La séance est ouverte.
La séance est ouverte à neuf heures.
La parole est à M. Bertrand Sorre, pour exposer sa question, n° 590, relative aux activités cynégétiques.
Je souhaite interroger le Gouvernement au sujet du renouvellement ou du déplacement des installations de chasse telles que gabions, huttes et tonnes situées dans le domaine public maritime. Les estrans, ces espaces que la mer couvre et découvre au gré des marées, sont le théâtre d'une chasse au gibier d'eau caractéristique du patrimoine naturel et culturel du littoral. La baie du Mont-Saint-Michel, dans ma circonscription, est un espace unique en France, où ont lieu les plus grandes marées d'Europe. L'évolution morphologique des estrans, le réchauffement climatique et la montée des eaux impliquent de remplacer les installations de chasse lorsque l'érosion ou les tempêtes les rendent inutilisables, mais aussi de les déplacer afin que les nouvelles installations ne subissent pas le même sort.
Dans la baie du Mont-Saint-Michel, l'autorisation d'occupation temporaire (AOT) d'août 1997, en cours de renouvellement, recensait dix-neuf installations. Deux nécessitent une modification de leur emplacement, la mer et le vent ayant entraîné leur disparition physique. Les demandes en ce sens n'ont à ce jour reçu aucune réponse des services de l'État, alors que les équipements légers tels que les gabions occupent moins de 12 mètres carrés au sol, qu'il s'agit de structures flottantes, sans maçonnerie, démontables, d'une réversibilité totale et quasiment invisibles, ce qui leur permet de s'intégrer parfaitement à leur environnement.
À l'appui de la demande des chasseurs, je rappellerai en outre la mission que ces derniers remplissent par convention en matière d'entretien des espaces naturels, leur rôle majeur dans la connaissance et l'observation des écosystèmes, ainsi que l'importance des mares de gabion, où se développe toute une biodiversité, dans la nidification et l'alimentation des espèces migratrices.
C'est pourquoi nous souhaitons que les dispositions du décret n° 2000-755 du 1er août 2000 soient étendues aux activités cynégétiques, afin de permettre ces déplacements, déjà autorisés, entre autres, dans le domaine terrestre de la baie de Somme. Cette évolution réglerait de fait, dans les strictes limites des AOT, l'ensemble des problèmes liés au transfert de huttes existantes ou ayant existé. Le Gouvernement est-il prêt à modifier ce décret afin d'y introduire les activités cynégétiques ?
La parole est à M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé des transports.
La chasse au gibier d'eau, y compris de nuit, depuis des gabions, huttes ou tonnes situés sur le domaine public maritime, fait en effet partie intégrante de la culture cynégétique. Le décret que vous avez cité vise à encadrer cette pratique, notamment par le référencement des installations autorisées, mais il n'est pas besoin de le modifier pour prévoir le déplacement de postes dégradés dans le temps ou en raison de facteurs climatiques puisque l'article R. 424-16 du code de l'environnement précise que « la chasse de nuit au gibier d'eau ne peut s'exercer […] qu'à partir de huttes, tonnes, gabions, hutteaux ou autres postes fixes qui existaient au 1er janvier 2000 et qui ont fait l'objet d'une déclaration auprès du préfet du département de situation avant le 1er janvier 2001 », et l'article R. 424-19 que « tout déplacement d'un poste fixe de chasse de nuit au gibier d'eau […] est soumis à l'autorisation préalable du préfet ».
Le dossier accompagnant la demande doit inclure une évaluation des incidences induites par l'installation du nouveau poste fixe sur la flore et la faune sauvages, ainsi qu'une analyse des potentialités de prélèvement. L'autorisation préalable est également l'occasion d'un dialogue avec l'État, au niveau local, afin d'analyser le projet au titre d'autres réglementations, par exemple celles concernant les zones humides.
Enfin, toujours suivant l'article R. 424-19, « l'installation du nouveau poste fixe est subordonnée à la démolition ou à la désaffectation préalable du poste fixe auquel il se substitue ». Les préfets de département disposent donc déjà d'un cadre réglementaire dans lequel inscrire leur appréciation de l'opportunité de tels déplacements.
Je remercie M. le ministre de sa réponse. Effectivement, un cadre réglementaire existe ; reste que dans l'espace unique, je le répète, que constitue la baie du Mont-Saint-Michel, nous nous heurtons à une réponse de l'État qui n'est pas favorable, bien qu'il ne s'y trouve que dix-neuf gabions, répartis sur plus de 4 000 hectares – à titre de comparaison, la baie de Somme, dont la surface est à peu près identique, compte 286 gabions. J'attends donc des services de l'État un regard bienveillant sur une activité de chasse maritime favorable à la biodiversité.
Je n'hésiterai pas à interpeller le préfet et à revenir vers vous.
La parole est à Mme Stella Dupont, pour exposer sa question, n° 594, relative à la transformation des lotissements-jardins.
J'appelle votre attention, monsieur le ministre délégué chargé des transports, sur les difficultés rencontrées par des citoyens du Maine-et-Loire, d'Angers et de Rochefort-sur-Loire notamment, qui veulent transformer en terrains constructibles des lotissements-jardins, dont le cahier des charges interdit toute construction. Un projet d'immeuble comprenant trente appartements est ainsi à l'arrêt. Certes, il importe de préserver un équilibre, mais cette contrainte va à l'encontre de l'ambition collective d'atteindre l'objectif zéro artificialisation nette (ZAN) d'ici à 2050, conformément aux objectifs de la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets. Jusqu'en 2007, il était possible, par le biais de l'article R. 315-52 du code de l'urbanisme, de transformer les lotissements-jardins en lotissements à usage d'habitation s'ils se trouvaient dans une zone affectée à l'habitation par un plan local d'urbanisme (PLU) ou un document d'urbanisme en tenant lieu : l'article a été supprimé lors de la réforme des autorisations d'urbanisme et cette disposition n'a pas été reprise.
Par ailleurs, la réponse ministérielle à une question écrite datant de 2009 précise qu'il est possible pour les colotis de rendre leurs terrains constructibles si, par une délibération prise à l'unanimité, ils modifient les documents approuvés du lotissement et s'ils décident de solliciter un permis d'aménager. J'aimerais donc que vous m'apportiez des précisions concernant l'interprétation et l'application de la législation, et que nous examinions la possibilité, puisque nous parlons beaucoup de simplification en ce moment, d'un assouplissement – dans le respect, encore une fois, d'un juste équilibre – des restrictions pesant sur les lotissements-jardins.
La parole est à M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé des transports.
Comme vous l'avez évoqué, madame la députée, les lotissements-jardins avaient à l'origine une vocation agricole et culturale, bien qu'ils puissent se trouver dans des zones affectées à l'habitat. L'ordonnance du 8 décembre 2005 relative au permis de construire et aux autorisations d'urbanisme, ainsi que son décret d'application, ont refondu et clarifié les dispositions applicables à ces lotissements : je vous confirme donc que ces derniers n'entrent pas dans le cadre de la procédure de lotissement, qui ne concerne que les divisions foncières en vue d'implanter des bâtiments.
Lorsque les lotissements-jardins sont classés par le PLU, ou autre document en tenant lieu, en zone urbanisée ou à urbaniser, les colotis peuvent rendre leurs terrains constructibles dans les conditions que vous avez mentionnées – la délibération devant être prise à l'unanimité dans la mesure où les documents du lotissement, notamment le cahier des charges, peuvent contenir des clauses de nature contractuelle.
Par ailleurs, concernant les procédures de lotissement du code de l'urbanisme, dans le prolongement des annonces formulées par le Premier ministre en matière de logement, le Gouvernement envisage à moyen terme de faciliter la remobilisation de lotissements, notamment par des divisions foncières et des actions de densification. À cette occasion, l'évolution des règles d'urbanisme concernant les lotissements-jardins pourra faire l'objet d'une réflexion approfondie.
Merci, monsieur le ministre : nous aurons donc l'occasion de revenir sur ce dossier important, car, je le répète, il convient de trouver un équilibre entre la préservation des espaces verts que constituent ces jardins historiques et la densification des centres urbains partout en France.
La parole est à M. Stéphane Mazars, pour exposer sa question, n° 595, relative à la liaison ferroviaire Paris-Rodez.
Monsieur le ministre, cela fait trop longtemps que les élus et les forces vives de l'Aveyron tirent la sonnette d'alarme afin de réclamer une liaison ferroviaire entre Rodez et Paris qui soit digne de ce nom. En 2019, notamment lors de l'examen de la loi du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités (LOM), et en 2020, mes collègues parlementaires et moi-même alertions d'une même voix vos prédécesseurs concernant l'état de cette desserte, déconnectée des attentes des usagers comme des besoins du département en matière d'aménagement et d'attractivité économique. Nous proposions des solutions concrètes et un contrat de progrès auquel serait associée la région Occitanie.
Cinq ans plus tard, rien n'a changé. Pis, pour les passagers des trains Rodez-Paris et Paris-Rodez, de nuit ou de jour, la qualité du service n'a cessé de se dégrader. Des témoignages d'exaspération me parviennent quotidiennement de la part d'étudiants, de jeunes actifs, de familles et de chefs d'entreprise. L'intégralité de la population aveyronnaise est affectée, avec le sentiment croissant d'une prise d'otages ou d'un abandon. En 2024, Rodez reste le chef-lieu français le plus éloigné de Paris pour ceux qui font le choix économique ou écologique – souvent les deux – du moyen de transport collectif décarboné le moins coûteux.
Ce gouvernement a érigé en priorité l'ouverture de lignes de train de nuit, ce dont on ne peut que se féliciter ; mais la réouverture de la ligne de nuit Paris-Aurillac ne peut s'opérer au détriment du territoire aveyronnais et, comme nombre de nos concitoyens, je me demande si l'opérateur SNCF entend réellement maintenir le train de nuit entre Rodez et Paris. Le quotidien des usagers, ce sont des annulations, parfois dix minutes seulement avant le départ, sans solution alternative, des retards récurrents, des horaires inadaptés au monde professionnel, des trajets rallongés – onze heures en moyenne – et des conditions de voyage considérablement dégradées, avec un wagon de moins – quand les trois qui restent ne se changent pas en bus, comme ce fut le cas presque tous les jours durant ce mois de février.
À l'heure où la décarbonation des transports et le développement du rail ne sont plus des options, mais des impératifs, comment admettre qu'en 1956 le train de nuit, quittant Paris plus tard qu'aujourd'hui, à vingt et une heures trente, et respectant les mêmes arrêts, arrivait plus tôt ? Comment accepter que depuis juillet 2023, près d'un train sur six ait été annulé ?
Monsieur le ministre, ces dysfonctionnements chroniques, unanimement constatés, n'ont que trop duré : il faut agir, et vite ! Quelle réponse pouvez-vous apporter au témoignage édifiant d'une entreprise aveyronnaise, au savoir-faire reconnu, qui envisage désormais de mettre un terme à son engagement dans la reconstruction de la cathédrale Notre-Dame de Paris, désabusée par l'expérience calamiteuse du train de nuit Rodez-Paris, dont les innombrables annulations empêchent l'acheminement régulier et prévisible de son personnel ? Comment entendez-vous garantir aux citoyens-usagers leur droit d'accès à un service public ferroviaire de qualité, fiable, capable de répondre comme il se doit aux besoins de désenclavement du département de l'Aveyron ?
La parole est à M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé des transports.
Les trains de nuit qui circulent entre Rodez et Paris subissent, il est vrai, de nombreuses gênes. Les annulations survenues à la fin de l'année 2023 sont essentiellement dues à des difficultés de maintenance des locomotives diesel qui tractent les voitures entre Brive-la-Gaillarde et Rodez. En effet, ces derniers mois, les enrayements dus à la chute de feuilles, ainsi que les nombreux incidents sur les voies, ont généré une surcharge dans les centres de maintenance habituels. De plus, le parc de matériels roulants thermiques, adaptés aux trains de voyageurs, est limité en quantité, ce qui laisse de faibles marges de manœuvre pour l'exploitation des lignes.
L'État, en tant qu'autorité organisatrice des trains de nuit, a financé la location d'une locomotive supplémentaire à Brive-la-Gaillarde, qui renforcera le parc de locomotives utilisées pour les dessertes de Rodez, Albi et Aurillac. Les recherches de locomotives supplémentaires se poursuivent parallèlement.
Des travaux de nuit, indispensables pour régénérer et moderniser la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse, sont en cours et se poursuivront tout au long de l'année 2024, notamment aux alentours de Limoges. Ces travaux entraînent parfois des adaptations d'horaires, voire des annulations. L'État et la SNCF mettent tout en œuvre pour en minimiser les impacts : ainsi, la desserte de Rodez devrait retrouver une fréquence quotidienne pour les vacances de Pâques, au minimum.
Au-delà de ces réponses circonstanciées, permettez-moi d'ajouter que je suis particulièrement sensible à votre question, puisque, en tant qu'élu de Dunkerque, j'ai vu le temps de parcours entre Paris et cette ville augmenter de 50 % au cours des vingt dernières années, passant en moyenne d'une heure trente-deux à deux heures vingt-deux. La liaison entre Paris et les villes moyennes – et pas uniquement les métropoles – est en effet un sujet important. Nous subissons, à l'heure actuelle, les conséquences du surinvestissement au bénéfice des lignes à grande vitesse entre métropoles, au détriment de la régénération du réseau de desserte des villes moyennes. Je vous propose donc que nous nous rencontrions prochainement afin d'envisager des solutions et des perspectives à court terme, sachant qu'il s'agit ici d'enjeux de long terme, voire de très long terme.
Je vous remercie de votre invitation à réfléchir ensemble à ce sujet important. Le Gouvernement a pris l'engagement de changer la vie des gens : si nous nous emparons de celui-ci, nos concitoyens auront le sentiment que les choses changent.
La parole est à Mme Marianne Maximi, pour exposer sa question, n° 581, relative à la mine de lithium d'Échassières.
Les réflexions essentielles en matière de transition énergétique doivent être engagées par l'État car, à l'heure du changement climatique, elles sont trop cruciales pour être laissées aux mains des intérêts privés. Malheureusement, le projet de mine de lithium d'Échassières, dans l'Allier, est aujourd'hui guidé par des intérêts privés. Ce projet, sur le modèle des mines existantes en Australie, au Chili et en Bolivie, vise à extraire un maximum de roches sans s'interroger sur les besoins ni s'enquérir des règles environnementales et sanitaires les plus strictes.
Ainsi, la multinationale Imerys compte extraire, dès 2028, 34 000 tonnes de lithium dans une zone Natura 2000. Des interrogations demeurent quant à la consommation en eau liée à cette extraction alors que l'Auvergne est confrontée à une pression de plus en plus forte concernant cette ressource. En outre, selon un rapport publié par le site d'investigation Disclose en novembre 2023, le secteur d'exploitation serait fortement contaminé à l'arsenic et au plomb. Malheureusement, cette information n'a pu être ni confirmée ni infirmée par les études d'impact puisque la préfecture de l'Allier en a dispensé l'entreprise à plusieurs reprises.
Ce projet aboutirait à l'un des plus grands gisements de lithium en Europe. Comment le Gouvernement entend-t-il prendre en considération l'avis des populations locales et obliger Imerys à présenter ses mesures en faveur d'un strict respect des normes environnementales et sanitaires ?
La parole est à M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé des transports.
La transition écologique et le développement des nouvelles technologies engendrent un besoin croissant en ressources minérales comme le lithium, utilisé pour les batteries, ce qui peut créer de nouvelles dépendances. L'approvisionnement, la transformation et le recyclage des matières premières critiques en Europe, ainsi que la sécurisation des chaînes d'approvisionnement, sont des conditions nécessaires pour réussir la transition énergétique. L'exploitation de nouveaux gisements de lithium contribue à répondre à ces enjeux. Le projet d'extraction de lithium à Échassières, le plus important situé en France, doit permettre de réduire la dépendance française et européenne pour l'approvisionnement en lithium à l'horizon 2030.
Sur le site d'Échassières, la société Imerys exploite actuellement une carrière de kaolin où la présence de lithium a été mise en évidence. Des travaux de recherche par sondage ont permis de confirmer la richesse du gisement. De premiers travaux exploratoires ont été réalisés, après les procédures administratives requises, pour développer ce projet minier. Imerys devra ensuite obtenir un titre minier et des autorisations environnementales visant à garantir une exploitation respectueuse de l'environnement et à préserver les intérêts nationaux en matière de gestion des ressources du sous-sol.
La participation du public tient une place primordiale dans ces processus. La Commission nationale du débat public (CNDP) a ainsi décidé d'organiser un débat public sur ce projet, qui se tiendra du lundi 11 mars au dimanche 7 juillet 2024. Il permettra d'informer largement toutes les personnes concernées, de débattre de l'opportunité du projet et de ses alternatives, et de recueillir la parole et les recommandations de l'ensemble de la population. Les personnes intéressées pourront une nouvelle fois exprimer leur avis sur le projet, avec de nouveaux éléments d'appréciation, lors des procédures d'octroi de la concession et de délivrance des autorisations environnementales.
Soyez assurée de l'attention portée par les services du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires à la qualité environnementale du projet. Son impact sera examiné en profondeur, dans toutes ses dimensions, dans le cadre des autorisations environnementales et sur la base d'études approfondies. Les sujets que vous mentionnez, liés à la ressource en eau, à la biodiversité, à la proximité d'une zone Natura 2000 et à l'état des sols, y compris résultant d'activités minières passées, font naturellement partie des enjeux considérés.
Je vous remercie de cette réponse. Toutefois, le besoin en lithium ne peut se fonder uniquement sur le développement de la voiture électrique, qui ne représente pas forcément l'avenir dans tous les territoires. La priorité du Gouvernement devrait être de développer des transports en commun, dont le train – il en est d'ailleurs beaucoup question ce matin. Si nous laissons les intérêts privés gérer cette chaîne de production du début à la fin, rien ne se fera pas dans l'intérêt des populations. On dit souvent que gouverner, c'est prévoir : force est de constater que la transition énergétique et écologique n'a pas été anticipée. C'est pourquoi nous vous demandons de reprendre la main sur ce projet et de ne pas le laisser aux seuls intérêts privés.
Certes, vous avez évoqué l'organisation d'un grand débat public, mais il ne sera pas suffisant. L'État doit reprendre l'initiative dans le secteur de l'énergie, créer une filière de recyclage efficiente et prévoir une gouvernance citoyenne et démocratique, associant non seulement les salariés et leurs organisations syndicales, mais aussi les élus locaux, les riverains et les associations de défense de l'environnement. Pour l'heure, nos inquiétudes demeurent vis-à-vis de ce projet dominé par des intérêts privés et non par ceux de la nécessaire transition énergétique.
Monsieur le ministre, il vous reste quelques secondes si vous souhaitez réagir.
J'entends vos inquiétudes, auxquelles la concertation prochaine devrait, je l'espère, permettre de répondre. S'agissant du premier point que vous avez évoqué, en tant que ministre, mais aussi qu'élu local et président d'une communauté urbaine, j'ai la chance de présider une agglomération qui a battu le record du monde de la hausse de la fréquentation du transport collectif : + 125 % en cinq ans, grâce à la gratuité des transports publics ! Vous avez donc devant vous quelqu'un qui est très engagé en faveur des transports publics ; pourtant, j'affirme que nous aurons besoin aussi de la voiture électrique. Il faut certes développer les transports en commun, car la voiture électrique, je suis d'accord sur ce point avec vous, ne peut constituer la seule réponse, mais nous aurons besoin des deux.
La parole est à M. Aurélien Lopez-Liguori, pour exposer sa question, n° 599, relative à la flotte chalutière méditerranéenne.
Ma question s'adresse à M. Hervé Berville, secrétaire d'État chargé de la mer et de la biodiversité, que j'interpelle en tant que représentant de deux grands ports de pêche – Sète et Agde –, mais aussi que petit-fils et arrière-petit-fils de pêcheurs, et au nom du monde de la pêche méditerranéenne, qui se meurt et qui a besoin d'aide.
Nos criées sont sur le point de fermer, en particulier celle de Sète ; avec elles, c'est toute une économie, une culture, des centaines de familles, des poissonniers, des mareyeurs et des restaurateurs qui sont en péril. À Sète, il y a vingt ans, on dénombrait cinquante chalutiers dans le port ; il n'en reste désormais plus que huit, alors qu'ils sont encore des centaines en Italie et en Espagne. Pourquoi ? Parce que vous appliquez avec un zèle excessif les règles européennes – vous êtes d'ailleurs les seuls à le faire en Méditerranée.
Vous soutenez le plan West Med – plan de gestion pluriannuel pour les pêcheries démersales en Méditerranée occidentale –, qui continue de réduire notre effort de pêche malgré le travail immense des pêcheurs français. Vous soutenez le plan de sortie de flotte, qui a envoyé à la casse, en 2023, le quart des chalutiers d'Occitanie. Vous soutenez les règles européennes absurdes qui nous empêchent de subventionner la modernisation des chalutiers méditerranéens, modernisation pourtant nécessaire pour les rendre moins consommateurs en gazole, plus respectueux de l'écologie, plus rapides et plus sûrs. Comment les pêcheurs français pourraient-ils s'en sortir si vous ne leur donnez même pas les moyens de respecter les normes écologiques que vous leur imposez ?
Je suis ici pour faire entendre le cri de désespérance des pêcheurs de Méditerranée, qui ne demandent qu'une chose : vivre de leur métier et en vivre dignement. La situation est urgente et vous leur devez des réponses. Vous avez eu le mouvement des gilets jaunes sur les routes et celui des agriculteurs en colère aux portes de Paris ; si vous persistez dans votre surdité, vous serez confrontés demain aux cirés jaunes dans tous les ports de Méditerranée. Pour notre souveraineté alimentaire, pour sauvegarder des emplois, pour sauver nos pêcheurs, vous devez dire non à Bruxelles ; à défaut, il en sera fini de la pêche en Méditerranée.
Quand entendrez-vous la détresse des pêcheurs et subventionnerez-vous enfin la modernisation et la décarbonation de la pêche méditerranéenne ?
La parole est à M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé des transports.
Je vous réponds au nom de mon collègue Hervé Berville, mais je suis élu local d'un territoire de pêche : je connais donc bien la situation des pêcheurs.
La modernisation de la flotte de pêche est au cœur des priorités du fonds européen pour les affaires maritimes, la pêche et l'aquaculture (FEAMPA), l'outil de financement qui accompagne le déploiement de la politique commune de la pêche. Le budget alloué à la France est de 567 millions d'euros sur la période 2021-2027 et sa déclinaison opérationnelle est partagée entre l'État et les régions. Ces dernières sont notamment chargées du soutien à l'investissement pour la modernisation des entreprises de pêche et responsables, en particulier, de la réduction de la consommation énergétique et de l'efficacité énergétique, un enjeu majeur, qui se traduit par le financement du remplacement des moteurs des navires. La région est libre de déterminer l'enveloppe qu'elle consacre à chaque mesure selon ses priorités, ainsi que de fixer les critères de sélection des projets les plus adaptés aux besoins de ses territoires.
Cependant, le Gouvernement partage avec la représentation professionnelle des pêches le constat que les règles de la politique commune de la pêche et du FEAMPA demeurent trop contraignantes pour optimiser la consommation de ces enveloppes et apporter le soutien nécessaire au renouvellement de la flotte de pêche. C'est notamment le cas des règles de jauge, qui ne permettent pas de prendre en compte les volumes nécessaires à l'installation de nouvelles motorisations plus économes en énergie.
C'est pourquoi la France a été à l'initiative d'une démarche coordonnée avec d'autres États membres de l'Union européenne, visant à demander à la Commission européenne de faire évoluer certaines règles européennes pour les améliorer. Ces propositions ont été reprises dans les conclusions de la présidence suédoise du Conseil de l'Union européenne en juillet 2023 et serviront de base de discussion avec la prochaine Commission.
De toute évidence, vous n'avez pas compris la situation dramatique de la pêche en Méditerranée : elle est différente des autres puisque la Commission européenne considère que cette zone est en déficit écologique et empêche, de ce fait, les régions de subventionner la nécessaire modernisation de la flotte.
Les mesures que vous décrivez ne permettront pas de changer la donne sur le plan structurel. Pour réaliser des économies de carburant, il serait nécessaire de changer les moteurs des chalutiers, qui ont au moins quarante ans : pour chaque navire, le financement d'un nouveau moteur représenterait un coût de plusieurs centaines de milliers d'euros, que les pêcheurs ne peuvent assumer sans l'aide de l'État.
Les pêcheurs de Méditerranée attendent que le Gouvernement prenne ses responsabilités et porte leurs voix devant la Commission européenne. Ils attendent son soutien et sa mobilisation. Le Gouvernement doit répondre de ses actions devant eux.
La parole est à Mme Emmanuelle Anthoine, pour exposer sa question, n° 586, relative aux nuisances sonores à Romans-sur-Isère.
Je souhaite appeler votre attention sur la situation inacceptable à laquelle le voisinage de la voie de retournement 13, à Romans-sur-Isère, est confronté. Les riverains des rues Parmentier et Pouchelon subissent quotidiennement les nuisances olfactives et sonores dues au stationnement des trains à moteur diesel de la ligne Romans-Gap-Briançon en pleine zone résidentielle, sous leurs fenêtres. Les moteurs diesel des motrices tournent parfois deux heures alors que le train est à l'arrêt. Du fait de nuisances sonores et olfactives récurrentes, prolongées et quotidiennes, les riverains ne peuvent plus ouvrir leurs fenêtres. La pollution atmosphérique générée par les émissions des moteurs diesel est en outre déplorable au regard de l'ambition de la transition écologique, à laquelle, vous en conviendrez, la SNCF doit prendre toute sa part.
Cette situation scandaleuse, qui entache profondément l'image de notre service public ferroviaire, est invivable pour les riverains, qui subissent une détérioration de leur qualité de vie et de leur santé. La SNCF avait annoncé en 2011 que cette situation serait temporaire, jusqu'à l'électrification de la ligne. Promise pour 2014, celle-ci n'a jamais été réalisée en dépit de son intérêt environnemental et de son efficacité. D'autres solutions ont été évoquées, comme le dédoublement total de la ligne sur 6 kilomètres et la création d'une troisième voie de retournement en zone industrielle, mais aucune suite n'y a été donnée.
Depuis plusieurs années, j'interpelle régulièrement les ministres chargés des transports, le directeur territorial SNCF Réseau de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur (Paca), la région Auvergne-Rhône-Alpes et l'agence régionale de santé (ARS). En dépit de mes courriers et de mes sollicitations répétées, je n'ai obtenu aucune réponse à ce jour.
La SNCF avait également promis aux riverains l'organisation d'un rendez-vous avant la fin de l'année 2021. Ils l'attendent toujours. À la suite de carences multiples et après tant d'années, aucune réponse satisfaisante n'a été apportée à un problème qui peut pourtant être aisément résolu. Monsieur le ministre délégué chargé des transports, quand l'État se décidera-t-il à offrir une solution sérieuse à ce problème afin de soulager enfin le quotidien des riverains ?
La parole est à M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé des transports.
Je suis très sensible aux gênes que vous évoquez et au confort des riverains de manière générale, notamment de ceux qui vivent à proximité d'installations ferroviaires, mais c'est la région Auvergne-Rhône-Alpes qui est l'autorité organisatrice compétente pour l'organisation des services de trains express régionaux (TER) sur son territoire. À ce titre, elle fixe, avec la SNCF, les conditions d'exploitation des TER.
À Romans-sur-Isère, SNCF Voyageurs a cherché des solutions pour atténuer les conséquences de la proximité des infrastructures ferroviaires et des habitations. Dans un premier temps, une démarche de sensibilisation des conducteurs a été menée, afin qu'ils éteignent les moteurs quand ils sont stationnés – une première solution qui semble logique. Cependant, lorsque le moteur est coupé, le chauffage et la climatisation ne fonctionnent plus et un délai minimum de vingt minutes est nécessaire pour la remise en service. Cela n'a donc pas fonctionné.
Dans un second temps, la SNCF a agi sur le temps de stationnement des trains. Au cours de l'année 2021, SNCF Réseau et SNCF Voyageurs ont lancé une étude d'exploitation avec la société Systra, qui a permis de définir des solutions complémentaires, telles que le stationnement prolongé à quai en gare, quand la circulation des trains le permet, ou le demi-tour et le retour au dépôt pour stationnement. Une présentation à l'association Transition écologique romanaise (TER26) a eu lieu en décembre 2021 sous l'égide de SNCF Réseau – vous le savez sans doute.
La SNCF poursuit sa politique d'innovation et de décarbonation en développant des solutions alternatives aux trains thermiques, notamment les trains à batteries et les trains hybrides, qui devraient constituer la solution définitive. Je vous encourage à contacter la SNCF pour faire le point, mais surtout la région, qui a une responsabilité importante sur ce dossier, afin d'examiner les pistes d'amélioration possibles et les perspectives en matière de modernisation des modes de transport.
Je vous ai entendu, monsieur le ministre. Vous dites que vous êtes sensible à cette situation, mais vous m'envoyez encore sur une voie de garage – si vous me permettez ce jeu de mots. Au cours des dernières années, j'ai sollicité la SNCF à de nombreuses reprises et l'association TER26 est intervenue très souvent : nous n'avons jamais obtenu de réponse.
Nous devons avancer sur ce dossier dans l'intérêt des riverains ! Ils sont démunis et en colère. Dans une société comme la nôtre de moins en moins tolérante et toujours plus violente, j'ai peur que la situation dégénère. J'ai constaté par moi-même les nuisances subies par les riverains : la situation est intolérable. Il est inacceptable que la SNCF la laisse perdurer.
Monsieur le ministre, je compte sur vous pour passer de la parole aux actes et pour que nous puissions enfin sortir de cette situation inextricable.
La parole est à M. Pierre Cordier, pour exposer sa question, n° 588, relative à la « forêt primaire » dans les Ardennes.
Depuis le printemps 2022, une association développe un projet visant à sanctuariser 70 000 hectares de forêt dans les Ardennes françaises et belges principalement. Ce projet de « forêt primaire » transfrontalière, qui toucherait le parc naturel régional (PNR) des Ardennes, empêcherait toute activité humaine pour des centaines d'années. Les Ardennais, et pas seulement, seraient privés de l'accès à la forêt pour des activités sportives et touristiques – randonnée, cueillette, chasse, pêche, vélo tout terrain (VTT) –, ainsi que pour l'affouage et l'exploitation forestière. Le réchauffement climatique nécessite des innovations ambitieuses – j'en suis tout à fait conscient –, mais ce projet de « forêt primaire » irait à l'encontre du développement économique et touristique du Nord-Ardennes, qui rencontre déjà tant de difficultés.
Le 11 septembre 2023, j'ai écrit à Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, pour lui faire part de l'opposition quasi unanime à ce projet des élus du Nord-Ardennes et de nombreuses associations. Le 8 décembre 2023, il m'a répondu que ce projet « ne pourrait évidemment se faire qu'en tenant compte des choix exprimés et portés par le territoire et en aucun cas dans un contexte d'opposition locale ».
Ces derniers mois, 92 % des communes de ma circonscription membres du PNR ont voté contre le projet de « forêt primaire », tout comme les intercommunalités, le conseil départemental des Ardennes et les membres du schéma de cohérence territoriale (Scot) Nord-Ardennes. Par ailleurs, une pétition citoyenne, dont je suis à l'initiative, a reçu le soutien de plus de 10 000 Ardennais, qui l'ont renvoyée signée à ma permanence.
L'opposition des Ardennais contre ce projet délirant est très claire. Monsieur le ministre, quand acterez-vous la fin de ce projet qui inquiète inutilement les citoyens, les élus et les associations ?
La parole est à M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé des transports.
Permettez-moi, tout d'abord, de dire à Mme Anthoine que je suivrai avec attention, en lien avec la région, le dossier des nuisances sonores à Romans-Sur-Isère.
Monsieur le député Cordier, les forêts françaises souffrent des effets du changement climatique. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement promeut une politique volontaire de renouvellement, pour la résilience des forêts, visant leur adaptation à une France à + 4 degrés Celsius d'ici à 2100. Les territoires forestiers doivent appliquer une gestion sylvicole adaptative active pour faire face au dépérissement des forêts et à leur vulnérabilité à l'aléa sécheresse. L'exploitation durable du bois dans les forêts ardennaises est indispensable aux trajectoires de transition bas-carbone et représente un potentiel d'avenir pour le développement de la bioéconomie de ce territoire.
Cependant, les solutions d'avenir pour nos forêts doivent être adaptées aux contextes locaux et assurer le maintien, dans le cadre d'une forêt diversifiée et de sylvicultures respectueuses de la biodiversité, des services liés aux fonctions économique, environnementale et sociétale de la forêt. Ces solutions sont à bâtir localement dans une démarche d'écoute et de dialogue entre les différents intérêts, et en aucun cas dans un contexte d'opposition locale.
La sanctuarisation d'un territoire forestier de plusieurs dizaines de milliers d'hectares, régulièrement exploité et fréquenté par les promeneurs, les chasseurs et les forestiers, ne constitue pas une perspective raisonnable. Si la stratégie nationale pour les aires protégées prévoit de couvrir 30 % du territoire en aires protégées, dont un tiers sous protection forte, sa territorialisation est primordiale. Les parcs naturels régionaux constituent ainsi des outils particulièrement adaptés pour trouver les équilibres entre développement local et conservation du patrimoine naturel.
Pour la France, je rappelle, par ailleurs, que la protection forte ne vise pas l'exclusion a priori des activités rurales traditionnelles, qu'elles soient agricoles ou forestières, mais la réduction des éventuelles pressions identifiées au regard des enjeux de conservation de la zone. Soyez donc assuré de la détermination du Gouvernement à accompagner le département des Ardennes dans l'adaptation de ses territoires forestiers et la valorisation de ses ressources naturelles au service du développement local.
Je vous remercie pour cette réponse de haut fonctionnaire, monsieur le ministre, mais pourrais-je avoir une réponse claire à ma question ? Le Gouvernement soutiendra-t-il le projet de « forêt primaire » engagé par l'association Francis Hallé, qui vise à sanctuariser la forêt pour des centaines d'années ?
Les Ardennais vous regardent et attendent la réponse du Gouvernement. Dans notre territoire, nous avons besoin de cette forêt pour nous développer. Le parc naturel régional et l'Office national des forêts (ONF) procèdent à de nombreuses vérifications. Les Ardennais sont très attachés à cette forêt – mais, bien sûr, ils ne veulent pas y faire n'importe quoi. Il vous reste quarante-cinq secondes pour nous donner une réponse claire, monsieur le ministre.
Je vous ai répondu !
La parole est à M. Jean-François Portarrieu, pour exposer sa question, n° 579, relative au Groupe Airbus.
Ma question porte sur les conséquences du niveau exceptionnel de commandes enregistrées par Airbus en 2023. L'an dernier, l'avionneur a non seulement livré 735 avions commerciaux – un record –, mais il a enregistré une commande exceptionnelle d'environ 2 100 appareils, essentiellement de la gamme A320 et A321, dont beaucoup sont assemblés à Toulouse. Le carnet de commandes s'élève désormais à 8 600 appareils et illustre l'accélération du renouvellement des flottes. Les avions de dernière génération sont plus économes en carburant, donc plus sobres et plus durables. Ce record de commandes nécessite une montée en cadence de la production pour respecter le calendrier de livraison.
À Toulouse, il s'agit d'un enjeu majeur pour toute la filière : après avoir surmonté une crise des approvisionnements, de nombreuses entreprises rencontrent de réelles difficultés de recrutement, à commencer par Airbus, qui a accueilli l'an dernier 13 000 nouveaux salariés, dont 3 500 en France – le niveau de recrutement devrait être sensiblement le même cette année. Nous devons rendre attractifs les métiers de l'aéronautique en renforçant les formations traditionnelles et en investissant dans les nouvelles disciplines liées aux enjeux énergétiques et écologiques.
De plus, les entreprises toulousaines du secteur sont confrontées à un nouveau problème : le manque de foncier disponible pour se développer. À ce stade, dans le cadre de l'objectif zéro artificialisation nette (ZAN), les projets de développement de la filière aéronautique ne figurent pas parmi la liste des projets d'intérêt national, à rebours de certains sites d'implantation de l'industrie pharmaceutique ou encore du secteur automobile.
Pourtant, le secteur aéronautique est stratégique : il contribue pleinement au réarmement de notre économie industrielle. Premier contributeur à la balance commerciale française, dont le solde était déficitaire de 30 milliards d'euros en 2023, il constitue une filière d'excellence pour l'économie toulousaine, française et européenne.
Dans le cadre de l'application de la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite climat et résilience, les projets fonciers de la filière aéronautique pourraient-ils être intégrés dans les projets d'intérêt national ? Je relaie ici un vœu formé très largement par les élus de Toulouse métropole
La parole est à M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé des transports.
Nous nous réjouissons de disposer en France d'une entreprise comme Airbus, dont le développement repart à la hausse parallèlement à celui du trafic aérien.
Vous avez évoqué le ZAN et la liste des projets d'intérêt national. Si celle-ci est limitative – nous avons un certain quota à ne pas dépasser au niveau national –, je tiens à vous rassurer : elle a été conçue dans une optique évolutive, ce que je suis bien placé pour savoir dans mon territoire. L'arrêté fixant la liste des projets d'intérêt national est en cours de consultation. Nous pourrons encore la modifier en 2024 et y inscrire les projets de développement que vous évoquez, mais nous pourrons également le faire en 2026 lors de sa révision. Rien n'est figé dans le quota national du ZAN.
Par ailleurs, le décret du 27 novembre 2023 fixant les modalités de la déclinaison territoriale de l'objectif du ZAN prévoit que la région peut aussi mutualiser la consommation ou l'artificialisation emportée par certains projets d'envergure régionale, de sorte qu'ils ne pèsent pas sur les trajectoires de sobriété foncière des documents d'urbanisme infrarégionaux. C'est donc là une seconde possibilité : après l'enveloppe nationale, il y a l'enveloppe régionale, que pourrait mobiliser la région Occitanie.
Restons mobilisés et vigilants ! Pour ma part, je le suis et j'attends que le Gouvernement le soit aussi.
La parole est à M. Belkhir Belhaddad, pour exposer sa question, n° 596, relative à la ligne TGV Paris-Metz/Nancy.
Je souhaite appeler l'attention du Gouvernement sur l'avenir de la ligne de TGV Paris-Metz/Nancy, qui préoccupe les élus locaux et nos concitoyens. Selon des informations parues dans la presse il y a quelques semaines, la SNCF projetterait d'alléger à moyen et long terme le poids financier que représentent les lignes à grande vitesse déficitaires. Deux pistes sont sur la table : l'une consisterait à rationaliser les dessertes, l'autre à demander une participation financière aux collectivités locales.
Monsieur le ministre délégué chargé des transports, vous êtes bien placé pour savoir que le TGV est, depuis son origine, un outil d'aménagement du territoire. Il a fait ses preuves dans la région Grand Est, comme nous avons pu le voir à Strasbourg, Reims, Nancy ou Metz. C'est ainsi qu'à proximité de la gare de Metz, se sont développés le centre Pompidou-Metz, le centre des congrès Robert-Schuman et les lignes de bus à haut niveau de service (BHNS) Mettis. Cette ligne à grande vitesse contribue à l'attractivité de la Moselle, de la Lorraine et, de manière générale, du Grand Est.
Ce serait une erreur de revenir sur cette infrastructure fondamentale, d'autant que nous avons pris des engagements en matière de décarbonation de notre économie et de nos transports. Soulignons, en outre, que la construction de la ligne TGV Paris-Metz/Nancy a été largement financée par les collectivités territoriales, qui ont ainsi démontré leur volonté de participer au développement des infrastructures de transport dans notre région.
Bien que la SNCF ait nié tout projet de réduction globale des lignes TGV, la réponse qu'elle a apportée n'est pas de nature à nous rassurer. Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous donner des assurances fermes quant à l'engagement du Gouvernement à maintenir et à soutenir la ligne TGV Paris-Metz/Nancy ? Nos concitoyens méritent des réponses claires et des garanties, compte tenu du caractère vital de cette infrastructure pour l'avenir de notre région.
La parole est à M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé des transports.
Monsieur le député, je vais être clair et dissiper les inquiétudes nées de la parution d'articles de presse portant sur les dessertes TGV : il n'est pas question de mettre un terme à la liaison TGV Paris-Metz – et je suis sûr que d'ores et déjà, ma réponse fait l'objet d'une capsule vidéo.
La SNCF maintient un équilibre économique entre liaisons TGV bénéficiaires et liaisons déficitaires – ce qui soulève des questions avec l'ouverture à la concurrence – afin d'assurer la desserte de tous les territoires. Cet équilibre, il n'est pas prévu de le remettre en cause. SNCF Voyageurs a ainsi démenti avoir engagé le moindre projet de réduction globale des dessertes TGV. Cela ne semble pas vous avoir suffisamment rassuré et j'espère que la réponse que je suis en train de formuler vous apaisera : aucun projet de ce type n'a été soumis dans les instances de l'entreprise.
Les réflexions internes à la SNCF relèvent du reste de sa seule responsabilité. L'État, lui, n'a ni décidé de fermetures de lignes TGV telles que Paris-Metz/Nancy ni même demandé qu'elles soient étudiées. De manière plus générale, le Gouvernement est attentif à ce que le niveau de service ferroviaire réponde aux besoins de mobilité des territoires. La loi du 27 juin 2018 pour un nouveau pacte ferroviaire prévoit à cet égard que les entreprises opérant des services librement organisés, comme SNCF Voyageurs avec les TGV, informent obligatoirement l'État et les collectivités territoriales concernées des modifications qu'elles souhaiteraient apporter à l'offre proposée. Nous aurions donc reçu des signaux d'alerte si de tels changements étaient envisagés. J'espère, monsieur le député, vous avoir rassuré.
Merci pour cette réponse claire. J'espère que vous aurez compris la préoccupation légitime des élus locaux et de nos concitoyens. Nous devons faire face à un mur d'investissements pour combler les besoins en matière de transport de voyageurs, mais aussi de fret ferroviaire – ma circonscription accueille la plus grande gare de triage de France –, et les collectivités locales ne voudraient pas être flouées après les efforts financiers qu'elles ont consentis pour la ligne de TGV Paris-Metz/Nancy.
La parole est à M. David Valence, pour exposer sa question, n° 597, relative aux lignes de fret ferroviaire dans les Vosges.
J'associe à ma question mon collègue Stéphane Viry, également député des Vosges. L'envie de train n'a jamais été aussi grande, et elle ne concerne pas seulement les voyageurs. Des entreprises qui, jusqu'à présent, considéraient le train, même combiné au camion, comme un moyen de transport compliqué et coûteux, en un mot archaïque, se posent désormais la question d'y recourir pour l'acheminement de leurs commandes et de leurs livraisons.
C'est le cas, dans les Vosges, de la société autrichienne Egger. Elle envisage en effet de recourir au rail pour s'approvisionner et expédier vers le reste de l'Europe les panneaux de bois qu'elle fabrique pour l'ameublement et la construction en bois dans son site de la commune de Rambervillers, en zone rurale. Ce projet, dont le comité de pilotage a tenu sa deuxième réunion hier matin, impliquerait de rouvrir la ligne ferroviaire, désaffectée depuis 1988, qui relie Rambervillers à Bruyères et d'adapter au fret la ligne Épinal-Saint-Dié-des-Vosges, rouverte en 2021 grâce à la mobilisation du Président de la République et de la région Grand Est. Une solution alternative consisterait à créer une plateforme de transport combiné sur des lignes actuellement ouvertes à la circulation.
Je suis conscient qu'il s'agit de projets ambitieux, dépassant le cadre des lignes de fret en service, et j'aimerais savoir comment l'État se prépare à répondre à ces initiatives atypiques, motivées par l'envie de décarboner le transport de marchandises dans notre pays. Comment entend-il s'engager aux côtés de la région Grand Est pour accompagner la société Egger à Rambervillers dans sa stratégie de décarbonation des expéditions et des livraisons ?
La parole est à M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé des transports.
Monsieur le député, je crois que nous partageons, vous en tant que président du Conseil d'orientation des infrastructures (COI), moi en tant que ministre chargé des transports, la volonté de développer le fret ferroviaire, enjeu majeur pour notre pays. L'attention se focalise souvent sur le transport de voyageurs, mais j'estime que le transport de marchandises appelle une réflexion à l'échelle nationale dans les mois à venir.
La ligne allant de Rambervillers à Bruyères est fermée administrativement – le trafic ferroviaire est arrêté depuis 1988 –, mais n'est pas déclassée. Elle relève du réseau ferré national et SNCF Réseau en est le gestionnaire d'infrastructure. À ce titre, la société Egger l'a sollicitée, ainsi que la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal) Grand Est, en vue d'étudier l'opportunité de réactiver le trafic fret de cette section ferroviaire. La desserte du site industriel situé en bord de voie nécessiterait de remettre en état une vingtaine de kilomètres de voie jusqu'à Bruyères. Compte tenu du fait que cette ligne n'a plus été utilisée depuis plusieurs décennies, les travaux à réaliser seraient d'importance, d'autant qu'elle comporte un nombre important d'ouvrages d'art.
Dans le cadre du volet mobilités du contrat de plan État-région (CPER) 2023-2027, sera réalisée une étude portant à la fois sur la remise en circulation de la ligne Rambervillers-Bruyères et les renforcements qu'appellerait le trafic de trains de fret sur la ligne Épinal-Saint-Dié. Les acteurs concernés – État, région, communauté de communes, SNCF Réseau et bien sûr l'entreprise Egger – disposeront ainsi des éléments nécessaires pour évaluer l'intérêt du projet et définir, le cas échéant, les modalités de son financement. La pertinence de ces modifications sera jugée notamment à l'aune des économies de carbone permises par cet investissement. Cette étude du CPER sera une bonne occasion pour examiner en profondeur ce projet très intéressant et déterminer ses implications financières.
L'étude de ce projet est en effet inscrite dans le CPER et, comme je le disais, la deuxième réunion du comité de pilotage a eu lieu hier. Je partage votre constat, monsieur le ministre : la solution passant par la réhabilitation de la voie existante est délicate, tant elle est lourde d'un point de vue financier. Toutefois, elle mérite d'être examinée avec beaucoup de sérieux, tout comme la solution alternative, sans doute plus facile à réaliser, consistant à aménager une plateforme de transport combiné, qui conduirait à mobiliser également l'État pour accompagner la société Egger aux côtés de la région Grand Est.
La parole est à M. Laurent Alexandre, pour exposer sa question, n° 583, relative à la ligne ferroviaire Paris-Rodez.
À l'heure où la prise de conscience de la crise climatique s'approfondit, personne ne conteste l'importance du train comme mode de transport essentiel pour assurer le droit à la mobilité. Malheureusement, avec l'éclatement du service public de la SNCF et votre politique, de plus en plus de territoires et de populations s'en trouvent exclus en raison de fermetures de lignes, de dysfonctionnements chroniques ou du prix trop élevé des billets. En matière de transports collectifs, nos ruralités sont les grandes oubliées. Je plaide auprès de vous, monsieur le ministre délégué chargé des transports, la cause du rail, en l'occurrence celle de la ligne Paris-Rodez, qui dessert ma circonscription, plus précisément la liaison de nuit qui concentre depuis de très longs mois d'immenses difficultés.
Cette ligne joue pourtant un rôle crucial pour la population de l'Aveyron, qui n'est pas un territoire à part dans la République. Les Aveyronnais sont des citoyens comme les autres, monsieur le ministre : ils paient des impôts et méritent qu'on leur assure un égal accès aux services publics. Pourtant les usagers de la liaison de nuit Paris-Rodez sont excédés et même désespérés à force de ne pas être entendus. Entre juillet 2023 et janvier 2024, soixante-six trains ont été supprimés hors période de mobilisation sociale, et aucun train n'a circulé entre la fin du mois de novembre et le 11 décembre 2023. Les horaires de cette liaison sont en outre inadaptés aux contraintes des travailleurs car ils ne sont pas assez tardifs, notamment dans le sens Paris-Rodez.
Les réponses apportées par le service voyageurs intercités de la SNCF ne sont pas à la hauteur compte tenu de l'exaspération compréhensible des usagers. Les raisons invoquées pour justifier ces annulations ne constituent en rien des circonstances exceptionnelles, qu'il s'agisse des travaux sur la voie, de la maintenance des locomotives ou de la chute de feuilles mortes. En 1950, l'automne revenait chaque année, ce qui n'empêchait pas les trains de nuit de circuler, bien au contraire, puisque malgré les feuilles mortes, le Rodez-Paris mettait une heure de moins pour effectuer son parcours.
Ce qui manque, c'est du matériel roulant, mais aussi du personnel opérationnel pour l'entretien des voies et de ce matériel. Cette ligne est d'intérêt national : elle devrait, à ce titre, permettre de relier Rodez à Paris dans des délais raisonnables. Quelles mesures comptez-vous prendre pour assurer le renouvellement du matériel roulant et son entretien et pour garantir la régularité des trains de nuit Rodez-Paris ? Êtes-vous prêts à écouter les propositions formulées par les cheminots et les usagers en vue d'améliorer le fonctionnement de cette ligne ?
La parole est à M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé des transports.
J'ai eu l'occasion de répondre à la question quasiment identique qu'a posée votre collègue Stéphane Mazars et je crains de me répéter. Étant élu d'un territoire qui a connu une augmentation de plus de 50 % du temps de parcours des trains le reliant à Paris – deux heures vingt-deux contre une heure trente-deux –, je suis particulièrement sensible à la question de la desserte des villes moyennes, qui ont sans doute été les victimes de l'accent mis pendant près de quarante ans sur le développement des liaisons entre métropoles.
Parmi les raisons invoquées, les travaux constituent une réalité nouvelle. Auparavant, ils n'avaient pas lieu d'être puisque la préférence était donnée à la création de lignes TGV. La situation actuelle ressemble à une double peine : à la vétusté des voies occasionnée par l'absence d'entretien s'ajoutent des opérations de régénération. C'est une bonne chose, certes, qu'il y ait désormais des travaux, mais cela pénalise les usagers actuels.
L'État, en tant qu'autorité organisatrice des trains de nuit, a financé la location d'une locomotive supplémentaire à Brive-la-Gaillarde, qui vient ainsi renforcer le parc de locomotives utilisé pour les dessertes de Rodez, Albi et Aurillac. Les recherches de locomotives supplémentaires se poursuivent car nous tenons à investir dans le matériel roulant. Pour le reste, je vous renvoie à la réponse que je viens de faire à votre collègue.
Sachez que nous essayons de répondre au mieux aux enjeux de la liaison Rodez-Paris en intégrant des solutions de court terme comme de long terme.
J'entends vos arguments, monsieur le ministre, notamment s'agissant de l'acquisition de matériel roulant. Je vous invite toutefois à vous déplacer pour échanger avec les usagers, les élus locaux et les agents SNCF, notamment ceux du centre de maintenance de Capdenac. Votre réponse n'est pas satisfaisante : acheter une ou deux locomotives ne suffira pas, il faut plus de moyens humains pour entretenir le matériel roulant et les voies, solution que vous n'avez pas évoquée dans votre réponse.
La parole est à Mme Estelle Folest, pour exposer sa question, n° 573, relative à la loi SRU.
Cela fait maintenant plus de vingt ans que nous avons modifié en profondeur le droit de l'urbanisme et du logement par l'adoption de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite loi SRU. Tout en souscrivant à l'ambition de disposer d'au moins 25 % de logements sociaux au niveau national, nous devons reconnaître que la loi est bien trop rigide à l'échelle des communes, car elle ne prend pas suffisamment en compte la réalité du terrain.
J'en veux pour preuve la commune de Deuil-la-Barre, située dans ma circonscription, dont 38 % du territoire est soumis à l'interdiction de construire des bâtiments à usage d'habitation en raison de nuisances aéroportuaires. Ses obligations en matière de construction de logements sociaux au titre de la loi SRU s'appliquent malgré tout, alors qu'elle en serait totalement exemptée si elle atteignait 50 % d'inconstructibilité. Pour résumer : à 50 %, on ne construit plus rien ; à 38 %, il n'y a aucun régime dérogatoire.
Voici un autre exemple, celui d'Enghien-les-Bains, appartenant aussi à ma circonscription. Son territoire urbanisé n'atteint pas la barre des 50 % d'inconstructibilité au regard de la loi ; pourtant, la surface non constructible de la commune constitue en réalité plus des deux tiers de son territoire si l'on compte, en plus du lac et de ses abords, les espaces paysagers à protéger, la zone naturelle et forestière et la zone soumise à un plan d'exposition au bruit (PEB).
Monsieur le ministre, il nous faut parvenir à une appréhension plus fine de la réalité des communes. À cette fin, le Gouvernement pourrait-il envisager de revoir les modalités du quota de 25 % de logements sociaux en instaurant un régime dégressif en fonction du taux de constructibilité des territoires ? Vous en conviendrez, le système en vigueur est à la fois injuste et mal calibré.
Vous savez que je suis très attaché à la loi SRU.
Dans le cadre des obligations de production de logements sociaux issues de l'article 55 de cette loi, le mécanisme d'exemption des communes connaissant un régime d'inconstructibilité sur la majeure partie de leur territoire urbanisé vise à prendre en compte la situation particulière de certains territoires soumis à d'importantes contraintes, sans renoncer à l'ambition d'une répartition équilibrée de l'offre sociale à l'échelle nationale. Je crois que nous souscrivons tous deux à cet objectif.
Si le législateur a fixé un seuil de 50 % de surfaces inconstructibles, cela ne signifie pas pour autant qu'une commune le dépassant serait exonérée de toute obligation de production d'une offre sociale. En effet, la loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, dite loi 3DS, a imposé une servitude de mixité sociale à l'ensemble des communes exemptées au titre de l'inconstructibilité : toute opération de construction d'immeubles collectifs de plus de douze logements ou de plus de 800 mètres carrés de surface de plancher sur leur territoire doit comprendre au moins 25 % de logements sociaux. L'équilibre ainsi trouvé par le législateur consiste donc à substituer une obligation en flux à l'obligation en stock lorsqu'une commune, du fait des contraintes de son territoire, dispose d'une marge de manœuvre trop limitée pour rattraper son déficit de logements sociaux. Cette évolution me semble pertinente.
Par ailleurs, la loi dite 3DS a permis de prendre en considération la réalité de certains territoires en renforçant le panel des motifs pris en compte pour caractériser l'inconstructibilité, auxquels ont été intégrés, par exemple, les zones de recul de trait de côte et les périmètres de protection immédiats des points de captage.
Une commune rencontrant des difficultés à respecter ses obligations peut également signer un contrat de mixité sociale (CMS) lui permettant, sur la base d'engagements précis et ambitieux et d'un constat partagé avec les services de l'État, d'aménager ses objectifs de rattrapage. Elles ne doivent pas hésiter à y recourir. En effet, un régime de taux dégressifs définis en fonction du taux de constructibilité du territoire pourrait être créateur de complexités importantes, mais les contrats de mixité sociale permettent déjà de prendre en compte plus finement les besoins des communes concernées.
Enfin, je tiens à vous sensibiliser à la nécessité de la loi SRU. On parle aujourd'hui de crise du logement à l'échelle nationale, et on insiste sur la production de logements. Or un logement social sur deux est construit grâce à la loi SRU. Plus nous allégerons cette loi, moins nous construirons de logements sociaux et de logements tout court.
Je comprends l'objectif de construction de 25 % de logements sociaux et je sais que nos compatriotes y sont attachés. Loin de moi l'idée de le remettre en cause ; je souhaite simplement l'adapter à la réalité des communes.
Je connais bien les contrats de mixité sociale – je pense notamment à une des communes de ma circonscription qui s'est engagée dans ce processus – et suis donc consciente de leurs avantages. Toutefois, je trouve qu'on demande beaucoup aux maires, étant donné le prix du foncier et la présence de zones inconstructibles. Ils sont soumis à des injonctions contradictoires : on leur demande de construire, mais de ne pas artificialiser, ou encore de bâtir à tout va alors qu'ils ne maîtrisent pas le niveau de peuplement de leur commune. Il convient donc de faire preuve d'une certaine souplesse. J'insiste notamment sur les notions de proportionnalité et de dégressivité ; même si la loi 3DS a connu des aménagements pour encourager la construction de logements sociaux au-delà du seuil de 50 % d'inconstructibilité, la différence entre une commune à 38 % d'inconstructibilité et une commune à 50 % reste majeure. Il y a deux types de communes : celles qui construisent et celles qui ne construisent pas. Une dégressivité des obligations – à partir de 38 ou 40 % d'inconstructibilité, par exemple – serait bienvenue.
La parole est à M. Arthur Delaporte, pour exposer sa question, n° 604, relative à l'hébergement d'urgence dans le Calvados.
« Désolé madame, nous n'avons plus de place d'hébergement disponible. » Chaque soir, à Caen comme partout en France, c'est la même réponse du 115. Dans le Calvados, des centaines de familles dorment à la rue ou, au mieux, dans des squats.
J'ai partagé moi-même ce constat d'impuissance lors de maraudes avec le Samu social ou avec le service intégré d'accueil et d'orientation (Siao) de Caen, qui gère les appels du 115. « Ce que la société nous demande, c'est de choisir », disait une écoutante. « Je me sens hyper coupable », disait un autre. Chaque jour, je reçois des alertes de la part d'enseignants qui voient leurs élèves dormir à la rue, de la part d'associations et de citoyens. J'ai déjà posé une question sur ce sujet il y a un an. Depuis, rien n'a changé, ou trop peu, et « la bombe sociale du logement » a explosé, selon l'expression de la Fondation Abbé Pierre.
Le Gouvernement a certes annoncé le 8 janvier 10 000 créations de places d'hébergement et une enveloppe supplémentaire de 120 millions d'euros. Dont acte, mais pour quand et combien ? Plus précisément, quels types de places et combien de créations sont envisagées pour le département du Calvados ?
Je vous alerte en outre sur la différence de traitement qui existe, notamment dans mon département, entre les étrangers qui ne peuvent pas signer des contrats d'hébergement au-delà de deux mois et les personnes soumises au droit commun qui peuvent les renouveler. La Fédération nationale des associations d'accueil et de réadaptation sociale (FAS) a exprimé son inquiétude quant à cette disposition qui pourrait être contraire au code de l'action sociale et des familles. Qu'en pense le Gouvernement ?
Enfin, je souhaiterais vous alerter sur la situation spécifique des victimes de violences conjugales. Régulièrement, le 115 répond négativement à des demandes de mise à l'abri faute de places, notamment lorsque le plafond des nuitées d'hôtel – fixé à 275 nuitées dans le Calvados – est atteint. Même quand ces femmes obtiennent une place d'hébergement d'urgence, il leur est parfois impossible d'emmener leurs enfants – dans le cas, par exemple, où elles doivent partager une chambre –, qui restent avec le conjoint violent. Comment réagissez-vous à cette situation intolérable ?
Pour répondre aux situations d'urgence que vous évoquez, plus de 200 000 places d'hébergement ont été pérennisées par le Gouvernement, ce qui représente 70 % d'augmentation par rapport à 2017. J'ai eu l'occasion de le dire ici lorsque j'étais ministre délégué chargé du logement.
Depuis 2017, le parc d'hébergement total du Calvados a augmenté de plus de 21 %, atteignant fin 2023 près de 3 200 places, auxquelles s'ajoutent les places d'hébergement dédiées à l'asile. L'État n'a cessé de renforcer sa capacité et son budget pour répondre aux besoins exprimés. Comme vous l'avez rappelé, j'ai moi-même annoncé début janvier 120 millions d'euros supplémentaires pour l'hébergement d'urgence. À ce stade, je ne sais pas combien seront alloués au Calvados.
Vous m'en excuserez ; je ne pensais pas avoir à répondre à cette question ce matin.
Soyez assuré, en tout cas, que la procédure de prise en charge des demandes auprès du 115 est la même pour tous les publics en situation de vulnérabilité et en demande d'hébergement, quelle que soit leur situation administrative. Je suis assez sensible à la question que vous évoquez ; je vous confirme que le Gouvernement ne souhaite introduire aucune discrimination ni aucune différenciation dans cette procédure, comme l'a rappelé le Président de la République à la fin de l'année 2023 et comme je l'ai rappelé moi-même au début de l'année 2024. Les propositions d'orientation vers des dispositifs d'hébergement ou de logement sont adaptées selon les besoins.
Le Gouvernement met également tout en œuvre pour protéger les victimes et leurs enfants contre le fléau des violences conjugales. La priorité donnée à la mise en sécurité des femmes victimes de violences s'est traduite par un effort particulier en faveur de la création de places d'hébergement dédiées et par la création d'une aide universelle d'urgence pour les victimes de violences conjugales. Le parc spécialisé a doublé en cinq ans et comptera plus de 11 000 places en juin 2024. Le budget consacré à ces places d'hébergement a également été revalorisé et des places sont attribuées à ces publics vulnérables – j'y ai porté une attention toute particulière lorsque j'étais chargé du logement.
Au-delà de la mise en sécurité en hébergement d'urgence, l'accès au logement est un préalable à la reconstruction des victimes et à la stabilisation de la cellule familiale. À cet égard, je rappelle que la part des attributions de logements sociaux aux personnes victimes de violences conjugales a connu une progression constante depuis 2018 et que le premier plan « logement d'abord » a permis à 440 000 personnes hébergées d'accéder à un logement. Fort de ces résultats, le Gouvernement a décidé de reconduire le plan et d'en augmenter l'ampleur budgétaire en portant son financement à 500 millions d'euros de crédits au total, soit 160 millions de plus que le premier plan. Les plans « logement d'abord » et « logement d'abord 2 » sont reconnus par l'ensemble des associations comme un pas en avant substantiel.
Je vous remercie de votre réponse, mais je reste sur ma faim. En effet, la première partie de cette question transmise au Gouvernement plusieurs semaines à l'avance concernait précisément la répartition des nouvelles places d'hébergement d'urgence et des nouveaux crédits annoncés. C'était écrit noir sur blanc. Vous dites que vous ne saviez pas que j'allais vous poser cette question, mais je l'avais écrite et transmise.
Deuxièmement, vous affirmez que le parc d'hébergement du Calvados a grandi de 21 % depuis 2017, mais le Calvados a connu l'arrivée de nombreuses personnes pendant cette période. Je pense, par exemple, aux exilés présents dans le port de Caen – afghans, notamment – et à Ouistreham, qui accueille plus d'une centaine de Soudanais. Cette situation est intolérable. Au-delà de ces cas extrêmes, des femmes et des enfants dorment dans les rues de Caen, ce qui est tout aussi intolérable.
Vous dites que le Gouvernement a sorti 440 000 personnes de la rue depuis 2018. M'étant penché sur ces chiffres que vous avancez en permanence, je constate qu'ils sont faiblement étayés et peu détaillés ; je doute fort qu'ils correspondent strictement à des personnes sorties de la rue. C'est un effet de langage, monsieur le ministre,…
La parole est à Mme Stéphanie Galzy, pour exposer sa question, n° 598, relative aux frelons asiatiques.
Les apiculteurs rencontrent de nombreux problèmes liés à la prolifération des frelons asiatiques et des frelons orientaux. Le manque d'anticipation des pouvoirs publics a entraîné une recrudescence de ces nuisibles dans nos régions, mettant en danger à la fois les professionnels du secteur et la biodiversité.
Des solutions existent, mais sont malheureusement coûteuses. Les pompiers, qui intervenaient autrefois pour effectuer les prestations de sécurité permettant de se débarrasser des nids, ont été remplacés par des sociétés privées facturant environ 150 euros par destruction de nid. Des collectivités participent à cette lutte en finançant des pièges, mais certaines s'en abstiennent faute de moyens et rendent ainsi caduques les efforts réalisés par d'autres.
Un nid de frelons, comme vous le savez, peut donner naissance à vingt autres dans un rayon de 2 kilomètres. La destruction des nids est primordiale, même si elle se heurte à un obstacle majeur : leur détection. Là encore, des solutions existent pour détecter les nids, telles que les recherches par drone à infrarouge, mais elles sont coûteuses.
Ces coûts pèsent énormément sur le budget des petites exploitations, mais aussi sur celui des particuliers, qui peuvent commettre l'imprudence de laisser les nids de nuisibles sur leur propriété. Les apiculteurs ne sont pas dédommagés des pertes d'exploitation liées à ce fléau, contrairement à ce qui se pratique pour d'autres activités victimes, par exemple, d'aléas climatiques.
La disparition d'exploitations apicoles risque d'entraîner une forte diminution, voire la fin, de la pollinisation au sein de nos territoires. Ce problème s'ajoute à la concurrence déloyale que représente la production du faux miel fabriqué en Chine, dont les points d'entrée européens sont l'Espagne et la Belgique.
Il est urgent d'apporter des solutions aux dangers qui mettent en péril toute une profession. Quelles actions le Gouvernement envisage-t-il de mettre en œuvre face à ces fléaux, à la fois pour les prévenir et pour soutenir nos apiculteurs ?
La lutte contre le frelon asiatique, espèce ayant connu une expansion rapide après l'introduction d'une seule femelle en Aquitaine en 2004, fait maintenant l'objet d'un encadrement réglementaire stabilisé. Le frelon asiatique est classé comme espèce exotique envahissante au niveau européen. Sa présence est désormais avérée dans l'ensemble du territoire. L'espèce étant durablement installée, les pouvoirs publics doivent mener une lutte difficile et coûteuse. Le classement comme espèce exotique envahissante permet au préfet de département de procéder ou de faire procéder à la capture, au prélèvement ou à la destruction de spécimens. Un arrêté préfectoral précise alors les conditions de réalisation de telles opérations, notamment dans des propriétés privées.
Le financement des opérations de lutte contre les frelons n'est pas pris en charge par l'État eu égard à l'envahissement d'une large partie du territoire métropolitain par l'espèce. La destruction des nids reste donc à la charge des particuliers. Ces coûts peuvent être pris en charge dans leur totalité ou en partie par des financements locaux émanant de collectivités territoriales. En outre, Fredon France accompagne les professionnels du végétal dans cette lutte par des conseils. Néanmoins, le fonds Vert a été mobilisé pour des projets globaux de lutte contre les frelons. Un financement par l'État est donc possible à condition qu'il s'agisse de projets globaux, et non d'une opération conduite sur une seule propriété, par exemple. Nous continuerons de financer la lutte contre les espèces exotiques envahissantes dans le cadre de la stratégie nationale pour la biodiversité (SNB).
L'impact sur les abeilles domestiques de la prolifération des frelons est connu. Aussi collaborons-nous étroitement avec le ministère de l'agriculture et avec la filière apicole. La lutte contre les agresseurs biologiques des colonies d'abeilles domestiques constitue une action du plan national en faveur des insectes pollinisateurs et de la pollinisation 2021-2026. Des actions sont menées pour piéger les frelons au moment de la fondation des nids et pour les appâter. Il s'agit de lutter efficacement contre les frelons tout en maîtrisant les effets de cette lutte sur l'environnement. Un plan national défendu par Fredon France et GDS France, des organismes à vocation sanitaire dans les domaines végétal et animal, sera prochainement présenté au ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, ainsi qu'au ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Il contiendra un état des lieux des solutions techniques actuelles.
Merci pour votre réponse, monsieur le ministre. Toutefois, il est urgent d'apporter une réponse aux apiculteurs : malgré leur courage, ils ne peuvent plus attendre, car la situation est devenue intenable. En outre, comme je l'ai rappelé, c'est le manque d'anticipation des pouvoirs publics qui a entraîné la recrudescence de la prolifération des frelons.
J'espère que votre gouvernement entendra l'appel de cette profession et se donnera enfin les moyens d'agir dans l'intérêt de toute une filière, au lieu de fermer les yeux une nouvelle fois. Protégerez-vous enfin les apiculteurs face à l'Union européenne qui les écrase comme elle écrase les agriculteurs ?
La parole est à M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé des transports.
Madame la députée, nous ne fermons jamais les yeux et nous travaillons très étroitement avec la filière.
La parole est à M. Sébastien Jumel, pour exposer sa question, n° 577, relative aux aides aux pêcheurs.
L'ancien maire de Dieppe s'adresse à l'ancien maire de Dunkerque ; nous avons un point commun : le hareng.
Sourires.
Oui, exactement ! Mais nous, nous les jetons !
Et nous, nous les vendons. Nous y tenons comme à la prunelle de nos yeux !
Sourires.
Depuis des mois, les crises s'additionnent dans la pêche française. La filière, fragilisée, en proie au doute, est bien loin de voir se réaliser les promesses du Président de la République d'assurer notre souveraineté alimentaire. Je ne vous parlerai ni du Brexit, ni des quotas, ni de la pression administrative sur les pêcheurs, ni de la crise du golfe de Gascogne, où 450 navires de plus de 8 mètres ont été punis et mis à quai pendant plus d'un mois – les professionnels ont pourtant pris le problème des cétacés à bras-le-corps –, ni de l'atonie de la demande et des prix du poisson en cette période de pouvoir d'achat en berne.
Je veux revenir sur la question des coûts de l'énergie, centrale aussi bien dans l'immédiat que pour l'avenir. Nos armements structurés – 150 bateaux, près de 2 000 navigants, 40 % de la valeur de la pêche débarquée en France – sont pénalisés, vous le savez, par le fait que le plafonnement de l'aide au carburant s'applique aux entreprises et non aux bateaux. Je pense à l'armement Favrou à Dieppe ou à Sophie Leroy à Cherbourg, mais il y a bien d'autres exemples.
Je veux vous poser trois questions précises, que vous transmettrez, je n'en doute pas, à Hervé Berville, secrétaire d'État chargé de la mer et de la biodiversité.
Tout d'abord, quand le règlement sur l'aide aux pêcheurs en matière de carburant sera-t-il modifié, dès lors que cette aide est prolongée au premier semestre ? Il faut supprimer le plafond qui nuit à ces entreprises et les empêche d'investir dans la décarbonation. Il porte préjudice à l'attractivité des métiers de la pêche : sans les armements, bien des criées risquent de dévisser.
Ensuite, quand la réduction de 13 centimes par litre à la pompe sera-t-elle effective ? Selon quelles modalités ? Sera-t-elle accessible dans tous les ports ? J'attends de vous un discours de vérité.
Enfin, la Commission européenne vient d'annoncer un investissement de 2,2 millions pour un appel à projets de recherche sur les navires du futur décarbonés. À qui fera-t-on croire qu'une somme aussi faible peut financer la recherche sur la décarbonation de navires tels que les chalutiers et les coquillards ? Ce n'est évidemment pas à la hauteur des enjeux. Je voudrais savoir concrètement quelle est la feuille de route du Gouvernement sur la décarbonation de la pêche et sur le plafonnement des aides au carburant. À quelle échelle, quand, comment ?
La parole est à M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé des transports.
J'évoquerai bien sûr les questions que vous posez avec le secrétaire d'État chargé de la mer et de la biodiversité, Hervé Berville, qui aura l'occasion de vous répondre plus largement dans un autre cadre.
Depuis mars 2022 et le début de la crise en Ukraine, vous le savez, le secteur de la pêche est accompagné par le Gouvernement pour faire face à l'augmentation du prix des carburants. Le dispositif d'aides instauré par la France a été rapide et d'une intensité sans égale en Europe afin de maintenir l'activité des pêcheurs, comme Hervé Berville a déjà eu l'occasion de le souligner.
Cinq phases d'une aide spécifique à la filière pêche ont couvert la période du 17 mars 2022 au 31 décembre 2023. Près de 80 millions d'euros ont été versés à plus de 3 000 bénéficiaires. Ce montant inclut les aides à la pompe, dont ont bénéficié l'ensemble des usagers. Parallèlement, le Gouvernement s'est battu auprès de la Commission européenne pour relever le plafond d'aide, qui était initialement de 30 000 euros et qui est à désormais établi à 335 000 euros. Le Président de la République a annoncé cet automne la prolongation du dispositif d'aide, à hauteur de 20 centimes par litre de carburant jusqu'au 30 juin 2024.
Par ailleurs, l'entreprise TotalEnergies s'est engagée, en signe de solidarité avec le secteur des pêches maritimes, à instaurer une ristourne de 13 centimes par litre de carburant pendant toute l'année 2024. Cette ristourne est effective pour tous les clients des coopératives d'avitaillement qui se fournissent auprès de TotalEnergies. Elle bénéficiera aux entreprises les plus importantes qui ont atteint le plafond d'aide publique.
Monsieur le ministre, je ne vous en veux pas de lire une fiche préparée par les services du ministère. Cependant, il y a un problème. Un plafond de 335 000 euros par entreprise, et non par bateau, pénalise les entreprises structurées. Il fragilise, par exemple, l'armement Favrou, qui possède quatorze chalutiers à Dieppe, fait vivre le port et fixe le prix de la coquille Saint-Jacques compte tenu des quantités pêchées.
Ensuite, il ne vous a pas échappé que l'entreprise TotalEnergies n'était pas présente dans tous les ports. Vous savez d'ailleurs que les ports français sont gérés selon différents modes : certains relèvent de la région ou du département, d'autres sont délégués aux chambres de commerce ou autonomes. De ce fait, les distributeurs d'énergie sont différents. Malgré l'effet d'annonce, concrètement, le geste de TotalEnergies ne bénéficie pas aux pêcheurs dans les ports.
Je le dis souvent, monsieur le ministre, les préoccupations des pêcheurs sont les mêmes que celles qui ont conduit les agriculteurs à exprimer une colère légitime ces derniers jours : pression administrative, coût de l'énergie préjudiciable à leur entreprise, absence de perspective pour le renouvellement des générations. Vous devriez prendre au sérieux la colère et l'inquiétude des pêcheurs, qui contribuent pour beaucoup à notre souveraineté alimentaire.
La parole est à M. Emmanuel Mandon, pour exposer sa question, n° 572, relative à la délinquance dans la Loire.
Ma question s'adresse au ministre de l'intérieur et des outre-mer et porte sur les résultats de la lutte contre la délinquance.
Il y a quelques jours, les statistiques de l'année 2023 au niveau national et dans chaque département ont été rendues publiques. En tant que parlementaire, je suis naturellement très attentif à l'évolution des différents indicateurs. Il nous faut les analyser objectivement et les mettre en perspective avec les moyens renforcés que le Gouvernement mobilise, notamment grâce à la loi du 24 janvier 2023 de programmation et d'orientation du ministère de l'intérieur. Celle-ci a fixé un cap, donné un cadre et permis de traduire en chiffres et en actes la considération de la République pour la sécurité publique et pour les forces de l'ordre, en prévoyant des moyens humains, matériels, technologiques et financiers.
En m'appuyant sur les statistiques, j'aborderai deux sujets intimement liés. Les forces de sécurité ont pour mission de protéger nos concitoyens qui subissent la délinquance de proximité, d'élucider les affaires en identifiant les auteurs d'infractions, lesquels doivent être poursuivis et sanctionnés, de prendre en charge les victimes, de recueillir leurs témoignages et de mener des enquêtes de terrain pour élucider les affaires. Nous le savons, la tâche est immense et doit être reprise chaque jour inlassablement.
J'en viens aux enseignements que nous devons tirer des chiffres de la délinquance en 2023. Entendons-nous bien : il ne s'agit pas de forcer le trait ni de passer sous silence les chiffres quand ils sont mauvais. Chaque acte de délinquance, chaque agression, chaque vol, chaque incivilité est toujours un acte de trop. Si nous pouvons nous réjouir des améliorations obtenues, il convient d'être vigilants et lucides, car la nature des violences évolue.
À titre d'exemple, dans le département de la Loire, la dégradation de certains indicateurs est particulièrement significative et préoccupante. Tout d'abord, comme on le constate au niveau national, les violences physiques et sexuelles sont en hausse, de 11 % sur l'ensemble du territoire ligérien et de plus de 20 % dans certaines villes de ma circonscription. Les trois quarts des victimes sont hélas des femmes et les violences ont souvent lieu entre jeunes. Les destructions volontaires de biens, comme les incendies de véhicules, augmentent également de manière significative, comme lors des violences urbaines au début de l'été 2023, particulièrement importantes à Rive-de-Gier ou à La Ricamarie.
Enfin, l'augmentation significative des infractions liées au trafic de drogue est préoccupante. La multiplication des points de deal accroît le sentiment d'insécurité de nos concitoyens. Toutefois, les opérations antistupéfiants qui se multiplient et la présence physique accrue des gendarmes et des policiers en brigade mobile et d'unités de CRS nouvelle génération ont sans doute permis de limiter la hausse de la délinquance dans notre territoire.
Il n'en demeure pas moins que le volume d'affaires est important et qu'elles sont toujours difficiles à élucider. Nous posons donc la question des moyens. En effet, nos concitoyens déplorent l'absence de réparation et le sentiment d'impunité qui résultent des affaires non élucidées. Le Gouvernement indique avoir pris la mesure de l'enjeu : il est important de renforcer la filière d'investigation en la réformant pour augmenter le taux de résolution des affaires. En effet, la filière d'investigation rencontre des difficultés au plan national, dans la Loire et malheureusement dans la circonscription de police du Gier, où l'effectif de sept officiers de police judiciaire est insuffisant – il en faudrait au minimum une dizaine.
Je vous ai fait part de préoccupations et de difficultés. Nous savons qu'il faut rester vigilants et mobilisés, comme me l'ont confié les responsables que j'ai rencontrés ces dernières semaines. Le Gouvernement a pris l'engagement de doubler la présence policière en zone rurale comme en zone périurbaine. Nous avons des objectifs solides, mais, dans ce contexte et à l'approche des événements sportifs exceptionnels, comme les Jeux olympiques, qui se tiendront cet été, je souhaite connaître les suites que le Gouvernement réserve à ces demandes et à ces préoccupations.
La parole est à M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé des transports, qui dispose d'une minute pour vous répondre…
Le groupement de gendarmerie départemental de la Loire comprend 671 militaires, dont les deux tiers possèdent la qualité d'officier de police judiciaire (OPJ). En zone de gendarmerie, l'analyse de la délinquance dans le département met en lumière une augmentation des atteintes à l'intégrité physique de 16 % ; il s'agit principalement de violences intrafamiliales. Cette hausse est également observée au niveau national.
Les cambriolages ont par ailleurs augmenté de 14 %, mais le taux d'élucidation a progressé significativement : de 9 % en 2022, il est passé à 18 % en 2023. La création de deux brigades mobiles envisagée en 2024 au sein du groupement de gendarmerie va indéniablement permettre de renforcer la présence des forces de l'ordre sur la voie publique, comme vous le demandez.
Dans la zone de compétence de la police, l'action de la police nationale se renforce, notamment grâce à la création, au 1er
La parole est à Mme Delphine Batho, pour exposer sa question, n° 576, relative au séisme dans les Deux-Sèvres.
Les 16 et 17 juin 2023, un séisme de magnitude 5,3 a frappé le Poitou-Charentes. Le 17 juin, le ministre de l'intérieur et des outre-mer, Gérald Darmanin, a promis une procédure de reconnaissance accélérée de l'état de catastrophe naturelle. Le 19 juin, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, Christophe Béchu, est venu sur place rencontrer les maires des communes des Deux-Sèvres. Huit mois plus tard, des communes du Marais poitevin restent abandonnées ; pire, leur demande de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle a été rejetée par l'arrêté du 31 janvier 2024.
Au total, seulement dix communes des Deux-Sèvres se sont vues reconnaître l'état de catastrophe naturelle, contre vingt en Charente-Maritime – tant mieux pour ces dernières. Cette reconnaissance repose sur des critères obscurs, appliqués de façon inégalitaire.
Nous ne comprenons pas pourquoi des communes du département voisin, situées à plus de 20 kilomètres de l'épicentre, ont été déclarées en état de catastrophe naturelle, tandis que des communes des Deux-Sèvres, situées à 10 kilomètres de l'épicentre, sont abandonnées.
Voici les conséquences concrètes de cette situation : les habitants sinistrés, dont les maisons sont fissurées, se retrouvent dans une impasse, parce qu'ils ne peuvent même pas contacter leur compagnie d'assurances ; des mères de famille ont des maisons à crédit sur le dos ; des personnes âgées issues des catégories populaires se trouvent aujourd'hui dans une situation impossible ; enfin, les maires sont en première ligne face à la colère des habitants.
Ma question est très simple : allez-vous reconsidérer votre décision concernant les communes du Marais poitevin des Deux-Sèvres les plus affectées par le séisme, dont la magnitude a été supérieure à 5 et dont les dégâts sont significatifs ?
Le ministre de l'intérieur a toute latitude pour décider car la commission à laquelle il se réfère n'est que consultative.
La parole est à M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé des transports.
Une procédure accélérée a été déclenchée qui a permis dans de courts délais la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle des communes les plus touchées en Charente-Maritime, dans les Deux-Sèvres et en Vendée.
En effet, sur le fondement d'expertises établies après les visites de terrain réalisées en urgence par une équipe de sismologues, vingt-deux communes ont été reconnues en état de catastrophe naturelle par des arrêtés publiés au Journal officiel dès le mois de juillet 2023 : dix-sept communes en Charente-Maritime, trois dans les Deux-Sèvres et deux en Vendée.
Entre août et septembre 2023, comme vous le faites remarquer, le séisme a donné lieu au dépôt de plus de 600 demandes communales supplémentaires de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle.
Ce nombre important s'explique en partie par le fait que certaines communes ont pensé, à tort, que la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, au titre du séisme, permettrait une prise en charge par les assureurs des dommages provoqués par les épisodes de sécheresse et de réhydratation des sols survenus au cours des années précédentes.
En raison du nombre considérable d'expertises complémentaires à réaliser pour analyser les dossiers nouvellement déposés par les communes, les délais d'instruction se sont prolongés durant l'automne.
Sur le fondement d'un rapport intermédiaire établi en octobre et d'un rapport d'expertise définitif remis en janvier 2024, quatorze communes supplémentaires ont été reconnues en état de catastrophe naturelle par deux arrêtés publiés en novembre 2023 et en janvier 2024. Ce chiffre est insuffisant, selon vous.
Les autres demandes communales déposées ont été rejetées car l'intensité anormale du séisme sur leur territoire n'a pas été démontrée. Cependant, les communes qui disposent d'éléments nouveaux caractérisant la gravité des effets du séisme sur leur territoire peuvent encore les communiquer au préfet de leur département à l'appui d'une demande de réexamen.
Je prends acte de la possibilité de réexamen que vous évoquez. Toutefois, alors que les maires des communes concernées ont fait le nécessaire, ils ont le sentiment de se heurter à la bureaucratie et à l'absence de réponses. À l'heure où je vous parle, nous n'arrivons même pas à accéder aux données des rapports sur lesquels la commission s'est fondée.
Monsieur le ministre, je ne vous parle pas de 600 communes ; je vous parle des communes du Marais poitevin des Deux-Sèvres, qui se trouvent dans un rayon maximal d'environ 25 kilomètres de l'épicentre. Elles sont dans une situation strictement similaire à celle des communes du département voisin, dont l'état de catastrophe naturelle a été reconnu.
Les communes dont je parle se heurtent à l'application à géométrie variable des critères. Les bâtiments publics et les maisons des habitants y sont touchés par des dégâts significatifs. Nous demandons que la situation de ces communes soit reconsidérée de toute urgence, sans leur infliger une nouvelle paperasserie bureaucrate.
Nous nous appuyons toujours sur des rapports pour indemniser les personnes et les communes. Je veillerai à ce que les communes aient accès aux données du rapport d'expertise définitif de janvier 2024.
La parole est à Mme Maud Petit, pour exposer sa question, n° 574, relative aux effets du chlordécone.
Entre 1972 et 1993, le chlordécone a été utilisé dans la lutte contre le charançon de la banane aux Antilles. Reconnu dangereux, ce pesticide avait pourtant été interdit aux États-Unis, puis en France en 1990.
Je ne reviendrai pas sur les dérogations obtenues pour la poursuite de son utilisation au-delà de cette date, ni sur les nombreuses plaintes pour empoisonnement ou mise en danger de la vie d'autrui ; elles ont abouti à un non-lieu en 2023, malgré la reconnaissance d'un scandale sanitaire ayant un impact humain, sanitaire, environnemental et économique.
Cette pollution des sols et des eaux perdure et provoque encore une augmentation significative des cancers de la prostate et des malformations congénitales, ainsi qu'un taux élevé de naissances prématurées et de cas d'infertilité.
Il faut saluer les différents plans mis en œuvre par l'État, qui s'attachent à en atténuer les conséquences ainsi qu'à prévenir et à mesurer les risques à venir. Je salue l'annonce récente du lancement d'une nouvelle étude de biosurveillance, appelée Kannari 2, qui suivra l'évolution de l'exposition au chlordécone dans le temps.
J'ai deux questions, monsieur le ministre. En premier lieu, des tests sanguins sont mis à disposition de la population antillaise, sur prescription en Guadeloupe, sans prescription en Martinique. Or beaucoup de nos concitoyens m'ont dit qu'ils ne connaissaient pas l'existence de ces tests. Peut-on envisager une campagne d'information ciblée, par l'envoi de courriers à domicile, par exemple, afin que les Antillais puissent procéder, s'ils le souhaitent, à ces tests, pris en charge à 100 % par l'Assurance maladie ? Ces courriers sont déjà utilisés pour d'autres types d'examen, comme l'incitation au dépistage du cancer du col de l'utérus.
En second lieu, le laboratoire de l'université des Antilles travaille sur la transformation des algues sargasses, autre fléau aux Antilles, en charbon actif aux propriétés de filtre. Ce charbon actif pourrait être efficace pour fixer les molécules de chlordécone et, ainsi, dépolluer les sols antillais. Personne n'en parle jamais. Comment accompagner et soutenir la recherche et l'industrie locales, à travers cet exemple d'innovation qui résoudrait simultanément deux problèmes majeurs pour ces territoires ?
Les actions déployées par l'État et ses partenaires concernent tous les publics touchés par cette pollution, et le budget mobilisé est inédit sur la période 2021-2027. Initialement fixé à 92 millions d'euros, il atteint aujourd'hui 130 millions d'euros. En trois ans, plus de 28 millions d'euros ont été consommés dans le cadre du plan Chlordécone.
Les travaux de recherche financés par l'État sont amplifiés et une large communauté scientifique est mobilisée dans tous les domaines, que ce soit la santé des travailleurs, des femmes et des enfants, ou la dépollution des sols.
En ce qui concerne la dépollution des sols, vous évoquez un projet de l'université des Antilles, visant à utiliser les biochars de sargasses pour séquestrer le chlordécone dans les sols ; ce projet est soutenu par le plan Chlordécone.
Sans attendre, des solutions sont à portée de main pour stopper l'exposition au chlordécone. En effet, les travaux scientifiques nous ont appris deux choses. D'abord, le fait d'avoir de la chlordécone dans le sang ne signifie pas que l'on est malade ou que l'on risque de tomber malade ; la chlordécone s'élimine naturellement de l'organisme en stoppant les sources d'exposition. En l'absence d'exposition, le taux de chlordécone dans le sang est divisé par deux en moins de six mois. La priorité est donc d'agir sur l'alimentation, sans tourner le dos aux productions locales. Ensuite, tous les sols ne sont pas contaminés ; il est possible de cultiver des produits sains non sensibles, même quand il y a du chlordécone dans le sol.
Le Gouvernement agit, et la mobilisation de tous est nécessaire pour que, à terme, les populations antillaises puissent vivre sans « risque chlordécone ».
Pour finir, je rejoins votre proposition de campagne de communication, action qu'on pourrait imaginer tous ensemble.
La parole est à M. Bryan Masson, pour exposer sa question, n° 601, relative au contrôle aux frontières.
Vous le savez, le département des Alpes-Maritimes, plus qu'aucun autre département hexagonal, continue de subir une immigration de masse. Pourtant, afin de se conformer à la Cour de justice de l'Union européenne, le Conseil d'État a abrogé une disposition de notre droit permettant le refoulement immédiat à la frontière française de migrants en situation illégale. Cette décision ahurissante a été prise pour se conformer au droit de l'Union européenne en matière d'immigration.
Les chiffres sont alarmants, permettez-moi de vous les rappeler. En 2023, il y a eu 33 000 refoulements à la frontière, et plus de 1 400 pour le seul mois de janvier 2024.
Je l'ai dit, ces chiffres font des Alpes-Maritimes le département hexagonal le plus concerné par les entrées illégales et, par conséquent, par toutes les dérives que cela entraîne en matière de sécurité et de prise en charge par les collectivités quand il s'agit de mineurs, et ils sont nombreux.
Bien qu'elles fassent un travail remarquable, les autorités de police présentes à la frontière franco-italienne ne disposent donc plus des moyens juridiques et administratifs permettant de limiter le nombre d'entrées sur notre sol. Une fois de plus, la France se retrouve paralysée par la politique immigrationniste de l'Union européenne.
Le texte du projet de loi pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration, tel qu'adopté en commission mixte paritaire, a été réduit à néant par les juges du Conseil constitutionnel, avant sa promulgation le 26 janvier dernier.
Sur le territoire français, les obligations de quitter le territoire français (OQTF) restent non exécutées ; le droit d'asile fait office de filière détournée de l'immigration ; et, dorénavant, la police ne pourra plus refouler immédiatement des clandestins en situation irrégulière à nos frontières.
La situation est alarmante ; elle nécessite des mesures urgentes pour protéger nos concitoyens. Monsieur le ministre, je vous rappelle que 80 % des Français veulent en finir avec l'immigration massive. Il est donc impératif de prendre la mesure de cette volonté populaire et d'y apporter une réponse à la hauteur afin d'éviter les embûches juridiques que nous connaissons.
Il existe une solution prévue par la Constitution, mais elle demande du courage et, par-dessus tout, de la volonté politique : il s'agit du référendum. Monsieur le ministre, ma question peut sembler simple aux Français, mais difficile pour vous : comptez-vous enfin utiliser l'arsenal constitutionnel qui est la seule réponse viable pour en finir avec cette immigration incontrôlée ? Comptez-vous enfin satisfaire la volonté des Français ?
La parole est à M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé des transports.
Je ne vais pas revenir sur votre vocabulaire volontairement excessif. Vous m'interrogez sur l'impact, en matière de contrôle aux frontières intérieures, de la décision rendue par le Conseil d'État le 2 février dernier, après un arrêt rendu par la Cour de justice de l'Union européenne, dans le cadre d'une question préjudicielle, le 21 septembre 2023.
Revenons-en aux faits. Ces décisions ne remettent pas en cause le régime de rétablissement des contrôles aux frontières intérieures, tel que la France a souhaité l'appliquer de manière continue depuis novembre 2015, conformément aux dispositions du code frontières Schengen. Elles ne mettent pas non plus en cause la possibilité, dans ce cadre, de prononcer des refus d'entrée à l'encontre des personnes qui ne remplissent pas les conditions pour entrer régulièrement sur le territoire national.
Autrement dit, il demeure possible de prononcer des refus d'entrée à nos frontières intérieures, à condition d'y adjoindre une mesure d'éloignement, qui peut prendre la forme soit d'une réadmission simplifiée, soit d'une décision portant OQTF.
Comme vous le savez, nous disposons d'accords de réadmission avec l'ensemble des pays frontaliers. Dans le cas de la frontière franco-italienne, il s'agit de l'accord de Chambéry, conclu entre la France et l'Italie le 3 octobre 1997.
Dès que cette décision a été rendue, les préfets concernés, en particulier le préfet des Alpes-Maritimes, en lien avec les services du ministère de l'intérieur et des outre-mer, ont pris les dispositions nécessaires pour adapter le dispositif de contrôle aux frontières aux exigences résultant de ces décisions. Nous travaillons aussi à procéder à des aménagements plus durables de notre cadre procédural et de nos moyens, afin de tirer les conséquences de ces décisions.
Ainsi, je puis vous assurer, monsieur le député, qu'en matière de contrôle des frontières intérieures et extérieures de l'Europe, comme en matière de lutte contre l'immigration irrégulière, l'action du Gouvernement est résolue.
Mon vocabulaire était peut-être excessif mais sans doute pas moins que ne le sont les chiffres des Alpes-Maritimes. Je vous rappelle que 1 400 clandestins ont été refoulés à la frontière pour le seul mois de janvier 2024 et qu'il y en a eu 33 000 pour l'année 2023. J'entends les arguments figurant sur votre fiche, bien écrite, admettons-le, mais ils sont très loin des réalités. Je n'ai pas écrit ma question sans avoir consulté les services de l'État, en particulier les agents de la police aux frontières – je puis vous assurer de leur inquiétude et même de leur angoisse. Je vous invite donc à mettre le ministère de l'intérieur au travail pour les Français.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix heures quarante-cinq, est reprise à onze heures.
La parole est à Mme Clémence Guetté, pour exposer sa question, n° 582, relative à l'éducation nationale dans le Val-de-Marne.
Dans le Val-de-Marne comme partout ailleurs, l'école craque – un constat que j'avais malheureusement déjà dressé l'an dernier, mais la situation, déjà catastrophique, continue de se dégrader. Il n'est pas acceptable qu'aujourd'hui, en France, des petites filles et des petits garçons à la rue, soient contraints de survivre. Les personnels et les parents se mobilisent – j'étais avec eux à Créteil le mois dernier –, mais celles et ceux qui sauvent les enfants d'une nuit sur le trottoir et qui les accueillent dans les écoles ne récoltent aujourd'hui que des sanctions. Il n'est pas non plus acceptable qu'aujourd'hui, en France, un enfant sur cinq arrive à l'école le ventre vide. Une fois en classe, les élèves s'entassent dans des salles qui débordent. Pourtant, des fermetures sont encore annoncées pour la rentrée prochaine à Créteil, Orly et Choisy-le-Roi, trois communes de ma circonscription. C'est un engrenage infernal : vous fermez des classes ; celles qui restent se retrouvent surchargées, et les parents qui en ont les moyens fuient dans le privé, entraînant de nouvelles fermetures de classes.
Face à cette urgence, quelles sont les priorités du gouvernement Attal ? Une nouvelle cure d'austérité de 10 milliards d'euros, qui se traduit cette fois par la suppression de plus de 4 000 postes d'enseignants et de plus de 4 000 postes d'assistants d'éducation et d'accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH). À ces décisions s'ajoutent un « choc des savoirs » rejeté par tous et la création de groupes de niveaux, qui n'aboutiront qu'à trier les élèves plutôt que de leur permettre de progresser tous ensemble. L'urgence est donc bien de répondre aux besoins des élèves et des personnels.
Dans ma circonscription, depuis l'abandon d'un projet de nouveau collège, on gère la pénurie d'enseignants par un sureffectif permanent. Au collège Émile-Zola, établissement classé en réseau d'éducation prioritaire (REP), le plafond de vingt-cinq élèves par classe ne pourra pas être respecté à la rentrée prochaine. Certains collégiens du Val-de-Marne n'ont pas eu un seul cours de français depuis le mois de septembre.
Les parents, les syndicats, font des propositions ; nous, Insoumis, avons déposé des amendements, mais aussi des propositions de loi, qui tendaient à garantir la gratuité réelle de l'école à tous les niveaux – cantine, matériel et sorties scolaires –, à permettre le recrutement de psychologues, d'infirmières, d'assistantes sociales, à améliorer la rémunération des personnels, à titulariser les contractuels ou encore à créer un statut pour les AESH. Des solutions sont donc sur la table.
Comme vous l'avez déjà fait en 2022 et en 2023, vous avez promis qu'il y aurait un professeur devant chaque élève à la rentrée prochaine – un engagement renouvelé par Mme Nicole Belloubet, ministre de l'éducation nationale, qui avait pourtant visiblement mieux à faire ce matin que d'être là pour répondre aux questions des députés sur la situation de l'école aujourd'hui. Madame la ministre, comment cette promesse se traduira-t-elle concrètement ?
La parole est à Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées.
Permettez-moi de rappeler que le budget de l'enseignement scolaire, qui atteint 84,6 milliards d'euros en 2024, représente le premier poste de dépenses de l'État. Doté de 3,8 milliards d'euros de plus qu'en 2023, il est même en hausse de 4,7 % : on ne saurait donc parler d'austérité. Les annulations de crédits décidées la semaine dernière ne remettent d'ailleurs absolument pas en question – j'insiste sur ce point – les créations de poste prévues, notamment pour soutenir le déploiement, à la rentrée 2024, du choc des savoirs voulu par le Premier ministre, mais également pour achever le dédoublement des classes de grande section de maternelle, CP et CE1 des établissements en REP, car il y va de l'égalité des chances, ou encore augmenter le nombre d'AESH – un sujet qui me tient, vous le savez, particulièrement à cœur. Ces moyens sont sanctuarisés et permettront une très nette amélioration du taux d'encadrement dans le premier degré.
Néanmoins, la répartition de cette enveloppe doit tenir compte d'une démographie scolaire en très forte baisse – un constat que l'on ne peut que déplorer. À la rentrée 2024, l'éducation nationale comptera ainsi 83 000 élèves en moins au niveau national.
S'agissant plus particulièrement du Val-de-Marne, malgré une diminution de 4,9 % du nombre d'élèves du premier degré entre 2017 et 2023 – soit une perte de 6 812 élèves –, le taux d'encadrement a été significativement amélioré, puisque le nombre moyen d'élèves par classe est passé de 24,4 en 2017 à 22,1 à la rentrée 2023. Et même si le département devrait de nouveau perdre 952 élèves à la rentrée 2024, il bénéficiera de la création de trente emplois, ce qui améliorera encore ce taux d'encadrement.
À l'échelle de l'académie de Créteil – une de celles qui profiteront le plus des mesures que nous avons prises –,…
…nos efforts se sont traduits par la création de 100 équivalents temps plein (ETP) d'enseignants en 2022, 70 en 2023 et 225 en 2024.
Je tiens également à rappeler l'importance d'autres dispositifs, comme la distribution de petits-déjeuners ou la cantine à 1 euro, déployés depuis la rentrée scolaire de 2019, principalement dans les écoles relevant de l'éducation prioritaire, afin d'éviter que les enfants arrivent à l'école le ventre vide. Dans le Val-de-Marne, plus de 600 élèves scolarisés dans quarante-quatre écoles ont pu bénéficier de ces dispositifs en 2022 et 2023, ce qui représente la prise en charge, par l'éducation nationale, de près de 85 000 petits-déjeuners.
Enfin, les familles des élèves scolarisés dans le second degré peuvent aussi bénéficier d'aides grâce aux bourses et aux fonds sociaux prévus pour les collégiens et lycéens.
Vous constaterez donc, madame la députée, que nous sommes loin de l'austérité que vous dépeignez.
La parole est à M. Damien Adam, pour exposer sa question, n° 592, relative à la maison d'arrêt de Rouen.
Madame la ministre déléguée, je voudrais vous parler ce matin non pas d'une bonne nouvelle, mais de Bonne-Nouvelle, puisque c'est ainsi que l'histoire a voulu que soit baptisée la maison d'arrêt de Rouen. Dans un courrier de décembre dernier, les syndicats de la maison d'arrêt sonnaient l'alerte au sujet de la vétusté de cette prison inaugurée en 1860. Si elle n'est pas récente, la vétusté de l'établissement atteint aujourd'hui des proportions inquiétantes et représente un danger. En décembre, quarante-cinq cellules et une salle d'activités ont ainsi dû être fermées en raison d'infiltrations d'eau fragilisant l'édifice.
Lors d'une visite de la maison d'arrêt à la suite de cette alerte, j'ai pu constater une dégradation de la situation. L'administration de M. le garde des sceaux a réagi rapidement – je tiens à l'en remercier –, et des travaux d'urgence ont commencé afin que les quarante-cinq cellules fermées puissent rouvrir dans les prochaines semaines. Les premières analyses de l'audit de structure lancé pour déterminer l'état précis de la situation et les travaux à réaliser font état de faiblesses sur cinq pignons de la prison – une découverte qui a d'ailleurs conduit à l'évacuation en urgence d'une cinquantaine de détenus le jeudi 8 février, qui s'ajoutent donc aux quatre-vingt-dix détenus déplacés en fin d'année dernière.
Madame la ministre, pouvez-vous nous indiquer où en sont les travaux d'urgence ? Quand les conclusions de l'audit seront-elles rendues et le coût estimé des travaux connu ? Ces derniers doivent être réalisés le plus rapidement possible pour assurer la sécurité des détenus et des personnels.
Au-delà de cette situation conjoncturelle, il est temps de réfléchir à l'avenir et de se projeter quinze à vingt ans dans le futur. Alors que 9,5 millions d'euros y ont déjà été investis entre 2010 et 2024, la maison d'arrêt nécessitera chaque année davantage d'investissements car les bâtiments continueront de se dégrader, entraînant des problèmes opérationnels. Nous devons donc envisager son déménagement dans une commune limitrophe, sur un nouveau site à proximité du tribunal judiciaire. Le foncier ainsi libéré pourrait être utilisé pour créer une véritable cité judiciaire à Rouen, un projet imaginé par le passé avant d'être abandonné. L'actuel bâtiment du tribunal judiciaire de Rouen, aussi beau soit-il, n'est pourtant plus adapté à la justice du XXI
La parole est à Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées.
Je vous prie tout d'abord d'excuser M. le garde des sceaux, qui vous remercie pour cette question et salue votre engagement, aux côtés de la sénatrice Agnès Canayer, pour la prison de Rouen.
Si la prison est évidemment nécessaire pour protéger nos concitoyens, les conditions d'incarcération, vous l'avez rappelé, doivent être dignes. Le Gouvernement est pleinement mobilisé sur cette question : il y va de la bonne santé de notre démocratie autant que du quotidien de nos agents pénitentiaires, auxquels je souhaite rendre hommage car ils effectuent un travail remarquable.
Ainsi, une enveloppe de 3,5 millions d'euros permettra de réaliser les opérations de maintenance les plus urgentes en 2024. À ce titre, le renforcement de certains murs pignons et d'éléments de charpente en bois détériorés sera ainsi effectué en priorité. En outre, dans l'attente de l'achèvement du diagnostic structurel, des mesures conservatoires seront déployées à court terme. Ces prérequis à l'opération de renforcement structurel permettront de garantir la sécurité des détenus et des personnels. Le nombre de détenus a été provisoirement réduit, ce qui a permis d'intervenir le mois dernier sur la structure des coursives d'une des ailes de l'établissement.
Les travaux de rénovation envisagés consisteront en la réfection complète de la couverture, le rejointoiement des façades en briques, le remplacement des menuiseries extérieures, la reprise intégrale des installations de plomberie, des sanitaires, de la ventilation et des installations électriques, ainsi que la réfection des cours de promenade et du mur d'enceinte. Un comité de suivi a été constitué pour suivre l'état d'avancement de cet ambitieux plan d'action.
Plus généralement, le budget consacré à la rénovation des prisons a connu une hausse importante ces cinq dernières années, puisqu'il avoisine 140 millions d'euros par an, soit deux fois plus qu'avant que nous n'arrivions au pouvoir, en 2017. Nous sommes donc pleinement mobilisés sur cette question.
Je vous remercie pour ces premiers éléments de réponse, mais je répète qu'au-delà des réparations indispensables à court terme, nous devons envisager le déménagement de cette prison vieille de plus de 150 ans, et qui n'offre plus des conditions d'enfermement et de détention adaptées au XXI
Alors que les travaux à réaliser seront plus chers chaque année, nous devons, dans un souci d'économies et d'efficacité, envisager de déménager la prison sur un nouveau site dans une commune limitrophe, ce qui coûtera finalement beaucoup moins cher à l'administration française, tout en assurant des conditions de détention adaptées à notre siècle.
La parole est au président Stéphane Travert, pour exposer sa question, n° 591, relative au dispositif Asalée.
Je souhaite vous interroger sur la situation des infirmières du dispositif Action de santé libérale en équipe, dit Asalée, dont la principale mission est l'éducation thérapeutique des patients. Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), celle-ci vise à aider les patients à acquérir ou maintenir les compétences dont ils ont besoin pour gérer au mieux leur vie avec une maladie chronique. Créé en 2004, ce dispositif financé par l'État est salué par tous les acteurs de la communauté médicale. La coopération entre les médecins généralistes et les infirmières dans l'ensemble du territoire est une réussite : en valorisant de nouvelles compétences paramédicales, Asalée a notamment permis de faciliter les parcours de soins des patients tout en permettant un gain de temps indispensable et très important pour les médecins.
Aujourd'hui, 800 médecins généralistes coopèrent avec plus de 1 800 infirmières pour apporter à près de 1 million de patients une offre de soins et une prise en charge de qualité, qui allie écoute et proximité. En outre, le dispositif favorise le dépistage précoce : pour être engagée en faveur des politiques de prévention, vous savez, madame la ministre, combien le conseil et le travail des infirmières d'Asalée sont importants.
Le dispositif Asalée remplit donc une véritable mission de service public, en particulier dans les territoires ruraux, comme dans mon département de la Manche. Pourtant, depuis la fin de l'année 2023, la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam) ne prend plus en charge les loyers pour l'hébergement des infirmières du dispositif Asalée. Vécue de manière brutale, cette décision, prise sans concertation particulière, a provoqué un émoi important et une inquiétude légitime chez les professionnels, qui se sont mobilisés, mais aussi chez les élus locaux, car cette absence de financement nuira à l'égalité territoriale que nous réclamons tous.
Madame la ministre, quelles mesures pourrions-nous créer ensemble pour prendre en compte la situation des infirmières du dispositif Asalée et prévenir le risque d'une sorte de casse du dispositif ? Asalée remplit une mission de service public indispensable dans les territoires ruraux, nous devons le défendre.
La parole est à Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées.
Monsieur le président Travert, je vous félicite pour votre élection à la tête de la commission des affaires économiques. Votre question porte sur le financement des locaux par l'assurance maladie dans le cadre du dispositif Asalée. La formation, la rémunération et la mise à disposition des infirmiers Asalée par l'association du même nom permettent à des milliers de médecins et de structures d'exercice coordonné d'améliorer leurs pratiques et de libérer du temps médical. Le financement du dispositif est encadré par une convention financière, conclue entre l'association Asalée et l'assurance maladie, et qui détaille les dépenses prises en charge par cette dernière, habilitée à auditer les comptes de l'association.
Or, dans ses derniers rapports d'audit, l'assurance maladie a constaté que l'association avait contracté des baux commerciaux avec des médecins et des structures d'exercice coordonné pour prendre en charge, en plus du salaire de l'infirmier, le loyer occupé par ce dernier dans le local du médecin ou dans la structure d'exercice coordonné, alors que la convention conclue entre l'assurance maladie et l'association ne prévoit pas le financement des loyers de l'espace occupé par les infirmiers Asalée. L'assurance maladie a fait part aux dirigeants de l'association de ses réserves sur cette prise en charge. Toutefois, les échanges entre l'association et les pouvoirs publics se poursuivent actuellement pour faire évoluer le dispositif afin d'en sécuriser les bénéfices et de maintenir le rythme de son déploiement, tout en garantissant la soutenabilité du subventionnement par l'assurance maladie.
La parole est à M. Jérôme Legavre, pour exposer sa question, n° 580, relative à la clinique Vauban de Livry-Gargan.
Ma question porte sur la situation de la clinique Vauban de Livry-Gargan, en Seine-Saint-Denis. Son propriétaire, le groupe Avec, après avoir refusé de répondre aux recommandations de l'agence régionale de santé (ARS), a décidé, le 12 juin 2023, de cesser l'activité de maternité puis de chirurgie qu'effectuait cette clinique. L'ARS en a « pris acte ».
Le département de la Seine-Saint-Denis est reconnu comme un désert médical avancé. Seuls sept habitants sur dix ont un médecin traitant. L'espérance de vie de la population est inférieure à la moyenne régionale, mais le taux de pauvreté y est le double. Seules six femmes enceintes sur dix réalisent les trois échographies de suivi recommandées aujourd'hui. Plus de cinq enfants sur mille meurent avant l'âge d'un an, soit 36 % de plus que la moyenne nationale.
Il est donc impossible de se résoudre à « prendre acte » de la disparition d'une maternité, d'un service de chirurgie, de six blocs opératoires pour lesquels des financements publics ont été versés, ou de consultations non programmées que fréquentent plus de 20 000 patients chaque année. Ajoutons pour être complet que cette clinique était le deuxième centre d'interruption volontaire de grossesse (IVG) du département. Il n'est pas possible non plus d'entendre – comme l'affirmait encore récemment l'ARS – que les établissements environnants absorbent l'activité qui était assurée à Vauban. Ils ne le peuvent pas car leur état ne leur permet pas de le faire.
La situation sanitaire va donc continuer à se dégrader très dangereusement. L'offre de soins sur le site de Vauban doit être rétablie. La puissance publique, l'État, doivent prendre leurs responsabilités. C'est ce que demandent la population, la municipalité, les syndicats et de nombreux médecins. C'est l'exigence que j'ai transmise à vos services le 14 décembre dernier avec le maire de Livry-Gargan.
Une table ronde va être organisée le 6 mars prochain sous la responsabilité de l'ARS. Il serait aberrant de recourir une nouvelle fois à un investisseur privé et de relancer le cycle infernal des liquidations et reprises qui a rythmé l'activité de cette clinique. J'estime que l'hôpital public doit constituer le socle de sa refondation, ainsi que l'autorité médicale et juridique qui organise l'avenir de ce site. Chacun, et en premier lieu l'État, doit prendre ses responsabilités. Madame la ministre, sans préjuger des résultats de la table ronde que j'espère fructueuse, quelles actions comptez-vous entreprendre pour empêcher le désastre qu'entraînerait la disparition définitive de l'offre de soins sur le site de la clinique Vauban ?
La parole est à Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées.
Vous évoquez la fermeture de la clinique Vauban depuis son placement en liquidation judiciaire, en juillet 2023. Je tiens tout d'abord à rappeler que les décisions prises par l'ARS d'Île-de-France faisaient suite à des défauts de qualité des soins dispensés au sein de cette clinique, constatés en juin 2023 lors d'une inspection sur site. Ces manquements avaient conduit à des événements indésirables graves associés aux soins et à la mise en danger des patients accueillis au sein de l'établissement. Le retrait des autorisations d'activités de soins a fait suite à l'incapacité du groupe à suivre les injonctions qui résultaient des manquements graves constatés aussi bien en obstétrique et en chirurgie qu'en médecine.
Si notre objectif est bien entendu de garantir une offre de soins de qualité qui réponde aux besoins des Livryens et des Livryennes, il est d'abord et avant tout d'assurer la sécurité et la qualité des soins. L'État s'est bien entendu mobilisé pour limiter l'impact de la fermeture de la clinique Vauban. Tous les usagers concernés ont pu être réorientés et bénéficier d'une offre de soins de proximité. Les professionnels de santé libéraux qui exerçaient sur le site ont pu poursuivre leurs activités, car le maire de Livry-Gargan, en lien avec l'ARS, leur a immédiatement proposé de nouveaux locaux, sans attendre la création du futur pôle de santé de spécialités, actuellement en projet.
Enfin l'ARS a accepté, à votre demande, de participer à une table ronde dans les prochaines semaines, associant élus, professionnels libéraux impliqués, la communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS) de Livry-Gargan, le groupement hospitalier de territoire (GHT) Grand Paris Nord-Est et le groupe Ramsay, afin qu'un travail collectif conduise à l'amélioration de l'accès aux soins de la population. Comme vous pouvez le constater, l'État est pleinement mobilisé, aux côtés des acteurs locaux, pour trouver des solutions qui garantissent la prise en charge sécurisée des patients.
J'entends qu'un pôle de santé est en projet et je m'en réjouis. J'insiste néanmoins sur un point de ma question : de mon point de vue – et pas seulement du mien – c'est à la puissance publique, donc à l'hôpital public, d'être le socle et l'autorité de tutelle de l'activité médicale qui devrait être relancée sur le site de l'ex-clinique Vauban. J'émets en outre les plus grandes réserves quant à votre affirmation selon laquelle la population a continué à bénéficier d'une offre de soins et que tout le monde a pu être pris en charge. L'un des établissements hospitaliers les plus proches de Livry-Gargan est l'hôpital d'Aulnay, dont les urgences étaient fermées l'été dernier. Votre affirmation est donc hasardeuse. Toutefois, j'ai entendu vos annonces. Nous allons donc continuer à nous mobiliser et, au besoin, nous reviendrons vers vous.
La parole est à Mme Cécile Rilhac, pour exposer sa question, n° 593, relative à la désertification médicale du Val-d'Oise.
Garantir l'accès aux soins pour tous nos concitoyens, sur l'ensemble du territoire, est un engagement de la majorité. Nous avons voté la suppression du numerus clausus, nous avons voté la proposition de loi portant amélioration de l'accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé, de notre collègue Stéphanie Rist, ainsi que la proposition de loi visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels, de M. Frédéric Valletoux, désormais ministre délégué. Cependant, malgré cet arsenal législatif de grande ampleur, nos territoires s'enfoncent dans la désertification médicale – c'est notamment le cas de ma circonscription du Val-d'Oise, en région parisienne.
Contrairement aux idées reçues, les déserts médicaux ne concernent pas seulement la province ou les zones rurales mais également les grandes aires urbaines, notamment l'Île-de-France. Dans le Val-d'Oise, la désertification médicale ne cesse de gagner du terrain. La moyenne de médecins par habitant y est inférieure à la moyenne nationale. Pourtant, ce territoire, dont la population est l'une des plus jeunes de France, est en expansion démographique continue et cette cadence s'est accélérée depuis la période de la crise du covid-19, créant une exception nationale. Dans ce contexte, il est impératif de garantir l'accès aux soins pour l'ensemble des habitants. Cependant, ce défi semble de plus en plus difficile à relever, notamment dans ma circonscription, qui ne possède ni centre hospitalier ni même clinique privée.
Dans les communes de ma circonscription, les départs à la retraite des médecins généralistes peinent à être compensés. Alors que la population augmente, le nombre de médecins diminue. En conséquence, trouver un médecin généraliste, dans la troisième circonscription du Val-d'Oise, devient de plus en plus difficile. L'obtention de rendez-vous avec des spécialistes, tels que les ophtalmologues, les dermatologues, les gynécologues ou encore les pédiatres, demande des délais d'attente de plus en plus longs. Les maires tentent, par tous les moyens, de trouver des solutions aux problèmes de désertification médicale en développant des projets de cabinets médicaux ou de maisons de santé, tels que ceux qui ont été créés, au cours des dernières années, à Taverny, à Beauchamp ou encore à Frépillon.
Grâce au soutien de l'État, une cabine de téléconsultation médicale a également pu être mise en place à Herblay-sur-Seine. Alors que les projets d'aménagement urbain se développent dans ma circonscription, les élus locaux ont à cœur de créer des conditions d'accueil matérielles et financières attractives pour les professionnels de santé. C'est notamment l'exigence que se sont fixée les programmes de développement urbain de Bessancourt ou de Montigny-lès-Cormeilles, qui verront le jour dans les prochaines années.
Cependant, malgré tous ces dispositifs, les difficultés subsistent. La moyenne d'âge des médecins est de 55 ans dans le Val-d'Oise ; les jeunes médecins s'installent peu dans ce département, bien que des dispositifs d'incitation financière soient mis en place par les intercommunalités. Depuis 2017, j'interpelle les autorités locales et nationales sur ce problème. Récemment encore, j'ai demandé à l'agence régionale de santé (ARS) d'Île-de-France de développer la formation des personnels médicaux et paramédicaux dans mon territoire, pour favoriser leur installation dans nos quartiers. Malgré cela, les alertes de mes concitoyens sont toujours aussi nombreuses et, aujourd'hui, c'est dans cet hémicycle que je veux relayer leurs préoccupations légitimes, pour ne pas dire leur désespoir.
Madame la ministre, il y a urgence. Plus que jamais, les communes et les habitants de ma circonscription ont besoin du soutien de l'État pour faire reculer la désertification médicale. Aussi, connaissant l'engagement du Gouvernement pour garantir l'accès aux soins pour tous les citoyens et partout sur notre territoire, pouvez-vous m'indiquer quelles actions, à court terme, sont envisageables pour renforcer la lutte contre la désertification médicale, qui ne cesse de gagner du terrain dans mon département du Val-d'Oise ?
La parole est à Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées.
Vous m'alertez sur la démographie médicale insuffisante du Val-d'Oise, en particulier sur la situation préoccupante de Cormeilles-en-Parisis. Cette commune est classée en zone d'intervention prioritaire (ZIP) renforcée concernant la densité médicale : elle est soutenue à ce titre par les pouvoirs publics. Les praticiens y bénéficient d'aides qui ont permis l'installation de deux médecins généralistes en 2022, un médecin généraliste en 2023 et un dermatologue en 2024. Enfin, la commune est couverte depuis la fin de l'année 2023 par la communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS) Ouest Parisis, qui permettra aux professionnels de santé du territoire de mieux s'organiser entre eux et ainsi d'améliorer l'accès aux soins sur ce territoire déficitaire.
De façon plus globale, les déserts médicaux sont une préoccupation majeure pour nos concitoyens et pour le Gouvernement. C'est un des chevaux de bataille de mon collègue Frédéric Valletoux, ministre délégué chargé de la santé et de la prévention. C'est lui qui a défendu, lorsqu'il était député, la proposition de loi visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels, texte promulgué en fin d'année 2023. De plus, la fin du numerus clausus permettra – vous l'avez rappelé – d'améliorer l'offre de santé d'ici à quelques années. Par ailleurs, c'est avec des solutions locales que nous luttons contre le phénomène de la désertification. Dans votre territoire, en 2023, l'ARS a renouvelé son protocole d'accord avec l'union régionale des professionnels de santé (URPS) Médecins pour la période 2023-2027. Il vise à répondre aux besoins de santé des Franciliens et à soutenir l'exercice professionnel en Île-de-France. Comme vous le voyez, nous sommes pleinement mobilisés et un protocole est en cours d'élaboration.
Je vous remercie, madame la ministre, pour ces premiers éléments de réponse. Je me permets néanmoins d'insister : il serait très important pour le Val-d'Oise que l'hôpital de Pontoise puisse bénéficier de formations, en devenant, si ce n'est un centre hospitalier universitaire (CHU), du moins un centre de formation permanente des professionnels de santé (CFPPS). Enfin, dans ma circonscription, j'avais proposé trois questions au Gouvernement : mes concitoyens, à plus de 75 %, ont opté pour la question du désert médical, devant celle des transports et même devant les préoccupations relatives au coût de l'électricité.
La parole est à M. Victor Habert-Dassault, pour exposer sa question, n° 589, relative à l'avenir des centres sociaux ruraux.
Dans l'Oise comme dans d'autres départements, il y a des déserts. Vous avez le choix entre la disparition des services publics ou des commerces de proximité, les déserts médicaux – ils viennent d'être évoqués – et les fermetures de classes, même si, dans ma circonscription, nous venons in extremis de sauver des classes à Ansauvillers, à Rochy-Condé et à Bonneuil-les-Eaux grâce à la mobilisation des élus, des parents et des enseignants.
Aux déserts s'ajoute l'isolement social d'une population vieillissante ou touchée par la précarité. Alors, animés par un désir d'agir, des élus locaux et des volontaires se sont rapprochés pour créer du lien, en faisant preuve de volonté, d'imagination et de beaucoup de bon sens. Les centres sociaux ruraux vivent au rythme des difficultés et des tensions collectives. Ils sont devenus au fil du temps des maillons indispensables de nos territoires grâce à des actions d'animation sociale, éducative et culturelle et à des outils de lutte contre l'exclusion.
Ils sont habitués à s'adapter, à organiser des événements avec les moyens du bord, à serrer des budgets toujours plus restreints. Mais, maintenant, la coupe est pleine car les sommes réclamées sont hors de leur portée. En raison de l'inflation, les assistants sociaux ont obtenu une meilleure rémunération – je me réjouis de cette excellente nouvelle pour eux qui accomplissent leur travail avec passion et détermination.
En revanche, comment les centres sociaux peuvent-ils intégrer cette hausse des salaires ? D'autant qu'à cette revalorisation du travail s'ajoute une augmentation importante des charges avec l'envolée des prix de l'alimentation, de l'énergie, des transports et des produits d'hygiène.
« Fermer un jour pour ne pas fermer toujours », pouvait-on lire sur des banderoles à l'entrée des centres sociaux ruraux. À bout de souffle, à bout de sous, à bout de tout, certaines structures sont tentées de réduire leurs horaires d'ouverture ou leurs périodes d'accueil, d'autres de suspendre les repas ou de baisser la qualité des activités proposées.
Madame la ministre, comment sanctuariser les financements dans le temps ? Il est impossible de demander toujours plus aux collectivités. Elles sont également en difficulté puisqu'on leur réclame d'agir toujours davantage, avec toujours moins de moyens. Comment pouvez-vous aider les centres sociaux ruraux à ne pas renoncer à des actions sociales d'une grande nécessité ?
La parole est à Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées.
Monsieur le député, vous avez raison de rappeler l'importance pour les territoires ruraux des 2 373 centres sociaux et des 1 668 espaces de vie sociale. Le Gouvernement est mobilisé en faveur de leur déploiement, notamment avec les mesures présentes dans la convention d'objectifs et de gestion pour 2023 à 2027 signée le 10 juillet dernier. Toutes les conventions collectives du secteur prévoient des augmentations salariales dont on peut se réjouir car elles revalorisent des métiers indispensables.
Nous sommes toutefois conscients du coût que cela représente pour les centres sociaux, associatifs pour la plupart et parfois en difficulté, comme vous l'avez souligné. Afin d'en tenir compte, nous avons prévu une hausse des financements de 6 %. Elle permettra un relèvement du taux de prise en charge des prestations de services de la branche famille : de 40 à 42,4 % pour les prestations d'animation et de coordination – les fonctions de base d'un centre social – et de 60 à 63,6 % pour le financement des espaces de vie sociale et des référents familles.
Par ailleurs, nous soutiendrons financièrement la création de 611 structures, dans des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), dans des zones de revitalisation rurale (ZRR) ainsi que dans des territoires pour l'heure non dotés. En effet, nous voulons favoriser un maillage par ces structures des territoires faiblement couverts, comme ceux d'outre-mer.
Nous devons travailler tous ensemble, notamment avec les collectivités territoriales afin que cet effort soit amplifié au niveau local.
J'espère que les hausses dont vous avez parlé pourront compenser le coût de la revalorisation salariale évoquée, car les centres sociaux ruraux sont la clé de voûte de notre architecture sociale. Comme l'a dit l'ancien président de la République Jacques Chirac, « aucune civilisation n'a duré quand elle acceptait la fracture sociale des exclus ». C'est donc avec insistance que je vous demande de continuer vos efforts.
La parole est à M. Christophe Naegelen, pour exposer sa question, n° 584, relative à l'hôpital de Remiremont.
Madame la ministre déléguée, j'aurais beaucoup de questions à vous poser, notamment sur la situation des personnes en situation de handicap. Celle du jour portant sur l'hôpital public de Remiremont, je regrette que le ministre délégué chargé de la santé et de la prévention, Frédéric Valletoux, ne puisse être présent.
L'hôpital de Remiremont existe depuis cinquante ans. Les 800 personnes qui y travaillent fournissent un service essentiel à la population. Au crédit de cet établissement existent de nombreux éléments positifs qu'il est important de rappeler : l'engagement de son personnel, l'investissement récent dans un scanner unique dans le département des Vosges, le travail d'un certain nombre de médecins et de leurs équipes pour développer de nouveaux services nécessaires et attendus par la population.
Malheureusement, il existe aussi des points sur lesquels nous devons travailler. L'hôpital romarimontain a connu des crises successives. La plus importante est due au manque de praticiens, notamment au pôle mère-enfant ou au service des urgences. Il est aussi régulièrement attaqué par des médias nationaux, ce qui n'aide pas – il faut le dire clairement – à se relever d'une situation qui a été vraiment difficile.
Ma question est donc très simple : que compte faire le Gouvernement, que compte faire l'agence régionale de santé (ARS), pour nous aider à maintenir cet hôpital dans sa dimension actuelle, c'est-à-dire avec la possibilité pour toutes les femmes du territoire vosgien et franc-comtois de venir y accoucher ? Que comptent faire le Gouvernement et l'ARS pour qu'on puisse rouvrir le service des urgences, notamment la nuit ?
Lors de sa visite, l'année dernière, le ministre de la santé d'alors, Aurélien Rousseau, avait déclaré que l'hôpital de Remiremont était indispensable à son bassin de vie. Il a aussi dit qu'il n'avait malheureusement pas, au ministère, d'imprimante 4D pour « fabriquer » des médecins. Néanmoins, d'autres solutions existent pour garder cet hôpital, primordial dans notre zone de montagne. Je pense notamment qu'il faut former beaucoup plus de praticiens.
Madame la ministre, merci, donc, d'apporter si possible des solutions pour que Remiremont continue d'avoir un pôle mère-enfant et un service des urgences.
La parole est à Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées.
Monsieur le député, la ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées que je suis aura plaisir de discuter avec vous – je vous invite d'ailleurs dès à présent à venir au ministère.
En attendant, vous avez voulu appeler l'attention du ministre délégué chargé de la santé et de la prévention sur la situation des urgences et de la maternité de Remiremont.
La priorité absolue, que nous partageons tous, est d'assurer au sein de tout établissement la qualité et la sécurité des soins. Les difficultés que vous avez soulignées sont réelles. Nous en sommes conscients et sommes mobilisés pour essayer de trouver des réponses.
Depuis octobre 2023, date à laquelle vous aviez déjà interrogé le Gouvernement sur le sujet, et après les différents travaux d'inspection menés à l'automne, un travail en profondeur a été engagé, à l'échelle départementale, pour revoir l'ensemble des organisations et assurer l'accès aux soins et leur continuité dans ce territoire.
Une mission spécifique, en lien avec le centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Nancy, a permis de traiter les « irritants du quotidien » et d'engager une coopération entre les sites hospitaliers. Les résultats sont là : des renforts en ressources humaines et des unités mobiles hospitalières viennent aider Remiremont dans ce moment de très forte tension. L'objectif est bien de retrouver un fonctionnement normal aux urgences.
À la maternité, les départs de plusieurs médecins ont fragilisé les services. Comme pour les urgences, un travail de fond est engagé afin de renforcer la filière femme-mère-enfant et de permettre une prise en charge de qualité et en toute sécurité pendant tout le parcours de soins.
Pour ce travail de filière comme pour celui sur les urgences, les élus sont régulièrement réunis par l'ARS afin de partager les informations sur les avancées comme sur les difficultés qu'il s'agit de résoudre de manière constructive. Vous le voyez, nous avançons, nous demeurons pleinement mobilisés pour le centre hospitalier de Remiremont et nous resterons vigilants sur ce sujet.
L'hôpital de Remiremont va fêter ses cinquante ans. Je vais inviter votre collègue Frédéric Valletoux à s'y rendre, à y constater l'engagement de tout le personnel pour notre territoire. Je vous remercie pour la pertinence de vos réponses et vous assure que vous pouvez compter sur ma collaboration pour que l'hôpital continue à vivre.
La parole est à M. Elie Califer, pour exposer sa question, n° 603, relative à l'hébergement des malades ultramarins.
Je tiens à sensibiliser sur les difficultés que rencontrent les Ultramarins durant leur parcours de soins. Souvent contraints de quitter leur territoire pour bénéficier de soins spécifiques en France hexagonale, nombreux sont les malades qui doivent payer un loyer durant leur phase de convalescence, quand ils sont encore sous surveillance médicale, avec des rendez-vous réguliers, et qui ne peuvent prendre l'avion.
Déjà lourdes en temps normal, ces démarches présentent pour eux des difficultés de nature à compliquer leur convalescence. Dans un marché locatif tendu tel qu'on le connaît en ce moment, les caractéristiques des « locataires de passage », que ce soit les convalescents ou leurs proches, ne présentent que peu d'attraits pour des bailleurs à la recherche de contrats plus stables et moins pénibles à gérer.
Ceci a pour conséquence d'orienter les Ultramarins vers des logements touristiques particulièrement onéreux et dont la disponibilité fluctue selon la période de l'année. Il y a quelques semaines, un ancien malade me disait que ses proches et lui avaient dû débourser plus de 4 000 euros en un mois pour s'assurer un toit.
La convalescence coûte donc très cher pour un Ultramarin qui n'a pas de famille dans l'Hexagone. Dans une période où les populations vieillissent et où les pathologies sont anormalement nombreuses, il faut s'en préoccuper.
C'est pourquoi, madame la ministre, je souhaite savoir si la création d'hôtels de soins est envisagée dans des structures hospitalières hexagonales et, de manière plus générale, connaître les mesures que le Gouvernement entend prendre pour favoriser l'hébergement des convalescents ultramarins.
La parole est à Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées.
Monsieur le député, vous attirez l'attention de la ministre du travail, de la santé et des solidarités sur les difficultés que les patients ultramarins rencontrent durant leur parcours de soins quand ils doivent venir en métropole pour être soignés.
Les obstacles pour accéder à un logement sont réels. Ils ajoutent des contraintes dans une période compliquée pour des patients qui peuvent se retrouver éloignés de leurs proches.
Les hôtels hospitaliers apportent toutefois une première réponse. Ce dispositif a été généralisé depuis 2021, avec des dérogations permettant d'accueillir les patients ultramarins pour des durées longues. Il convient d'amplifier le nombre d'établissements ayant recours à ce dispositif qui fonctionne bien. En effet, seuls quarante-quatre établissements avaient eu recours aux hôtels hospitaliers en 2021.
Le Gouvernement souhaite également faciliter l'accès aux services sociaux des patients ultramarins contraints de venir se faire soigner en métropole, les aider à accéder à un logement temporaire et leur proposer un accompagnement administratif.
Plus spécifiquement, le comité interministériel des outre-mer du 18 juillet 2023 a dédié une mesure aux patients atteints d'un cancer. Deux axes de travail ont été identifiés : l'amélioration de la capacité à dépister les cancers et à encourager la prévention dans les territoires ultramarins, d'une part ; la réduction des délais de prise en charge et la refonte des parcours de soins, d'autre part.
Cette mesure est fondamentale pour renforcer l'accès aux soins dans les territoires d'outre-mer où le dépistage et la prise en charge des cancers souffrent de retards chroniques. Une détection anticipée pourrait permettre des prises en charge sur place et éviter des déplacements très onéreux.
En combinant toutes ces mesures, nous réduirons les obstacles auxquels sont confrontés les patients ultramarins pour accéder à des soins de qualité en métropole lorsqu'ils souffrent de maladies graves.
Votre réponse est très complète, madame la ministre. Vous avez énuméré les mesures susceptibles de conduire à ce que moins de patients soient contraints de se rendre dans l'Hexagone pour se soigner. Il est important d'en être informé. Néanmoins, votre réponse le montre, vous mesurez qu'il y a encore de nombreux efforts à accomplir dans les territoires ultramarins. Par ma question, je souhaitais insister sur la nécessité de fournir un accompagnement administratif, mais aussi de favoriser l'accès à l'hébergement pour les patients atteints d'un cancer ou d'une pathologie cardiaque qui subissent de tels frais de logement après leur opération.
La parole est à M. Paul-André Colombani, pour exposer sa question, n° 585, relative à l'exercice de la médecine libérale en Corse.
Après un premier échec, les négociations conventionnelles entre la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam) et les médecins libéraux ont repris péniblement. À ce stade des discussions, les professionnels de santé et l'ensemble des parlementaires de la Corse constatent avec regret que les spécificités de l'exercice de la médecine libérale en Corse n'ont pas été intégrées au nouveau projet de convention médicale.
Pourtant, vous le savez, la Corse, « île-montagne », cumule toutes les difficultés des régions à caractère géographique particulier : retard historique en matière d'infrastructures de transport, précarité socio-économique supérieure à la moyenne nationale, vieillissement de la population, multiplication du nombre d'évacuations sanitaires, forte saisonnalité. Qui plus est, ces difficultés affectent la seule région à ne pas posséder de centre hospitalier universitaire (CHU). Les tensions relatives à l'offre de soins y sont importantes et se répercutent nécessairement sur la médecine libérale. Le manque de structures hospitalières et la disparition de certaines spécialités médicales entraînent une surcharge des cabinets médicaux, dont la conséquence sera une perte de chances pour les patients. L'ensemble de ces données fait de la Corse une région peu attractive pour la médecine générale.
Malgré ce constat accablant, la Corse ne fait pas l'objet d'un chapeau spécifique dans la convention médicale, à la différence des zones de montagne et des territoires ultramarins. Pour pallier ce manque, un collectif de médecins libéraux insulaires a soumis au directeur général de la Cnam des propositions visant à rationaliser et améliorer l'offre de soins. Ils proposent notamment de créer de meilleures conditions de travail pour les praticiens et de mieux adapter la rémunération à la situation de l'île. Ces mesures apparaissent comme l'unique moyen de renforcer l'offre de soins et d'empêcher la vague massive de déconventionnements et de cessations d'activité médicale qui se profile. Le Gouvernement entend-il œuvrer à la reconnaissance des besoins spécifiques de la Corse dans la convention médicale ?
La parole est à Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées.
Les professionnels de santé libéraux constituent, vous l'avez dit, un pilier de l'organisation du système de santé. C'est particulièrement le cas en Corse – très beau territoire ! – du fait de la géographie qui en isole certaines zones. Compte tenu du rôle joué par les professionnels de santé de ville, il a été décidé de leur consacrer un chapitre particulier dans le projet régional de santé (PRS) pour les années 2023 à 2028, établi par l'agence régionale de santé (ARS) Corse en concertation avec les acteurs locaux.
Dans le cadre de la négociation de la nouvelle convention médicale, les partenaires conventionnels ont examiné les spécificités de ce territoire, où l'on dénombre 550 médecins libéraux. Une réunion de travail a été consacrée à ces enjeux. Cela a conduit l'assurance maladie à proposer notamment une augmentation significative des indemnités de déplacement dans les territoires de montagne et la création d'une majoration de déplacement spécifique à ces territoires. Les médecins du territoire corse, qui est presque intégralement une zone de montagne, bénéficieront particulièrement de ces deux mesures.
Toutefois, l'outil conventionnel n'est pas le plus adapté pour traiter des enjeux de territorialisation, sa vocation première étant de déterminer les nomenclatures pour la prise en charge des actes médicaux. Néanmoins, plusieurs adaptations spécifiques à la Corse ont déjà été mises en œuvre. Ainsi en est-il pour le déplacement des patients corses vers un établissement de santé situé sur le continent : depuis 2021, tous les assurés sociaux de Corse peuvent bénéficier de la prise en charge d'un second accompagnateur pour un transport lié à une consultation pour un enfant ou à l'hospitalisation d'un enfant. Cette mesure ne s'applique que pour les habitants de la Corse. Chaque année, l'assurance maladie enregistre environ 18 000 déplacements sur le continent pour des raisons médicales.
En outre, huit expérimentations innovantes dérogeant aux règles de tarification de droit commun sont en cours sur le territoire corse. Toutes ces mesures traduisent bien la volonté d'adaptation territoriale des politiques publiques nationales.
La loi du 27 décembre 2023 visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels offre un cadre concret pour territorialiser la réponse aux besoins de santé, de nouvelles missions ayant été confiées aux conseils territoriaux de santé (CTS).
Merci, madame la ministre. Vous savez toute l'affection que je porte à l'ancienne présidente de la commission des affaires sociales que vous êtes. Néanmoins, à l'instar de mon collègue Christophe Naegelen, je regrette que le ministre délégué chargé de la santé et de la prévention ne soit pas présent au banc pour répondre, car le compte n'y est pas. La convention médicale des médecins libéraux reconnaît les spécificités des territoires de montagne et des territoires ultramarins. Or la Corse présente des spécificités propres, qui ne relèvent ni d'une catégorie ni de l'autre. Il faut donc insérer dans la convention un chapeau spécifique à la Corse, afin de pouvoir adapter les mesures décidées. On doit faire une place à la Corse dans la convention, de même qu'on en a fait une aux territoires ultramarins.
La parole est à M. Jean-Marc Tellier, pour exposer sa question, n° 578, relative au handicap.
Depuis le début de mon mandat, j'ai pu mesurer les manques de la politique du handicap. C'est alarmant ; il est urgent d'agir. Tout au long de leur vie, les personnes en situation de handicap doivent faire face à de nombreux obstacles. Il en va de même pour leur entourage : j'ai reçu de trop nombreux parents qui n'arrivent pas à obtenir de place dans un établissement spécialisé ; faute de moyens humains et financiers, la scolarité de leur enfant est sacrifiée. La question du handicap est un combat des parents. Or ce devrait être aussi le combat de l'État.
Je pense à l'association La Maison d'Antoine, fruit d'un long combat de parents pour l'inclusion des personnes autistes. Certains parents sont confrontés à des difficultés pour la scolarité ; d'autres doivent faire face à la question des études et du travail. On nous parle d'égalité des chances dans les universités et les grandes écoles, mais l'égalité des chances est absente sur la question du handicap. J'ai rencontré dans ma circonscription une jeune fille dont la mobilité est réduite, et cela a représenté une difficulté supplémentaire dans ses études. Je ne peux accepter non plus qu'un jeune autiste ayant obtenu un diplôme universitaire ait des difficultés à s'insérer professionnellement. L'intégration des personnes en situation de handicap sur le marché du travail ne devrait pas être seulement une question de chiffres.
Si tous les combats sont appelés à être aussi complexes que celui de la déconjugalisation de l'allocation aux adultes handicapés (AAH), je n'ose imaginer le temps qu'il faudra pour améliorer la situation. Madame la ministre chargée des personnes âgées et des personnes handicapées, vous avez déclaré : « Maintenant, il faut mettre un coup d'accélérateur. » Comment comptez-vous traduire cette promesse en pratique ?
La parole est à Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes âgées et des personnes handicapées.
Merci pour votre question, monsieur Tellier. En avril 2023, lors de la sixième Conférence nationale du handicap (CNH), le Président de la République a présenté, pour les prochaines années, un plan d'action ambitieux en faveur des personnes en situation de handicap. Ce plan est appliqué par l'ensemble des ministères – je dis bien « l'ensemble » car je me dois de travailler avec tous mes collègues.
Le Gouvernement nourrit une véritable ambition en matière de mise en accessibilité. Nous avons créé un fonds territorial doté au total de 1,5 milliard d'euros pour améliorer l'accessibilité des infrastructures publiques et des établissements privés recevant du public. J'ai lancé ce fonds en présence de ma collègue Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des entreprises, du tourisme et de la consommation.
Désormais, chaque ministère prend en compte les besoins spécifiques des personnes en situation de handicap dans la conception des politiques publiques. La réforme de France Travail et le renforcement de l'école inclusive – l'éducation nationale apportant des réponses de premier niveau comme la fourniture de matériel adapté – relèvent de cette approche ambitieuse.
Afin de proposer à chacun, selon ses besoins, un soutien spécialisé et individualisé, j'ai lancé, en lien avec les territoires, un plan massif de création de 50 000 solutions médico-sociales supplémentaires, assorti d'un engagement financier de 1,5 milliard d'euros d'ici à 2030. Je tiens à souligner que toutes ces avancées et les sommes correspondantes sont sanctuarisées.
Lors de la CNH, le Président de la République s'est en outre engagé à ce que les fauteuils roulants manuels et électriques soient pris en charge par l'assurance maladie et les complémentaires santé. Cette promesse sera, bien sûr, tenue. C'est un enjeu de justice sociale. Je tiens également à rappeler que la déconjugalisation de l'AAH, que vous avez mentionnée, est effective depuis le 1er octobre 2023.
Je pourrais évoquer en détail d'autres mesures : la nouvelle stratégie nationale pour les troubles du neurodéveloppement, lancée en novembre dernier ; la stratégie Agir pour les aidants, leur engagement méritant toute notre attention ; la création, par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, d'un service public de repérage du handicap chez les enfants de 0 à 6 ans ; l'alignement des droits des travailleurs des établissements et services d'aide par le travail (Esat) sur ceux des salariés, voté cet automne lors de l'examen du projet de loi pour le plein emploi.
Nous avons beaucoup fait et, j'en conviens avec vous, nous avons encore beaucoup à faire. Il faut mobiliser l'ensemble de la société : non seulement les services qui relèvent de ma responsabilité, mais aussi le monde associatif, les collectivités territoriales, l'ensemble des citoyens. C'est une question de justice sociale. Il faut faire en sorte que les personnes en situation de handicap puissent vivre dignement et que leurs droits de citoyens soient respectés.
La parole est à Mme Christine Loir, pour exposer sa question, n° 602, relative à la réduction des charges sociales pour les TPE-PME.
Je me fais la porte-parole des commerçants et artisans de ma circonscription, qui sont à bout de souffle. Pour la plupart, ils ne peuvent plus se verser de salaire, ou si peu. Dans ses dernières annonces, le Gouvernement prétend vouloir défendre ceux qui se lèvent tôt, les travailleurs du quotidien qui font la richesse de notre pays. Pourtant, les boulangers, maçons, maraîchers, restaurateurs ou coiffeurs que je rencontre sont écrasés par les charges sociales.
Les patrons sont de plus en plus inquiets quant à l'avenir de leur entreprise. Faute de moyens, ils ne peuvent plus embaucher. L'augmentation des factures énergétiques, des cotisations sociales à verser à l'Urssaf et des contrôles, particulièrement stricts, crée une pression excessive pour les employeurs. Ils se retrouvent écrasés par les démarches administratives alors même qu'ils sont censés s'occuper de leur commerce. Un chef d'entreprise qui veut augmenter de 100 euros un de ses employés au Smic devra débourser 480 euros supplémentaires à cause de l'augmentation des charges sociales. Ajoutons à cela les refus de découvert et les difficultés pour contracter un prêt.
Mis bout à bout, tous ces problèmes condamnent les très petites, petites et moyennes entreprises (TPE et PME) et leurs employés ; elles ne peuvent pas s'en sortir. Preuve en est que le nombre de cessations d'activité augmente de nouveau : en 2023, d'après la Banque de France, 55 492 sociétés ont été concernées par l'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire. J'alerte le Gouvernement à ce sujet et lui demande de relâcher la pression sur les TPE-PME, afin de relancer l'activité économique. Grâce à elles, les centres-villes sont actifs et les petites communes se redynamisent ; c'est une France qui vit.
La parole est à M. Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics.
Merci pour votre question, madame Loir. Vous le savez, nous sommes aux côtés des PME, des TPE, des artisans et des commerçants, qui sont le poumon économique de nos territoires. Les PME et TPE emploient plus de 4,3 millions de salariés et créent 23 % de la valeur ajoutée.
Vous l'avez dit, des charges administratives souvent très lourdes pèsent sur les épaules de tous les indépendants, notamment des entrepreneurs et des commerçants. À la fin de sa journée, une fois qu'il a fermé sa boutique, un commerçant est amené à accomplir de nombreuses démarches administratives. Afin de relâcher la pression administrative qui s'exerce sur ces entreprises, Bruno Le Maire et Olivia Grégoire ont lancé un grand chantier de simplification.
D'autre part, nous continuons à encourager l'emploi : au niveau du Smic, l'État prend en charge près de 40 % des cotisations patronales. De plus, conformément au souhait du Premier ministre, nous avons confié à Antoine Bozio et Étienne Wasmer une mission visant à « désmicardiser » la France et à encourager les entreprises à augmenter les salaires, afin de redonner du pouvoir d'achat aux salariés.
Enfin, vous le savez, nous soutenons depuis 2019 les TPE et les PME dans le cadre de la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises, la loi Pacte, avec la suppression du forfait social sur les sommes versées au titre de l'intéressement et même au titre de l'épargne salariale qui représente une baisse de charges pour ces entreprises. Nous avons également diminué les impôts de production pour toutes les entreprises, jusqu'aux plus petites, avec la réduction de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et sa suppression pour environ 300 000 entreprises cette année, dont 82 % de TPE.
Vous le voyez, nous sommes au chevet des entreprises. La remontée des défaillances que vous avez évoquée est logique : elle correspond au contrecoup de la crise du covid-19 que nous avons traversée, durant laquelle les entreprises ont bénéficié d'une certaine protection. Dans tous les territoires, vous trouverez au sein du réseau de la direction générale des finances publiques des conseillers départementaux aux entreprises pour accompagner les chefs d'entreprise qui traverseraient des difficultés.
Monsieur le ministre délégué, je tiens tout de même à vous alerter car la situation est impossible pour certains. Quand des boulangers qui travaillent en couple plus de quinze heures par jour se versent un salaire de 500 euros chacun et me disent : « Nous ne pouvons pas embaucher parce que nous sommes pris par les charges », c'est vraiment parce que les charges pèsent trop lourd sur leurs épaules. Je ne peux pas entendre votre réponse.
La parole est à M. Éric Pauget, pour exposer sa question, n° 587, relative au déploiement de la téléphonie mobile et de la fibre.
J'appelle votre attention sur les difficultés que rencontrent les maires et de nombreux propriétaires riverains face au déploiement anarchique sur le territoire des antennes-relais de téléphonie mobile 5G, mais aussi de la fibre optique, notamment dans ma circonscription des Alpes-Maritimes.
Certes, le Gouvernement se doit de garantir à tous les Français l'accès effectif à des solutions de communication abordables et de qualité. Certes, l'accès à une connexion de qualité doit passer par le déploiement de la fibre, dont la généralisation sur l'ensemble du territoire est prévue d'ici à la fin de l'année 2025. Pour impérieuses que soient ces nécessités, celles-ci ne doivent néanmoins pas faire l'objet de dérives de la part d'opérateurs motivés par une logique commerciale simple et agressive, loin de la réalité patrimoniale des territoires.
Dans ma circonscription, les villages du Rouret et de Tourrettes-sur-Loup sont victimes de la multiplication tous azimuts de ces antennes-relais d'une hauteur de plus de 25 mètres. On ne peut que déplorer l'absence de concertation entre les élus locaux, actuellement impuissants, placés face au fait accompli, et les préfectures ainsi que les opérateurs privés. Pour compléter ce triste tableau, de nombreux désagréments sont également à déplorer dans le cas de la pose de la fibre, qui dénature par une installation disgracieuse la richesse du patrimoine architectural des villages de ma circonscription. Ces installations s'avèrent, de plus, peu fiables et fragiles car elles ne sont souvent pas réalisées dans les règles de l'art.
Une consultation obligatoire des maires en amont de toute nouvelle installation d'antenne et de la mutualisation de ces dernières entre les différents opérateurs serait plus que bienvenue. Cette politique de concertation tripartite entre les élus, les opérateurs et le préfet, que j'appelle de mes vœux et que je qualifierais de bon sens, doit pouvoir être menée en matière d'installation d'antennes-relais et de déploiement de la fibre. Parce que les Français et leurs élus attendent un déploiement écologiquement responsable et raisonnable des technologies de l'information et de la communication en même temps qu'une visibilité fine sur les intentions de déploiement des opérateurs, je souhaite que vous m'indiquiez si le Gouvernement entend prendre des mesures en ce sens.
La parole est à M. Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics.
Le Gouvernement a bien conscience de l'exaspération que peut susciter la multiplication des antennes dans certaines zones du territoire. C'est la raison pour laquelle beaucoup a été fait pour inciter à leur mutualisation. Dans le cadre du New Deal mobile et du dispositif de couverture ciblée, les opérateurs ont l'obligation de mutualiser les pylônes afin d'éviter leur trop grand nombre dans certaines zones et leur installation active lorsque celle-ci est déjà couverte par quatre opérateurs. D'autres obligations légales sont déjà appliquées, comme l'obligation de mutualisation en zone de montagne ou dans le cas du déploiement de la 5G en zone peu dense. Enfin, l'article 30 de la loi du 15 novembre 2021 visant à réduire l'empreinte environnementale du numérique en France, adoptée à l'initiative du sénateur Patrick Chaize, oblige désormais les opérateurs à justifier auprès du maire le choix de ne pas recourir à une solution de partage de site ou de pylône.
Grâce à l'ensemble de ces mesures, l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) indique, dans son dernier rapport annuel, que 70 % des antennes sont mutualisées entre les opérateurs. Concernant la fibre, dont je salue le taux de déploiement élevé dans votre circonscription – plus de 90 % à Antibes et 95 % à Vallauris –, les opérateurs sont soumis au respect des règles des architectes des bâtiments de France tant pour le déploiement aérien des fils que pour la pose des armoires de rue.
Par ailleurs, un plan de qualité du déploiement de la fibre, dont la secrétaire d'État chargée du numérique, Marina Ferrari, assure le suivi rigoureux, vise à réduire drastiquement les malfaçons et les dysfonctionnements des infrastructures que nous constatons parfois dans les territoires. Les dernières données publiées par l'Arcep montrent une amélioration encourageante de la qualité du déploiement de la fibre.
Il est primordial que le déploiement de ces infrastructures, source de meilleure connexion pour nos concitoyens, se fasse dans le respect de la législation, dans la transparence et dans le dialogue constant – j'insiste sur ce point – avec les élus. Le numérique constitue un puissant levier au service des territoires et de la réduction des fractures territoriales entre les villes et la ruralité, qui fait l'objet des politiques publiques menées ces cinq dernières années sous l'impulsion du Président de la République.
Nous sommes d'accord sur le fond ; c'est sur la forme que j'appelle de mes vœux cette concertation obligatoire et tripartite. Ce qui pose problème, c'est que la concurrence commerciale entre les opérateurs est féroce dans des territoires comme le mien et que les maires sont placés devant le fait accompli, sans pouvoir s'opposer à des antennes qui portent atteinte au paysage ou au patrimoine – toutes les décisions de justice leur sont défavorables. Ce que je demande, c'est qu'il y ait en amont, dans chaque département, une concertation entre les quatre ou cinq grands opérateurs et l'association des maires sous l'autorité du préfet pour établir une coordination qui tienne compte du patrimoine, du paysage et de la valeur architecturale de certains villages. Je vous assure que, dans ma circonscription, des villages typiques sont dénaturés par la prolifération de ces antennes. J'ai cité le village du Rouret : à terme, il doit y être installé douze antennes, dans un village de 4 000 habitants ! C'est l'ensemble du territoire français qui sera concerné.
La parole est à M. Nicolas Meizonnet, pour exposer sa question, n° 600, relative aux difficultés des manades de Camargue.
C'est en ma qualité de député de Petite Camargue que je m'adresse à vous. Lorsque le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, Marc Fesneau, que j'aurais aimé voir au banc, s'est rendu dans les départements du Gard et de l'Hérault, le 3 février dernier, à la rencontre des représentants syndicaux du monde agricole, il a été saisi du sujet très important des assurances des manadiers, les éleveurs de taureaux de Camargue.
Principalement situés dans le Gard, dans les Bouches-du-Rhône et un petit peu dans l'Hérault, ces élevages comptent parmi leurs principales activités la participation à des manifestations taurines telles que les courses camarguaises, les abrivades et les bandides, c'est-à-dire des spectacles traditionnels emblématiques de la culture locale. On dénombre environ 150 élevages de taille variable, ce qui représente environ 18 000 bêtes et 25 000 hectares de terres, et l'économie qui en découle représente au bas mot des dizaines de millions d'euros par an.
Les manadiers, déjà mis à mal par la crise sanitaire du fait de l'interruption des festivals pendant de longs mois, voient désormais leur existence menacée par un problème d'assurances. En effet, la loi dispose que l'éleveur propriétaire d'un animal est responsable en toutes circonstances des dommages causés par celui-ci. Ainsi, lors d'un spectacle traditionnel drainant un public important tel que l'abrivade, où les manadiers conduisent à cheval les taureaux dans les rues d'un village jusqu'aux arènes, s'il survient un accident en raison du mauvais comportement d'un spectateur, pourtant alerté des dangers potentiels, le manadier est tenu responsable de l'accident causé, quand bien même toutes les mesures de sécurité auraient été prises au préalable. En conséquence, les deux assureurs principaux des manadiers ont fait exploser les montants des cotisations en les multipliant par cinq, six ou sept, et refusent même d'assurer certains élevages.
Vous comprenez que si rien n'est fait, si les assureurs ne revoient pas leur position et si l'on ne fait pas en sorte que le gardien de l'animal soit exonéré lorsqu'il n'est pas fautif, quand le dommage résulte d'un risque accepté par la victime, c'est la mort des manades et des traditions camarguaises qui est au bout du chemin. J'ai d'ailleurs, avec mes collègues du groupe d'étude Camargue à l'Assemblée, déposé une proposition de loi en ce sens.
Ma question est donc simple : puisque Marc Fesneau a été saisi de ce dossier, et Bercy également, quelles solutions le Gouvernement compte-t-il apporter à cette difficulté ?
La parole est à M. Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics.
Les traditions taurines du Sud de la France, en particulier la course camarguaise, font partie intégrante du patrimoine de notre pays et constituent un élément central de la culture et de l'économie de la Camargue. Je tiens à vous assurer du soutien du Gouvernement à ces traditions. À l'occasion de ces événements, les services de l'État sont aux côtés des organisateurs et ils contribuent chaque année à la sécurité publique lors de ces manifestations.
Le Gouvernement est mobilisé pour que chacun, particulier, entreprise ou collectivité territoriale, puisse bénéficier d'une assurance adaptée aux risques auxquels il fait face, en contrepartie d'une responsabilisation par une plus grande prévention. Il y a quelques mois, j'avais répondu au sénateur du Gard Laurent Burgoa, qui m'avait interpellé sur la même question, que le Gouvernement veillerait à l'accès à l'assurance, dans des conditions de couverture raisonnable, des communes et manadiers organisateurs de fêtes camarguaises. Nous appelons donc à la mobilisation des assureurs mais aussi aux efforts de prévention les plus ambitieux possibles des organisateurs de ces fêtes afin de réduire les risques associés et de faciliter leur accès à l'assurance. Les services déconcentrés de l'État pourront aussi être mobilisés, tant pour ces efforts de prévention que pour l'accès à l'assurance.
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Questions sur le thème : « L'accès aux services publics dans les territoires ruraux » ;
Questions sur le thème : « Neuf mois après : un bilan du plan gouvernemental Agir contre la fraude ».
La séance est levée.
La séance est levée à douze heures quinze.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra