Discussion d'une proposition de loi — Texte n° 2634

Amendement N° 2087 (Tombe)

Publié le 23 mai 2024 par : M. Guedj, Mme Battistel, M. Delautrette, Mme Pires Beaune, M. Mickaël Bouloux, M. Aviragnet, M. Baptiste, M. Philippe Brun, M. Califer, M. David, M. Delaporte, M. Echaniz, M. Olivier Faure, M. Garot, M. Hajjar, Mme Jourdan, Mme Karamanli, Mme Keloua Hachi, M. Leseul, M. Naillet, M. Bertrand Petit, Mme Pic, Mme Rabault, Mme Rouaux, Mme Santiago, M. Saulignac, Mme Thomin, Mme Untermaier, M. Vallaud, M. Vicot.

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Texte de loi N° 2634

Article 1er bis (consulter les débats)

I. – À la première phrase de l’alinéa 4, après les deux occurrences du mot :

« soins »

insérer les mots :

« palliatifs et ».

II. – En conséquence, à la seconde phrase du même alinéa, procéder à la même insertion.

Exposé sommaire :

Cet amendement des députés socialistes et apparentés vise à prévoir que la stratégie nationale porte sur les "soins palliatifs et d'accompagnement" et non seulement sur les "soins d'accompagnement".

Les députés socialistes et apparentés s'opposent depuis le début de l'examen du projet de loi à la terminologie proposée par le Gouvernement renommant les "soins palliatifs" en "soins d'accompagnement".

L’article 1er du projet de loi transforme ainsi les soins palliatifs en soins d’accompagnement, tout comme cet article 1er bis propose une stratégie décennale des soins d'accompagnement.

Le Gouvernement motive ce changement - loin d’être uniquement rédactionnel - en définissant les soins d’accompagnement comme « des soins qui visent à anticiper, prévenir et soulager les souffrances dès l’annonce du diagnostic et aux différents stades de la maladie afin d’améliorer la qualité de vie des personnes malades et de leur entourage, et de préserver leur dignité et leur bien-être »*.

Les soins d’accompagnement couvriraient ainsi « d’autres soins que les soins palliatifs, tels que les soins de support (prise en charge nutritionnelle, accompagnement psychologique, aide à la pratique d’une activité physique adaptée etc.) ou encore les soins de confort (musicothérapie, massage, soins socio-esthétiques etc.), et plus largement toutes les mesures et soutiens mis en œuvre pour répondre aux besoins de la personne malade, médicaux ou non médicaux, de nature physique, psychique ou sociale, et à ceux de ses proches aidants ».

Le Gouvernement reprend ici la proposition du Professeur Chauvin dans sa stratégie décennale pour les soins palliatifs remise en décembre 2023.

Si l’intention du Gouvernement de donner plus de contenu aux soins palliatifs peut sembler louable, elle se heurte en réalité à plusieurs obstacles.

Tout d’abord, les soins d’accompagnement ne renvoient à aucune définition scientifique, ni référentiel de méthodes ; à l’inverse des soins palliatifs.

Ainsi, « l’accompagnement » n’est pas une compétence mais dénote d’une présence auprès de l’autre, d’une attention à la personne, d’une écoute sans jugement, sans intention spécifique.

Les bénévoles sont ainsi dans une posture d’accompagnement.

A l’inverse, les soins palliatifs ne sont pas qu’une présence ou une attention.

Ils sont une pratique clinique nécessitant des connaissances et des compétences techniques, thérapeutiques, relationnelles et éthiques spécifiques visant à une prise en charge globale de la personne et de ses proches.

Ces compétences s’acquièrent grâce à des formations universitaires diplômantes bien identifiées, dans le respect des critères de qualité et des référentiels issus de la recherche clinique nationale et internationale.

C’est grâce à l’identification d’une médecine palliative clairement nommée en ces termes, en cohérence avec les standards internationaux, que la filière universitaire a progressé ces dernières années au bénéfice des patients et qu’une intégration des équipes françaises dans des travaux de recherches internationaux est rendue possible.

Pour appuyer ce propos, il convient de relever qu’aucun pays n’a une spécialité de « médecine ou de soins d’accompagnement ».

Ensuite, toutes les justifications de ce changement de nom - l’anticipation de la prise en charge des patients dès le diagnostic de la maladie, leur élargissement à tous les besoins médicaux et non médicaux, ainsi que l’accompagnement de l’entourage - existent déjà mais sous un nom différent : les « soins palliatifs précoces ».

Ces soins font suite à une étude** menée notamment par Temel JS, Greer JA, Muzikansky A, Gallagher ER, Admane S, Jackson VA, Dahlin CM, Blinderman CD, Jacobsen J, Pirl WF, Billings JA, Lynch TJ menée sur deux groupes de patients au diagnostic d’un cancer du poumon que l’on peut soigner (chimiothérapie, radiothérapie) mais pas guérir.

Cette étude montre que le groupe ayant bénéficié des « soins palliatifs précoces » a une meilleure qualité de vie, a moins de dépressions, et subit moins d’obstination déraisonnable.

Elle a inspiré nombre de recommandations scientifiques dans divers pays, et en France par la HAS***.

Elle a également inspiré le Ministère de la Santé puisque l’instruction interministérielle de la direction générale de l’offre de soins (DGOS) publiée en juin 2023 recommande de faire évoluer les soins palliatifs vers les soins palliatifs précoces et de ne pas les réserver à la fin de vie.

Nul besoin donc d’évoluer du concept de soins palliatifs à celui d’accompagnement.

Enfin, cette redéfinition des « soins d’accompagnement » ouvre la porte à de nombreuses dérives.

En effet, sur quelles compétences recruter des professionnels pour exercer dans des structures « d’accompagnement » puisqu’il n’existe aucune définition, aucun référentiel de compétences ?

Le risque est de voir se développer rapidement des structures de « soins d’accompagnement » au rabais, loin des standards de qualité des unités de soins palliatifs et des équipes mobiles de soins palliatifs.

Pire, l’accompagnement est une notion polysémique à la mode, qui dépasse largement le champ de la médecine.

C’est un terme utilisé par différents ministères dans des domaines très variés : la campagne de France travail en cette semaine 22 au 26 Avril 2024 ou le dispositif du « plan personnalisé d’accompagnement » du ministère de l’éducation concernant les élèves en difficulté.

L’utiliser pour définir des soins ouvrirait donc la porte à une prise en charge de moindre qualité.

Pour toutes ces raisons, les députées et députés signataires du présent amendement souhaitent maintenir la terminologie adoptée en Commission spéciale à l'article 1er parlant de « soins palliatifs et d'accompagnement ».

Tel est l’objet du présent amendement.

-

* Source : exposé des motifs du projet de loi.

** Source : Temel JS, Greer JA, Muzikansky A, Gallagher ER, Admane S, Jackson VA, Dahlin CM, Blinderman CD, Jacobsen J, Pirl WF, Billings JA, Lynch TJ. Early palliative care for patients with metastatic non-small-cell lung cancer. N Engl J Med. 2010 Aug 19 ;363(8) :733- 42. doi : 10.1056/NEJMoa1000678. PMID : 20818875.

*** Source : Haute autorité de santé. L’essentiel de la démarche palliative. Décembre 2016

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