COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES
Lundi 26 septembre 2022
Présidence de M. Charles Sitzenstuhl, Vice-président de la Commission
La séance est ouverte à 15 heures 02.
Le plan NextGenerationEU est un outil de relance inédit de près de 800 milliards d'euros, qui traduit l'esprit de solidarité avec lequel les États membres ont réagi pendant la crise sanitaire. Ce plan a favorisé le redémarrage des économies en 2021 et 2022. Ce soutien budgétaire européen, qui prend la forme de prêts mais aussi de subventions, permet de financer des investissements d'avenir par le biais d'emprunts qui sont levés sur les marchés par la Commission européenne. Le tabou des règles d'endettement a été levé, et c'est une bonne chose. La France y attache beaucoup d'importance.
L'Union a également tiré des leçons des crises précédentes (2008 et 2010-2011), qui avaient débouché sur des mesures d'austérité, préjudiciables à la fois à la croissance et à l'image de l'Union. Sous votre houlette, Mme la Directrice générale, la mise en œuvre de ce plan avance bien : 25 des 27 plans nationaux ont été approuvés et plus de 110 milliards d'euros ont été décaissés par la Commission.
Le premier débat porte sur le lien entre le plan de relance et l'état de droit. Un recours en annulation a été déposé par des organisations de juges devant la Cour de justice de l'Union européenne, contre la validation du plan de relance polonais. Pourriez-vous nous présenter ce que la Commission compte faire pour garantir le bon usage des fonds du plan de relance européen ?
Le second débat concerne la création de nouvelles ressources propres : sans mise en place de ces nouvelles ressources, l'Union devra financer le remboursement de l'emprunt par le redéploiement des dépenses ou par l'augmentation des contributions des États membres. La Commission a fait des propositions précises en la matière. Comment évaluez-vous les chances d'aboutir à une telle réforme du système de financement du budget de l'Union ?
Le troisième débat concernera la proposition de la Commission de financer en partie le plan REPowerEU par le plan de relance européen. Une telle proposition suscite les réserves de la Cour de comptes européenne et de certains États membres. Pourrait-elle déboucher sur une renationalisation de la mise en œuvre d'une stratégie énergétique conçue à l'échelle européenne ?
Enfin, quelle évaluation faites-vous de l'efficacité globale du plan de relance européen à date ?
Tout d'abord, il est important de rappeler que le plan NextGenerationEU est une facilité d'un type nouveau qui a cassé le tabou d'un emprunt commun. Une autre spécificité de cette facilité est la combinaison qu'elle opère entre les réformes et les investissements. Cette nouvelle facilité exige des États membres qu'ils engagent à la fois des réformes et des investissements pour pouvoir bénéficier des subventions et des prêts. Contrairement aux fonds structurels, basés sur un remboursement des coûts, le plan de relance est basé sur un contrat entre chacun des États membres et l'Union, qui consiste à effectuer les réformes et les investissements contenus dans le plan dans les temps impartis, en échange de ces financements.
Grâce à cet argent, on observe d'importants progrès réalisés au sein des pays membres. Nombreux d'entre eux ont inclus dans leurs plans des mesures de réformes extrêmement ambitieuses qui répondent à des enjeux de long terme. Par exemple, en Espagne, le marché du travail était extrêmement segmenté, avec un taux de chômage élevé, notamment chez les jeunes, et une difficulté d'accès à des CDI. Grâce à la réforme du marché du travail, adoptée en accord avec les partenaires sociaux et mise en œuvre avec le soutien des fonds européens, nous assistons à un changement rapide et radical du marché du travail en Espagne – avec notamment des créations d'emplois de qualité et des mouvements qui réduisent la segmentation du marché du travail. En Italie, le système judiciaire ralentit généralement les investissements et vient diminuer la productivité des entreprises. Une réforme très ambitieuse de la justice administrative, commerciale, civile et pénale a été incluse par le gouvernement italien dans le plan de relance. La Slovaquie a également proposé de réformer en profondeur son système d'éducation grâce aux fonds européens. La facilité européenne propose donc des financements massifs, mais surtout des financements bien employés.
En matière d'investissements, la facilité pour la reprise et la résilience vise en priorité le changement climatique, la biodiversité et l'environnement. En moyenne, plus de 40% de l'ensemble des financements vont vers ces mesures, avec l'exigence que les mesures contenues dans le plan n'endommage pas l'environnement ou le climat. Nous avons vu dans chacun des plans nationaux, tant pour la mobilité durable que pour l'efficacité énergétique et le développement des énergies renouvelables, une attention particulière et un effort sans précédent de la part des États membres pour s'engager dans la lutte contre le changement climatique et faire évoluer leurs économies vers davantage de soutenabilité.
En France, le plan est beaucoup plus riche en investissements qu'en réformes. Quelques réformes sont importantes, comme celle sur le climat et l'énergie. Il y a aussi un encadrement plus important de la progression des finances publiques. Les investissements sont déjà très avancés dans leurs mises en œuvre. Il faut par exemple considérer le succès de « MaPrimeRénov' », financée à 70% par le plan européen. Beaucoup de citoyens en ont bénéficié, mais très peu savent qu'il s'agit de financements européens. Il existe également des financements dans la formation et l'apprentissage, avec le financement de « 1 jeune, 1 solution » ou encore un investissement très important sur le ferroviaire, tant sur les grandes lignes que sur les lignes régionales, avec 4,4 milliards d'euros dédiés à l'amélioration des réseaux ferroviaires.
Nous jugeons le bilan intermédiaire très positif. 2026 est la date butoir pour la mise en œuvre de toutes les réformes et de tous les investissements.
L'État de droit s'impose à tous et commande que le cadre juridique applicable soit respecté. Le plan polonais, qui nous a été soumis, remplissait parfaitement les exigences du règlement sur la facilité pour la reprise et la résilience. C'est la raison pour laquelle la Commission a approuvé le plan polonais. Un objectif du plan fait l'objet d'une attention particulière : la réforme de la justice, et en particulier le régime disciplinaire des juges polonais. Cet élément fait partie du plan polonais : il est essentiel à la bonne utilisation des fonds publics européens. Cela implique qu'aucun paiement ne pourra être fait tant que cet objectif ne sera pas parfaitement rempli. Ce n'est pas le cas à ce stade et la Pologne n'a d'ailleurs pas émis de demande de paiement. Lorsque nous recevrons celle-ci, nous examinerons si les reformes mises en œuvre par la Pologne sont conformes aux exigences de la Cour de justice de l'Union européenne et si le régime disciplinaire des juges est conforme à l'état de droit. Si c'est le cas, nous serons ravis de pouvoir financer les réformes et les investissements en Pologne, comme dans l'ensemble des autres États membres.
Vous avez raison de souligner l'urgence et l'importance des nouvelles ressources propres. Nous avons fait une première série de propositions l'année dernière qui ne sont pas totalement suffisantes. Nous travaillons à d'autres propositions qui devraient être formulées prochainement.
Enfin, REPowerEU a été la réponse de la Commission afin d'accélérer la transition climatique et énergétique et d'aider les États à sortir de leur dépendance à la Russie. Il y a encore 225 milliards d'euros d'emprunts qui n'ont pas été demandés et il existe une possibilité pour les États membres d'utiliser les fonds structurels pour cet objectif particulier. La Commission propose également d'acquérir 20 milliards d'euros supplémentaires en mettant aux enchères des certificats ETS (Emissions Trading System) de manière anticipée. Ces 20 milliards permettront de financer des investissements et des réformes susceptibles d'accélérer la transition énergétique et de se désengager des approvisionnements russes, sur le même modèle que le plan de relance et de résilience
La Cour des comptes européenne fait part de ses réserves en estimant qu'il n'y a pas assez d'argent engagé. Or la Commission est allée chercher l'argent là où il y en avait encore et ne souhaitait pas solliciter davantage les États membres. Nous avons essayé de mobiliser tous les financements disponibles pour cet objectif, il sera toujours possible d'évaluer les besoins restants une fois que les réformes et les investissements auront été mis en œuvre.
En ce qui concerne le risque évoqué de renationalisation de REPowerEU, les politiques entreprises dans le cadre du plan sont des politiques européennes. L'efficacité climatique, avec par exemple l'isolation des bâtiments, est une politique européenne. Mais sa mise en pratique se fait bien évidemment au niveau national et local, avec des moyens mis à disposition par l'Union. La seule exception à ce raisonnement concerne les infrastructures énergétiques transfrontalières. Ce n'est l'objectif de personne de déployer de nouveaux gazoducs ou oléoducs. Nous devons nous désengager des combustibles fossiles. Des investissements ciblés à fort ancrage territorial seront toutefois possibles.
Est-il envisagé de financer également des infrastructures multimodales sur certains ports européens ? Une grande partie de ce que nous consommons arrive par les voies portuaires sur des porte-conteneurs. Dans certains pays, dont la France, les infrastructures ne sont pas suffisantes pour pouvoir ensuite approvisionner le territoire. Il n'y a pas d'alternatives au transport en camions. Je voulais savoir si cet aspect-là pouvait également entrer dans le plan de relance, car c'est un objectif de la France de réduire les émissions de gaz à effet de serre liées au transport routier.
L'articulation entre les conditions relatives à l'état de droit et le plan de relance ne renvoie pas à toutes les questions sur l'état de droit, mais au respect des critères dans la mise en œuvre des financements européens. Il ne s'agit pas de tordre le bras de la Pologne, mais simplement d'encadrer de possibles dérives du pouvoir en place. On ne peut pas donner de l'argent européen si le système judiciaire ne fonctionne pas, parce qu'on n'a pas la garantie que cet argent va être bien utilisé.
Ma première question concerne la fin de la facilité pour la reprise et la résilience en 2026, qui suppose que les financements soient versés auparavant. Avez-vous des tendances ou des inquiétudes pour certains pays ? Est-ce problématique pour la Pologne de ne toujours pas avoir bénéficié de financements jusqu'à aujourd'hui ? Avez-vous des indicateurs qui pourraient nous alerter dès maintenant sur l'existence de blocages ?
Ma deuxième question porte sur la suspicion de nationalisation. Vous avez parlé des réseaux, sans mentionner le réseau électrique. L'Europe manque de réseaux électriques coordonnés, et non pas uniquement interconnectés – les interconnections non-coordonnées pouvant représenter un danger en ne faisant que peu baisser les consommations. Les différents gestionnaires de réseaux ont organisé une coordination à 24 heures. En revanche, la coordination à un cinquantième de seconde, qui est nécessaire, n'existe pas encore. L'argument du risque de renationalisation ne doit pas faire obstacle aux investissements nécessaires. Dans le domaine de l'énergie et en particulier de l'électricité, une Europe forte suppose des investissements et du travail au niveau de l'Union européenne, au lieu d'un travail enraciné dans chaque pays. Cette remarque vaut également pour le ferroviaire. Ce plan est ambitieux mais nécessitera des investissements communs. Je voudrais avoir votre avis à ce sujet.
Je voudrais savoir quelle est la part restante des crédits non contractualisés. Par ailleurs, n'y a-t-il pas un problème de visibilité, voire d'efficacité, des dispositifs ? Je pense notamment à « MaPrimeRénov' », pour laquelle il existe un ensemble de guichets et d'intervenants différents, ainsi qu'une problématique d'évaluation de la qualité et de l'efficience des travaux réalisés.
Je rejoins le propos de mon collègue Frédéric Petit sur les infrastructures transfrontalières : un vrai réseau européen est nécessaire. Une problématique similaire existe pour le transport de l'hydrogène et pour la décarbonation des mobilités par l'intermédiaire de l'hydrogène.
Ma dernière question porte sur les tensions relatives au modèle institutionnel européen et à la répartition des compétences entre autorités. La nécessité d'un cadre européen sur les grands enjeux devrait s'accompagner d'une révision des traités, puisqu'il faudrait que les compétences soient clairement marquées.
Les acteurs européens se sont rassemblés afin d'organiser la résilience régionale et de créer un instrument de relance pour soutenir les investissements sur le long terme. Ces investissements sont précieux, car une seconde crise énergétique a frappé le monde entier, tandis que la crise environnementale nous oblige à nous adapter. Dans ce contexte, la task force a pour ambition de mettre en œuvre cette relance européenne, car l'Europe a besoin que ses fonds soient utilisés.
En matière de contrôles, quelles seraient les conséquences pour un État qui ne respecterait pas ses engagements, tant sur l'objet que sur le temps ou l'espace d'utilisation des financements européens ? La gestion des fonds européens par l'État dans le département de Mayotte a connu de sérieux ratés, qui ont eu un impact fort sur un territoire et des habitants particulièrement touchés par les conséquences des différentes crises. Plusieurs sujets touchent les outre-mer, dont la sécurisation des infrastructures d'accès et de production en eau potable. Ces sujets sont vitaux pour nos territoires ultra-marins. Existe-t-il un risque de perte des crédits européens en raison des règles de non-cumul des fonds structurels ?
Les plans proposés par les États membres ont été, à quelques rares exceptions près, approuvés par la Commission européenne. En conséquence, il n'y aura pas de réévaluation du contenu de ces plans. Concernant les infrastructures multimodales, en particulier portuaires, plusieurs États membres, dont la France, ont inclus dans leur plan des mesures venant renforcer ces infrastructures.
La mise en œuvre des plans nationaux peut être suivie de manière détaillée sur le site internet de la facilité pour la reprise et la résilience. Aujourd'hui, la situation des investissements est plutôt bonne : ils ont débuté, y compris pour les plans approuvés plus tard, à l'instar du plan néerlandais. Par ailleurs, les réformes fonctionnent convenablement. Les États membres qui avaient certains problèmes avec le marché du travail, les finances publiques, l'éducation ou encore le climat ont utilisé la dynamique du plan pour adopter ces réformes nécessaires. Les réformes ont contribué au dialogue social dans certains pays, au premier rang desquels l'Espagne.
Au sujet des renationalisations et de l'enracinement local, je rappellerai simplement qu'une grande partie des objectifs et des politiques européennes a une déclinaison nationale. Lorsque nous agissons au niveau national sur l'efficacité énergétique, nous agissons de facto au niveau européen. Pour autant, les projets européens n'en sont pas moins primordiaux. Ceux-ci sont par ailleurs soutenus par des instruments spécifiques, tels que Connecting Europe Facility pour l'énergie et les transports. La facilité pour la reprise et la résilience vient ainsi compléter ces dispositifs. En conséquence, les éléments nationaux sont complémentaires des investissements européens. Nous travaillons de surcroît à une réforme du marché de l'électricité dont le marché intérieur en constitue l'élément fondamental. Nous pouvons constater qu'en dépit des difficultés d'approvisionnement en énergie, l'Europe n'a pas connu de black-out. Ceci est à mettre au compte des interconnexions constitutives du marché de l'électricité, permettant aux flux d'aller là où la demande est la plus forte. La solidarité doit être au centre des solutions à venir concernant l'électricité. Le parallèle avec la santé n'est pas inintéressant. En effet, il s'agissait au départ d'une compétence exclusivement nationale, comme l'énergie. À la faveur d'une crise, l'Union européenne, à travers la Commission, a organisé l'achat commun des vaccins et ainsi su mettre au premier plan la solidarité qui lie les États membres entre eux. L'amélioration et la digitalisation des réseaux ferroviaires sont par ailleurs essentielles dans une perspective de décarbonation des transports.
Les crédits restants, à savoir 225 milliards, vont être utilisés dans les secteurs stratégiques que sont l'indépendance énergétique et la transition climatique. La facilité pour la reprise et la résilience se caractérise par le niveau élevé de responsabilité nationale. L'objectif est certes fixé par l'Union, à savoir un objectif de performance énergétique et de rénovation permettant une économie d'énergie significative. Pour autant, l'État membre dispose de la marge de manœuvre nécessaire pour fixer la méthode. Ainsi, les difficultés éventuelles ne seront pas du fait de Bruxelles mais bien des États membres. La communication sur les bénéfices apportés par l'Union européenne à chaque État membre demeure marginale. Vous devez nous aider à montrer ce que l'Union européenne fait au quotidien. Il s'agit là d'un impératif non seulement légal mais aussi politique afin que les citoyens soient mis au courant des actions menées par l'Union européenne.
Nous sommes en outre dans une phase d'accélération concernant les travaux sur l'hydrogène. Toutefois, le transport de l'hydrogène n'est pas totalement abouti.
Dans le cas où un État ne respecte pas ses engagements du fait de problèmes d'approvisionnement, la Commission n'est pas défavorable à l'adaptation du plan ou au report de la demande de paiement. Cette flexibilité est prévue par le règlement établissant la facilité pour la reprise et la résilience. Lorsqu'un État membre ne remplit pas ses engagements de manière délibérée, la Commission rappelle que celui-ci est tenu par un contrat. Si le non-respect d'un objectif est dû à un problème naturel, comme pour le cas allemand où des inondations ont rendu impossible un investissement dans les infrastructures, il est possible de le changer dans le plan pour en garantir la continuité.
Il est possible de cumuler les fonds de la FFR avec d'autres fonds, qu'il s'agisse des fonds d'investissement, de transport, d'énergie ou des fonds structurels. Les mêmes coûts ne doivent pas être financés deux fois. Il revient aux États membres de s'en assurer. Si la Commission constate le double financement d'un même investissement, il est demandé à l'État membre de rectifier cette erreur. Si l'erreur n'est pas rectifiée, la Commission se chargera de récupérer l'argent qui aura été mal distribué ou mal utilisé. Dans la logique de la facilité, la responsabilité première revient toutefois à l'État membre, qui doit s'organiser le plus efficacement possible afin d'éviter la fraude, la corruption et notamment le double financement.
Concernant la communication, est-ce une obligation légale et réglementaire pour les États membres de signaler le financement européen de certains projets et dispositifs ? Si tel est le cas, pourriez-vous nous préciser la portée de cette communication ? Par ailleurs, quelle incidence le contexte d'inflation a-t-il sur le plan de relance ? Enfin, la situation en Italie peut-elle avoir des conséquence sur plan de relance ? Quelle pourrait être, selon vous, l'évolution de la situation politique en Italie d'un point de vue technique, opérationnel et administratif ?
La communication est une obligation légale : les États membres doivent informer les bénéficiaires qu'ils bénéficient de financements européens, par exemple à l'occasion d'un appel d'offres ou d'un appel à propositions. Toutes les informations sont disponibles sur le site Internet. Un kit de communication composé de panneaux et de stickers est également prévu afin de faciliter la communication. Il est important de signaler les projets financés par l'Europe afin que la population en soit informée.
La Commission doit être consciente du fait que ce n'est pas un terrain neutre : les bénéficiaires n'ont pas nécessairement envie d'indiquer que l'Europe finance un projet. Il faudrait donc trouver des méthodes allant au-delà de l'obligation des panneaux et des stickers.
En effet, la Commission a remarqué les démarches de communication qui ont été bien exécutées, comme en Espagne. La France a également bien communiqué sur l'initiative du plan de relance, qu'elle a impulsé avec l'Allemagne. La Commission est reconnaissante pour cette initiative franco-allemande. Il ne s'agit pas d'une opposition entre le niveau local ou national et le niveau européen, il s'agit d'un partenariat entre l'Europe et les États membres.
Ce qui se passe en Italie est politique et nous ne sommes pas en terrain neutre. La Commission n'est pas neutre, elle doit porter le projet politique européen.
Qu'est-il nécessaire de faire au niveau européen en l'état actuel des traités? Le discours d'Ursula von der Leyen était attrayant et dynamique car il proposait une extension du domaine d'intervention de l'Union. La construction européenne est un projet politique même si la Commission en tant qu'administration n'est pas politique.
Quand je dis que la Commission n'est pas politique, je voulais dire qu'elle n'est pas comme un élu local qui s'opposerait à un gouvernement dont il ne partage pas la couleur politique. Par contre, nous sommes totalement dans l'objet politique Europe/non-Europe, qui constitue notre raison d'être. J'assume pleinement ce côté politique.
Par ailleurs, l'inflation a une incidence sur le plan de relance. C'est un instrument de performance dans lequel l'engagement des dépenses dépend du respect d'un contrat. L'impact de l'inflation n'est pas automatique, car l'évaluation des coûts réalisée par l'État membre lui est propre. Il revient ensuite à cet État membre de mettre en œuvre le plan de la manière la plus efficace possible. Plus l'enveloppe est grande, plus il existe une marge et plus l'État peut réaliser des économies ailleurs. Tous les coûts n'augmentent pas de la même manière, il est donc possible de rationaliser – à l'exception des plans dont les infrastructures sont lourdes, comme en Italie ou en Roumanie. Dans l'hypothèse où l'inflation rend impossible la mise en œuvre de la cible, la cadre de révision du plan s'applique. La Commission et les États membres essayent de trouver les solutions les plus efficaces et les plus rationnelles. La cause sous-jacente de cette inflation provient des prix de l'énergie. La Commission cherche à éviter une situation dans laquelle un État membre investirait moins d'efficacité énergétique par faute de moyens.
Concernant l'Italie, chaque nouveau gouvernement annonce un changement radical, puis la Commission entame des discussions qui permettent de trouver un terrain d'entente. Il est nécessaire d'investir dans l'efficacité énergétique, le transport et les énergies renouvelables, quelle que soit la couleur politique d'un gouvernement. Les réformes contenues dans les plans ne concernent pas la réduction du déficit budgétaire, mais porte sur la transition climatique ou l'efficacité dans la dépense publique. Ce sont des domaines qui répondent aux besoins des États membres. Je n'imagine pas un scénario dans lequel un État membre ne mettrait pas en œuvre son plan. L'Italie a besoin de la stabilité macro-économique apportée par la facilité pour le reprise et la résilience. Par ailleurs, l'Italie s'est démarquée par la bonne organisation dont elle a fait preuve dans la mise en œuvre de son plan.
Vous avez évoqué l'efficacité dans les dépenses publiques. Cette ambition ne pourrait-elle pas être revue à l'aune des prix de l'énergie actuels dans la zone euro, à savoir des prix qui ont augmenté de 400% ? Par ailleurs, la Commission de la Commission a proposé de désindexer le mode de calcul du prix de l'électricité de celui du gaz. Cette idée pourrait-elle avoir des conséquences sur la réévaluation des plans eu égard aux changements qui pourraient advenir sur les marchés ?
L'efficacité de la dépense publique revient à utiliser de la meilleure manière possible l'argent du contribuable par les autorités publiques. En situation d'inflation, cette nécessité s'intensifie. Il est pertinent de réexaminer les politiques publiques à la lumière de l'inflation. Ainsi, il faudrait agir de manière ciblée, notamment à l'égard des ménages les plus vulnérables afin de les protéger contre la hausse des prix. La consommation d'énergie doit en outre être régulée. En effet, la hausse du prix de l'énergie induit un changement de comportement chez les citoyens qui ont tendance à baisser leur consommation. Nous pouvons nous réjouir de cette évolution au regard des dommages que cause la surconsommation sur l'environnement.
Enfin, la réforme concernant les prix de l'électricité doit permettre de fixer un prix qui permet à toutes les centrales de fonctionner correctement pour éviter le black- out, pour permettre aux flux européens de satisfaire la demande européenne sans pour autant générer des surprofits.
La séance est levée à 16 heures 13.
Membres présents ou excusés
Présents. – M. Henri Alfandari, M. Frédéric Petit, Mme Anna Pic, M. Jean-Pierre Pont, M. Charles Sitzenstuhl, Mme Liliana Tanguy, Mme Estelle Youssouffa
Excusés. – M. Franck Allisio, M. Gabriel Amard, M. Pierrick Berteloot, Mme Anne-Laure Blin, M. Manuel Bompard, M. Stéphane Buchou, Mme Sophia Chikirou, M. Thibaut François, M. Philippe Juvin, Mme Brigitte Klinkert, Mme Julie Laernoes, Mme Constance Le Grip, M. Thomas Ménagé, Mme Lysiane Métayer, Mme Barbara Pompili, M. Richard Ramos