Publié le 2 février 2024 par : M. Pradal, M. Lemaire, Mme Moutchou, Mme Poussier-Winsback.
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Après l’article 223‑1-1 du code pénal, il est inséré un article 223‑1-2 ainsi rédigé :
« Art. 223‑1-2. – Est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende la provocation de toute personne atteinte d’une pathologie à abandonner ou à s’abstenir de suivre un traitement thérapeutique ou prophylactique, lorsque cet abandon ou cette abstention est présenté comme bénéfique pour sa santé alors qu’il est, en l’état des connaissances médicales, manifestement susceptible d’entraîner pour elle des conséquences graves pour sa santé physique ou psychique.
« Est punie des mêmes peines la provocation à adopter des pratiques présentées comme ayant une finalité thérapeutique ou prophylactique alors qu’il est manifeste, en l’état des connaissances médicales, que ces pratiques exposent à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente.
« Lorsque la provocation prévue aux deux premiers alinéas a été suivie d’effets, les peines sont portées à trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende.
« Les délits définis au présent article ne sont pas constitués lorsque la provocation s’accompagne d’une information claire et complète permettant de garantir la volonté libre et éclairée de la personne quant aux conséquences pour sa santé, susceptibles de survenir lorsqu’une telle provocation a été suivie d’effet.
« Lorsque ces délits sont commis par la voie de la presse écrite ou audiovisuelle, les dispositions particulières des lois qui régissent ces matières sont applicables en ce qui concerne la détermination des personnes responsables. »
L’article 4, supprimé par le Sénat, vise à répondre à un enjeu de santé publique en créant un nouveau délit réprimant la provocation à l’abandon ou l’abstention de soins ou à l’adoption de pratiques dont il est manifeste qu’elles exposent la personne visée à un risque grave ou immédiat pour sa santé. Le domaine de la santé, du bien-être, des soins et de l’alimentation est un enjeu majeur dans la lutte contre les dérives sectaires. Il est devenu nécessaire d’agir pour protéger la santé de nos concitoyens face aux risques des dérives sectaires et pour sanctionner les pratiques les plus dangereuses pour la santé des personnes.
Le Groupe Horizons & apparentés souhaite que cet article soit réintégré au projet de loi pour plusieurs raisons :
D’abord, les faits que cette nouvelle infraction cherche à incriminer ne sont pas couverts par des délits existants : par exemple, le délit d’exercice illégal de la médecine a été qualifié par la jurisprudence de « délit d’habitude », obligeant donc la réitération des faits pour être caractérisé. Ainsi, les discours tenus dans le cadre d’un collectif ou en ligne sont le plus souvent en dehors du champ de cette incrimination. De plus, certains médecins déviants échappent eux aussi à cette qualification en raison de leur situation régulière d’exercice.
Ensuite, ce nouveau délit porte une atteinte proportionnée à la liberté d’expression. Afin de limiter les risques d’effets de bord, plusieurs critères cumulatifs sont en effet nécessaires pour caractériser la nouvelle infraction : l’abandon ou l’abstention de suivre le traitement ou l’adoption de pratiques soit présenté comme bénéfique pour la santé (permet d’écarter tout risque d’effet de bord sur les convictions religieuses ou philosophiques), que le risque pour la santé soit manifeste au regard des connaissances médicales à la date des faits (n’interdit pas le débat sur des traitements émergents), que la personne visée par la provocation soit atteinte d’une pathologie, et que les conséquences pour la santé soient graves.
Enfin, afin de limiter ce risque d’inconstitutionnalité, la présente rédaction précise cette infraction ne serait pas constituée « lorsque la provocation s’accompagne d’une information claire et complète permettant de garantir la volonté libre et éclairée de la personne quant aux conséquences pour sa santé, susceptibles de survenir lorsqu’une telle provocation a été suivie d’effet ». Autrement dit, si la personne concernée a pu exprimer une volonté libre et éclairée de remplacer un traitement médical par un autre traitement, alors même qu’elle était consciente des risques qui pouvaient survenir du fait de cet abandon, le délit de provocation ne sera pas caractérisé. Ainsi, la liberté de conscience est ici préservée.
Tel est l’objet du présent amendement.
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