Publié le 6 octobre 2022 par : Mme Pires Beaune, M. Baptiste, M. Mickaël Bouloux, M. Philippe Brun, M. Aviragnet, Mme Battistel, M. Califer, M. David, M. Delaporte, M. Delautrette, M. Echaniz, M. Olivier Faure, M. Garot, M. Guedj, M. Hajjar, Mme Jourdan, Mme Karamanli, Mme Keloua Hachi, M. Leseul, M. Naillet, M. Bertrand Petit, Mme Pic, M. Potier, Mme Rabault, Mme Rouaux, Mme Santiago, M. Saulignac, Mme Thomin, Mme Untermaier, M. Vallaud, M. Vicot.
Entre les 3° et 4° de l’article L. 6 du code de la commande publique, est inséré l’alinéa suivant : « Lorsque l’autorité contractante, dans l’exercice de ses prérogatives extérieures au contrat, prend une mesure imprévisible qui bouleverse substantiellement l’équilibre économique du contrat, le cocontractant a droit à une compensation, sous réserve des stipulations du contrat. La compensation ne peut intervenir que si la mesure porte atteinte à l’objet du contrat ou à l’un de ses éléments essentiels ».
Le présent amendement du groupe Socialistes et Apparentés vise à encadrer les clauses de compensation des charges fiscales dans les contrats administratifs de la commande publique.
Par application de la théorie jurisprudentielle du fait du prince, de telles clauses permettent aux cocontractants de prévoir une compensation, par le biais notamment d’une indemnisation ou d’une augmentation des tarifs, lorsqu’un accroissement de taxes ou de charges fiscales spécifiques, imprévisible au moment de la signature du contrat, affecte substantiellement l’équilibre économique du contrat.
En 2015, le protocole d’accord entre l’Etat et les sociétés concessionnaires autoroutières (SCA) historiques a abaissé le seuil de recours au mécanisme de compensation prévue à l’article 32 des différentes conventions à une simple atteinte à l’équilibre du contrat et non plus à une atteinte grave.
Ainsi que le remarque la commission d’enquête du Sénat dans son rapport du 16 septembre 2020 sur les concessions autoroutières, il en résulte une stabilité totale des prélèvements obligatoires spécifiques auxquels sont soumis les SCA historiques, alors même qu’une augmentation
raisonnable de la charge fiscale n’a rien d’imprévisible et que la jurisprudence subordonne la compensation à l’atteinte à un élément essentiel du contrat ou à son objet même (CAA Paris, 25 mai 1993, Société RENOVECO, n° 91PA00863, mentionné aux tables).
Sollicitée par l’Etat, l’ARAFER a eu l’occasion de prendre position en faveur d’une interprétation restrictive de la théorie du fait du prince à propos d’une clause visant à compenser l’augmentation de la redevance domaniale due par une société concessionnaire d’autoroute (Avis n° 2018-054 du 9 juillet 2018 relatif au projet de septième avenant entre l’Etat et l’ATMB).
Ainsi, au regard du contournement de l’impôt et de la charge fiscale résultant de ces clauses, une codification de la théorie du fait du prince dans les principes généraux du code de la commande publique permettrait d’encadrer son aménagement dans les contrats de la commande publique en limitant le droit à compensation aux seules atteintes substantielles à l’équilibre économique du contrat.
Par ailleurs, au regard de l’exigence de sécurité juridique et de l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi, il serait intéressant d’éclairer sur les raisons qui ont conduit le législateur à ne pas consacrer cette théorie jurisprudentielle dans le code au moment de l’opération de codification et de refonte du droit de la commande publique.
Pour l’ensemble de ces raisons, cet amendement propose de consacrer la théorie du fait du prince à l’article L. 6 du code de la commande publique.
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