Publié le 9 février 2024 par : M. Pradal, M. Lemaire, Mme Moutchou, Mme Poussier-Winsback, M. Albertini, M. Alfandari, M. Batut, Mme Bellamy, M. Benoit, Mme Carel, M. Christophe, M. Gernigon, Mme Félicie Gérard, M. Jolivet, M. Kervran, Mme Kochert, M. Lamirault, Mme Le Hénanff, Mme Magnier, M. Marcangeli, M. Patrier-Leitus, M. Plassard, M. Portarrieu, Mme Rauch, M. Thiébaut, M. Villiers, Mme Violland.
Après l’alinéa 4, insérer l’alinéa suivant :
« Les délits définis au présent article ne sont pas constitués lorsque la provocation s’accompagne d’une information claire et complète permettant de garantir la volonté libre et éclairée de la personne quant aux conséquences pour sa santé susceptibles de survenir lorsqu’une telle provocation a été suivie d’effet. »
Le présent amendement vise à préciser que l’infraction créée à l’article 4 du projet de loi ne serait pas constituée « lorsque la provocation s’accompagne d’une information claire et complète permettant de garantir la volonté libre et éclairée de la personne quant aux conséquences pour sa santé, susceptibles de survenir lorsqu’une telle provocation a été suivie d’effet ».
Le Groupe Horizons & apparentés estime que cette précision est indispensable à la sécurisation juridique du dispositif.
L'article 4 est essentiel en ce qu’il vise à réprimander plus efficacement la provocation à l’abandon ou l’abstention de soins ou à l’adoption de pratiques dont il est manifeste qu’elles exposent la personne visée à un risque grave ou immédiat pour sa santé. Le domaine de la santé, du bien-être, des soins et de l’alimentation est un enjeu majeur dans la lutte contre les dérives sectaires. Il est devenu nécessaire d’agir pour protéger la santé de nos concitoyens face aux risques des dérives sectaires et pour sanctionner les pratiques les plus dangereuses pour la santé des personnes. Or, le Conseil d’État a souligné une certaine fragilité juridique.
Dans son avis consultatif de 17 novembre 2023, le Conseil d’État notait que l’objectif de protection de la santé poursuivi par la création de cette infraction nouvelle est incontestable. Néanmoins, il s’inquiétait de son articulation avec les autres droits et libertés à valeur constitutionnelle (la liberté d’accepter ou de refuser un traitement médical spécifique, de choisir un autre type de traitement, la liberté d’expression et la liberté de communication des pensées et des opinions, la liberté de conscience).
S’agissant d’une part de l’atteinte portée à la liberté d’expression et à la liberté de communication des pensées et des opinions, il nous semble que la rédaction du présent article y porte une atteinte nécessaire, adaptée et proportionnée. En effet, afin de limiter les risques d’effets de bord, plusieurs critères cumulatifs sont nécessaires pour caractériser la nouvelle infraction : l’abandon ou l’abstention de suivre le traitement ou l’adoption de pratiques soit présenté comme bénéfique pour la santé (permet d’écarter tout risque d’effet de bord sur les convictions religieuses ou philosophiques), que le risque pour la santé soit manifeste au regard des connaissances médicales à la date des faits (ce qui n’interdit pas le débat sur des traitements émergents), que la personne visée par la provocation soit atteinte d’une pathologie, et que les conséquences pour la santé soient graves.
D’autre part, afin de limiter l’atteinte portée à la liberté d’accepter ou de refuser un traitement médical, la liberté de pensée et d’opinion, il nous semble nécessaire d’insérer l’alinéa prévu par le présent amendement. En effet, dès lors qu’une personne incitant une autre personne à remplacer un traitement par un autre a pu lui fournir une « information claire et complète permettant de garantir [une] volonté libre et éclairée (...) quant aux conséquences pour sa santé », cette dernière ne saurait être poursuivie pénalement ou tenue pour responsable des choix réalisés. Ces choix doivent être réalisés de manière libre et éclairée c’est-à-dire sans contrainte ni menace et en pleine conscience des risques encourus - excluant ainsi la capacité des personnes en état de sujétion physique ou psychologique qui ne sauraient être considérées comme en capacité d’exprimer une telle volonté. A l’inverse, si la personne concernée a pu exprimer une volonté libre et éclairée de remplacer un traitement médical par un autre traitement, alors même qu’elle était consciente des risques qui pouvaient survenir du fait de cet abandon, le délit de provocation ne saurait être caractérisé.
Tel est l’objet du présent amendement.
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