La séance est ouverte à quinze heures.
La commission procède à l'examen de la proposition de loi visant à favoriser l'accompagnement psychologique des femmes victimes de fausse couche (n° 747 ) (Mme Sandrine Josso, rapporteure).
Cette proposition de loi porte sur un sujet dont on parle trop peu : les fausses couches. Nombre d'entre nous y ont pourtant été confrontées, de manière directe ou indirecte ; une grossesse sur quatre se termine de cette façon.
On appelle « fausse couche » un arrêt naturel de la grossesse avant vingt-deux semaines d'aménorrhée, c'est-à-dire avant cinq mois et demi de grossesse. Avant quatorze semaines, c'est une fausse couche précoce, entre quatorze et vingt-deux semaines, une fausse couche tardive.
Cette proposition de loi porte principalement sur les fausses couches précoces, non que les fausses couches tardives, ou les autres formes de deuil périnatal – morts in utero, interruptions médicales de grossesse, enfants mort-nés – ne soient pas un sujet pour le législateur, au contraire, mais elles ne sont pas l'objet de ce texte.
Cette proposition vise des événements qui sont considérés comme totalement en dehors du champ du deuil périnatal. Des fausses couches précoces, il y en a chaque année des centaines de milliers. Les médecins nous expliquent, non sans raison, que c'est un phénomène naturel, qui permet d'éliminer des embryons affectés de malformations chromosomiques telles qu'ils n'étaient pas viables. Cela ne se conteste pas.
Ce qui me semble beaucoup plus contestable, c'est l'idée que, parce que la fausse couche précoce est un phénomène naturel, qui survient souvent alors que la grossesse n'est pas encore visible, voire pas encore annoncée, elle n'est pas un problème pour les femmes qui la vivent. C'est cette idée fausse que ma proposition de loi veut combattre. La fausse couche, c'est au mieux un événement très désagréable de la vie d'une femme, dont elle se remettra avec le temps, et souvent avec la survenue d'une nouvelle grossesse. Mais dans bien des cas, la fausse couche est, pour la femme et pour le couple, une épreuve physique et surtout psychologique.
Ce n'est pas le cas pour toutes les femmes, mais les études montrent qu'entre 20 % et 55 % des femmes qui ont subi une fausse couche présentent des symptômes dépressifs, et que 15 % développent un véritable stress post-traumatique. Quant aux partenaires, 17 % présentent des symptômes dépressifs après une fausse couche.
L'impact psychologique de la fausse couche précoce est donc tout sauf anecdotique. C'est un enjeu réel pour la santé mentale des femmes et, plus généralement, un enjeu de santé publique.
Si ce sujet est à ce point occulté dans la société et dans le monde médical, c'est, je l'ai constaté lors de mes auditions, parce que certaines idées reçues sont encore largement véhiculées. Ainsi, le chagrin lié à une perte de grossesse serait proportionnel à l'âge de la grossesse – ce qui expliquerait que les fausses couches précoces ne sont pas ou seulement peu douloureuses. Or toutes les études montrent que c'est faux ! L'impact émotionnel n'est pas lié à l'âge gestationnel ; il dépend de la manière dont les futurs parents investissent la grossesse et se projettent. Une femme enceinte de quelques semaines peut déjà se sentir mère, a fortiori lorsque la grossesse a été très désirée et longtemps attendue.
Il est donc urgent de briser le tabou sur les fausses couches.
Sur le plan médical, les femmes concernées sont bien prises en charge. Mais l'impact psychologique est trop souvent sous-estimé, voire négligé au point de plonger les femmes et leurs partenaires dans la détresse. Il y a bien sûr des professionnels de santé très empathiques, qui savent trouver les mots justes dans cette situation. Il y a aussi, çà et là, des initiatives locales très utiles, qui permettent aux couples éprouvés d'être informés, accueillis, écoutés, rassurés.
Mais, globalement, l'accompagnement n'est pas institutionnalisé. Les nombreux professionnels médicaux – gynécologues, sages-femmes, échographistes – que j'ai auditionnés se disent souvent démunis lorsqu'il faut annoncer et expliquer la fausse couche ; ils ne savent pas vers qui orienter les couples qui éprouvent le besoin d'être soutenus. Rompre l'isolement de ces couples est indispensable.
Il ne s'agit ni de surmédicaliser la fausse couche, ni de systématiser des prises en charge qui ne répondraient pas à un besoin. Nous devons préserver la liberté des praticiens ; ils sont responsables et il leur revient de décider quel accompagnement est le plus adapté.
J'en viens au contenu de cette proposition de loi et à ses probables évolutions.
Outre le gage, nécessaire pour qu'elle soit recevable, elle ne comporte qu'un seul article. Il permet aux patientes suivies par des sages-femmes de bénéficier d'un suivi psychologique pris en charge par la sécurité sociale lorsqu'elles ont subi une fausse couche.
En avril dernier, pour la première fois, un dispositif pérenne de prise en charge par la sécurité sociale de séances avec un psychologue libéral a été instauré : le dispositif MonParcoursPsy permet à toute personne qui ressent des troubles psychiques d'intensité légère à modérée de bénéficier chaque année de huit séances remboursées avec un psychologue libéral conventionné. Ces séances sont prises en charge à 60 % par la sécurité sociale et à 40 % par les mutuelles.
J'entends que certains considèrent que ce n'est pas assez, qu'il faudrait que tout soit financé par la sécurité sociale, qu'il faudrait plus de séances... J'entends aussi qu'une partie des psychologues refusent résolument de rentrer dans ce dispositif parce qu'ils trouvent que les tarifs des séances ne sont pas assez élevés.
Mais, ce qui compte à mes yeux, c'est qu'en neuf mois, 76 315 patients ont consulté dans ce cadre, pour un total de 297 000 séances prodiguées.
J'en reviens à ma proposition de loi. Actuellement, seuls les médecins peuvent adresser un patient dans le cadre du dispositif MonParcoursPsy. L'article 1er autorise les sages-femmes à adresser leurs patientes. Les femmes sont de plus en plus souvent suivies par des sages-femmes pendant leur grossesse, et les études montrent qu'en cas de fausse couche, l'aide psychologique doit être proposée sans délai afin que la femme puisse s'en saisir si elle la juge utile. La mesure que je propose paraît donc indispensable. Je vous présenterai deux amendements qui visent à étendre au partenaire le bénéfice de cette mesure.
Étant, comme vous, soumise au filtre de la recevabilité financière, je ne pouvais avancer, sur des sujets coûteux, qu'avec l'accord du Gouvernement. Je n'ai donc pas cessé, au cours de ces dernières semaines, de négocier pour améliorer la rédaction initiale. Ces efforts ont porté leurs fruits : je vous présenterai tout à l'heure deux amendements dont la charge a été couverte par le Gouvernement, qui nous permettront d'aller beaucoup plus loin pour accompagner les couples confrontés à une fausse couche.
Il s'agira, d'une part, de complètement déverrouiller l'adressage au dispositif MonParcoursPsy par l'intermédiaire des sages-femmes. D'autre part, la proposition de loi généralisera les « parcours fausse couche » dans les régions, après une période de recensement des bonnes pratiques locales.
Au lieu d'édicter des règles rigides, complexes, longues à appliquer et peut-être inefficaces, j'ai choisi de faire reposer ces parcours sur la généralisation d'expériences qui ont prouvé leur efficacité. Ces parcours pourront différer d'une région à l'autre, selon les caractéristiques du territoire, selon les acteurs et selon les établissements sur lesquels il sera possible de s'appuyer.
Ce parcours fausse couche répond à l'essentiel des préoccupations exprimées dans vos amendements : formation des professionnels de santé, information donnée aux patients, consultation médicale après une fausse couche. Tous ces sujets ont vocation à être traités dans le cadre de ce parcours, selon une approche qui privilégiera la souplesse et la mise en réseau des initiatives locales.
J'espère vivement que nous pourrons voter cette proposition de loi à l'unanimité. C'est un sujet largement transpartisan, vos amendements le montrent.
Je ne dis pas que nous aurons réglé toutes les questions liées aux fausses couches, notamment celle du congé spécifique que plusieurs d'entre vous ont soulevée dans vos amendements. Mais cette proposition de loi marquera une réelle avancée pour de très nombreux couples, et son coût me semble négligeable au regard des bénéfices que nous en attendons en matière de prévention et de santé mentale.
Lorsque je l'ai auditionné, le professeur Frydman, l'un des pionniers de la procréation médicalement assistée en France, m'a dit qu'il fallait vraiment agir pour accompagner les fausses couches parce qu'il y avait là un « vide juridique ». Nous pouvons combler ce vide ensemble.
Votre proposition permet à notre commission d'aborder un sujet trop peu évoqué dans notre société ; il est regrettable de ne pas parler d'une réalité qui concerne 15 % des femmes enceintes en France, celle d'une grossesse qui s'achève prématurément et de façon subie. Il est anormal que certaines et certains considèrent encore les fausses couches comme un tabou ; c'est un préjugé qui enferme encore un peu plus les femmes concernées dans leur détresse, et ajoute de la souffrance à la souffrance.
Si le ressenti de chacune peut être différent, nombreuses sont celles qui vivent une expérience douloureuse et traumatisante. Dépression, anxiété, culpabilité, honte, colère ou simplement tristesse : ce sont là autant de sentiments susceptibles d'altérer sensiblement la santé mentale de ces femmes.
Face à un tel constat, il apparaît indispensable de permettre à celles qui en ont besoin de bénéficier d'un accompagnement psychologique adapté à leurs besoins. Si le soutien de la famille et des proches est indispensable, il ne saurait se substituer à l'intervention d'un professionnel. Souvent dépeinte à tort comme un luxe ou une prestation de confort, la prise en charge par un psychologue occupe pourtant une place déterminante dans le processus de reconstruction des personnes confrontées à des épreuves terribles.
Fort de ce constat et soucieux de renforcer les mesures déployées en faveur de la santé mentale, le Président de la République a annoncé en septembre 2021 la prise en charge des consultations de psychologie par la solidarité nationale, avec le soutien des groupes de la majorité présidentielle. Dès avril 2022, cette annonce s'est traduite par l'instauration du dispositif MonParcoursPsy, qui permet aux personnes qui en ont vraiment besoin de bénéficier gratuitement de plusieurs séances d'accompagnement psychologique.
En proposant d'intégrer les femmes victimes de fausse couche à ce dispositif, le texte présenté par notre rapporteure répond utilement à la question qu'il soulève. Le groupe Renaissance votera en faveur de cette proposition de loi.
Je remercie Mme Josso de s'être saisie de ce sujet délicat mais important. La fausse couche, que je préfère appeler interruption naturelle de grossesse, est un enjeu majeur de santé publique qui concerne chaque année 200 000 femmes en France. Il mérite d'être mis en lumière et ne doit pas être banalisé.
Pour de nombreuses femmes, l'interruption naturelle de grossesse est un événement traumatique qui peut entraîner des répercussions émotionnelles importantes, quel que soit l'âge gestationnel lorsqu'elle survient. Chacun des parents ressent souvent du chagrin, de la colère, de la culpabilité voire du désespoir. Ils doivent savoir qu'ils ne sont pas seuls dans leur douleur et qu'ils peuvent bénéficier d'un accompagnement à la hauteur des enjeux.
Je souhaite en effet parler des deux parents. J'ai déposé un amendement qui vise à ne pas laisser de côté le conjoint ou la conjointe : ils sont tout autant impliqués dans la grossesse. Ils doivent pouvoir être accompagnés s'ils le souhaitent ; les professionnels de santé, notamment les psychologues, représentent un soutien important lorsqu'il faut faire face à la perte réelle de l'enfant et à la perte symbolique de la réalisation d'un désir d'enfant.
Il est essentiel que la société reconnaisse que l'interruption naturelle de grossesse est un événement douloureux et involontaire ; un accompagnement psychologique approprié doit être proposé lorsqu'il est nécessaire. Pouvoir exprimer sa douleur et recevoir le soutien et les soins requis, voilà ce que la puissance publique doit proposer.
Cette proposition de loi va dans ce sens et le groupe Rassemblement National votera en sa faveur.
Les conséquences physiques et morales des fausses couches ne sont que très peu prises en charge ; la réalité est masquée, banalisée, parce que le corps des femmes, lorsqu'il ne parvient pas à enfanter, est perçu comme défaillant. La fausse couche est définie comme une erreur de parcours : on enjoint aux femmes de « réessayer », oubliant la dimension traumatique de l'événement.
Mais les chiffres sont là : une femme sur dix risque de subir une fausse couche au cours de sa vie, et chaque année, 200 000 femmes font une fausse couche.
Cette proposition de loi vise à améliorer les dispositifs en vigueur, ce que nous ne pouvons qu'approuver. Elle demeure néanmoins largement insuffisante au regard des besoins exprimés par les personnels soignants, les associations et les personnes victimes de fausses couches. En effet, elle concerne uniquement les psychologues conventionnés dans le cadre du dispositif MonParcoursPsy, c'est-à-dire 1 900 professionnels parmi les 88 000 de notre pays. Elle ne traite pas non plus des déserts médicaux. Psychiatres et gynécologues sont pourtant déterminants dans le suivi et l'accompagnement des personnes victimes de fausses couches.
La prise en charge de la fausse couche nécessite un plan ambitieux en matière de prévention et de formation du personnel médical, doté de moyens financiers, matériels et humains destinés à faciliter le parcours des personnes victimes.
Le code du travail doit prévoir des mesures pour les personnes qui vivent un arrêt spontané de leur grossesse, en leur reconnaissant le droit à un congé spécifique.
C'est dans ce sens qu'iront nos amendements. Nous avions aussi demandé l'organisation de campagnes d'information et de prévention des fausses couches, mais aussi d'information sur le dépistage de l'endométriose, maladie mal connue qui peut provoquer des fausses couches ; ces amendements ont été jugés irrecevables et nous le regrettons.
Nous espérons néanmoins pouvoir débattre sereinement de ce sujet primordial.
Une grossesse sur quatre se termine par une fausse couche, et c'est un sujet qui reste tabou dans notre société. Nous saluons donc l'initiative de Mme Josso. L'accompagnement psychologique est primordial, et doit être proposé par tous les professionnels dès que nécessaire, que ce soit au moment du diagnostic ou plus tard.
Le fait que les futurs parents attendent la première échographie, à deux mois et demi de grossesse, pour annoncer la nouvelle à leurs proches et à leurs familles concourt au sentiment d'incompréhension et de solitude qu'ils éprouvent lors d'une fausse couche. Alors qu'ils sont déjà pleinement investis dans la grossesse, ils souffrent parfois d'un décalage vis-à-vis de leurs proches comme des professionnels de santé, qui banalisent parfois cet événement fréquent.
L'annonce d'une fausse couche et les mots employés par les professionnels ont toute leur importance dans les phases de deuil qui suivent la perte de ce bébé à venir.
Certaines entreprises françaises donnent le droit à deux jours de congé en cas de fausse couche avant vingt-deux semaines d'aménorrhée. Le conjoint peut parfois bénéficier aussi de ce congé. C'est une piste de réflexion intéressante dans la considération apportée au couple : cela permet de prendre le temps d'accepter les choses ensemble.
Si une meilleure prise en charge est nécessaire, une formation adaptée et une analyse des retours d'expérience sont aussi indispensables, ainsi qu'un temps de consultation suffisant pour peser les mots utilisés à l'annonce de la fausse couche ; il faut en donner les moyens à tous les professionnels. Il faut aussi bien associer les deux parents dans cette épreuve. Nous proposerons plusieurs amendements en ce sens.
Le groupe Les Républicains est favorable à cette proposition de loi. Je salue le travail de notre rapporteure, qui a su, lors de nombreuses auditions, entendre les attentes fortes de la société sur ce sujet si important.
On dit souvent que la loi ne fait pas de sentiment, et pourtant nous légiférons aujourd'hui sur un sujet qui nous touche au cœur, qui nous touche parfois même dans notre chair. Chaque année, 200 000 femmes et leurs conjoints affrontent l'impensable : la perte d'un enfant dont la vie était encore nichée au creux du ventre de leur maman. En France, une grossesse sur quatre se termine par une fausse couche. Je remercie notre collègue Sandrine Josso de mettre en lumière, sans filtre, cette douloureuse réalité.
Le MoDem a toujours voulu une politique familiale ambitieuse. Le deuil périnatal brutal, tragique, doit absolument en faire partie, même si l'interruption spontanée de grossesse survient tôt, voire très tôt. Il est de notre devoir de soutenir ces familles qui vivent l'inimaginable et dont la souffrance ne peut plus être passée sous silence.
Si un accompagnement physique, médical, existe, cette proposition de loi renforce l'accompagnement psychologique des familles afin de prévenir des situations post-traumatiques et la détresse, l'isolement, la dépression qui peuvent découler d'une fausse couche.
Le groupe Démocrate (MoDem et Indépendants) souhaitait que cet accompagnement soit élargi à toute situation qui le nécessiterait, notamment celle d'une interruption médicale de grossesse. Ce sera probablement le cas grâce à un amendement de la rapporteure, et nous nous en féliciterions.
J'ai enfin une pensée pour toutes les « mamanges » et les « papanges », tous les « paranges », comme on dit aujourd'hui, et je veux leur rappeler que nous sommes à leurs côtés.
Le vote en faveur de ce texte est pour le groupe Démocrate est une évidence, et nous espérons vivement son adoption.
Deux minutes, c'est peu pour mettre des mots sur la douleur des femmes, des couples touchés par une interruption spontanée de grossesse, plus communément appelée fausse couche. On en compte, cela a été rappelé, 200 000 chaque année ; c'est 15 % du total des grossesses. En tant qu'homme, je ne pourrai évidemment jamais comprendre la souffrance physique, la blessure du corps, le vide psychologique, le stress post-traumatique qui touche une femme concernée sur trois. C'est un sujet encore tabou dans notre société.
Le groupe Socialistes soutient bien sûr ces femmes, ces familles. Rappelons aussi solennellement que notre devoir est de les écouter lorsqu'ils vivent « un drame silencieux dont les douleurs sont vécues dans l'ombre et auquel notre société ne prépare guère », pour reprendre les mots de Paula Forteza. Parce que l'entourage, les amis, les proches rappellent qu'il ne faut pas annoncer une grossesse avant trois mois, on renvoie souvent ces femmes à l'idée qu'une fausse couche, ce n'est rien ; pourtant, le corps et les émotions disent le contraire.
Je salue votre travail, madame la rapporteure, comme je tiens à rappeler celui de notre collègue Paula Forteza lors de la précédente législature.
Je n'ai pas le temps d'évoquer l'insuffisance du nombre des gynécologues et des psychologues hospitaliers sur notre territoire pour prendre en charge ces femmes victimes de fausse couche.
Nous accueillons évidemment favorablement ce texte, qui nous donne l'occasion de valoriser l'engagement des sages-femmes en leur donnant la possibilité d'adresser leurs patientes à un psychologue. C'est un premier pas vers un accompagnement tellement nécessaire pour amener un peu d'apaisement dans ce grand bouleversement.
« Ceux qui ne savaient pas, qui ne pouvaient pas se douter, m'ont dit que ce n'était rien, que j'allais oublier, que ça n'était même pas un fœtus, ce n'était pas un enfant, que mes émois étaient de la littérature. Pourtant, j'avais vu mon corps se transformer, je l'avais senti. [...] Et puis cette sensation d'être seule, seule, en voyant tout disparaître. “Perdre”, c'était le verbe. [...] Même sans tristesse, même sans drame, rien n'est comme avant. Ça avait eu lieu. » Ce sont les mots de Line Papin dans Une vie possible.
Ces femmes ne seront plus seules ; la représentation nationale est à leurs côtés.
Nous aimons souvent incarner nos propos dans des exemples concrets, relayer des témoignages reçus, des histoires qui se sont écrites dans la chair des personnes que nous rencontrons et qui donnent un sens à l'exercice de notre mandat, justifiant l'énergie que nous mettons à améliorer la loi.
Je vous épargne pourtant les nombreux récits des femmes, des couples, confrontés à une fausse couche. On y retrouve presque toujours la brutalité du verdict, les projections de familles qui s'effondrent, la souffrance physique et psychologique, le tabou et le silence qui emmurent et isolent, parfois l'absence de compassion des soignants, et surtout presque toujours l'absence de répit pour se remettre de cet événement traumatique.
On estime qu'une femme sur dix a vécu une interruption spontanée de grossesse. Ce n'est pas une maladie, mais une perte : les personnes qui y sont confrontées doivent être dignement accompagnées et sensibilisées durant leur grossesse puis tout au long de leur vie.
Merci, madame la rapporteure, de votre travail sur ce sujet crucial et encore largement tabou. C'est un très bon socle de départ. Je salue également vos amendements, qui vont plus loin que le texte initial, notamment par l'ouverture de la prise en charge au conjoint ou à la conjointe. On peut encore renforcer le dispositif d'accompagnement ; c'est le sens de mes amendements, largement issus de la proposition de loi de Mme Paula Forteza pour une meilleure prise en charge de la fausse couche. Je souhaite à mon tour saluer son travail et les nombreuses auditions qu'elle avait menées pour proposer une prise en charge aussi complète que possible.
Ces mesures ont un coût, c'est certain ; mais il reste minime comparé à celui des inégalités entre les femmes et les hommes. Or ce sont ces inégalités qui font que les fausses couches restent taboues, au détriment de la santé physique et psychologique des femmes.
Merci à tous de vos propos. Merci aussi d'avoir salué le travail effectué dans les précédentes législatures.
Article 1er A (nouveau) : Mise en place d'un parcours fausse couche
Amendement AS52 de Mme Sandrine Josso et sous-amendements AS57, AS55 et AS56 de M. Arthur Delaporte.
Cet amendement reprend les orientations esquissées au début de la réunion : l'accompagnement des couples confrontés à une fausse couche doit être pensé globalement, depuis le moment de l'annonce par le gynécologue, la sage-femme ou le médecin échographiste jusqu'au suivi médical et psychologique a posteriori. Il faut mettre fin à la solitude des femmes et de leurs conjoints qui se trouvent plongés dans la détresse par la découverte de la fausse couche.
L'objectif initial de la proposition de loi, faciliter l'accès à un suivi psychologique pour les femmes qui le souhaitent après une fausse couche, est utile et légitime. Mais il faut aller au-delà en proposant un accompagnement aux couples.
Il s'agit donc ici de mettre en place des parcours fausse couche au niveau des agences régionales de santé. J'y ai réfléchi avec le Gouvernement. Afin de les concevoir de la façon la plus efficace possible, il nous a semblé utile de procéder d'abord à un recensement des bonnes pratiques ainsi qu'à une identification des établissements et professionnels de santé qui seraient susceptibles de jouer un rôle pilote dans ce programme, dans une approche au plus près du terrain. Ainsi, les gynécologues de l'hôpital Foch, à Suresnes, ont déjà envisagé d'ouvrir une consultation spécifique, qui serait accessible à tous les couples qui en ressentiraient le besoin.
Il faut à mon sens s'appuyer sur ces initiatives locales pour déterminer les contours d'un parcours fausse couche qui serait mis en place dans chaque région au 1er septembre 2024.
Vous proposez d'introduire un accompagnement pour « les couples » confrontés à une interruption naturelle de grossesse. Nous proposons, avec le sous-amendement AS57, de recentrer cet accompagnement sur « la femme » qui y est confrontée, tout en précisant que « ce parcours inclut les conjoints, partenaires ou concubins des femmes ayant subi l'interruption spontanée de grossesse ». S'il importe d'accompagner aussi le partenaire, ce qui va dans le sens d'une plus grande égalité au sein du couple et d'une déconstruction des rôles traditionnellement assignés à chacun, la priorité doit rester l'accompagnement de la femme qui a elle-même subi une interruption de grossesse, avec toutes les conséquences physiques et psychologiques que cela peut causer. Il importe de considérer cette femme comme une patiente à part entière, indépendamment de la cellule sociale qu'est le couple.
Le sous-amendement AS55 vise, quant à lui, à systématiser l'information des femmes par les professionnels de santé qui les accompagnent sur les conséquences des interruptions spontanées de grossesse. Toute femme victime d'une interruption spontanée de grossesse doit être informée des éventuelles conséquences de sa fausse couche, des potentiels traitements et de la possibilité de se faire accompagner psychologiquement.
Le sous-amendement AS56, enfin, propose d'avancer au 1er janvier 2024 l'entrée en vigueur de cet article : c'est un délai qui paraît raisonnable.
Il me semble que c'est précisément un apport important de ce texte que de prendre en compte le couple, et pas seulement la femme – étant entendu que l'on distinguera, dans la mise en œuvre du parcours fausse couche, la prise en charge de la femme et celle du couple.
L'objectif du parcours fausse couche étant d'institutionnaliser la prise en charge globale des couples, je suis favorable à votre proposition de rendre systématique l'information des femmes sur les conséquences des interruptions spontanées de grossesse.
Vous proposez enfin, que le parcours fausse couche soit généralisé dès janvier 2024. Je souhaite, comme vous, que l'on avance le plus vite possible sur cette question, mais le mois de septembre 2024 me semble être l'échéance raisonnable la plus proche, d'abord parce qu'il faut partir des initiatives de terrain qui ont fait leurs preuves, ensuite parce que le temps législatif est assez long et que cette loi n'est qu'au début de son parcours.
J'émettrai donc un avis défavorable sur vos sous-amendements AS57 et AS56 et un avis favorable sur le sous-amendement AS55.
Madame la rapporteure, votre amendement n'étant pas contraignant, comment s'assurer qu'il s'appliquera bien ? Il y a de grandes inégalités d'accès aux soins d'un territoire à l'autre : comment garantir que, où qu'ils habitent, tous les couples auront accès à ce dispositif ?
Le sous-amendement AS56 est retiré.
La commission rejette le sous-amendement AS57 et adopte successivement le sous-amendement AS55 et l'amendement AS52 sous-amendé.
Article 1er : Possibilité pour les sages-femmes d'adresser des femmes ayant subi une fausse couche dans le cadre du dispositif MonParcoursPsy
Amendement AS48 de la rapporteure et sous-amendement AS53 de Mme Katiana Levavasseur.
La rédaction actuelle de l'article 1er n'est pas satisfaisante. Il n'y a pas de raison de restreindre aux seuls cas de fausse couche la possibilité, pour les sages-femmes, d'adresser des patientes à un psychologue dans le cadre du dispositif MonParcoursPsy. Les sages-femmes doivent pouvoir faire bénéficier leurs patientes de ce suivi psychologique dans toutes les situations qui leur paraissent nécessaires, pendant et après la grossesse.
Par ailleurs, une fausse couche pouvant être un événement très douloureux pour le ou la partenaire, il serait utile que la sage-femme puisse également adresser cette personne à un psychologue, si elle en ressent le besoin, sans qu'elle ait à consulter un médecin.
Nous proposons que lorsqu'une patiente n'a pas pu bénéficier de toutes les séances d'accompagnement psychologique auxquelles elle avait droit au terme de l'année civile, elle puisse en bénéficier l'année suivante.
Je comprends votre intention, mais une telle disposition serait coûteuse, dans la mesure où le dispositif MonParcoursPsy n'a pas été construit sur l'hypothèse budgétaire d'une consommation systématique des huit séances annuelles par l'ensemble des assurés sociaux. Si chacun accumule des droits à des séances de psychothérapie d'une année sur l'autre, cela peut devenir ingérable. Il faut prendre en compte la réalité budgétaire et se donner le temps d'évaluer le dispositif actuel, avant de chercher à l'élargir ou à le renforcer. Pour les patients qui auraient besoin de plus de huit séances par an, on peut imaginer une prise en charge des séances supplémentaires par les mutuelles, lesquelles proposent d'ores et déjà des forfaits pour des psychothérapies.
Avis défavorable.
La commission rejette le sous-amendement.
Puis elle adopte l'amendement et l'article 1er est ainsi rédigé.
En conséquence, les amendements AS34 de Mme Justine Gruet, AS19 et AS21 de Mme Katiana Levavasseur tombent.
Après l'article 1er
Amendement AS9 de Mme Marie-Charlotte Garin.
Nous proposons d'intégrer la question de la grossesse et des risques associés, notamment la fausse couche, aux cours d'éducation à la santé sexuelle et reproductive. Si l'on veut préparer les jeunes à l'éventualité des fausses couches, qui sont si fréquentes, il faut inclure cette question dans leur parcours de formation dès le plus jeune âge.
Si je reconnais qu'il importe de mieux informer les jeunes sur les fausses couches – leurs causes, leurs manifestations et leurs conséquences –, en revanche, je ne suis pas certaine qu'il faille traiter cette question dans le cadre des cours d'éducation à la sexualité dispensés dans les écoles, les collèges et les lycées. On pourrait concevoir d'enseigner aux enfants ce qu'est une fausse couche, mais il me semble que cela relèverait davantage du cours de sciences que du cours d'éducation à la sexualité.
Quant au vécu médical et psychologique des fausses couches, il me semble prématuré de l'aborder avec des enfants. C'est plutôt au moment du désir de grossesse que les couples pourraient, de manière profitable, en entendre parler.
Enfin, je ne crois pas que la loi ait vocation à traiter du contenu des programmes scolaires. Évitons de mettre le doigt dans cet engrenage et restons-en aux grands principes.
Avis défavorable.
L'amendement est retiré.
Amendement AS10 de Mme Marie-Charlotte Garin.
Dans le même esprit, nous proposons d'améliorer l'information du public en confiant à Santé publique France la mission de diffuser l'information la plus large possible sur les fausses couches. Il importe de sensibiliser la population à cette question, à la fois pour lever un tabou et pour mieux préparer les couples qui pourraient y être confrontés.
Ce serait effectivement une bonne idée que Santé publique France développe des supports d'information sur les fausses couches, à destination des professionnels et du public. Toutefois, je ne pense pas qu'il faille l'écrire dans la loi, dans la mesure où les compétences de Santé publique France sont énoncées d'une façon très générale à l'article L. 1413-1 du code de la santé publique : promotion de la santé et réduction des risques pour la santé, développement de la prévention et de l'éducation pour la santé... Avouez qu'il serait un peu étrange de préciser que Santé publique France a aussi une mission d'information sur les fausses couches.
La question de l'information sera nécessairement abordée dans le cadre du parcours fausse couche. Elle passera sans doute par des supports de Santé publique France, mais utilisera peut-être aussi d'autres vecteurs. Ne rigidifions pas trop les choses dans la loi : ce pourrait être contreproductif.
La commission rejette l'amendement.
Amendement AS11 de M. Arthur Delaporte.
Cet amendement prévoit une information de la femme enceinte par le professionnel de santé qui l'accompagne des risques liés à sa grossesse et des moyens de les prévenir, dès l'entretien prénatal précoce obligatoire. En informant très tôt la femme enceinte des risques liés à sa grossesse, on prévient mieux ces risques.
J'ai déjà dit combien cette information me paraît importante, mais votre amendement pose deux problèmes.
Le premier tient au timing. Vous proposez que le risque de fausse couche soit évoqué lors du premier examen prénatal. Or celui-ci a souvent lieu autour de la dixième semaine d'aménorrhée, lorsque le risque de fausse couche a déjà nettement diminué. Une information sur les fausses couches à ce stade déjà bien avancé de la grossesse pourrait avoir un effet contreproductif.
Votre amendement pose ensuite un problème de principe, dans la mesure où il est très directif envers le médecin. Si celui-ci estime, pour une raison ou une autre, qu'il n'est pas opportun ou utile d'évoquer le risque de fausse couche avec sa patiente, il sera tout de même contraint de le faire, sous peine de violer la loi. Cela me semble inadapté.
Avis défavorable.
L'amendement est retiré.
Amendement AS13 de M. Arthur Delaporte.
Nous proposons que la femme ayant subi une fausse couche soit informée de la possibilité d'être accompagnée psychologiquement.
Le parcours fausse couche a précisément vocation à développer l'information et l'orientation des couples confrontés à une fausse couche et à mettre en place, lorsque c'est nécessaire, un suivi médical ou psychologique. Votre amendement étant satisfait, je vous invite à le retirer.
L'amendement est retiré.
Amendements identiques AS7 de Mme Marie-Charlotte Garin et AS38 de M. Paul Vannier, amendements AS16 et AS 14 de M. Arthur Delaporte (discussion commune)
Parce qu'il s'agit d'un événement traumatisant, nous proposons par l'amendement AS7 l'instauration, pour les deux parents, d'un congé exceptionnel de trois jours après la survenue d'une fausse couche.
Les fausses couches concernent 200 000 femmes et couples par an et une femme sur dix traverse cette épreuve au cours de sa vie. Les interruptions spontanées de grossesse peuvent avoir des conséquences majeures et durables sur le plan physique, mais aussi sur le plan psychologique – syndrome de stress post-traumatique, anxiété, dépression –, auxquelles peut s'ajouter un sentiment de deuil pour les parents.
Il faut donc des mesures à la hauteur de la douleur vécue par les femmes et par les couples, et à la hauteur de l'attente sociale sur cette question. C'est le sens de cet amendement, qui vise à créer un congé spécial de trois jours après la survenue d'une interruption spontanée de grossesse, pour la femme concernée et son conjoint ou sa conjointe. Une telle mesure contribuerait à lever le tabou qui continue d'entourer la fausse couche. Elle irait dans le sens d'une plus grande égalité au sein du couple, en reconnaissant que la perte qui suit la fausse couche s'accompagne d'un deuil pour les deux parents.
L'amendement AS16 est un amendement de repli : il vise à créer un congé spécial de deux jours pour la femme victime d'une fausse couche et pour son conjoint ou sa conjointe.
L'amendement AS14, enfin, propose de n'accorder un congé de deux jours qu'à la femme ayant subi une fausse couche. Adopter l'un de ces amendements, ce serait envoyer un signe à toutes ces femmes, et à tous ces couples.
Une fausse couche est éprouvante, physiquement et psychologiquement, et certaines femmes ont effectivement besoin d'être arrêtées quelques jours, le temps de se remettre un peu. À l'heure actuelle, elles doivent demander un arrêt maladie, dont l'octroi est subordonné à l'appréciation du médecin.
Il arrive toutefois que le traumatisme se réveille plusieurs mois après la fausse couche. Par ailleurs, il est fréquent que les femmes n'aient pas envie de faire connaître leur fausse couche à leur employeur, car un congé pour fausse couche peut être très stigmatisant.
Étant donné l'importance de cette question, qui a une portée financière, je vous propose que nous interrogions le ministre le 8 mars, lors de l'examen du texte en séance publique. Pour l'heure, j'émettrai un avis défavorable.
Même si je comprends la préoccupation de nos collègues, je m'inquiète des effets de bord qui peuvent résulter de leur proposition. À l'heure actuelle, une femme victime de fausse couche peut bénéficier d'un arrêt de travail ; le médecin qui le lui délivre fixe librement sa durée, en fonction de la situation particulière de sa patiente. Cet arrêt de travail est opposable à l'employeur, sans justification supplémentaire. Créer un congé spécifique pour fausse couche impliquerait nécessairement la divulgation de la situation de la salariée victime de fausse couche à l'employeur.
Celui-ci apprendrait, du même coup, la volonté de la salariée de s'engager dans un projet prénatal. Or je n'apprendrai rien à nos collègues de la NUPES en leur disant que ce type de révélation peut entraîner des comportements douteux, pour ne pas dire illégaux, et être préjudiciable au salarié concerné. En outre, la création d'un congé dont la durée serait fixée par les partenaires sociaux pourrait ne pas convenir à toutes les femmes ; l'arrêt de travail délivré par un médecin offre davantage de souplesse. Nous sommes donc plus que réservés sur la méthode, même si nous sommes en accord avec l'objectif visé.
Le médecin pourrait transmettre lui-même une demande de congé de trois jours, en précisant qu'il ne doit pas y avoir de jour de carence : de cette façon, la salariée n'aura pas à divulguer ce dont elle ne veut pas parler. Par ailleurs, si une femme est victime de discrimination à la suite d'un congé pour fausse couche, il faudra qu'elle entame une procédure contre son entreprise.
Nous proposons que ce congé soit octroyé aux deux parents, parce que le conjoint ou la conjointe est tout aussi affecté par les conséquences de cette perte. Or il lui sera plus difficile d'obtenir un arrêt médical.
La solution est peut-être à chercher du côté de ce fameux jour de carence, mais vos amendements n'en disent rien. Je vous propose d'interroger le ministre lors de l'examen en séance publique.
J'insiste sur le fait qu'il serait souhaitable que cet amendement ait reçu en commission un avis favorable, ou au moins de sagesse.
Aujourd'hui, lorsqu'un médecin transmet un arrêt de travail ordinaire à la sécurité sociale, il peut en indiquer le motif. Cette information est destinée au médecin conseil et relève du secret médical. En revanche, s'il demande l'exemption des trois jours de carence, il doit en officialiser le motif auprès de l'administration. La proposition qui est faite me paraît donc sujette à caution.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement AS44 de Mme Élise Leboucher.
L'amendement prévoit que dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la disponibilité des professionnels de santé pour les femmes victimes d'une interruption spontanée de grossesse dans chaque département. Il évaluera notamment l'accessibilité des professionnels conventionnés au titre du dispositif MonParcoursPsy.
Les déserts médicaux, notamment gynécologiques, ne cessent de s'étendre : neuf femmes sur dix n'ont pas accès à un gynécologue conventionné secteur 1 ; 23 % d'entre elles vivent dans un désert médical gynécologique et 77 % des départements sont insuffisamment dotés en gynécologues médicaux, ce dont pâtissent la prévention et le dépistage. Les patientes, notamment les plus jeunes, sont les premières victimes de ce manque d'investissement, les risques pour la santé des patientes sont nombreux et, au fil des restrictions budgétaires gouvernementales, s'amplifient.
Il en est de même dans le domaine de la psychologie. Cette proposition de loi concerne les psychologues conventionnés de MonParcoursPsy mais, à ce titre, on ne compterait que 1 900 professionnels de santé conventionnés, ce qui est d'évidence insuffisant pour accompagner les 200 000 femmes qui, chaque année, sont victimes d'une fausse couche.
Or, leur prise en charge est un enjeu de santé publique qui appelle des solutions ambitieuses. Nous souhaitons donc savoir ce qu'il en sera de l'accès à ce dispositif pour nous assurer que nul ne sera oublié et que toutes les victimes pourront consulter un psychologue.
Avec, à ce jour, 2 100 psychologues agréés, le dispositif MonParcoursPsy est encore en cours de déploiement et il est donc encore un peu trop tôt pour se prononcer sur les professionnels conventionnés au regard des besoins.
De plus, le travail des psychologues est très peu axé sur le suivi psychologique des fausses couches, précisément parce que cet aspect est occulté dans la prise en charge de ces femmes et de leurs partenaires. Le but du parcours fausse couche permettra d'identifier des professionnels pour les mettre en réseau et développer leur formation.
Avis défavorable.
Je déplore que les psychologues ne s'engagent pas plus dans MonParcoursPsy, néanmoins, j'ai eu l'occasion de rappeler l'état des lieux lors de l'examen de la proposition de loi de Mme Rist portant amélioration de l'accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé : pour une séance d'une heure, un psychologue est en général rémunéré entre 50 et 55 euros, or, l'État propose en l'occurrence huit séances conventionnées à 30 euros. Le Gouvernement manque de considération à l'endroit de ces professionnels, ce que je déplore. Nous devons d'abord nous interroger sur la reconnaissance que nous leur devons afin de pouvoir répondre aux attentes de nos administrés.
Je répète que l'analyse du déploiement du dispositif est en cours, de même que les discussions avec les syndicats de psychologues. Certains points devront être bien entendu améliorés et nous en tiendrons compte lorsque nous disposerons de toutes les informations nécessaires.
La commission rejette l'amendement.
Amendement AS45 de Mme Martine Etienne.
Les femmes enceintes bénéficient d'une prise en charge à 100 % de l'ensemble des frais médicaux, en lien ou non avec la grossesse, au titre de l'assurance maternité : celle-ci couvre les frais intervenant entre le premier jour du sixième mois de grossesse jusqu'au douzième jour après la date de l'accouchement. Le tiers payant s'applique de plein droit.
En revanche, cette protection sociale contre les risques et conséquences de la maternité ne s'applique pas pour les frais engagés avant le sixième mois de grossesse. En outre, le code de la sécurité sociale omet la prise en charge des interruptions spontanées de grossesse alors qu'elles représentent l'un des principaux risques de la maternité.
Par cet amendement, nous proposons donc d'assurer à toute femme enceinte la garantie de bénéficier de cette protection sociale, quelle que soit l'avancée de la grossesse déclarée.
Je ne pense pas que le reste à charge, s'agissant des fausses couches, soit un vrai problème et, par ailleurs, la question que vous soulevez dépasse assez largement le cadre de cette proposition de loi.
En outre, ces restes à charge sont remboursés par les contrats complémentaires santé responsables qui couvrent la très grande majorité de la population, notamment grâce à la complémentaire santé solidaire.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Article 2 : Gage de recevabilité
Amendement de suppression AS54 du Gouvernement.
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'article 2 est supprimé.
Titre
Amendements AS50 de Mme Sandrine Josso, AS32 de Mme Justine Gruet et AS18 de Mme Katiana Levavasseur (discussion commune).
Mes travaux m'ont amenée à prendre en compte trois nouveaux enjeux.
Lorsque l'on évoque les conséquences psychologiques des fausses couches, il ne faut pas oublier les partenaires des femmes.
De plus, ces couples n'ont pas seulement besoin de l'accompagnement d'un psychologue. Certaines femmes, certains conjoints ont besoin d'un suivi psychologique pour se remettre d'une fausse couche mais, en général, ce n'est pas le cas. En revanche, le besoin existe d'un meilleur accompagnement de la fausse couche afin que les couples qui y sont confrontés reçoivent l'empathie et les explications dont ils ont besoin, soient orientés, et ne se sentent pas livrés à eux-mêmes. Tel est le sens du parcours fausse couche.
Enfin, l'expression « victimes de fausse couche » peut paraître mal adaptée au regard du caractère souvent naturel et physiologique de la fausse couche précoce. Je vous propose donc de lui préférer celle de « confrontés à une fausse couche », qui souligne le caractère parfois difficile de cet événement, sans préjuger de sa nature.
Je vous propose donc de prendre en compte ces trois enjeux à travers une formulation du titre de la proposition de loi, laquelle ne viserait plus « à renforcer l'accompagnement psychologique des femmes victimes de fausse couche » mais « à renforcer l'accompagnement des couples confrontés à une fausse couche ».
Je vous remercie d'avoir tenu compte de mon amendement, que je retire donc.
Le texte est tout à fait satisfaisant mais on ne pouvait pas en dire autant de son titre. J'ai d'emblée été frappée par l'oubli des futurs pères !
Je salue également la substitution des termes « confrontés à » à celui de « victimes ». Les personnes concernées seront satisfaites du consensus auquel nous sommes parvenus.
L'amendement est retiré.
Cette proposition de loi, bienvenue, doit faciliter l'accès des femmes à un accompagnement afin de les aider psychologiquement à surmonter ce qui peut constituer un drame.
Nombre d'entre elles estiment que le terme de « fausse couche » n'est pas approprié car il s'agit d'une réelle épreuve. D'ailleurs, lorsque cette interruption naturelle de grossesse survient tardivement, elle ressemble à un véritable accouchement, accompagné de contractions et de douleurs. Une telle formule est perçue comme péjorative : il n'y a rien de « faux » dans un tel événement.
Nous préférons donc lui substituer celle d'« interruption naturelle de grossesse », d'ailleurs plébiscitée par des associations. Une telle interruption, il faut y insister, est naturelle et courante.
Je comprends que le terme de fausse couche puisse heurter, dès lors que les femmes qui ont vécu une grossesse arrêtée peuvent estimer que rien n'était « faux » dans ce début de grossesse.
J'ai beaucoup réfléchi à cette question, avec d'autres, et nous avons conclu qu'il n'était pas souhaitable de supprimer ce terme du titre pour deux raisons.
Tout d'abord, la formule « fausse couche » est commune et immédiatement comprise. Or, il est important, en termes de communication, que tout le monde puisse saisir d'emblée l'objet de cette proposition de loi. Ensuite, la notion d'arrêt naturel de la grossesse correspond bien à la réalité médicale mais j'ai peur qu'elle entraîne des confusions avec les notions d'arrêt volontaire de grossesse ou d'arrêt médical de grossesse.
Avis défavorable.
Ce texte a été grandement amélioré grâce à une véritable écoute, je m'en réjouis.
Je me félicite, en particulier, de l'ouverture du dispositif aux couples. J'espère que cela augurera de politiques publiques à destination des femmes et des familles plus étendues encore, jusqu'à la parentalité égale sur tous les plans, y compris celui du congé parental.
Comme la rapporteure, je considère qu'il importe de maintenir cette formule. L'un des antonymes de « naturel » est « artificiel » : cela signifie-t-il que tout ce qui ne relève pas des fausses couches, en particulier l'interruption volontaire de grossesse, relèverait de l'interruption artificielle de grossesse ? Un tel glissement sémantique me paraît assez dangereux et il convient de s'y opposer.
La commission adopte l'amendement AS50.
En conséquence, l'amendement AS18 tombe.
La commission adopte l'ensemble de la proposition de loi modifiée.
La proposition de loi sera examinée en séance publique le 8 mars à vingt et une heures trente.
La séance est levée à seize heures quinze.
Présences en réunion
Présents. – M. Christophe Bentz, Mme Anne Bergantz, M. Victor Catteau, M. Paul Christophe, Mme Josiane Corneloup, Mme Laurence Cristol, M. Arthur Delaporte, M. Marc Ferracci, M. Thierry Frappé, Mme Marie-Charlotte Garin, M. Jean-Carles Grelier, Mme Justine Gruet, Mme Claire Guichard, Mme Servane Hugues, Mme Caroline Janvier, Mme Sandrine Josso, Mme Élise Leboucher, Mme Katiana Levavasseur, Mme Astrid Panosyan-Bouvet, Mme Maud Petit, Mme Sandrine Rousseau, Mme Annie Vidal, Mme Caroline Yadan
Excusés. – M. Thibault Bazin, Mme Fanta Berete, M. Elie Califer, Mme Caroline Fiat, Mme Fadila Khattabi, M. Jean-Philippe Nilor, M. Jean-Hugues Ratenon, Mme Stéphanie Rist, M. Olivier Serva, Mme Isabelle Valentin
Assistaient également à la réunion. – Mme Martine Etienne, M. Paul Vannier, Mme Anne-Cécile Violland