À peu près 200 000 personnes en activité, un chiffre d'affaires de 3,5 milliards d'euros, 92 tonnes de marchandises saisies en 2023. Nous ne parlons pas d'une entreprise comme une autre, mais de celle, funeste, du narcotrafic. Les chiffres communiqués par le ministère de l'économie en mars dernier montrent l'ampleur du problème. Le narcotrafic est un drame dont on ne compte plus les victimes, qui, chaque jour, sont évoquées dans les actualités et glacent le sang de nos honnêtes compatriotes. Sans prendre la posture d'un simple commentateur, ce qui serait inutile, je tiens à rappeler l'urgence d'agir face au narcotrafic et, plus largement, à la criminalité organisée, qui menace gravement la sécurité nationale et l'avenir de nos enfants. Monsieur le garde des sceaux, je vous sais pleinement engagé dans cette lutte, comme en témoignent jour après jour vos déplacements et vos prises de position, de concert avec le ministre de l'intérieur et l'ensemble du Gouvernement. Je tiens à saluer une nouvelle fois ici votre volontarisme.
La proposition de loi qui nous réunit constitue un levier incontestable de l'arsenal de répression. Monsieur le rapporteur, en consacrant la politique conduite depuis une dizaine d'années et en y apportant des améliorations indispensables, votre proposition de loi améliorera considérablement la politique de saisie et de confiscation des avoirs criminels. Elle améliorera la fluidité de la chaîne qui va de la saisie à la confiscation et, surtout, elle renverse le droit : désormais, le principe consiste à confisquer le moyen et le produit de l'infraction ; cela constitue une réelle avancée.
La proposition de loi démontre l'efficacité de notre processus législatif – dont certains aiment à douter : un rapport conduit brillamment par Jean-Luc Warsmann avec l'ancien député Laurent Saint-Martin, suite à une impulsion du Premier ministre Édouard Philippe, une consultation des acteurs concernés, le temps de réflexion nécessaire à la préparation d'un nouveau texte, en concertation avec l'ensemble des formations politiques qui composent notre assemblée. Qu'on vienne nous dire que nous n'arrivons pas à travailler !
Les orateurs qui m'ont précédé l'ont relevé : l'adoption de ce texte permettra de franchir un nouveau palier dans la lutte contre la criminalité organisée. Grâce à des adaptations techniques et d'apparence très procédurale, la culture de la confiscation, si répandue chez nos voisins italiens, infuse progressivement dans notre pays.
Je formule donc le vœu que cette proposition de loi incite tous les acteurs de la justice à intégrer la peine de confiscation comme un instrument de la réponse pénale. Cet outil ne doit plus être vu comme chronophage et coûteux, mais bien comme un moyen redoutable et redouté de la politique pénale.
Nous devons garantir l'absence, dans notre pays, d'infractions lucratives. Force est de constater qu'en 2024, la seule perspective du risque d'emprisonnement ne dissuade pas suffisamment les délinquants. Malheureusement, certaines personnes érigent même en modèle la délinquance et l'enrichissement illicite. C'est à nous, par le biais de cette proposition de loi et en poursuivant nos efforts, de remettre en cause plus frontalement cet enrichissement.
Je voudrais insister sur un point particulièrement cher au groupe que je préside : grâce à un amendement défendu par Naïma Moutchou, ces saisies et confiscations auront une vocation sociale. Depuis novembre 2021, l'Agrasc a la possibilité de mettre les biens immobiliers saisis à disposition d'associations ou de fondations reconnues d'utilité publique. Grâce à notre contribution, il sera désormais possible d'attribuer à ces associations et fondations des biens meubles d'origine criminelle et de les mettre ainsi au service de l'intérêt général. Il faut le faire entendre partout : le bien commun prendra toujours le pas sur les systèmes mafieux et leurs tentatives de déstabilisation de l'ordre social.
Je conclurai en faisant écho à la volonté gouvernementale que vous avez exprimée, monsieur le garde des sceaux, de lier la confiscation des avoirs criminels à des dispositions prévues dans des textes à venir. Je ne parlerai que de celui qui m'a le plus intéressé, qui prévoit un statut pour les repentis, à savoir les personnes impliquées dans des délits et crimes dont la collaboration avec la justice a été déterminante pour démanteler les réseaux criminels. Je serai à vos côtés pour affronter le débat sur les collaborateurs de justice, débat dont l'importance est nationale. Vous connaissez notre détermination sans faille pour que ce dispositif soit enfin reconnu à sa juste valeur. Nous réussirons.