Publié le 7 décembre 2023 par : M. Kamardine, M. Bazin, Mme Bazin-Malgras, M. Dumont, Mme Genevard, M. Gosselin, M. Hetzel, M. Minot, M. Pradié, M. Schellenberger.
Dans la collectivité départementale de Mayotte, lorsqu’il est constaté, dans le cadre d’une enquête préliminaire ou d’une instruction judiciaire, que le propriétaire d’un immeuble ou toute personne exerçant sur un immeuble une jouissance paisible et continue est mis en cause pour l’infraction prévue à l’article 225‑14 du code pénal à l’égard de ressortissants étrangers en situation irrégulière, le préfet peut procéder, par arrêté, à la confiscation conservatoire de ce bien jusqu’à ce qu’une décision de justice établisse ou non la matérialité des faits. Cet arrêté est alors publié et notifié au procureur de la République, au propriétaire du bien concerné ou de toute personne exerçant sur un immeuble une jouissance paisible et continue s’il est connu et à l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués.
Si la matérialité des faits n’est pas établie aux termes de l’enquête judiciaire ou si un non-lieu ou une relaxe est prononcée par le juge judiciaire, l’arrêté du préfet de Mayotte cité à l’alinéa précédent est immédiatement abrogé.
Si la matérialité des faits est établie par une décision de justice, le préfet de Mayotte, si la décision de justice ne le prévoit pas, peut, par arrêté, procéder à la confiscation des biens cités au premier alinéa qui sont alors affectés à l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués qui peut alors procéder à leurs ventes dans les conditions prévues pour les autres biens confiscations et affectés à cette agence et notamment à l’article 706‑160 du code de procédure pénale. Cet arrêté est alors publié et notifié au procureur de la République, au propriétaire du bien concerné s’il est connu et à l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués.
Le juge pénal peut également, dans les conditions de droit commun, procéder à cette confiscation.
Conformément aux termes du premier alinéa de l’article 73 de la Constitution, « dans les départements et les régions d’outre-mer, les lois et règlements sont applicables de plein droit. Ils peuvent faire l’objet d’adaptations tenant aux caractéristiques et contraintes particulières de ces collectivités ».
Comme le rappelle le Conseil d’Etat statuant au contentieux dans une décision en date du 30 juin 2003 (N° 24659, la loi peut « instituer dans la collectivité départementale de Mayotte un régime de prestations familiales différent de celui existant en métropole à la condition que cette différence soit justifiée par la situation particulière de cette collectivité ; qu’eu égard aux différences qui existent entre cette collectivité et la métropole tant du point de vue de la situation économique que de la démographie et du statut civil qui s’applique à la plupart des personnes qui y résident et à l’objectif de maîtrise de la natalité nécessaire au développement de cette collectivité ».
Comme le rappelle, également, le Conseil constitutionnel dans sa décision n°2018-770 DC du 6 septembre 2018, en prévoyant dans le code civil d’instaurer, à Mayotte par rapport au reste du territoire national, « une différence de traitement qui tient compte des caractéristiques et contraintes particulières propres à Mayotte et qui est en rapport avec l'objet de la loi », le législateur « ne méconnait pas les exigences constitutionnelles ».
Comme le rappelle, de surcroît, le conseil constitutionnel dans sa décision n° 2022-1025 QPC du 25 novembre 2022, « le Département de Mayotte est, depuis de nombreuses années, confronté à des flux migratoires exceptionnellement importants et comporte une forte proportion de personnes de nationalité étrangère en situation irrégulière. Ce département est soumis à des risques particuliers d’atteintes à l’ordre public. D’autre part, du fait de sa géographie, ces risques concernent l’ensemble de son territoire ».
Ainsi, le législateur peut poursuivre l’objectif de lutte contre l’immigration irrégulière qui participe de la sauvegarde de l’ordre public qui est un objectif de valeur constitutionnelle.
Dès lors, une différence de traitement instaurée à Mayotte par rapport au reste du territoire national, concernant la lutte contre l’immigration irrégulière, par des dispositions qui tiennent compte des caractéristiques et contraintes particulières propres au Département de Mayotte est en rapport avec l’objet de la présente proposition de loi.
Pour mémoire et concernant la situation particulière de Mayotte et les contraintes particulières du 101ème département, la population de Mayotte, qui était il y a seulement une dizaine d’année d’une large majorité de ressortissants français, est actuellement constituée, en raison d’une immigration massive irrégulière des dernières années, d’un tiers de Français et deux tiers d’étrangers, dont environ la moitié en situation irrégulière ; les services de l’Etat à Mayotte comptabilisent en décembre 2023 plus de 290 000 demandes de titre de séjour à instruire ; il conviendrait pour respecter les normes nationales de la scolarisation, construire une salle de classe par jour pour absorber les naissances quotidiennes d’origine étrangère ; la croissance démographique d’environ 4% par an trouve très largement sa source dans l’immigration irrégulière ; cette croissance démographique met en échec la plupart des politiques publiques ; le taux d’homicide qui était sous la moyenne nationale il y a quelques années a évolué rapidement pour atteindre le taux le plus élevé au niveau européen ; la puissance publique qu’il s’agisse des représentants de l’Etat ou du Gouvernement reconnait depuis plusieurs années l’existence d’un lien de causalité entre les violences et l’insécurité à Mayotte avec l’immigration clandestine massive ; les modalités d’accès direct ou indirect à la nationalité contribuent à la l’importante pression migratoire à Mayotte ainsi que avec l’accès gratuit et sans condition au système de santé ; les difficultés concernant l’établissement d’un cadastre complet et les dérivées en matière de droit de la propriété issues du statut local des personnes réduisent fortement les capacités de lutte contre l’exploitation indigne des personnes en situation régulière et de lutte contre les marchands de sommeil.
De plus, dans l’esprit des Titres 1er A, II, II bis, III et V, cet amendement est bien en lien direct ou indirect avec le texte adopté en commission des lois qui présente, en outre, un Titre VI consacré spécifiquement aux adaptations législatives outre-mer, notamment aux collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution, dont Mayotte.
A cet égard, en accord avec le gouvernement, la commission des lois a voté la suppression de la possibilité de légiférer par ordonnance concernant les collectivités d’outre-mer relevant de l’article 73 de la Constitution, conférant au Parlement la possibilité de légiférer directement sur le périmètre dans lequel le gouvernement envisageait de légiférer par ordonnance, c’est-à-dire, selon l’article 26 du projet de loi initial du gouvernement, sur les dispositions « régissant la situation des ressortissants étrangers en matière d’entrée, de séjour, d’éloignement, d’asile, de contrôles et de sanctions, de contentieux administratif et judiciaire, d’intégration, de travail ou portant sur le code de la construction et de l’habitation, le code de commerce et le code de la santé publique ».
Le présent amendement s’inscrit strictement dans ce périmètre.
Il tend à améliorer les capacités de lutte contre l'exploitation des immigrés clandestins et en particulier contre les marchands de sommeil.
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