extrêmement valorisant pour la commission des affaires européennes de pouvoir traiter de sujets aussi précis et de permettre à l'Assemblée nationale de prendre position à l'issue d'un travail commun. J'espère que notre commission pourra adopter sa position à l'unanimité s'agissant d'un sujet extrêmement important de modification des délais de paiement pour les commerçants. L'objectif n'est pas ici de faire un coup politique mais de pouvoir avancer concrètement pour nos entreprises.

Je me félicite également de la capacité de la commission des affaires européennes de pouvoir écrire, rédiger et travailler sur les propositions de résolution dans un laps de temps court mais de façon efficace.

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Les délais de paiement excessifs et les retards de paiement érodent la compétitivité, freinent la croissance, et dans certains cas menacent même la survie de certaines entreprises, au premier rang desquelles les PME. Lutter contre ces phénomènes doit donc bien évidemment être une priorité européenne.

L'Union européenne s'efforce depuis les années 1990 de mettre en place un cadre juridique hautement harmonisé en faveur de la réduction et du bon respect des délais de paiement. Mais le texte européen en vigueur est imparfait, à la fois par l'absence de délais de paiement maximal pour les transactions entre entreprises, mais aussi par le manque de dissuasion des mesures répressives en ce qui concerne les retards de paiement.

D'après la dernière grande consultation des entrepreneurs réalisée fin 2023 par la CCI France, 40 % des entreprises françaises seraient confrontées à des retards de paiement, 50 % d'entre elles jugent même que ces retards sont de plus en plus fréquents. À l'échelle européenne, 25 % des faillites seraient dues à des retards de paiement selon la Commission européenne. Nous ne pouvons ignorer ces chiffres. Nous pensons donc au groupe Démocrate que l'amélioration de la situation passe par le renforcement du cadre juridique européen puisque le maintien de différences trop importantes entre États membres quant aux règles et pratiques de paiement créé des distorsions de concurrence entre les entreprises, ce qui affaiblit notre marché unique.

C'est dans ce sens que le projet de règlement a été déposé par la Commission en septembre dernier. Elle propose de fixer à 30 jours stricts les délais de paiement à toutes les transactions commerciales « B to B », et donc créer un environnement plus équitable pour les PME qui n'ont pas nécessairement la capacité de négocier les délais de paiement avec leurs clients. Mais cette proposition de raccourcir à 30 jours, sans dérogation possible, ne tient pas compte du tissu économique français et des réalités des entreprises. C'est la raison pour laquelle nous vous rejoignons monsieur le rapporteur : l'article 3 du projet de règlement doit être amendé pour prendre davantage en considération l'impact sur les trésoreries des entreprises, le planning de déploiement des outils de facturation dématérialisés, mais aussi les spécificités de certains secteurs d'activité.

Cependant, nous ne vous rejoignons pas dans l'invitation qui est faite au gouvernement de rejeter l'entièreté du projet de règlement. Plusieurs mesures pourraient être très efficaces. Je pense à la volonté de renforcer les pouvoirs de contrôle en exigeant des États membres de désigner des autorités nationales en charge de l'application des dispositions du règlement, mais aussi à la volonté de mieux réprimer les pratiques illégales en durcissant les sanctions applicables. En ce sens, avec d'autres groupes, nous avons déposé un amendement pour modifier dans une approche constructive le texte, en invitant le gouvernement à concentrer sa mobilisation sur une nouvelle évaluation des dispositions prévues à l'article 3. Si cet amendement est adopté, le groupe démocrate votera en faveur de cette proposition de résolution.

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L'article 3 de la proposition de règlement de la Commission européenne visant à mettre à jour la directive sur les retards de paiement, comme l'ont rappelé mes collègues avant moi, a provoqué de vives inquiétudes, tant au niveau local qu'européen. La mise en place d'un délai strict de 30 jours risque de créer un large transfert qui pénalisera la trésorerie de nombreuses PME à travers le pays. Certes, nous avons besoin d'une harmonisation européenne des délais de paiement. Le règlement de la Commission présente des avancées bienvenues sur ce plan, proposant notamment que chaque pays se dote d'une autorité dédiée, à l'image de ce qui est pratiqué en France avec la DGCCRF. Mais on ne peut pas se satisfaire de la rédaction actuelle de ce règlement, ni de la rédaction actuelle de cette proposition de résolution qui condamne par principe la proposition de la Commission sur le seul fondement de son article 3. C'est pourquoi le groupe Horizons et apparentés propose, avec les groupes Renaissance et Démocrate, une réécriture de la proposition de résolution. Il s'agit de laisser une chance à la négociation afin que le règlement final, issu des discussions entre le Parlement européen et le Conseil, préserve les intérêts des PME. Nous restons donc très clair : la proposition de la Commission européenne ne peut nous satisfaire en l'état, et nous voterons en faveur de cette résolution si elle est amendée en fonction des échanges que nous aurons.

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Votre proposition de résolution est de bon sens. En effet, réduire les délais de paiement pour les commerçants et artisans aura inéluctablement un effet néfaste sur les trésoreries, avec un risque accru pour les petites entreprises. Deux choix s'imposeront alors : limiter drastiquement le stock, et ainsi le choix des produits vendus, ou bien tendre un flux tendu avec par exemple la vente sur image avec pour conséquence un accroissement des délais de livraison pour chaque produit vendu hors stock, mais aussi un surcoût lié à des envois plus nombreux avec un risque de suppression du franco de port.

Un des risques majeurs est de voir disparaître les petites structures ne disposant que d'une faible trésorerie. De plus, si les consommateurs ne peuvent plus acheter instantanément par manque de stocks, ils risquent de se tourner vers des boutiques virtuelles, privilégiant l'achat par internet au détriment des magasins qui font partie intégrante des tissus économiques locaux.

De plus il est fréquent que des arrangements avec des dates de paiements différées soient effectués entre professionnels, lors par exemple de ventes saisonnières ou de chantiers longs dans l'artisanat. En effet, lorsqu'un marché public est passé, des paiements à 90 jours sont courants, ainsi l'artisan s'arrange fréquemment avec le fournisseur pour allonger les paiements des fournitures inhérentes à ce chantier. Interdire les paiements au-delà de 30 jours reviendra à imposer également aux collectivités cette disposition.

Néanmoins il est également important de rappeler que plus les sociétés sont importantes, plus elles ont du poids dans les négociations. Il y a sur ce sujet matière à réflexion, même pour un défenseur du grand capital ! Cependant, légiférer au niveau européen de manière drastique tel que proposé engendre de tels risques que ce n'est pas la solution appropriée. Au regard de ces arguments, et même si des améliorations en matière de négociations contractuelles de paiement peuvent et doivent être apportées, il me paraît judicieux d'abonder dans le sens de cette proposition de résolution européenne.

Je tiens à remercier Fabien Di Filippo pour cette initiative. Même si les services de notre commission nous informent en amont, chaque semaine, des textes qui seront soumis à notre assemblée et s'ils nécessitent une transposition dans le droit national de façon générale, nous manquons de temps pour prendre connaissance et réagir à des propositions de directives ou règlements européens. J'insiste donc sur le fait que c'est une bonne initiative, puisque nous ne sommes pas assez nombreux à nous saisir des possibilités que nous avons pour apporter des appréciations en amont sur des textes européens.

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Je comprends les inquiétudes de Louise Morel et de Denis Masséglia sur l'article 3 de la proposition de règlement. Je souhaite que le retrait de l'article 3, que soutient la proposition de résolution, soit conservé. Le reste peut être un peu édulcoré, à l'image du titre qui doit être corrigé en ne visant pas seulement les commerçants, puisque les acteurs de l'industrie sont au moins aussi inquiets que les commerçants. Ceux de l'artisanat sont également touchés ainsi que ceux du secteur bancaire.

Sur les autres points, il existe déjà en France un observatoire des délais de paiement. En ce qui concerne les organes de contrôle, la DGCCRF servirait plutôt de modèle pour les autres pays. Je mets juste un petit bémol : la proposition de règlement parle d'organes de contrôle qui auraient des pouvoirs de sanction. Dans ce cas, il faudra voir en France comment cette disposition aura à s'appliquer compte tenu des instances juridiques déjà existantes. En ce qui concerne les sanctions, ces dernières pourraient s'appliquer de façon plus sévère. Aujourd'hui, s'appliquent des sanctions forfaitaires qui sont symboliques, mais ne posent pas de difficultés.

Pour répondre à Annick Cousin, la liberté contractuelle est pour les personnes que j'ai auditionnées quelque chose de fondamentale. En France, même s'il y a des exceptions dans certains secteurs, le contrôle sur les 60 jours est déjà excessivement cadré. Or, comme en droit français nous avons tendance à transposer les directives de manière très stricte, la base serait plutôt de 30 jours pour tout le monde avec une approche assez stricte, alors que d'autres pays accorderaient une latitude bien plus large aux acteurs économiques.

Pour répondre à mon collègue Pierre-Henri Dumont, nous serions le deuxième Parlement national à émettre un avis sur le sujet après le Parlement allemand. C'est important, puisque, même si le débat a été repoussé au Parlement européen, cet avis donnerait un signal important.

Enfin pour mon collègue André Chassaigne, qui a parfaitement saisi les enjeux, je dirais que ce travail m'a beaucoup interrogé sur le fonctionnement de la Commission européenne, qui a parfois des raisonnements macroéconomiques très théoriques, que l'on pourrait même qualifier de « hors-sol ». Cela manque de contrôle démocratique. De plus, il y a des surcoûts logistiques et environnementaux qui ne sont pas pris en compte par la Commission. Vous avez aussi soulevé un point très important, c'est celui de l'avantage que l'on donné aux marketplaces, ces plateformes d'achats sur internet, qui n'ont pas de stocks, et qui vont donc devenir encore plus compétitives par rapport à des petits acteurs. Je pense ici aux petits indépendants des centres-villes, dans le domaine de la chaussure ou du textile par exemple. Je ne vois pas comment ils pourraient surmonter ce cap.

Je tiens compte de toutes vos observations qui étaient tout à fait pertinentes. J'accepte volontiers de modifier cette proposition de résolution dont le point essentiel concerne sur l'article 3. Cet article viendra percuter de plein fouet le fonctionnement de l'économie française. Sur les autres points nous sommes déjà en avance.

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Avec ma collègue Sabine Thillaye, nous avons présenté une communication il y a un an sur ce même sujet. Les retards de paiement augmentent lors des périodes de perturbations économiques et de crises et affectent tout particulièrement les PME qui se voient imposer des délais abusifs de la part de leurs fournisseurs plus puissants. Nous sommes dans un contexte inflationniste nécessitant des besoins en fonds de roulement supplémentaires à court terme pour les entreprises. J'aurai donc deux questions : dispose-t-on d'un panorama des effets attendus par secteur d'activité et par taille d'entreprise ? Dispose-t-on de l'avis du secteur bancaire sur les effets attendus sur les besoins de fonds de roulement ? Les propositions avancées semblent apporter une nuance au problème posé sans pour autant que nous connaissions l'état des négociations entre les États.

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Sur la question des besoins en fonds de roulements, les entreprises auront à supporter un surcoût. S'il est nécessaire de payer plus rapidement, la trésorerie sera financée par les banques qui en feront payer le coût aux entreprises. Les fédérations bancaires évoquent pour la France un besoin de trésorerie supplémentaire évalué entre 20 à 30 milliards d'euros. A l'échelle européenne, ce besoin serait entre 120 et 130 milliards d'euros. La seconde difficulté à laquelle nous nous sommes confrontés porte sur l'étude d'impact réalisé par la Commission européenne qui est insuffisante au regard des enjeux économiques. Dans le sud de l'Europe, il existe encore des délais de 120 jours alors que dans le nord de l'Europe certains États ont des délais de paiement très resserrés. Mais les spécificités de l'Europe font que le délai débute à partir de la réception de la facture dans le nord de l'Europe. En France, c'est la date d'émission de la facture, plus favorable au fournisseur, qui est retenue. Ces éléments ne sont pas pris en compte par la Commission européenne. Un acteur m'a raconté d'ailleurs que la décision de la Commission avait provoqué une mobilisation unanime de tous les acteurs s'opposant à cette réforme.

Amendements identiques n° 1, n°°3 et n°°5

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Les PME sont souvent les premières à payer et les dernières à l'être. Nous considérons que la proposition de la Commission repose sur des principes efficaces pour lutter contre les retards de paiement. Un abaissement du délai maximal de paiement à 30 jours sans dérogations aurait des effets sectoriels désastreux. C'est en particulier le cas pour les activités saisonnières, les secteurs où l'écoulement des stocks est particulièrement long ou encore le secteur du livre. Une telle mesure restreindrait en effet l'accès à une offre éditoriale vaste et porterait atteinte à la diversité culturelle.

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Nous souhaitons la mobilisation du gouvernement en faveur de la renégociation de l'article 3.

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Notre amendement étant identique à ceux de mes collègues, il est défendu.

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Mon avis sera favorable. L'alinéa 11 de la rédaction originelle pouvait poser problème car il était un peu radical sur des aspects plutôt favorables pour la France. L'ajout à l'alinéa 13 d'une disposition demandant à la France de s'opposer à l'article 3 est le cœur du combat. Pour le reste, les modifications rédactionnelles ne changent rien à la nature des difficultés de trésorerie pour les consommateurs et les entreprises.

Les amendements identiques n° 1, n°°3 et n°°5 sont adoptés.

Amendements identiques n° 2, n°°4 et n°°6

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Il s'agit de mettre en adéquation le titre avec les amendements précédents.

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Même position. Je souhaite que cet amendement recueille un avis favorable.

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Je valide les propos de mes collègues avec les mêmes objectifs.

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Le titre ne me satisfaisait pas. Je suis donc d'accord avec ces modifications rédactionnelles qui sont en accord avec ce que nous nous sommes dit durant le débat sur les amendements. Je souhaite que la combativité du gouvernement sur cet article 3 soit à l'image de l'esprit de concorde dont nous avons fait preuve.

Les amendements identiques n° 2, n°°4 et n°°6 sont adoptés.

L'article unique de la proposition de résolution européenne ainsi modifiée est adopté.

La proposition de résolution européenne est donc adoptée.

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J'étais jusqu'à aujourd'hui étranger aux travaux de la commission des Affaires européennes et je remercie ceux qui ont appuyé mes arguments. L'enjeu économique est important : il faut que les députés européens et le gouvernement obtiennent des résultats. Les acteurs sont très inquiets et j'espère que ce que nous faisons aujourd'hui ira dans le bon sens.

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Il est important que nous puissions prendre de telles initiatives. Nous n'avons pas suffisamment de retours sur les avis politiques ou propositions de résolution que nous adoptons. Je proposera que les référents travaillent sur les sujets entrant dans leurs compétences en liaison avec les autres parlements nationaux pour peser face à la Commission. C'est un travail de fourmi mais sur certains sujets nous avons obtenu des résultats.

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Nous avions prévu une réunion avec Laurence Boone, secrétaire d'État aux affaires européennes, sur le suivi des résolutions européennes. Nous allons renouveler ce travail avec Jean-Noël Barrot. Je tiens à rappeler qu'à chaque fois qu'un rapport d'information ou une proposition de résolution européenne est publié, nous l'adressons aux responsables politiques nationaux et européens.

II. Nomination de rapporteur

La Commission a nommé sur proposition de M. le Président Pieyre-Alexandre Anglade Mme Constance Le Grip, rapporteure d'information portant observations sur la proposition de loi de M. Sacha Houlié et plusieurs de ses collègues visant à prévenir les ingérences étrangères en France (n°°2150).

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Nous avons fait une demande écrite afin de pouvoir être présents lors des auditions qui seront faites dans le cadre de ce rapport. Je me permets de refaire cette demande oralement : le Rassemblement national, étant le premier parti d'opposition dans l'hémicycle, devrait pouvoir être présent lors de ces auditions.

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Il revient au rapporteur d'organiser ses auditions, mais il va de soi que, comme les autres groupes, le Rassemblement national pourra y participer si c'est son souhait.

La séance est levée à 15 heures 52.

Membres présents ou excusés

Présents. - M. Pieyre-Alexandre Anglade, M. Pierrick Berteloot, Mme Pascale Boyer, M. André Chassaigne, Mme Annick Cousin, Mme Laurence Cristol, M. Fabien Di°Filippo, M. Pierre-Henri Dumont, Mme Marietta Karamanli, Mme Constance Le Grip, M.°Denis Masséglia, Mme Louise Morel, M. Christophe Plassard, M. Jean-Pierre Pont

Excusés. - M. Charles Sitzenstuhl, Mme Liliana Tanguy