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Intervention de Marietta Karamanli

Séance en hémicycle du lundi 13 mai 2024 à 16h00
Saisie et confiscation des avoirs criminels — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarietta Karamanli :

Je vous prie de bien vouloir excuser ma collègue Cécile Untermaier, qui a participé aux travaux en amont, mais ne peut être présente aujourd'hui. De mon côté, je connais bien le sujet, ayant pris part aux premiers débats.

En 2023, dans le cadre d'enquêtes pénales, la justice française a saisi 1,45 milliard d'euros à des criminels et à des délinquants. L'Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués, créée en 2011, a joué un rôle central dans la gestion de cette réponse pénale. Selon les données d'Europol, les recettes accumulées par les organisations criminelles sont estimées, au niveau de l'Union européenne, à 140 milliards d'euros par an. D'après nos informations, il s'agit d'une estimation basse. Dans ces conditions, il est essentiel de priver les criminels et leurs réseaux de profits illicites, afin de désorganiser leurs activités et, ainsi, de prévenir leur infiltration dans l'économie légale.

Avec deux collègues de l'Assemblée et du Sénat, j'ai eu l'honneur de participer, en janvier dernier, à la réunion de contrôle parlementaire d'Europol, à Gand. Il ressort des échanges avec les parlementaires nationaux que le dépistage et la confiscation d'avoirs illicites doivent devenir une priorité.

En 2020, le Conseil européen a invité la Commission européenne à renforcer le cadre juridique. Le Parlement européen, de son côté, a appelé de ses vœux des règles plus strictes en matière de recouvrement des avoirs. Un projet de législation a été proposé en mai 2022.

La proposition de loi dont nous discutons est un texte a priori technique, voire ardu, si l'on s'en tient à la seule rédaction des dispositions adoptées. Elle fait suite au rapport que Jean-Luc Warsmann et Laurent Saint-Martin ont remis en 2019 aux ministres de la justice et de l'intérieur.

Les dix-huit dispositions en discussion ont fait l'objet d'un accord en commission mixte paritaire. Le texte complète le dispositif de saisie des avoirs et des biens issus d'activités criminelles et facilite la confiscation de ceux-ci.

Son premier apport est de faire de la saisie des biens une peine complémentaire obligatoire, lorsque ceux-ci ont servi à commettre l'infraction, lorsqu'ils étaient destinés à la commettre ou lorsqu'ils sont l'objet, ou le produit direct ou indirect, de l'infraction. La confiscation obligatoire des avoirs criminels en cas de condamnation pénale est une sanction facile à comprendre ; elle est aussi efficace car elle prive les auteurs d'infraction des moyens de poursuivre leurs activités et d'acquérir une façade légale. Dans un grand nombre de cas, elle résout aussi le problème de la conversion des saisies en confiscations.

Son second apport est d'instituer une procédure qui permettra de mieux identifier les magistrats chargés d'exercer la gestion des biens saisis, entre la clôture de l'enquête ou de l'instruction et la tenue de l'audience de jugement. Cette évolution prend également en compte les actions de formation prévues à l'article 1er bis – nous y sommes attachés.

En parallèle, des dispositions plus techniques, mais qui rendent le dispositif plus efficace, ont pour objet de mieux cerner les biens concernés, de supprimer l'obligation de motivation dans le cadre de la nouvelle infraction, et, dans certaines situations, de donner plus de pouvoirs à l'Agrasc.

Nous avions demandé qu'il soit tenu compte de la situation des locataires de bonne foi des biens immobiliers confisqués ; nous avons été entendus. Les travaux en CMP ont permis de préciser cette notion et de garantir la protection de leurs droits, sans affecter de manière excessive l'efficacité du dispositif pour ces biens.

L'objectif était de rendre plus efficace le régime de confiscation, de mieux cerner les responsabilités et de limiter certains écueils de la gestion des avoirs saisis. Le texte a été enrichi dans un esprit de consensus et de recherche de l'efficacité – nous nous en félicitons.

Le groupe Socialistes et apparentés soutient ce texte de lutte contre la criminalité organisée. Il note plusieurs enjeux : la visibilité de la lutte contre le crime, l'amélioration de la police judiciaire et l'importance donnée aussi bien aux missions d'investigation longues qu'aux interventions de la police du quotidien. En parallèle, la police doit disposer d'effectifs suffisants, de temps et de moyens techniques et technologiques adaptés à ses missions. Lors du prochain projet de loi de finances (PLF), l'examen des moyens dédiés à cette priorité devra faire l'objet d'un dialogue entre l'exécutif et l'Assemblée nationale, afin de corréler au mieux les moyens humains et techniques et les outils juridiques.

Nous voterons ce texte et souhaitons le voir appliqué dans le cadre d'une politique publique d'ampleur.

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