Publié le 7 octobre 2022 par : M. de Courson, M. Castellani, M. Lenormand, M. Mathiasin, M. Morel-À-L'Huissier, M. Naegelen, M. Serva, Mme Youssouffa.
La section II bis du chapitre I bis du titre III de la deuxième partie du livre premier est complété par un article 1609 sexdecies C ainsi rédigé :
« Art. 1609 sexdecies C. – I. – Il est institué une taxe sur les locations en France, y compris dans les départements d’outre-mer, de phonogrammes et de vidéomusiques destinés à l’usage privé du public dans le cadre d’une mise à disposition à la demande sur les réseaux en ligne.
« Pour l’application du présent article, est assimilé à une activité de location de phonogrammes ou de vidéomusiques, la mise à disposition du public d’un service offrant l’accès à titre onéreux ou gratuit à des enregistrements phonographiques ou vidéomusicaux, sur demande individuelle formulée par un procédé de communication électronique.
« Les services ci-dessus sont réputés mis à disposition du public en France lorsqu’ils sont effectués en faveur des personnes non assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée qui sont établies, ont leur domicile ou leur résidence habituelle en France.
« Cette taxe est due par les personnes qui louent, à toute personne qui elle-même n’a pas pour activité la location de phonogrammes ou de vidéomusiques, sous forme d’un abonnement payant via un service d’écoute en ligne à la demande des enregistrements phonographiques ou vidéomusicaux ou les mettent à disposition du public en ligne de façon gratuite afin que chacun puisse y avoir accès à la demande.
« II. La taxe est due par toute personne opérant un service susvisé, quel que soit son lieu d’établissement, en France ou à l’étranger, dès lors qu’il propose un service de cette nature en France.
« III. La taxe est assise sur :
« - Le montant hors taxe sur la valeur ajoutée du prix acquitté par le public au titre des opérations visées ci-dessus ;
« - Le montant des sommes versées par les annonceurs et les parrains pour la diffusion de leurs messages publicitaires sur un service donnant ou permettant l’accès, à titre gratuit, à des enregistrements phonographiques ou vidéomusicaux.
« - La présente taxe s’applique également aux revenus générés par des services proposant des contenus crées par des utilisateurs prouvés à des fins de partage au sein de communautés d’intérêt.
« N’est pas compris dans l’assiette de la taxe, pour les redevables établis en France, le montant acquitté au titre d’une taxe due à raison des opérations visées au présent article dans un autre État membre de l’Union européenne, autre que la taxe sur la valeur ajoutée.
« IV. – Le taux est fixé à 1,5 %.
« V. – La taxe est exigible dans les mêmes conditions que celles applicables en matière de taxe sur la valeur ajoutée.
« Elle est constatée, liquidée, recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties, sûretés et privilèges que la taxe sur la valeur ajoutée. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à cette même taxe.
« VI. – La présente taxe entrera en application à compter du 1er janvier 2023.
« VII. Le produit de la taxe est affecté au Centre national de la musique. »
La création, le 1er janvier 2020, du Centre National de la Musique est venue combler une forte attente des professionnels de la musique : disposer d’un opérateur capable de coordonner et promouvoir la mise en œuvre d’une politique publique ambitieuse et efficace en faveur de la création musicale française.À compter du 1er janvier 2023, ses ressources deviendront limitées et incertaines. En effet, le financement pérenne de l’établissement repose actuellement sur trois ressources :
- Une taxe sur la billetterie des spectacles musicaux et de variétés, dont le produit s’est effondré durant la période 2020‑2021, et dont le retour à la normale reste encore incertain compte tenu des difficultés à la fois conjoncturelles (hausse généralisée de nombreux coûts, réticence d’une partie du public à reprendre le chemin des salles), mais aussi plus structurelles (pénurie de main d’œuvre, transition écologique).
- Un financement garanti par l’État à hauteur de 26 M€, qui couvre à la fois les frais de fonctionnement de l’établissement et un certain nombre de missions prévues par la loi (environ 18 M€).
- Une contribution marginale des Organismes de Gestion Collective (SACEM, ADAMI, SPEDIDAM, SCPP, SPPF), initialement évaluée à 7 M€, mais qui du fait à la fois des conséquences de la crise sanitaire et de la jurisprudence européenne du 8 septembre 2020 (arrêt RAAP), a été ramenée à 1,5 M€.
Ainsi, la question de son financement pérenne et la contribution de la totalité du secteur sonore se pose aujourd’hui de manière aigüe. Afin d’éviter que seul le spectacle vivant contribue de manière significative au financement du CNM, il est proposé de compléter ce financement par une taxe, appelée « contribution de l’écosystème de la diffusion numérique au financement de la diversité musicale », assise sur l’ensemble des revenus issus des abonnements payants aux formules de streaming musical et des revenus publicitaires ou de parrainage générés par l’exploitation des contenus musicaux (phonogrammes et vidéomusiques) sur l’ensemble des services en ligne.
Il s’agit donc de permettre au CNM de fonctionner « sur ses deux jambes », en trouvant un équilibre entre financement privé et financement public, mais également entre les deux volets de la filière musicale (spectacle et musique enregistrée).
Le taux de 1,5 % constitue un niveau de prélèvement extrêmement faible, qui devrait néanmoins permettre de générer en année 1 un rendement suffisant, dont le caractère dynamique est assuré par les perspectives de croissance très encourageantes du marché du streaming musical.
Le risque potentiellement inflationniste de cette taxe est peu plausible, car le relèvement du prix des formules d’abonnements en streaming constitue un sujet autonome, les politiques tarifaires étant souvent applicables à un ensemble de territoires, actées à un niveau international (la très grande majorité des plateformes et services de streaming étant contrôlées par des opérateurs étrangers) et dictées essentiellement par des impératifs d’investissement et de rentabilité.
En outre, les contrats liant les plateformes et les producteurs phonographiques contiennent des clauses prévoyant la répercussion d’éventuelles futures taxes sur les redevances versées aux ayants droit, conséquence que ces derniers indiquent accepter au bénéfice de la diversité musicale et du dynamisme de la production locale.
Cette contribution relèvera donc in fine d’une auto-taxation par la filière musicale, sans incidence sur les finances publiques.
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