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...u'ils le demandent ou que l'équipe médicale en a pris collégialement la décision. Vous ne voyez rien d'hypocrite, chers collègues, à employer ces termes de sédation profonde et continue jusqu'à la mort. Mais lorsqu'il s'agit de la décision libre et éclairée de le faire soi-même, en pleine conscience, pour partir de manière apaisée, vous revendiquez d'y accoler les termes d'« euthanasie » et de « suicide assisté ». Pourtant la notion d'« aide à mourir » couvre ces trois types de mort, de la même manière que les soins d'accompagnement englobent les soins palliatifs. Nous avons passé beaucoup de temps à essayer de vous en convaincre, sans succès.
Il y avait pour moi un euphémisme dans l'expression « aide active à mourir ». Le mot « active » a été retiré, en ajoutant encore à mon sens dans l'euphémisme. Nous devons nommer les choses. Dans mon esprit, il n'y a rien d'infâmant. La société a cessé de déshonorer la personne qui se suicide. Il vaut mieux dire les choses telles qu'elles sont pour qu'elles puissent être appliquées correctement. Il est indispensable de faire un effort d'intelligibilité et de lever les malentendus – et ils sont nombreux dans ce débat. Certes, le Président de la République a dit qu'il n'aimait pas le mot « euthanasie », mais il me souvient qu'il a aussi dit ne pas aimer le mot « pénibilité »... Ce qu'a...
...ants d'ailleurs. Ce que propose ce projet de loi, c'est bien autre chose que l'aide à mourir, et il faut définir ce quelque chose. J'appelle votre attention sur l'obligation constitutionnelle d'intelligibilité de la loi. M. Pont l'a dit, nous avons sémantiquement raison de souligner que l'expression « aide à mourir » ne décrit pas la réalité. L'étude d'impact emploie les mots « euthanasie » et « suicide assisté », la loi ne le fait pas. En refusant de dire les choses, cette dernière présente une faille constitutionnelle.
Vous nous dites que l'avis du Conseil d'État ne pousse pas à faire référence à l'assistance au suicide ni à l'euthanasie. Je me permets de vous en lire un extrait : « Le projet de loi porte sur la fin de vie [...] . Il a pour objet principal de créer une “aide à mourir” entendue comme la légalisation [...] de l'assistance au suicide et, dans l'hypothèse où la personne n'est pas en mesure physiquement de s'administrer elle-même la substance létale, de l'euthanasie à la demande de c...
L'article 5 me laisse dubitatif. Ne risque-t-il pas de contrarier la réalisation de l'objectif du titre Ier de renforcer les soins d'accompagnement ? Une analyse empirique publiée en 2020 montre en effet que les soins palliatifs ont stagné, voire régressé dans les pays où le suicide assisté ou l'euthanasie ont été autorisés. Lors de son audition par la mission d'évaluation de la loi Claeys-Leonetti, Annabel Desgrées du Loû disait ceci : « Faire avancer vraiment l'accompagnement de la fin de vie pour tout le monde, et donc faire avancer de manière majeure nos soins palliatifs, va prendre énormément de temps, d'argent, de volonté. [...] Si on fait ça en parallèle, i...
Outre la manipulation des mots que nous ne cessons de condamner, nous considérons qu'autoriser l'euthanasie et le suicide assisté ouvrirait la voie à des abus et à des dérives. Cette crainte est légitime et les soignants la partagent. Chez nos voisins, la légalisation de l'euthanasie s'est malheureusement toujours accompagnée d'une extension de son champ d'application. Les garde-fous sautent peu à peu : en Belgique, elle est ouverte aux mineurs ; au Canada, aux personnes atteintes de maladies mentales ; aux Pays-Bas...
L'article 5 est le cœur du projet de loi. Il est normal que nous y passions du temps, car c'est là que se concentre la réalité du texte. Pour ma part, je demande sa suppression car je suis fondamentalement hostile à l'euthanasie et au suicide assisté. Tous les arguments invoqués en leur faveur appellent des contre-arguments. La loi serait la conquête d'un droit nouveau, et même un acte de fraternité ? Mais il y a un fait troublant, c'est qu'une personne renonce à mourir quand on répond à ses problèmes de douleur et d'isolement. N'est-ce pas là que devrait se concentrer le soin ? Le texte couvrirait des cas qui échappent à la loi Cla...
L'article 5 définit l'aide à mourir, un euphémisme qui ne masque pas le contenu réel du texte : le suicide assisté et l'euthanasie. Bien nommer les choses est essentiel à la bonne compréhension de la loi, et il ne faut pas atténuer la réalité des actes qui seront pratiqués. Rappelons que les lois belge, espagnole, hollandaise et luxembourgeoise emploient les mots d'euthanasie et de suicide assisté. Autoriser l'euthanasie, c'est rompre le lien de confiance entre le patient et les soignants et transgre...
...et, d'autre part, en autorisant, pour la première fois, un acte ayant pour intention de donner la mort ». Tout cela va perturber l'éthique du soin et de la médecine et, potentiellement, la relation de confiance entre les soignants et les patients. Deux logiques incompatibles s'affrontent. L'étude Jones-Paton de 2015 montre que la légalisation de la mort provoquée n'a pas diminué le nombre de suicides non assistés, plutôt le contraire. Ce texte de loi est un problème au moment où les soins palliatifs sont en situation d'insuffisance criante, où l'hôpital connaît une crise profonde et durable, où le droit à la retraite a été abîmé, où les pénuries de médicaments, y compris pour soulager la douleur, perdurent. Alors que le traumatisme de la pandémie a laissé pour trace une crise sociale profond...
L'ancien ministre Jean Leonetti a eu une phrase très belle : « La main qui soigne ne peut pas être celle qui donne la mort. » Le projet de loi change clairement de paradigme. Au lieu de prendre le problème des soins palliatifs à bras-le-corps pour permettre à chacun de mourir dignement et sans souffrance, on veut légaliser le suicide assisté et l'euthanasie dans un texte qui, en associant cyniquement les trois sujets, prend en otage ces soins palliatifs. Je considère qu'une société qui fait cohabiter les soins palliatifs avec le suicide assisté et l'euthanasie est une société malade. Il y a un réel antagonisme entre une société qui cherche à supprimer la souffrance et une société qui cherche à supprimer la personne qui souffr...
...rviennent les dérives, lorsque les pratiques sont clandestines et hors de contrôle. Il ne s'agit pas de tuer, mais de permettre à des personnes en fin de vie, condamnées par la médecine, d'entrer dignement dans la mort selon leur volonté et en fonction de leur capacité à supporter la souffrance, en choisissant à quel moment elle aura lieu et auprès de qui. La loi n'abandonne pas la prévention du suicide et elle n'ouvre pas l'aide à mourir aux personnes dont l'envie de suicide est la manifestation d'un syndrome anxiodépressif. Elle accepte la possibilité de souffrances psychologiques insupportables, à condition qu'elles soient provoquées par une pathologie qui engage le pronostic vital. L'aide à mourir n'est pas contradictoire avec le respect de la vie. La France insoumise continue de batailler ...
... d'un acte médical. Il s'agit de donner intentionnellement la mort à une personne qui la demande ; cela requiert une intervention humaine, en rupture avec le développement naturel d'une maladie qui pourrait conduire à la mort. Et, pour compléter ma citation de tout à l'heure, Didier Sicard, l'ancien président du CCNE, disait de ce projet de loi : « Ne pas parler expressément d'euthanasie ou de suicide assisté pour éviter des mots lourdement chargés ne peut être que la source de conflits incessants. »
Je propose une rédaction inspirée de la définition du suicide assisté de l'Académie suisse des sciences médicales, laquelle a été consultée en amont de la rédaction de la loi suisse : « L'assistance au suicide est l'acte accompli dans l'intention de permettre à une personne capable de discernement de mettre fin à ses jours, après la prescription de médicaments par un médecin à des fins de suicide. » Puisque nous évoquions des exemples étrangers, je signale...
...ises l'attention de la commission sur le risque d'inconstitutionnalité de ce texte qui n'utilise pas les bons mots. Vous ne pouvez pas vous référer à l'arrêt Mortier, qui utilise le mot « euthanasie » 345 fois dans son attendu, pour un texte qui ne le dit pas une seule fois ! De même, la Convention citoyenne, à laquelle vous vous référez souvent, a conclu à la nécessité d'instituer « le suicide assisté et l'euthanasie ». Nous répétons que l'absence de ces termes pose un problème constitutionnel.
Certains amendements emploient l'expression « suicide assisté » : il faut la bannir du texte. Ne laissons pas croire que l'aide à mourir pourra être utilisée par tous ceux qui souhaiteraient mettre fin à leurs jours. Elle devra répondre à des conditions médicales bien précises.
Voyons ce qu'il en est dans les pays qui ont instauré un tel dispositif. En Belgique, le Centre de prévention du suicide n'a pas constaté d'évolution du taux de suicides depuis qu'existe l'aide à mourir. Les deux phénomènes ne concernent donc pas les mêmes personnes. Selon une étude canadienne de 2020 couvrant la période 2016-2018, les personnes qui recourent à l'aide à mourir sont plus fortunées que la moyenne, plus souvent mariées, et essentiellement atteintes d'un cancer. Cela ne correspond pas au profil des per...
Soupesons les bénéfices et les risques. L'étude d'impact évoque une centaine de patients potentiellement concernés chaque année. Certes, il est difficile de prévoir les dernières volontés des malades ; mais sachant que les suicides assistés représentent 3,8 % à 4 % des décès en Belgique et aux Pays-Bas, on peut estimer qu'à terme, ils concerneront 25 000 personnes par an en France, sur 660 000 décès annuels. Dans cette fourchette, où vous situez-vous ?
Nous soutenons ces amendements. Lorsqu'un patient souffre trop, c'est la douleur qui doit s'arrêter, pas la vie. La réponse réside dans les soins palliatifs, certainement pas dans le suicide assisté et l'euthanasie. Les légaliser serait un renoncement. Ce serait aussi le reflet de votre échec à développer les soins palliatifs.
...ns d'abréger les souffrances qu'elles subissent du fait d'une maladie grave et incurable ». Pourquoi nécessairement indiquer un terme ? Et quel sens lui donner ? Ma seconde question porte sur l'article 5 du projet de loi, qui évoque la situation dans laquelle le patient n'est pas en capacité physique de s'administrer lui-même la substance létale. Il rejoint la distinction entre euthanasie et suicide assisté. Quelles pourraient être les modalités d'une délégation de l'administration de la substance létale ?
Professeur Bringer, vous avez insisté sur la nécessité d'établir des critères stricts d'accessibilité à l'aide à mourir. Pourriez-vous apporter des précisions ? Par ailleurs, j'aimerais interroger l'Académie comme le Conseil sur la notion de collégialité dans la prise de décision. Madame Bergoignan-Esper, vous avez distingué le suicide assisté de l'euthanasie. Comment faire la part entre la dose qui soulage et la dose qui tue, quand l'index thérapeutique est très proche ? Par ailleurs, j'aimerais que vous développiez votre référence au serment d'Hippocrate, et que vous la rapportiez au code de déontologie.