Publié le 22 septembre 2023 par : M. Delaporte, M. Aviragnet, M. Califer, M. Guedj, M. David, M. Baptiste, Mme Battistel, M. Mickaël Bouloux, M. Philippe Brun, M. Delautrette, M. Echaniz, M. Olivier Faure, M. Garot, M. Hajjar, Mme Jourdan, Mme Karamanli, Mme Keloua Hachi, M. Leseul, M. Naillet, M. Bertrand Petit, M. Bertrand Petit, Mme Pic, Mme Pires Beaune, M. Potier, Mme Rabault, Mme Rouaux, Mme Santiago, M. Saulignac, Mme Thomin, Mme Untermaier, M. Vallaud, M. Vicot, les membres du groupe Socialistes et apparentés.
I. – Compléter l’alinéa 25 par la phrase suivante :
« Ces indicateurs tiennent comptent notamment du taux de satisfaction des usagers des services rendus par l’opérateur, du nombre de demandeurs d’emploi et de la taille des portefeuilles par conseiller à respecter, des conditions de travail des salariés de l’opérateur, du nombre de salariés de l’opérateur présent dans chaque département, du nombre de dispositifs en cours dans le but de lever les freins à l’emploi, du pourcentage de personnes inscrites au sein de l’opérateur ayant fait l’objet de sanctions, du nombre de sorties en emplois durables, du nombre d’actions réalisées dans le but d’un retour à l’autonomie des personnes inscrites éloignées de l’emploi et du nombre de travailleurs sociaux dédiés à l’accompagnement social des personnes éloignées de l’emploi au sein de chaque département. »
II. – En conséquence, procéder à la même insertion à l’alinéa 46.
Cet amendement des députés socialistes et apparentés vise à intégrer dans les indicateurs un certain nombre d’objectifs détaillés, afin d’améliorer l’accompagnement, la satisfaction des usagers, les conditions de travail des conseillers Pôle emploi et des travailleurs sociaux et la qualité des sorties du dispositif.
Le présent projet de loi prévoit la mise en place d’indicateurs via les instances de gouvernance de France Travail sans en préciser aucun, sans procéder à l’analyse et au bilan de la précédente fusion de l’ANPE et des ASSEDIC tant sur les conditions de travail des conseillers Pôle Emploi que sur la dégradation de l’accompagnement social et à l’emploi pour les usagers et les allocataires du RSA.
La précédente fusion de l’ANPE et des ASSEDIC a accompagné et permis une explosion du portefeuille des conseillers pôle emploi. Selon le CESE, un agent accompagne en moyenne 85,7 demandeurs d’emploi en janvier 2009. Un peu plus d’un an plus tard, le ratio est de près de 100 personnes à suivre par conseiller. Il a aujourd’hui explosé jusqu’à atteindre les 1000 par conseillers.
Lors des auditions menées par le groupe Écologiste, la question de l’adéquation entre les objectifs fixés par le texte et les moyens financiers et humains déférés constitue une inquiétude de la part de l’ensemble des acteurs rencontrés : institutionnels, associations, syndicats. Il n’existe, à ce jour, aucune garantie financière et le projet de loi de finances pour l’État n’est pas encore connu de la représentation nationale.
Le député Stéphane Viry dans une Mission d’Information Flash sur Pôle Emploi en 2019, faisait déjà état de cette hausse qui ne cesse de progresser au fil du temps en parlant de « portefeuille surdimensionnés ».
Ainsi en décembre 2018, un conseiller accompagnait en moyenne : 349 demandeurs d’emploi en modalité « suivi » (+ 9 % par rapport à décembre 2016) ; 216 en modalité « guidé » (+ 14 % en deux ans) ; 100 en accompagnement « renforcé » (+ 23 % en deux ans) ; 49 en accompagnement « global » (+ 9 % en deux ans).
Et S. Viry de préciser : « Les moyennes observées à l’échelon régional sont dans certains cas encore plus élevées : plus de 400 demandeurs d’emploi en moyenne par portefeuille en Nouvelle-Aquitaine pour les conseillers en modalité « suivi », par exemple, ou plus de 300 demandeurs d’emploi par conseiller en modalité « guidé » dans les outre-mer (en Guadeloupe ou à Mayotte). ».
La situation est si délétère que, selon S. Viry, « les agents ont appris à « vivre avec » la pénurie d’effectifs. ».
Sans l’inclusion d’indicateurs pour suivre et protéger les conditions de travail des conseillers et maintenir un niveau de portefeuille raisonnable, il sera impossible à l’opérateur France Travail d’accompagner efficacement les demandeurs d’emploi et de pas subir une dégradation supplémentaire des conditions de travail avec la prise en charge des centaines d’allocataires du RSA non-inscrits comme demandeurs d’emploi à ce jour et qui vont être inscrits suite à la loi.
Il est impératif dans ces conditions que les indicateurs prévus puissent prendre en compte un objectif de réduction des portefeuilles via notamment une augmentation des effectifs. En comparaison, l’Allemagne, dont le SPE est proche du projet France Travail, compte 101 000 conseillers dans l’équivalent Pôle Emploi quand la France compte 54 000 conseillers.
De même, les travailleurs sociaux en charge de l’accompagnement des personnes éloignées de l’emploi ou des allocataires du RSA sont en sous-effectifs patents. La Cour des Comptes, comptabilise 120 personnes par travailleur social au service social du département et 144 personnes par travailleur en accompagnement socio-professionnel. De plus, la Cour souligne que selon les choix des départements, les travailleurs sociaux peuvent être spécialisés ou au contraire exercer des missions polyvalentes, auquel cas ils ne sont pas uniquement chargés de l’accompagnement des bénéficiaires du RSA. Ils peuvent notamment assurer des permanences d’accueil social et être mobilisés pour la protection de l’enfance. Le défaut d’accompagnement des allocataires du RSA dont le Gouvernement fait grand cas vient de là, du manque de moyens humains à Pôle Emploi et du manque de moyens humains dans l’accompagnement social au sein des départements.
Par ailleurs, la Cour souligne que la présence de conseillers de Pôle Emploi ne dépend pas du taux de pauvreté des territoires, de sorte que le ratio entre personnes à accompagner et conseillers est largement déficitaire sur certains et que des territoires sont ainsi plus débordés que d’autres. Là encore, les indicateurs doivent tenir compte du nombre de conseillers présents dans chaque territoire pour en augmenter le nombre et le répartir équitablement.
Enfin les indicateurs ne peuvent uniquement se focaliser sur le nombre de sorties à l’emploi car les raisons de sorties d’un dispositif peuvent être variées : abandons, sanctions, radiations, retour à emploi non durable… Et, étant donné le public visé par France Travail, doivent mieux mesurer l’accompagnement social, la levée des freins à l’emploi, l’accompagnement à l’autonomie et le retour à un emploi durable.
Cet amendement est une reprise de l'excellent amendement de nos collègues Ecologistes-NUPES déposé en Commission des affaires sociales.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cet amendement.