Publié le 28 octobre 2022 par : M. Ciotti, M. Boucard, M. Breton, M. Gosselin, M. Kamardine, M. Pauget, M. Pradié, M. Schellenberger.
Après l’alinéa 423, insérer les douze alinéas suivants :
« 4. ADAPTER NOTRE ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE AUX BESOINS ACTUELS - RÉHABILITER LA PRISON
« La prison ne doit être ni un principe, ni une exception. L’emprisonnement est une peine ordinaire parmi un ensemble de sanctions, qui doit pouvoir être prononcée par les juridictions en fonction de la gravité du délit commis et de la personnalité du délinquant. Toutefois, le constat doit être dressé de la difficulté de l’État à remplir pleinement sa mission d’appliquer une sanction à l’encontre de ceux qui ont enfreint la loi.
« La situation la plus critiquable actuellement est de vouloir faire de la prison une exception, faute de places pour enfermer les personnes prévenues ou condamnées. Notre politique pénale ne saurait être contingentée par des considérations matérielles.
« La France ne peut pas faire l’économie d’une adaptation de son parc carcéral afin notamment de garantir le respect du principe de l’encellulement individuel et de mettre à exécution les peines d’emprisonnement prononcées par les juridictions. Rappelons qu’au 1er septembre 2022, le parc pénitentiaire comptait 60 715 places opérationnelles pour 71669 détenus, tandis que la densité carcérale frôlait les 140 % dans les maisons d’arrêts. La densité carcérale moyenne française est de 118 % lorsque la moyenne européenne s’établit à 82,5 % en 2021.
« Au regard de l’évolution actuelle de la population carcérale, notre capacité d’emprisonnement devra atteindre les 80 000 places d’ici 2027, ce qui impose la création, en supplément du programme »15 000 places« en cours, de 6 000 places supplémentaires.
Cette augmentation des capacités d’hébergement de l’administration pénitentiaire devra permettre d’améliorer le taux de mise à exécution des peines d’emprisonnement prononcées par les juridictions pénales. Elle permettra également d’assurer des conditions plus dignes de détention, en conformité avec les règles européennes.
« Dans le cadre de ce nouveau programme immobilier, il est nécessaire de mettre en adéquation le besoin déterminé sur un territoire donné et l’offre carcérale. Dans cette optique, sera établie une cartographie des besoins pénitentiaires sur le ressort de chaque direction interrégionale, en fonction d’une part de l’activité judiciaire (nombre et du quantum des peines d’emprisonnement ferme prononcées), d’autre part du taux de détention pour 100 000 habitants de chaque inter-région.
« En effet, en construisant des établissements pénitentiaires, et plus particulièrement des établissements pour peine, dans des territoires au sein desquels le besoin carcéral est faible, l’administration pénitentiaire est contrainte, pour occuper les places disponibles, d’éloigner les personnes détenues de leurs attaches familiales. Cet éloignement est de plus en plus problématique.
« En revanche, au sein de territoires où le besoin carcéral est fort, comme en Ile de France, le déficit de places en établissements pour peine a pour conséquence un allongement des délais avant affectation dans ces structures et, mécaniquement, une tension au sein des maisons d’arrêt.
« Pour faire diminuer les coûts, dans un contexte de contraintes budgétaires fortes, une réflexion sera conduite sur la pertinence du cahier des charges des nouvelles structures, notamment en ce qui concerne leur sécurité passive. Cette sécurisation des établissements pénitentiaires a, en effet, un coût important.
« Si le niveau de sécurisation des sites pénitentiaires assure une parfaite exécution de la mission de garde confiée à l’administration pénitentiaire - le nombre d’évasions en France étant en effet l’un des plus faibles au monde - il est cependant légitime de s’interroger sur le caractère systématique de dispositifs de sécurité très lourds et donc très couteux.
« Cette sécurisation n’est souvent nécessaire, notamment en maison d’arrêt, que pour une minorité de personnes détenues. La population carcérale dans sa très large majorité ne présente pas de risque en termes d’évasion ou de violences.
« Ainsi convient-il de mener une réflexion sur la construction d’établissements pénitentiaires aux contraintes techniques allégées. Un certain nombre de détenus pour lesquels l’administration pénitentiaire confirmera qu’il n’y a aucun risque d’évasion ou d’incident majeur, ainsi que ceux qui sont placés en quartier de semi-liberté, pourront être incarcérés dans ces établissements. Une évaluation réalisée région par région devra déterminer le nombre de places à établir pour y parvenir. »
Le présent projet de loi d'orientation fait l'impasse sur l'institution judiciaire et l'administration pénitentiaire, alors que leurs missions sont étroitement liées à celles du ministère de l'Intérieur.
La programmation immobilière de l’administration pénitentiaire est marquée par le plan de création de 15 000 places supplémentaires à horizon 2027. Notre pays comptait 59 000 places de prison en 2017, ce programme porterait donc le parc pénitentiaire français à environ 74 000 places.
Or il est nécessaire aujourd'hui de lancer la construction de nouvelles places de prison, tant pour résorber la surpopulation carcérale (le taux d'occupation des maisons d'arrêt frôle les 140% en septembre 2022), que pour répondre au principe de l'encellulement individuel posé par la loi (seuls 42,9% des détenus ont bénéficié d'un encellulement individuel en 2021) et pour favoriser l'exécution des peines. Le programme de construction actuel de places de prison est trop lent et sous-dimensionné pour répondre à cet objectif.
Pour cela le présent amendement prévoit d'insérer dans le rapport annexé une partie relative à l'administration pénitentiaire prévoyant l'allocation de moyens à la construction de 6 000 places supplémentaires, pour un montant estimé à 960 millions d'euros sur cinq ans, afin d'atteindre un parc de 80 000 places de prison à l'horizon 2027.
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