Mission d'information de la conférence des présidents sur les capacités d'anticipation et d'adaptation de notre modèle de protection et de sécurité civiles

Réunion du jeudi 15 février 2024 à 9h00

Résumé de la réunion

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La réunion

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La séance est ouverte à neuf heures cinq.

Présidence de Mme Lisa Belluco, présidente.

La mission d'information auditionne M. le préfet Julien Marion, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) au ministère de l'intérieur et des outre-mer.

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Nous avons le plaisir d'accueillir ce matin M. Julien Marion, préfet, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) au ministère de l'intérieur et des outre-mer. Nous avons devant nous un temps d'échange assez long. Il constituera évidemment une étape essentielle à quelques semaines de l'achèvement de nos travaux. M. Marion est accompagné de M. Yves Hocdé, sous-directeur de la préparation, de l'anticipation et de la gestion des crises (SDPAGC), de Mme Gaëlle Lugand, sous-directrice des affaires internationales, des ressources et de la stratégie (SDAIRS), de M. Bertrand Vidot, sous-directeur des services d'incendie et des acteurs du secours (SDSIAS), et de sa directrice de cabinet, Mme Clémence Lecœur.

Nous avons entendu les associations d'élus, les acteurs et les experts de la sécurité civile, les universitaires qui ont travaillé sur ce sujet, ainsi que les principales structures administratives et gouvernementales compétentes en la matière. Nous avons par ailleurs effectué cinq déplacements, certains en France, notamment dans des départements ayant connu récemment des catastrophes, et d'autres à l'étranger. Nous souhaitions en effet avoir une vue d'ensemble des acteurs concernés, voir large sans négliger le terrain, afin que notre échange avec l'administration la plus directement concernée par nos travaux soit d'autant plus fructueux.

Monsieur le préfet, votre présence devant notre mission d'information est loin d'être purement symbolique. Nous en attendons beaucoup. Elle marque un point d'orgue de nos travaux, car la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) est le cœur du réacteur de la sécurité civile. Nous vous remercions d'ailleurs des éléments écrits que vous nous avez communiqués il y a déjà plusieurs semaines en réponse à nos questions.

Les risques sont multiples ; ils évoluent, notamment sous l'effet du dérèglement climatique, et il nous faut adapter notre modèle de sécurité civile pour anticiper les menaces et relever de nombreux défis. Les travaux de notre mission d'information pourront, nous l'espérons, y contribuer. Notre objectif est de formuler des recommandations aussi concrètes et opérationnelles que possible pour renforcer notre dispositif de sécurité civile, en nous appuyant sur les témoignages, les analyses et les retours d'expérience des acteurs clés de ce système, parmi lesquels la DGSCGC occupe une place prépondérante.

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Merci, monsieur le préfet, d'avoir répondu à notre invitation après nous avoir communiqué des éléments écrits à propos du modèle français de sécurité civile, qui nous tient particulièrement à cœur.

Mon expérience d'élu local – j'ai eu à gérer la crise du covid-19 dans ma commune – et la trentaine d'années que j'ai passées chez les sapeurs-pompiers m'ont permis d'avoir de nombreux échanges à ce sujet.

Comment évoluent les risques de crises majeures auxquels nous devrons faire face ? Quelles adaptations convient-il que nous apportions à notre modèle de protection et de sécurité civiles pour nous y préparer ?

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Julien Marion, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises

J'aimerais faire quelques rappels historiques en introduction de mon propos, dont la réponse à votre question, monsieur le rapporteur, sera la conclusion logique. Pour comprendre les évolutions à apporter à notre modèle de sécurité civile, il est bon d'en connaître les fondements, les racines historiques, ce que j'appelle son ADN. Pour deviner où l'on va, mieux vaut savoir d'où l'on vient.

La sécurité civile est à la fois très bien identifiée par nos concitoyens – tout le monde connaît et aime les pompiers – et fort mal connue. Cela m'a frappé, tant dans l'exercice de mes responsabilités actuelles que dans mes fonctions précédentes au sein de cette belle direction. Si nous demandions par sondage à nos concitoyens quelles en sont les composantes, leurs réponses nous surprendraient sans doute. Une telle méconnaissance implique pour vous, parlementaires, et pour nous, acteurs de la sécurité civile, un devoir de pédagogie. À cet égard, cette mission d'information me semble bienvenue. C'est aussi pour cela que j'aimerais rappeler les fondements historiques de la sécurité civile en France, ce qui en constitue en quelque sorte le code génétique.

Historiquement, tout part de la lutte contre l'incendie. Très tôt, la civilisation a été confrontée à des incendies – sous la Rome de Néron ou à Rennes en 1720, par exemple. Chaque incendie majeur a rendu sensible la nécessité de s'organiser contre le risque du feu. Les premières démarches en ce sens vinrent de la population : confrontée à un risque immédiat, elle s'est organisée elle-même, indépendamment de toute directive venant d'en haut. Si Charlemagne prenait, dès 803, une ordonnance pour structurer la veille de nuit, ce n'est que beaucoup plus tard que les citoyens s'organisèrent véritablement pour assurer ce service. En tout cas, il s'agit toujours d'une chaîne de réponses partant du plus près du terrain.

On peut faire remonter aux XVIIe et XVIIIe siècles les premières démarches de structuration par la puissance centrale d'un embryon de service de sécurité civile, et ce autour d'un outil dont la découverte constitua un tournant : la pompe à incendie. Dès 1716 naissent les gardes pompes, organisés en compagnies en 1722. Au-delà de l'organisation, certains principes sont posés dès le début XVIIIe siècle, et ne seront jamais remis en cause. Je pense en particulier au principe de la gratuité des secours.

La Révolution française confirme cette dynamique. La Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 avance d'ailleurs plusieurs principes qui valent toujours : la solidarité de la nation à l'égard des victimes d'accidents, de sinistres et de calamités ; la prise en charge des dépenses qu'occasionne l'organisation des secours par la collectivité, garante de leur gratuité.

La compagnie des sapeurs du génie de la garde impériale, qui deviendra la brigade des sapeurs-pompiers de Paris (BSPP), voit le jour en 1811, suivie une quinzaine d'années plus tard par les corps communaux de sapeurs-pompiers. On voit alors apparaître une dichotomie, ou plutôt une complémentarité, entre pompiers professionnels et volontaires, qui structure encore notre dispositif. Fait notable, seul le corps des sapeurs-pompiers volontaires survivra à la dissolution de la garde nationale dont il était issu, surmontant le soubresaut historique de 1871.

La suite découle assez logiquement des prémisses ainsi posées. Le XXe siècle est celui des guerres mondiales. L'État se dote d'une structure centralisée, dont l'organisation et la dénomination évolueront, mais qui reste chargée de la protection civile. Initialement rattachée au ministère de la guerre, elle rejoint rapidement le ministère de l'intérieur. La création de cette structure répond d'abord à la nécessité de protéger les populations contre les bombardements. C'est l'époque de la défense passive et de l'aménagement d'un réseau d'abris. Le XXe siècle voit ainsi la protection civile déborder de son cœur historique, la lutte contre l'incendie, pour assurer diverses missions de secours à personne et s'orienter vers la prévention.

Au début des années 1950 est créé un service national de la protection civile. Dans ces mêmes années, l'administration prend plusieurs initiatives et élabore notamment les plans d'organisation de la réponse de sécurité civile (Orsec). De cette période datent aussi les premières associations agréées de sécurité civile, qui restent des acteurs majeurs. Les événements dictent souvent l'organisation. En 1959, la tragédie du barrage de Malpasset conduit le général de Gaulle à créer les colonnes de renfort, un dispositif entré depuis dans les usages et toujours très utile. En 1964 naît le corps des démineurs, suivi, en 1974, par les premières formations militaires de sécurité civile (Formisc), ces formations répondant à des besoins spécifiques bien identifiés. Parallèlement à ce foisonnement d'initiatives étatiques, l'organisation et la dénomination de notre direction évoluent : de direction de la sécurité civile, elle devient direction de la défense et de la sécurité civile avant la création, en 2011, de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC). La lente structuration des initiatives citoyennes depuis l'échelon local atteint quant à elle ses limites, ce dont prend acte la loi du 3 mai 1996 relative aux services d'incendie et de secours, qui en organise la départementalisation.

Vous me pardonnerez ces rappels un peu longs, mais les services dont nous sommes dépositaires ont des racines très profondes dans notre histoire ; elles manifestent une remarquable capacité à s'adapter en élargissant sans cesse leur sphère d'intervention. Il faut prendre la mesure de l'originalité de la sécurité civile par rapport à d'autres services de l'État : née d'initiatives citoyennes, issue des territoires, elle a un ADN particulier. Cette sorte de code génétique explique que les services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) fassent l'objet d'une gouvernance partagée entre l'État et les collectivités locales. L'arrière-plan historique doit nous faire comprendre qu'il ne s'agit pas d'un compromis de circonstances passé en 1996, mais de l'aboutissement logique d'une évolution de longue durée. L'ADN citoyen explique quant à lui qu'à côté des professionnels, employés par les collectivités territoriales ou par l'État – je parle des Formisc, des services de déminage ou des moyens aériens –, notre système repose avant tout sur des volontaires et des bénévoles. Nous devons préserver ce code génétique de la sécurité civile française, le faire évoluer, certes, mais en conservant cette caractéristique forte. Elle fonde sa singularité, manifeste dès qu'on regarde la façon dont s'organisent ces services dans les pays voisins du nôtre. Cette originalité assure sa capacité à s'adapter en permanence, sa souplesse, son agilité.

Dans l'orbite d'un ministère, qu'imprègne un principe hiérarchique, pyramidal, et presque napoléonien, qui fait aussi sa force, la DGSCGC occupe une place à part. Ceux qui agissent sur le terrain ne sont pas statutairement ses employés. Le ministère de l'intérieur emploie les policiers et les gendarmes dont il dirige l'action ; il n'emploie pas les sapeurs-pompiers. Cela crée une tension, salutaire, qu'il faut assumer, si peu naturelle soit-elle dans l'écosystème du ministère de l'intérieur. C'est une richesse et je constate que tout cela fonctionne.

Je vous épargne une présentation de l'organisation interne de la DGSCGC pour répondre plus directement à la question de monsieur le rapporteur : quelles décisions ont été prises récemment pour permettre à notre direction de relever les défis qui l'attendent ? La loi du 24 janvier 2023 d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi) définit trois priorités. Elle reprend plusieurs mesures annoncées par le Président de la République en octobre 2022, après une saison de feux de forêt particulièrement intenses.

Le premier volet consiste à adapter les moyens opérationnels à l'évolution, très dynamique, des risques. Nos moyens aériens sont renouvelés : les hélicoptères actuels, les fameux dragons (Eurocoptère EC145), seront remplacés par les hélicoptères H145 produits par Airbus. La flotte passera de trente-six à quarante machines. Le contrat ayant été signé fin 2023, les premières livraisons interviendront dès la fin de l'année en cours ; nous aurons une flotte d'hélicoptères entièrement renouvelée pour 2028. Indépendamment de la Lopmi, nous avons également engagé le renouvellement de nos avions, en faisant l'acquisition de huit appareils Dash 8-Q400 MR, dont le dernier a été livré en juin 2023. Quatre Canadairs supplémentaires, financés par la Commission européenne, devraient s'y ajouter entre 2027 et 2028. Nous renforçons également les capacités des Formisc. Trois de ces régiments de l'armée de terre sont déjà à la disposition du ministère de l'intérieur, et nous allons en créer un quatrième. Installée à Libourne, cette unité commencera à monter en puissance à partir de cet été pour atteindre son effectif nominal en 2027. Cela portera le nombre d'agents des Formisc à plus 2 000, contre 1 400 à ce jour. Nous augmentons aussi nos moyens de faire face aux risques NRBC et aux menaces terroristes. Les Jeux olympiques et paralympiques nous servent à cet égard de catalyseur. Voilà pour les moyens nationaux.

Les pactes capacitaires liant l'État, les collectivités territoriales et les SDIS organisent le cofinancement et l'acquisition de matériels lourds, comme les 1 096 camions de lutte contre les feux de forêts acquis fin 2023. Ces matériels ne sont d'ailleurs pas exclusivement destinés aux départements du Sud.

Deuxième axe : la modernisation de nos systèmes d'information, pour anticiper les changements liés au développement des nouvelles technologies. J'enfonce une porte ouverte : la gestion de crise passe par celle des données. Il nous faut donc rendre possible un bond qualitatif dans ce domaine. Tel est l'objet du projet NexSIS 18-112, qui prendra son envol en 2024 et permettra d'équiper les services d'incendie et de secours et les services de l'État partenaires, à savoir l'État-major interministériel de zone (EMIZ) et le centre opérationnel de gestion interministériel de crises (COGIC), du même outil de gestion opérationnel. Cela permettra d'être bien plus efficace dans l'analyse et le pilotage des crises. Nous déployons également de nouveaux vecteurs d'alerte des populations : je pense en particulier au dispositif FR-Alert, qui fait l'objet d'un exercice commencé aujourd'hui et qui se poursuivra demain, sous le contrôle de la préfecture. Ce dispositif fonctionne ; nous l'avons vérifié à l'occasion d'une crise réelle, quand la tempête Ciarán a frappé le Finistère, les Côtes-d'Armor et la Manche. Les préfets des trois départements ont pu coordonner à temps la diffusion de messages d'alerte. Même si, par définition, les vies sauvées ne se voient pas, cela a permis à des dizaines de personnes d'avoir la vie sauve. Notre ambition est donc d'achever le déploiement de FR-Alert et notamment de l'étendre aux territoires ultramarins.

Il s'agit, troisièmement, de renforcer la position centrale du ministère de l'intérieur et des outre-mer dans la gestion des crises. Cet objectif procède d'un constat simple, que nous pouvons tous partager : presque toutes les crises ont une dimension interministérielle. Il revient donc au ministère de l'intérieur d'assurer la coordination entre les ministères concernés. Pour lui permettre d'assumer cette responsabilité, la Lopmi prévoit la création d'une structure permanente. Une préfète chargée de mission auprès de ma direction conduit la réflexion en cours sur les arbitrages à opérer. Nous envisageons d'activer cette nouvelle structure d'ici à la fin de 2024, une fois les Jeux olympiques terminés. La gestion de la donnée sera d'ailleurs une des tâches centrales de cette future structure.

À quels risques majeurs devons-nous nous préparer ? Premièrement, nous sommes confrontés aux conséquences du dérèglement climatique, qui sont déjà une réalité. Nous devons collectivement nous habituer à voir l'exception devenir la norme. Les indicateurs météorologiques que nous utilisons pour préparer la saison des feux de 2024 n'ont rien à envier à ceux de 2022. C'était déjà le cas l'année dernière, mais les épisodes de pluie survenus fin mai et début juin dans le Sud-Est ont heureusement permis d'échapper à une nouvelle catastrophe. Sans pluies significatives, notamment dans le pourtour méditerranéen, nous pourrons nourrir des craintes sérieuses. Les saisons des feux seront de plus en plus longues et concerneront un territoire de plus en plus large. En 2022, plus de la moitié des départs de feu sont survenus au nord de la Loire, et nous avons été confrontés à des situations graves dans des départements que l'on pensait à l'abri, en particulier le Finistère, les Vosges et le Maine-et-Loire. Nous devons nous adapter. Des décisions ont déjà été prises afin de rehausser nos moyens, et nous devons poursuivre les efforts engagés.

Le dérèglement climatique entraîne également des inondations. Nous avons tous en tête celles qui ont touché le Pas-de-Calais en novembre et en janvier. Je me suis rendu sur place à plusieurs reprises avec le Président de la République et le ministre de l'intérieur et des outre-mer pour constater l'étendue de la crise. En novembre, nous assurions aux populations que l'État ne les abandonnait pas dans cette terrible situation. De fait, nous avons déployé des moyens considérables. Nous ajoutions qu'il s'agissait d'un épisode hors norme, que de telles inondations étaient décennales, voire centennales. Deux mois après, nous y retournions dans les mêmes conditions. Pour illustrer mon propos, j'ajoute que les moyens cumulés que la sécurité civile a déployés dans le Pas-de-Calais à l'occasion de ces deux épisodes d'inondations massives, notamment pour assurer le pompage, sont équivalents à ceux requis lors d'une saison de feux de forêts de moyenne intensité.

Je pourrais également évoquer le risque d'origine naturelle dans les territoires ultramarins. Nous nous sommes rendus il y a peu à La Réunion, après le passage du cyclone Belal, qui a heureusement dévié sa trajectoire, évitant d'atteindre l'île elle-même. À Mayotte, nous gérons une crise de l'eau qui est la conséquence directe du bouleversement climatique. Je suis fier de le souligner, la sécurité civile a élaboré une logistique de distribution d'eau potable dans toute l'île, qui fonctionne depuis le mois de novembre, parce que les réserves n'étaient plus suffisantes.

Un indicateur permet de mesurer objectivement la réalité du changement climatique : la projection des moyens de la sécurité civile hors des frontières hexagonales, donc en outre-mer et à l'étranger. Entre 2015 et 2020, nous avons engagé sept à huit détachements par an en moyenne, représentant environ 3 000 hommes-jour. En 2021 et 2022, nous avons engagé dix-huit détachements, soit environ 10 000 hommes-jour. En 2023, vingt détachements l'ont été, représentant au total l'équivalent de 46 000 hommes-jour. Je précise que l'unité hommes-jour inclut tous les moyens déployés – sapeurs-pompiers civils et formations militaires.

L'accélération des crises d'origine climatique constitue le premier risque auquel nous sommes confrontés, mais ce n'est pas le seul. J'appelle votre attention sur le secours à personne, qui représente entre 80 et 85 % de l'activité des sapeurs-pompiers – seules 5 à 7 % de leurs interventions concernent la lutte contre l'incendie. Il s'agit d'une tendance profonde depuis plusieurs années. En effet, des défis s'imposent au monde médical et la sécurité civile est confrontée aux conséquences, car les pompiers, et de plus en plus les bénévoles des associations agréées, accomplissent des missions de soutien au monde de la santé. Cela amène d'ailleurs à s'interroger sur ce qu'on attend de la sécurité civile. La crise liée au covid-19 était exceptionnelle, mais je vous parle ici de la réalité quotidienne des services d'incendie et de secours. Je ne porte pas de jugement, je me borne à constater la situation. Les acteurs concernés, respectueux de leurs valeurs, assument leurs missions sans se dérober. Toutefois, le système est sous tension : il devient nécessaire d'encadrer davantage les rôles des différents acteurs, notamment ceux de la sécurité civile, dans les secours pré-hospitaliers. Des difficultés existent déjà pour répondre aux besoins ; il faut accompagner leur amplification.

Cette évolution est moins spectaculaire que les crises climatiques, mais il est tout aussi essentiel de s'en préoccuper. Tous nos concitoyens perçoivent ce risque. Tout le monde, je l'espère, ne sera pas confronté à une crise climatique ; en revanche, tout le monde peut être victime d'une chute ou d'un malaise cardiaque. Il s'agit d'un chantier majeur pour l'avenir de la sécurité civile. Au niveau central, nous dialoguons avec nos partenaires du ministère du travail, de la santé et de la solidarité.

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Merci pour votre introduction historique : effectivement, pour savoir où l'on va, il faut savoir d'où l'on vient.

Nous sommes allés en Gironde. Vous avez évoqué les feux de forêt qui s'y sont produits ; les acteurs locaux nous ont exprimé leur crainte d'une rupture capacitaire. Pendant la crise, les moyens nationaux étaient engagés là-bas. Par chance, et grâce au savoir-faire français, les interventions ont pu être réduites dans les autres régions.

Comment avez-vous anticipé les saisons de 2022 et 2023 pour éviter une telle rupture, alors que les risques étaient élevés ? Vous avez expliqué qu'entre 2015 et 2023, on était passé, pour les effectifs engagés, de 3 000 à 46 000 hommes-jour. Avez-vous établi des prévisions en matière de besoins humains et matériels pour faire face aux feux de forêt dans les années à venir ?

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Julien Marion, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises

La Gironde est un très bon exemple. Nous avons tous en tête les images terribles des incendies à Landiras et à La Teste-de-Buch. Je vous rassure : ce sujet nous occupe constamment. Pour anticiper le risque de feux de forêt, il faut combiner de manière optimale les moyens et la doctrine d'intervention, afin d'être performant.

La saison des feux de 2022 a révélé l'accélération du risque. Le Président de la République a pris des décisions fortes, qu'il a annoncées dès le mois d'octobre suivant. Premièrement, les pactes capacitaires sont à jour : les conventions avec les SDIS, les services départementaux d'incendie et de secours, ont toutes été signées avant la fin de l'année 2023. Dans ce cadre, 150 millions d'euros serviront à acquérir près de 1 100 camions-citernes feux de forêt (CCF), pour accroître significativement la capacité d'intervention. Cela représente l'équivalent de quarante-six colonnes de renfort. Deuxièmement, nous avons plus que doublé le nombre de ces dernières. Dès 2023, le dispositif prévoyait la possibilité d'armer cinquante et une colonnes de renfort dans un département confronté à des incendies majeurs. Il sera reconduit en 2024, et les années suivantes. Troisièmement, nous avons créé une quatrième unité d'instruction et d'intervention de la sécurité civile (UIISC), dans la cadre des Formisc. Suivant le souhait du Président de la République, elle sera installée à Libourne. Elle entrera en fonction en format réduit dès cet été, puis elle montera en puissance jusqu'à atteindre son format définitif à l'été 2027, avec 650 militaires. Ils accompliront toutes les missions qui reviennent aux Formisc, notamment l'appui aux sapeurs-pompiers locaux en cas de feux de forêt. Positionnée dans le Sud-Ouest, elle sera complémentaire des trois premières.

Nous réfléchissons également à moderniser la flotte d'avions et d'hélicoptères. Certes, les capacités de largage des nouveaux H145 seront limitées, mais ils pourront intervenir de manière complémentaire dans la lutte contre les incendies. Par ailleurs, nous avons décidé de recourir à la location de moyens supplémentaires. Au cours de l'été 2023, nous avons loué dix hélicoptères et cinq avions bombardiers d'eau ; nous reconduirons ce dispositif en 2024 et les années suivantes, car il a prouvé son efficacité. En 2023, les départs de feux ont été plus nombreux qu'en 2022, mais 14 000 hectares seulement ont brûlé.

Cela prouve également que notre doctrine d'intervention est pertinente. Elle s'est construite progressivement, depuis les années 1990, autour du Bassin méditerranéen, où le risque était concentré. Tous nos partenaires ne la partagent pas. Le premier principe consiste à attaquer massivement les feux naissants, pour éviter qu'ils ne prennent de l'ampleur et deviennent hors de contrôle. Le second est d'organiser un guet aérien armé, en assumant de consacrer une partie de nos vecteurs aériens à la surveillance des zones à risque. Pendant la saison des feux, nous accueillons des prévisionnistes de Météo-France au ministère et dans les états-majors de zone, Sud et Sud-Ouest notamment. Avec eux, nous déterminons les zones les plus à risques à t + 24 heures. Des avions partent effectuer des rotations dans des périmètres définis, afin de détecter les départs de feux et d'intervenir immédiatement, en attendant des moyens complémentaires.

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J'ai eu le plaisir de me rendre l'été dernier à la base de Nîmes-Garons dans les Bouches-du-Rhône, alors en vigilance rouge. J'ai constaté en temps réel la réactivité en cas de feu naissant.

Nous sommes allés au Portugal et en Italie pour discuter de nos modèles respectifs de sécurité civile. Vous avez expliqué les grands projets de modernisation du modèle et de renforcement de la capacité d'anticipation. Sont concernés les ministères chargés de l'intérieur, de la défense, de l'écologie, de la santé parfois. Comment évolue la coordination interministérielle, notamment en lien avec le secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) ?

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Julien Marion, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises

Pour gérer les conséquences du changement climatique, la coordination interministérielle est permanente. Avec nos partenaires de la direction générale de la prévention des risques (DGPR) du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, nous effectuons un travail dense en matière de prévention des risques et d'éducation des populations. Nous menons ensemble de nombreux projets, en particulier pour anticiper les conséquences du changement climatique. Après une phase de diagnostic, nous engageons la mise en œuvre d'un plan national d'adaptation au changement climatique (Pnacc) très détaillé. Nous travaillons par exemple sur la Journée nationale de la résilience, le 13 octobre, pour en faire un temps fort.

Le SGDSN conçoit et applique la stratégie nationale de résilience ; il garantit la cohérence interministérielle des actions. Nos travaux s'inscrivent naturellement dans le cadre des textes qu'il publie, puisque nous sommes l'un des acteurs de la stratégie. Par ailleurs, le SGDSN mène la politique interministérielle d'exercices. En effet, un entraînement régulier est indispensable pour gérer efficacement les crises. Chaque département ministériel concerné organise ses exercices, mais ceux qui sont effectués en commun sont de plus en plus nombreux. Actualité oblige, beaucoup de ces exercices, ces derniers temps, visaient à préparer les Jeux olympiques et paralympiques (JOP). Ils ne sont pas étrangers à la sécurité civile, puisque nous réfléchissons notamment à la survenue d'un épisode climatique complexe pendant le déroulement des Jeux, qui mobiliseront largement les forces de sécurité. Il est bon d'anticiper le risque en s'exerçant à le surmonter dans des conditions fictives.

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Nos auditions ont montré qu'il fallait réfléchir au soutien de l'État envers les SDIS, qui connaissent des situations diverses. Évidemment, notre travail concerne tout le territoire, hexagone et outre-mer, ville, campagne, montagne et littoral. L'État envisage-t-il de soutenir les SDIS qui souffrent d'un manque de moyens ?

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Julien Marion, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises

Depuis la loi de 1996, les services d'incendie et de secours obéissent au principe de gouvernance locale : ce sont le département, puis le bloc communal, qui leur fournissent les moyens dont ils ont besoin. Il n'est pas prévu que l'État soutienne ces investissements de manière pérenne. Néanmoins, l'État agit. J'ai évoqué le pacte capacitaire, opération d'envergure mais ponctuelle. Il soutient également les investissements en participant à des projets structurants, comme NexSIS, qui vise à doter l'ensemble des SDIS d'un système de gestion des alertes et d'un système de gestion des opérations (SGA-SGO) unique. L'accompagnement financier de l'État se monte à 100 millions d'euros sur dix ans.

Je rappelle par ailleurs que l'investissement des SDIS était soutenu par l'État à travers le fonds de compensation pour la TVA (FCTVA), à hauteur de 117 millions d'euros en 2022. Sur le plan local, les préfets ont la possibilité de mobiliser des dispositifs tels que la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), la dotation de soutien à l'investissement local (DETR) et la dotation de soutien à l'investissement des départements (DSID) pour accompagner certains projets d'investissement des SDIS. Selon nos estimations, cela représente à peu près 10 millions par an, ce qui n'est pas anecdotique.

On considère que l'État contribue aux budgets des services d'incendie et de secours, de manière ou indirecte, notamment dans le cadre de la taxe spéciale sur les conventions d'assurance (TSCA), et sans distinguer fonctionnement et investissement, à hauteur d'un quart du total.

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Le couple maire-préfet est-il suffisamment bien établi en cas de crise ? Qu'en est-il de l'implication d'autres acteurs, comme les élus départementaux, les associations, les bénévoles et les médias ? Les rôles sont-ils assez bien identifiés ?

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Julien Marion, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises

J'ai le sentiment, même si c'est très impressionniste, que les responsabilités sont bien identifiées. Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas de réflexion à mener sur la manière dont on pourrait optimiser l'intervention de chacun.

S'agissant du couple maire-préfet, les responsabilités sont connues – elles sont prévues par les textes. Le maire a ainsi une responsabilité en matière de conduite de la gestion de crise. Je fais régulièrement des déplacements dans les départements : le sentiment que j'ai est que la responsabilité de chacun est bien identifiée et que, globalement, la chaîne de commandement en matière de sécurité civile fonctionne.

Les élus départementaux ont un rôle éminent en matière de gouvernance des services d'incendie et de secours, mais les textes ne prévoient pas qu'ils aient des responsabilités en ce qui concerne la conduite de la gestion de crise.

Pour ce qui est des associations agréées en matière de sécurité civile et, au-delà d'elles, du bénévolat spontané, de la manifestation de bonnes volontés à l'occasion de crises, le système fonctionne, et c'est heureux. Globalement, une complémentarité assez harmonieuse se met en place sous l'égide des maires et des préfets.

Je ne voudrais pas vous donner l'impression d'évoluer dans un univers de Bisounours – des questions, profondes, se posent, comme celle du modèle des associations agréées de sécurité civile, en particulier en matière de financement –, mais sur le terrain, en cas de crise, j'ai quand même le sentiment que notre système fonctionne bien. L'une de ses grandes forces, surtout en comparaison de ce qui existe dans d'autres pays, est qu'il n'y a qu'un seul patron pour gérer une crise à un moment donné et à un certain échelon territorial, ce qui est très important. L'absence de concurrence pour la direction de la gestion de crise facilite énormément le travail d'agglomération des efforts des différents acteurs ou contributeurs – les services de l'État, les sapeurs-pompiers, les moyens nationaux, le cas échéant, les bénévoles des associations, les élus locaux et les bénévoles spontanés.

Je ne sais pas s'il faut considérer les médias comme des acteurs de la gestion de crise, mais celle-ci se déroule, comme toute action publique, sous leur œil, ce qui est une bonne chose – nous devons rendre compte des actions qui sont menées. Il faut, et je crois qu'on le fait maintenant partout, intégrer la dimension médiatique et la communication dans toute conduite de gestion de crise.

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Si j'ai cité les médias, c'est parce que nous avons eu des témoignages au sujet de difficultés de communication quand il s'agit de toucher l'ensemble de la population et du rôle que les médias peuvent jouer en matière d'alerte ou d'information en cas de crise.

Je reviens sur la constellation des associations agréées de sécurité civile. Leur existence est une force, mais nos auditions ont montré qu'il y avait parfois des difficultés de coordination avec les autres acteurs de la sécurité civile, notamment les sapeurs-pompiers. Avez-vous dans ce domaine des axes de travail ?

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Julien Marion, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises

Notre constat, que je crois partagé, est que les associations agréées de sécurité civile sont un acteur essentiel de la réponse et qu'il faut évidemment les conforter dans ce rôle.

Un encadrement existe, notamment grâce à un dispositif d'agrément, selon les types de missions. Une coordination a lieu au niveau central : les services de la direction des sapeurs-pompiers sont chargés de l'animation des acteurs du secours et, à ce titre, ils interagissent régulièrement avec les associations agréées de sécurité civile. Néanmoins, l'essentiel de la coordination se passe sur le plan local, dans le cadre de dynamiques territoriales.

Les textes prévoient des instances pour faire vivre cette coordination, en particulier le conseil départemental de sécurité civile. On pourrait se demander s'il est suffisamment vivant dans chaque département – je n'en suis pas totalement certain. Il y aurait peut-être lieu de réactiver un peu cette instance. En tout cas, c'est à ce niveau que la coordination doit avoir lieu. Au niveau central, nous traitons, par définition, de sujets systémiques. La coopération opérationnelle ne peut relever que de dynamiques territoriales.

Je pense, par ailleurs, qu'il faut admettre, comme je l'ai dit au sujet du secours à la personne, que les associations agréées de sécurité civile sont de plus en plus appelées à intervenir en complément des acteurs de santé. La loi Matras a commencé à apporter des réponses en matière d'encadrement, mais il faudra probablement aller plus loin afin de sécuriser les conditions d'intervention de ces associations. Cela relève de travaux au niveau central, que nous sommes tout à fait prêts à conduire.

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Il semblerait que la procédure d'agrément des associations de sécurité civile soit complexe dans certains cas, notamment au niveau départemental. Le sujet est, par ailleurs, controversé, car certaines associations nationales souhaitent qu'il n'y ait pas de procédure supplémentaire d'agrément au niveau départemental. Pouvez-vous revenir sur le processus à suivre et les critères ? Existe-t-il des pistes en matière de simplification ?

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Julien Marion, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises

En effet, on peut probablement simplifier le processus de délivrance, notamment l'articulation entre les agréments délivrés au niveau national et ceux qui le sont au niveau départemental. Les premiers, renouvelables tous les trois ans, sont de différents types, en fonction des missions. Les agréments A concernent les opérations de secours ; les agréments B, les missions de soutien et d'accompagnement des populations, notamment l'accueil, l'écoute, le réconfort et le ravitaillement ; les agréments C sont délivrés pour tout ce qui relève de l'encadrement des bénévoles spontanés, non affiliés aux associations mais qui peuvent se manifester à l'occasion de crises ; l'agrément D, enfin, porte sur la tenue de postes de secours lors de grands rassemblements de personnes. Il existe aussi un agrément spécifique, qui ne relève pas de la sécurité civile, pour toutes les missions de formation au secourisme.

La délivrance de l'ensemble de ces agréments se fait selon des critères précis. On vérifie que l'association publie ses comptes, qu'elle a une gouvernance conforme aux règles du droit associatif, qu'elle respecte le contrat d'engagement républicain, etc. À cela s'ajoute, évidemment, la vérification de l'aptitude technique, parce que des compétences très pointues doivent être mobilisées.

L'instruction des agréments nationaux fait partie des missions de la sous-direction que dirige, au sein de la direction des sapeurs-pompiers, M. Bertrand Vidot. Nous délivrons par ailleurs les agréments interdépartementaux. Lorsque le champ est départemental, en revanche, c'est le préfet qui est compétent – il applique alors les mêmes principes.

On pourrait probablement travailler à une simplification des procédures pour faciliter la vie des associations en évitant des surcharges inutiles. Cela me semble tout à fait dans l'air du temps.

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Ne pourrait-on pas se passer d'agréments départementaux ? Il semble que le cumul des deux niveaux d'agréments requis peut représenter une gêne pour certaines associations de sécurité civile.

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Julien Marion, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises

Le risque, si on allait dans cette direction, serait de se priver de compétences qui peuvent exister localement et qui répondent à des besoins. Il faut être en mesure de mobiliser ces compétences, même si elles n'existent qu'à l'échelle d'un territoire. Les effectifs d'activité, s'agissant des associations agréées, sont à peu près les mêmes que pour les autres acteurs de la sécurité civile : on observe un recours accru, assez dynamique, aux bénévoles. Je pense qu'il faut garder la capacité de mobiliser, dans un cadre réglementé – d'où l'existence d'un agrément –, des ressources précieuses qui peuvent exister uniquement à l'échelle locale. Je vous rejoins bien volontiers, en revanche, pour ce qui est de rechercher un peu de souplesse ou d'éviter des rigidités inutiles.

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Je reviens sur le lien avec les municipalités. Nous serons tous d'accord pour dire, me semble-t-il, que la gestion de crise ne s'improvise pas. Nous sommes allés, il y a quelques semaines, dans la vallée de La Vésubie, qui a été coupée du monde pendant un certain temps, aussi bien en matière de communications que de fourniture d'électricité. Des efforts sont-ils réalisés pour accompagner la mise en place de plans communaux de sauvegarde (PCS) ? Il nous a semblé, lorsque nous avons reçu les témoignages de l'Association des maires de France et de l'association Départements de France, que les élus étaient un peu démunis lorsqu'ils n'avaient pas dans leur équipe des gens déjà sensibilisés à la sécurité civile.

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Julien Marion, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises

Ce que vous demandez, monsieur le rapporteur, suppose de mobiliser plusieurs dispositifs.

L'obligation d'adopter un PCS existe, mais n'est pas encore mise en œuvre partout. Néanmoins, la situation est en voie d'amélioration. Les préfets savent qu'ils doivent absolument inciter les collectivités à agir, dans un cadre communal – ou intercommunal, si cela paraît plus adapté aux réalités du territoire ou du bassin de vie. Je mets une pression sur les préfets : chaque fois qu'un nouveau préfet est nommé, j'échange avec lui, en ayant les chiffres sous les yeux : je lui dis qu'il lui reste tant de communes à convaincre.

Par ailleurs, les préfets se tiennent à la disposition des élus qui ont besoin d'une aide méthodologique, qui peut passer par des réunions spécifiques ou la fourniture de modèles, pour l'adoption de plans communaux ou intercommunaux de sauvegarde. On ne se contente pas d'aller voir un maire pour lui dire que sa commune doit être dotée d'un PCS, que c'est très important et que, sinon, on va lui tirer les oreilles : on ne le laisse pas tout seul face à une page blanche. On aide, on accompagne – c'est le rôle de l'État, que les préfets jouent très bien. La dynamique existante doit se poursuivre, afin que les zones dans lesquelles des plans communaux ou intercommunaux de sauvegarde n'existent pas encore disparaissent peu à peu.

Une autre réponse à la question que vous avez soulevée repose sur les réserves communales de sécurité civile. Il en existe 639 : c'est bien, mais ce n'est clairement pas suffisant. Bien que les réserves communales de sécurité civile aient un fondement juridique, leur création est laissée à la libre initiative des élus. Notre constat est que certains d'entre eux se sont emparés de ce dispositif, ce qui est très positif – nous avons tous en tête des exemples dans lesquels la mobilisation de réserves communales de sécurité civile a joué un rôle déterminant dans la gestion d'une crise –, mais on peut clairement faire mieux dans un pays qui compte 36 000 communes. Je me demande, par conséquent, s'il ne faudrait pas réfléchir à la manière dont on pourrait être un peu plus incitatif, parce que c'est dans l'intérêt de tout le monde et totalement conforme à l'ADN de notre sécurité civile.

Un autre domaine dans lequel nous devons nous améliorer, à mon avis, est celui de la formation proposée aux élus en matière de gestion de crise. Des choses se font, mais pas encore d'une manière suffisante. Nous essayons de structurer le travail d'accompagnement : la la Journée nationale de la résilience (JNR) est un très bon catalyseur. Je pense néanmoins que nous devrions monter en puissance, de manière pérenne, pour ce qui est des dispositifs de formation des élus à la gestion de crise. Tout cela ne s'improvise pas. Si vous êtes maire d'une petite commune, qu'une catastrophe se produit et qu'on vous dit qu'il faut armer un PC communal, il y a des choses à savoir, des réflexes à avoir et des techniques à maîtriser.

Dans ce domaine, l'État n'a pas vocation à mener tout seul la réflexion : le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) pourrait tout à fait être associé à la démarche, et je vois assez bien autour de quelles structures des dispositifs de formation pourraient être construits – l'École nationale supérieure des officiers de sapeurs-pompiers (Ensosp) pourrait très bien voir ses missions élargies à ce type de formation, et l'Institut des hautes études du ministère de l'intérieur (IHEMI) pourrait également être mobilisé, ainsi que toute une série d'acteurs. Comme la gestion de crise va, malheureusement, devenir une réalité pour un nombre croissant d'élus, il faut s'organiser en conséquence.

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L'acculturation des élus me semble, en effet, très importante. Qu'en est-il de celle de la population ? Le premier acteur, c'est le citoyen. Y a-t-il des pistes à suivre en ce qui concerne son accompagnement ? Pensez-vous qu'il faudrait aller plus loin ? Nous avons vu combien l'acculturation de la population était essentielle chez nos amis portugais et italiens, qui travaillent sur cette question dès le plus jeune âge. Le ministère de l'éducation nationale pourrait peut-être jouer un rôle chez nous.

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Julien Marion, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises

Je voudrais compléter ma réponse précédente. Les élus sont associés de façon systématique à la politique d'exercices qui est menée au plan local, à l'initiative des préfectures. C'est aussi une manière de diffuser la culture de la gestion de crise.

Par rapport à certains voisins et partenaires, nous avons peut-être un déficit de maturité en matière d'éducation des populations aux risques et à la gestion de crise, pour de nombreuses raisons. Il faut en tirer les conséquences : vous avez parfaitement raison de dire qu'il faut mener un travail dès le plus jeune âge, en milieu scolaire.

Il est plutôt encourageant de constater, à cet égard, qu'une très belle dynamique est en train de se développer autour de la JNR, dont la deuxième édition s'est tenue en 2023. Nous en faisons le principal vecteur pour essayer de diffuser, sur le territoire national, l'éducation aux risques.

Cela permet de faire beaucoup de choses, mais ce n'est pas exclusif d'un travail au niveau central avec le ministère de l'éducation nationale pour toucher les jeunes publics. Le Service national universel peut aussi constituer un vecteur intéressant : je ne sais pas si c'est encore d'actualité, mais il était envisagé, à un moment, de renforcer la « brique » relative à l'éducation aux risques dans le cadre des séjours de cohésion, afin de toucher toute une classe d'âge.

Je tiens également à mentionner, même s'ils reposent sur le volontariat, des dispositifs qui permettent de proposer à des jeunes de s'engager dans le domaine de la sécurité civile et de devenir un peu des ambassadeurs de l'éducation aux risques, comme les classes de cadets de la sécurité civile, qui se développent. Là où elles existent, vous l'avez peut-être constaté lors de vos déplacements, se crée une dynamique très positive, très vertueuse, qui conduit un certain nombre de participants à devenir ensuite de jeunes sapeurs-pompiers, puis à s'engager comme sapeurs-pompiers volontaires, voire professionnels. C'est vraiment le genre de trajectoire dont j'aimerais voir la diffusion partout dans le territoire, car c'est aussi de cette manière qu'on acculturera de plus en plus la population aux risques.

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Yves Hocdé, sous-directeur de la préparation, de l'anticipation et de la gestion des crises

Le code de l'éducation comporte des dispositions qui demandent aux établissements scolaires de mettre en place des sessions de sensibilisation et de formation des élèves. Il existe, par ailleurs, des plans particuliers de mise en sûreté, les PPMS, qui font l'objet d'exercices annuels pour permettre de se préparer à des événements naturels ou à des menaces de type terroriste. Ce sont des éléments majeurs pour l'acculturation des populations, sur lesquelles on s'appuie naturellement dans le cadre de la JNR afin de toucher les élèves. Un travail est mené, de plus, avec les directions générales du travail et des collectivités locales ainsi qu'avec l'Association des maires de France, pour faire en sorte que l'ensemble des employeurs privés et publics contribuent à la sensibilisation et à l'acculturation de la population.

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Existe-t-il des pistes de réflexion en ce qui concerne la reconnaissance de l'action des bénévoles de la sécurité civile ? Devrait-on parfaire la situation en la matière ?

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Julien Marion, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises

La loi Matras a posé un principe important, qui est la reconnaissance du fait que les associations agréées de sécurité civile participent à l'exercice des missions de sécurité civile : cela consacre, en quelque sorte, leur rôle dans la chaîne des acteurs.

Un autre aspect de la réflexion en la matière concerne la reconnaissance accordée, sur un plan plus symbolique, aux bénévoles des associations agréées de société civile dans le cadre des récompenses et distinctions honorifiques. Je ne fais pas partie de ceux qui considèrent avec dédain ou mépris l'octroi de distinctions honorifiques à ceux qui acceptent de mettre une partie importante de leur temps libre au service de la collectivité. J'ai donné des instructions pour qu'une place significative soit réservée aux bénévoles des associations agréées de sécurité civile lors des promotions dans les ordres nationaux et de l'octroi des médailles de la sécurité intérieure. Ce fut le cas lors des dernières promotions dans les ordres nationaux et j'espère qu'on pourra bientôt faire le même constat s'agissant de la médaille de la sécurité intérieure.

Cependant il faut aussi faire attention à ne pas brouiller les frontières entre les différents statuts. Un bénévole n'est pas un volontaire. Il faut se garder, même si les intentions sont forcément bonnes, de créer des dispositifs qui rapprocheraient insidieusement les bénévoles du statut de volontaire. Ce n'est pas la même chose. Et il faut également éviter qu'un processus similaire fasse glisser les volontaires vers le statut de travailleur…

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Il est aussi important d'évoquer la coopération européenne, dont vous nous avez dit quelques mots dans votre propos introductif.

D'après vous, quelle est la principale singularité du modèle français de sécurité civile ?

Certains aspects des modèles étrangers – portugais, italien ou autres – pourraient-ils nous inspirer ?

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Julien Marion, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises

Je ferai tout d'abord un constat dont je ne tire aucune conséquence particulière : le modèle français de sécurité civile s'exporte assez bien, si j'en juge par le nombre de demandes de missions d'appui ou de coopération technique ainsi que par le nombre des délégations étrangères que nous accueillons à la fois à Paris et dans nos grands établissements, comme l'École nationale supérieure des officiers de sapeurs‑pompiers (Ensosp), ou dans les SDIS. J'en déduis que ce modèle ne fonctionne pas trop mal.

Cela étant dit, il faut surtout être très humble et se garder de tout cocardisme déplacé – je le dis d'autant plus que c'est parfois une tentation française – et d'aller voir nos partenaires en estimant que nous avons tout à leur apprendre.

Chaque modèle, nous devons en être conscients, est le fruit de l'histoire et de la géographie. Le nôtre résulte d'une longue évolution historique, mais aussi des caractéristiques géographiques de la France, pays méditerranéen qui comprend des territoires ultramarins.

Qu'est-ce qui fait que notre modèle de sécurité civile suscite l'intérêt ? Ce sont avant tout quelques principes assez simples, que nous avons déjà évoqués au cours de cette audition : une organisation et une gestion intégrées de l'ensemble des composantes de la sécurité civile ; une chaîne de commandement unique – élément essentiel sur lequel on n'insistera jamais assez ; un maillage territorial d'une haute densité, hérité du passé mais que l'on a réussi à préserver ; une compétence très large dans de multiples secteurs, qui permet à notre modèle de sécurité civile de répondre tant aux risques courants qu'aux risques exceptionnels ; enfin, une doctrine de formation unifiée.

Même si les statuts des acteurs de la sécurité civile sont très différents, ils sont pour l'essentiel tous formés au même endroit – c'est en particulier le cas des officiers de sapeurs-pompiers avec l'Ensosp. De ce fait, des acteurs variés aux origines et statuts divers savent très bien travailler ensemble, car leurs modes d'organisation sont similaires et leurs systèmes interopérables.

Pour vous donner un exemple, j'ai accueilli hier le directeur général des affaires économiques et financières de la Commission européenne à la base aérienne de la sécurité civile à Nîmes. Je lui ai fait visiter le simulateur d'entraînement à la coordination des opérations aériennes de secours, qui dispose d'équipements assez extraordinaires. Des démineurs de la sécurité civile étaient en train d'y être formés au pilotage de drones. C'est une très belle illustration : des policiers et sapeurs-pompiers civils sont formés par des pilotes qui sont eux-mêmes d'anciens militaires. Notre grande force en cas de crise est d'arriver à agréger ces compétences et ces statuts différents pour construire une réponse appropriée, à un moment et à un endroit donnés. Dans le domaine de la sécurité civile, la diversité des profils n'est pas une contrainte. C'est une richesse et une force.

Quant à notre système de gestion de crise, il repose sur quelques principes assez simples : la subsidiarité et la solidarité. La subsidiarité consiste à laisser par principe l'échelon local gérer un événement et décider à son niveau. Quand il n'est plus en mesure de le faire, l'échelon zonal prend le relais. Et quand on atteint un stade encore supérieur d'intensité, c'est à l'échelon national que revient le pilotage. Tout cela fonctionne assez bien.

Voilà en quelques mots ce qui fait à mon avis la force de notre modèle, et donc suscite l'intérêt de nos partenaires étrangers

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Pour faire face à la crise du volontariat chez les sapeurs-pompiers, qui se traduit par moins de candidats et des engagements d'une durée plus réduite, avez-vous prévu des campagnes nationales de communication pour susciter des vocations – comme le font par exemple les armées et la gendarmerie ?

On sait que 85 % des interventions des sapeurs-pompiers concernent le secours aux personnes, la lutte contre les feux et les incendies en constituant seulement 7 à 8 %. Avez-vous entamé une réflexion sur notre organisation, en vous inspirant du modèle américain qui distingue les firefighters et les paramedics ? En effet, dans l'imaginaire collectif, le sapeur-pompier est un homme en bonne condition physique, alors que cela n'est pas forcément nécessaire pour secourir des personnes. Effectuer une distinction entre les missions permettrait d'attirer d'autres volontaires. Cela contribuerait en outre à limiter les frustrations liées au fait que les missions les plus fréquemment remplies ne consistent pas à désincarcérer des victimes d'accident d'automobile ou à lutter contre les incendies.

J'en viens aux matériels. On le sait, le risque d'incendie s'étend désormais au nord de la Loire, mais on ne peut guère y utiliser les Canadair faute d'étendues d'eau suffisantes pour écoper. Une réflexion est-elle conduite au sein de votre direction générale au sujet de l'acquisition d'hélicoptères lourds ? Actuellement, vous louez de tels engins. Ils sont capables d'emporter une charge importante de 4 000 litres d'eau – contre 6 000 litres pour les Canadair. Ces hélicoptères pourraient en outre être utiles pour d'autres missions, notamment pour évacuer des personnes lors d'évènements climatiques extrêmes, comme des inondations.

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Julien Marion, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises

. Je vais répondre brièvement à ces trois questions, mais je m'engage à vous faire parvenir des éléments écrits plus détaillés.

De nombreuses campagnes de communication sont réalisées par les SDIS afin de recruter – car il revient normalement aux employeurs de le faire. Faut-il aller plus loin avec une campagne organisée par l'État ? Nous y réfléchissons et ça n'est absolument pas exclu. Je souligne que les dernières données disponibles montrent qu'on a réussi à inverser la tendance à la baisse du nombre de volontaires. Une hausse a été constatée en 2022, même si ce n'est pas dans des proportions spectaculaires. Il faut poursuivre nos efforts, parce que nous savons tous que les sapeurs-pompiers volontaires sont une ressource qui constitue le cœur de notre modèle – ne serait-ce que d'un point de vue quantitatif.

La distinction des missions est déjà rendue possible par les textes, grâce à ce que l'on appelle l'engagement différencié – c'est-à-dire la possibilité de s'engager sur certains types de missions et pas sur d'autres. Cette possibilité n'est pas suffisamment connue et mise en œuvre, mais elle existe. Je suis d'accord avec votre constat : quand 85 % des missions concernent le secours aux personnes, on n'a pas forcément besoin de recruter des sapeurs-pompiers ayant les mêmes aptitudes physiques que ceux qui vont aller éteindre des incendies dans des conditions extrêmement périlleuses. Ces missions étant différentes, elles ne requièrent ni les mêmes qualités, ni les mêmes compétences. Peut-être faut-il davantage de pédagogie autour de la possibilité, déjà offerte par les textes, d'un engagement différencié.

Les hélicoptères lourds ont prouvé leur utilité. Faut-il s'en doter en propre ? Nous y réfléchissons. Mais l'analyse doit croiser l'intérêt opérationnel – que personne ne conteste – et le paramètre budgétaire. Quelle est la solution optimale du point de vue budgétaire : louer ou acheter ? Si l'on achète, il faut ajouter au prix du matériel le coût du maintien en condition opérationnelle et celui des personnels volants et chargés de l'entretien. Le coût complet d'acquisition d'un hélicoptère ou de tout autre matériel aérien est donc beaucoup plus élevé que le seul prix d'achat brut. Notre analyse actuelle est que la location constitue plutôt la meilleure solution, du point de vue tant opérationnel que budgétaire. Mais la réflexion est ouverte en permanence.

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Merci beaucoup pour votre participation à nos travaux. Vous pourrez compléter les éléments écrits que vous nous avez déjà fournis.

Puis, la mission d'information auditionne M. Édouard Geffray, directeur général de l'enseignement scolaire (DGESCO) au ministère de l'éducation nationale, de la jeunesse, des sports et des jeux olympiques et paralympiques, et Mme Stéphanie Gutierrez, adjointe au sous-directeur de l'action éducative à la DGESCO.

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Nous poursuivons notre matinée d'auditions en accueillant M. Édouard Geffray, directeur général de l'enseignement scolaire, et Mme Stéphanie Gutierrez, adjointe au sous-directeur de l'action éducative au sein de la direction générale de l'enseignement scolaire (DGESCO), pour un échange consacré à la formation et à l'implication des jeunes en matière de prévention des risques et lors de la survenance des crises. Cette audition nous permettra en particulier de mieux comprendre comment l'éducation nationale intègre l'acculturation aux risques et la promeut auprès des plus jeunes. Nous vous remercions, monsieur Geffray et madame Gutierrez, pour votre présence parmi nous.

Nous l'avons constaté tout au long de nos travaux, et singulièrement à l'occasion de nos déplacements dans les départements ayant connu de graves crises ces dernières années, l'acculturation aux risques représente un enjeu majeur pour notre modèle de sécurité civile. Celui-ci sera, en effet, confronté à l'avenir à davantage de catastrophes de toute nature, frappant l'ensemble de notre territoire, métropolitain comme ultramarin. À cet égard, la contribution de l'éducation nationale à l'acculturation des plus jeunes est particulièrement importante.

Notre mission d'information, composée de vingt-cinq députés issus de l'ensemble des groupes politiques de l'Assemblée, a été lancée par le groupe Horizons et a pour rapporteur M. Didier Lemaire. Elle a pour objet d'évaluer les capacités d'anticipation et d'adaptation de notre modèle de protection et de sécurité civiles, et elle rendra ses conclusions dans les prochaines semaines. Nous avons souhaité entendre les administrations à la fin de nos travaux, afin de pouvoir les interroger sur le fondement des observations recueillies auprès des acteurs de terrain.

Cette audition est enregistrée et sera disponible sur le site internet de l'Assemblée nationale. Elle fera l'objet d'un compte rendu qui sera annexé au rapport.

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Pourriez-vous, monsieur Geffray, nous présenter les notions d'éducation à la sécurité civile inscrites au programme de chacun des cycles ? Dans quelle mesure les programmes scolaires ont-ils évolué pour améliorer la connaissance et la compréhension par les élèves des enjeux de prévention et de sécurité civile ? Nous avons pu constater, lors de nos déplacements et de nos précédentes auditions, le rôle majeur de l'acculturation des jeunes en la matière.

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Édouard Geffray, directeur général de l'enseignement scolaire

La formation des jeunes est structurée autour de trois enjeux : être protégé, notamment par les plans particuliers de mise en sûreté (PPMS) ; se protéger, ce qui implique de savoir identifier les risques quels qu'ils soient ; protéger les autres, enfin, en ayant les compétences de base nécessaires pour intervenir. Les formations sont dispensées par couches successives, certaines relevant de la sensibilisation, quand d'autres débouchent sur une certification sanctionnant l'acquisition des compétences – comme c'est le cas pour la sécurité routière.

La sécurité n'est pas une discipline en elle-même : les enseignements font partie d'un continuum éducatif visant à promouvoir une culture de la sécurité et une éducation à la responsabilité. Ils sont dispensés dès le cycle 1, en maternelle et jusqu'à la fin du collège, et se poursuivent de façon spécifique au lycée : dans les lycées professionnels, par exemple, ils portent sur la sécurité au travail.

Les règles générales de sécurité – prévention des risques, premiers secours – font l'objet d'une sensibilisation dès l'école primaire, l'objectif étant que l'intégralité des collégiens obtiennent le certificat PSC1 (prévention et secours civiques de niveau 1).

La mise en sûreté et en sécurité dans des circonstances particulières – PPMS attentat-intrusion, par exemple – est abordée dès l'entrée à l'école avec des mots et des procédures adaptés à l'âge de l'enfant. La sensibilisation aux gestes d'autoprotection et de protection collective s'approfondit progressivement jusqu'au lycée.

Des enseignements relatifs aux questions de sécurité et, ultérieurement, de défense, sont ventilés dans les programmes.

Enfin, la loi rend obligatoire l'enseignement des bases du code de la route. Celui-ci figure dans les programmes du premier et du second degré, où il est abordé de façon progressive : après une sensibilisation, il fait l'objet d'une première attestation, puis d'une seconde, l'attestation scolaire de sécurité routière (ASSR), obtenue actuellement par 98 % des élèves en fin de collège.

Au total, ces enseignements forment un parcours assez complet. Compte tenu de leur diversité, ils se concrétisent toutefois dans des lieux, des temps et des modes d'évaluation très différents les uns des autres.

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Quelles sont les matières mobilisées pour dispenser ces enseignements ?

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Édouard Geffray, directeur général de l'enseignement scolaire

Les notions relatives à la sécurité sont abordées dans certains enseignements : en premier lieu, dans le cadre de l'enseignement moral et civique (EMC), mais aussi en histoire-géographie, en éducation physique et sportive (EPS) ou encore en sciences – où il s'agit notamment d'appréhender le geste de sécurité précédant la manipulation.

Les questions relatives aux PPMS ou à la sécurité routière ne sont pas rattachées à une discipline, mais font l'objet d'actions éducatives ponctuelles au cours de l'année scolaire. Des opérations visant à promouvoir la sécurité routière sont organisées de façon systématique à l'école primaire : on reconstitue par exemple un circuit routier dans la cour de l'école, pour apprendre aux enfants à s'arrêter au feu rouge et à traverser lorsque le bonhomme est vert. De la même façon, la mise en place des PPMS se traduit, dans tous les établissements, par l'organisation d'exercices d'incendie et de secours ainsi que de mise en sécurité des élèves. Dans ce domaine, la cible est quasiment atteinte, tous les établissements organisant chaque année un voire deux ou trois exercices. Le but est de transformer en réflexes les comportements que les élèves s'habituent à adopter.

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Vérifiez-vous l'acquisition des compétences par les élèves ? À quelle fréquence ces évaluations ont-elles lieu au cours de la scolarité ?

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Édouard Geffray, directeur général de l'enseignement scolaire

La réponse à cette question dépend du type d'enseignement et de l'exercice associé. La prévention des risques majeurs et les PPMS donnent lieu chaque année à des exercices qui ne font pas l'objet d'une évaluation individuelle des élèves mais d'une appréciation chronométrée – évacuer dans un temps limité un établissement, par exemple ; tant que le standard n'est pas atteint, de nouveaux exercices sont organisés.

Il est d'autres enseignements dont on peut en revanche évaluer l'acquisition par chaque élève. En matière de sécurité routière, une attestation de première éducation à la route (Aper) est délivrée au cours moyen, puis deux ASSR le sont en classes de cinquième et de troisième. Celles-ci visent à sensibiliser les enfants en tant qu'usagers de la route – qu'ils soient piétons, cyclistes ou passagers d'un véhicule – et même en tant que futurs conducteurs. Aucune attestation spécifique n'est délivrée au lycée, mais des actions complémentaires sont organisées dans certaines formations dispensées par les lycées professionnels.

Nous évaluons aussi les élèves individuellement sur l'éducation aux premiers secours. Prévue par les textes, celle-ci se matérialise dans des actions pédagogiques menées dans l'école ou l'établissement. Le parcours commence par une sensibilisation des enfants aux gestes simples, avec le dispositif Apprendre à porter secours : savoir mettre une personne en position latérale de sécurité (PLS) ou connaître les principaux numéros de téléphone des services de secours.

Les élèves de collège, dotés d'une plus grande force physique et d'une meilleure conscience de leurs gestes, suivent une sensibilisation aux gestes qui sauvent, validée par le certificat PSC1. Notre objectif, à terme, est que 100 % d'entre eux obtiennent cette certification, ce qui n'est pas le cas actuellement. Nous devons y travailler, et j'ai d'ailleurs envoyé récemment un courrier à ce sujet aux recteurs et aux directeurs académiques des services de l'éducation nationale (Dasen). Cette situation s'explique par la baisse considérable du nombre de certifications au moment de la crise du covid : durant les années scolaires 2019-2020 puis 2020-2021, seuls 25 % des élèves environ ont obtenu le PSC1, ce qui n'est clairement pas suffisant. Les premières remontées chiffrées de l'année 2022-2023 témoignent d'un rebond, qui demeure néanmoins trop faible. L'atteinte de la cible de 100 %, que nous visons toujours à terme, implique que nous mobilisions suffisamment de formateurs, même extérieurs le cas échéant.

Si les autres domaines de la sécurité, comme la prévention des accidents de la vie courante, ne font pas l'objet d'une certification, ils donnent toutefois lieu à des actions de formation dès les premières années d'école primaire.

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Vous faites appel à des intervenants extérieurs pour assurer la sensibilisation aux questions de sécurité et aux risques en général, ainsi que pour les formations aux gestes qui sauvent. Les professeurs assurent-ils aussi de tels modules ? Ont-ils été formés à ces questions ?

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Édouard Geffray, directeur général de l'enseignement scolaire

Nos personnels – professeurs, conseillers principaux d'éducation, médecins et infirmières scolaires – constituent notre premier vivier. La DGESCO est habilitée à former au secourisme. Nous avons donc notre propre réservoir de formateurs et tout membre de nos personnels peut devenir formateur à la prévention et au secours civiques. Je ne connais pas le nombre de professeurs habilités à former, mais je vous ferai parvenir cette information. Dans le premier degré, nous nous appuyons presque exclusivement sur les professeurs pour apprendre les premiers secours. En revanche, à partir du collège, notamment dans la perspective du PSC1, nous faisons appel à des organismes habilités par le ministère de l'intérieur, comme la Croix-Rouge, pour intervenir dans les établissements.

La qualité des formateurs demande une remise à niveau périodique. Avoir suivi une formation ne suffit en effet pas pour former les autres ad vitam aeternam. Après les années que nous avons connues, nous avons perdu une partie de notre vivier, mais nous l'avons reconstitué depuis, grâce à un rebond en 2023. Cette évolution s'est traduite par l'expiration de la validité de la formation de nombreuses personnes, qui devront donc être de nouveau formées. Ce travail de reconstitution de notre vivier est important pour couvrir, avec nos partenaires extérieurs, un maillage territorial de 55 000 implantations dans toute la France.

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Quelles ressources sont mises à la disposition des enseignants et du personnel de la vie scolaire pour assurer l'éducation à la sécurité ?

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Édouard Geffray, directeur général de l'enseignement scolaire

Éduscol, qui est un site très consulté de ressources à destination des personnels de l'éducation nationale, diffuse les référentiels internes de formations et de certifications relatifs aux premiers secours, des ressources pédagogiques sur l'enseignement des gestes qui sauvent et des éléments de documentation.

Nous mettons également à la disposition des professeurs et d'autres professionnels des ressources sur les PPMS. Notre cellule du bâti scolaire travaille avec les collectivités locales, puisque la sécurité du bâti relève de leur compétence.

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Le dispositif des cadets de la sécurité civile a été lancé en 2015. Existe-t-il toujours ? Si oui, combien de classes étaient concernées lors de la rentrée 2023 ? Disposez-vous d'un bilan de l'engagement des jeunes pendant et après leur scolarité ?

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Édouard Geffray, directeur général de l'enseignement scolaire

Ce dispositif fonctionne très bien. Le dernier bilan, réalisé en 2020-2021, recensait 370 classes de sécurité civile – 90 % au collège et 10 % au lycée. Comme nous ne pouvons obtenir ces informations que par enquête, nous ne les réalisons que tous les trois ans pour éviter de surcharger les chefs d'établissement et les professeurs. Nous devrions donc en effectuer une nouvelle cette année ou au début de l'année prochaine. Il peut être mis en relation avec les classes de défense et de sécurité globales, qui sont en lien avec des unités militaires au sens large – armée, police, gendarmerie et sapeurs-pompiers. Depuis 2019, leur nombre a doublé, passant de 300 à 750, grâce à l'action très volontariste que nous avons menée avec les ministères et les directions concernés. En cumulant ces deux dispositifs, qui participent d'une démarche de résilience collective, nous atteignons plus de 1 000 classes en interaction forte avec les services en charge de la sécurité, de la défense et de la protection de la population.

Le programme des cadets de la sécurité civile forme les élèves à la prévention et favorise la culture de la sécurité civile grâce à un lien renforcé avec les services de la protection civile. Il compte 370 classes, soit un peu plus de 6 000 élèves, dont 20 % en éducation prioritaire, ce qui est représentatif du poids de cette dernière à l'échelle de l'ensemble de notre système éducatif. Sa couverture territoriale est intéressante. Ce programme fonctionne très bien auprès des élèves.

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Les élèves ainsi formés distinguent-ils la sécurité civile de la protection civile ? Je constate en effet que de nombreux sujets sont abordés dans l'enseignement scolaire – premiers secours, PPMS, sécurité routière. Disposez-vous d'un suivi de l'engagement de ces élèves dans le domaine de la sécurité civile après leur cursus scolaire ?

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Édouard Geffray, directeur général de l'enseignement scolaire

La réponse à votre première question est clairement positive. Les jeunes concernés disposent d'une connaissance assez fine des dispositifs et des services publics impliqués dans la protection des populations, grâce à la formation complémentaire qu'ils reçoivent en plus des cours. J'ajoute que les milliers de jeunes formés chaque année sont à même de diffuser la culture de la sécurité auprès de leur environnement familial : une plus grande partie de la population est ainsi sensibilisée à ces questions.

Si des enquêtes statistiques permettent d'observer les filières professionnelles choisies en fonction du type de bac obtenu, nous ne disposons pas de données sur le devenir de nos élèves. Nous ne pouvons donc pas vous dire si les élèves ayant suivi ce programme sont statistiquement plus intéressés que les autres par les métiers de la sécurité civile. Toutefois, il pourrait être intéressant d'interroger la sécurité civile pour savoir si, parmi leurs jeunes recrues des trois dernières années – le dispositif ayant été lancé en 2015, principalement à destination des classes de troisième, les premiers à avoir été formés ont donc aujourd'hui 22 ou 23 ans –, une partie d'entre elles ont suivi ce programme.

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Comment la Journée nationale « Tous résilients face aux risques » – ou Journée nationale de la résilience – se déroule-t-elle dans les établissements scolaires ? Depuis quand existe-t-elle ? Combien d'établissements l'organisent ? Comment renforcer leur participation ?

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Stéphanie Gutierrez, adjointe au sous-directeur de l'action éducative à la DGESCO

Lors de la première Journée nationale de la résilience, en 2022, nous avons cherché à valoriser ce qui était déjà fait dans ce domaine par les établissements. Nous avons du mal à quantifier le nombre d'établissements, car la remontée des données n'est pas satisfaisante – elle ne motive pas les chefs d'établissements, qui peuvent être découragés d'avoir à accomplir une démarche pour chaque action mise en œuvre. Le chiffre de 800 actions dont nous disposons n'est donc pas révélateur de ce qui se passe dans les établissements. Nous travaillons avec le ministère de l'intérieur pour voir comment mieux valoriser l'ensemble des actions réalisées par les établissements, y compris les exercices réalisés en application du PPMS.

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Édouard Geffray, directeur général de l'enseignement scolaire

J'observe, mais je ne peux la quantifier, une volonté croissante de la part des établissements de s'impliquer dans ces questions. La crise sanitaire a contribué à fortifier l'acculturation au risque. La résilience, qui n'était pas le premier sujet de préoccupation lorsque j'en parlais il y a quelques années, est devenue un enjeu majeur depuis 2021. Cette appropriation très nette concerne toutes les questions liées à la sécurité : les PPMS – la quasi-totalité des établissements en ont un –, la santé ou la sécurité environnementale, particulièrement outre-mer, où les territoires sont soumis à des risques spécifiques comme les cyclones. Nos outils de remontée sont malheureusement incomplets et ne nous permettent pas de connaître toutes les activités organisées dans nos 60 000 implantations. Nous ne disposons donc que d'une vision partielle, mais j'observe une dynamique très forte depuis la crise sanitaire.

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Quel est le pourcentage d'établissements disposant d'un PPMS ? Sont-ils incités à en établir un ?

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Édouard Geffray, directeur général de l'enseignement scolaire

Les PPMS sont une obligation légale : l'article L. 411-4 du code de l'éducation prévoit en effet que « chaque école dispose d'un plan pour parer aux risques majeurs liés à la sûreté des élèves et des personnels ».

La configuration des établissements peut être différente entre les 3 200 écoles rurales à classe unique et les groupements scolaires accueillant 2 000 élèves. Les exigences doivent donc être adaptées. Une enquête exhaustive nous a permis de constater que presque tous les établissements avaient déployé un PPMS. Le 8 juin 2023, nous avons simplifié la procédure en unifiant les deux PPMS existants, l'un pour les risques majeurs, l'autre pour les attentats et les intrusions. L'existence de deux procédures constituait en effet une source de complexité, et certains établissements avaient mis en place l'un des deux PPMS, mais pas l'autre. L'unification des procédures s'est accompagnée de la mise à disposition de ressources d'accompagnement. Nous n'avons pas encore de retour sur le PPMS unifié, car il ne s'applique que depuis l'année scolaire en cours, mais la quasi-totalité des établissements ont un PPMS, unifié ou non.

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Les enjeux de la sécurité civile ne sont pas les mêmes en ville, à la campagne ou en montagne : dans quelle mesure les établissements scolaires s'associent-ils aux acteurs locaux de la sécurité civile ?

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Édouard Geffray, directeur général de l'enseignement scolaire

Le sujet, polymorphe, est très dépendant de l'environnement territorial ; il doit donc être traité à l'échelle de l'établissement, et il n'appartient pas à la rue de Grenelle de définir ce qui doit être fait établissement par établissement. En effet, selon qu'un établissement est exposé à un risque de submersion, de séisme, d'ouragan ou est situé près d'une usine Seveso, la préparation des élèves ne sera pas la même. Au-delà de compétences universelles, qui, comme le massage cardiaque, font partie de la formation des professeurs, la prévention et la sensibilisation se font de manière contextualisée. Nous menons ces actions avec des partenaires publics, comme la gendarmerie, la police nationale ou la sécurité civile, au sein des territoires où ces acteurs interviennent.

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Les familles des élèves sont-elles en partie associées aux modules d'information et de prévention des risques ?

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Édouard Geffray, directeur général de l'enseignement scolaire

En règle générale, les familles ne sont pas acculturées au risque par l'école. Notre rôle est de former les élèves, non leur famille, même si des initiatives locales peuvent conduire à la mise en place d'ateliers de sensibilisation avec des parents. En revanche, ces derniers sont associés à la définition de la politique de prévention à l'échelle de l'établissement et des actions menées, notamment dans le cadre des comités d'éducation à la santé, à la citoyenneté et à l'environnement (CESCE). Ces structures, qui réunissent des parents d'élèves élus par leurs pairs et les personnels de l'établissement, définissent les actions prioritaires à conduire auprès des élèves en matière de santé, de sécurité et de protection.

Par ailleurs, les parents sont informés des exercices menés dans le cadre des PPMS, ce qui participe d'une prise de conscience collective.

Enfin, un élève formé est parfois le meilleur ambassadeur des bons gestes à adopter auprès de sa famille et, plus largement, de son entourage, à qui il peut communiquer l'envie de se former.

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Nous évoquons souvent l'importance de l'acculturation au risque et aux enjeux de la prévention et de la sécurité civile, ainsi que de l'engagement citoyen dans son ensemble. Avez-vous réfléchi à des évolutions possibles dans ce domaine à l'échelle de l'éducation nationale ?

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Édouard Geffray, directeur général de l'enseignement scolaire

Tout l'enjeu, pour nous, consiste à faire en sorte que l'élève soit suffisamment outillé à chaque étape de son parcours, grâce à des enseignements adaptés à son âge. Cela concerne tous les sujets, y compris l'acculturation au risque et les gestes permettant d'en limiter la réalisation – ou les effets, si le risque survient.

Sur le plan des compétences, nous nous employons à massifier jusqu'au collège les actions existantes. Nous avons su le faire pour la sécurité routière et la PPMS, il nous faut le réaliser pour le PSC1. La priorité, à mes yeux, est d'atteindre un niveau de 100 % pour le PSC1 d'ici à la fin du collège.

En matière de culture, on peut penser à deux types de dispositifs. En premier lieu, la Journée nationale de la résilience et d'autres actions du même type visent à sensibiliser et à développer la prise de conscience des élèves. C'est en quelque sorte une piqûre de rappel à la suite des enseignements qu'ils ont reçus. Des actions de ce type soulignent que tel ou tel événement peut se produire à n'importe quel moment et qu'il faut avoir le bon réflexe pour se protéger et protéger les autres. Nous souhaitons massifier ces actions de sensibilisation.

En second lieu, il faut travailler sur la suite du parcours, après le collège, dans deux directions. La première concerne la sécurité au travail et les gestes professionnels. Nous menons en ce domaine une action très forte, que nous essayons constamment de parfaire, dans la voie professionnelle. C'est essentiel, car cela peut avoir des incidences sur l'accidentologie au travail et les risques pesant sur la santé des élèves et des futurs salariés. La difficulté tient au fait que certains travaux nécessitent d'avoir 16 ans. Les élèves plus jeunes peuvent s'entraîner grâce à des casques de réalité virtuelle utilisant la modélisation en 3D ; ils apprendront ainsi à effectuer des gestes qui deviendront des réflexes en situation réelle. Nous sommes en train de généraliser ces actions.

La seconde direction est le service national universel (SNU), qui a pour objet de répondre aux enjeux de résilience et de prévention des risques, tant par le séjour de cohésion que par la possibilité de participer à un projet d'engagement collectif. Nous avons lancé, à l'été dernier, les classes et les lycées engagés, dispositif visant à impulser une dynamique collective dans plusieurs domaines, parmi lesquels la résilience. Dans ce cadre, les jeunes se voient offrir la possibilité de faire un séjour de cohésion. En octobre, on comptait plus de 1 000 classes et lycées engagés, ce qui témoigne du développement d'une conscience collective. Tout ce qui participe à l'extension du SNU, dans la perspective tracée par le Président de la République lors de sa conférence de presse de janvier, contribue à l'acculturation collective au risque et à sa prévention.

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Connaissez-vous les unités nationales de secouristes citoyens, qui ont notamment pour objet de former les jeunes au sein des établissements scolaires ? Leur fondateur, M. Thomas Alliot, prône la formation par les pairs – autrement dit, entre jeunes – en partant du constat qu'en cas de crise dans un établissement scolaire, les adultes sont fortement mobilisés et ne sont pas toujours en mesure d'intervenir dans tous les domaines. Il estime que le fait de former les jeunes les responsabilise et accroît la capacité de réaction à la crise. Serait-il envisageable de développer la formation par les pairs au sein des établissements ?

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Édouard Geffray, directeur général de l'enseignement scolaire

Non, je ne connais pas ces structures. Ne peuvent intervenir en milieu scolaire, sur les questions de formation aux premiers secours, que les personnes relevant d'entités agréées par le ministère de l'intérieur. De manière générale, les intervenants au sein de l'institution scolaire doivent être considérés comme fiables par l'éducation nationale. Il ne saurait y avoir maldonne concernant ce type de gestes. Dans l'absolu, l'idée me paraît intéressante, mais une organisation doit d'abord obtenir un agrément attestant la qualité du service rendu et des intervenants. En effet, les mineurs dont nous avons la charge sont placés sous notre responsabilité exclusive. En cas de problème, la responsabilité du chef d'établissement peut être recherchée.

Je suis tout à fait d'accord avec vous sur le fait que, dans une situation de crise paroxystique, la capacité de réaction individuelle de chacun est déterminante pour la bonne marche collective. L'objectif est que chacun adopte les bons réflexes et garde son sang-froid. Le fait de savoir effectuer les bons gestes au bon moment participe du sang-froid collectif.

Il y a quelques années, lorsque nous avons commencé à réaliser les exercices de PPMS, les élèves ne comprenaient pas toujours l'enjeu. À présent, on constate une discipline collective absolue, laquelle constitue un gage de protection.

Dans ce cadre, la transmission entre les pairs peut avoir du sens, car un élève est souvent sensible à ce que lui dit un autre élève. À titre personnel, toutefois, il me semble que ce dispositif devrait être mis au service de la sensibilisation plutôt que de la formation. Être sensibilisé par ses pairs, cela marche généralement très bien. Des élèves d'une classe de sécurité civile ou de défense peuvent ainsi faire part avec profit de leur expérience à leurs camarades – à l'image des témoignages des pompiers volontaires dans les lycées. En revanche, la formation à des gestes suppose, me semble-t-il, une expérience et une antériorité que n'ont pas les élèves.

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M. Alliot avait également mis l'accent sur l'information et la sensibilisation.

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Le Portugal et l'Italie ont institué un ministère en charge de la sécurité civile. Pensez-vous qu'un tel choix serait un atout pour notre pays, où la prévention et la gestion de crise relèvent des ministères de l'intérieur, des armées, de la transition écologique, de la santé et de l'éducation nationale ? Avez-vous des exemples de politiques menées chez nos voisins européens qui pourraient nous inspirer ?

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Édouard Geffray, directeur général de l'enseignement scolaire

Je n'ai pas d'exemples à l'esprit. Nous pouvons demander à la délégation aux relations européennes et internationales et à la coopération de vous fournir un état des lieux de ce qui se pratique dans les autres systèmes éducatifs européens.

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Volontiers. N'hésitez pas à nous envoyer des éléments écrits si vous souhaitez compléter nos échanges.

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Édouard Geffray, directeur général de l'enseignement scolaire

Nous vous ferons parvenir les réponses écrites et les éléments d'analyse de la délégation aux relations européennes et internationales et à la coopération.

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Je vous remercie pour votre contribution à nos travaux.

La séance est levée à onze heures cinquante-cinq.

Membres présents ou excusés

Présents. - Mme Lisa Belluco, M. Florian Chauche, M. Didier Lemaire

Excusé. - M. Bertrand Bouyx, M. Éric Pauget, Mme Marietta Karamanli